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AU TEMPS DE L’ÉPIDÉMIE

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ANNEXE

ANNEXE

3. LES ATTRIBUTS TERRITORIAUX ET LA POLLUTION DE L’AIR AU TEMPS DE L’ÉPIDÉMIE

Hypothèse : existence d’un lien de corrélation fort entre la pollution et le taux d’incidence et de mortalité liés au covid 19

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La succession des épidémies à travers le temps a soulevé plusieurs questions, notamment celle des inégalités de propagation des virus entre les différents territoires ainsi que le taux de mortalité et d’incidence. Dans le cas de la pandémie de COVID-19, le premier constat de la répartition des foyers épidémiques correspondait à des territoires où le taux de pollution est très élevé. Parmi les hypothèses avancées par les scientifiques, l’existence d’un lien de corrélation fort entre la pollution et le taux d’incidence et de mortalité liés au covid 19 notamment en France. Les particules atmosphériques fines et ultrafines PM 10 et PM 2,5 ont été tout particulièrement suspectées de servir à la fois de support à la propagation du virus et de facteur d’aggravation de la maladie.

Plusieurs articles scientifiques à travers le monde, rédigés pendant la crise sanitaire, traitent le sujet de la pollution atmosphérique en lien avec la propagation du virus du covid-19. La première étude de Ricardi Pansini et David Fornacca « Early Spread of covid-19 in the Air-Polluted Regions « concerne 8 pays différents à un moment qui correspondait à la fin de la première vague d'infection en Chine, juin 2020. Elle permet d’étudier le caractère géographique de la propagation du virus en corrélation avec plusieurs indices satellitaires et terrestres annuels de la qualité de l'air en Chine, aux États-Unis, en Italie, en Iran, en France, en Espagne, en Allemagne et au Royaume-Uni. (Figure 3) Les premiers résultats de cette étude montrent qu’il y a plus d'infections virales dans les zones touchées par des valeurs élevées de PM 2,5 et de dioxyde d'azote. Une mortalité plus élevée était également corrélée à une qualité de l'air relativement médiocre. En Italie, notamment dans sa région nord très industrialisée, la correspondance entre la pollution de l’air et les infections par le SRAS-CoV-2 et la mortalité induite a été plus frappante qu’en Espagne ou en Allemagne où le taux de pollution est moins important.

La deuxième étude observationnelle sur le rôle potentiel des particules dans la propagation du COVID-19 dans le nord de l'Italie est réalisée par plusieurs scientifiques sous la direction de Leonardo Setti. Ils se sont basés sur l’analyse des données quotidiennes relatives aux niveaux ambiants de PM 10, aux conditions urbaines et à l'incidence du COVID-19 de toutes les provinces italiennes, afin d’évaluer l'association potentielle entre les dépassements de particules (PM) et la propagation du COVID-19 en Italie. Le résultat de cette étude est une association significative entre la répartition géographique des dépassements quotidiens de PM 10 et la propagation initiale du COVID-19 dans les 110 provinces italiennes. Les provinces les moins polluées avaient une médiane de 0,03 infection sur 1000 habitants, tandis que les provinces les plus polluées affichaient une médiane de 0,26 cas.

Covid-19 élevé / PM 2,5 élevée Covid-19 faible / PM 2,5 faible Covid-19 élevé / PM 2,5 faible Covid-19 faible / PM 2,5 élevé

Figure 8 : Cartes des 4 types de relations spatiales significatives entre Covid-19 et PM 2,5 dans 8 pays : Source : Article de Ricardi PANSINI et David FORNACCA - Early Spread of COVID-19 in the Air-Polluted Regions of Eight Severely Affected Countries

Dans un autre contexte, aux États-Unis et à une échelle plus restreinte du quartier Queens à New York, l’article de Atin Adhikari et Yin Jingjing s’intéresse aux effets à court terme de l'ozone ambiant, des PM 2,5 et des facteurs météorologiques sur les cas confirmés de COVID-19 et les décès. Les résultats de cette étude concluent que les expositions à court terme à l'ozone et à d'autres facteurs météorologiques dans le périmètre de Queens pourraient être associées à la transmission du COVID19 et à l'initiation de la maladie pendant la période d'observation jusqu'au 20 avril 2020, mais l'aggravation de la maladie et la mortalité dépendent d'autres facteurs.

