Guide API 2015 2016

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Le guide

2015-2016

ÉLUS LOCAUX CONTRE LE SIDA

nformation révention

Pour mieux comprendre les enjeux de la lutte contre le sida, les hépatites et les discriminations. Inclus : les Actes des XIXe Etats Généraux des Elus Locaux Contre le Sida



DIX-NEUVIÈMES ÉTATS GÉNÉRAUX DES ÉLUS LOCAUX CONTRE LE SIDA

ÉLUS LOCAUX CONTRE LE SIDA

ACTES DES XIXe ÉTATS GÉNÉRAUX DES ÉLUS LOCAUX CONTRE LE SIDA Mercredi 26 novembre 2014, Hôtel de Ville de Paris

VIH/SIDA, HÉPATITES, LES NOUVEAUX ENJEUX

GUIDE API 2015-2016

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DIX-NEUVIÈMES ÉTATS GÉNÉRAUX DES ÉLUS LOCAUX CONTRE LE SIDA

sommaire Sida/VIH, hépatites : les nouveaux enjeux ! Intervention vidéo de M. François Hollande Président de la République française ..................................................................................................... 5 Intervention de Mme Anne Hidalgo, Maire de Paris ...................................................................................................................................................................... 6 Intervention de M. Jean-Paul Huchon, Président du Conseil régional d’Île-de-France ........................................................................12 Intervention de Mme George Pau-Langevin Ministre des outre-mer ......................................................................................................................................... 16 ÉCHANGES THEMATIQUES animés par Mme Julie Nouvion, conseillère régionale d’Île-de-France et vice-présidente d’Élus Locaux Contre le Sida et M. Michel Taube, fondateur du magazine en ligne Opinion internationale. • Intervention de Mme Dominique Gillot, sénatrice et ancienne secrétaire d’Etat à la Santé .......................................................... 20 • Présentation d’une enquête sur les jeunes et le VIH, avec M. Patrick Teissère, sxecrétaire général d’ELCS et adjoint au Maire du Havre, et M. Frédéric Dabi, directeur général adjoint de l’Ifop .................................................................................................................................. 25 • (R)évolution thérapeutique et qualité de vie avec M. Yann Metzger, membre du Comité des familles ................................................... 31 • VIH, hépatites : remporter la bataille de la communication avec M. François Dupré, directeur général de Sidaction et Mme Lucile Bluzat, responsable du pôle santé sexuelle de l’INPES ..................................................................................................... 36 • L’innovation au cœur de l’action avec M. Michel Bonjour, Président de SOS Hépatites et Mme Dominique Versini, adjointe à la Maire de Paris .........................................................................................................................41 • Intervention de Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ancienne Ministre de la Santé et des Sports ......................................................................... 44 Intervention de M. Jean-Luc Romero-Michel, président d’ELCS ........................................................................................................................................................ 47 Intervention vidéo de Mme Geneviève Fioraso, Ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche ...................................... 52

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sommaire Guide API (Action Information Prévention) 2014-2015 Lexique ..................................................................................................................................................................................... 58 ::: Le VIH/sida en France Les chiffres clés du VIH/sida en France ........................................................................................ 61 Le dépistage en France ......................................................................................................................................... 61 La situation sociale des personnes touchées par le VIH ........................................... 62

::: Les hépatites virales en France ...................................................................................................... 63

::: Les drogues en France ............................................................................................................................. 64

::: Le VIH/sida à l’international ................................................................................................................ 65 Focus • Le VIH/sida et les jeunes : un maillage d’information à resserrer ......................................................................................................................................................................... 67 • La gratuité du préservatif en débat .................................................................................................. 68 • Contaminations au VIH chez les seniors .................................................................................. 69 • Le dépistage du VIH : LA priorité ................................................................................................... 70 • Ipergay .................................................................................................................................................................................. 71 • Discriminations LGBT et prises de risque ............................................................................. 72 • La réduction des risques en direction des usagers de drogues : une nécessaire innovation ............................................................................................... 73 • Situation dans les DOM ................................................................................................................................. 75 • La liberté de circulation et d’établissement des PVVIH ....................................... 77 • Déclaration de Paris : les villes actrices de la transformation sociale ....................................................................................................................................... 78 ::: Le sida se soigne aussi par la politique Le principe fondateur d’ELCS ................................................................................................................... 80 ::: La Gouvernance de l’association Bureau ....................................................................................................................................................................................... 82 ::: Comment soutenir ELCS ? Manifeste ............................................................................................................................................................................... 85 Cotisation personnelle / adhésion / subvention – don ................................................... 86 Label « Ville engagée contre le sida » ................................................................................................ 87 Merci à nos partenaires ....................................................................................................................................... 89 3


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M. François Hollande Président de la République (Intervention vidéo) Monsieur le Président, Cher Jean-Luc Romero, Mesdames et Messieurs les élus, Mesdames, Messieurs, qui vous battez depuis tant de temps contre le sida, Cette année, encore à l'occasion de votre Assemblée générale, je souhaite vous apporter un message d’espoir et de soutien. L’année qui vient de s’écouler a été un moment important pour la recherche et les perspectives de traitement, avec un essai mené par l’ANRS qui vient de démontrer l’efficacité d’un traitement préventif contre le VIH. Ce traitement à la demande va modifier profondément la prévention du VIH. C’est donc un espoir aussi que je veux saluer avec le développement des autotests qui permettront à chaque utilisateur de connaître en moins d’une heure sa situation sérologique. Voilà pourquoi la lutte est toujours nécessaire, voilà pourquoi la lutte est efficace, et voilà pourquoi la lutte contre l’épidémie doit se poursuivre en France et mérite le soutien des pouvoirs publics et la mobilisation de tous. Dans notre pays, 150 000 personnes vivent avec le VIH, 6 000 nouveaux cas sont dépistés chaque année, mais il y a 30 000 personnes qui ignorent leur séropositivité. Nous devons intensifier les campagnes, faire que l’information circule, que la prévention puisse être entendue, notamment vis-à-vis des populations vulnérables et des populations à risques. Je pense ici aux départements français d’Amérique, là où il y a aujourd’hui recrudescence. Ce qui importe, c’est qu’il faut lutter partout contre la maladie, c’est d’éviter la stigmatisation qui conduit au repli et à l’isolement. Vous savez mon soutien dans l’action que vous menez, également celui du gouvernement, vers les associations, aussi bien leurs actions nationales, que régionales. Et je veux ici au nom de l’État, vous remercier pour votre participation, votre conviction, votre générosité. Parce que cette lutte, elle ne pourra pas être gagnée sans vous, elle sera gagnée avec tous. Merci pour cette action.

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M. Jean-Luc Romero-Michel Président d’Élus Locaux Contre le Sida Bonjour à toutes et à tous, Merci de continuer à être mobilisés, alors qu’on sait tous aujourd’hui qu’il est difficile de mobiliser autour du VIH, même s’il n’y a jamais autant de gens qui vivent avec ce virus. Nous avons l’habitude de venir dans cette mairie, où nous venons depuis bientôt 20 ans, tous les trois ans. J’ai une pensée pour Bertrand Delanoë, qui nous a si souvent accueillis. Cette année, c’est Anne Hidalgo. C’est un double plaisir, un plaisir à la fois personnel – j’ai beaucoup travaillé avec elle sur cette question – et militant. Anne n’a pas raté une seule de nos manifestations, en tant que Première adjointe, et en tant que membre aussi d’Élus Locaux Contre le Sida. Je sais à quel point ce combat est important pour elle : elle va encore le prouver lundi [1er décembre] par une action de grande envergure dont elle va peut-être nous dire quelques mots maintenant. Je voudrais vraiment la remercier au-delà des clivages, au-delà des désaccords qu’on peut avoir les uns et les autres, d’avoir toujours eu une parole politique sur le sida, et c’est vraiment un honneur pour nous d’être accueillis cette année par toi. Madame la Maire, Anne Hidalgo. Intervention de Mme Anne Hidalgo Maire de Paris Merci cher Jean-Luc, Monsieur le Président, C’est un bonheur d’être là. D’abord, c’est la première fois que je m’exprime en tant que Maire de Paris dans cette belle association d’Élus Locaux Contre le Sida. C’est mon année des premières fois, permettez-moi de goûter le plaisir des premières fois. Élus et associations ensemble Surtout, c’est vrai que c’est l’occasion de retrouver Jean-Luc Romero, de saluer le travail qu’il fait depuis de très nombreuses années, ce travail de mobilisation, ce 6


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travail à la fois de mobilisation des élus, mais aussi de jonction entre les élus et les associations. Et je voudrais saluer bien sûr toutes les associations, les militants et responsables associatifs que je vois dans cette salle, et bien sûr l’ensemble des élus du Conseil de Paris, des arrondissements, Monsieur le Maire du Xe arrondissement. Et puis mes adjoints : parce que cette politique que nous conduisons, c’est une politique qui est bien sûr en lien directement avec les questions de santé : Bernard Jomier porte ces questions de santé à mes côtés. C’est aussi parce que le sida est une maladie particulière qui a montré à quel point la question des discriminations est présente dans cette maladie qui n’est pas comme les autres : Hélène Bidard qui est à mes côtés aussi et qui porte les questions d’égalité femmes-hommes mais aussi de lutte contre les discriminations. Et puis une dimension qui est très importante aussi qui est la dimension liée à ce tissu associatif qui porte depuis longtemps l’énergie, qui est à l’avant-garde, aux avant-postes de la lutte contre le sida, toute la vie associative et la démocratie locale que porte à mes côtés Pauline Véron. Je voudrais également saluer Mao Peninou, un adjoint engagé, militant, et Alexandra Cordebard, qui est en charge de l’éducation. Je voudrais bien sûr saluer George Pau-Langevin, Ministre des Outre-mer, qui est présente parmi nous et on sait à quel point toujours, avant d’être ministre, lorsqu’elle était ici comme élue et, avant encore, comme collaboratrice auprès du Maire de Paris, elle était engagée sur ces questions-là. Être ambitieux ! C’est une année particulière, le message du Président de la République le dit, c’est vrai qu’il y a la progression de la science, une progression des thérapies. La prévention a marqué un pas très important, et nous devons en tenir compte. En tenir compte en nous lançant un objectif ambitieux, au-delà des actions concrètes que nous devons continuer à accomplir. Précarité des personnes touchées Je vais commencer par les actions concrètes. C’est d’abord être aux côtés des associations, à un moment où la crise économique et sociale que nous connaissons met en difficulté les associations, mais aussi des personnes. Parce que la précarité qui existe et se développe dans notre pays, on le sait, elle frappe de façon assez générale des catégories de population entières, mais aussi et surtout les catégories les plus vulnérables, et notamment les personnes séropositives, les personnes qui vivent avec le sida depuis longtemps et qui donc présentent un certain nombre de problèmes de santé qui en général sont perçus et vus par leurs employeurs. Ces personnes vulnérables subissent aussi cette crise avec plus de violence. Je le sais 7


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parce que les associations qui sont les vôtres, celles qui viennent en aide aux personnes malades du sida, aux personnes qui sont en situation de grande précarité, je pense à Basiliade, je pense à beaucoup d’associations qui font un travail absolument exceptionnel, croulent sous une demande sociale beaucoup plus importante encore que ces dernières années. Un niveau de subventions maintenu Dans une situation de crise, nous avons décidé à Paris de maintenir un niveau de prestations, un niveau de prestations sociales et un niveau de prestations auprès des associations pour qu’il n’y ait pas un déficit, en plus, de notre part qui serait lié à un retrait de la Mairie de Paris. Il n’y a pas de retrait de la Mairie de Paris, nous sommes engagés, nous continuons à l’être, parce que, comme l’a très bien dit Jean-Luc, la question du sida, c’est aujourd’hui d’abord des milliers de personnes qui vivent avec le VIH et qui subissent des discriminations, et sur ce point-là, nos actions, nous allons les poursuivre, et continuer à faire ce travail. Il y a tout le travail de prévention, d’alerte, d’information, notamment des populations à risques. On le sait, Paris est une ville dans laquelle l’épidémie est encore extrêmement prégnante. Il y a encore beaucoup contaminations qui se déploient sur le territoire parisien et sur les Outre-mer également, nous sommes des territoires particulièrement concernés. Donc la prévention elle doit être là aussi au cœur de nos politiques. L’éducation à la sexualité vs vision moraliste Prévention, éducation, c’est quelque chose d’important, de poursuivre ce travail, avec les jeunes, avec les associations qui parlent à un certain nombre de populations ciblées, qui sont plus vulnérables aussi dans les contaminations, et donc, ce travail de prévention, là aussi nous allons le poursuivre. Je soutiens beaucoup les actions que vous portez vous les associations, et avec les adjoints de mon équipe, qui visent à informer et prévenir les jeunes. Pour prévenir et pour informer, il faut pouvoir le faire sans qu’on soit empêchés par une espèce de fausse morale qui consisterait à ne pas parler des questions de sexualité, à ne pas parler des questions d’orientation sexuelle, à ne pas parler des questions d’inégalités entre les filles et les garçons, à ne pas parler de ce que certains appellent la santé reproductive et qui en gros concerne la sexualité et qui touche aussi les questions de santé. Donc il faut pouvoir le faire, bien sûr avec les mots qui conviennent aux publics et aux âges concernés, mais moi je suis résolument engagée dans cette éducation pour l’égalité, non-sexiste, non-violente, qui lutte contre l’homophobie, contre les stéréotypes, et qui permette de passer aussi des messages de prévention le plus tôt 8


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possible, lorsque les jeunes, à l’adolescence, à la préadolescence, et même avant – je me souviens de ce très beau film, Le Baiser de la Lune [réalisé par Sébastien Watel], décrié d’une façon indigne par certains responsables politiques un peu irresponsables, et quelques associations pas très progressistes, pour ne pas dire caricaturalement réactionnaires. Un travail au quotidien Donc nous, nous allons continuer à affirmer que Paris est une ville où nous devons porter ce message de prévention, en parlant aux Parisiens, quel que soit leur âge, et en misant sur leur intelligence, y compris quand ils sont mineurs. On peut parler à des enfants, c’est aussi la mère que je suis qui le sait, quand ils sont en train de se construire, de ce qui les attend, et de sujets qui ne sont pas tabous, et qui peuvent permettre de mieux vivre ensemble et de faire reculer les stéréotypes, les discriminations et aussi le VIH. Ça, c’est un travail au quotidien que nous engageons depuis longtemps, que nous allons poursuivre, avec tout le tissu associatif, et sur lequel vous pouvez compter sur nous. L’Appel des maires pour mettre fin au sida Il y a, à partir de ce qu’a dit le Président de la République, c’est vrai, une idée qui n’est pas un fantasme ou un objectif inatteignable : oui, je pense que nous pouvons en finir avec la contamination du sida, dans les vingt ou trente prochaines années. Il faut y mettre les moyens, les moyens de recherche, de santé, d’éducation, de diffusion. Tout cela, il faut l’engager. Avec le directeur exécutif de l’Onusida, nous avons décidé d’accompagner JeanLuc Romero dans son initiative, qui est de faire appel aux maires des grandes villes. Nous avons la conviction que nos villes, quel que soit le continent, sont des espaces de solutions et non pas de problèmes. Dans nos villes, les maires – des personnes emblématiques, progressistes – s’engagent pour faire reculer l’épidémie et pour faire reculer les discriminations et l’homophobie, parce que ça va ensemble. Nous avons donc pris l’initiative, pour le 1er décembre, de lancer un Appel des Maires, avec Michel Sidibé de l’Onusida. Cet appel, nous le porterons ici, à l’Hôtel de Ville. Plusieurs maires de la francophonie m’ont confirmé leur engagement à être présents dans cette initiative – j’étais à leurs côtés il y a quelques semaines à Kinshasa puisque je préside l’Association internationale des maires francophones (AIMF). C’est important, parce qu’on sait qu’en Afrique, la stigmatisation et la discrimination sont aussi présentes. Ces maires francophones ont décidé de s’engager à nos côtés pour faire en sorte que dans nos villes on fasse reculer le sida, jusqu’à la disparition, en 2030. 9


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Pas de fatalité dans la lutte ! Cet engagement est pour nous quelque chose de très important. Il y a quelques années dans les organismes de santé ou dans les instances ministérielles de santé, on m’a dit que le sida était désormais une maladie chronique, qu’il tuait moins que d’autres maladies et que donc ça passait au second rang des priorités ! À la Mairie de Paris et à la Région Île-de-France, nous n’avons jamais accepté cette idée. Pour ne pas se retrouver dans une situation où on nous dit que « le sida, il faut passer à autre chose », et bien nous devons nous engager, agir au quotidien et faire reculer la discrimination, la stigmatisation, pour faire progresser aussi, non seulement la recherche, mais les thérapies, et donc la possibilité de faire disparaître les contaminations et le sida. L’engagement déterminé des villes pour la vie ! Cet engagement nous le prenons aussi avec les associations : les maires viendront rencontrer les associations le 1er décembre. Je le prends aussi avec le Maire de New York. Il ne pourra pas être présent à Paris ce jour-là, mais tous les deux, nous signons une tribune d’engagement, Paris-New York, aux côtés de l’Onusida, pour faire reculer le sida et engager nos villes de façon résolue, volontariste, pour qu’effectivement, on puisse accomplir ce saut, ce pas supplémentaire, que nous devons accomplir, à un moment où la question du sida reste une question majeure. Se servir des méthodes développées dans la lutte contre d’autres pathologies Je vais conclure là-dessus. Cette question elle est majeure parce qu’elle continue à tuer, parce qu’on continue à avoir des contaminations, et parce qu’il y a toujours une discrimination, et parce que certains n’ont toujours pas compris qu’en faisant reculer l’homophobie, on s’en porterait tous mieux et on permettrait aussi de lutter contre ces stigmatisations qui ne sont pas acceptables. On a pu le vérifier lorsque j’étais avec l’Association des maires francophones à Kinshasa : la façon dont nous avons appréhendé, grâce aux associations, la question du sida, nous donne beaucoup de force pour traiter d’autres épidémies, d’autres pandémies, dans le monde. Cette méthode qui a été celle promue par les associations, celle sur laquelle les villes se sont engagées, sur laquelle les États aussi bien sûr ont agi, c’est une méthode qui aujourd’hui nous permet de décliner des modes d’actions, notamment sur la question d’Ebola. Ce ne sont pas les mêmes problèmes dans la mesure où les contaminations sur Ebola ne se font qu’à partir du moment où la maladie et les symptômes sont là, mais pour autant, nous tirons beaucoup d’enseignements de toute cette expérience et cette expertise, et elle est très présente, et nous avons eu un temps de travail très important à Kinshasa avec notamment les villes qui sont 10


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confrontées à l’épidémie d’Ebola, et aussi la question du paludisme, qui est un sujet qui fait beaucoup de morts à travers la planète. Et là aussi, la méthode utilisée grâce aux associations, grâce à cette mobilisation qui existe depuis longtemps maintenant sur la question du sida et qui ne va pas faiblir, ça fait aussi progresser l’action publique, y compris celles des associations, sur d’autres sujets, d’autres terrains. Aller toujours plus loin, faire toujours mieux C’est donc un moment important en cette veille du 1er décembre 2014. Vous l’aurez compris, l’engagement de la Ville de Paris, des élus parisiens, est là, complet, total, pour faire le bond que nous avons besoin de faire ensemble pour aller encore plus loin, fixer des objectifs très ambitieux, sans rien lâcher de l’action concrète et quotidienne. Les deux doivent être portés avec la même force, parce qu’oublier l’action quotidienne auprès des malades du sida pour n’agir que sur des objectifs très ambitieux, ça serait une contradiction que nous ne pourrions pas assumer donc comptez sur moi, je sais que je peux aussi compter sur vous. Merci. M. Jean-Luc Romero-Michel Merci Madame la Maire, merci chère Anne, on voit que le fait d’être devenue maire n’a rien enlevé à tes convictions et à ta force militante et ça c’est très important pour nous. Je salue Dominique Gillot, qui sera une des marraines de l’association ELCS pour l’année 2015. La Ville de Paris et la Région Île-de-France se sont engagées très tôt en faveur des salles de consommation à moindre risque (SCMR). C’est un discours extrêmement courageux parce qu’on sait que là-dessus on doit encore mener le combat. C’est le travail d’Élus Locaux Contre le Sida d’expliquer aux élus qui n’ont pas encore compris à quel point en termes de santé publique, en termes sociaux, et en termes de sécurité. Je voudrais en profiter pour saluer Rémi Féraud, qui accueillerait, si la loi est votée bientôt, une salle, dans son arrondissement. Je voudrais dire à ceux qui ne l’ont pas vu, de voir un film extraordinaire, qui est à voir pour ceux qui ont oublié ce qu’étaient les débuts du sida, un film que les chaînes françaises n’ont pas le courage de passer : il s’appelle The Normal Heart, le Cœur normal. Il est passé sur la chaîne HBO et il raconte comment une poignée d’homosexuels ont réussi à faire bouger un maire de New York qui était lui-même homosexuel et qui ne voulait rien faire alors que les gens mouraient. Je crois donc que c’est important et symbolique que la Ville de Paris signe avec New York. 11


