MILKDECORATION.COM
Featuring
Federico Masotto Sergio Roger Charlotte Taylor Ferréol Babin Lauren Piscione Clara Molloy
Style et inspiration pour tribus contemporaines
Sommaire. En couverture : L’architecte Federico Masotto dans la maison de ville parisienne dont il signe la métamorphose intérieure. Tables basses en bois et tête en céramique d’Arnold Goron, vase de Floris Wubben, néon de Bertrand Lavier. Federico porte un pull Isabel Marant.
CAHIER MOODERN
Photo : Karel Balas
18 News. Design, déco, artisanat, mode, expos, pleins feux sur les nouveautés de la saison.
GALERIE Mélissa Paul s’ancre à Nice. EVENT Le PAD Paris revient pour sa 24e édition.
36 Zoom textile. Le motif “Clan” de Bute Fabrics.
38 Iconique. Les meubles sculptures d’Alexandre Noll.
EXPO Le musée Ludwig rend hommage au sculpteur et designer Isamu Noguchi.
FOOD À Paris, Tekés, la nouvelle adresse aux saveurs de Jérusalem.
42 Sergio Roger.
56 Paula Camiña Eiras. -
à Paris, où Éric Touchaleaume présente ses collections.
En Galice, une démarche engagée aux côtés d’artisans vanniers et d’un bio designer.
70 Ferréol Babin × Revol. -
Les sculptures textiles de l’artiste espagnol.
50 Umberto Bellardi Ricci. La première collection de meubles et de luminaires en métal du créateur new-yorkais.
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62 Galerie 54. Visite de l’iconique hôtel Martel
La manufacture de porcelaine a donné carte blanche au designer.
Photos : Kim Lightbody – Style : Monday Club; Rodri Porcelli – Style : Olalla Armada
CAHIER INSPIRATION
Sommaire. CAHIER TRIBU 78 Malene et Nikolaj. -
98 Lauren Piscione. -
118 Charlotte Taylor. -
Une maison scandi-zen à Copenhague.
Un bungalow wabi-sabi à Los Angeles.
86 Federico Masotto. -
108 Ludwig Godefroy. -
Un appartement londonien où dialoguent créations design et objets sculpturaux.
La métamorphose d’une maison de ville des années 1920 à Paris.
À Mexico, le refuge de béton de l’architecte français.
130 Opening. -
Cap sur Berlin, ville cosmopolite et vibrante qui cultive aussi une réelle douceur de vivre.
CAHIER ÉVASION
134 City Guide. OBJETS DE DÉSIR 160 Shopping. -
168 Adresses. -
Pleins feux sur nos tendances de la saison pour composer un cabinet de singularités dans l’air du temps.
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144 Adresse. Retraite magique à Son Ru, dans un ancien monastère majorquin du xiiie siècle.
Un voyage au cœur de la Norvège, sur les traces de la création du nouveau parfum de la maison Memo Paris.
Photos : Thea Sneve Løvstad; Fabian Martínez - Courtesy Grupo Habita
À Puerto Escondido, au Mexique, l’hôtel Terrestre est un sanctuaire invitant à se reconnecter avec la nature.
152 Destination. -
Édito. Pour nos amis de longue date, ou voisins de table d’un soir, aux potes de potes qui refont leur appart, à tous ceux qui nous ont un jour demandé “et sinon, quels sont les intérieurs les plus inspirants du moment?”, cette édition de printemps 2022 se veut la quintessence de ce qui se fait de plus manifeste en matière de décoration aujourd’hui, selon nous. Nos tribus en avant-garde. De l’antre scandi-zen des Danois Malene et Nicolaj, qui revisitent la poésie japonaise à la mode nordique, au bungalow wabi-sabi de Lauren Piscione à Los Angeles, en passant par le repaire brutaliste tout béton de l’architecte Ludwig Godefroy à Mexico, ou l’appartement très craft & design de la jeune créative londonienne Charlotte Taylor, ces différents intérieurs expriment tous à leur façon les codes sensibles de la création actuelle. Des décors habités, en dehors de tout cliché, qu’incarne en majesté le projet de notre couverture : une incroyable maison de ville, à Paris, que l’architecte Federico Masotto a métamorphosée, à coups de collaborations artisanales et artistiques, menées amicalement avec la maîtresse des lieux. Loin du combo parquet-moulurescheminée, il livre ici un vaisseau aux associations inattendues, très architectural et extrêmement moderne, au twist italo-fantaisiste étonnant. La surprise, toujours. – Le collectif MilK Decoration
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on scandinavian design
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new perspectives
Contributeurs.
Salva Lopez PHOTOGRAPHE
Michael DePasquale + Martina Maffini
Simon Heger Knudsen
Thea Sneve Løvstad
PHOTOGRAPHE
PHOTOGRAPHE
Son chez-lui En dehors de la ville Ses icônes Ses parents Son objet rêvé Une jolie maison Instagram @simonknuds
Son chez-elle L’archipel de Kragerø en Norvège Ses icônes Alvar Aalto, Georgia O’Keeffe, Dieter Rams, Ludwig Mies van der Rohe, Isamu Noguchi Son objet rêvé Une sculpture de Barbara Hepworth Son porte-bonheur Son appareil photo Contax Instagram @theasnevelovstad
PHOTOGRAPHES
Né à Barcelone, Salva parcourt aujourd’hui les quatre coins du monde, d’où il rapporte des clichés au traitement singulier à l’empreinte poétique sans pareil. Souvent minimalistes, ses images possèdent leur propre lumière, au sens propre comme au figuré. → page 42
Leur chez-eux Un appartement à Belleville aux murs habités de photographies et pièces d’art de leurs amis, d’étagères pleines de BD, de livres d’artistes et des piles de magazines Leurs icônes Irving Penn, Isamu Noguchi, Charlotte Perriand, Carlo Scarpa Leur objet rêvé Un bureau de Charlotte Perriand Instagram @depasquale.maffini
Simon est un photographe danois qui partage sa vie entre Copenhague et Londres. Autodidacte, il travaille de façon instinctive et aborde des sujets variés comme la culture, la mode, le design et l’art. Il compte Adidas, Rimowa, Fritz Hansen, New York Times, T Magazine, Wallpaper et bien d’autres parmi ses collaborations.
Né et élevé dans le nord de l’État de New York, Michael commence ses études de photographie à Londres, mais il est diplômé au Brooks Institute of Photography à Santa Barbara. Après des études de sciences politiques, Martina vit à Buenos Aires, Paris et New York où elle rencontre Michael en 2012. Ils commencent alors à collaborer et se spécialisent dans les photos d’intérieurs et de voyage. Attirés par l’histoire et l’archéologie, les origines et les traditions, ils partagent travail et aventures.
→ page 78
D’origine norvégienne, Thea est une photographe et artiste installée à Londres. Son enfance passée à Kragerø influence son esthétisme et une approche candide dans sa pratique. À la recherche d’une certaine sérénité dans ses clichés, elle capture aussi bien des intérieurs que de la mode, mais uniquement pour des clients concernés par des problématiques durables. → page 118
→ page 62
Photos : DR
Son chez-lui Ciutadella de Menorca, à Minorque Ses icônes Toute personne qui sait vivre le moment présent Son objet rêvé Une image du photographe Masao Yamamoto Son porte-bonheur Il n’est pas superstitieux Instagram @salvalopez
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N° 39 | MARS | AVRIL | MAI 2022
RÉDACTION
RÉGIE PUBLICITAIRE
— Directrice de la publication et de la rédaction Isis-Colombe Combréas Directeur artistique Karel Balas — Comité de rédaction Isis-Colombe Combréas, Karel Balas, Laurine Abrieu — Rédactrice en chef Laurine Abrieu — Design graphique Quentin Hourie Secrétaire de rédaction Carole Daprey Responsable éditoriale web Sophie Bouchet Editing Sandra Basch Assistante design graphique Joséphine Day Stagiaire de la rédaction Barbara Noton
— Directrice de la publicité Aurélie Artigaud-Agullo – aurelie@milkdecoration.fr Cheffes de publicité Mandy Fixy – mandy@milkmagazine.fr Alice Marois – alice@milkmagazine.fr Régie publicitaire externe Catherine-Sophie Marteau – Adcare Agent Italie Carlo Fiorucci – carlo@fiorucci-international.com IMPRESSION
— Imprimerie FOT ZAC Satolas Green, 69330 Pusignan, France DIFFUSION / DISTRIBUTION
— Coordination Mandy Fixy — Diffusion Stand Up Presse +33 (0)6 60 90 93 41 +33 (0)6 60 18 81 46 — Distribution France MLP / F3P, Zac des Brateaux, rue des 44 Arpents, bâtiment E, 91100 Villabé Distribution internationale MLP / F3P, Zac des Brateaux, rue des 44 Arpents, bâtiment E, 91100 Villabé
— Magazine Laurine Abrieu, Sophie Bouchet, Carole Daprey, Marie Farman, Adel Fecih, Muriel Françoise, Karine Monié, Marie Randon du Landre, Hélène Rocco, Justine Villain, Sylvie Wolff — Photo Sabela Andrés, Karel Balas, Michael P.H. Clifford, De Pasquale+Maffini, Adel Fecih, Adrianna Glavanio, Simon Heger Knudsen, Tommy Kha, Salva Lopez, Rodri Porcelli, Paul Raeside, Thea Sneve Løvstad, Fabian Martínez, Christophe Rihet — Traduction Simon Thurston — Correspondante à Montréal Muriel Françoise – muriel@milkmagazine.fr — Correspondante à Stockholm Clara Dayet – clara.dayet@gmail.com — La fonte de titrage utilisée, Tomica, a été créée par l’Atelier télescopique, ateliertelescopique.com
COMPTABILITÉ
— Maria Suthanthara – maria@milkmagazine.fr — MILK SARL
MilK Decoration est un magazine trimestriel édité par MilK SARL 3, rue des Pyramides, 75001 Paris, France Tél. : +33 (0)1 45 08 91 48 – Fax : +33 (0)1 45 08 91 66 RCS Paris 215 321 525 — Tous droits de reproduction réservés © 2022 Commission paritaire : 1122 K 91575 ISSN : 2262-3701
milkdecoration.com La rédaction n’est pas responsable des textes, photos, illustrations et dessins qui engagent la seule responsabilité de leurs auteurs. Leur présence dans le magazine implique leur libre publication. La reproduction, même partielle, de tous les articles, illustrations et photographies parus dans MilK Decoration est interdite. MilK Decoration décline toute responsabilité pour les documents remis.
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Photo : Kevin Noble – © The Isamu Noguchi Foundation and Garden Museum/VG Bild-Kunst, Bonn 2022 / The Noguchi Museum Archives, 147079.
— Boy Looking Through Legs (Morning Exercises), 1933, œuvre d’Isamu Noguchi, immense sculpteur et designer à l’honneur d’une grande exposition au musée Ludwig, Cologne (Allemagne).
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MOODER N
Les amateurs sont nombreux à faire le pèlerinage jusqu’au musée Noguchi, caché dans une discrète rue du Queens, à NewYork, pour découvrir ses œuvres organiques, monumentales en bois, papier ou marbre qui jalonnent ce qui fut son atelier et son jardin de sculptures. Ce printemps, inutile de traverser l’Atlantique pour découvrir son travail puisque l’artiste américano-japonais fait l’objet d’une rétrospective au musée Ludwig à Cologne. Cent cinquante œuvres seront représentées, couvrant l’ensemble de ses pratiques et périodes de création, de ses lampes “Akari” en papier washi à ses décors de danse pour Martha Graham… Des pièces sensibles, imaginées par celui qui a survolé toute sa vie le clivage entre art et fonction, une pratique qui a inspiré des générations entières d’artistes… – “Isamu Noguchi”, du 26 mars au 31 juillet 2022, musée Ludwig, Cologne, Allemagne, museum-ludwig.de
Isamu Noguchi. — Au-delà de ses célèbres lampes en papier, Isamu Noguchi a tout au long de sa carrière brouillé les frontières entre art et design… Le musée Ludwig rend hommage à cet immense sculpteur et designer. — 18
Photos : Michio Noguchi / Kevin Noble – © The Isamu Noguchi Foundation and Garden Museum/VG Bild-Kunst, Bonn 2022
MOODERN
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MOODERN
TEXTILE
Plaid non coupable. À la recherche de la perfection, c’est un atelier situé à Katmandou au Népal que Delphine Randet, la fondatrice d’Otherways, a choisi pour confectionner à la main ses collections de couvertures et d’écharpes. Réalisées à partir de laine de yack du Tibet et de laine de chameau de Mongolie, ces pièces sont produites de façon traditionnelle et éthique. Cette association de savoir-faire et matières nobles donne notamment naissance à ce plaid à carreaux au toucher d’une volupté prodigieuse. otherways.fr
COLLAB
Dans la lignée de ses désormais célèbres collaborations avec des designers de renom (Sabine Marcelis, Cristina Celestino, Faye Toogood…) cc-tapis s’est récemment associé au label de design made in LA Atelier de Troupe. Baptisé “Le Tapis Nomade”, ce modèle puise son nom de ses origines et influences plurielles. Imaginé dans la cité des Anges, il est fabriqué à la main au Népal, comme toutes les pièces de la maison de tapis milanaise, et s’inspire des tapis berbères comme du film Profession : reporter réalisé par Michelangelo Antonioni en 1975. Pour mettre en scène cette collaboration mix and match de formes géométriques : la Casa a tre cilindri, conçue à Milan par les architectes Angelo Mangiarotti et Bruno Morassutti et achevée en 1962. Un édifice dont les courbes rappellent celles du “Tapis Nomade”, disponible en trois teintes : or, forêt et sable. cc-tapis.com
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Photos : Romain Laprade; Mattia Greghi
Tisser des liens.
MOODERN
ADRESSE
Arty show. Située traverse Saint-Hèlene, aux abords de l’anse de Malmousque à Marseille, La Traverse est un lieu pluriel, à la fois chambre d’hôtes et galerie d’art, théâtre d’expositions et d’expériences culinaires. À l’origine de ce lieu, Catherine Bastide met à profit son expérience de galeriste et curatrice. Du 5 mars au 2 avril 2022, elle donne ainsi à voir le travail de Peter Simpson, peintre britannique installé à Bruxelles dont les compositions narratives offrent une série d’autoportraits à la fois fragiles et surréalistes. latraversemarseille.fr DÉCOUVERTE
Londres et la lumière. Voilà quelques mois que la Londonienne Rowena Morgan-Cox a fondé Palefire, son studio de création de luminaires. La première collection se compose de quatre suspensions et de quatre lampes de table confectionnées à Barcelone à partir de matière papier recyclée et peinte à la main. Des structures réalisées à la commande, à l’esthétique Art nouveau twistée par un choix de couleurs et de motifs audacieux. Photos : SP La Traverse – artwork : Peter Simpson; Kim Lightbody – Style : Monday Club ; SP CFOC
palefirestudio.com
DÉCO
Faire un tabac. Invitée de la CFOC pour imaginer une collection capsule, la directrice artistique et décoratrice d’intérieur Valérie Barkowski a choisi de placer l’héritage chinois au cœur de ses créations exclusives. Imaginée en collaboration avec la directrice de la création de la CFOC Valérie Mayéko Le Héno, cette ligne habille les tables d’une teinte tabac, présente aussi bien sur la vaisselle en céramique, inspirée de l’époque de la dynastie Yuan, que sur les nappes et les serviettes dont les broderies rappellent les jupes aux cent plis, portées par les femmes de la minorité chinoise Miao. cfoc.fr
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MOODERN
GALERIE
Mélissa Paul s’ancre à Nice.
Photo : Galerie NicolasVella
— La galeriste Mélissa Paul vient d’investir un nouvel espace, une ancienne halle de 400 m2 située dans le quartier historique du port de Nice. L’occasion d’échanger avec cette passionnée des métiers d’art. —
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MOODERN
D’où vient votre appétence pour les métiers d’art et la création contemporaine ? Après des études de stylisme/modélisme au Studio Bercot à Paris, j’ai entamé une carrière de designer broderie en maison de couture à Paris et je me suis spécialisée dans les métiers d’art. Le travail de la main, son exigence et surtout le processus de création se sont alors placés au cœur de mes préoccupations. Son histoire m’intéressait et me fascinait. Comment en est-on arrivé là? Quelles ont été les évolutions qui nous ont permis d’accumuler autant de savoir-faire? J’ai alors décidé de quitter la mode pour les puces de Saint-Ouen avec l’envie de comprendre les époques, leurs styles, leurs influences. Redémarrer par le commencement.