Une autre étude intitulée « Air pollution and COVID-19 : Is the connect worth its weight? » de Arun kumar Sharma et Palak Balyan permet d’examiner les preuves existantes sur le rôle des particules polluantes dans la transmission du SRAS-CoV2 et vérifie si les PM 2,5 et d'autres petites particules transportent des particules virales viables dans l'air et si ils sont incriminés dans la propagation de la rougeole et du coronavirus du SRAS.

L’étude de Antonio Frontera, Lorenzo Cianfanelli, Konstantinos Viachos, Giobanni Landoni et George Cremona « Severe air pollution links to higher mortality in COVID-19 patients : The "double-hit" hypothesis » avance une hypothèse du double impact : l'exposition chronique aux PM 2,5 provoque une surexpression du récepteur alvéolaire ACE-2 qui peut augmenter la charge virale chez les patients exposés à des polluants, épuise les récepteurs ACE-2 et altère les défenses du corps. Un NO2 atmosphérique élevé peut fournir un deuxième coup provoquant une forme grave de SRAS-CoV-2 dans les poumons appauvris en ACE-2, entraînant un résultat pire.

Le tableau ci-dessous montre la multitude des articles scientifiques publiés pendant la période de la pandémie et qui concerne différents pays et régions à travers le monde

Tableau : Les articles scientifiques liés à la pollution de l’air et à la covid 19

En partant du constat des différences remarquables en termes de taux de propagation du COVID-19 dans le monde, une étude de la relation entre la pollution de l'air et les décès liés au COVID-19 sous la direction de Cosimo Magazzino, permet d’évaluer l'influence potentielle de la pollution atmosphérique comme facteur contribuant à la mortalité par COVID-19 sur la période du 18 mars au 27 avril 2020 soit 41 jours consécutifs d’observation pour trois grandes villes françaises : Paris, Lyon et Marseille L’interprétation des résultats de cette étude confirme l'hypothèse selon laquelle la matière particulaire agit comme un "porteur" en transportant le virus qui coagule à la surface des particules sur une plus longue distance puisque les particules ont au moins une douzaine de fois plus de diamètres que le virus.

Les cartes ci-dessous, basées principalement sur des statistiques INSEE et des données de santé publique en France qui datent de février 2021 montre la relation entre la densité, le taux de pollution et le taux d’incidence et de mortalité et surtout la superposition frappante entre le taux d’incidence et le taux de pollution en France notamment en Île-de-France, Hauts-de France et au sud-est.

Figure 9 : Source : Taux d’incidence et de mortalité : Santé publique France – février 2021 Source : Densité de population : INSEE 2017 Source : Taux de pollution PM 2,5 Atmos France 2019

Cette première partie est une manière d’éclairer notre présent à la lumière du passé. Le retour effectué sur les éventements sanitaires marquants l’histoire de la ville de Paris ainsi que sur les effets des pandémies sur l’espace urbain depuis le premier récit de la « peste d’Athènes » dans la Grèce antique jusqu’à l’émergence de la pandémie de la Covid-19 en passant par les grandes épidémies du Moyen-Âge en Europe nous permet de mettre la crise actuelle dans son contexte théorique.

La deuxième partie de ce mémoire est une étude de la crise sanitaire actuelle, la façon avec laquelle elle a influencé les doctrines et les techniques de l’urbanisme, surtout en termes d’interventions dans le domaine public pendant et après la pandémie. L’étude de plusieurs exemples nous permettra de tester l’hypothèse de départ en s’appuyant sur les différents entretiens effectués avec des experts du domaine.

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