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Parce que, aux débuts du sida, il ne faut pas oublier que si Act Up n’avait pas été là, il y a bien des élus qui n’auraient pas bougé. Donc merci Anne. La Ville de Paris et la Région Île-de-France sont les deux collectivités qui font le plus contre le sida. Il est vrai que c’est parce qu’il y a beaucoup de cas de sida – un quart à Paris – mais c’est avant tout parce qu’il y a une volonté politique. C’est pour cela que je suis heureux aussi d’accueillir Jean-Paul Huchon. Il se bat, et il va nous rappeler à quel point, aussi bien sur un plan personnel qu’au niveau de la Région Île-de-France, c’est important. Intervention de M. Jean-Paul Huchon Président du Conseil régional d’Île-de-France Madame la Ministre, chère George, Madame la Maire de Paris, chère Anne, Monsieur le Président d’Élus Locaux Contre le Sida, cher Jean-Luc, je voudrais aussi saluer tous les élus qui sont là, de tous les horizons, je salue Yves Contassot, Dominique Gillot, mais aussi Roxane Decorte, Julie Nouvion, Rémi Féraud, Mao Peninou… C’est une bataille qui se gagne collectivement. Il faut des capitaines, des chevaux légers, ceux qui reconnaissent l’ennemi, toute une série de soldats, et le patron de tout ça, c’est Jean-Luc. Et c’est difficile d’être le patron de quoi que ce soit, d’ailleurs. Le courage politique Je me souviens que les premières années à la Région, c’était très difficile de parler de ce sujet. Il fallait du courage. Jean-Luc à l’époque n’était pas dans la même formation politique que la mienne et il lui a fallu du courage par rapport à ses propres amis. Je crois qu’aujourd’hui il a réussi non seulement à faire changer les choses – le sida est toujours là, il y a toujours des gens qui meurent, mais l’opinion que l’on a sur le sida a changé. Nous fêtons aujourd’hui les 20 ans d’Élus Locaux Contre le Sida. Vingt ans que Jean-Luc et son équipe rappellent deux évidences : la première c’est que le sida continue à tuer, la seconde c’est que lutter contre le sida est l’affaire de tous et que cette lutte engage en particulier les collectivités territoriales, ici, ailleurs, en France et dans le monde. Anne Hidalgo vient de le rappeler en insistant sur la nécessité d’actions coordonnées et internationales à travers les collectivités locales. 12


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Une région particulièrement touchée Le sida tue. Il continue de tuer. Il y a deux jours, notre Observatoire régional de la santé rappelait qu’en France, le premier foyer de l’épidémie se trouve ici, en Île-de-France. Le VIH frappe d’abord à Paris, mais aussi en Seine-Saint-Denis. L’épidémie est plus forte chez les hommes qui ont des relations sexuelles avec des hommes. C’est chez migrants que la proportion de personnes séropositives est la plus élevée. Le sida touche d’abord et avant tout les plus fragiles. En 2012, 2 702 Franciliens découvraient qu’ils étaient séropositifs. Deux mille sept cent deux personnes, ce ne sont pas seulement des statistiques, ce ne sont pas des anonymes, ce sont des femmes, des hommes qui ont une vie, qui ont une histoire. Parler et dépister Notre pire ennemi contre le sida, c’est le silence. Il faut en parler, continuer d’en parler, en parler toujours, parce que le VIH se nourrit de moments de relâchement ou d’inconscience. La vocation de notre Centre régional d’information et de prévention du sida (Crips), qu’Anne a présidé au nom de la Région. Sa vocation – il existe depuis 25 ans – est précisément celle-là : mener de grandes campagnes de prévention ici, en Île-de-France. Avec le Crips, nous jouons notre rôle d’élus locaux. En mettant à disposition des préservatifs, des kits de seringues propres, nous jouons notre rôle d’élus locaux. En soutenant des manifestations festives comme Solidays, nous jouons notre rôle d’élus locaux. La priorité, c’est d’abord le dépistage, encore le dépistage, toujours le dépistage. En 2010, ceux qui ont eu des comportements à risque y ont d’ailleurs eu davantage recours. Le résultat est là : on notait, « comme par hasard », en même temps, une baisse de la proportion de tests positifs. Cela doit bien entendu au Plan national de lutte contre le VIH, Madame la Ministre, cela doit aussi à une mobilisation des élus locaux : plus le dépistage sera précoce, plus nous ferons reculer l’épidémie. Soutenir et accompagner les malades La priorité, on l’oublie souvent, c’est aussi d’accompagner les malades, qui sont frappés par une double peine. Objet de discriminations, ils doivent pouvoir trouver auprès des pouvoirs publics et de la société civile un soutien, une attention particulière, une empathie réelle. Nous le faisons, en luttant contre les discriminations, nous le faisons aussi en soutenant les dispositifs d’accompagnement au long cours. 13


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À la Région, nous sommes aussi aux côtés de tous ceux qui accompagnent les malades : les proches, les réseaux associatifs, les personnels soignants, qui font tous un travail formidable, un travail souvent lourd. Certaines associations une passe financière difficile. Je veux leur dire aujourd’hui qu’elles peuvent continuer à compter sur nous. Investir en direction des acteurs médicaux Certains personnels soignants ont besoin d’être formés, y compris cette notion d’accompagnement. Nous y contribuons aussi. La Région est chargée, depuis la loi de décentralisation de 2004, de la formation de tous les personnels sanitaires et sociaux. Depuis 2007, la Région Île-de-France a engagé plus de 20 millions d’euros sur la lutte contre le sida. Grâce à Jean-Luc, nous avons maintenant des coopérations décentralisées qui mettent en œuvre des solutions dans 13 pays. Nous pouvons en faire encore davantage. Cela consiste non seulement à agir sur la prévention, mais aussi sur les traitements. Nous avons financé un centre permettant de diffuser les thérapies modernes. La mobilisation à l’international : zones de coopération et Metropolis Dans la lutte contre le VIH, tous les élus locaux sont concernés. En France, et dans le monde. L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) soulignait encore récemment à Melbourne – je crois d’ailleurs que Jean-Luc était là – que nous n’avons jamais été aussi près de notre objectif d’éradiquer la maladie au plan mondial. En 13 ans, le nombre de personnes nouvellement touchées par le sida a régressé d’un tiers. C’est donc un combat local et un combat mondial, qui passe par le développement de l’accès aux soins, et par la multiplication des mesures de prévention, nous y travaillons, avec notre coopération décentralisée, à Nouakchott, à Dakar, en Afrique du Sud, au Mali, au Chili… Je pourrais multiplier les exemples. Nous ne travaillons jamais seuls : ces projets, ce sont les élus locaux, bien sûr, de nos régions partenaires qui les portent. Et c’est encore avec les élus locaux des grandes capitales et métropoles, souvent foyers de l’épidémie, que nous faisons progresser les droits des malades. Cette année, il y a quelques semaines, dans une ville d’Inde, à vrai dire peu connue, Hyderabad, mais qui comporte quand même 10 millions d’habitants et qui se préoccupe de ces questions, avec Jean-Luc, nous avons fait voter à l’unanimité du congrès des 120 métropoles qui étaient présentes, une résolution contre les restrictions et pour la liberté de circulation et d’établissement des personnes séropositives. Il y a encore 40 pays qui imposent de telles restrictions. Nous avons voté pour qu’elles soient abolies. 14


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Être vivant … La route est longue pour que disparaisse le sida. Mener ce combat, c’est notre responsabilité de citoyens du monde, d’élus locaux. Dans ce combat, je pense qu’Élus Locaux Contre le Sida incarne le mieux la voix collective que nous voulons faire entendre. Je voudrais terminer par une citation, et comme j’aime le rock c’est une citation de Lou Reed, malheureusement disparu. Il a produit un disque entier sur le sida. Il y dit simplement : Inside I am decaying – à l’intérieur je décline – Outside I am young and vital – à l’extérieur je suis jeune et vivant. Et bien, nous devons penser à tous ceux qui sont malades et dont, un jour, il faut que les amis, les familles, redeviennent jeunes, et vivants. Merci. (Applaudissements) M. Jean-Luc Romero-Michel Merci Jean-Paul. Tu as rappelé ce qui a été fait à Metropolis, et je suis très reconnaissant que tu aies réussi à convaincre. Je rappelle aussi qu’Anne, dans le cadre de l’AIMF, a aussi fait voter cette résolution. C’est aussi important car on ne peut pas lutter contre la maladie si les personnes ne sont pas respectées. Pour continuer dans les amis, maintenant, c’est George Pau-Langevin, qui est aujourd’hui Ministre des Outre-mer. Le jour où elle est devenue ministre, elle était à ce momentlà au Crips, et la composition du gouvernement était annoncée à la radio. Dans ce gouvernement, il y avait George Pau-Langevin. Depuis 20 ans, j’ai rencontré quasiment tous les ministres en charge de l’Outremer, et j’ai souvent eu l’impression de parler dans le vide. Quand j’ai demandé à George Pau-Langevin de me rencontrer et de parler de ce sujet, je ne sais même pas pourquoi j’y suis allé ! De toute façon elle savait ce qu’elle allait faire et elle n’avait pas besoin de moi pour ça ! Aujourd’hui, très symboliquement, et ce n’était jamais arrivé à l’Outre-mer, elle a, avec un certain nombre d’élus de l’Outre-mer, déployé un ruban rouge sur son Ministère, et tenu un discours très important. À un moment où on doute parfois des politiques, je voudrais dire à quel point j’ai été sensible à ces paroles. Tout le monde le sait, il faut de l’argent pour lutter contre le sida, mais la parole est aussi très importante, et notamment dans ces départements où certains ne veulent pas dire le mot sida – sans parler du mot homosexuel ! Je me rappellerai toujours de mon déplacement en Guyane et d’avoir vu les personnes qui vivent avec ce virus. Et qui vivent cachées, dans une grande solitude. Donc c’est important de voir aujourd’hui une ministre prend la parole, et qui en plus fait des annonces. Je crois qu’on peut l’applaudir. (Applaudissements) 15


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Intervention de Mme George Pau-Langevin Ministre des Outre-mer Monsieur le Président, cher Jean-Luc, Mesdames et Messieurs les élus, notamment les élus de Paris, Chers amis, Je suis très heureuse de l’invitation qui m’a été faite par Jean-Luc Romero, dont je salue l’action à la tête d’ELCS, car il est très important que la lutte contre le sida demeure une priorité de santé publique. Sur certains sujets, la parole politique doit s’avancer avec beaucoup de gravité, d’humilité et de circonspection. Car avant d’être un virus, le sida est une maladie intime, qui nous confronte à l’expérience qui est la plus douloureuse et la plus traumatique qui soit. Lorsque le diagnostic est annoncé au patient, sa vie, comme celle de ses proches, est bouleversée. Et il s’agit évidemment d’une épreuve collective tout à fait importante. S’il est vrai que l’action de lutte contre le sida depuis vingt ans a fait d’indéniables progrès, c’est d’abord grâce à la mobilisation de tous, et d’associations comme la vôtre, celle des médecins, celle des professionnels. Mais je crois qu’il nous reste beaucoup de chemin à parcourir. Une épidémie qui touche fortement les DOM En France, nous avons beaucoup de cas d’infections par le VIH, et beaucoup de décès encore dus à cette maladie. Il est vrai qu’en Outre-mer, la situation est aussi plus préoccupante. Les taux de contaminations sont particulièrement élevés, notamment en Guadeloupe et en Guyane, où ils s’avèrent deux à trois fois plus importants qu’en Île-de France, alors que cette région est elle-même particulièrement frappée. L’Île-de-France abrite d’ailleurs aussi une forte communauté antillaise, que je salue. C’est un enjeu majeur pour nos départements et territoires d’outre-mer que de pouvoir prendre à bras-le-corps ce qui constitue une véritable tragédie du quotidien. Au-delà des idéologies, une lutte pour la vie Jean-Luc Romero rappelle souvent cette phrase du Professeur Rozenbaum, que je me permets de reprendre à mon tour : « Le sida se soigne aussi par la politique. » C’est-à-dire qu’il ne suffit pas de trouver les traitements. Il faut refuser la fatalité, et faire cause commune pour venir en aide à ceux qui en ont le plus besoin, je 16


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crois que c’est une manière de rendre notre société plus humaine, plus juste et plus solidaire. La lutte contre le VIH doit transcender les clivages politiques. Ce n’est pas une lutte idéologique. C’est une lutte pour la vie même. Si le terme de communauté nationale a bien un sens, c’est celui d’affronter ensemble les maux qui touchent les plus fragiles d’entre nous. Or, la Caraïbe dans son ensemble est la deuxième région au monde la plus touchée par le VIH/sida. Les départements français d’Amérique, notamment la Guyane, sont hélas les régions de France les plus touchées par l’infection. Des objectifs ambitieux pour 2017 Le ministère des Outre-mer, donc, est tout à fait concerné par la lutte contre ce fléau, et notamment par la sensibilisation des élus locaux à cette question. Nous sommes intervenus au cours des dernières années, notamment dans l’élaboration du volet Outre-mer du Plan national de lutte contre le VIH/sida, qui s’appuie sur les recommandations des experts du Conseil national du sida (CNS) pour la Guyane et pour les Antilles. Le Ministère des Outre-mer participe au financement du Plan de lutte contre le VIH outre-mer. Ces crédits sont particulièrement nécessaires aux associations qui mettent en œuvre les actions de terrain. Aussi, le ministère s’est impliqué dans la mise en œuvre du Plan national, en particulier sur la prévention de la maladie. C’est notamment en finançant des programmes innovants d’études ou de soutien aux associations locales. Dans ce plan, la lutte contre le VIH s’articule pour les Outre-mer autour de six axes principaux : la prévention, le dépistage, la prise en charge des malades et la lutte contre les discriminations, la recherche et la coopération sanitaire. Il est indispensable que ce combat aux Antilles soit mené en adaptant les actions aux caractéristiques et aux modes de vie des populations concernées. Celles-ci doivent être par ailleurs pleinement intégrées dans les stratégies régionales de santé. Nous nous sommes donnés pour objectif la réduction de moitié, d’ici la fin du quinquennat [en 2017, ndlr], de l’incidence des infections par le VIH dans les Antilles-Guyane et la diminution de moitié également de la proportion de personnes découvrant leur séropositivité au stade sida. Connaissance, responsabilité et respect La nécessité du port du préservatif pour se protéger du virus n’est pas encore suffisamment entrée dans les mœurs, tout comme le dépistage fréquent, ce qui contribue à la diffusion de la maladie. La perception du sida y est celle d’une maladie qui serait principalement homosexuelle, alors que ce n’est pas le cas dans les Outre-mer. Des messages de prévention clairs et ciblés doivent être dirigés en 17


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direction de la population hétérosexuelle, et notamment en direction des femmes, qui ne se sentent pas toujours concernées. Cette prévention doit donc être adossée à une éthique de la responsabilité. Ce n’est pas de la prédication, ce n’est pas non plus un discours de la culpabilité ou de moralisation. Il s’agit de faire comprendre aux publics que lorsqu’on veut lutter contre le sida, il y a à la fois le fait de prendre en main sa santé, mais il y a aussi le respect de chacun. Autrement dit il s’agit de rappeler à tout le monde, et notamment aux jeunes, que la santé de chacun c’est quelque chose qui nous appartient en propre, et que nos comportements à tous sont aussi un problème à l’encontre notre prochain. Lutter contre le silence et le carcan de l’isolement Nous devons, et j’insiste parce que c’est un élément important pour les Outre-mer, sortir les personnes vivant avec le VIH de la route de l’ignorance et de la suspicion. C’est encore une maladie qui est taboue, par conséquent, les gens souffrent de la maladie, mais aussi du regard des autres. Très souvent, on n’en parle pas. Donc, affronter la maladie se fait aussi dans le secret par rapport à l’entourage et par rapport aux proches, donc, souvent, dans la solitude. C’est la raison pour laquelle ce midi, nous avons apposé ce ruban sur la façade du Ministère des Outre-mer, parce que c’est un message pour dire aux gens infectés des Outre-mer qu’ils ne sont pas seuls pour faire face à ce fléau, qu’il faut qu’ils en parlent, et qu’ils ne restent pas avec leur secret. Faire taire les discriminations Je dois dire aussi que nous avons largement à lutter contre l’homophobie, qui est une manière de penser qui est encore trop répandue dans les Outre-mer, même si parfois cela est caricaturé. Il faut arriver à faire comprendre à Monsieur-tout-lemonde que la discrimination n’est pas un langage acceptable dans notre société, et que la discrimination fait progresser, en quelque sorte, la maladie. À partir du moment où les gens sont discriminés, ils ne parlent pas, ne se soignent pas et donc continuent à contaminer les autres. Il faudra continuer à travailler sur l’intégration des personnes vivant avec le VIH, en matière d’hébergement, de logement, d’insertion professionnelle. Autrement dit, sur tous ces sujets, nous devons soutenir les associations, qui travaillent là-dessus, mais qui sont encore très discrètes, parce que justement, elles ont à affronter le regard social, sociétal, qui n’est pas toujours un regard très positif. Déconstruire les préjugés, c’est donc aussi une manière de lutter contre le VIH/sida. 18


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Les jeunes : notre priorité Bien évidemment, il est nécessaire de former les soignants pour qu’ils puissent arriver à prendre en charge les malades, et de travailler en direction de la jeunesse, qui est particulièrement exposée, notamment parce que, on le sait, s’agissant de sujets comme l’orientation sexuelle ou l’éducation sexuelle, ils ne sont pas encore suffisamment présents dans l’éducation. Donc nous devons éduquer la jeunesse à ce sujet-là, et permettre un dialogue de se développer. Ouvrir des centres pour les jeunes, et nous pensons beaucoup à ce que la Région Île-de-France a fait avec le Cybercrips. En reproduisant des initiatives comme celles-là en Outre-mer, nous permettrons aux jeunes d’être mieux protégés contre la maladie, et de pouvoir se protéger eux-mêmes et de protéger les autres. Être solidaires Lutter ensemble contre le sida, prendre soin des personnes touchées et empêcher que d’autres ne soient contaminées, permettre aux personnes séropositives de conserver leur place au sein de notre société et d’y trouver du soutien, c’est œuvrer pour la vie. C’est travailler à faire reculer la peur, les souffrances, les inégalités. C’est rendre notre société plus humaine, plus juste et plus solidaire. La solidarité nationale, c’est l’exercice en acte de la fraternité. La solidarité de l’ensemble de la communauté nationale avec les personnes atteintes du sida est une obligation de chacun vis-à-vis d’autrui. C’est la condition de la dignité de tous, et la condition pour que nous partagions un monde commun. Notre pays doit continuer à faire de la prévention et de la prise en charge du sida une mission privilégiée. C’est une mission qui lui incombe. Ce n’est rien moins que de contribuer à l’effort de la civilisation, pour que les forces de la vie l’emportent sur les forces de la mort. Je vous remercie.

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Échanges thematiques animés par Mme Julie Nouvion, conseillère régionale d’Île-de-France et vice-présidente d’Élus Locaux Contre le Sida et M. Michel Taube, fondateur du magazine en ligne Opinion internationale. Intervention de Mme Dominique Gillot Sénatrice et ancienne secrétaire d’État à la Santé M. Michel Taube Pourquoi avoir accepté d’être une des deux marraines de l’association ? Mme Dominique Gillot Je ne peux rien refuser à Jean-Luc ! (sourires). Au début, il m’a un peu chahutée, comme l’ont fait d’autres représentants associatifs du sida, lorsque j’étais au ministère. J’ai eu des « baptêmes du feu », et puis très rapidement j’ai appris à connaître ces militants, ces combattants contre le sida. J’ai appris leur manière de faire et je les ai accompagnés, et depuis j’ai une fidélité sans faille à Élus Locaux Contre le Sida parce que je suis convaincue que c’est par la politique, par l’engagement public que l’on peut aussi lutter contre ce fléau. C’est donc un grand honneur pour moi d’être marraine de cette édition d’ELCS. Comme toutes les marraines, j’ai envie de me pencher sur mon filleul avec beaucoup d’attention, de bienveillance, et développer ma capacité de soutien. Je voudrais apporter quelques précisions sur plusieurs thèmes : les comportements ; l’intérêt de la connaissance sérologique ; les progrès de la recherche ; l’accès précoce aux médicaments ; l’information. La méconnaissance du statut sérologique, cause de la transmission Après 20 ans de combat ensemble, en France, l’épidémie de VIH reste toujours active avec entre 7 000 et 8 000 contaminations par an, ce qui est excessif et insupportable quand on possède la connaissance que nous possédons aujourd’hui. Il est estimé que 150 000 personnes vivent en France avec le VIH, et que parmi elles, 20


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près de 30% ignorent leur séropositivité. Ce qui pose des problèmes majeurs. Je vais en citer deux : ces personnes accèdent tardivement aux traitements, une fois que leurs défenses immunitaires sont déjà affaiblies. Deuxièmement, si elles étaient traitées plus tôt, les médicaments permettraient de faire baisser leur charge virale de manière importante, réduisant ainsi leur capacité à transmettre le VIH, ce qui pourrait améliorer leur confort de vie, leur espérance de vie en bonne santé, et aussi freiner la dynamique globale de transmission de l’épidémie – ce que les différents intervenants avant moi ont bien expliqué qu’une des causes de la transmission du VIH est la méconnaissance. François Bourdillon, directeur général de l’Institut national de Veille sanitaire (InVS), a publié une étude sur le dépistage entre 2003 et 2013, qui explique que la raison de ce nombre élevé de personnes infectées par le VIH en France reste notamment dû à des comportements de prévention trop laxes, imprudents, voire inconscients. L’absence de connaissance de sa sérologie est un acte d’imprudence – surtout quand on a des comportements qui peuvent conduire [à la contamination]. Je lisais avant de venir que 37% des seniors qui ont des partenaires multiples n’ont jamais utilisé le préservatif et ne font pas non plus de contrôles de sérologie. J’ai eu récemment dans mon environnement l’exemple d’une femme de 60 ans qui a été dépistée séropositive. Elle est très confuse et ne veut pas l’admettre. C’est une imprudence liée à une reprise d’activité sexuelle qu’elle n’a pas su contrôler en imposant le préservatif. Elle pensait probablement qu’à son âge ce risque était dépassé. Eh bien non, il faut être très vigilant. Accès inégal aux outils de prévention L’Onusida souligne dans son rapport que des populations clés, aux risques plus élevés d’être touchés par le VIH ne bénéficient pas de la même manière des gains du dépistage, ce qui souligne la nécessité de renforcer les efforts de prévention du VIH auprès de ces groupes. Chaque année nous le disons, il y a des groupes plus fragiles que les autres – il faut toujours le redire ! De même, l’accès aux moyens de prévention demeure bas pour les hommes ayant des rapports homosexuels : quatre-vingt-un pays signalent que moins de la moitié de ces hommes ont récemment passé un test pour connaître leur statut sérologique. Les usagers de drogue injectable (UDI) sont aussi mal lotis en ce qui concerne la réduction des riques (RdR) : la plupart des pays ne fournissent pas de traitement de substitution aux opiacés ou d’accès à des aiguilles et des seringues stériles. 21