Portrait : Noel Manalili
Comment s’est formé votre goût pour la céramique ? Naturellement, après plusieurs mois de terrain et d’apprentissage, mon attirance pour la céramique a pris une ampleur inattendue. Sûrement en lien avec mes premiers désirs de création, l’argile est l’espoir d’un nouvel horizon. Ses possibilités plastiques, son volume dans l’espace et sa fonctionnalité sont autant de raisons pour lesquelles je m’y intéresse. Son histoire, ce passé si lointain à l’origine même de nos civilisations, la rend à mon sens sublime. En marge des archétypes et des dictats de la mode, de son consumérisme, de son impact destructeur, la céramique remet les choses à leur juste place. Quels sont les types de pièces qui vous attirent? Généralement des pièces sculpturales et techniques. La construction en particulier m’intéresse, comment créer une structure avec ce matériau à la base si fragile. S’interroger sur la possibilité de repousser les limites de la matière, soit par un esprit logique, soit par un instinct
fort, me semble fondamental dans l’exercice de la terre. Le monumental en céramique en est l’apogée. Ensuite vient le travail de la matière, sous forme d’engobes (une terre sigillée) ou d’émaux. Ici aussi une infinité de variations, de possibilités, de combinaisons, mais toujours un geste personnel et inimitable. Comment avez-vous investi cette ancienne halle de 400 m2 ? C’est un exercice qui demande un énorme effort de compréhension de l’espace et de mise en scène. C’est très intéressant et excitant, mille projets sont possibles. J’entame des collaborations avec différents acteurs pour lui donner une vie singulière. J’aime l’idée d’un lieu hybride et d’expression, avec des interventions variées sans perdre le focus sur ce que je sais faire, c’est-à-dire montrer des œuvres en céramique. L’important, c’est de réussir à créer une ambiance chaleureuse où le spectateur, quel qu’il soit, puisse se projeter et imaginer une vie intime avec une de ces pièces. Quels sont les artistes que l’on peut découvrir ici ? Il commence à y avoir du monde avec, entre autres, Agnès Debizet, Bertrand Créac’h, Andrée et Michel Hirlet, Guy Bareff, Flavie Van Der Stigghel, Valery Maillot, Clotilde Ancarani, Sébastien Touret, Olivia Cognet, Ulrikk Dufossé et la dernière arrivée Léa Ginac. C’est par leur histoire et la rencontre à chaque fois personnelle avec chacun d’entre eux que je décide généralement d’entamer un travail, une collaboration. Il n’y pas d’autres critères pour moi qu’une attirance naturelle qui réside dans la seule intuition d’être face à une vérité, une force indiscutable. – Galerie Mélissa Paul, 22 bis, boulevard Stalingrad, 06300 Nice galerie-melissa-paul.com
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MOODERN
DESIGN
Figure de style. Fondé en 1924 et installé dans le 11e arrondissement de Paris, Rispal est un éditeur et fabricant de luminaires dont l’activité s’est arrêtée en 1982. Sous l’impulsion du designer Douglas Mont, l’entreprise française renaît en 2018 avec l’aspiration de créer des pièces éco-responsables. Depuis, ce passionné d’histoire et de luminaires s’attache à redonner vie aux modèles les plus emblématiques du répertoire avant-gardiste de la Maison. Création iconique de François Rispal – fils du fondateur – en 1950, le luminaire “Mante religieuse”, baptisé ainsi par les antiquaires et les décorateurs, puise son inspiration du design scandinave. Le lampadaire se dévoile aujourd’hui dans une réédition fabriquée à la main en France, en chêne, en frêne et en noyer issus de forêts gérées durablement, en lieu et place des bois exotiques originellement utilisés. L’abat-jour suspendu est réalisé en acétate de cellulose, une matière biodégradable obtenue à partir de fibre de coton ou de pulpe de bois. rispal.com
MOBILIER
Cette année, String Furniture étoffe ses collections en lançant des caissons à portes battantes déclinés en sept teintes. Les différentes versions, en frêne, en noyer et en chêne, sont à mélanger à l’envi pour créer un rangement personnalisé du plus bel effet. L’allure minimaliste de ce nouvel élément permet de capitaliser sur le côté caméléon d’un meuble susceptible de trouver sa place dans toutes les pièces de la maison. stringfurniture.com
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Photos : Sébastien Baert; SP String Furniture
Caisses de résonance.
MOODERN
MODE
Fibre sensible. Confectionnées dans une laine de yak, plus douce et plus chaude que le cachemire, les créations de la maison Norlha perpétuent et célèbrent les traditions locales du plateau tibétain où est installé l’atelier de la marque. Parmi les pièces de la nouvelle collection, les écharpes aux tons naturels de brun, gris et blanc nous touchent particulièrement. norlha.com
HÔTEL
Photo s: Nikki McClarron; Sean Davidson
Belle piaule. S’il fallait encore un prétexte pour faire halte dans les Catskill Mountains, au milieu de la campagne new-yorkaise, le voici : l’hôtel Piaule Catskill, dont les 24 cabines de luxe de 35 à 90 m2 sur pilotis se perdent dans la forêt. Habillées de bois et de pierre bleue, et ouvertes sur le paysage montagneux grâce à une cloison vitrée, elles offrent une connexion privilégiée avec la nature sans concession de confort. Un espace commun permet de se retrouver autour du feu et de savourer un repas farm-to-table alors qu’un Spa complète ce grand “reset” de façon divine. Piaule Catskill, 333 Mossy Hill Road, Catskill, NY 12414 / piaule.com
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MOODERN
EXPO
Planète plastique.
L’épopée du plastique est d’une fulgurance rare… C’est cette histoire que raconte le Vitra Design Museum à travers une scénographie immersive et chronologique. Symbole de révolution technologique, d’insouciance et de modernité, ce matériau est devenu en un siècle le plus familier, le plus indispensable… et le plus polluant. Des origines aux alternatives, à travers une vaste sélection d’objets de la moi-
tié du xixe siècle à aujourd’hui, le visiteur navigue des téléphones en bakélite aux assises en mycélium, en passant par les poupées Barbie mais surtout les plus beaux objets de design : la mythique “Ball Chair” d’Eero Aarnio, toute ronde et ultra pop, ou la “Moon Lamp”, un petit ovni lumineux signé du maestro Gino Sarfatti. L’accrochage, lucide sur le destin de ce matériau, consacre sa dernière partie à
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l’actualité du plastique avec des sujets d’étude concrets proposés par des jeunes designers. Recyclage, biomatériaux… Les solutions sont nombreuses, il ne reste plus qu’à les déployer à grande échelle. – “Plastic: Remaking Our World”, du 26 mars au 4 septembre 2022, Vitra Design Museum, Charles-Eames-Straße 2, 79576 Weil-amRhein, Allemagne, design-museum.de
Photo : “Throwaway Living”, Peter Stackpole
— Toujours en pointe, le Vitra Design Museum, en Allemagne, dédie ses expositions à des figures ou à des courants du design. Après le féminisme, le musée se penche sur un sujet brûlant, le plastique, aussi miraculeux que désastreux… —
National Trust Papers II Dernière collection de papiers peints | Disponible maintenant Showroom Little Greene 21 rue Bonaparte 75006 PARIS Tel: 01 42 73 60 81 paris@thelittlegreene.com « Demandez gratuitement des échantillons de papiers peints et des nuanciers, ou trouvez le revendeur le plus proche sur littlegreene.fr » Service de conseils couleurs à domicile et en ligne Papier Peint : ‘Beech Nut – Florence’ collection National Trust Papers II Beech Nut : Robe créée exclusivement par La Designer Anglaise de robe de mariée Halfpenny London
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MOODERN
DESIGN
Branché. Jeune pousse du design américain récompensée du titre de talent émergent du salon Maison et Objet en 2019, Joel Seigle aime délaisser son studio de Brooklyn pour se réfugier dans les bois. Sa nouvelle collection de luminaires en chêne “Branch” est issue de nombreux séjours dans la campagne new-yorkaise passés à réfléchir sur les tourments et adaptations vitales qu’imposent notre époque. joelseigle.com MOBILIER
Pile et chaise. Collaborateur régulier de Miniforms, le designer Skrivo a dessiné la nouvelle assise “Brulla” dans un esprit minimaliste. Ces chaises en bois évoquent un modèle autrichien du xxe siècle, repensé dans une version résolument moderne. Très pratiques, elles s’empilent les unes sur les autres pour être stockées facilement. miniforms.com
TEXTILE
L’Italie et ses palais patinés par le temps représentent le point de départ de la collection “Craft Chic” d’Élitis pour l’année 2022. Directrice artistique de l’éditeur de textile, Ariane Dalle a imaginé des effets de matière et revisite l’ancien dans un style contemporain. Une interprétation foisonnante de matériaux nobles comme le marbre et de fresques qui ornent ces lieux chargés d’histoire, que la Parisienne a traduite sous forme de tissus élégants, à l’instar de ce jacquard texturé “Regina”. Dans cette collection, on observe l’apparition de couleurs brillantes comme le bronze et l’or, ainsi que des motifs instinctifs tracés au pinceau. elitis.fr
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Photos : Brooke Holm; SP Miniforms; Karel Balas
Étoffes de palazzo.
MOODERN
ADRESSE
14 Cavendish Square. À collections d’exception, écrin d’exception. Les fondatrices de The Invisible Collection, Isabelle Dubern-Mallevays et Anna Zaoui, ne s’y sont pas trompées en choisissant cette extraordinaire adresse georgienne comme showroom pour exposer leur répertoire unique de meubles de décorateurs et d’architectes. Construit en 1770 par George Foster Tufnell, ce bâtiment exceptionnel de cinq étages, aux murs décatis et aux nuances surannées, offre un cadre incroyable pour accueillir et souligner la modernité des pièces de leur catalogue, à l’instar des chicissimes fauteuils “Minotaure” de Pierre Augustin Rose (photo). L’espace prévoit d’évoluer régulièrement et de vivre également à travers de nombreux événements comme des expositions, des talks, ou encore des dîners… 14 Cavendish Square, Londres W1G 9DB, Royaume-Uni, theinvisiblecollection.com
OPENING
Entrée en matières.
Photos : SP Cavendish ; Graydon+Herriott
Le Ace Hotel ouvre, à la fin de ce printemps, sa première adresse canadienne à Toronto, ville patchwork de cultures. Pour cette nouvelle construction de 124 chambres, agrémentée d’un rooftop dans le Garment District, l’Atelier Ace a collaboré avec le bureau local Shim-Sutcliffe Architects. L’intérieur, à la matérialité réfléchie, mixe béton, argile, bois et cuivre avec du mobilier vintage chiné dans la ville et des œuvres originales d’artistes torontois. Ace Hotel Toronto, 51 Camden St., Toronto, ON M5V 1V2, Canada, acehotel.com/toronto
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MOODERN
FOOD
Tekés, l’hymne végétal. — Pour sa troisième adresse, le quatuor Assaf Granit, Tomer Lanzman, Dan Yosha et Uri Navon, fondateurs de Balagan et Shabour, célèbre la nature brute dans ce qu’elle a de meilleur. –
Nommé Tekès, ce nouveau-né exprime le végétal avec gourmandise et curiosité dans un décor sensoriel où matières et savoir-faire se rencontrent en majesté. Sol en terre battue, comptoir en pierre, claustras, couverts en métal frappé, bouquets XXL… Tekés vibre entre terre et feu, dans un langage aussi spectaculaire qu’élémentaire. De quoi planter le décor d’une cuisine végétarienne étonnante, aux saveurs de Jérusalem, qui explore le potentiel de ses produits frais et locaux sous toutes ses formes. Orchestrée par la cheffe Cécile Levy, la cuisine initie des dialogues modernes et créatifs mêlant le cru et le cuit dans des saveurs, textures et couleurs attrayantes. Que ce soit avec la crème brûlée de topinambour, la sucrine braisée ou la massabaha de haricots blancs, la carte étonne, les épices s’expriment, les herbes se dévoilent et les parfums s’installent au cœur d’une ambiance chaleureuse, menée par une troupe de passionnés. Si Tekés n’est pour le moment ouvert que pour le dîner, l’adresse s’étoffera en avril d’un lunch, d’un bar à jus, d’un grab & go et d’un bar à cocktails… Que la fête commence ! –
Photos : Adel Fecih - Style : Marion Di Rodi
Tekés, 4 bis, rue Saint-Sauveur, 75002 Paris, tekesrestaurant.com
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MOODERN
ÉVÉNEMENT
Hi Pad!
C’est le rendez-vous de la fine fleur des galeries internationales et françaises d’arts décoratifs et de design historique, moderne et contemporain. Pour cette 24e édition, onze nouveaux exposants rejoignent l’événement, parmi lesquels les Belges de Modern Shapes Gallery, le Luxembourgeois Bernard Soetens, ou la Parisienne Laurence Bonnel et sa galerie Scène Ouverte. Parmi les habitués de la manifestation, la galerie Gosserez profitera du rendez-vous pour présenter quelques exclusivités dans une scénographie imaginée par l’architecte d’intérieur et designer Pierre Gonalons. L’occasion de découvrir ou redécouvrir le travail de Lukas
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Cober (photos) et notamment sa table ronde “New Wave” qui a remporté un franc succès lors de son solo show au sein de la galerie fin 2021. Pour ne rien gâcher, le jury du PAD Paris sera, pour cette édition, présidé par Jacques Grange, tandis que la scénographie du restaurant a été confiée à la décoratrice Sandra Benhamou, et le décor du Studio PAD pensé par les architectes d’intérieur Jacques Bec et Artur Miranda, du duo OITOEMPONTO. Save the date! – PAD Paris, de 5 au 10 avril 2022, Jardin des Tuileries, entrée 234, rue de Rivoli, 75001 Paris, padesignart.com
Photos : SP Galerie Gosserez; Lukas Cober
— Événement incontournable des collectionneurs internationaux et amateurs de design, le PAD Paris revient aux Tuileries du 5 au 10 avril 2022 pour sa 24 e édition. —
MOODERN
ÉVÉNEMENT
It’s a main’s world. Après une première édition fructueuse en 2018, Homo Faber est de retour à Venise du 10 avril er au 1 mai prochain. À l’initiative de la Michelangelo Foundation, l’événement qui place les métiers d’art à l’honneur regroupe pour cette prochaine édition une quinzaine d’expositions et rend hommage au Japon en célébrant son héritage traditionnel. homofaber.com
COLLECTION
Zana mania. Esthète et grand amateur d’art, l’architecte Charles Zana lance “Ithaque”, sa première collection de mobilier auto-éditée. S’il a toujours dessiné des pièces sur mesure pour ses projets, le designer élargit son répertoire de créations en signant une ligne élégante de luminaires, d’assises et de tables haut de gamme. Ici, la lampe “Yos” avec un pied en bois et un abat-jour en papier. Photos : Ruben Guerreiro – Crédit : œuvre deVanessa Barragão; François Halard; DR
zana.fr BOOK
Maisons de poche. Ce sont plus de 900000 abonnés qui suivent Brent Heavener et son compte Instagram @tinyhouse. Cet entrepreneur y publie des photos de ces habitations qui prônent un mode de vie plus respectueux de l’environnement et moins onéreux. De cette aventure digitale découle le livre éponyme qui compile les plus belles mini-maisons à travers le monde et plonge le lecteur au plus près de la nature. editionsdelamartiniere.fr
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MOODERN
DESIGN
Tour de table. Elle se nomme “Togrul” et a été imaginée par le designer Gordon Guillaumier pour l’éditeur italien Tacchini. De belle allure, cette table totem, proposée en plusieurs tailles, dispose d’un pied sculptural en polyuréthane rigide disponible en diverses finitions réalisées à partir de terre crue appliquée à la main par des maîtres artisans. Le plateau rond, en marbre, est lui aussi proposé en plusieurs versions. Mention spéciale pour les chaises “Pigreco” de Tobia Scarpa dessinées en 1959 et rééditées l’an dernier par Tacchini, et qui s’accordent à merveille avec ce monument de convivialité. tacchini.it MODE
Champ libre. Pour sa collection printemps-été 2022, Sessùn poursuit son récit de reconnexion à la nature et s’inspire d’un retour à la terre salutaire. Au programme de cette échappée belle : un vestiaire qui associe des pièces esprit worker à des silhouettes empreintes d’une délicatesse évoquant les années 1940, que viennent twister quelques incursions de patchworks si chers à la marque. En toile de fond, une gamme estivale faite de rouges passés, ocre et roses délavés. C’est beau.
