de faire naître le débat quant aux différences de perceptions sensorielles et affectives et aux formes d’appropriation auxquelles chacun aspire pour ensuite superposer ces idées dans une dynamique de paysage et patrimoine.
Sensorialité et patrimoine : une conciliation discutable Que ce soit à travers la notion de patrimoine ou de bien(s) commun(s), le paysage sera abordé par les aspects sensoriels et affectifs qu’il procure. Bien que la loi très récente du 29 Janvier 2021 vise à définir et à protéger le patrimoine sensoriel dans le cadre des campagnes françaises, la conciliation entre sensorialité et patrimoine reste difficile à définir, en particulier dans le cadre urbain auquel nous serons confrontés. La notion de patrimoine, nous l’avons vu précédemment, tend à classifier ce qui relève du matériel ou de l’immatériel, du naturel ou du culturel. Nous avons d’ailleurs vu la difficulté de cette classification en ce qui concerne le paysage ou le patrimoine naturel et les écueils possibles. Lorsqu’il s’agit de parler de patrimoine sensorial, l’exercice de la classification est encore une fois rendu compliqué. Finalement notre propos de rejeter toute forme de classification pose l’expérience émotionnelle comme « manière fondamentale, (croyons-nous,) à la rationalité de l’identification de cet objet comme patrimoine » (Verguet, 2013) et s’inscrit dans l’originalité même de la notion d’environnement sensible, d’être « à la croisée des patrimoines matériels et immatériels » (Simonnot et Siret, 2014). Le patrimoine est donc matériel en raison de la réalité physique de la source émettrice. Il est immatériel par sa « spatialité fragmentée », sa discontinuité en terme de qualité et quantité et sa « temporalité épisodique et éphémère » (Fraigneau, 2019). Chez Simonnot et Siret, l’enjeu autour du patrimoine sensoriel se pose entre une volonté de « conservation ou de re-création » (Simonnot et Siret, 2014) des éléments patrimonialisés. En effet, « la fugacité de la trace » soulignée par Alain Corbin, caractère même des environnements sensibles, pose la question de leur conservation et « restitution dans une logique patrimoniale » (Simonnot et Siret, 2014). Le problème de la logique patrimoniale se pose aussi en amont dans l’identification même de cet environnement sensoriel. En effet, en ce qui concerne l’odorat, Victor Fraigneau mobilise Keller (2012, citée par Fraigneau, 2019) pour souligner la qualité subjective et personnelle de ce sens liée à des dispositions olfactives inégales et leur lien à une histoire personnelle et culturelle propre. Il s’appuie de l’étude de 59