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Éducation à la santé dès le plus jeune âge Quand on lit ces informations-là, on se dit qu’en France il y a des éléments positifs puisque notre pays est celui qui réalise le plus de tests en Europe. En 2013, ce sont environ 5,5 millions de tests qui ont été effectués. Il faut continuer et renforcer ce combat pour la prévention, l’éducation à la santé et la connaissance sérologique. George Pau-Langevin qui a été Ministre de la Réussite éducative était aussi très sensible à cette éducation pour la santé, qui intègre toutes les recommandations, dès le plus jeune âge, et je partage avec elle cet engagement. Bientôt les résultats d’Ipergay Dans le cadre du projet de loi santé, Marisol Touraine souhaite renforcer la pratique des tests rapides, tout en ouvrant le recours aux autotests, qui permettent un dépistage, seul, chez soi, dans la discrétion, ce qui peut permettre de se rassurer plus rapidement après une prise de risque. Cela m’amène à vous parler des progrès de la recherche. À l’Université Pierre-et-Marie-Curie (UPMC), une équipe de recherche qui travaille sur l’élaboration d’un vaccin pour stimuler les réponses immunitaires s’oriente également sur la vaccination sans aiguille, ce qui pourrait être très utile dans d’autres domaines de la santé. Sont également attendus pour 2015 les résultats définitifs de l’essai Ipergay et de son antirétroviral, le Truvada, un programme de recherche coordonné par le Professeur Jean-Michel Molina. Une autre équipe de chercheurs a démontré dans des résultats intermédiaires que le Truvada, utilisé de manière préventive, sous forme médicamenteuse, se révèle également hautement thérapeutique contre le VIH. Donc là aussi on a deux études convergentes qui peuvent irriguer plusieurs secteurs de la recherche. Les efforts dans la recherche contre le VIH sont donc profitables à bien d’autres pathologies, et il faut encourager, comprendre et soutenir cette démarche pluridisciplinaire de nos chercheurs. Ce matin, j’ai voté [au Sénat] un amendement pour restaurer les crédits de la recherche qui avaient été un peu rabotés par l’Assemblée nationale... Le financement de la recherche est indispensable. Il faut agir pour que la recherche ciblée sur le VIH soit un axe de la stratégie nationale de la recherche. Ce n’est pas une recherche spécifique, ce n’est pas une recherche à part. Accès universel aux traitements ? J’en viens à l’accès précoce aux médicaments. En juin 2014 dans le monde, on dénombre 13,6 millions de personnes porteuses du VIH sous traitement. Cela peut paraître énorme, mais ce chiffre représente seulement 38% des adultes vivant 22


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avec le VIH, et seulement 24% des enfants. C’est donc un combat pour l’accès aux traitements, qu’il faut mener, encore et toujours, et particulièrement dans les pays en développement. Les annonces de George Pau-Langevin ont été dans ce sens, et je pense que nous devons l’encourager dans sa démarche. Rendre visible les progrès J’en viens à l’information. Parlons-en. Je pense, comme les intervenants précédents, qu’il faut rendre visible les progrès, la recherche, les innovations, la volonté de surmonter ce fléau par tous les moyens de nos politiques publiques. Les décisions politiques renforcent toujours cette volonté. La solidarité et la volonté politique doivent être toujours répétées. Sans être trop optimiste, je pense que les avancées existent. Le 4 novembre dernier, nous apprenions que nos propres gènes pourraient nous guérir du sida. C’est la découverte étonnante qu’ont fait des chercheurs français sur deux patients non malades, mais porteurs du virus. Celuici aurait été neutralisé, et intégré à leur ADN. C’est un phénomène naturel, déjà constaté dans le monde animal chez les koalas. L’ADN du VIH neutralisé rend impossible la multiplication du virus et donne donc l’espoir d’une éradication de la maladie. Voilà encore une piste à poursuivre, et une bonne nouvelle à répercuter, me semble-t-il. Un combat politique, citoyen et sociétal Enfin, et toujours, le combat est politique. Les élus ne doivent pas laisser le sujet s’endormir, malgré les progrès scientifiques. Il faut continuer de parler sida. Aux élus d’en faire un sujet politique et de l’inscrire à leur agenda. Là, Élus Locaux Contre le Sida nous le rappelle régulièrement, à l’occasion de ses états généraux, avant le 1er décembre. Parler sida, c’est aussi parler relations, parler sexe, parler comportements, parler normes. Avec le mouvement réactionnaire qui traverse notre société, la suspicion jetée sur l’éducation sexuelle à l’école, son refus même, sa contestation par des parents qui considèrent que ça n’est pas à l’école de faire ce travail, il faut toujours affirmer plus fortement que le sida et son environnement ne sont pas des sujets qui sont négociables, oubliables, escamotables. Ce sont des sujets de société qu’il faut faire vivre et qu’il faut partager. Personne ne peut se sentir exclu de ce risque. Pour certaines populations à risques justement, que d’aucuns voudraient reléguer dans l’ombre et oublier, un combat politique est en passe d’être gagné, au point que Rémi Féraud, maire du Xe arrondissement de Paris, accepte qu’il y ait une salle de consommation à moindres risques, dite « salle de shoot », dans son arrondissement, à titre expérimental. Nous avons été témoins des résistances face à ce projet. Le maire qui s’engage dans cette 23


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démarche mérite donc nos félicitations, notre soutien, nos encouragements, notre salut le plus profond. J’espère qu’il fera école, et que la loi permettra la multiplication de ces salles. La volonté politique récurrente ne doit jamais être abandonnée. Je prendrais aussi comme exemple l’installation des distributeurs de seringues stériles – et les récupérateurs [de seringues usagées]. Chaque fois qu’il y a une décision d’installation, il y a un combat à mener, parce que, chaque fois, il faut faire la démonstration que c’est une responsabilité collective et une décision de santé publique. Je pense que convaincre nos concitoyens que cela s’inscrit dans une démarche d’intérêt général fait avancer et garantir la responsabilité collective. Ne rien lâcher ! Le dernier rapport annuel du Programme commun des Nations unies contre le VIH/sida, qui a été rendu public le 19 novembre dernier, indique que nous avons infléchi la courbe de l’épidémie: à présent nous avons cinq années pour la briser, sinon l’épidémie rebondira encore plus fort. J’y vois une information positive, qui donne espoir et récompense des années de lutte, ainsi que l’urgente nécessité de ne rien lâcher, de construire le combat, de le continuer, de baliser les avancées au fil des découvertes et de l’évolution des comportements. Nous avons cinq ans pour réussir. Est-ce que c’est le bout du chemin ? Attention ! Au moindre relâchement, c’est le rebond, et là ce sera encore pire. Alors sans prôner la politique de sanction, de culpabilisation, en gardant le cap de la compréhension, de l’empathie et de la solidarité, ne lâchons rien. Restons mobilisés, exigeants : la vie de nos concitoyens, la considération et le respect des gens contaminés le valent bien. Et pour reprendre les mots de Jean-Paul Huchon, citant lui-même Lou Reed, restons jeunes et vivants, en étant combattants ! (Applaudissements)

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Première table-ronde : Présentation d’une enquête sur les jeunes et le VIH M. Patrick Teissère Secrétaire général d’ELCS et adjoint au Maire du Havre Mesdames et Messieurs, chers amis, Cher Président, cher Jean-Luc Romero, Je suis ravi d’être parmi vous pour cette XIXe édition des états généraux d’Élus Locaux Contre le Sida. Avant de passer la parole à Frédéric Dabi, permettez-moi de dire quelques mots sur Élus Locaux Contre le Sida, association dont j’ai le plaisir et l’honneur d’assurer la mission de Secrétaire général tout en étant également élu local, élu de terrain, élu de Province, comme Maireadjoint au Havre auprès du député-maire, M. Édouard Philippe. ELCS fêtera ses 20 ans l’an prochain – à ce propos, vous pouvez toutes et tous participer à une opération photo de soutien et de visibilité à l’entrée de la salle, n’hésitez pas à porter ce panneau avec le chiffre « 20 ». N’hésitez pas car nous sommes tous ici réunis pour un même combat, dans une grande famille qu’est ELCS. Elle fait partie des associations bien installées, et reconnues dans le paysage des acteurs de ce combat pour la vie. Bien sûr nous sommes toutes et tous convaincus que le sida se soigne aussi par la politique. Nous le savons tous, lorsque la politique baisse la garde par manque de courage, la maladie regagne du terrain ; lorsque la politique fait preuve de conservatisme, la maladie progresse: le sida se nourrit de l’impuissance de l’action publique et de l’absence de volontarisme politique. Les mots ne suffisent pas, il faut des actes courageux. C’était la conviction de Jean-Luc Romero et de Philippe Lohéac quand ils ont créé l’association ; c’est ma conviction quand je les ai rejoints il y a bien des années ; c’est votre conviction à vous tous réunis ici dans cette très belle enceinte de l’Hôtel de Ville de Paris. Élu local, je suis intimement persuadé que l’échelon local est un échelon légitime et pertinent dans la lutte contre le VIH/sida, que ce soit en matière de prévention, d’information, d’éducation, de soutien aux acteurs de la lutte, d’aide aux personnes touchées. L’élu local peut faire beaucoup et doit faire beaucoup. C’est notre responsabilité que de nous engager dans ce combat pour la vie, la dignité et l’égalité. Réveiller des élus qui n’auraient pas conscience du problème de santé publique que constitue le sida fait partie de notre travail. Les élus 25


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locaux ont indéniablement une responsabilité particulière, c’est ce que je défends, c’est ce que défend ELCS depuis 20 ans. Permettez-moi de rappeler que le bureau d’ELCS est composé d’hommes et de femmes de toutes tendances politiques et c’est ce qui crée une force importante et incontournable dans l’association et dans son action. Une force qui travaille ensemble, dans le même sens et pour une même cause, en étant les premiers militants de la lutte contre le sida. Qu’il me soit également permis de saluer le travail important de notre président Jean-Luc Romero-Michel, qui a su fédérer et être le président-ambassadeur de l’association dans chacune des villes de France qu’il visite toute l’année afin d’expliquer et de convaincre. Je suis heureux d’être à ses côtés. Jean-Luc RomeroMichel, je ne le vois jamais lassé dans ses motivations qui le guident chaque jour et dans ses nombreux combats pour la vie. C’est cela aussi la force des Élus Locaux Contre le Sida. Beaucoup reste à faire. Vingt ans de travail et de mobilisation d’ELCS ont déjà porté leurs fruits. Continuons, car nous en avons tous la volonté. Revenons au cœur des choses. Je vais dire quelques mots sur Frédéric Dabi, le directeur général adjoint de l’Ifop. Vous le connaissez, forcément. Parce qu’il est régulièrement invité à intervenir dans les médias, et d’autre part parce qu’il nous a fait le plaisir d’intervenir lors de nos états généraux assez souvent. C’est surtout une personnalité engagée. C’est un grand plaisir pour moi de partager cette scène avec lui, afin qu’il vous présente et commente les résultats de l’enquête IfopSidaction-ELCS sur les jeunes et la prévention du VIH. Avant que les résultats de cette enquête ne vous soient donnés, permettez-moi de remercier ici très chaleureusement Sidaction et son directeur général, M. François Dupré. Sidaction est en effet à l’initiative depuis de nombreuses années de cette enquête sur les jeunes. Je laisse la parole à Frédéric, merci de votre attention. (Applaudissements) M. Frédéric Dabi Directeur général adjoint de l’Ifop Merci, cher Patrick, de ces mots très agréables qui me touchent, c’est vrai que c’est un plaisir pour moi de venir ici année après année pour vous présenter un Baromètre annuel de l’Ifop sur les jeunes et l’information sur le VIH/ sida, une enquête qui est menée depuis maintenant plus de 5 ans pour Sidaction et les Élus Locaux Contre le Sida, réalisée à l’occasion des XIXe États généraux de cette as26


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sociation, et dans la perspective bien sûr du 1er décembre – Anne Hidalgo et Jean-Luc Romero-Michel en ont parlé tout à l’heure. 600 jeunes interrogés Cette enquête d’opinion a pour objectif de tirer un bilan relatif au niveau d’information, global et détaillé, des jeunes de moins de 25 ans sur le sida, que ce soit les vecteurs d’informations qu’ils utilisent, ou tout ce qui touche à la prévention, à l’information scolaire, à la communication entre partenaires. D’un point de vue méthodologique, avant de rentrer dans le vif du sujet, cette cinquième enquête a été menée avec la même méthodologie, afin de pouvoir comparer parfaitement les résultats d’une année à l’autre. L’Ifop et son partenaire Internet Bilendi ont interrogé plus de 600 jeunes âgés de 15 à 24 ans, il y a une dizaine de jours. Un échantillon représentatif sur les critères de sexe, d’âge, de profession, après une stratification par région et par catégorie d’agglomération. Vingt-quatre pour cent des Français, ne l’oublions pas, vivent en commune rurale. Une information scolaire impactante On va regarder les résultats, au global, et comparer aux années précédentes. En premier lieu, un indicateur global sur l’information sur le VIH/sida, ses modes de transmission, ses traitements et sa prévention. Vous le voyez, le degré d’information est très élevé : 89% des jeunes interrogés se déclarent informés, même si, tout de suite une petite nuance : à peine 20% se déclarent bien informés. Pour autant, par rapport aux autres années, on observe deux évolutions encourageantes. La première : la part de bien informés n’a jamais été aussi élevée depuis 2009 ; d’autre part, la proportion de mal informés ne concerne que 11%, mais cela devient 15% chez les 15-17 ans (c’est la tranche générationnelle souvent fragile sur l’information relative au VIH) et surtout ce score monte à 25% auprès des jeunes qui n’ont pas bénéficié d’une information scolaire sur le sujet. Il y a également une différence, légère mais non négligeable, entre les sans-diplômes et les personnes qui sont titulaires d’au moins un bac plus deux [respectivement 87% et 92%]. Des niveaux d’information à nuancer Venons nuancer ce degré d’information global élevé : on voit que les niveaux d’informations plus précis, les connaissances sur des aspects plus poussés qui relèvent de la prévention ou des traitements liés au VIH, apparaissent moins élevés que cet indicateur global de 89%. Il s’établit, vous le voyez, à 71% pour les lieux où aller se faire dépister pour savoir si on a le virus du sida ; 65% pour l’existence des préservatifs féminins (bien sûr, sur cette question un vrai clivage entre les 27


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femmes et les hommes, ce sont les femmes de moins de 35 ans qui se déclarent les mieux informées) ; même chiffre, 65%, sur l’existence d’un traitement d’urgence si on a pris un risque. Faible connaissance des traitements pour les personnes touchées Bien sûr, on regarde la part des personnes bien informées, mais on n’est pas ici dans une logique électorale où l’on intéresserait seulement à ce qui dépasse les 50%, il faut voir aussi la part non négligeable de jeunes qui se déclarent mal informés : 29% pour les lieux où se faire dépister, 35% deux fois sur l’existence d’un traitement d’urgence et des préservatifs féminins. Cela fait beaucoup de monde. Ces chiffres sont encore plus forts chez les 15-17 ans et chez les non diplômés. Enfin, un niveau de connaissance d’à peine 50% sur l’existence de traitements pour les personnes séropositives. Sur la longue durée, on voit des évolutions nettes : 10 points de plus sur les lieux où vous faire dépister, plus 5 sur le préservatif féminin, et 19 points en 7 ans sur l’existence d’un traitement d’urgence, soit une vraie progression. Internet comme première source d’information Comment les jeunes s’informent-ils sur le VIH ? Sans surprise, Internet demeure la première source d’information. 35% des jeunes s’informent par les sites Internet, 8% par les réseaux sociaux (Facebook, Twitter…). Les parents sont la 2e source d’information avec 27%, ce qui n’est pas rien. Chez les moins de 18 ans, ce sont les parents qui arrivent en tête des sources d’information. Une place relativement modeste s’agissant des médias traditionnels, 26%, devancés cette année par la source parentale. Ensuite, viennent les médecins (une source très forte chez les 21-24 ans), la médecine scolaire, les amis, puis les enseignants et enfin les associations de lutte contre le sida. Un chiffre encourageant, en baisse très forte par rapport aux années précédentes : seul un jeune sur dix déclare n’avoir jamais été amené à chercher une information sur le VIH/sida. Une information donnée par les professeurs, moins par les intervenants extérieurs Deuxième partie de l’enquête : l’information scolaire sur le VIH. Même si on vient de voir que les enseignants ne constituaient pas la source d’information privilégiée, il est intéressant qu’une très forte majorité des jeunes déclarent avoir bénéficié d’une information scolaire sur le VIH/sida (32% plusieurs fois, 55% au moins une fois, soit un « total oui » de 87%). Quel intervenant a fourni une information 28


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sur le VIH ? Souvent, c’est un enseignant, un enseignant de sciences de la vie et de la terre (SVT) (43%), viennent ensuite les intervenants extérieurs (31%) ou les infirmières scolaires (31%). En 2013, pour la première fois, les intervenants extérieurs étaient arrivés premiers (47%), on a ici un « retour à la normale » avec les professeurs en première position. On peut difficilement l’expliquer, est-ce lié à une moins grande ouverture des établissements scolaires avec une année aux débats polémiques voire hystériques sur la « théorie du genre » ? Est-ce lié à une question financière ? On a en tout cas une baisse très nette. On verra quelle sera l’évolution l’année prochaine. La communication entre partenaires Troisième partie de l’enquête : la communication entre partenaires sur le VIH/ sida. Parle-t-on de la question avec un nouveau partenaire ? Trente-deux pour cent en parlent systématiquement ou plus souvent, contre 42% qui le font occasionnellement ou ne le font jamais [26% n’ont pas de relations sexuelles]. À la question « Quand décidez-vous d’arrêter d’utiliser le préservatif avec un partenaire régulier ? », 29% répondent « jamais », 37% « après 6 mois », 18% « après 1 mois », 7% « après une semaine ». Neuf pour cent n’ont pas un partenaire sexuel unique. Meilleure information = moins peur du sida Dernière question de ce sondage Ifop pour Sidaction-Élus Locaux Contre le Sida, les perceptions associées au sida. Le regard des jeunes est toujours assez ambivalent. Les deux affirmations qui recueillent le plus d’adhésion concernent l’existence de médicaments qui permettent de vivre avec le sida (91%) et « le sida me fait peur » (81%). Ceux qui sont les mieux informés ont le moins peur du sida. Sur les autres affirmations, on observe une minorité d’adhésion à des propos faux comme « il existe des médicaments pour guérir du sida », 27%, mais une minorité en progression (+14 points), qui peut s’expliquer par des avancées scientifiques spectaculaires de ces dernières années. Je vous remercie. (Applaudissements) M. Michel Taube Merci. Je voudrais parler de ce qui n’est pas dans l’enquête, c’est-à-dire qu’il n’y a pas de question posées aux jeunes sur les conséquences que l’homophobie et le climat du débat sur le mariage pour tous. Ce climat ambiant impacte-t-il la perception de la question du sida chez les jeunes ? 29


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M. Frédéric Dabi Pour cette étude, la question n’a pas été posée, non. Mais il existe des études sur la perception de l’homosexualité chez les Français, menées depuis les années 1960 par l’Ifop. On voit une très forte progression de l’acceptation de l’homosexualité au fil des ans : en 2012, c’est une manière comme une autre de vivre sa sexualité pour 87% des Français. Mais s’il y a bien une catégorie où il y a une plus grande tolérance de l’homosexualité, ce sont les jeunes de 15 à 24 ans. Il est à voir si le recul de 16 points sur les intervenants extérieurs dans les établissements est dû à des pressions. M. Michel Taube Entre la première enquête et la dernière, quelles sont les évolutions principales ? M. Frédéric Dabi D’abord, le sentiment d’information globale sur le sida a nettement progressé. Ensuite, on note qu’il n’y a plus de catégorie d’âge à la traîne, les 15-17 ans ont rattrapé leur retard – en tout cas en France métropolitaine où nous menons cette enquête. Il serait en effet intéressant, d’interroger les habitants des départements d’outre-mer, comme le rappelait George Pau-Langevin.