COLLECTION
Lumière de tête. Dans son espace rue de Seine, le galeriste parisien Alexandre Biaggi présente avec singularité un choix de meubles et objets du xxe siècle, avec une prédilection pour la fin des années 1930 et les années 1940, aux côtés de pièces qu’il choisit lui-même d’éditer, à l’instar de cet incroyable lampadaire “Scramble” signé Mauro Fabbro, au pied réalisé en fer patiné, coiffé d’un abat-jour en parchemin. alexandrebiaggi.com
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Photos : Mattia Parodi – Style : Greta Cevenini; Charlotte Lapalus; SP Alexandre Biaggi
fr.sessun.com
MOODERN
OPENING
La vie de château.
Photo : Aurélien Aumond
— Cet été, le groupe REVĪVŌ dévoilera le Château de Fiac, son nouvel hôtel situé au cœur d’un village pittoresque du Tarn. Un lieu où la contemplation et le lâcherprise sont de mise, grâce à son décor manifeste et ses expériences holistiques. —
À seulement 45 minutes de Toulouse, le Château de Fiac donne le goût de l’évasion. Dernier projet du groupe REVĪVŌ (“Je revivrai”, en latin), cet hôtel-expérience est entouré d’un parc bicentenaire de 3 hectares, où s’exprime le savoir-faire “bien-être” de la maison. Au programme ? Quatorze chambres pour des retraites immersives au sein d’une luxueuse bâtisse, finement réorchestrée par l’architecte d’intérieur Alexis Dupont et le studio
Art in situ fondé par Clara Copin, cosignant la curation des œuvres d’art. Fresques de Galatée Martin, galerie de portraits anciens, photographies de Sarah van Rij et œuvres de la Craft Gallery sont présentées dans une ambiance maison de famille, où de multiples thèmes et inspirations s’entrecroisent. Un mix and match créatif, mêlant pièces uniques, contemporaines et vintage dans un langage hors temps. “L’idée était de retrouver l’éclec-
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tisme et la « folie » des voyages du xviie siècle dans toutes les pièces du château, tout en y ajoutant une touche de joie de vivre”, raconte Alexis. Une parenthèse enchantée qui, à l’arrivée des beaux jours, ne manquera pas d’éveiller les esprits. – Ouverture été 2022, Château de Fiac, 51, rue Chaminade, 81500 Fiac, revivoresorts.com alexisdupont.com / studioartinsitu.com
ZOOM TEXTILE
Entrez dans le “Clan” de Bute Fabrics
Composé de laine et de soie, “Clan” a séduit les architectes d’A-nrd qui l’ont choisi pour le restaurant Korean Dinner Party à Londres.
Bute Fabrics tire son nom de l’île écossaise sur laquelle l’entreprise a été fondée en 1947, à l’origine pour fournir des emplois aux militaires qui rentraient chez eux au sortir de la Seconde Guerre mondiale. Là, non loin de l’île d’Arran, dans le Firth of Clyde, l’île offre à ses quelque 6 500 habitants des paysages d’une variété étonnante : landes à bruyère, collines luxuriantes et paysages marins changeants. Une palette de textures et de couleurs qui constitue une source d’inspiration infinie pour les collections de tissu. “Clan”, issu de la collection “Identity” créée par David Irwin, évoque l’héritage
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culturel de l’île en déclinant le motif du damier présent sur les armoiries du clan écossais Stuart of Bute. Son jeu de blocs géométriques montre une diversité d’armures illustrant le savoir-faire de l’entreprise qui a réalisé en 2019 d’importants investissements en termes d’équipement. Fort d’une clientèle prestigieuse (Knoll International, Habitat) et de collaborations de choix (Tom Dixon, Jasper Morrison, Matthew Hilton), l’éditeur textile veille aussi à valoriser son héritage en s’appuyant sur ses riches archives soigneusement conservées. – butefabricsltd.com
Photo : Kris Piotrowski/A-nrd
— Créé en collaboration avec le designer britannique David Irwin, le tissu “Clan” s’inspire de l’identité écossaise de l’éditeur de textile Bute Fabrics qui célèbre cette année son 75e anniversaire. — Texte : Carole Daprey
C O L L E C T I O N L’ A C C E S S O I R E TA P I S « P E N N Y L A N E » E T C O U S S I N S « V I C E V E R S A »
Auteur & Éditeur.
P A P I E R P E I N T, T I S S U , R E V Ê T E M E N T M U R A L , L’ A C C E S S O I R E 06 Nice Cosi 09 54 70 79 80 13 Saint-Rémy-de-Provence Libellule 04 90 21 19 89 17 Saint-Martin-de-Ré Sandra Dubrul 06 48 23 38 44 19 Brive-la-Gaillarde Les M Design 05 55 87 53 25 31 Toulouse Terra Rosa 05 62 26 47 94 33 Libourne Acanthe 05 57 25 97 67
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34 Montpellier Vues d’intérieurs 04 67 60 76 34 35 Saint-Malo La Maison Générale 02 99 40 81 37 35 Montgermont VBA Décoration 02 99 23 17 41 42 Saint Etienne Signe Interieur 04 77 34 32 00 49 Angers 68 Rue du Mail 06 50 25 72 92 57 Metz Bleu Jasmin 06 62 29 41 66
S H O W R O O M - 5 R U E S A I N T- B E N O I T, 7 5 0 0 6 P A R I S 59 Bondues Joseph et Stanislas 06 98 87 11 44 62 Le Touquet Margot Juez 03 21 81 62 98 64 Biarritz Alta Quota 05 59 22 57 35 69 Tassin-la-Demi-Lune Amsterdam 06 11 63 63 11 69 Lyon Simone Sisters 04 78 42 30 28 74 Annecy Organdi 04 50 51 28 40
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W W W. E L I T I S . F R
74 La Roche-sur-Foron Projection Intérieur 04 50 03 27 24 75 Paris 7e Le Bon Marché Rive Gauche 75 Paris 12e Textile Français d’ameublement 01 43 43 60 99 83 Gassin Taman Antik 04 94 97 61 53 92 Sceaux Artigala 09 53 14 92 58 94 Vincennes En ville 06 60 75 25 06
ICONIQUE
Les meubles sculptures d’Alexandre Noll. — Tout au long du xxe siècle, Alexandre Noll façonne des objets et des meubles au caractère primitif, dans un geste réfractaire aux évolutions techniques qui jalonnent son époque. — Texte : Carole Daprey
des essences et trouve dans la forme brute les contours de ses créations. Il sculpte, polit et assemble avec “l’intransigeante volonté de ne jamais imposer la blessure d’un métal (…) ni l’insolite contact de la colle”, écrit Renée Moutard-Uldry dans le premier catalogue qui lui est consacré en 1954. Alexandre Noll se tourne ensuite entièrement vers la sculpture, confirmant que l’aspect utilitaire de ses créations est depuis longtemps transcendé par une dimension artistique profondément ancrée en lui.
Photos : DR ; Sotheby’s Paris / © Adagp Paris 2022.
Cette chaise taillée en plein bois, comme libérée du tronc d’arbre dont elle est issue, témoigne de la passion obsédante d’Alexandre Noll pour la matière vivante du bois. C’est durant la Première Guerre mondiale qu’il en a la révélation. Employé de banque rémois, il est mobilisé dans l’aviation et rencontre le graveur Lucien Jacques. De Salonique où il est en mission, il rapporte de nombreux croquis et gravures sur bois. Débute alors son apprentissage avec la confection de manches d’ombrelle, de pieds de lampe repérés par Paul Poiret et de socques pour le chausseur Perugia. Puis il se lance dans une création prolifique d’objets qu’il présente notamment à l’Exposition internationale des arts décoratifs en 1925. De l’objet, indéniablement sculptural, Alexandre Noll passe à la création de meubles. Ses tables, sièges et buffets, présentés pour la première fois en 1943 à la Compagnie des arts français, soulignent la puissance et le caractère unique d’une matière qu’il vénère. Là où une carafe sculptée aux dimensions disproportionnées s’affranchit de son aspect utilitaire, la chaise elle-même paraît avoir été créée sans se soucier de l’ergonomie. Alexandre Noll est tout à l’écoute du bois, dont il explore la variété
Alexandre Noll (1890-1970) Fauteuil, acajou, vers 1947. Merci à Florent Jeanniard de Sotheby’s Paris pour sa précieuse collaboration.
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Le feu essentiel Remarquable par sa large vision sur le feu, l’insert Stûv 6-in se glisse aisément dans les feux ouverts existants, y compris dans des niches peu profondes. Ce foyer de remplacement, disponible en 7 formats, abordable et compact, permet au plus grand nombre d’accéder à un foyer de première qualité. Esthétique, écologique et économique, cet insert comblera les amateurs d’authentiques feux de bois.
Modèle présenté : Stûv 6-in
Retrouvez-nous sur www.stuv.com
Photo : Salva Lopez
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I N S P I R AT I O N
Photo : Salva Lopez
INSPIRATION
CRAFT
Statues de toile. — À Barcelone, dans son studio situé en plein cœur du quartier gothique, Sergio Roger présente sa série de sculptures de lin baptisée “Ruines textiles”. Son travail, repéré par la galeriste Rossana Orlandi, se joue des apparences et revisite de façon moderne l’art antique. —
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Comment est née l’idée de la sculpture textile? Mon rapport au textile remonte à l’enfance. Quand j’étais petit, j’ai appris à coudre à la main. J’ai aussi toujours été intéressé par des artistes qui utilisent des tissus pour construire leurs œuvres : Louise Bourgeois, Joseph Beuys, Cosima von Bonin, Ernesto Neto, Mike Kelley… pour n’en citer que certains. J’ai commencé à expérimenter très tôt le rapport entre la sculpture et ce matériau, si bien que j’ai développé ma propre méthode et ma technique. D’où vient votre passion pour l’Antiquité? J’ai un penchant pour l’art antique et je suis particulièrement friand de la période gréco-romaine. C’est le point de départ pour s’interroger sur la notion de beauté et d’idéalisme dans une perspective occidentale. Votre but est-il de vous rapprocher le plus possible de la version historique? C’est le fondement de ma démarche artistique. Je veux constamment améliorer
CRAFT
mon savoir-faire pour voir jusqu’à quel point je peux imiter la sculpture classique. En remplaçant la pierre et le bronze par des matériaux mous, j’ai à cœur de déconstruire notre conception de la sculpture traditionnelle et de présenter l’archéologie sous un nouveau jour. Par exemple, je voulais travailler un buste à la gloire d’un empereur, avec une armure, une cape, etc. En faisant des recherches sur Internet, je suis tombé sur un portrait en marbre de l’empereur Antonin le Pieux, qui a particulièrement attiré mon attention. J’ai cherché en vain des photos du verso de cette statue. Après plusieurs mois de travail sur ma version de ce buste, j’ai découvert que l’œuvre originale se trouvait au musée du Prado à Madrid. Dans la foulée, j’ai fait l’aller-retour dans la journée pour étudier la sculpture de plus près, notamment l’arrière. J’étais tellement heureux et empressé d’examiner cette pièce et de la prendre en photo qu’un employé du musée me surveillait de près pendant ma visite. Comment se déroule votre processus de création? J’ai élaboré les premiers bustes textiles
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En remplaçant la pierre et le bronze par des matériaux mous, j’ai à cœur de déconstruire notre conception de la sculpture traditionnelle et de présenter l’archéologie sous un nouveau jour.
La collection “Ruines Textiles” revisite le style antique en recréant des colonnes et des bustes de l’époque dans du lin chiné.
Photos : Salva Lopez
INSPIRATION
Photo : Salva Lopez
Photo : Salva Lopez
L’atelier de Sergio Roger est situé en plein cœur du quartier gothique de Barcelone dans une demeure typique du xviiie siècle appelée Palau Mercader, aujourd’hui louée à des artistes.
Photo : Salva Lopez
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Mon travail consiste en un assemblage de techniques traditionnelles et comprend aussi une grande part d’expérimentation et d’improvisation.
Photos : Salva Lopez
Le drapé, cousu à la main, est la dernière étape de confection des pièces en lin de Sergio Roger. Pour imaginer ses œuvres, l’artiste puise son inspiration de statues antiques existantes repérées en ligne et dans des musées.
CRAFT
avec l’intention de recréer des pièces classiques sans inspiration spécifique. Dans un second temps, j’ai commencé à travailler en m’appuyant sur de véritables sculptures et œuvres d’art découvertes dans des musées ou au gré de mes recherches sur Internet. Je débute par le choix d’une sculpture, que je vais soit recréer, soit utiliser comme inspiration. J’utilise le plus de photos possible, puis je commence à dessiner. J’ai mis au point une technique pour recréer des formes en 3D à l’aide de patrons. Je réalise plusieurs prototypes dans un coton de base que je garde jusqu’à obtenir l’aspect désiré. C’est à cette étape que je couds la pièce avec du lin antique et que je la rembourre. Ensuite, je m’attelle aux détails comme les cheveux ou le drapé. Quel type de tissu travaillez-vous? J’utilise du lin ancien vieux de 100 à 150 ans. Je chine les tissus dans des boutiques spécialisées ou des marchés en Espagne et dans le sud de la France. Puis je colore ces textiles avec une teinture végétale. Pour le moment, j’ai seulement utilisé des teintes inspirées de la terre, par exemple le terracotta,
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qui donne une impression de patine, comme si la pierre était érodée. Mais j’aimerais expérimenter davantage autour de la couleur. Notamment, des tonalités vertes qui rappellent le bronze de l’Antiquité. Quelles techniques utilisez-vous pour confectionner une sculpture? Les techniques que j’utilise sont celles du métier de tailleur, comme la confection d’un patron, la couture à la main, la broderie, le matelassage et la teinture naturelle. Mon travail consiste en un assemblage de techniques traditionnelles et comprend aussi une grande part d’expérimentation et d’improvisation. Quelles sont vos envies pour le futur? Beaucoup d’idées se bousculent dans ma tête. J’aimerais, par exemple, expérimenter autour de l’échelle et la taille des sculptures. Et d’autres choses que vous découvrirez sous peu. – interview : sophie bouchet photos : salva lopez sergioroger.com / @sergioroger
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Photo :Tommy Kha
L’âge d’acier. — Dans son studio sur les quais de Brooklyn, Umberto Bellardi Ricci ordonne des formes qui se confondent avec celles des gratte-ciel alentour. Sa première collection
de meubles et de luminaires minimalistes en métal, dévoilée à la galerie new-yorkaise Matter l’été dernier, est riche de sa vision d’architecte, d’anthropologue et de sculpteur. — 51
Photo :Tommy Kha
INSPIRATION
Quel chemin vous a mené à la sculpture et au design? Diplômé en anthropologie sociale, j’ai repris des études à l’Architectural Association School of Architecture à Londres, où j’ai découvert ma capacité à exprimer des idées abstraites à travers la forme. J’ai ensuite ouvert une école d’expérimentationdubétonauMexique avecuncollectifd’artistesetd’architectes qui se réunissait un mois par an dans le jardinsurréalistedeLasPozaspourcréer des sculptures à l’échelle architecturale. Après y avoir rencontré ma femme, je suis venu enseigner l’architecture et la sculpture à la Cornell University, dans la campagne new-yorkaise. C’était une sorte de retraite monastique pour le citadin que j’étais. Dans le sous-sol de ma maison, j’ai commencé à assembler des objets qui sont devenus mes premiers meubles sculpturaux.
comme autant de possibilités. J’adore aussi détourner les objets de leur usage ou les réinventer. L’une de mes devises préférées est d’ailleurs celle du peintre métaphysique Giorgio de Chirico : “Vous n’avez pas besoin d’inventer quoi que ce soit, il vous suffit juste de voir les choses différemment.” Pourquoi avez-vous choisi le métal comme principal médium d’expérimentation? Le passage au métal s’est fait de façon intuitive lorsque je me suis installé à New York. J’étais devenu expert dans la fabrication de moules pour le coulage du béton, autrement dit dans la fabrication de formes négatives. Celles-ci se sont muées en formes positives, des sortes d’enceintes en acier plié qui reflétaient ou capturaient la lumière de façon feutrée. Par exemple, dans mes luminaires sculpturaux“Mano”,lemétalenveloppe une lumière chaude un peu comme une main qui tiendrait une bougie. Mon studio au treizième étage d’un bâtiment sur les quais de Brooklyn, dont les fenêtres donnent sur la skyline de Manhattan, a aussi contribué à faire naître les pièces de ma première collection. Quelles sont vos techniques de prédilection? J’ai commencé par le moulage, le pliage et le roulage. J’aime ces techniques
Photos : Adrianna Glavanio
Avec votre regard d’architecte, quelle relation envisagez-vous entre l’objet et l’environnement dans lequel il s’inscrit? Je pense que l’espace définit l’objet. La véritable différence entre une architecture et un meuble, un luminaire ou une sculpture, est avant tout une question d’échelle et de perception. J’aime faire conserver aux choses une certaine ambiguïté. Ma maison est pleine de prototypes ou de pièces inachevées que je vois
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Ci-dessous, un des premiers modèles du luminaire “Mano” en laiton et pierre de lave. Page de gauche, au mur, luminaire “Mano” en laiton poli et brossé. Sur un support en bois, un grand carré en aluminium destiné à un plafonnier et une poignée en fonte.