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Deuxième table ronde : (R)évolution thérapeutique et qualité de vie Mme Julie Nouvion Vice-présidente d’ELCS Nous excusons le Professeur Jean-François Delfraissy, le directeur de l’ANRS, qui devait être à nos côtés, mais qui a été retenu par une réunion sur le virus Ebola. Nous accueillons Yann du Comité des familles. Je vous propose de vous présenter en quelques mots pour commencer. M. Yann Metzger Membre du Comité des familles Bonjour tout le monde, je suis Yann Metzger, je suis membre et délégué du Comité des familles, une association qui est dans le XXe arrondissement de Paris, dans laquelle je me retrouve totalement parce qu’elle est basée sur l’autogestion. Il y a beaucoup d’énergie et de motivation chez les militants ; l’association est ouverte à tous : homos, non-homos, vieux, jeunes, non-séropos… J’ai appris ma contamination en 1990, et j’ai commencé à être traité en 1992. Ensuite, j’ai fait un ulcère à l’estomac et c’est à ce moment-là qu’on m’a dit que j’avais l’hépatite non A non B, qui ne s’appelait pas encore l’hépatite C. J’étais dans un refus global de prendre de l’Interféron, car les pourcentages de réussite que je lisais dans la presse n’étaient pas du tout représentatifs de la réalité que je voyais autour de moi, et surtout concernant les dégâts causés par ce médicament – même si, il ne faut pas le nier, il a aussi sauvé des personnes. Si j’ai décidé de venir ici aujourd’hui, c’est aussi pour vous donner une très bonne nouvelle, que certains d’entre vous connaissent déjà, c’est la révolution de ce médicament, cette nouvelle molécule [le sofosbuvir, commercialisé sous le nom de Sovaldi par les laboratoires Gilead, ndlr]. Cela n’a pas été facile pour moi, et pourtant, après presque 20 ans avec le même infectiologue, il me semblait qu’une réelle confiance s'était bien installée. Il me semblait que je pouvais, au vu la longévité de ma pathologie, accéder tout à fait normalement à ce médicament. Donc l’Afssaps s’est réunie pour juger si j’étais prioritaire. C’est le grand drame, pour nous, les personnes concernées : à quel moment, en fibrome 2, 3, en fonction de quel infectiologue, on va pouvoir bénéficier de ce médicament-miracle. Depuis 15 jours j’ai 31


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appris que je n’avais plus de trace de VHC dans le sang, ce qui n’empêche pas qu’il faut que je continue mon traitement pendant six mois. Donc je suis bien remonté, parce qu’en tant qu’association, on a de plus en plus de gens qui viennent nous voir en nous disant : « je suis désespéré ». Vous pouvez écouter notre émission de radio « Vivre avec le VIH » sur 106.3 FM, vous aurez des témoignages accablants de personnes qui sont en F2 avec des pathologies-types et qui n’ont pas accès au traitement, avec des réponses très aléatoires. Ce qui me fait peur aussi c’est que les clivages entre les malades soient renforcés : « Pourquoi toi tu as eu ton traitement et pas moi ? » Mes questions sont simples : quand est-ce que les politiques vont vraiment décider de mettre un coup de pied là-dedans, dans tous ces lobbys, dans tous ces labos qui se gavent ! – il n’y a pas d’autre mot. Je sais que la recherche coûte cher, mais d’abord la recherche c’est subventionné… Je connais le prix d’un avion Rafale, je sais plein de choses donc il ne faut pas me la faire ! Je connais l’histoire du VIH, j’ai perdu énormément de monde. Donc quand on est en France, le médecin doit donner le meilleur médicament qui existe à son patient ! (Applaudissements dans la salle) M. Julie Nouvion Je voudrais faire le lien avec les interventions précédentes. Quel est votre regard sur l’évolution sociétale, au regard des relents moraux pendant le trop long processus sur le mariage pour tous ? M. Yann Metzger Nous avons repris le Projet Madeleine, fondé par Madeleine Amarouche en Suisse, dont le principe était « Je suis concerné, je vais parler aux jeunes de ce que c’est de vivre avec le VIH ». Les lycées et les collèges qui nous ont le plus acceptés, c’est en banlieue, avec des partenariats très forts avec les infirmières scolaires. Donc oui, avec tous ces tabous, le fait qu’on ne puisse pas parler de sexualité à l’école, des manières de s’aimer, j’ai l’impression qu’on régresse dans la censure… Mme Julie Nouvion Avez-vous un commentaire sur l’essai Ipergay ? M. Yann Metzger Pas réellement, non. Je ne peux pas être sur tous les fronts ! 32


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Mme Julie Nouvion Je voudrais revenir sur l’effet du prix du médicament auquel on a accès, quand on y a accès. Aujourd’hui, concrètement, où en est-on sur le médicament ? M. Yann Metzger La Ministre de la Santé a presque fait passer son annonce pour quelque chose de formidable, pour les gens qui n’ont aucune connaissance sur ce sujet, à savoir qu’il y aurait une prise en charge à 100% sur ce médicament. Je rappelle simplement que pour les maladies chroniques ça fait plus de 60 ans que le 100% existe donc merci de cette annonce obsolète ! Sur le prix du médicament, c’est l’État qui doit réorienter ces marges qui sont d’une impudeur totale. On sait le coût de revient du traitement. Il y a des limites ! Je vois que les chaises de devant, celles des politiques, sont déjà vides quand les témoins sont là… Qui a le pouvoir de faire baisser ce prix ? Qui peut me répondre ? Intervenant dans la salle C’est une proposition que nous avons fait au niveau interassociatif, qui s’appelle la dispense d’office. Elle a été étudiée par le cabinet de la Ministre, mais personne n’a eu le courage de l’appliquer, parce que « on aime l’industrie » ! Cette industrie des labos fait son argent à la Bourse en rachetant une start-up, c’est complètement immoral et l’État est coupable de ça ! (Applaudissements) M. Michel Taube Est-ce que vous travaillez avec ELCS ? M. Yann Metzger Nous sommes pour le rassemblement, pour l’énergie des petites associations car on sait que quand ça grossit trop ça perd un peu de sa ferveur… Actuellement, quelqu’un qui apprend sa séropositivité, ça reste pour lui une météorite qui lui tombe sur la tête, comme hier. Les associations sont là aussi pour que des personnes concernées depuis plus longtemps lui disent : « Tu vas pouvoir t’en sortir ». Je crois qu’il faut donner et redonner la parole aux personnes militantes concernées. Pour les vieux séropositifs, il reste des pathologies qui ne sont pas toutes prises en charge, je pense à la neuropathie par exemple. L’ostéopathie n’est toujours pas reconnue et prise en charge non plus. 33


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Mme Julie Nouvion Oui, les médecines douces sont trop rarement utilisées pour soulager la maladie ou les effets secondaires des traitements. Nous allons parler de communication lors de prochaine table ronde. Est-ce qu’il est plus difficile de parler du VHC que du sida ? M. Yann Metzger C’est difficile parce que c’est plus sournois, c’est une maladie qui peut mettre longtemps à se déclarer. Il y a la problématique de qui a le droit d’être soigné, qui n’a pas le droit d’être soigné… Je pense que si j’ai eu accès à ce traitement, c’est parce que j’étais informé et que je suis arrivé avec de la matière ; je pense au mec ou à la nana en Province et qui n’a pas l’information, qui va en bouffer de l’Interféron ! Je voudrais dire aussi que le 1er décembre nous serons en direct de la Place de la République, Sandra tient une émission de radio. C’est l’occasion de passer un moment avec nous et de passer nous faire un coucou. Je voudrais vous présenter également la Maison des familles, le Comité des familles qui est une association créée pour des personnes concernées par le VIH, qui sont aussi entourées de gens avec un parcours VIH. Le VIH nous concerne tous. La force de cette association c’est un réel partenariat avec les personnes. On s’est aperçus que quand une personne est envoyée au Comité des familles, après deux mois, à son prochain rendez-vous, elle a repris de l’espoir. Pourquoi ? On a

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énormément de femmes qui apprennent leur séropositivité au moment où elles sont enceintes. Elles sont reçues par des mamans qui sont passées par là, par ce sentiment d’abandon, ce sentiment qu’elles vont mourir, que l’enfant va forcément naître séropositif. Il y a une parole libre. Je ne veux pas faire de guéguerre entre associations mais je trouve qu’on fait un boulot énorme avec le budget qu’on a. Cela passe aussi par la convivialité, par le partage d’un repas avec les malades, comme peut le faire également l’association Les Petits Bonheurs. Je sais que les délégués de l’État, les élus et d’autres se plaignent qu’il n’y ait « pas vraiment de retour » ! Mais le retour il est là, dans le partage. Intervenante dans la salle Je voulais simplement signaler que l’association Sol en Si partage également des repas, avec des adolescents, des jeunes mamans, des volontaires ; il y a des fêtes de Noël… Autre intervenante C’est dans toutes les associations. Il faut arrêter de se tirer dans les pattes entre nous aussi !

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Troisième table ronde : VIH, hépatites : remporter la bataille de la communication M. François Dupré Directeur général de Sidaction Bonjour à toutes et à tous. Je voudrais d’abord réagir au titre de cette table-ronde. Au Sidaction, c’est très clair, nous sommes sur un thème qui est le VIH/sida. C’est en partie un choix de communication, pour être impactant. Une autre question est : faut-il parler de VIH ou de sida ? Je vous le dis très simplement : pour le grand public, le VIH c’est un mot qui reste très technique. Nous recommandons de parler du VIH/sida ou du sida, et pas simplement du VIH si on veut être sûrs qu’on est bien compris. Enfin, « bataille de communication » oui mais aussi « bataille de la mobilisation ». 4 enjeux de communication pour le Sidaction Quels sont les enjeux de communication du Sidaction ? J’en ai identifié quatre. Le premier, c’est la lutte contre la banalisation de la maladie malgré les avancées considérables. Les traitements font que, de plus en plus, on parle d’une maladie chronique. Le second point, c’est qu’arrive aujourd’hui une génération qui est « née avec les traitements », et pour laquelle il faut avoir un discours. Dans le sondage de l’Ifop, 27% sont d’accord avec cette affirmation selon laquelle « il existe des médicaments pour guérir du sida ». Si vous êtes convaincus que vous pouvez guérir du sida, les messages de prévention ne vont pas passer ! On voit à quel point le côté rassurant pour les personnes s’améliore, et ça c’est lié aux traitements. Le troisième point de nos enjeux de communication, c’est de rappeler l’importance de la recherche qui sera, à terme, la solution. Enfin, notre association ne vit que de dons, ce qui nous oblige à réfléchir à la notion d’adhésion. Une mobilisation hétéroclite Quels sont les enjeux de mobilisation pour Sidaction ? Compte tenu de nos moyens, nous communiquons en mobilisant. On travaille beaucoup avec les journalistes, les animateurs, les présentateurs, les membres des médias. C’est comme ça qu’on arrive à organiser les trois jours du Sidaction médias. Une autre communauté avec laquelle on travaille beaucoup, ce sont les artistes. On en a un exemple avec un album que nous lançons en ce moment qui s’appelle le Kiss & Love, avec une très grande prime télévisuel. C’est l’occasion, à travers le divertissement, de parler du sida, à travers des personnes très populaires, ce qui a un impact fort en termes de mobilisation. Enfin, nous agissons auprès des jeunes, notamment à travers un concours de films vidéo. 36


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Parler « vrai » Notre premier objectif c’est de maintenir le VIH/sida à un haut niveau de présence positive et pérenne dans l’esprit du public, c’est-à-dire qu’on veut que les messages restent. Pour cela, nous avons comme règles de parler vrai sur la maladie et la recherche, d’être concrets et proches des personnes, de faire parler les gens, de chercher l’adhésion, et enfin de ne pas relayer les objectifs de communication politique, qui sont indispensables mais différents des nôtres, qui sont beaucoup plus larges. Je vous remercie. Mme Lucile BLUZAT Responsable du Pôle Santé sexuelle de l’Inpes Bonsoir. Je vais vous parler des outils de campagne de l’Inpes. La sexualité est quelque chose d’intime, donc les gens ont des visions très différentes sur ce sujet. Par conséquent, remporter la bataille de la communication est quelque chose de difficile. Concertation, expertise et adaptation des campagnes La communication est un outil parmi d’autres dans la lutte. On m’a souvent demandé « est-ce que vous évaluez [l’impact de vos campagnes de prévention, à l’Inpes] ? » Oui ! Je l’ai dit, les publics sont hétérogènes. Nous voulons toucher les gens au plus près, avec les bons messages, avec Internet, dans les médias particuliers. Il y a une phase de concertation. Nous agissons dans le cadre du Plan national de lutte contre le VIH/sida. Nous travaillons avec l’Institut de Veille sanitaire, avec des groupes d’experts, avec la Direction générale de la santé (DGS), avec l’Inserm, avec les associations et les acteurs de terrain. Nous consultons également des universitaires. Nous avons un groupe d’experts pour la population des homosexuels masculins, un pour la population jeune, un pour les migrants d’Afrique subsaharienne, et un pour les Départements français d’Amérique (DFA). On fait un travail de dentelle. Il faut à la fois avoir une vision large, et des messages plus précis. On a des campagnes adaptées. Par exemple, on va faire des annonces dans la presse gay locale, la presse gay nationale, sur les sites Internet de rencontre et les sites gays, de la même manière qu’on va avoir des partenariats avec la radio Africa n° 1. On va également diffuser dans les commerces gays, dans le réseau de magasins exotiques. L’exemple d’une campagne sur le préservatif Je vais vous monter l’exemple d’une campagne de 2009 sur le préservatif. L’idée 37


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c’est que tout le monde était concerné dès lors qu’il avait un nouveau partenaire sexuel. L’objectif, c’était de sortir de cette notion de « groupe à risque », et de recentrer le sujet sur les situations à risque. Donc on avait Jean-Pierre, qui avait trompé sa femme sans préservatif et qui le regrettait. Il témoignait qu’il avait fait un dépistage et qu’il avait voulu en parler. On avait Paul aussi, en couple avec un homme, qui expliquait qu’il avait eu une relation sans préservatif un été, et qu’il avait réutilisé le préservatif avec son compagnon le temps d’avoir le résultat du test. Enfin, Maryse, en situation de divorce, qui redécouvre le plaisir sexuel et dit qu’elle utilise le préservatif. Nous avions également produit une carte postale, diffusée dans les lieux de convivialité gay. Le message était adapté, puisqu’on sait grâce aux études que les couples d’hommes sont plus ouverts au multipartenariat. Nous travaillons aussi avec le magazine et site web de prévention Prends-moi. L’indicateur annuel du nombre de dépistages effectués, du nombre d’appels reçus au numéro de Sida info service, et la fréquentation du site de l’Inpes sont quelques outils parmi d’autres pour évaluer l’impact de nos campagnes. La communication peut se mettre au service de politiques d’élargissement des offres de dépistage. M. Michel Taube Quel est le rôle d’Internet dans votre communication ? M. François Dupré Nous avons une génération de digital natives, c’est vrai qu’il faut que nous allions plus loin sur ce point. Mme Julie Nouvion L’enquête Ifop-Sidaction-ELCS montre qu’Internet reste la première source d’information des jeunes… Mme Lucile Bluzat On a vu que les réseaux sociaux étaient une source d’échanges entre amis, de témoignages. On a créé un site qui s’appelle « On sexprime », destiné aux jeunes, qui aborde les sujets tels que le VIH, les premières fois, l’égalité femme/homme, le préservatif… Nous avons 4 millions de vue sur notre chaîne Youtube. Ce qui marche, c’est que les utilisateurs posent des questions, on les reprend et la discussion s’installe. 38


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M. Michel Taube Quelle est l’évolution de vos moyens ? M. François Dupré Globalement nos moyens sont stables. Pour maintenir un tel niveau de budget, cela demande une énergie de mobilisation considérable. Mieux on vit avec la maladie, plus il faut se battre pour susciter l’intérêt. Mme Lucile Bluzat À l’échelle de l’Inpes, les moyens sont en baisse, mais pas sur la prévention du VIH : nos participations aux moyens des associations ne sont pas en baisse. Les choses se redéfinissent également, on parle de santé sexuelle. On bénéficie de moyens qui augmentent sur la question des hépatites. La notion de santé sexuelle permet de parler de plaisir. Mme Julie Nouvion Vous avez évoqué les messages de prévention à destination de communautés. C’est important de rappeler que ce n’est pas « communautariste » mais que les messages sont mieux reçus dans ce cas-là… Mme Lucile Bluzat Oui, c’est important de pouvoir avoir un message précis, car parfois le message peut être trop large. Cette approche communautaire est importante. Question, femme dans la salle J’ai une question pour Mme Bluzat. Il y a une fusion entre InVS et l’Inpes prévue pour 2016, qu’en sera-t-il de vos belles campagnes de communication ? Mme Lucile Bluzat Nous travaillons sur cette fusion. Des groupes de travail ont lieu en ce moment, depuis quelques mois. 39


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M. Jacques Bancal Trente à quarante pour cent des premières relations sexuelles se font sous l’effet de l’alcool, ce qui altère la capacité à utiliser le préservatif, et je ne parle même pas du consentement ! Dans le document Questions d’ados, rien n’est dit sur cette question ! J’interpelle l’Inpes depuis plusieurs années, sans succès. Mme Lucile Bluzat Ce que je peux vous dire c’est que sur le site « Onsexprime », il y a des conseils sur les premières fois, et on y parle d’alcool et des substances psychoactives. M. Michel Taube Merci à tous pour cette table ronde, et on rappelle que la diffusion de l’émission Kiss and Love au profit du Sidaction aura lieu vendredi sur la première chaîne. L’album est déjà sorti.

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Quatrième table ronde : L’innovation au cœur de l’action M. Michel Bonjour Président de SOS Hépatites J’ai vu des élus aujourd’hui parler à cette tribune, jamais personne n’a prononcé le mot hépatite ! Il aura fallu que ce soit un malade qui soit assis là pour qu’on parle d’hépatite. J’entends Sidaction parler du choix de ne parler que du sida… Usagers et « usagés » On a formé 1700 soignants en onze ans, des infirmières, des pharmaciens, avec un budget de 140 000 euros, sans un centime du gouvernement. L’année dernière, on a eu 3 000 balles de l’Inpes ! Alors les usagers, vous pouvez aussi l’écrire « usagés », ça marche aussi… Une innovation pour le plus grand nombre… chiche ! Et puis il y a cette révolution [thérapeutique, ndlr] avec beaucoup moins d’effets secondaires que les traitements précédents. Il y a un hold-up qui est fait par les laboratoires, mais les responsables [politiques, ndlr] laissent faire. Je n’ai rien contre le principe qu’un laboratoire de recherche gagne de l’argent ! Mais ici c’est immoral. On va forcer les gens à faire un choix entre un traitement à 71 000 euros avec le Sovaldi et deux autres médicaments, et un traitement de combinaison à « seulement » 48 000 euros, tout ça pour engraisser les labos. La loi Kouchner sur la démocratie sanitaire a été votée en 2002. Il y a deux endroits où les usagers ne sont pas représentés : au CEPS et à la soi-disant Commission de transparence de la Haute Autorité de santé (CT-HAS). On nous dit « rassurez-vous ! ». On est dans un changement total de paradigme quant au traitement, mais il faut donner les moyens aux associations pour accompagner les malades dans cette révolution. On n’a jamais été aussi puissants en matière de traitement, et on n’a jamais été aussi impuissants en matière d’accès ! Tout nous échappe. « L’innovation dans l’action », moi je veux bien, mais quels moyens d’action on se donne, justement, pour que cette innovation profite au plus grand nombre ? (Applaudissements) 41


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M. Jean-Luc Romero-Michel Je vais donner la parole à Dominique Versini, ancienne ministre, maire-adjointe, femme courageuse s’il en est, qui a parfois subi la foudre d’Act Up dans les réunions d’ELCS, de manière parfois injuste. Tu as toujours été à nos côtés. Merci d’être là et merci de continuer à Paris cette action qui est importante dans cette ville particulièrement concernée par le VIH. Mme Dominique Versini Adjointe à la Maire de Paris, ancienne ministre Chère Roselyne, je suis très heureuse de te retrouver là autour de Jean-Luc qui est quelqu’un que l’on connaît depuis bien longtemps. Je voulais vraiment remercier Jean-Luc pour son engagement sans faille depuis tant d’années. Il a réussi quelque chose d’assez exceptionnel, c’est d’engager autour de lui des élus de tous bords, de toutes origines, de différents pays, de France et d’ailleurs. C’est très important d’avoir du courage et de la détermination, et je crois que si beaucoup de progrès ont été accomplis, effectivement, Jean-Luc et beaucoup de gens qui se trouvent dans cette salle y sont vraiment pour quelque chose. Un axe fort sur la précarité et l’exclusion Pour ma part, j’ai toujours été engagée à travers mes actions avec un regard spécifique sur les questions de sida. Vous le savez, au Samu social, je me suis beaucoup engagée pour y faire avancer ces questions. Aujourd’hui, comme adjointe à la maire de Paris, je suis heureuse de pouvoir continuer à participer à cette lutte, à l’information. Mes fonctions sont, comme toujours, la lutte contre la précarité et l’exclusion, mais également de la Protection de l’enfance, ce qui est un domaine très intéressant pour intervenir en amont auprès des ados pour les préparer à leur vie de jeune adulte. Nous avons, à l’Aide sociale à l’enfance (ASE), beaucoup de jeunes mineurs étrangers isolés, venus d’ailleurs, de pays à risques. Sans discrimination, nous menons ce travail d’information, d’accompagnement, de mise en place de lieux adaptés, d’aide à l’accès au logement et au travail pour les personnes malades en situation de précarité. Nous travaillons ensemble avec mon collègue Bernard Jomier, adjoint à la Santé, en lien avec les hôpitaux, pour une stratégie coordonnée. 42


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Solutions collectives co-construites Paris s’engage, Anne Hidalgo l’a dit, avec une vingtaine de maires de grandes capitales dans le monde, contre le sida, pour faire bénéficier partout dans le monde des traitements dont on bénéficie ici. Nous pouvons être collectivement fiers des avancées, il y a encore beaucoup de choses à faire, avec vous. Nous sommes aussi très attachés à avoir des politiques co-construites avec les personnes elles-mêmes pour mettre en place des dispositifs conformes aux besoins plutôt que des politiques qui tombent d’en haut. Pour conclure, vous pouvez compter sur ma détermination, dans mon domaine, à être auprès de vous, avec Jean-Luc. Je voulais dire encore une fois à Jean-Luc combien j’admire son engagement dans tous les combats difficiles dans lesquels il est engagé. Cela fait si longtemps et il le fait avec une telle sincérité. C’est pour ça que tous les élus que nous sommes, d’où que nous venions, quels que soient nos parcours – atypiques pour Jean-Luc et pour moi – nous sommes vraiment fiers, Jean-Luc, d’être tes amis et de continuer à t’accompagner. (Applaudissements). Jean-Luc Romero-Michel Merci. La deuxième marraine de l’association est une autre femme elle aussi atypique. Elles ont bien un point commun toutes les deux, c’est que ce sont des femmes courageuses, qui ont des convictions, qui les défendent jusqu’au bout, au risque d’être minoritaires dans leur camp. Je me rappelle à l’époque quand certains voulaient gouverner la Région Île-de-France avec le Front national, Dominique, tu t’es levée contre ça et tu as permis que cela n’arrive pas [en 1998, ndlr]. Et puis bien sûr comment ne pas se rappeler du Pacs et de ce discours [de Roselyne Bachelot] à l’Assemblée nationale que peu d’entre nous ont oublié, parce qu’il fallait avoir du courage d’aller dire, devant certains de ses amis politiques, ses convictions. Élus Locaux Contre le Sida permet de réunir des gens comme cela. Que Roselyne Bachelot soit la deuxième marraine de l’association, c’était naturel. D’abord parce qu’elle a vraiment été à l’origine de sa création. Le jour où on a créé cette association, ça n’intéressait pas grand monde, il faut le dire. Je suis allé voir Roselyne, et elle m’a beaucoup encouragé. Elle est toujours là et c’est pour ça que nous sommes très honorés que tu puisses, pour 2015, être à nos côtés. Tu n’as jamais renoncé à tes convictions, même si ce n’est pas toujours facile !

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Intervention de Mme Roselyne Bachelot-Narquin Ancienne Ministre de la Santé et des Sports Monsieur le Président, cher Jean-Luc, Madame la Ministre, chère Dominique, Mesdames et Messieurs les élus, Madame la conseillère régionale qui avez animé ce colloque, Je suis très heureuse de me retrouver parmi vous. Je suis effectivement membre d’ELCS depuis 20 ans. Des engagements toujours bien présents Ma fidélité à cette association n’a pas été démentie à travers les vicissitudes des mandats. En 2012, j’ai décidé d’abandonner la vie politique, mais pour moi cela veut dire abandonner des mandats, mais pas les engagements citoyens qui sont les miens. Dieu sait si la lutte contre le sida et ses coinfections reste au cœur de mon engagement, dans mon nouveau métier de chroniqueuse-journaliste [sur la chaîne D8 dans l’émission Le Grand 8, ndlr], et dans mes engagements associatifs. JeanLuc, oui, je partage absolument les remerciements et les saluts que t’a adressés Dominique Versini. Tu es un exemple dans le milieu associatif parce que tu as su allier l’engagement et l’originalité, l’innovation. Une réalité dramatique à rappeler au quotidien Au début de l’épidémie de sida, un certain nombre de personnes sont restées les bras ballants devant l’angoisse, l’anxiété, l’immensité qui a amené les organisations sanitaires internationales à déclarer le sida pandémie. Aujourd’hui encore, alors que pour beaucoup de nos compatriotes, le sida apparaît comme une histoire ancienne, il n’est sans doute pas inintéressant de rappeler certains chiffres: dans notre pays, il y a plus de 80 000 personnes sont traitées, dont 27 000 qui sont en échappement thérapeutique et 3 000 en échec thérapeutique complet. Depuis 2012, nous savons qu’il y a 35 millions de personnes séropositives dans le monde. Tout le monde sait bien que c’est en fait beaucoup plus, puisqu’il y a des pays qui ne sont pas en capacité de compter les malades, je pense aux théâtres de guerre, d’autres qui cachent le nombre de malades, comme la Chine, et d’autres pour des raisons religieuses comme l’Arabie Saoudite. En France, on note avec intérêt que le nombre de dépistages continue d’augmenter, cinq millions deux cent milles au total, mais, néanmoins, et c’est tout à fait inquiétant, on constate 44


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que 30% des malades sont dépistés à un stade trop tardif (soit d’un sida avéré, soit avec un taux de CD4 inférieur à 200). Les tests rapides ont permis sans doute d’augmenter les dépistages. Il faut donc continuer ce combat, mené par l’État, la Sécurité sociale, les professionnels de santé, les associations, et les élus locaux. 16 000 élus mobilisés ! Ces élus locaux, qui sont au nombre de 600 000, vont être renouvelés, entre les élections municipales de cette année et les élections départementales et régionales de 2015. C’est donc tout un travail qu’il va falloir recommencer ! On va avoir besoin de vous, du tissu associatif, épaulé par un certain nombre d’experts. J’ai beaucoup apprécié la communication de M. Bonjour, qui m’a rappelé un certain nombre de souvenirs – comment dirais-je ? – toniques ! Act Up avait déposé sur les marches du ministère de la Santé quelques éléments sanguinolents… On a donc tout ce stock d’adhérents à ELCS, 16 000, surtout des élus municipaux, à reconstituer, qui sont autant de missi dominici, qui ont acquis une expertise et peuvent la communiquer à leurs collègues. Les moyens importants des collectivités locales On voit bien que ces collectivités territoriales ont des moyens extrêmement puissants, sur des distributeurs de seringues, de préservatifs, l’édition de documents à certains publics ciblés. Elles ont aussi des moyens d’information indirecte – car Dieu sait si la communication des collectivités locales est abondante. Vous avez vu également que la Ville de Grenoble a décidé de supprimer les panneaux dédiés à la publicité, certains remplacés par des arbres et d’autres dédiés à la communication municipale. Je pense que sur ces panneaux, on pourrait faire de la santé publique, en particulier liée à la lutte contre le sida. Les collectivités territoriales sont aussi représentées dans un certain nombre de structures: l’hôpital, les écoles, l’université… Il suffit parfois d’aller dans un conseil d’administration et d’alerter. Au CHU d’Angers où j’ai siégé, j’ai demandé un rapport sur l’accueil des personnes séropositives. Cela a permis de changer les choses et d’avoir un accueil plus chaleureux et plus humain. HSH, seniors, contaminations en province Je voudrais insister sur trois points. On voit quand même des évolutions qui interpellent les élus locaux. On voit depuis un certain temps une nette recrudescence des cas de positivité chez les homosexuels masculins. Deuxième élément, pour la première fois en 2012, il y a eu plus de découvertes de séropositivité en Province 45


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qu’en Île-de-France. Les courbes se sont croisées. Troisième élément, une nette augmentation des dépistages positifs chez les personnes âgées de plus de 50 ans. Le nombre de cas de séropositivité est passé de 12 à 17%. Et 2% des cas sont des personnes de plus de 70 ans. Cela interpelle l’élu local. La baisse de la garde chez les homosexuels masculins doit entraîner les élus locaux à multiplier un certain nombre d’actions à destination de ce public qu’on a laissé tomber. Distribution de seringues, de préservatifs, communication ciblée, et également mise à disposition de locaux pour les associations communautaires. Le deuxième élément est que le sida n’est pas la maladie de Paris et des territoires d’outre-mer ! Un agriculteur du Maine-et-Loire me disait « Moi je risque rien, je fais l’amour qu’avec les filles du village ! » (Rires) Il reste un effort très net à faire en Province, dans les grands centres urbains comme dans les zones rurales. La question du sida chez les personnes de 50 à 70 ans n’est pas vraiment prise en charge en termes de santé publique. Il y a vraiment une zone grise à ce niveau-là. C’est à cette période de leur vie que les gens arrêtent de travailler et ne sont plus suivis par la médecine du travail, les femmes ne sont plus en activité génésique donc elles laissent un peu tomber les visites chez leur gynécologue. On voit bien que l’élu local, qui est en première ligne sur un certain nombre d’opérations auprès des seniors (maisons de retraite, etc.), a un rôle à jouer avec cette population qui est en pleine activité, en pleine activité sexuelle… Il faut le dire… Ce n’est pas parce qu’on a plus de 50 ans qu’on ne baise plus ! (Rires et applaudissements dans la salle) On a donc toute une population où il y a véritablement des drames (on détecte des sidas à un stade très avancé) et pour laquelle les élus locaux peuvent s’impliquer dans toutes ces zones grises. Gardons l’espoir Mesdames, messieurs, je sais que vous êtes tous des acteurs extrêmement impliqués dans cette lutte contre le sida. Nous n’avons pas vaincu ce sida que nous espérions, avec Jean-Luc il y a vingt ans, terrassé. Nous ne sommes pas désespérés. J’ai fait mienne une phrase de Scott Fitzgerald : « Savoir que les choses sont sans espoir et cependant tout faire pour les changer ». Nous pouvons tout faire pour les changer, et garder l’espoir. (Applaudissements)

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Intervention de M. Jean-Luc Romero-Michel Président d’Élus Locaux Contre le Sida Mesdames les Ministres, chère Dominique et chère Roselyne, Mesdames et Messieurs les élus, Chère Princess Erika, Pour la dix-neuvième fois, je suis ravi de vous retrouver pour ces états généraux d’Élus Locaux Contre le Sida. Comme à chaque fois, je vois des visages que je connais bien, des élus, des institutionnels, des associatifs. Le sida se soigne et se combat par la politique, même si malheureusement nous sommes de moins en moins nombreux à l’affirmer. J’espère, comme le dit Roselyne, que les nouveaux élus municipaux vont nous rejoindre, même si on voit bien que le sida n’est plus à l’agenda politique et médiatique. Nous sommes dans un beau lieu, un lieu dans lequel nous avons l’habitude de venir, où nous avons été particulièrement bien reçus par le passé: j’ai une pensée particulière pour Bertrand Delanoë, qui a été le maire de cette ville, un maire très engagé aux côtés d’Élus Locaux Contre le Sida. Aujourd’hui, bien sûr, c’est Anne Hidalgo qui est toujours à nos côtés. De quelle politique parlons-nous ? Oui, le sida se soigne et se combat par la politique, mais de quelle politique parlons-nous ? Celle qui divise, qui discrimine, qui pour des raisons électoralistes accepte de s’abaisser et de s’asseoir sur nos valeurs démocratiques et notre devise républicaine Liberté, égalité, fraternité ? Celle qui préfère les freins idéologiques au progrès pragmatique ? Celle qui pointe du doigt les malades responsables de tous les maux ? Celle qui considère la personne séropositive non pas comme un être humain comme un autre mais comme une bombe virale, un contaminateur en puissance, celle qui pénalise par principe, celle qui refuse l’éducation à l’information, notamment des plus jeunes ? Ou l’autre politique, celle qui regarde la réalité telle qu’elle est, non déformée par un prisme idéologique, celle qui agit en fonction d’un seul intérêt, l’intérêt général, celle qui croit que nous devons tous pouvoir regarder la devise au fronton de nos mairies sans rougir, celle qui considère que l’information est la solution, que l’éducation est une chance, celle qui croit en l’humain et qui agit pour lui. Vous le savez déjà, de mon côté, j’ai fait mon choix. Votre présence ici laisse supposer le vôtre. 47


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Une société qui se recroqueville Le constat des crispations, des divisions, des tensions dans notre société, nous pouvons tous objectivement le faire. Il suffit de regarder les débats sur les salles de consommation à moindres risques, sur les programmes scolaires d’éducation à la vie affective et sexuelle à l’école, ou sur le mariage pour tous. J’en profite pour saluer Vincent Boileau-Autin, le président de la LGP Montpellier et premier marié, c’est un honneur que tu soies là à nos côtés. Du travail, nous en avons. La pertinence de l’échelon local : la Déclaration de Paris L’année 2014 a quand même été riche en matière d’élection, Roselyne le rappelait, deux élections majeures ont dessiné la France, les municipales, et les sénatoriales. Content ou pas content du résultat, pour être parfaitement honnête ce n’est pas le problème d’ELCS: le sida n’est ni de droite ni de gauche, ni du centre d’ailleurs. Je voudrais dire mon affection à Philippe Lohéac, qui doit être dans la salle, qui a été de toute l’aventure ELCS, et de celle qui a été la moins drôle, puisqu’il assume le poste de trésorier. (Applaudissements). Je vous remercie tous pour ce combat que nous avons mené, souvent montrés du doigt à une certaine époque d’ailleurs. Je tenais à vous informer du lancement d’un spot TV sur l’histoire d’ELCS et surtout sur les combats portés par notre association depuis 20 ans contre le sida. Ce projet, nous souhaitons le concrétiser via le site Ulule et un appel au financement participatif. En somme, ce projet ne verra le jour que si les élus, si quelques personnes y mettent quelques sommes. Il nous faut réunir 5 000 euros. J’espère pouvoir compter sur vous. Les élections sénatoriales et municipales créent, bien sûr, pour ELCS, un potentiel réservoir de nouveaux élus qui peuvent s’engager avec nous dans ce combat pour la dignité et l’égalité, pour la prévention, l’information, le soutien aux personnes, l’aide aux associations… La liste est longue ! Je ne cesse de le marteler depuis longtemps, l’échelon local est particulièrement pertinent, légitime et efficace dans ces combats. Je veux voir dans l’annonce d’Anne Hidalgo une consécration du rôle de l’échelon local, clairement à l’initiative, villes actrices de la transformation sociale. Je souhaite vraiment qu’ELCS puisse participer activement à cette initiative portée entre autres par l’Onusida et son très engagé directeur exécutif, Michel Sidibé. Sans nul doute, cette initiative va énormément faire avancer les choses pour la concrétisation de ce nouvel objectif des « 90 / 90 / 90 » : augmentation à 90% de la proportion des personnes vivant 48


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avec le VIH qui connaissent leur diagnostic, augmentation à 90% des personnes vivant avec le VIH recevant un traitement antirétroviral, et enfin, l’augmentation à 90% de la proportion des personnes sous traitement qui ont une charge virale indétectable. La pertinence de l’échelon local : Metropolis Je veux vous donner un autre exemple de la légitimité et de l’efficacité de l’échelon local. J’étais, Jean-Paul Huchon l’a rappelé, il y a quelques semaines, avec lui, à Hyderabad, en Inde, pour le Congrès mondial de Metropolis, association qui réunit plus de 120 métropoles de plus d’un million d’habitants. Au cours de cette manifestation, sous l’impulsion de Jean-Paul Huchon, qui est donc aussi président de Metropolis, c’est un appel solennel de tous ces maires, demandant la levée des restrictions à la liberté de circulation et d’établissement des personnes séropositives qui a été adopté à l’unanimité, et croyez-moi dans cette salle il y avait des maires de certains pays, je pense au Qatar notamment, qui, au-delà du fait qu’ils ne respectent pas les femmes, qu’ils ne respectent pas les homosexuels qu’ils mettent en prison, interdisent leur territoire aux personnes séropositives, et c’est valable d’ailleurs pendant la Coupe du monde de football… Les plus grandes villes du monde s’engagent sur les droits humains. Pour mémoire, cet engagement a été porté aussi par l’AIMF que préside Anne Hidalgo. Rappelons qu’aujourd’hui encore 40 pays interdisent soit l’installation, soit l’entrée dans le pays aux personnes séropositives. Ces restrictions sont d’un autre âge, inutiles et surtout, inhumaines ! Loi de santé : SCMR, RDR en prison et dépistage Bien évidemment, l’échelon local ne peut pas tout faire. Il est un des maillons de la réponse au VIH et aux hépatites ; et du côté de l’État, l’année 2014 nous donne quelques débuts de satisfaction, puisqu’on nous annonce pour début 2015 la loi de Santé. Une loi tant attendue en ce qui nous concerne, tout simplement parce qu’elle envisage la concrétisation de certains projets si longtemps demandés par les associations. Je veux mettre en exergue trois points. Premier point : les salles de consommation à moindre risque. Nous sommes tous convaincus ici que ce type de dispositif est en fait un outil supplémentaire à la politique de réduction des risques, un outil qui concerne les usagers de drogue les plus précarisés, un outil qui a fait ses preuves en matière de santé, mais aussi en matière de sécurité, un outil qui fonctionne très bien chez nos voisins européens, avec des résultats fort probants. C’est pour ça qu’une expérimentation sur une durée de six ans est enfin une excellente nouvelle, quoi que puisse en dire certains politiques, qui 49


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préfèrent un positionnement idéologique à des personnes qui sont, rappelons-le, des citoyens. Nul doute qu’ELCS aura dans ce débat la volonté de déconstruire les peurs et les fantasmes. Notre positionnement nous permet d’être vus comme un partenaire privilégié par les élus. Profitons-en pour sortir de cette crispation idéologique. Le deuxième point que je veux mettre en exergue est l’introduction de programmes d’échanges de seringues en prison. Bien sûr, je peux comprendre l’inquiétude de certains membres de l’administration pénitentiaire. Comprendre, oui, mais pas accepter tant les expériences étrangères démontrent que l’introduction de ce type de dispositif au sein du monde carcéral ne constituera pas une atteinte à la sécurité des personnes et des personnels pénitentiaires. Rappelons que cela répond à une véritable urgence sanitaire, quand on sait qu’en France la prévalence au VIH et au VHC est trois à quatre fois plus élevée en milieu fermé qu’en milieu ouvert. Troisième point qu’il me paraît important de mettre en avant, le dépistage. En France, environ 40 000 personnes ne connaissent leur séropositivité et un tiers des porteurs de l’hépatite C ne le savent pas. C’est évidemment très important et cela a un impact négatif, et c’est pour cela que la promotion du dépistage doit se renforcer, tant c’est un outil individuel d’accès au traitement, mais aussi un outil politique de contrôle de l’épidémie, via la politique désormais consacrée du Test and Treat. D’où cette volonté de généraliser les tests rapides d’orientation diagnostique (les Trods), le dépistage rapide et, certainement autorisés dans les jours qui viennent, les autotests. Par contre, quelque chose est absent du projet de loi: le dépistage rapide de l’hépatite C. C’est fort étonnant alors que la Haute autorité de santé a rendu un avis très clair en mars dernier, préconisant l’utilisation de ce type de tests pour les personnes à risques éloignées des structures d’accès commun, notamment évidemment les usagers de drogue les plus marginaux. Alors à quand des Trods pour le VHC ? Voilà trois points de la loi de Santé qu’il nous paraissait important de mettre en exergue. VHC : le coût de la vie Sur le VHC, au-delà de la question du dépistage, se pose évidemment la question du coût démesuré, vous l’avez exprimé tout à l’heure, des traitements innovants. Il est pour nous inacceptable que des gens ne puissent pas bénéficier, à cause de ce coût, de traitements. C’est un des combats des années à venir. Nous avons la chance d’être dans un pays où nous accédons aux traitements, par exemple sur le VIH, que l’on soit avec des papiers ou sans-papiers – c’est une chance et c’est aussi un acquis. Imaginer que des gens continuent à mourir parce qu’on ne veut pas 50


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mettre l’argent pour leur payer les traitements c’est un vrai problème. C’est une des questions qu’il nous faut aujourd’hui plus que jamais porter. Outre-mer : un engagement politique à venir à la hauteur des défis Au-delà du projet de loi de Santé, je voudrais réagir sur les engagements de Mme George Pau-Langevin, parce que c’est la première fois qu’une ministre des Outremer a un discours aussi engagé. Je me suis rendu en Outre-mer, notamment en Guadeloupe, à Saint-Martin et en Guyane. J’ai toujours été frappé et consterné par le silence des élus sur cette question du VIH/sida. Je me souviens que le président du Conseil régional de la Guyane de l’époque, qu’on allait voir et qui nous disait « Vous savez le sida, c’est pas les Guyanais, c’est les étrangers qui vivent autour qui l’amènent »… Cela peut paraître dérisoire sauf que ce silence des élus est souvent pesant. Certes, l’argent c’est le nerf de la guerre. Mais la parole politique est importante, et les propositions politiques que George Pau-Langevin a faites pour les départements français d’Amérique (DFA) sont importantes, et je voulais l’en remercier. Je voulais dire aussi que dans ces départements, comme chez nous, le carcan de l’isolement doit vraiment être brisé. En Guyane, presque aucune personne séropositive n’a osé témoigner à visage découvert – une seule, elle est morte depuis ! Les associations ont plus que jamais besoin de soutien. Il y a quelques années, j’avais demandé pour les DFA un véritable Plan Marshall pour l’Outre-mer. Je suis très heureux d’avoir entendu les propositions fortes de la Ministre des Outre-mer et je compte sur son engagement pour mettre en œuvre les propositions annoncées. Information et maillage du territoire, garants d’une réponse au VIH efficace Je vais désormais terminer cette intervention en vous remerciant d’être toujours à nos côtés. Je veux remercier encore très chaleureusement tous les intervenants, Julie et Michel ont fait un travail remarquable en animant ces tables rondes, remercier encore nos deux marraines, Dominique et Roselyne. Je voulais insister sur le rôle de l’information dans le combat que nous menons. Cette information elle peut être menée de façon technique ou sur le plan de l’humour, comme dans la campagne d’ELCS avec les personnages historiques. Pour celles et ceux qui ne la connaissent pas encore, allez sur notre site, vous verrez qu’on peut faire de l’humour. Roselyne le fait très bien, les permanents d’ELCS ont fait aussi sans aucun moyen une très belle campagne. Ce que je peux vous dire, c’est que l’information est toujours la clé. Pour reprendre les termes d’un slogan d’Act Up-Paris, « Information = Pouvoir ». Une information claire, décomplexée, objective, ce n’est que comme cela, par exemple, que 51


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l’essai Ipergay sera compris. Cette information elle ne peut être portée que si le maillage des acteurs de terrain est assez serré. La richesse associative est un avantage collectif qui profite à toutes et à tous. Bien évidemment, je sais le contexte économique dégradé. Mais sachons nous projeter au-delà du court terme. Le tissu associatif est aujourd’hui menacé et a besoin de soutien. Il faut le préserver et le renforcer. Et surtout, sachons travailler ensemble et mutualiser nos expériences. C’est le but du label Ville engagée contre le sida. Bien sûr il s’agit dans un premier temps de rendre visible l’engagement d’une ville dans la lutte contre le VIH/sida. Annecy, Aubervilliers, Carrières-sous-Poissy, Montpellier, Toulouse, etc. ont déjà obtenu ce label. Dans un second temps, il s’agit de créer un véritable réseau de villes engagées et de mutualiser nos expériences. Communiquer sur l’engagement politique et avancer dans l’efficacité des réponses apportées au niveau local dans lutte contre le VIH/sida. Voilà les fondements et les raisons d’être de ce label, voilà les raisons d’être d’ELCS depuis 20 ans. Je vous remercie. (Applaudissements) Avant le cocktail, nous allons diffuser le message de Geneviève Fioraso, qui devait être avec nous mais a dû accompagner le Ministre des affaires étrangères aujourd’hui. Mme Geneviève Fioraso Ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche (Intervention vidéo) Mesdames les Ministres, Monsieur le Président d’Élus Locaux Contre le Sida, cher Jean-Luc Romero, Mesdames et Messieurs les élus, Mesdames et Messieurs les présidentes et les présidents, Mesdames et Messieurs, Je regrette vivement de ne pas pouvoir être avec vous ce soir pour ces XIXe États généraux de l’association Élus Locaux Contre le Sida, mais je tenais par ce message à vous exprimer mon soutien, mais aussi ma reconnaissance pour votre engagement. Le sida est un enjeu de santé publique majeur. En France, 150 000 personnes sont porteuses du virus du VIH et on estime que 30 000 ne le savent pas. Six mille nouveaux cas sont dépistés chaque année dans notre pays, deux millions dans le monde. Quant aux hépatites B et C, déclarées « grandes causes sanitaires » en France, elles touchent plus de 500 000 personnes, et plus 52