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Dans quoi peut-on retrouver l’empreinte de la ville de New York au riche héritage industriel et où vous vivez depuis 2018? Elle m’inspire très fortement. Si les gratte-ciel me laissent froid lorsque je marche à Manhattan, car ils n’autorisent aucune interaction humaine, j’aime la façon dont ils coexistent depuis les fenêtres de mon studio, commeundécor de théâtre à l’échelle de mes créations souvent verticales. Une sorte dedialogue y a pris forme, un peu comme entre une maquette et des pièces presque interchangeables. La ville a aussi influencé le titre de ma première exposition“Dawn” chez Matter, en référence à la chaleureuse lumière de l’aube qui l’enveloppe, ainsi qu’à celle au bout du tunnel, signe de renouveau, dans lequel excelle New York, qui se réinvente sans cesse. Vos meubles et luminaires partagent une simplicité formelle dans la veine de celle recherchée par Donald Judd. Compte-t-il parmi vos maîtres à penser?
Étonnement, je n’ai jamais perçu une influence directe dans l’œuvre de Donald Judd, même si nous avons tous deux eu recours à des plaques de métal constitutives de New York. En revanche, l’artiste Richard Serra a joué un rôle déterminant dans mon travail de création, en particulier avec sa façon de transcender l’échelle des choses, ainsi queDanFlavinetsesinstallationssculpturales lumineuses. J’ai aussi beaucoup d’affinités avec des artistes et architectes minimalistes tels que Walter De Maria, Sol LeWitt et Carlo Scarpa.
Ci-dessous, sur la table basse “Pica” en acier patiné et verre, lampe “Angolo”. À l’avantplan, maquettes d’escaliers en noyer destinées à un projet de maison à Londres. Page de droite, luminaire “Spira” en aluminium et, au sol, morceau de bois flotté ramassé sur une plage de Montauk.
Quels sont les projets qui se profilent à l’horizon? Je devrais lancer d’ici cet été une nouvelle collection de mobilier en pierre. Je travaille notamment sur un daybed avec une base en marbre rouge comme celui que l’on peut retrouver à l’Opéra de Paris. Je compte y intégrer des pièces et détails en béton, dont le coulage me manque. Je prépare également d’autres modèles de luminaires en métal pour lesquels j’expérimente différentes patines, un processus fascinant aux possibilités infinies. — interview : muriel françoise photos : tommy kha et adrianna glavanio ubrstudio.com / @butrome
Photos : Adrianna Glavanio
simples et le travail avec des manufacturiers du Bronx qui perpétuent un savoir-faire des années 1950 au moyen de presses hydrauliques gigantesques, que j’utilise parfois avec des métaux précieux polis.
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Photo :Tommy Kha
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Photo : Sabela Andrés
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Photo : Rodri Porcelli – Style : Olalla Armada
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Tresseuse d’avenir. — Pour son projet de fin d’études, Paula Camiña Eiras ravive le folklore galicien aux côtés d’artisans vanniers et d’un bio designer. Une démarche engagée et pleine d’avenir, mêlant innovation et traditions ancestrales. —
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Photo : Rodri Porcelli – Style : Olalla Armada
INSPIRATION DÉCOUVERTE
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Photo : Sabela Andrés
La Galice, région entre terre et mer située au nord-ouest de l’Espagne. Des paysages sauvages et escarpés, vibrant au rythme de l’océan Atlantique et de sa forte empreinte celtique. C’est ici que la designer-chercheuse Paula Camina Eiras a développé son projet d’études dans le cadre de sa maîtrise en biodesign, présentée à la Central Saint Martins à Londres. Concernée par les spécificités écologiques, scientifiques et culturelles créant un impact positif par le design et la matérialité, elle profite d’un retour dans sa région natale, durant la pandémie, pour déterminer son champ d’investigation : la pollution marine. “L’océan Atlantique a fourni aux habitants de la Galice et de l’Espagne toute son histoire, ceux-ci ont beaucoup compté sur ses ressources marines, entraînant le gaspillage de 602 tonnes de coquillages galiciens par an, ce qui représente un danger important pour l’environnement. De plus, cette quantité de déchets a augmenté ces
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dernières années en raison d’une demande accrue en produits de la mer, des systèmes de production et de la mise en place d’outils de pêche modernes s’éloignant des méthodes traditionnelles, ce qui met en péril l’artisanat local comme la vannerie. Le déclin de cette dernière provient principalement du reboisement d’arbres non autochtones en Galice, dont le bois n’est pas exploitable pour les techniques de vannerie”, constate Paula. C’est pourquoi elle décide de mettre au point un biomatériau flexible à disposition des vanniers, à base de coquillages de fruits de mer. Un moyen de réduire une source de déchets nocifs pour l’environnement, tout en permettant la pérennité des savoir-faire locaux. “Ce projet ne s’éloigne pas des principes durables liés à la vannerie, à savoir maintenir un équilibre entre l’activité et les ressources prélevées sur notre environnement. D’une part, en tant que biodesigner, mon approche a été d’apprendre, de sentir et de voir l’ensemble des techniques, matériaux et processus tra-
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ditionnels de la vannerie galicienne. D’autre part, mon travail de designer consistait à concevoir une collection de pièces de tissage contemporaines, dont la morphologie s’inspirait d’éléments issus du folklore galicien.” Une démarche hors temps qui, comme un passé recomposé, lie la préservation d’une culture ancestrale et le développement de nouvelles approches, adaptées au contexte environnemental. Intitulé “Co-Obradoiro Galego”, ce projet ouvre le champ des possibles et les potentielles ressources pour un artisanat nouveau. “J’imagine un avenir où designers et artisans façonnent ensemble des systèmes régénératifs”, nous confie Paula. Une histoire à réécrire, main dans la main, dans une démarche salvatrice et collaborative. – texte : adel fecih modèles : esperanza piñeiro, maría martínez, rosa rodríguez, olga leston, maruja et dominga vannier : rubén bertoa @paula.camina
Photo : Sabela Andrés
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Photo : Rodri Porcelli – Style : Olalla Armada
Pour illustrer sa collection, Paula Camiña Eiras s’est rendue en bord de mer aux côtés de femmes en tenues traditionnelles. Une ode à la culture locale inspirée par des images d’archives.
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VISITE
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INSPIRATION
VISITE
Galerie particulière. — Au cœur du quartier d’Auteuil dans le 16e arrondissement de Paris, l’iconique hôtel Martel signé Robert Mallet-Stevens accueille aujourd’hui la Galerie 54, fondée par le marchand Éric Touchaleaume. Cette maison-atelier, emblématique de l’avantgarde architecturale, continue de célébrer les arts et le design dans un écrin hors du temps.—
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Ci-contre, miroir polyédrique de Jan et Joël Martel. Page de droite, photo de gauche, table de Le Corbusier, fauteuils de Pierre Jeanneret et Le Corbusier, Chandigarh, 1955. À droite, fauteuil de Robert MalletStevens. Lustre de Jean Touret, 1968.
Photo : De Pasquale+Maffini
Photo de droite, sofa, guéridon et tabouret d’Eckart Muthesius pour le Maharaja d’Indore, 1930. Potence de Gaetano Sciolari, 1958. Figure de reliquaire Kota.
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VISITE
Photos : De Pasquale+Maffini
Le vaste atelier permet au galeriste de présenter et de faire dialoguer ses nombreuses découvertes.
L’hôtel Martel est l’œuvre de l’architecte et designer Robert Mallet-Stevens, auteur également de la villa Noailles à Hyères et de la villa Cavrois près de Roubaix. Entre 1924 et 1927, il fait sortir de terre un ensemble d’hôtels particuliers, situé dans une petite impasse qui porte aujourd’hui son nom. Il pense les moindres détails de ce lieu unique et exclusif, des trottoirs aux lampadaires, pour en faire son manifeste architectural. Chaque maison est un ensemble de cubes blancs, percés de larges fenêtres horizontales et surplombés d’un toitterrasse. Les principaux matériaux utilisés sont le ciment, le verre et le métal. Cette modernité radicale est la signature de Robert Mallet-Stevens, symbole de
sa vision rationnelle et idéologique de l’architecture. Il s’entoure pour ce projet de collaborateurs tels que Jean Prouvé, Charlotte Perriand ou Pierre Chareau. Aujourd’hui encore, presque cent ans après sa création, la petite rue MalletStevens ne laisse aucun promeneur indifférent, elle impressionne par sa modernité et son caractère exclusif. C’est un lieu hors du temps. Parmi les heureux propriétaires de l’époque, les frères Jan et Joël Martel, des sculpteurs parisiens proches de l’architecte qui investissent la maison-atelier au numéro 10 de la rue, baptisée hôtel Martel. En 2015, le marchand d’art et de design Éric Touchaleaume a l’opportunité de faire l’acquisition de l’atelier mythique
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des frères Martel qu’il transforme en galerie. “Dans les années 1980, jeune marchand, j’ai fait l’acquisition de grands plâtres des frères Martel qui occupaient leur atelier. Parmi lesquels La Trinité, dont un tirage trône toujours aujourd’hui en majesté dans l’entrée”, relate-t-il. Il avait déjà acheté, une petite dizaine d’années auparavant, l’appartement en duplex au-dessus pour y habiter. Éric Touchaleaume entretient un lien fort avec ces lieux, qu’il connaît depuis son enfance et dont l’audace créative a beaucoup influencé ses goûts et son parcours. Ce vaste atelier lui permet de présenter et de faire dialoguer ses nombreuses découvertes. Se mêle ainsi ici de l’art tribal, de la céramique, de
Photo : De Pasquale+Maffini
Chauffeuse de Pierre Jeanneret, Chandigarh, 1955. Tables basses de Charlotte Perriand et Marc du Plantier. Tableau de Ronan Barrot, portrait de Pierre Autin-Grenier. Céramiques de Georges Jouve, Pablo Picasso et Antonio Sabatelli. Tapis “Les Génies” de Jean Lurçat, 1925.
Photo : De Pasquale+Maffini
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INSPIRATION
VISITE
Photo : De Pasquale+Maffini
Art tribal, céramique, photographie, peinture, design et mobilier d’architecte… Les œuvres s’accordent naturellement avec la pureté architecturale du lieu.
la photographie, de la peinture, du design des années 1970, ainsi que du mobilier d’architecte de Jean Prouvé, Charlotte Perriand, Le Corbusier, Pierre Jeanneret ou Gio Ponti. Les œuvres s’accordent naturellement avec la pureté architecturale du lieu. “Libéré depuis quinze ans des contraintes d’une galerie imposant le « white cube » et le « total look », je me situe maintenant aux antipodes en traitant mon espace d’exposition comme le prolongement de mon appartement”, explique le marchand, adepte des lieux hors normes, propices à exposer des œuvres inattendues. À Marseille, il anime chaque été avec son fils la Friche de l’Escalette : 3 hectares de ruines face à la mer, au cœur du parc national des Calanques.
Ils y présentent les maisons nomades de Jean Prouvé, des expositions de sculptures et de céramiques. En juin prochain, ils mettront à l’honneur les “Formes molles” des céramistes Baptiste & Jaïna, et les “Cabanes” de Marjolaine Dégremont. Si, à Paris, la Galerie 54 n’est accessible librement à la visite que l’été, l’hôtel Martel et la rue Mallet-Stevens sont un trésor méconnu, qu’il faut s’empresser d’aller découvrir. – texte : marie farman photos : de pasquale+maffini Galerie 54 / Éric Touchaleaume, réservée aux professionnels, exclusivement sur rendez-vous. Accessible librement à la visite du 23 juillet au 31 août 2022. galerie54.com / @galerie_54
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Dans l’appartement, mobilier d’origine par Mallet-Stevens. Chauffeuses de Giulio Minoletti, 1950. Œuvres de Yokoyama Taikan, Charles Lacoste, Eugène Fromentin, Seizo Sugawara, Pierre Tal Coat… Page de gauche, chaises de Jean Prouvé, table de Pierre Jeanneret. Sculptures Nok et œuvres de Le Corbusier, Frank Burty Haviland, Jean Arp et Boris Lovet-Lorski.
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Photo : Adel Fecih
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L’art à la table. — La manufacture de porcelaine Revol a donné carte blanche au designer Ferréol Babin pour créer une collection de vaisselle. Son amour du geste et de la matière s’exprime ici avec justesse, sans être dénaturé. —
Photo : Adel Fecih
Installée à Saint-Uze dans la Drôme des Collines, la maison Revol, spécialiste de l’art de la table, fabrique de la vaisselle en porcelaine depuis 1768. L’entreprise familiale a vu neuf générations se succéder à sa tête et des centaines d’ouvriers apprendre le métier et le transmettre. L’usine est le lieu où tout se concrétise, place d’effervescence et d’innovation où se côtoient différents corps de métier et plusieurs générations. Ici, le four donne le tempo. Ateliers de modelage, de coulage ou d’émaillage : toutes les étapes de production sont effectuées par des experts et des passionnés, dont le savoirfaire rare fait la réussite et l’âme de la maison. Des designers sont régulièrement invités à concevoir des collections qui s’ancrent dans l’ère contemporaine; cet échange créatif permet à Revol de se confronter à d’autres regards, de se lancer sans cesse de nouveaux défis.
collection baptisée “YLI”, l’origine de la matière en grec. Depuis plusieurs années, Ferréol Babin accorde une grande place à la fabrication de pièces uniques, qu’il réalise lui-même dans son atelier avec une approche à la fois instinctiveetdélicate.Séduitparlavisionde cet électron libre, le président de Revol Olivier Passot a donné carte blanche au designer. Leur désir et défi commun fut de révéler son geste artisanal et instinctif de manière industrielle. “Mon amour de la matière est au cœur du projet”, souligne Ferréol Babin. Cette collection fait d’ailleurs particulièrement écho à sa sensibilité; elle rassemble l’artisanat, l’art de la table et implique une réflexion sur l’aliment et la manière de le présenter. Il a donc créé un ensemble culinaire composé classiquement d’assiettes et de bols, mais également de pièces plus singulières et personnelles comme des centres de table en forme de cabosses et des assiettes pelles sculpturales. Très sensible à la céramique, Ferréol avait, quelque temps avant la proposition de Revol, investi dans un four et appris la technique. Si son geste
L’amour de la matière et du sensible Après plusieurs mois de recherche et d’expérimentation, Revol et le designer Ferréol Babin ont donné naissance à la
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“Je façonne les pièces à la main, elles ont donc inévitablement des défauts, des aspérités, des asymétries”, explique le designer.
reste totalement libre, sa formation de designer lui permet de comprendre la rigueur qu’imposent l’industrie et la réalité de la production. Ses projets sont toujours basés sur une conscience de la fonction combinée à une dimension poétique et instinctive. Pour cette collection, Ferréol a commencé par faire des essais de texture dans son atelier puis à fabriquer des prototypes luimême. “Je façonne les pièces à la main, elles ont donc inévitablement des défauts, des aspérités, des asymétries”, expliquet-il. Ses objets naissent d’une utilité, mais pas seulement, ils donnent sens au toucher. Les prototypes ont ensuite été moulés pour être produits à grande échelle. L’usine possède un savoirfaire de pointe dans la fabrication des
moules, il a donc été possible de recréer à l’identique les pièces originelles de Ferréol Babin. “Ce que j’ai initialement créé dans mon atelier est retranscrit dans cette collection, l’objet premier n’est pas dénaturé”, poursuit le designer. En optant pour une porcelaine blanche et noire, il mise sur l’intemporalité de ces pièces, considérant que la texture et le relief leur donnaient déjà une identité. La force de la collection “ILY” réside dans cette impulsion artisanale reproduite de manière industrielle et dont Revol fait l’éloge. – texte : marie farman photos : adel fecih revol1768.com / @revol.porcelaine ferreolbabin.fr / @ferreol_babin
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Photo : Adel Fecih
D’abord façonnés à la main dans l’atelier du designer, les prototypes de la collection “YLI” ont ensuite été moulés à l’usine. Chaque pièce a ainsi conservé ses effets de texture et sa singularité.