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de 350 000 personnes meurent chaque année dans le monde de pathologies liées à l’hépatite C. Un pôle recherche très actif et performant en France Les équipes de recherche françaises ont joué, vous le savez, un rôle crucial dans l’identification du virus du sida, et elles contribuent activement depuis 30 ans à la lutte contre l’infection. Elles sont mobilisées notamment depuis un quart de siècle à travers l’Agence nationale de recherche sur le sida, devenue en 2012 l’Agence nationale de recherche sur le sida et les hépatites B et C, dirigée par le Professeur Jean-François Delfraissy. La France est à ce jour le seul pays d’Europe à s’être doté d’une agence nationale dédiée à la coordination et au financement de la recherche contre le sida et nous pouvons en être particulièrement fiers. L’investissement a été constant. La communauté française a pu faire valoir son engagement et la qualité de ses travaux de recherche, au deuxième rang dans le monde, au cours de la 20e grande conférence internationale sur le sida, qui s’est tenue à Melbourne en juillet dernier, et qui est organisée par l’International Aids Society (IAS), présidée par le Prix Nobel Françoise Barré-Sinoussi, qui la préside depuis la Conférence de Washington de 2012. J’avais eu l’honneur d’accompagner cette grande chercheuse et de parrainer un partenariat de recherche en français entre le NIH et l’Inserm pour mieux lutter ensemble contre le sida au niveau international. Notre effort en faveur de la recherche, considérable, porte ses fruits, comme le montrent les avancées très récentes sur les nouvelles pistes de guérison ouvertes par les équipes de recherche du Professeur Didier Raoult à l’Institut hospitalouniversitaire Méditerranée Infection à Marseille et le Professeur Yves Lévy, à l’Institut Mondor de recherche biomédicale de l’Inserm – Professeur Lévy qui préside par ailleurs l’Inserm. Les perspectives de guérison sont donc meilleures, mais cela ne suffit pas. En France, sur les 6 000 personnes qui découvrent leur séropositivité chaque année, plus de 30% sont déjà à un stade avancé de l’infection. On voit l’urgence de développer des moyens de prévention innovants qui restent le moyen d’action le plus efficace pour lutter contre la propagation du virus et parvenir à son éradication, qui reste, je veux le rappeler, notre objectif. Essai Ipergay Je tiens donc à saluer ici le travail effectué en ce sens par l’ANRS, et l’ensemble des acteurs de l’essai ANRS-Ipergay. Merci au Professeur Jean-François Delfrais53


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sy, qui coordonne également toute l’action du gouvernement et des acteurs publics pour lutter contre le virus Ebola. Les services cliniques, les biologistes, les associations de malades et les volontaires doivent aussi être salués. Les résultats de cet essai coordonné par le Professeur Jean-Michel Molina à l’Université Paris-Diderot et l’Hôpital Saint-Louis, montrent l’efficacité, à près de 80%, d’un traitement préventif antirétroviral pris au moment des rapports sexuels. Cette étude est porteuse de progrès majeurs pour l’approche préventive de la maladie. Le projet « Hepatibivax » Je salue aussi la réussite du projet Hepatibivax, projet de vaccin contre les hépatites B et C, financé par l’Agence nationale de la recherche, qui a été primé au début de ce mois par l’Académie nationale de médecine et qui est porteuse d’espoir en termes de vaccination contre les hépatites B et C. Associer prévention, dépistage et traitements Mais la réussite d’un plan de prévention contre le sida ne passe pas uniquement par les progrès en laboratoires, aussi importants soient-ils. Cette prévention doit être totalement repensée en intégrant pleinement, en plus des paramètres biomédicaux indispensables, les paramètres comportementaux, socio-économiques, culturels, et politiques. C’est ce qu’on appelle la prévention combinée, qui vise à construire des synergies entre ces différentes stratégies de prévention. Il s’agit de toucher en priorité les publics les plus fragilisés, ceux qui n’ont pas accès à l’information, et qui sont donc les plus vulnérables. Il faut aussi faire converger dans une approche globale prévention, dépistage et traitements. Le bénéfice d’une réduction de la contamination, d’une prise en charge plus précoce, d’un traitement amélioré, profitera tant aux individus qu’à la collectivité, et cela à l’échelon national comme à l’échelle mondiale. Car vous le savez, ce sont toujours les pays du Sud qui payent le plus lourd tribut au fléau, et dans ces pays, ce sont les populations les plus exposées, les enfants et les femmes, qui sont davantage touchés. C’est pourquoi la collaboration avec ces pays, qui fait partie intégrante des missions de l’ANRS, est absolument essentielle. Succès du label « Ville engagée » L’enjeu est donc bel et bien collectif. Votre mobilisation à vous, élus, au sein de l’association Élus Locaux Contre le Sida, est donc capitale et donc je remercie à nouveau Jean-Luc Romero, qui a su briser le premier une espèce d’omerta politique, finalement. Merci à lui, c’était courageux. 54


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Les actions d’information et de prévention que mène cette association depuis près de vingt ans ont déjà porté leurs fruits. Je pense bien sûr la mise en place du label Ville engagée contre le sida, qui permet de porter au plus près des citoyens une cause dont il faut que chacun et chacune s’empare. Une future génération sans sida : notre invincible espoir ! Enfin, je voudrais redire mon engagement sans faille dans la lutte contre toutes les discriminations et toutes les stigmatisations. Je le porte dans les établissements d’enseignement supérieur et de recherche. C’est le regard de toute la société sur les malades qui reste encore à changer, et le travail que vous faites en ce sens auprès des élus, des associations, des professionnels de santé est tout à fait essentiel. La lutte contre le sida, maladie connue de tous au moment de son apparition, a mobilisé dans un combat commun les malades, les soignants, les associations et les ONG. Cette démarche originale, il faut l’étendre à d’autres pathologies, et c’est bien l’originalité de cette démarche qui explique les progrès de la médecine depuis trente ans, de manière collaborative. Mais le chemin reste encore long, il est difficile. De nouvelles avancées vont arriver. Je voudrais partager avec vous cette parole de Jean Jaurès : « L’histoire enseigne aux hommes la difficulté des grandes tâches et la lenteur des accomplissements, mais elle justifie l’invincible espoir. » Avoir demain une génération sans sida, c’est notre invincible espoir. Nous avons le devoir, en tant que citoyens, en tant qu’élus, en tant que chercheurs, soignants, associations de patients, de nous mobiliser pour que cet espoir se concrétise. Comme le dit si justement votre slogan, le sida se soigne aussi par la politique. Je vous remercie de votre attention et vous souhaite de très fructueux échanges. (Applaudissements) Princess Erika, artiste Chanteuse Bonsoir, je suis très heureuse d’être avec vous. Je reprends les mots de Geneviève pour dire que l’espoir, c’est la vie sans sida. Et c’est exactement le titre de la chanson que j’ai écrite pour le Collectif Vi(h)es plurielles, dont je suis la marraine. C’est un collectif qui s’occupe des femmes, qui sont les plus touchées par le VIH. Quand elles sont en âge de procréer, elles ne savent souvent pas qu’elles le peuvent [sans trans55


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mettre le virus à leur enfant, ndlr]. Elles s’enferment, elles s’isolent, et c’est une triple peine. Donc moi qui suis artiste, ma petite contribution à enchanter la vie, c’est ma chanson ! (Applaudissements) Diffusion du clip « La vie sans sida » de Princess Erika

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rĂŠvention


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Lexique Ce document n’a pas pour visée d’être exhaustif ; son but est de reprendre quelques termes très souvent utilisés dans la lutte contre le VIH/sida. AAH Allocation aux Adultes Handicapés. ALD Affection de Longue Durée. L’infection par le VIH est une ALD : les soins et traitements de cette affection sont pris en charge à 100%. Antirétroviraux Classe de médicaments utilisés pour le traitement du VIH (et autres « rétrovirus »). ATU Autorisation Temporaire d’Utilisation. Autorisation d’utilisation exceptionnelle et temporaire d’une spécialité pharmaceutique ne bénéficiant pas de l’Autorisation de Mise sur le Marché (AMM). La délivrance de l’ATU se fait sous certaines conditions (gravité de la maladie, absence de traitement approprié, mise en œuvre du traitement ne pouvant être différée). CD4 Lymphocytes T CD4+ (également appelés « T4 »). Cellules de défense de notre organisme (globules blancs), ils sont une cible du VIH. Le suivi de la charge virale et du taux de CD4 permet de connaitre l’évolution de l’infection et ainsi d’adapter le traitement. Charge virale (CV) Quantité de virus (exprimés en nombre de copies du virus dans un volume donné) présente dans le sang. La charge virale est dite « indétectable » lorsque celle-ci est en dessous du seuil de détection. Co-infection Infection par plusieurs agents pathogènes simultanément chez un même patient. La co-infection par le VIH et le virus de l’hépatite C est très fréquence chez les usagers de drogue injectable. Femidom Nom commercial de préservatif féminin. Les préservatifs féminins et masculins sont les seuls moyens de contraception qui protègent du VIH/sida et des autres IST. HSH Hommes ayant des rapports Sexuels avec des Hommes. Ipergay Essai conduit par l’ANRS, testant l’efficacité d’une offre de prophylaxie « à la demande » (c’est à dire seulement au mo58


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ment de l'exposition aux risques) chez des HSH très exposés au VIH. IST Infections Sexuellement Transmissibles. PEP Prophylaxie Post-Exposition (de l’anglais « Post-Exposition Prophylaxis ») ou TPE : Traitement Post-Exposition. Traitement d’urgence d’une durée d’un mois et à commencer de préférence dans les 4 heures et au maximum 48 heures après la prise de risque. PrEP Prophylaxie Pré-Exposition (de l’anglais « Pre-Exposure Prophylaxis ») est une nouvelle méthode de prévention contre le VIH, destinée aux séronégatifs particulièrement exposés au risque de contamination au VIH. Prévalence du VIH Nombre de personnes vivant avec le VIH. Prévention combinée Méthode de prévention associant dépistages réguliers du VIH et autres IST, traitements préventifs (pré-exposition, post-exposition), traitements curatifs, usage de préservatifs. Primo-infection Première phase de l’infection par le VIH. Dans la moitié des cas environ, la personne récemment contaminée ressent des signes (tels que de la fièvre, maux de gorge, fatigue...) mais la primo-infection peut aussi passer totalement inaperçue. SCMR Salles de Consommation à Moindre Risque, parfois appelées à tort « salles de shoot ». Espaces où les usagers de drogues apportent et consomment sur place leurs produits, sous la supervision d’un personnel qualifié. SIDA Syndrome d’ImmunoDéficience Acquise. Il s’agit d’un stade de l’infection par le VIH, au cours duquel une ou plusieurs maladies vont se développer en profitant de l’affaiblissement du système de défense de notre corps (= système immunitaire) qui est détruit par le virus : la survenue de ces « maladies opportunistes » caractérise le début du stade du sida. TasP Traitement comme Prévention (de l’anglais « Treatment as Prevention »), c'est-à-dire que le traitement permet non seulement d’améliorer la vie des patients mais aussi réduit le risque de transmission du VIH : le traitement est donc un outil de prévention collective. TPE Traitement Post Exposition (voir « PEP »). 59


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TROD Test Rapide d’Orientation Diagnostique. Simple d’utilisation, il permet d’obtenir le résultat en 30 minutes, et peut être utilisé dans un cadre délocalisé et non médicalisé. Le délai pour que le résultat négatif soit fiable est de 3 mois après la prise de risque pour un TROD. VHB Virus de l’Hépatite B / VHC : Virus de l’Hépatite C. VIH Virus de l’Immunodéficience Humaine, responsable du sida. Institutions ANRS L’Agence nationale de recherches sur le sida et les hépatites virales ANSM Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des produits de santé CAARUD Centres d'Accueil et d'Accompagnement à la Réduction de risques pour Usagers de Drogues CDAG Centre de Dépistage Anonyme et Gratuit CIDDIST Centre d'Information, de Dépistage et de Diagnostic des Infections Sexuellement Transmissibles COREVIH Comités de coordination de la lutte contre l’infection par le VIH CNS Conseil National du Sida HAS Haute Autorité de Santé HCSP Haut Conseil de la Santé Publique INPES Institut National de Prévention et d’Éducation pour la Santé INSERM Institut National de la Santé Et de la Recherche Médicale InVS Institut de Veille Sanitaire OMS Organisation Mondiale de la Santé Onusida Instance de l'ONU en charge de la lutte contre le sida

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Le VIH/sida en France Les chiffres clés du VIH/sida en France • 150 000 personnes sont séropositives en France (de 30 à 40 000 ignorent leur séropositivité) Nouvelles découvertes de séropositivité au VIH • En 2013, 6 220 séropositivités VIH ont été découvertes en France. - 43% chez les HSH - 37% chez les hétérosexuels nés à l'étranger - 18% chez les hétérosexuels nés en France - 1% chez les usagers de drogue • Les jeunes de moins de 25 ans représentent : - 8% des hommes contaminés par voie hétérosexuelle - 13% des femmes contaminées par voie hétérosexuelle - 14% des HSH (8% en 2003) Nouveaux cas de sida • 1 200 nouveaux diagnostics de sida ont été posés en 2013, un chiffre en diminution lente mais constante depuis 2000. • Dans 85% des cas, ces diagnostics concernent une personne n'ayant pas bénéficié d'un traitement antirétroviral avant l'entrée en stade sida, le plus souvent par méconnaissance de sa séropositivité.

Le dépistage en France • De 30 000 à 40 000 personnes ignorent leur séropositivité : elles ne représentent que 20% des personnes porteuses du VIH et on estime qu'elles sont à l'origine de 60% des contaminations chaque année. • 5,21 millions de tests ont été réalisés en France. 7% de ces sérologies sont réalisées dans un cadre anonyme (CDAG, Ciddist). Les diagnostics tardifs (25%) diminuent, surtout chez les hétérosexuels. Les diagnostics précoces (39%) augmentent, surtout chez les HSH. 61


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Motif du dépistage - 38% : présence de signes cliniques liés au VIH - 23% : un bilan systématique - 21% : une exposition récente au VIH. Les Trod (Test rapide d'orientation diagnostique) • Le nombre de Trod est en forte hausse : 56 500 tests rapides ont été réalisés en 2013 contre 31 700 en 2012 et 4 000 en 2011. • Il a concerné : - Les HSH, 30% en 2013 versus 69% en 2011 - Les migrants, 27% en 2013 versus 1% en 2011 - Les usagers de drogue, 5% en 2013 versus 4% en 2011 - Les travailleurs du sexe, 2% en 2013 versus 1% en 2011 - 30% des personnes ayant bénéficié d'un Trod en 2013 n'avaient jamais été testées auparavant. Le dépistage communautaire • En 2013, 60 associations ont effectué 56 500 tests rapides sur l'ensemble du territoire français ; 486 Trod se sont révélés positifs. Le taux de positivité était de : - 24,9/1000 pour les personnes prostituées - 17,9/1000 pour les HSH - 7,1/1000 pour les migrants - 2,4/1000 pour les usagers de drogue - 1,7/1000 pour les autres publics. • Ce dispositif est donc bien adapté aux populations particulièrement exposées au VIH.

La situation sociale des personnes touchées par le VIH Discriminations à l’encontre des PVVIH • Les discriminations : une réalité vécue par les personnes séropositives Enquête de Sida info droit – 2012 : une personne sur deux (47%) pense avoir déjà été discriminée du fait de sa séropositivité. Près de la moitié des personnes interrogées (48%) rapportent une situation vécue comme discriminante dans le domaine de la santé. 62


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• Une discrimination assumée Enquête KABP – 2010 : 73% des franciliens interrogés estiment que pour éviter les discriminations une personne séropositive a raison de garder son diagnostic secret. Moins de 20% des répondants auraient des relations sexuelles protégées avec une personne séropositive • Une stigmatisation due à la méconnaissance 21% des jeunes pensent que le VIH peut être transmis par une piqûre de moustique. Précarité et isolement des personnes séropositives • Selon l’enquête Vespa 2, le pourcentage de personnes sous traitement a augmenté de 83,2% en 2003 à 93,3% en 2011. Le vieillissement de la population séropositive suivie à l’hôpital est confirmé : l’âge moyen est passé de 41 ans en 2003 à 49 ans en 2011. • 31,5% ne parviennent pas à faire face à leurs besoins sans s’endetter. Une personne sur cinq rencontre des difficultés à se nourrir au quotidien par manque d’argent. 40% des personnes interrogées vivent seules (55% chez les hommes ayant des rapports sexuels avec d’autres hommes). • Le niveau d’activité des personnes touchées est très inférieur à celui de la population générale. 58,5% des personnes interrogées travaillent et 13% sont à la recherche d’un emploi.

Hépatites virales en France • 280 000 personnes sont contaminées par le VHB • 360 000 personnes sont contaminées par le VHC • 45% des personnes infectées par le VHB n’ont pas connaissance de leur statut. • 43% des personnes infectées par le VHC n’ont pas connaissance de leur statut. • Via le diagnostic et les traitements, le VHB peut être contrôlé chez 80% des patients et guérit pour 70% des personnes infectées par le VHC. • Augmentation des moyens alloués par l’ANRS sur les hépatites : 22% en 2012 contre 5% en 2005. • 10% des hépatites B et 65 à 85% des hépatites C évoluent vers une forme chronique aboutissant à terme au cancer du foie. 63


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Détenus (Enquête Prévacar, réalisée dans 27 établissements pénitentiaires) • Prévalence de l’hépatite : 4,8%, soit une prévalence cinq fois plus élevée qu’en population générale, représentant près de 3 000 personnes détenues. • L’hépatite est découverte au cours de l’incarcération actuelle dans 1 cas sur 5. Usagers de drogues (source : Enquête Coquelicot réalisée chez 1 418 usagers de drogues pris en charge dans des dispositifs spécialisés pour UD en 2011) • La séroprévalence est de 44% sur le VHC. La séroprévalence croît régulièrement avec l’âge : elle est de 9% chez les moins de 30 ans mais reste élevée environ 60% chez les 40 ans et plus.

Les drogues en France Source : baromètre santé Inpes 2014 (L’enquête portait sur plus de 15 000 Français de 15 à 75 ans interrogés entre décembre 2013 et mai 2014) Cannabis • Le cannabis est toujours le produit illicite le plus consommé en France. • Expérimenté au moins une fois dans leur vie par 42% des personnes interrogées. Usage actuel (au cours de l’année) : 11% en 2014 contre 8% en 2010. • Produit le plus répandu parmi les jeunes de 18-25 ans : 34% d’hommes et 23% de femmes dans cette tranche d’âge. Cocaïne • Nette hausse de l’usage de cocaïne sur la période 1995-2014 : 5,6% des 18-64 ans l'avaient expérimentée au moins une fois au cours de leur vie en 2014, contre seulement 1,2% en 1995. • Usage au cours de l’année : 1,1% des 18-64 ans, contre 0,9% en 2010. • Consommation plus importante chez les 18-25 ans (3,1%) et les 26-34 ans (2,2%). MDMA et ectasy • Expérimentation de cette substance concerne 4,3% des 18-64 ans. 64


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• Usage dans l’année : 0,9% (0,3% en 2010). Pour les 18-25 ans : 3,8% Héroïne, champignons hallucinogènes ou LSD • Au cours de l'année, les consommations de ces trois produits ne dépassent pas 0,2% de la population.

Le VIH/sida à l’international Toutes les données qui suivent sont extraites du site de l’ONUSIDA Personnes vivant avec le VIH • En 2013, 35 millions de personnes [33,2 millions–37,2 millions] vivaient avec le VIH. • Depuis le début de l’épidémie environ 78 millions de personnes [71 millions–87 millions] ont été infectées par le VIH et 39 millions de personnes [35 millions–43 millions] sont décédées de maladies liées au sida. Nouvelles infections à VIH • Les nouvelles infections à VIH ont chuté de 38% depuis 2001. Dans le monde, 2.1 millions de personnes [1,9 million–2,4 millions] ont été nouvellement infectées par le VIH en 2013, contre 3,4 millions [3,3 millions–3,6 millions en 2001. • Les nouvelles infections à VIH parmi les enfants ont diminué de 58% depuis 2001. • Dans le monde, 240 000 enfants [210 000–280 000] ont été nouvellement infectés par le VIH en 2013, contre 580 000 [530 000–640 000] en 2001. Décès liés au sida • Les décès liés au sida ont chuté de 35% depuis le pic de 2005. • En 2013, 1,5 million de personnes [1,4 million–1,7 million] sont décédées de causes liées au sida dans le monde, contre 2,4 millions [2,2 millions–2,6 millions] en 2005. Thérapie antirétrovirale • En juin 2014, 13,6 millions de personnes vivant avec le VIH avaient accès à la thérapie antirétrovirale. 65


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• En 2013, ce chiffre était de 12,9 millions, soit 37% [35%-39%] de l’ensemble des personnes vivant avec le VIH. • 38% [36%-40%] de l’ensemble des adultes vivant avec le VIH bénéficient d’un traitement, cependant seuls 24% [22%-26%] de l’ensemble des enfants vivant avec le VIH bénéficient des médicaments salvateurs. Investissements • Pour mettre fin à l’épidémie de sida d’ici à 2030, les ressources nécessaires dans les pays à revenu faible ou intermédiaire s’accroîtront. Dans les pays à faible revenu, US$ 9,7 milliards seront nécessaires en 2020, tandis que le chiffre pour les pays se situant dans la tranche inférieure du revenu intermédiaire sera de US$ 8,7 milliards et le chiffre pour les pays se situant dans la tranche supérieure du revenu intermédiaire sera de US$ 17,2 milliards. • Les pays se situant dans la tranche supérieure du revenu intermédiaire financent la quasi-totalité des investissements liés au VIH à partir de sources publiques domestiques (80% en 2013). Dans les pays situés dans la tranche inférieure du revenu intermédiaire et les pays à faible revenu, ces proportions sont respectivement de 22% et de 10%. • Les besoins mondiaux en ressources commenceront à diminuer à partir de 2020 et, d’ici à 2030, les ressources annuelles nécessaires dans l’ensemble des pays à revenu faible ou intermédiaire tomberont à US$ 32,8 milliards, soit 8% de moins que le chiffre requis en 2020. Ces ressources permettront d’offrir un traitement antirétroviral à deux fois plus de personnes en 2020 qu’en 2015.