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Photo : Simon Heger Knudsen
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LE STYLE SCANDI-ZEN DE MALENE ET NIKOLAJ TEXTE : MURIEL FRANÇOISE – PHOTOS : SIMON HEGER KNUDSEN
— Dans un jardin de Copenhague, l’architecte Malene Hvidt et le designer Nikolaj Lorentz Mentze ont uni leurs sensibilités artistiques pour faire d’une petite maison un lieu de vie serein pour leur famille. Modelée par les rituels du quotidien, celle-ci n’accueille que l’essentiel pour mieux s’ouvrir à la nature alentour. —
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Photo : Simon Heger Knudsen
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Avec l’arrivée de leur fils Eli il y a trois ans, l’envie de vivre dans le quartier tranquille de Frederiksberg, à Copenhague, résonnait avec force pour Malene Hvidt et Nikolaj Lorentz Mentze. Ils n’hésitent donc pas lorsqu’une maison de 75 m2 s’offre à eux. Bâtie en 1981, elle n’a aucun charme particulier, mais sa localisation est idyllique : “Elle se trouve dans un coin de verdure au milieu de villas. Les nombreux oiseaux qui le colonisent en font une petite oasis. À l’intérieur, on oublie presque
que l’on se trouve en ville”, explique Malene. L’architecte du bureau Spacon & X et le designer du Studio 0405 notent d’emblée une disposition des pièces intéressante à exploiter. Plutôt que de faire table rase du passé, ils choisissent de miser sur les points forts de la bâtisse pour nouer une relation personnelle avec celle-ci, reflet de leurs valeurs et de leurs habitudes de vie. L’ouverture des façades avant et arrière de la maison, grâce à de grandes portes80
fenêtres aux châssis de chêne, s’impose comme une évidence pour connecter l’intérieur à l’extérieur et apporter de nouvelles perspectives. Pour renforcer le lien avec la nature, des pierres brutes semblables à celles des cours végétalisées de part et d’autre de l’habitation sont posées entre la cuisine et le séjour. Et le sol et les murs de la salle de bains, qui rappelle les sources thermales japonaises, sont habillés de galets gris des côtes suédoises. “Nous venons tous deux
Photo : Simon Heger Knudsen
Autour de la table en chêne conçue par Nikolaj pour Fora Projects, chaises d’Olavi Hänninen. La bibliothèque en orme est inspirée de l’œuvre de Pierre Chapo. Lampes d’Isamu Noguchi.
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Photo : Simon Heger Knudsen
Les nouvelles assises “Symmetry” et la table basse dessinées par Nikolaj sont mises à l’essai dans le salon. Tabouret de Charlotte Perriand et modèle vintage finlandais. Lampe d’Isamu Noguchi.
L’OUVERTURE DES FAÇADES AVANT ET ARRIÈRE DE LA MAISON, GRÂCE À DE GRANDES PORTES-FENÊTRES AUX CHÂSSIS DE CHÊNE, S’IMPOSE COMME UNE ÉVIDENCE POUR CONNECTER L’INTÉRIEUR À L’EXTÉRIEUR ET APPORTER DE NOUVELLES PERSPECTIVES.
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Photo : Simon xxx Heger Knudsen
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La nouvelle cheminée en briques blanches du salon a été complétée d’un banc en hommage au travail de l’architecte Halldor Gunnløgsson qui a construit la maison d’enfance de Malene. Lampe d’Isamu Noguchi, tabouret de Charlotte Perriand et vase en verre soufflé Studio 0405.
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de familles d’artistes, qui ont toujours porté énormément d’attention à la matière et à l’origine des choses. Cet héritage a influencé nos choix tout au long de notre vie. Il en va de même pour la maison que nous partageons où tout a été sélectionné avec soin et a trouvé sa place grâce à ses qualités intrinsèques, ou a été conçu pour répondre à une fonction ou un rituel du quotidien.” Fille d’architecte et petite-fille de l’architecte et designer Peter Hvidt, Malene est restée nostalgique de sa maison d’enfance
dessinée par Halldor Gunnløgsson dans les années 1970. Le banc de brique dans le prolongement de la cheminée du salon est d’ailleurs un hommage à l’œuvre du maître moderniste. Dans cet espace épuré, des meubles en bois, vintage ou réfléchis à deux, composent un intérieur chaleureux, véritable ode à l’artisanat. L’intérieur familial sert d’ailleurs de champ d’expérimentation à Nikolaj qui compte à son portfolio plusieurs pièces pour les 84
labels danois Frama et Fora Projects dont il est le cofondateur. “Nous y testons nos produits en nous efforçant de parvenir à l’équilibre idéal entre le toucher, l’esthétique et la fonction, et de cerner ce qui fait d’un lieu une maison.” Qu’il s’agisse d’une bibliothèque, d’une chaise ou d’un verre, chaque chose est ici pour accompagner un geste ou une intention de plaisir. Ce souci, qui se sent partout, contribue au bien-être de la famille. Si Malene et Nikolaj songent à complé-
Photo : Simon Heger Knudsen
QU’IL S’AGISSE D’UNE BIBLIOTHÈQUE, D’UNE CHAISE OU D’UN VERRE, CHAQUE CHOSE EST ICI POUR ACCOMPAGNER UN GESTE OU UNE INTENTION DE PLAISIR. CE SOUCI, QUI SE SENT PARTOUT, CONTRIBUE AU BIEN-ÊTRE DE LA FAMILLE.
Photo : Simon Heger Knudsen
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ter les lieux d’une deuxième chambre et d’une salle à manger, ils profitent entre-temps pleinement de leur nouveau cadre de vie : “Nous apprécions en particulier de pouvoir assister au défilé des saisons de notre fenêtre. Chaque jour, nous avons l’impression d’avoir une nouvelle photo au mur”, observe Malene. – spaconandx.com / @spaconandx studio0405.com / @studio0405 foraprojects.com / @fora_projects
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Dans la salle de bains, au pied du bassin en cèdre, tabouret “AML” de Frama. Page de gauche, table d’appoint en chêne massif de Fora Projects, lampe en laiton signée FOS, bouteille et verre “0405” de Frama.
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Photo : Karel Balas
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LE GESTE ARCHITECTURAL DE FEDERICO MASOTTO TEXTE : LAURINE ABRIEU – PHOTOS : KAREL BALAS
Photo : Karel Balas
— À Paris, l’architecte Federico Masotto signe la métamorphose intérieure d’une maison de ville des années 1920. En résulte un décor aux collaborations artisanales et artistiques prolifiques, fruit d’un dialogue libre et curieux entre Federico et la maîtresse des lieux. —
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pense que la façon d’occuper l’espace intérieur privatif est intimement liée à la personne, donc quand j’écris un lieu, j’ai plus d’inclination à raconter des histoires via les éléments architecturaux que par les objets. Je trouve aussi qu’un intérieur est toujours le produit de choses qui se construisent au fil du temps et de l’histoire des gens, cela n’est jamais complètement terminé. En revanche, j’adorerais faire un hôtel. Raconter des histoires à des hôtes de passage… J’y pressens une autre liberté dont je serais très excité de m’emparer.” À bon entendeur. Lorsqu’il découvre la maison, le projet de la propriétaire est au point mort. Les espaces ne sont pas grands, mais pourvus d’importantes hauteurs sous plafond et de vues traversantes compliquées à
gérer. Le rez-de-chaussée est paré de boiseries très foncées et, pour ne rien gâcher, une profonde reprise structurelle de la bâtisse s’impose… Federico prend le parti de restructurer complètement les espaces des trois étages, en mettant les pièces en communication par de grandes ouvertures. Il redessine les arches existantes pour les faire davantage correspondre à celles de la façade et en crée une nouvelle en projection de la fenêtre principale sur le bureau. Il traite l’acoustique, dessine tous les équipements et le mobilier – la cuisine, le dressing, la banquette du salon et la bibliothèque, les portes, les mainscourantes et les poignées… Précis et jusqu’au-boutiste.
L’artiste Kalou Dubus a habillé la colonne du rez-dechaussée d’une œuvre en céramique exclusivement créée pour l’espace. Page de droite, en bois, la table de salle à manger a été réalisée par l’artiste Arnold Goron pour la maîtresse des lieux. Chaises d’Eero Aarnio. Au plafond, Federico a dessiné un jeu graphique pour encastrer une série de luminaires en verre de Murano.
Photo : Karel Balas
C’est une maison de ville à la façade protégée, plantée dans l’une des plus charmantes avenues de la capitale. Construite en 1927 par un architecte belge dont on ne connaît pas grandchose, la demeure se révèle mystérieuse. Un défi de taille dont Federico Masotto s’est emparé avec brio. Après dix ans chez Jean Nouvel à suivre des projets urbains, l’Italien a changé d’échelle en 2001 pour œuvrer dans l’univers de l’architecture intérieure à Paris, jonglant entre projets résidentiels et aménagements de boutiques, bureaux ou restaurants. Le décor du délicieux Cuisine (Paris 9e), c’est lui. De son travail, il émane une dimension plus architecturale que décorative. C’est lui qui le dit. “Je
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Photo : Karel Balas
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Dans l’entrée, auvent en fibre de verre réalisé par Géraud De Bizien. Banquette dessinée par Federico et tapissée d’un tissu Kvadrat/Raf Simons. Au mur, néon “Ifafa V” de Bertrand Lavier (galerie Kamel Mennour). Applique de Paolo Venini (galerie Fabio & Davide Novello). Tables basses d’Arnold Goron. Lampe de table de Gino Sarfatti.
Photo : Karel Balas
Rigueur et détails tout en finesse pour les gardecorps dessinés par Federico.
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“POUR COMPENSER LA SOBRIÉTÉ DU DESSIN DE LA PARTIE ARCHITECTURALE, IL FALLAIT APPORTER DE LA MODERNITÉ ET UN JEU GRAPHIQUE PAR LA DÉCORATION ET LES ŒUVRES D’ART.” “La maison est dotée d’une très jolie facade, explique Federico, mais, à l’intérieur, on se retrouvait vide de cette mémoire, que j’ai travaillée à non pas recréer maisévoquerpar l’usage de matériaux particuliers, la maîtrise d’une certaine volumétrie et la présence d’objets de masse, comme le bloc en travertin de l’entrée et les sols en terrazzo aux tonalités sobres, composé de travertin, matériaulargement utilisé dans les années 1920-1930.Ces éléments architecturaux m’ont permisdecommencer à raconter l’histoire de cet intérieur.” Il se dit timide, mais on comprend discret et attentif. Son univers ne cesse de dialoguer avec celui de la propriétaire, donnant lieu à des collaborations artistiques et artisanales d’exception. “La passion apporte une plus-value dans l’échange. Avec elle, on peut se confronter
à des problématiques pour aller plus loin”, enchaîne Federico. Ici, le travail de marbre et des sols en terrazzo a été réalisé par l’entreprise italienne Morseletto, qui a toujours collaboré avec de grands architectes,dontScarpa,maîtreàpenser de Federico, aux côtés d’Aalto, Albini ou encore Ponti; les vitrages ont était faits par les ateliers Barrois, qui travaillent avec le monde entier depuis l’Auvergne; des staffeurs sont venus façonner les courbes, les moulures et les arrondis de la maison créés par l’architecte. “Pour compenser la sobriété du dessin de la partie architecturale, il fallait apporter de la modernité et un jeu graphique par la décoration et les œuvres d’art”, complète Federico, chez qui frissonne une jolie fantaisie. Et les artistes Kalou Dubus et 93
Arnold Goron ont accepté avec enthousiasme de participer à cette aventure. “Très éclectique, je ne suis pas maniaque d’une époque particulière. J’aime être surpris, que cela soit dans mes voyages, dans mes rencontres, par des associations inattendues, et c’est ce que je propose dans mes projets, avec subtilité. Ce ne sont pas des éléments choc à première vue mais ils accompagnent l’histoire du lieu et la façon de l’habiter. Juste un petit décalage, un élément grinçant, une note presque fausse, qui fait passer le projet dans une autre dimension. Je suis sensible à des choses très diverses et j’ai envie de composer avec les différences de mes clients. Pour moi, la curiosité est primordiale.” – federicomasotto.com @federicomasotto_architecte
Photo : Karel Balas
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Dans la salle de bains, les murs et la baignoire sont recouverts d’un carrelage Raven. Au sol, dalles de marbre Laboratorio Morseletto. Page de gauche, patchwork de coussins de la marque Ikou Tschüss et tapis fait main J.D. Staron. Télévision “The Serif” de Samsung. Lampadaire de Mario Bellini.
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Page suivante, parquet et console en pin de l’Oregon (Dinesen). Poignée, Atelier Bonomi Milano.
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L’ESPACE INCARNÉ DE CHARLOTTE TAYLOR TEXTE : JUSTINE VILLAIN – PHOTOS : THEA SNEVE LØVSTAD
— À 27 ans, Charlotte Taylor fait partie d’une nouvelle génération de créatifs qui érigent le dessin numérique au rang d’art. En collaborant avec d’autres talents, elle conçoit des lieux de vie utopiques qui brouillent la frontière entre les mondes réels et fantasmés. Dans la vraie vie, à Londres, elle s’est façonné un repaire où dialoguent créations design et objets sculpturaux. —
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Photo : Thea Sneve Løvstad
Photo : Thea Sneve Løvstad
Autour de la table, chaises en métal de Mario Botta et assise en bois provenant d’un antiquaire du comté de Suffolk, en Angleterre. Page de droite, puzzles 3D vintage et fauteuil “Saratoga” de Lella et Massimo Vignelli.
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Photos : Thea Sneve Løvstad
CHARLOTTE PUISE SON INSPIRATION DANS LES INTÉRIEURS DES ANNÉES 1970 À 1990 : “DES COULEURS AUX MATÉRIAUX, J’AIME L’AUDACE DE CETTE ÉPOQUE.”
Diplômée du Chelsea College of Art à Londres, la jeune artiste anglaise s’est fait connaître grâce à ses illustrations pastel mêlant architecture et design. Aujourd’hui, elle travaille essentiellement le rendering, ou rendu photoréaliste pour créer des espaces intangibles fantasmagoriques qu’elle poste quasi quotidiennement sur son compte Instagram @maison_de_sable (240000 abonnés), également devenu un studio créatif. “J’ai ouvert ce compte pour partager mes rendus 3D, mes inspirations et aujourd’hui mes commandes”, éclaire Charlotte. Car cette page s’est rapidement imposée comme
la vitrine de son art… numérique! “J’ai beaucoup d’idées et d’envies et ce procédé me donne une liberté créative incomparable. Je collabore avec des gens extrêmement talentueux et, en seulement quelques semaines, nous sommes en mesure d’imaginer des maisons entières – agencement et meubles compris”, commente la jeune artiste. Non conventionnelle, son approche de l’architecture séduit les marques de tous bords, et notamment des clients français à l’instar du chausseur Jonak et du créateur de meubles Kann Design. Charlotte puise son inspiration dans les intérieurs des années 1970 à 1990 : “Des couleurs aux 101
matériaux, j’aime l’audace de cette époque. Je suis aussi passionnée par le mouvement italien Design radical.” De retour dans notre dimension, c’est dans un quartier populaire de Londres, à Hackney, qu’elle a emménagé avec sa compagne française Elodie il y a deux ans et demi. “Tout ce dont on a besoin se trouve ici : nos restaurants et bars préférés, tout est praticable à pied. Nos amis habitent à côté et l’ambiance y est sympa.” Le logement de 95 mètres carrés situé au 2e étage comprend un salon, une chambre et une mezzanine qui sert de studio et de débarras. L’espace est baigné de lumière,
Photo : Thea Sneve Løvstad
Au salon, la table basse géométrique “Metafora” de Lella et Massimo Vignelli pour Martinelli Luce trône en pièce maîtresse, tandis que le fauteuil “Puffy” de Faye Toogood pour Hem invite à la détente.