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FOCUS

Le VIH/sida et les jeunes : un maillage d’information à resserrer Le sida est devenu une maladie chronique : depuis 1996, la mise sur le marché de traitements efficaces a permis de retarder l’apparition des premiers symptômes et de retarder l’évolution de la maladie. Ce faisant, les jeunes qui ont commencé leur vie sexuelle après 1996, n’ont pas connu les « années noires » du sida et n’ont pas le même rapport à la maladie. Aujourd’hui, même si l’on constate une protection toujours élevée lors des premiers rapports sexuels, il n’en reste pas moins que les connaissances sur les modes de transmission de la maladie sont moins bonnes qu’auparavant. L’usage du préservatif est toujours très élevé pour ce qui est du premier rapport sexuel, elle l’est moins ensuite. Les résultats d’une enquête SMEREP menée en 2014, indiquent que près d'un étudiant sur trois (30%) ayant des rapports sexuels déclare ne « jamais utiliser de préservatifs ». Et ils ne sont que 41% à y avoir recours systématiquement, selon l'enquête. Plus globalement l’efficacité du préservatif est remise en cause pour la première fois : l’enquête KABP de 2010 indique que même si la croyance en l’efficacité du préservatif pour se protéger du VIH est importante, elle n’est aussi absolue (la part des répondants qui considèrent le préservatif comme seulement « plutôt efficace » et est en augmentation constante). Alors 12% des contaminations au VIH en France concernent les 15-24 ans, ces faits posent donc la question de l’information sur le VIH, l’assimilation des connaissances. Une enquête IFOP/Sidaction/ELCS a été publiée autour de la Journée mondiale de lutte contre le sida 2014. Quels en sont les enseignements principaux ? Le niveau d’information des jeunes de 15 à 24 ans sur la contamination reste à un niveau élevé puisque 94% d’entre eux connaissent l’existence de traitements permettant de vivre après avoir contracté le virus (+4 points par rapport à 2013). Une quasi-unanimité identifie les pratiques à risque (pour 98% d’entre eux, le virus peut être transmis lors d’un rapport sexuel sans préservatif et pour 96%, en entrant en contact avec le sang d’une autre personne) ainsi que les moyens d’éviter une contamination (98% cite le préservatif masculin). 67


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Pour autant, 19% des jeunes interrogés déclarent avoir des partenaires irréguliers, parmi eux, 29% disent ne pas utiliser de préservatif. En outre les fausses croyances demeurent et on le sait : moins on connaît une maladie, plus les pratiques à risque augmentent, tout comme les discriminations à l’encontre des personnes touchées. Ainsi, ils sont 15% à penser que le sida peut être transmis en embrassant une autre personne, 13% en s’asseyant sur un siège de toilettes publiques, 5% en serrant la main d’une autre personne et 11% à penser que la prise d’une pilule contraceptive est efficace pour éviter la transmission du virus. Ce manque de connaissances entraîne de manière automatique une possible discrimination envers les personnes touchées : 10% pense que l’on peut détecter la contamination d’une personne par le virus du sida en l’observant attentivement. L’ensemble de ces données démontrent bien l’importance d’une politique volontariste menée par les élus sur l’éducation à la vie affective et sexuelle en milieu scolaire et hors scolaire.

La gratuité du préservatif en débat Alors que 6 000 nouveaux cas de séropositivité au VIH sont découverts chaque année, se pose forcément la question de l’accès aux moyens de prévention notamment le préservatif. Aujourd’hui, la grande majorité des préservatifs proviennent du secteur marchand (selon l’enquête de la LMDE du 1er décembre 2012, près de 80% des préservatifs obtenus par les étudiants ont été payés). Faire payer un outil de prévention ne va pas de soi : la baisse drastique du coût unitaire a déjà été mise en œuvre (20 cents le préservatif) mais ELCS demande à aller encore plus loin et réclame la gratuité du préservatif. Ce type de gratuité serait justifiée sur le plan sanitaire et a déjà fait ses preuves : à titre d’exemple, les seringues sont ainsi distribuées aux usagers de drogues pour éviter les contaminations au VIH ou à l’hépatite C. Ce faisant, il apparaît justifié de prévoir, sur le plan d’une logique de santé publique efficace et pragmatique, le remboursement d’un outil dont le but est d’éviter la contamination par une maladie mortelle. Cette mesure serait économiquement viable : la prévention, c’est coût-efficace ! Prévenir une contamination au VIH emporte un poids financier bien moindre que de devoir traiter une personne toute sa vie. La gratuité des préservatifs, outre le fait d’être une mesure de santé efficace, serait l’expression par l’État de son rôle de 68


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bon gestionnaire des finances publiques. Cette mesure serait totalement réalisable et existe d’ailleurs déjà avec le Syndicat national des entreprises gaies (SNEG) qui a déjà passé un accord avec l’État pour que soient mis à disposition gratuitement dans les boîtes, bars et saunas gays des préservatifs et du gel, en échange de la mobilisation d’agents de prévention. Pour la mise en œuvre de cette logique de santé publique couplée à une logique de bon gestionnaire, l’État pourrait mettre en place deux systèmes : - La mise en place de la gratuité totale via des contrats passés entre État et fabricants et mise à disposition dans les lieux publics (mairies, gymnases, hôtels des impôts, centres de la sécurité sociale…) comme dans les cafés, les restaurants et les pharmacies. - Le remboursement des préservatifs via une prescription faite par un médecin pour les personnes séropositives et pour ceux pour qui le coût est un réel obstacle comme les jeunes de moins de 25 ans et les personnes vivant avec les minima sociaux.

Contaminations au VIH chez les seniors En 2013, les seniors (personnes de plus de 50 ans) représentaient 18% nouveaux cas de VIH diagnostiqués en France, alors qu’ils ne représentaient que 12% des cas en 2003 (chiffre INVS). Les résultats de l'enquête "Seniors et VIH" montrent que les seniors s’estiment autant informés que les plus jeunes (18-49 ans). Ainsi, 70% des seniors déclarent connaître le VIH dans les grandes lignes, 54% se disent plutôt bien informés et 90% connaissent les modes de contamination, Par contre, 88% des seniors interrogés disent ne pas se sentir concernés par le VIH (contre 72% chez les plus jeunes) dès lors qu’ils ne font pas partie des groupes dits à risque (homosexuels, usagers de drogues par injection, etc). Très peu d’entre eux ont recours au dépistage : près de 60% des personnes interrogées ayant eu plusieurs partenaires au cours des 5 dernières années reconnaissent n’avoir jamais fait de test (contre environ 40% des moins de 50 ans). Parmi les plus de 50 ans ayant une vie sexuelle avec des partenaires multiples, 40% déclarent n’avoir jamais utilisé de préservatif au cours des 5 dernières années (contre 12% chez les moins de 50 ans). La sexualité des seniors évolue, la politique de prévention doit suivre ! 69


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Le dépistage du VIH : LA priorité Le dépistage du VIH est une démarche volontaire liée au consentement de la personne. Il n’y a pas de dépistage forcé ou fait à l’insu et sans le consentement. Le test n’est obligatoire que dans quelques rares cas: dons de sang, d’organes, de sperme, d’ovocytes et de lait. En France, l’activité de dépistage du VIH est très important avec près de 5 millions de tests réalisés par an. Le dépistage a un intérêt sur le plan tant individuel que collectif. Sur le plan individuel, le dépistage de l’infection à VIH permet de bénéficier d’une discussion au plus près de ses pratiques et de conseils de prévention personnalisée. En cas de découverte d’une séropositivité, cela permet d’accéder à la prise en charge la plus précoce possible. Sur le plan collectif, le dépistage limite la propagation de l’épidémie par la responsabilisation des personnes vivant avec le VIH et par l’action des ARV sur la transmission du VIH (la prise d’un traitement antirétroviral efficace rend la charge virale indétectable et baisse donc automatiquement le risque de transmission du VIH). Le dépistage est l’une des priorités du Plan national de lutte contre le VIH et les IST. L’objectif énoncé est de réduire tant le retard au diagnostic que le nombre important des personnes ignorant leur séropositivité (30 à 40.000 personnes en France). Cet objectif repose sur trois axes d’intervention : - la proposition de test par les professionnels de santé dans le cadre de recours aux soins (concrètement, une proposition de dépistage est proposée par le médecin généraliste ou par les services de premier secours) - le développement des tests rapides, en direction des populations à forte incidence (HSH et migrants) - la rénovation du dispositif de dépistage pour une prise en compte plus large de la santé sexuelle L’utilisation des tests rapides et une offre de proximité sont aussi préconisées. Cette approche est aussi bien justifiée sur le plan de la santé publique que sur le plan économique. En 2013, 60 associations ont effectué 56 500 tests rapides sur l'ensemble du territoire français ; 486 Trod se sont révélés positifs. Le taux de positivité était de : • 24,9/1000 pour les personnes prostituées • 17,9/1000 pour les HSH • 7,1/1000 pour les migrants 70


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• 2,4/1000 pour les usagers de drogue • 1,7/1000 pour les autres publics. La question des auto-tests a été particulièrement discutée et a été l’objet de grands débats en France. Se posait notamment la question de leur fiabilité et de l’isolement de la personne devant l’éventuelle découverte d’une séropositivité. Pour ce qui est de la fiabilité, la technique a beaucoup évolué ; aujourd’hui, le nouveau test OraQuick in-Home HIV, a fait l’objet d’une évaluation approfondie et sa fiabilité a été prouvée : 98% pour un test négatif et 93% pour un test positif. Après deux Avis défavorables (1998 et 2004), fin 2012, le CNS s’est prononcé pour l’utilisation des autotests du VIH compte tenu de l’évolution des stratégies de dépistage du VIH en France, des enjeux liés à une offre de dépistage plus adaptée et de l’évolution des performances des autotests. Le Comité national consultatif d’éthique (CCNE), début 2013, rend également un avis favorable à leur commercialisation. La dernière enquête –KABP (2010) comportait une question sur l’autotest (à cette date, l’autotest n’était pas disponible) : en population générale française, l’enquête montre un haut niveau d’adhésion à l’autotest en général (86,6% des hommes et 83,3% des femmes) et pour soi-même (75% des hommes et 69,8% des femmes). Au regard de l’ensemble de ces données, il a été décidé par la ministre de la santé une mise sur le marché au cours de l’année 2015. Une mise sur le marché qui ne fait que renforcer le besoin d’accompagnement, d’éducation et de lutte contre la sérophobie.

Ipergay L’ANRS présente l’essai Ipergay de cette manière sur son site : « L’essai ANRS Ipergay repose sur plus de 400 participants en France et au Canada. Il vise à évaluer l’efficacité d’un traitement préventif du VIH (la PrEP) pris à la demande dans le cadre d’un programme de prévention renforcée. Ce programme comprend notamment un suivi médical rigoureux, une prise en charge importante (dépistages réguliers et traitement) des IST (infections sexuellement transmissibles) et un accompagnement individuel et personnalisé des participants. Des préservatifs de qualité et du gel lubrifiant sont distribués à volonté. » De dire que les résultats étaient attendus relève de l’euphémisme. Une diminution de 86% du risque d’infection au VIH : voilà ce que montre l’essai Ipergay. En somme, pour des hommes ayant des relations sexuelles avec les hommes (HSH), 71


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très exposés par leurs pratiques sexuelles au risque d'infection par le VIH, la prise d'un traitement antirétroviral (Truvada) au moment des rapports sexuels diminue de 86% le risque d'infection. L’efficacité préventive du traitement est clairement démontrée. Pour autant, il ne faut pas voir dans cet essai une solution miracle. D’une part, cette étude concerne les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH) particulièrement exposés au VIH (des HSH n’ayant pas un usage systématique du préservatif avec des partenaires multiples) ; elle n’est donc pas « transférable » d’emblée à la population générale. D’autre part, il ne faut pas ignorer que le tiers des participants a été atteint par une IST comme la gonorrhée, la syphilis, l’hépatite C. Concrètement, il va s’engager un travail d’information et de pédagogie mais surtout un travail d’influence, de vulgarisation, de traduction pour que ces annonces soient suivies d’effets puisque, à ce jour, le Truvada n’est pas autorisé en France comme traitement préventif. Rappelons que l’Organisation mondiale de la santé recommande le développement de programmes expérimentaux de délivrance de Prep dans le monde… Plus globalement, un important travail de communication devra être fait pour expliquer au mieux les enjeux du traitement comme outil de prévention et la politique de prévention combinée, une prévention qui permet de s’adapter à tous, en fonction de ses envies, ses besoins, son vécu, ses possibilités. Une prévention qui recherche l’efficacité avant tout.

Discriminations LGBT et prises de risque L’homosexualité a été dépénalisée en France en 1981 et cela fait plus de 20 ans que l’OMS ne la considère plus comme une pathologie mentale. Alors, dans une société qui se veut plus tolérante et plus ouverte, une personne homosexuelle peutelle librement dire son orientation sexuelle ? Prenons cette étude de Sida info service de 2013 : la moitié des participant(e)s ont un sentiment de discrimination liée à l’orientation sexuelle et 81% évoquent au moins une situation discriminante vécue dans un des domaines de la vie quotidienne (moqueries, dénigrements, injures, harcèlements, outing, agressions physiques). Près de 60% ont vécu au moins un événement discriminant dans la rue, 50% citent également l’école. 72


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Au-delà des discriminations directes, il existe un phénomène concomitant et tout aussi impactant qui est la crainte d’être discriminé et l’auto-discrimination qui peut en découler. Ainsi, plus de 80% des participants à l’étude vivent avec l’appréhension d’être discriminés. Tout cela a et aura bien sûr un impact terrible sur la santé des personnes. On ne le sait que trop bien, et ce sont des faits très largement documentés, les comportements à risque chez les HSH peuvent être et sont la conséquence du mal-être psychologique, de l’isolement, d’une mauvaise estime de soi qui peut aller jusqu’à la tentative de suicide (trois fois supérieure chez un jeune homosexuel que chez un jeune hétérosexuel).

La réduction des risques en direction des usagers de drogues : une nécessaire innovation La politique de réduction des risques (RDR) basée sur l’information, l’accès au matériel stérile et les traitements de substitution est une des politique de santé les plus efficaces : elle a notamment permis une baisse très importante des contaminations au VIH chez les usagers de drogues (- de 2% aujourd’hui). Cette politique a été légalisée par la loi du 13 août 2004. Une centaine de CAARUD ont été créés depuis 2005. Au niveau international, la déclaration de Vienne de 2010 a clairement élevé la RDR comme solution face à des politiques répressives dont les impacts sont très limités sur le plan sanitaire et social. Aujourd’hui, les défis sont : la précarité et l’hépatite C. Ainsi, la prévalence au VHC s’établit à près de 60% et la prévalence de la co-infection VIH/VHC est une des plus élevées en Europe. La précarité est extrêmement problématique au sein des usagers de CAARUD : 21% ne disposent d’aucun revenu, 54% d’un revenu social uniquement. Face à cela, la solution est bel et bien l’approfondissement de la politique de RDR et cela passe notamment par l’expérimentation de salles de consommation à moindre risque. Il existe actuellement plus de 90 salles de consommation dans le monde dont la grande majorité en Europe. Le premier de ces centres à avoir obtenu une autorisation légale s’est ouvert en Suisse à Berne en 1986. Dans la décennie suivante, plusieurs pays européens (Pays-Bas, Allemagne, Espagne) ont suivi cet exemple, ainsi que l’Australie et le Canada. Ils ont été créés suite au constat que les dispositifs de RDR (échange de seringues etc) ne touchaient pas une population d’usagers de drogues particulièrement précarisée. 73


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Ce type de structure accueille en priorité les consommateurs d’héroïne ou de cocaïne par injection qui viennent avec leur drogue. La structure ne fournit en aucun cas de drogue. L’intérêt est la sécurité sanitaire : la salle de consommation permet de réduire principalement les risques d’infection au VIH ou VHC, en fournissant un lieu propre et sécurisé, des seringues, sous la surveillance de personnel médical pour prévenir notamment toute overdose. La SCMR permet à l’usager de ne pas s’injecter dans la rue. Ce faisant, ce type de structure a un intérêt en termes de santé publique puisqu’elle permet une prévention de la contamination au VHC et au VIH mais également en termes de sécurité publique (notamment quant à l’absence de matériel d’injection sur la voie publique). Le débat en France sur cette question a été long mais il semble que les avis des associations et des expertises de l’INSERM ou de la Haute Autorité de Santé aient permis à cette expérimentation de voir le jour dans la loi de santé qui sera votée en 2015. Le débat est compliqué, certes, mais cette expérimentation est nécessaire. Les évaluations faites montrent toutes l’intérêt sanitaire et social de ce type de structure. Si elles respectent des principes simples de transparence, elles seront totalement intégrées par le voisinage. A titre d’exemple, dans le cadre du référendum tenu le 30 novembre 2008, la Suisse a appuyé́ à 68% la révision de la loi sur les stupéfiants basé sur quatre piliers dont les salles de consommation à moindre risque et le traitement avec prescription d’héroïne. A 76% même, à Genève, ville pilote de cette politique efficace et pragmatique. Les innovations en matière de RDR peuvent aussi prendre d’autres formes, notamment la délivrance d’héroïne sous contrôle médicalisé. Les innovations peuvent aussi viser d’autres publics : ainsi, un collectif d’associations a élaboré un outil de réduction des risques, « Kit Base », pour l’usage de crack fumé. Cet outil est issu de l’expérience de ces associations auprès des usagers accompagnés et vise à limiter le risque de blessures et la transmission virale. Outre l’innovation en termes d’outils, il nous faut penser la RDR en termes de champ d’application. La prévalence du VIH en prison est très inquiétante puisqu’elle est estimée à 2%. Pour l’hépatite C, c’est pire puisque la prévalence est estimée à 4,8%. Face à ce constat, l’offre de RDR est bien trop faible par rapport au milieu libre : un accès très inégal aux traitements de substitution, un accès à l’eau de javel non systématique, des programmes d’échange de seringues inexistant... Instaurer une vraie politique de RDR en prison, c’est une nécessité : d’une part parce que cela répondrait à une vraie nécessité sanitaire et d’autre part, parce que cela permettrait de respecter la loi, celle du 4 mars 2002 relative aux droits 74


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des malades qui reconnaît dans son article L110-1 que « le droit fondamental à la protection de la santé doit être mis en œuvre par tous les moyens disponibles au bénéfice de toute personne (...) les autorités sanitaires (...) contribuent à garantir l’égal accès de chaque personne aux soins nécessités par son état de santé » et ainsi « assurer la continuité des soins et la meilleure sécurité sanitaire possible ». Ce droit fondamental à la santé qui comprend donc l’accès aux dispositifs de RDR ne peut trouver sa limite au seul prétexte qu’il s’agirait du monde carcéral.