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une aubaine dans la ville où la météo est souvent “cafardeuse”. Un cocon qu’elles ont pris le temps d’aménager avec le plus grand soin, et qu’elles partagent avec deux chats, Dante et Wolfgang, adoptés pendant le premier confinement. “Je voulais choisir chacun des meubles et objets et non me contenter de meubler l’espace pour le rendre fonctionnel”, précise l’artiste. Et il aura fallu près d’un an pour agencer et trouver les pièces fortes qui les accompagneront toute une vie. C’est le cas de la table basse “Metafora” de Lella et Massimo Vignelli pour Martinelli Luce. De loin l’objet fétiche
de Charlotte : “Elle était sur ma wishlist depuis cinq à dix ans. J’avais l’habitude de la glisser dans tous mes travaux tellement elle m’obsédait”, s’amuse celle qui nous confie être attirée par les objets sculpturaux et “bizarreries” en tous genres dénichés sur eBay. Et l’appartement en est truffé. À tel point que l’on pourrait se croire dans une galerie : collection de vases en bois et en céramique, bougeoirs intrigants habitent l’espace et coexistent avec des pièces de design (fauteuil “Puffy” de Faye Toogood, lampe Harvey Guzzini) et sa collection de magazines The World of Interiors. “Je cherche à faire 104
matcher les objets. C’est le cas des chaises de la salle à manger qui ne viennent pas du même endroit, ni de la même époque mais peuvent entrer en conversation tant elles se complètent.” En ce moment, Charlotte Taylor travaille sur deux projets mêlant design et architecture d’intérieure : la rénovation d’une lamia dans les Pouilles et un chantier top secret aux États-Unis. Cette nouvelle étape est un point de bascule dans la carrière de l’artiste. Celui qui la fera passer du rêve à réalité. – studiocharlottetaylor.com / @charlottetaylr
Photos : Thea Sneve Løvstad
COLLECTION DE VASES EN BOIS ET EN CÉRAMIQUE, BOUGEOIRS INTRIGANTS HABITENT L’ESPACE ET COEXISTENT AVEC DES PIÈCES DE DESIGN.
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Photo : Thea Sneve Løvstad
Dans le bureau de Charlotte, situé à 5 minutes à vélo de son appartement, la chaise “Triangolo” de Frama en acier rehausse l’atmosphère tout bois. Tabouret et chaise chinés.
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LE BUNGALOW WABI-SABI DE LAUREN PISCIONE TEXTE : KARINE MONIÉ – PHOTOS : MICHAEL P.H. CLIFFORD
— La jeune fondatrice new-yorkaise du studio de design d’intérieur LP Creative a trouvé sa place dans une cabane californienne plein de charme. Chaque recoin de cette petite maison révèle un entremêlement de styles qui reflète son esprit audacieux. —
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Les meubles en contreplaqué de la cuisine ont été faits sur mesure. Au mur, poissons tissés de Nickey Kehoe.
À Los Angeles, Lauren Piscione a été séduite par le quartier tendance de Silver Lake, comparé souvent à Brooklyn d’où elle vient. “J’adore ici les petits magasins indépendants, les créatifs qui parcourent les rues et le sens de la communauté”, confiet-elle. Après des mois de recherche, la jeune designer d’intérieur jette son dévolu sur une petite maison violette qui se découvre en haut d’une série de marches menant à un environnement calme entouré de verdure, en pleine ville. À peine entrée à l’intérieur, les plafonds voûtés en bois finissent de convaincre Lauren. “Je n’étais pas vraiment sûre de ce que je cherchais mais je savais que ce serait évident au moment de
le trouver”, se souvient-elle. “Ce bungalow, qui donne l’impression d’une cabane dans les arbres, avait tant de caractère que cela m’a tout de suite inspirée.” Le patio invite à entrer dans le salon où deux grandes portes s’ouvrent vers un deuxième espace extérieur : une terrasse, idéale pour voir le coucher de soleil, faire du yoga, peindre, écouter de la musique ou tout simplement observer le ciel. En tant que décoratrice, Lauren – qui vit ici avec son petit-ami et leur chienne Jennifer – souhaite bien sûr s’approprier les lieux et décide alors de peindre certains murs avec une finition façon ciment, en plus de repenser les meubles de la cuisine et de la salle de bains en 108
s’inspirant du travail de Donald Judd. Connectée au salon, la petite cuisine fait également désormais office de studio pour la jeune créatrice qui y conserve ses échantillons de matériaux. Se découvre ensuite la salle de bains, suivie de la chambre paisible, toute de vert vêtue, avec sa cheminée d’origine qui crée une atmosphère accueillante et singulière. “J’aime dessiner et imaginer mes espaces dans l’esprit wabi-sabi. Rien ne doit forcément s’accorder mais finalement tout va bien ensemble”, dit Lauren. “Ici, j’ai tout simplement inclus des choses que j’aime et qui ont du sens pour moi.” Pour les couleurs, les tons végétaux – tels que le
Photo : Michael P.H. Clifford
Page de droite, la suspension de Shoppe Amber Interiors éclaire le coin repas décoré de coussins de Nickey Kehoe, d’un vase Ikebana vintage de CounterSpace et de pièces en céramique de Raina J. Lee.
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Une œuvre abstraite de Sam Kupiec prend place audessus des étagères trouvées chez Counter-Space. Les vases en céramique sont de Georgie Wass Designs. Page de droite, au mur, une pièce de Taylor Kibby côtoie une œuvre de Hannah Polskin et une lampe de Lightsong Exchange. Au pied du portelivres de Mario Milana, une lanterne en papier de Noguchi. La chaise “Bell” de Sam Klemick fait face à une table basse de Minjae Kim posée sur un tapis touareg chiné sur Etsy.
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Dans la salle de bains, le meuble a été fait sur mesure. Serviette de bain Baina et bougie parfumée Flamingo Estate.
Photos : Michael P.H. Clifford
Page de droite, le lit RH et le linge de lit Cultiver invitent à se reposer dans une ambiance paisible. Tabourets Lumber Club Marfa.
vert olive, le jaune moutarde, l’indigo ou le rouille – prédominent, tandis que les matériaux s’inspirent eux aussi de la nature, en particulier avec la présence du bois qui apporte chaleur et texture aux espaces. “Je choisis des matières qui m’apportent du bien-être, comme le lin, le velours et les textiles japonais ; rien de trop précieux”, indique Lauren. “J’adore voir les marques du temps sur mon mobilier.” Différents styles et une variété de textures s’entremêlent alors dans chaque recoin de la maison. Le résultat éclectique et unique concorde parfaitement avec la personnalité et la vision du design de Lauren. “Je me vois comme
une raconteuse d’histoires et je trouve que tous les éléments qui sont chez moi vont dans ce sens : ils racontent d’où ils viennent, qui les a faits, comment ils ont été faits et pourquoi. Chaque objet est unique et célèbre des moments de ma vie”, ditelle. Dans le salon, la table basse a été spécialement créée par Minjae Kim pour la maîtresse des lieux qui lui a laissé carte blanche. La chaise “Bell” de Sam Klemick (Otherside Objects) a été personnalisée à la demande de Lauren qui souhaitait la voir recouverte des tissus japonais vintage qu’elle a collectionnés au fil du temps. Une œuvre de Hannah Polskin (la meilleure amie de Lauren), un tapis touareg, ainsi que 113
des pièces en céramique de Georgie Wass, Raina J. Lee et Simone BodmerTurner, entre autres, habitent les lieux. “La plupart des pièces ont été créées par des artistes et artisans que j’ai la chance d’avoir comme amis. Je me sens en bonne compagnie chez moi, entourée de créateurs inspirants”, dit Lauren, qui a su donner vie à un concentré d’influences vintage et contemporaines, mêlées de touches japonaises, dans un savant mélange des genres caractérisé à la fois par une tension et un équilibre. Le résultat se résume en deux mots : “imparfaitement parfait”, conclut la designer d’intérieur. – lpcreative.com / @thelpcreative
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Au jardin, chaises “Sof-Tech” de David Rowland pour Thonet (CounterSpace) et lampe vintage. Nappe Heather Taylor Home. Page de droite, paire de fauteuils pliants Lawn Chair USA autour d’une table vintage trouvée sur Amsterdam Modern.
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LE REPAIRE ESSENTIEL DE LUDWIG GODEFROY TEXTE : KARINE MONIÉ – PHOTOS : PAUL RAESIDE
— Installé au Mexique depuis quatorze ans, l’architecte français a créé un refuge de béton au sud de la ville tentaculaire de Mexico pour vivre et travailler aux côtés de sa femme photographe et de leur fille de 3 ans. —
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Le grand saut, Ludwig Godefroy l’a fait en 2007. À cette époque, le Français travaille à Rotterdam, au sein de l’agence OMA dirigée par Rem Koolhaas. Mais ses envies d’ailleurs ne s’arrêtent pas là. “Je souhaitais vivre en Amérique latine pour apprendre l’espagnol et j’ai eu l’opportunité de rejoindre l’agence de l’architecte Tatiana Bilbao”, se souvient-il. “Je pensais rester à Mexico un an ou deux.” Mais c’était sans compter sur le pouvoir d’attraction de la fascinante métropole au bouillonnement créatif incessant. Depuis son arrivée, Ludwig Godefroy s’est fait un nom dans le monde de l’architecture. À la tête de son studio éponyme, il se plaît à dessiner et à donner
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corps à des réalisations réunissant les influences de ses deux pays, la France et le Mexique donc, à travers le concept de “concordance”. “J’explore au travers de mes projets cette correspondance entre les bunkers de ma Normandie natale, d’une part, et les pyramides et temples préhispaniques mexicains, d’autre part”, confiet-il. “Je me penche sur le monolithisme et la monomatérialité de ces types d’architecture, tous deux aveugles et basés sur le thème élémentaire qu’est le mur. Cependant, c’est le temps et leur condition de ruine qui les unit. La ruine, cette contradiction du temps disparu au travers de la persistance, dans notre présent, d’un élément du passé en état de recomposition.”
Cette philosophie apparaît pleinement dans le nouveau lieu de vie de Ludwig, qu’il partage avec son épouse, la photographe Fabiola Zamora – fondatrice et rédactrice en chef du magazine 192 –, et leur fille de 3 ans, Oona. Alors que la petite famille vit dans un appartement du quartier branché de la Roma Norte, la possibilité d’acquérir une maison avec jardin dans la zone résidentielle de San Jerónimo, au sud de la ville, se présente pendant le confinement de mars 2020. “Nous avons brièvement réfléchi pour finalement décider de faire de cette maison notre projet de pandémie”, se souvient Ludwig qui se lance alors dans une rénovation complète terminée en mai 2021.
L’ARCHITECTE SE PLAÎT À DESSINER ET À DONNER CORPS À DES RÉALISATIONS RÉUNISSANT LES INFLUENCES DE SES DEUX PAYS, LA FRANCE ET LE MEXIQUE.
L’architecte Ludwig Godefroy et sa compagne, la photographe Fabiola Zamora.
Photo : Paul Raeside
Page de gauche, le mur en pierre de Tezontle s’accorde avec une pièce en rotin de la marque txt.ure. Artisanat mexicain, textiles et objets de Sandra Weil contribuent à créer une atmosphère authentique.
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Sur la grande table où Ludwig travaille et réalise ses maquettes, une photo de Gonzalo Morales prend place sur la partie gauche. À droite, la grande lampe sur pied a été conçue par l’architecte.
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Des chaises chinées dans la ville de San Miguel de Allende entourent la table en béton dessinée par Ludwig et qui fait partie intégrante de l’architecture.
Photo : Paul Raeside
Page de droite, la porte d’entrée de la maison, vitrée toute hauteur, baigne l’espace de lumière.
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La salle d’eau a été réalisée en béton ciré du sol au plafond, renforçant ainsi l’harmonie visuelle.
Photo : Paul Raeside
Page de droite, dans la chambre, la table est de Ludwig et la photo de Fabiola. Le poncho est de Cynthia Buttenkelpper.
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Photo : Paul Raeside
“LE BÉTON EXPRIME UNE MÉMOIRE DE LA CONSTRUCTION, IL PORTE EN LUI ET POUR LE RESTE DE SA VIE L’EXPRESSION DE SA MISE EN ŒUVRE ET LA MAIN DU MAÇON QUI A TRAVAILLÉ.”
Organisée sur trois niveaux, la propriété loge également le bureau de l’architecte, au rez-de-chaussée, lui permettant ainsi de profiter au mieux de ce nouveau repaire sculpté en accord avec sa vision de “l’utilisation du temps comme matière, en opposition à l’idée du tout-jetable de nos sociétés contemporaines”. Ici, Ludwig a fait disparaître toutes les finitions (comme le carrelage et les enduits) pour donner vie à un grand espace, façon loft, épuré et baigné de lumière tout au long de la journée. Côté matériaux, ils sont massifs et font également office de couleur. “J’aiutilisépresque exclusivement du béton et de la pierre volcanique rouge, le tezontle, que j’avais en tête
depuislongtemps,pourcréerdelatexturesur un mur”, explique l’architecte. “Le béton est mon matériau de prédilection car il est simpleethonnête.J’aimelefaitqu’ilexprime une mémoire de la construction, il porte en lui et pour le reste de sa vie l’expression de sa mise en œuvre et la main du maçon qui a travaillé. En ce sens, il est unique à chaque fois.” Du bois a été introduit à l’étage sur le sol des chambres pour le confort d’y marcherpiedsnus.“C’estunemaisonsans superflu”, ajoute Ludwig. Pour le mobilier, tout en béton aussi, l’architecte l’a entièrement conçu lui même, du bureau à la sublime table de repas, en passant par le canapé, les étagères, le lavabo, la douche et la cuisine. 127
Y vivant à son rythme, sans se soucier du reste du monde et entouré de sa famille et de ses projets, Ludwig voit cette maison comme son terrain de jeu, “une maquette géante à échelle 1 pour expérimenter, un chantier permanent qui évolue avec moi au fur et à mesure qu’évolue mon architecture”, décrit-il. “Je ne cherche jamais à créer du beau. Je ne sais pas si cette maison est belle ou pas, peu importe, c’est relatif à chacun. La seule chose que je sais, c’est qu’elle a une atmosphère; il est important de créer cela en architecture.” – ludwiggodefroy.com @ludwiggodefroy
Photo : Karel Balas
IV
É VA S I O N
ÉVASION
OPENING
Temple du soleil. — C’est à Puerto Escondido au Mexique, face à l’océan Pacifique et enfoui dans la végétation luxuriante, que Grupo Habita vient d’ouvrir le dernier-né de sa collection ultra tendance de boutiques-hôtels. L’hôtel Terrestre, qui réunit seulement 14 villas et fonctionne grâce à l’énergie solaire, est un sanctuaire invitant à se reconnecter avec la nature dans une atmosphère où sophistication rime avec simplicité. —
Photo : Fabian Martínez - Courtesy Grupo Habita
texte : karine monié – photos : fabian martínez
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Photo : Fabian Martínez - Courtesy Grupo Habita
Photos : Fabian Martínez - Courtesy Grupo Habita
ÉVASION OPENING
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Photo : Fabian Martínez - Courtesy Grupo Habita
ÉVASION
Dès les premiers instants sur les lieux, la description de l’hôtel Terrestre, qui affiche être 100 % local et connecté aux éléments, prend tout son sens. Ouvert en février dernier, l’établissement place la relaxation au premier plan grâce à son décor paisible en harmonie avec la nature. Les sept bâtiments conçus par l’architecte Alberto Kalach et son équipe de Taller de Arquitectura X (TAX) offrent un panorama exceptionnel sur la faune et la flore. Ici, c’est une ode à la vie à l’air libre qui se fait sentir. Construit avec des matériaux locaux et selon des techniques permettant de rafraîchir les espaces de façon naturelle – sans recourir à l’air conditionné –, l’hôtel réunit 14 villas interconnectées. Chacune dispose de sa piscine privée, d’une douche extérieure et d’une terrasse avec vue sur les montagnes. La brique, le bois, le béton et l’argile créent une connexion immédiate et permanente avec la terre qui a également inspiré la palette de couleurs. Le studio de design d’intérieur RB + K et le Mexicain Oscar Hagerman, à l’origine du mobilier, ont également contribué à donner corps à ce projet aux accents brutalistes qui a mis trois ans pour voir le jour sous la houlette des cofondateurs de Grupo Habita, Carlos Couturier et Moisés Micha. Tout aussi importants que l’intérieur, le jardin, la zone dédiée au bien-être (comprenant une piscine circulaire, un couloir de nage et un Spa hexagonal), le restaurant à ciel ouvert rendant hommage à la tradition culinaire mexicaine et le beach club complètent l’expérience. Idéalement situé près du centre culturel Casa Wabi dessiné par Tadao Ando – qui abrite des résidences d’artistes et des expositions –, d’un atelier de céramique doté d’une cheminée de 22 mètres de haut réalisée par Alberto Kalach et d’une installation d’art de l’artiste mexicain Bosco Sodi, l’hôtel Terrestre invite à découvrir de plus près la magie de Puerto Escondido, cette petite ville discrète et adorée des amateurs de surf, en passe de devenir une destination à part entière. –
OPENING
Le mobilier aux lignes épurées a été réalisé sur mesure par le designer mexicain Oscar Hagerman.
terrestrehotel.com / @terrestrehotel grupohabita.mx / @grupohabita
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Photo : Adel xxx Fecih
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Welcome à Berlin. — Un seul week-end ne suffit pas pour explorer Berlin. La ville se découvre petit à petit, à force d’y revenir, captivés par son identité plurielle. Cosmopolite et vibrante, cette capitale tentaculaire cultive pourtant une réelle douceur de vivre. Les parcs omniprésents et la richesse de sa scène créative n’y sont sans doute pas étrangers et l’on se plaît à sillonner ses rues et les bords de la Spree, en famille ou en solo. De la mode à la gastronomie en passant par l’artisanat, cap sur une destination inépuisable. — texte : hélène rocco et adel fecih – photos : adel fecih
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Photo : Adel Fecih
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CITY GUIDE
MANGER
BOIRE
Annelies En bordure du parc Görlitzer, dans le quartier bohème de Kreuzberg, Annelies est un charmant café avec terrasse. Sa carte marie saveurs locales et créativité, à l’image d’un plat d’asperges à l’ail des ours coiffées d’un jaune d’œuf fumé, ou d’un mémorable toast mêlant mousse de foie de volaille et confiture de myrtille. En cas de soif, la limonade à la fleur de sureau tombe à pic. –
Ora On croirait pénétrer chez un apothicaire : il s’agit en réalité de l’une des adresses les plus en vue de la ville. Sur le comptoir des années 1860 défilent des cocktails enivrants et des plats bien troussés tels que des arancini nduja (saucisse calabraise épicée), gnocchi aux petits pois et pâtés campagnards. –
Görlitzer Straße 68, 10997 Berlin
La cheffe Julia Heifer dans son restaurant LOK6, installé dans une ancienne gare de triage berlinoise. Page de gauche, le concept store The Store X se cache au rezde-chaussée de l’hôtel Soho House. On y trouve une sélection pointue de vêtements, livres, musique et même une cantine où se tiennent des expos.
LOK6 Après une première vie en tant que styliste, la cheffe Julia Heifer a ouvert une table bistronomique devenue incontournable. Du sol au plafond, le rouge brique domine dans ce décor conçu par le duo d’architectes Nadine Göpfert et Till Wiedeck. Dans l’assiette, les pickles à l’aïoli de piment habanero, les poireaux au beurre de camomille et les champignons au safran nous subjuguent : carton plein. – Am Lokdepot 6, 10965 Berlin
Sofi C’est dans une ruelle cachée que le célèbre chef danois Frederik Bille Brahe (Atelier September, Apollo Bar, Kafeteria et Apollo Kantine) a installé son premier avant-poste berlinois. Ici, on achète du pain aux céréales anciennes et on savoure à toute heure d’excellents morning buns à la cannelle, une focaccia aux orties et pecorino et bien d’autres douceurs. –
Photo : Adel Fecih
Sophienstraße 21, 10178 Berlin
Julius Face au réputé Ernst, Julius troque le menu dégustation contre des assiettes individuelles à l’accent japonais. Ainsi, une brioche au thé vert et à la verveine, une lotte séchée au miso avec chou frisé, et un sorbet de basilic aux prunes se succèdent à la carte qui change chaque semaine. Cette adresse hybride interprète également les classiques tels que le pain perdu et la brioche… sculpturale. – Gerichtstraße 31, 13347 Berlin
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Oranienplatz 14, 10999 Berlin
Jaja Dans cette cave à manger du quartier de Neukölln ne sont servis que des vins naturels, à boire sur place ou à emporter. À la tête de ce repaire chaleureux, Yulja Giese et Étienne Dodet sont là pour distiller leurs bons conseils. Et n’y allez pas seulement pour le vin, Jaja accueille régulièrement des chefs en résidence. – Weichselstraße 7, 12043 Berlin
Café Strauss Quoi de plus tranquille… qu’un cimetière ? Jouissant d’une belle terrasse, ce café singulier est installé dans une ancienne morgue. Les Berlinois en quête de calme aiment venir y boire une bière et un café ou déguster une pâtisserie maison dans une ambiance on ne peut plus paisible. – Werderscher Kirchhof, Bergmannstraße 42, 10961 Berlin
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DÉCOUVRIR Kindl – Zentrum für zeitgenössische Kunst Avant d’être un centre d’art contemporain, Kindl était une immense brasserie logée dans un bâtiment de style expressionniste et datant des années 1920. De son passé, le musée a conservé, côté café, de monumentales cuves en cuivre qui abritaient jadis de la bière. Un arrêt idéal après avoir arpenté l’une des nombreuses expositions se tenant chaque année. – Am Sudhaus 3, 12053 Berlin
Babylon Inauguré en 1929, ce cinéma indépendant se situe dans un immeuble classé, typique de l’architecture moderne allemande. Pas de crainte si vous ne maîtrisez pas la langue : l’adresse projette régulièrement des films muets accompagnés d’un orchestre en direct. Voyage dans le temps garanti. – Rosa-Luxemburg-Straße 30, 10178 Berlin
Église Saint-Canisius À deux pas du lac Lietzensee, cet édifice religieux se compose de deux cubes minimalistes. Il a été érigé entre 2000 et 2002 et récompensé du prix d’architecture de Berlin dès 2003. Joyau brutaliste, le bâtiment en béton est également habillé de bois de mélèze sur les parois de la chapelle intérieure et le clocher. À visiter dans le quartier de Charlottenburg. –
L’hôtel Soho House. Déjeuner à l’hôtel Michelberger et sa salle de restaurant. Flacons de parfum en céramique de la boutique Ryoko.
Witzlebenstraße 30, 14057 Berlin
Parc de Friedrichshain Dans un quartier ponctué de vestiges communistes et de restaurants vegan, ce vaste parc municipal (le plus ancien de la ville) abrite un cinéma en plein air, des barbecues, un mémorial datant de l’époque de la RDA et plusieurs étangs. Un point de chute parfait aux beaux jours. – 10249 Berlin
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Photo : Adel Fecih
Page de droite, de gauche à droite et de haut en bas :
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Photos : Adel Fecih
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Photo : Adel Fecih
La créatrice Maryam Keyhani dans son atelier.
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Photo : Adel Fecih
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Il faut toujours garder l’œil ouvert lorsqu’on arpente cette capitale vibrante adoptée par de nombreux artistes talentueux. 141
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Photos : Adel Fecih
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De gauche à droite et de haut en bas : Série de vases en pierre esquissés par Hsin-Ying Ho et KaiMing Tung du Yellow Nose Studio. Ensemble, Ryoko Hori et Daniel Kula ont ouvert un salon où le bien-être règne en maître. Sur les étagères de Ryoko, de jolis flacons d’apothicaire renferment des solutions à tous les maux. Rien de tel qu’un toast à la mousse de foie de volaille au café Annelies après une balade sous le soleil berlinois.
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BOUTIQUES
DORMIR
Yellow Nose Studio Hsin-Ying Ho et Kai-Ming Tung, duo de créateurs taiwanais, se sont installés à Berlin il y a quelques années. Dans leur studio immaculé du quartier de Sprengelkiez, ils dévoilent objets en céramique et mobilier : des pièces épurées qui témoignent d’un beau travail de la matière et d’un minimalisme certain. –
Michelberger Situé dans l’Est berlinois, au cœur d’un ancien bâtiment industriel, cet hôtel de caractère n’a pas pris une ride depuis son ouverture en 2004. Que l’on opte pour une chambre cosy ou une suite hideout parée de bois, constituée de nombreuses cachettes et même d’un sauna, le Michelberger offre une expérience intimiste près des quartiers bohème de Kreuzberg et de Friedrichshain. –
Lindower Straße 18, 13347 Berlin
Ryoko Fondé par le couple Ryoko Hori et Daniel Kula, ce salon dispense des soins ressourçants comme un fabuleux massage prodigué par la propriétaire. On y trouve également des parfums contenus dans de superbes flacons en céramique, des huiles essentielles ainsi que de l’artisanat nippon. Une ode au folklore japonais, aux douces effluves et au bien-être, dans un quartier qui ne cesse de se développer. – Friedelstraße 11, 12047 Berlin
Maryam Keyhani À la fois chapelière, sculptrice et designer, Maryam Keyhani incarne les mille visages de Berlin à elle seule. Il flotte dans son atelier un air de liberté teinté d’une réelle extravagance et lorsqu’on la croise par hasard en ville, c’est à sa silhouette majestueuse qu’on la reconnaît au premier coup d’œil. Ses couvre-chefs XXL et autres créations théâtrales sont à découvrir en ligne ou sur rendez-vous. – maryamkeyhani.com
Warschauer Straße 39-40, 10243 Berlin
Soho House On ne fait pas plus confidentiel que Soho House : seuls les membres du club peuvent y séjourner. Toujours estil qu’une fois montré patte blanche, ce repère arty du quartier central de Mitte séduit par son décor opulent inspiré des années 1940. Outre les 85 chambres déployées sur huit étages, cet immeuble de style Bauhaus abrite The Store X (un concept store pointu), un restaurant italien, un Spa Cowshed et un bar à cocktails au bord d’une piscine chauffée sur le toit. Kitscho-cool. – Torstraße 1, 10119 Berlin
Zoo Hotel Nichée sur l’artère commerçante la plus connue de la ville, cette adresse affiche un style volontairement provocateur, pensé par des décorateurs hollywoodiens. Foulez le tapis vert du corridor, laissez-vous surprendre par les paparazzi qui mitraillent chacun de vos passages dans l’ascenseur et embrassez un mode de vie glamour dans l’une des 144 chambres luxueuses : votre séjour n’en sera que plus mémorable. – Kurfürstendamm 25, 10719 Berlin
Y ALLER Photo : Adel Fecih
De nombreuses compagnies aériennes proposent des vols aller-retour au départ de Paris, Lyon, Bordeaux, Nice et Toulouse.
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Photo : Christophe Rihet
Un balcon sur la Méditerranée. — Adossé à la Serra de Tramuntana, cet ancien monastère du xiiie siècle est une retraite magique pour se retirer du monde sans être reclus. Son Ru est un havre enchanteur à louer en tribu, pour prendre de la hauteur et se ressourcer sur fond de bleu profond. — texte : sylvie wolff – photos : christophe rihet
Annie Grunfeld et ses deux fils ont restauré ce monastère du xiiie siècle sans dénaturer l’âme du lieu.
ADRESSE
On imagine souvent Majorque envahie par des cohortes de touristes. Mais un autre voyage est possible. Immobile et confidentiel, destiné aux amateurs de sérénité, de luxe dépouillé et de panoramas saisissants. Arrimée aux contreforts de la Serra de Tramuntana – un massif montagneux inscrit sur la Liste du patrimoine mondial de l’Unesco –, cette propriété perchée au sommet d’une colline ondulante est un éden qui invite à écouter le silence, à musarder et à rêver à d’autres horizons. Elle est située à quelques kilomètres seulement de Déià, un village bohème chic au nord-ouest de l’île, réputé pour ses nombreuses résidences d’artistes dont celle du romancier britannique Robert Graves. Pour accéder à ce joyau, il faut emprunter un chemin de terre cabossé, fes-
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tonné de murets en pierres sèches, au milieu d’oliviers et de caroubiers séculaires qui embaument l’atmosphère. Au sommet, la vue sur ces arbres millénaires dévalant jusqu’à la mer est hypnotique. Majorque déploie ici ses plus beaux atours : eaux d’un bleu azuréen qu’un simple rayon de soleil réchauffe, calanques désertes cernées de falaises dentelées, nature éblouissante déroulant son camaïeu de vert… Refuge pour voyageurs épicuriens, ce monastère cistercien aurait accueilli des moines jusqu’au xviie siècle avant de se muer en domaine agricole et d’être cédé à la famille Grunfeld à l’aube des années 1960. C’est le père, Frédéric, célèbre journaliste spécialiste de musique classique et écrivain, qui le découvre lors d’un séjour à Déià.
Photo : Christophe Rihet
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Photos : Christophe Rihet
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À peine foule-t-il le sol de cette propriété qu’il est saisi par sa noblesse. Bien que le monastère soit en ruine, car abandonné depuis plus d’un demi-siècle, Frédéric Grunfeld est alors instantanément conquis par la force tellurique de ce lieu qui offre une vue plongeante sur les eaux argentées de la Méditerranée. Il le rachète en 1964 et lui insuffle une seconde vie. Il restaure la charpente, rehausse les poutres, crée des cheminées, aménage cinq chambres et multiplie les ouvertures afin de permettre d’admirer le coucher de soleil qui embrase le paysage. Le monastère restera ainsi jusqu’à l’aube des années 2000 où Annie, sa femme, l’ouvre au public en s’improvisant maison d’hôtes. Leurs deux fils Geoffrey et Adam, respectivement architecte et entrepreneur,
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décident alors de lui donner une allure plus contemporaine tout en préservant son architecture vernaculaire et sa simplicité monacale. Ils agrandissent la terrasse, construisent une piscine panoramique qui joue les équilibristes à flanc de rocher, créent une salle à manger d’été et plusieurs espaces pour chiller devant cette vue spectaculaire ouverte sur l’horizon. “La priorité était de magnifier les extérieurs sans dénaturer l’âme des lieux. On a bien sûr conservé le pressoir à huile, l’abreuvoir et la tour de guet transformée en salon d’hiver ou encore l’âtre monumental autour duquel on aime à se retrouver”, affirme Geoffrey qui a aussi chiné ici et là des meubles typiques de Majorque, rafraîchi les dessus-delit, distillé quelques céramiques locales et notamment celles d’Annie réalisées
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dans l’atelier mitoyen. Une discipline à laquelle elle s’est formée en regardant sa mère, qui travaillait déjà la terre. Et Dora Good, une artiste réputée de Déià dont les œuvres sont exposées dans une galerie du village. Aujourd’hui, la maison se loue dans son intégralité pour des séjours de 5 nuits minimum ou des retraites de yoga et de pilates. L’hiver prochain, Annie et ses fils ont aussi l’intention d’accueillir des artistes en résidence. Pas nécessairement des céramistes mais plutôt des écrivains, des musiciens, des peintres ou des sculpteurs que le panorama ne pourra laisser indifférents. – son-ru.com / @fincasonru À partir de 1000 euros/la nuit pour 10 personnes et 5 nuits minimum.