Situation dans les DOM L’épidémie du VIH/sida est globalement très active dans les DOM. Le taux global d’incidence du VIH a été estimé à 59 pour 100 000 personnes-année sur la période 2009-2010, soit un taux extrêmement élevé : au niveau national, ce taux n’est que de 17 pour 100 000. Certes, cette forte incidence cache des disparités : une épidémie basse à la Réunion, une épidémie proche de celle de la métropole en Martinique, une épidémie très forte en Guyane et Guadeloupe, avec la majorité des contaminations concernant les hétérosexuels. Globalement, dans les DOM, ce sont 18% des nouvelles contaminations qui concernent les HSH (hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes). Ces disparités ne peuvent que confirmer que le VIH/sida est une urgence tant sanitaire que sociétale dans les DOM. Aujourd’hui, le sida est une maladie qui fait peur : ainsi selon l’enquête KABP (2011), 60% des personnes ont déclaré craindre « beaucoup » le VIH/sida pour elles-mêmes (pour le cancer, ce taux était de 56%). Alors que les habitants des DOM reconnaissent moins qu’en 2004 l’efficacité du préservatif pour se protéger du VIH (seuls 57% tiennent le préservatif comme un moyen de prévention « tout à fait efficace » alors qu’ils étaient 69% à le considérer comme tel en 2004), on peut toujours noter une utilisation très forte du préservatif et ce, alors que les connaissances erronées sur les modes de transmission sont largement partagées : environ une personne sur cinq pense que le VIH peut se transmettre par une piqûre de moustique (21% en Guadeloupe, 21% en Martinique et 23% en Guyane). Le dépistage est une démarche qui suscite une forte adhésion : près de 80% ont indiqué partager l’idée que « le test de dépistage du VIH devrait être fait tous les ans, pour tout le monde » et 97% ont répondu qu’ils accepteraient de faire un test de dépistage si leur médecin le leur proposait. Ce faisant, une très nette progression du recours au dépistage est observée entre 2004 et 2011 dans les trois départements, chez les hommes comme chez les femmes. D’une part, la proportion de 75


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personnes n’ayant jamais été testées a nettement reculé, passant, en moyenne dans les DFA de 44% en 2004 à 28% en 2011. D’autre part, la proportion de personnes ayant eu recours à un test de dépistage du VIH au cours des douze derniers mois (c'est-à-dire récemment) est en hausse : elle est passée de 16% à 26% en Guadeloupe, de 16% à 23% en Martinique et de 24% à 32% en Guyane. Tout ceci n’empêche pas que 55,3% des personnes nouvellement diagnostiquées entre 2003 et 2011 le sont à un stade tardif. Quant aux personnes séropositives : leur situation sociale est très compliquée avec un taux d’emploi près de 20% moins élevé que les personnes séronégatives. Elles sont également très isolées : en moyenne plus d’une personne séropositive sur trois vit seule. Dire sa séropositivité est de ce fait extrêmement compliquée : à l’annonce de leur diagnostic, de nombreuses personnes séropositives gardent le secret même vis-à-vis de leur entourage proche (respectivement 34,7%, 34,2% et 56,9% en Martinique, Guadeloupe, Guyane). Le niveau de discrimination à l’encontre des personnes séropositives est très fort, même si l’on note des avancées. En Guyane, ils sont 84% à indiquer qu’ils accepteraient de travailler avec une personne séropositive (contre 90% en Guadeloupe et 91% en Martinique) et 53% qu’ils accepteraient de laisser leurs enfants ou petitsenfants en compagnie d’une personne séropositive (contre 56% en Guadeloupe et 59% en Martinique). Comparées à 2004, ces données sont certes en nette augmentation mais restent néanmoins en retrait par rapport à celles observées en métropole où 94% des habitants accepteraient de travailler avec une personne séropositive et 70% de lui laisser leurs enfants ou petits-enfants. Deux focus peuvent être faits. Le premier sur les femmes : près d’une femme sur trois en Guyane et une sur quatre aux Antilles ont indiqué un premier rapport sexuel non voulu. Les femmes ont davantage été confrontées à un refus d’utilisation du préservatif que les hommes - près de 18% - et ce refus a pour conséquence le plus souvent que le rapport se déroule sans utilisation d’un préservatif. Le second sur les jeunes : plus de la moitié d’entre eux n’ont jamais fait de test de dépistage au cours de la vie. Or, à 18-24 ans, ils sont déjà 91% à avoir déjà eu des rapports sexuels et un homme sur deux a été engagé dans des relations simultanées au cours des cinq dernières années. Il s’agit donc de la classe d’âge où la proportion d’hommes et de femmes n’ayant jamais fait de test est la plus élevée et celle où la proportion de multipartenaires est également la plus élevée. 76


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La liberté de circulation et d’établissement des PVVIH En 2014, 40 pays appliquent encore des restrictions à la liberté de circulation et d’établissement des personnes vivant avec le VIH. Face à cette situation, ELCS mène depuis plusieurs années déjà un intense lobbying contre ces restrictions, aussi inhumaines que dangereuses, tant le plan individuel que collectif Ces restrictions constituent une atteinte grave aux droits humains. Tout d’abord, au regard de la personne qui découvrirait sa séropositivité via un test imposé à l’entrée (quid du suivi de la personne quant au choc psychologique engendré ? Quid du counseling ?). Également pour la personne qui se sait touchée : une expulsion du territoire est forcément traumatisante. Refuser l’admission ou l’installation d’une personne séropositive au seul motif de son statut sérologique renvoie à une vision totalement perverse du malade : le séropositif comme vecteur de maladie, comme possible contaminateur. Cela ne fait que renforcer le niveau de stigmatisation et de discrimination à l’encontre des personnes vivant avec le VIH et, décourager tant les nationaux que les étrangers d’avoir recours aux services de prévention, de dépistage et de prise en charge du VIH. Ces restrictions ont également des effets dramatiques sur l’efficacité des politiques de santé. Elle met à mal les fondements de toute politique de prévention qui repose tant sur les personnes touchées que les personnes séronégatives, c’est ce qui se nomme la notion de responsabilité partagée, notion que les associations défendent, notamment le Conseil national du sida. Il faut l’affirmer haut et fort : les personnes séronégatives comme séropositives sont responsables de leur propre prévention et cette affirmation est toujours plus vraie au regard des évolutions de la lutte qui fait du traitement un outil majeur de prévention. Au-delà de leur inefficacité, de telles restrictions peuvent se révéler contre-productive et être la cause d’une baisse de la vigilance et de pratiques à risques en hausse. Comment ? Tout simplement en créant un sentiment de fausse sécurité, en laissant à penser que le sida est une maladie d’étrangers et que le VIH vient de l’extérieur. Ce raisonnement peut mettre à mal des années de politique de prévention basées sur la connaissance de la maladie, l’éducation, la responsabilisation individuelle et collective. Lutter contre le sida en luttant contre les malades et non contre la maladie est une erreur fatale qui met en péril la politique de lutte contre le sida et conduit clairement à une moins bonne protection de la santé publique. L’argument économique qui voudrait que ces restrictions soient justifiées par le contrôle des dépenses de santé est d’une part faux, d’autre part insupportable. Faux car la personne séropositive est un acteur de la société qui contribue à sa 77


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richesse en travaillant et en payant des impôts. Sa venue permettra souvent de pallier un manque de mains d’œuvre ou un manque de personnel dans tel ou tel secteur de l’économie. De plus compte tenu de l’allongement de l’espérance de vie des personnes touchées, il est impossible d’affirmer que les séropositifs coûteront davantage qu’ils n’apporteront de bénéfices au cours de leur séjour. Insupportable au regard de la vision que cela révèle de la personne touchée par le VIH/sida. Malade = charge financière. Depuis des années, ELCS martèle ce message. Un message entendu par l’Association internationale des maires francophones et Metropolis (organisme regroupant les plus grandes villes du monde) qui ont tout deux voté un vœu appelant à la levée de ces restrictions. Ces prises de position constituent des leviers très importants pour ELCS. La Chine et les États-Unis, notamment, ont modifié leur législation : à quand les 40 autres ?

Déclaration de Paris : les villes actrices de la transformation sociale Le 1er décembre 2014, Anne Hidalgo, maire de Paris et Michel Sidibé, directeur de l'ONUSIDA, accompagnés d'une vingtaine de représentants de grandes villes dans le monde, ont lancé l'initiative mondiale "Villes actrices de la transformation sociale", initiative très impactante et qui est appelée à devenir un maillon essentiel de la réponse mondiale au VIH/sida. Concrètement, les villes signataires s'engagent à tout mettre en œuvre pour la concrétisation du nouvel objectif stratégique de l'ONUSIDA: "90 - 90 - 90", c'està-dire l'augmentation à 90% de la proportion de personnes vivant avec le VIH qui connaissent leur diagnostic, l'augmentation à 90% de la proportion de personnes vivant avec le VIH recevant un traitement antirétroviral et l'augmentation à 90% de la proportion de personnes sous traitement du VIH qui ont une charge virale indétectable. Même si les contextes sociétaux et épidémiologiques sont différents, quelques grands axes peuvent être mis en exergue sur la politique à mener. La politique mise en place doit débloquer des moyens suffisants pour aider les acteurs de cette lutte et permettre un réel déploiement des dispositifs de prévention et de dépistage du VIH, pierre angulaire d'une réponse efficace au VIH/sida. De manière très concrète, il peut être décidé la mise à disposition des préservatifs 78


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masculins et féminins dans tous les lieux publics de la ville ainsi que l'organisation d'opérations de dépistage rapide. La politique de la ville doit aussi participer de manière engagée au respect et la promotion des droits des personnes vulnérables: jeunes filles, prisonniers, LGBTI, personnes usagères de drogues ; concrètement, les villes peuvent mettre en place des campagnes de communication locales de lutte contre la stigmatisation ou organiser des séances d'information, des conférences sur la thématique. Les élus doivent également soutenir les personnes touchées par le VIH, que ce soit dans l'accès aux droits et au logement par exemple. Ils peuvent décider de former le personnel municipal, notamment le personnel accueillant, à la thématique du VIH et des discriminations ; les villes peuvent également prioriser l'accès aux logements sociaux pour les personnes séropositives. Enfin, pour agir efficacement dans la lutte contre le sida, le politique ne doit pas être seul. Les villes doivent œuvrer avec la société civile, être à leurs côtés, pas seulement en tant que soutien financier ou logistique via la mise à disposition de locaux mais également et surtout en tant que soutien sur les projets.

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Le sida se soigne aussi par la politique : le principe fondateur d’ELCS

Présentation d’Élus Locaux Contre le Sida L’association ELCS (Élus Locaux Contre le Sida) est une association à but non lucratif et apolitique. L’association soutient et met en place des actions d’information et de prévention à destination des élus mais aussi auprès des patients et du grand public dans un but de prévention, d’information et d’action. « Le sida n’est ni de droite ni de gauche » : partant de cette idée simple, l’association ELCS a été créée en 1995 par Jean-Luc Romero-Michel, premier et seul élu à avoir parlé publiquement de sa séropositivité. Unique dans le paysage associatif, cette association regroupe des élus français de tous bords politiques ! Notre association n’est rattachée à aucun parti ou mouvement politique : sur une question aussi importante, il est nécessaire de dépasser les clivages. Au-delà de la question du VIH/sida, nous travaillons aussi sur la question des IST, des hépatites, de la réduction des risques en direction des usagers de drogues et de la lutte contre les discriminations. Nous œuvrons pour une prévention et une information plus efficace que ce soit auprès du grand public que des publics les plus vulnérables, nous combattons les inégalités et les injustices touchant les personnes vivant avec le VIH/sida ou une hépatite et nous sommes force de proposition pour la réalisation d’actions innovantes. Notre liberté, c’est notre force ! Aujourd’hui, plus de 16.000 élus de toutes tendances ont signé le manifeste d’ELCS qui crée une obligation morale de résultat, les engageant à se mobiliser dans ce combat pour la vie. ELCS œuvre au cœur des régions avec l’organisation de tables-rondes départementales et régionales sur le VIH/sida, réunions qui sont destinées à rencontrer - et également à faire se rencontrer- les acteurs locaux de la lutte contre le sida, les élus locaux et le monde médical (vous pouvez suivre nos tables-rondes partout en France sur elcs.fr ou avec le hashtag #TourDeFranceContreLeSida). Au cours 80


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de ces réunions (notre Tour de France…mais contre le sida !), qui sont les plus importantes manifestations d’élus contre le sida organisées depuis le début de l’épidémie, les intervenants font le point sur la situation dans chacun des départements visités, sur les actions développées par les collectivités locales mais aussi et surtout réfléchissent à la mise en place de projets communs. Chaque fin d’année, autour de la Journée mondiale de lutte contre le sida, sont organisés les États Généraux, manifestation qui permet de dresser le bilan des politiques publiques en matière de lutte contre le sida et d’être force de proposition via des solutions innovantes pour le futur. Ces États Généraux sont le cadre d’intervention de nombreuses personnalités françaises et internationales notamment de nombreux ministres mais aussi, au plus haut sommet de l’État français dont le Président de la République (2007-2012), Nicolas Sarkozy, mais aussi du Président de la République actuel, François Hollande. Informer les patients et le grand public est aussi une mission quotidienne d’ELCS, avec par exemple, le site www.aids-sida-discriminations.fr: un site d’information pour les voyageurs séropositifs ainsi qu’un outil de plaidoyer pour la liberté de circulation et d’établissement des personnes vivant avec le VIH/sida. Pour plus de visibilité, nous avons lancé en 2012, le label « Ville engagée contre le sida » pour que les villes les plus engagés dans cette lutte puissent, après acceptation de leur dossier, afficher fièrement leur soutien dans ce combat pour la vie. Notre association, est organisée en réseau, composée en délégations régionales et départementales. Les publications de l’association sont : ELCS Infos (lettre d’information trimestrielle), les Actes / Guide annuel et diverses publications à destination des élus, patients, professionnels et du grand public.

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La Gouvernance de l’association Élu par la 9e Assemblée Générale de l’association, à l’Assemblée Nationale en novembre 2013. Président

Jean-Luc ROMERO-MICHEL Conseiller régional (Apparenté PS) d’Île-de-France, Maire-Adjoint du 12e arrond. de Paris, Membre du Conseil National du Sida

Secrétaire Général

Patrick TEISSÈRE, Adjoint du Maire (UMP) du Havre

Trésorier

Philippe LOHÉAC Trésorier du Crips Île-de-France

Vice-présidents

Eddie AÏT, Conseiller régional délégué (PRG) d’Île-de-France

Joëlle CECCALDI-RAYNAUD, Maire (UMP) de Puteaux

Roxane DECORTE, Conseillère (UMP) de Paris, 2008-2014

Philippe DUCLOUX, Conseiller (PS) de Paris, Conseiller du 11e arrond. de Paris

Julie NOUVION, Conseillère régionale (EELV) d’Île-de-France

François QUESTE, Conseiller municipal (PS) de Béthune, 2008-2014, cadre infirmier

Fabien ROBERT, Adjoint au maire (Modem) de Bordeaux

Michèle VOISIN, Adjointe au maire (UMP) de St-Laurent-du-Var, 2008-2014 82


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Secrétaires Généraux adjoints

Christine FREY, Conseillère régionale (PS) d’Île-de-France, Conseillère du 3e arrond. de Paris

Elisabeth RAMEL, Conseillère municipale (PS) déléguée de Strasbourg, 2008-2014, responsable associative

Laurent ROSAIN, Adjoint au Maire (SE) d’Annecy, 2008-2014

Ludovic PIRON, Collaborateur de cabinet

André STAUT, Directeur d’agence d’événementiel

Michèle PARION, Assistante parlementaire

Paul SIMONET, Conseiller municipal (UMP) de Cannes, 2008-2014, Médecin

Nicolas NOGUIER, Président de l’association Le Refuge

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Comment soutenir ELCS ? MANIFESTE D’ÉLUS LOCAUX CONTRE LE SIDA ÉLUS LOCAUX CONTRE LE SIDA

Élu(e) local(e), je m’engage à : 1. Sensibiliser mes citoyens sur la nécessité de la prévention contre le sida et sur la solidarité à l’égard des personnes séropositives ou ayant déclaré la maladie, 2. Mettre en œuvre une politique de lutte contre le sida planifiée sur la durée de mon mandat et dans la collectivité locale dont je suis élu(e). Cette politique sera définie en concertation avec les pouvoirs publics, les intervenants locaux, les associations nationales et locales de lutte contre le sida. Nom : .................................................................................................... Prénom :......................................................................................... . Mandat(s) électif(s) : .............................................................................................................................................................................. Collectivité locale :................................................................................................................................................................................... Adresse : ................................................................................................................................................................................................................ Code Postal : .............................................................................. Ville : ................................................................................................. Téléphone : ................................................................................... Télécopie :.................................................................................... Courriel : ........................................................................................ @ ............................................................................................................ Les coordonnées ci-dessus sont : Fait à : ................................................

le :

o personnelles (de préférence) o celles de ma collectivité locale d’élection o professionnelles .................................................... Signature :

À retourner à Élus Locaux Contre le Sida (ELCS) - 84, rue Quincampoix - 75003 Paris 85


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Comment soutenir ELCS ? Trois modes de soutien à association sont possibles. Ils sont dissociables mais compatibles.

COTISATION PERSONNELLE

La cotisation personnelle Depuis la création de l’association, les cotisations de nos adhérents ont permis de continuer et d’amplifier notre action de terrain, de mobiliser les élus locaux comme nationaux dans un contexte difficile, à la prévention et à l’information sur le sida. L’association ELCS est ouverte à tous, aux élus comme aux non élus. En tant que cotisant, vous recevrez en priorité notre lettre d’information ELCS Infos, notre Guide - pour mieux comprendre les enjeux de la lutte contre le sida et les chiffres clés -, ainsi que l’ensemble de nos publications et invitations. ADHÉSION COLLECTIVITÉ

L’adhésion collectivité pour les villes, agglomérations, départements et évidemment régions Les collectivités peuvent également adhérer à Élus Locaux Contre le Sida depuis quelques années. En tant que collectivité adhérente à Élus Locaux Contre le Sida, vous recevrez en priorité l’ensemble de nos publications et invitations. De plus, en tant que collectivité adhérente, un permanent d’ELCS répondra à vos questions en priorité par téléphone au 01.42.72.36.46. ou sur rendez-vous au siège de l’association. Ainsi que vous devenez un partenaire de notre association pour agir auprès de vos habitants sur les questions de la lutte contre VIH/Sida.

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SUBVENTION / DON

Voter une subvention à ELCS ! Depuis la création d’ELCS en 1995, les subventions des collectivités locales permis de maintenir notre action de terrain sur l’ensemble du territoire français, y compris en outre-mer. Les subventions des collectivités locales représentent plus de la moitié du budget de l’association. Sans elles, ELCS n’existe plus ! Si vous votez une subvention à notre association, vous avez les mêmes avantages qu’une collectivité adhérente.

BULLETINS TÉLÉCHARGEABLE SUR ELCS.FR

ELCS (Élus Locaux Contre le Sida) 84, rue Quincampoix - 75003 Paris Renseignements au 01.42.72.36.46. ou par courriel : contact@elcs.fr

LABEL « VILLE ENGAGÉE CONTRE LE SIDA »

Label décerné par

tre le Sida

Locaux Con l’association Elus

« Ville engagée contre le sida » est un label créé et décerné par l’association ELCS pour les villes engagées dans le domaine de la lutte contre le sida, selon plusieurs critères.

Pour devenir « ville engagée » vous devez :

 Soutenir la lutte contre le sida, en acceptant le principe de notre manifeste « Manifeste des Élus Locaux Contre le Sida ».

 Soutenir notre action, en étant déjà collectivité adhérente ou en votant une subvention à notre association.

 Déposer votre dossier (sur demande auprès d’ELCS) qui sera examiné lors d’un bureau national d’ELCS composé d’élus de droite comme de gauche. Découvrez la liste sur elcs.fr / Rubrique Ville Engagée contre le sida

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Remerciements

M. le Président de la République, M. François HOLLANDE pour son message lors des 19e États Généraux, Mme Anne HIDALGO, Maire de Paris M. Rémi FERAUD, Maire du 10e arrondissement de Paris pour leur soutien à la sortie de ce Guide. Bertrand DELANOË, Alain FOUCHÉ, Jean-Paul HUCHON, Alain JUPPÉ pour leur constant soutien Sheila, notre présidente d’honneur Nos amis artistes qui se sont mobilisés pour la pétition sur les soins funéraires pour tous, Pascale BERLANDIER, Mathieu DELMESTRE, Jonathan DENIS, Johan FONTIC, Jacqueline JENCQUEL, Julien HOREL, Chris HOULIEZ, Michelle KATZ, Geoffroy KRYCH, Frédéric LATOUR, Franck LAGUILLIEZ, Marie-Christine MARCOUX, Christophe MICHEL, Michel MICHEL, Geoffrey PAILLOT DE MONTABERT, Claire PECQUEUR, Etienne QUIQUANDON, Dominique THIERY, Bastien VIBERT-VICHET, les dévoués collaborateurs, amis et bénévoles d’ELCS à Hubert, mort du sida le 9 mai 1994.

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Merci à nos partenaires Le président, le trésorier, les membres du bureau, les adhérents d’Élus Locaux Contre le Sida remercient leurs partenaires financiers pour leur soutien. Nos principaux partenaires financiers :

Conseil régional d’Île-de-France, Ministère des Affaires sociales et de la Santé (Direction Générale de la Santé), et le département de Paris. Villes adhérentes (ou partenaires financiers) : Annecy, Aubervilliers, Béthune, Bobigny, Bordeaux, Clichy, Grenoble, Le Havre, Levallois-Perret, Lille, Livry-Gargan, Lyon, Marseille, Montpellier, Montreuil, Nancy, Nevers, Nice, Pau, Paris, Perpignan, Puteaux, Taverny, Toulouse, Vigneux-sur-Seine, Valréas, Villeneuve Loubet, Villepinte Les régions partenaires : Île-de-France, Midi-Pyrénées. Les départements partenaires : Bouches-du-Rhône, Essonne, Paris, Seine-Saint-Denis, Seine et Marne, Val-de-Marne, Vienne, Yvelines. Les entreprises partenaires : Abbvie, Gilead, Le Banana Café, Laboratoire du Chemin Vert, Janssen, ViiVHealtcare.

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Crédits photographiques : Mathieu Delmestre, Philippe Escalier Prise de notes et transcription des États Généraux : Fabien Carlat

Dépôt légal : Juin 2015 Imprimerie ARLYS - Tél. 01 34 53 62 69

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A P H E I V H ES T I T UX EA S LE OUV UX ! N JE EN

Lorsque le politique baisse la garde par manque de courage, la maladie regagne du terrain. Lorsque les femmes et les hommes politiques font preuve de frilosité, la maladie progresse. L’élu, parce qu’il est « en première ligne », parce qu’il a une vraie capacité d’écoute et d’action, a une véritable légitimité à intervenir dans ce combat pour la vie. L’engagement dans ce combat est, plus qu’une responsabilité, un vrai devoir. Aujourd’hui, plus de 16 000 élus ont rejoint ELCS dans ce combat pour la vie : c’est beaucoup et peu à la fois. Alors que plus de 6 000 de nos concitoyens sont contaminés chaque année par ce virus, nous avons de plus en plus besoin du politique. En effet, au-delà du combat médical, le sida est devenu une maladie porteuse de discriminations.

Le GUIDE API 2015-2016 est publié par l’association Elus Locaux Contre le Sida. Le thème de cette édition est “VIH/sida-Hépatites, les nouveaux enjeux !” incluant les actes des XIXe Etats Généraux des Elus Locaux Contre le Sida. Ce livre a pour but de faire comprendre les enjeux de la lutte contre le VIH/sida et les hépatites ainsi que le combat contre les discriminations.

ElusContreSida www.aids-sida-discriminations.fr

SHEILA et Jean-Luc ROMERO-MICHEL Présidente d'honneur et Président d’ELCS

Action • Prévention • Information

Photo : Franck Laguilliez

www.elcs.fr


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