Photo : Christophe Rihet
Photo : Christophe Rihet
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ADRESSE
Les Grunfeld ont restauré la maison en gardant les éléments qui l’inscrivent dans son histoire : la mangeoire transformée en garde-manger, l’immense cheminée métamorphosée en coin cosy, le pressoir à huile, les sols d’époque...
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ADRESSE
Photo : Christophe Rihet
Piscine panoramique en surplomb de la Grande Bleue. Page de droite, le salon d’été aménagé dans le patio du monastère Son Ru.
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Photo : Christophe Rihet
Photo : Karel Balas
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DESTINATION
Tout froid, tout Flåm. — C’est un village bordé de fjords et de forêts au centre de la Norvège qui prête son nom à la nouvelle fragrance de la maison de parfums Memo Paris. À l’occasion du lancement de Flåm, nous avons embarqué avec Clara Molloy, fondatrice de la marque et poétesse, sur les traces de cette création. — texte : justine villain – photos : karel balas
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DESTINATION
La nouvelle création Memo Paris traduit la dualité du village de Flåm, en Norvège : à la fois l’énergie magnétique et revigorante du Grand Nord et la chaleur réconfortante des foyers scandinaves.
“J’ai toujours adoré le parfum qui est mon moyen d’expression. Comme d’autres se coupent les cheveux, moi je change de parfum.” Animée par sa passion, Clara Molloy décide il y a quinze ans d’écrire un livre sur les grands nez de la parfumerie contemporaine : 22 parfumeurs encréation.Elleracontecomment,après un début de carrière à créer des magazines pour des marques, elle a opéré un switch:“C’étaitunepériodecharnièrepour la parfumerie, j’ai compris que c’était le bon momentpourlancerunemarque.Àl’époque, le défi semblait gigantesque, comme s’il fallait créer son usine… Mais, tout à coup, en voyant les nez, ça m’a semblé à portée de main. Le Bon Marché cherchait de jeunes marques, je me suis dit que c’était pour moi! J’ai pris le train en marche.” Memo Paris
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est née. Une marque qu’elle a fondée avec son mari, John, mais qui ne porte pas leur nom. Comme une troisième entité au sein du couple. Les parfums Memo évoquent la mémoire de lieux uniques, des territoires olfactifs réels ou fantasmés, que la marque prend le parti d’explorer. Le couple décide d’opérer à rebours des grandes maisons de parfumerie en misant sur des matières premières modernes de très grande qualité. Là où d’autres dépensent en égéries et en publicité. Ils engagent Alienor Massenet en tant que nez. Aujourd’hui, le postulat reste inchangé : Memo explore toujours des lieux “qui se méritent”. Alors, pour découvrir le dernier jus, direction le cœur de la Norvège, dans le minuscule village de Flåm (il ne s’étend
Photo : Karel Balas
“La Norvège est un pays intrigant, avec ses forêts qui lui confèrent un côté féerique. Ici, la nature est en force.”
Photo : Karel Balas
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que sur quelques kilomètres carrés). Un petit bourg perdu entre les montagnes et les fjords et qui sert d’embarcadère pour naviguer sur ces étendues d’eau paisibles. De Bergen, ville située sur la côte sudouest de la Norvège, il faut se rendre en train jusqu’à la station de ski Myrdal, pour ensuite embarquer à bord du train panoramique de la ligne mythique Flåmsbana. Un moyen de locomotion slow travel très apprécié de Clara : “Je suis passionnée de train, sûrement pour leur côté Wes Anderson. Je m’y sens instantanément bien, à la fois portée et en sécurité. Il n’y a rien qui puisse remplacer cela. D’ailleurs, selon une étude scientifique, on serait plus créatif dans les trains, un rapport avec la vision latérale qui libèrerait une partie du cerveau.” Ce train touristique en dehors du temps longe le
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plus long et le plus profond fjord d’Europe : le Sognefjord. Son intérieur tout en bois contraste avec les banquettes tapissées de rouge. Une parenthèse enchantée pendant laquelle les paysages hypnotiques défilent à douce allure (environ 20 km/h) jusqu’à Flåm. Par la fenêtre, des décors à couper le souffle. “La Norvège est un pays intrigant, avec ses forêts qui lui confèrent un côté féerique. Ici, la nature est en force. Et comme on travaille à faire des parfums, c’est primordial”, détaille-t-elle. La nature, justement, est le point de départ des créations Memo. Ainsi Flåm renvoie à une idée de chaud-froid : si son nom évoque le feu, le village, lui, est souvent sous la glace. Le nectar reprend cette dualité. “Côté arômes, cela consiste à marier de la fève tonka chaude et une base
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d’épices froides. Un parfum finalement assez doux sur la peau”, détaille la fondatrice, également poétesse, auteure de trois recueils1. La prochaine destination, le prochain parfum? “À force d’annuler des billets d’avion, je ne me lance plus dans des pronostics”, plaisante Clara. La pandémie a bousculé les plans de vol mais la directrice artistique reste philosophe et conclut par la devise du poète Virgile : “Sic itur ad astra (littéralement : Ainsi atteint-on les astres)… Et ça, il est possible de le faire de notre fenêtre.” De quoi se consoler avant le prochain grand départ. – memoparis.com 1. Alkaline, Suivi de Graines vagabondes, Tituli, 2015; Tempe a païa (Le temps et la paille), Cheyne, 2017; Grandirs, Cheyne, 2020.
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Photos : Karel Balas
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Photos : Karel Balas
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Photos : Karel Balas
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L’itinéraire de Clara Molloy À BERGEN Visiter le musée d’Edvard Grieg – Troldhaugen. L’ancienne maison du compositeur s’est muée en musée, salle de concert et café. Ici, en haute saison, sont donnés quotidiennement des concerts de musique de chambre. – griegmuseum.no/en
Déjeuner au marché aux poissons de Bryggen. Inscrit sur la Liste du patrimoine mondial de l’Unesco, c’est l’un des plus prisés du pays. Les étals iodés se mélangent aux tables de restaurant pour un petit déjeuner ou un déjeuner sur le pouce. Dormir à Opus XVI. Dans un bâtiment historique du centreville, cet hôtel de 65 chambres spacieuses, qui tire son nom d’une œuvre du compositeur Edvard Grieg, lui rend hommage. –
bergenbors.no/fr, barerestaurant.no
Y ALLER Vols. Aller Paris-Bergen (à partir de 79 €), retour Oslo-Paris (à partir de 67 €), avec Air France – airfrance.fr
À FLÅM Explorer le Nærøyfjord. Une croisière d’une durée de 2 à 4 heures permet de découvrir l’un des plus beaux paysages de fjords du monde : l’étroit Nærøyfjord. – norwaysbest.com
Pour se rendre à Flåm. Emprunter la ligne Bergen-Myrdal (env. 2 heures) en train, puis prendre la correspondance de la Flåmsbana. De mai à octobre, de 8 à 10 trains quotidiens parcourent la Flåmsbana, contre 4 en hiver. Ticket aller- retour : 50 euros. – Réservations sur :
À OSLO Dormir à l’hôtel Amerikalinjen. En plein centre-ville d’Oslo, ce boutiquehôtel abrite un bar à cocktails ainsi qu’un club de jazz intimiste. – amerikalinjen.com
Photo : Karel Balas
opusxvi.no
Dormir à Bergen Børs. Cet élégant hôtel bâti dans l’ancien palais de la bourse accueille le restaurant Bare (1 étoile au Michelin). –
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vy.no/en norwaysbest.com/flamsbana/flamsbana--the-flam-railway
Flåm est la destination qui a servi d’inspiration au dernier parfum de Memo Paris.
Photo : SP Pholc
— La marque suédoise Phloc propose des collections de luminaires contemporains aux lignes épurées et à l’esthétique minimaliste. Le design scandinave dans ce qu’il a de plus beau.
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OBJETS DE DÉSIR
OBJETS DE DÉSIR
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1 | Fauteuil “Buthakaa”, en aluminium, création Yann Le Coadic pour Pouenat, prix sur demande, pouenat.fr — 2 | “F-Cabinet”, en aluminium, création Morten Emil Engel pour Frama, 1749 €, framacph.com — 3 | Table d’appoint, en acier, création destroyers/builders pour Valerie Objects, 820 €, valerie-objects.com — 4 | Porte-savon “I-beam”, en aluminium, création Silo Studio pour Ensemble, 60 € env., ensemble-shop.com — 5 | Lampadaire “Apollo 180”, en aluminium, création Broberg & Ridderstråle pour Pholc, prix sur demande, pholc.se
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Photos : DR ; Peter Guenzel
Alu mignonne.
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1 | Étagère “Fracture”, en aluminium, création Trine Andersen pour Ferm Living, 119 €, fermliving.com — 2 | Lampe “TGV”, en aluminium, création Ionna Vautrin, coédition Moustache × SNCF, 295 €, moustache.fr — 3 | Applique “Be Patient”, en aluminium, création Pelle, 6150 €, édition de 10, pelledesigns.com — 4 | Armoire “Alltubes”, en aluminium, création Muller Van Severen, prix sur demande, mullervanseveren.be — 5 | Lampe à poser au sol “Cone Spinning Top”, en aluminium, création Kristina Dam Studio, 689 €, kristinadam.dk — 6 | Table basse “DVN”, en aluminium, création Pelle, à partir de 12580 €, pelledesigns.com
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1 | Lampe de table “Kyoto”, en métal, création Antonino Sciortino pour Serax, 211 €, serax.com — 2 | Table basse “Cloud”, en chêne, création Louise Liljencrantz et KFK Cabinet Makers, à partir de 7 206 €, sur theinvisiblecollection.com — 3 | Coussin “Abstrait”, en coton, 115 €, maisonsarahlavoine.com — 4 | Guéridon “Kiku”, en bois, création Frédéric Pellenq × By Charlot, 2 849 €, disponible au Bon Marché Rive Gauche et sur bycharlot.com — 5 | Veste de travail matelassé, en coton, création Bode, 1410 € env., bodenewyork.com — 6 | Quilt “Day”, en coton et lin, création Thompson Street Studio, à partir de 540 € env., thompsonstreetstudio.com
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Photos : DR
Art and patch.
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1 | Tapis “Équilibre”, en laine et soie, création Atelier Février, à partir de 1380 € par m2, sur theinvisiblecollection.com — 2 | Œuvre murale, en céramique et miroir, création Kiki Van Eijk, 2600 €, kikiandjoost.com — 3 | Chaise “Arbor”, en chêne, création Pierre Augustin Rose, prix sur demande, pierreaugustinrose.com — 4 | Table basse “Henge”, création Di Tao et Bob Dodd, à partir de 3 450 € env., objectsandideas.com — 5 | Applique “Paw 2”, création Pierre Yovanovitch, prix sur demande, pierreyovanovitch.com — 6 | Table d’appoint “Atlas Mini”, en bois, création Pierre Augustin Rose, prix sur demande, pierreaugustinrose.com — 7 | Œuvre murale “Wood Collage no.14”, en contreplaqué peint, prix sur demande, studiomariebernard.com
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1 | Théière, en céramique, création Epoca Studio by Sonia Pueche et Jaime Mato, à partir de 230 €, epocaceramic.com — 2 | Table basse “Intervalle”, en chêne, création Guillaume Delvigne pour Ligne Roset, à partir de 1622 €, ligne-roset.com — 3 | Galets tressés, de 7 à 12 cm, 20 €, cfoc.fr — 4 | Chaise “Soft Lounge”, création Thomas Bentzen pour TAKT, 599 €, taktcph.com — 5 | Pichet “Cactus 2”, création Urge pour Ichendorf, prix sur demande, ichendorfmilano.com — 6 | Buffet “Rikyu”, création Gabriel Tan pour Ariake, prix sur demande, ariakecollection.com — 7 | Tabourets “AA”, création Torafu Architects pour Ishinomaki Laboratory, 410 € le set de 2 pièces, sur menuspace.com
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Photos : Sonia Pueche ; DR
Levant se lève.
OBJETS DE DÉSIR
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Photos : DR
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1 | Table d’appoint “Japanese Tray”, en chêne, création Kristina Dam Studio, 689 €, kristinadam.dk — 2 | Tapis “Cruise / AP11”, création All the Way to Paris pour &Tradition, prix sur demande, andtradition.com — 3 | Portemanteau “Elements”, en chêne, création Shin Azumi pour Ariake, 700 €, sur finnishdesignshop.com — 4 | Suspension “Soren Globe”, en fibre de banane, 2600 € env., pinchdesign.com — 5 | Chaise porteserviettes, en frêne, 189 €, zarahome.com
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Adresses. A
Frama framacph.com
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Raven raven.style
All the Way to Paris allthewaytoparis.com
Frédéric Pellenq fredericpellenq.fr
Kalou Dubus kaloudubus.com
Rossana Orlandi rossanaorlandi.com
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Kann Design kanndesign.com
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Amsterdam Modern amsterdammodern.com Ariake ariakecollection.com Arnold Goron arnoldgoron.com Atelier Barrois atelierbarrois.com Atelier Bonomi Milano gbtbonomi.com Atelier de troupe atelierdetroupe.com Atelier Février atelierfevrier.com
B Baina shopbaina.com Broberg & Ridderstråle brda.se
C Counter-Space counter-space.com Craft Gallery craftgallery.fr Cynthia Buttenkelpper cynthiabuttenklepper.com
D Destroyers/builders destroyersbuilders.com Dinesen dinesen.com
E Etsy etsy.com
F Faye Toogood fayetoogood.com Flamingo Estate flamingoestate.com
Gabriel Tan gabriel-tan.com
Kvadrat kvadrat.dk
Sam Klemick / Otherside Objects othersideobjects.com
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Sam Kupiec samkupiec.com
Laboratorio Morseletto morseletto.com
Samsung samsung.com
Lawn Chair USA lawnchairusa.com
Sandra Weil us.sandraweil.com
Le Bon Marché Rive Gauche 24s.com
Shin Azumi shinazumi.com
Géraud De Bizien @gerauddebizien
Lightsong Exchange / Bennet Schlesinger bennetschlesinger.com
Shoppe Amber Interiors shoppe.amberinteriordesign.com
Gordon Guillaumier gordon-guillaumier.com
Louise Liljencrantz liljencrantzdesign.com
Guillaume Delvigne guillaumedelvigne.com
Lumber Club Marfa lumberclubmarfa.com
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Hannah Polskin hannahpolskin.com
Mario Milana mariomilana.com
Heather Taylor Home heathertaylorhome.com
Martinelli Luce martinelliluce.it
Hem hem.com
Matter mattermatters.com
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Minjae Kim minjae.kim
Galerie Fabio & Davide Novello Calle Bembo, 4782, 30124 Venezia VE, Italie Galerie Gosserez galeriegosserez.com Galerie Kamel Mennour kamelmennour.com Georgie Wass Designs @georgiewassdesign
Ikou Tschüss ikoutschuss.com Ionna Vautrin ionnavautrin.com
Morten Emil Engel mee-studio.com MullerVan Severen mullervanseveren.be
Isabel Marant isabelmarant.com
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Ishinomaki Laboratory ishinomaki-lab.org
Nickey Kehoe nickeykehoe.com
J
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J.D. Staron jdstaron.com
Pierre Augustin Rose pierreaugustinrose.com
Jean Nouvel jeannouvel.com
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Jonak jonak.fr
Silo Studio silostudio.net Simone Bodmer-Turner simonebodmerturner.com
T Taller de Arquitectura (TAX) kalach.com Taylor Kibby taylorkibby.com Thomas Bentzen thomasbentzen.com Thonet thonet.de Torafu Architects torafu.com Txt.ure txt-ure.mx
V Valérie Barkowski valeriebarkowski.com
Y Yann Le Coadic @ylcstudio
Raina J. Lee rainajlee.com
Erratum Une erreur s’est glissée dans le reportage “Conjuger l’art” publié dans notre MilK Decoration 37 paru le 25 août 2021. Dans ce projet de Sandra Benhamou, nous présentions “deux bibliothèques chinées et redessinées pour cet espace” or ces bibliothèques sont les créations originales et référencées de la galerie ADDICT de Laetitia Hecht.
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chanel.com
CERTAINES RENCONTRES MARQUENT POUR TOUJOURS. BAGUES EN OR BEIGE ET OR BLANC.