Gastronomie créole sous influence africaine

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Vu par Anne Fontaine : Rédactrice & Les Boucaniers , Emmanuel Virin, Marco Schmidt, Olivier Onic, Antoine Hubert, Amcaja : Photographes

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Combava et manioc se retrouvent dans de nombreuses préparations de la cuisine afro-caribéenne

Gastronomie créole sous

sous influence africaine ParPar Eric-Olivier Pietrantoni Eric-Olivier Pietrantoni

Depuis les Antilles ou l’Océan Indien, on se délecte d’une cuisine créole riche et variée. Les tables guadeloupéennes, martiniquaises et réunionnaises sont souvent le théâtre d’une fusion et peuvent s’enorgueillir de leur héritage africain. Pour cette escale gourmande, nous vous proposons une présentation de l’influence de l’Afrique culinaire sur la gastronomie créole.

À l’image des populations créoles métisses, la cuisine d’Outre-Mer est issue d'un mélange où se mêlent influences indiennes, africaines, chinoises et métropolitaines. Toutefois, l’Afrique demeure une source d’inspiration prégnante. Les plats en sauce, les viandes bouillies, les piments qui égayent une préparation : autant de signes qui font de l’Afrique une source majeure quand il s’agit de la gastronomie créole. Premier signe de cette influence, les ingrédients. Nombre de condiments et d’épices incontournables dans les recettes réunionnaises ou antillaises sont héritées de la culture africaine. Le girofle, produit à Madagascar et aux Comores, se retrouve dans beaucoup de préparations culinaires créoles comme le boudin antillais ou le civet de zourites réunionnais. Aux Antilles, l’introduction de certains aliments provenant du continent africain s’est faite par les esclaves obligés d’inventer des recettes. Si certaines ont désormais disparu comme la soupe à l’igname, d’autres font encore le plaisir des papilles. Soupe à Congos, soupe à fruit à pain, bébélé de Marie-Galante, ces plats se retrouvent aujourd’hui encore sur les cartes des meilleurs restaurants afro-antillais. Au XIXème siècle, le manioc et la morue ont compensé les carences d’un régime alimentaire très déséquilibré. Finalement, en se penchant sur l’histoire de la cuisine créole, on en vient à découvrir l’histoire de

nos départements d’Outre-Mer. À l’époque déjà, manioc, igname et patate douce étaient préférés aux tubercules européens. Aujourd’hui, de nombreux chefs font fusionner les saveurs créoles et africaines, apportant à leurs préparations une touche originelle. Les saveurs afro-caribéennes n’ont jamais été aussi en vogue. Pour JeanMichel, serveur pour une grande table créole à Paris, « aujourd’hui, les clients raffolent de recettes antillaises. Nous avons même des Japonais qui viennent chez nous. C’est quelque chose que l’on ne voyait pas voilà encore 10 ans ». Chef de renom installé à Saint-Barthélémy où il déploie ses talents à La route des boucaniers sur Gustavia, Francis Delage est un passionné de cuisine créole, auteur de plusieurs ouvrages dont une encyclopédie culinaire : Les délices de la cuisine créole. « Maître » Delage revendique l’influence africaine mais souhaite que l’on parle de la gastronomie créole comme d’une culture à part entière. C’est la conjonction de toutes ces influences qui rendent uniques les préparations créoles. Le boucan des Indiens Caraïbes, le combavas d’Inde, le girofle de Zanzibar : c’est toute la richesse d’une cuisine en mouvement. L’Afrique garde une place de choix dans les saveurs antillaises et réunionnaises mais on ne saurait réduire à cette seule origine la singulière gastronomie de nos îles d’OutreMer.

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Christian Abégan, la cuisine afro-caribéenne à Paris et de conservation qui sont identiques. C’est le cas du boucanage. Aux Antilles et dans l’Océan Indien, de nombreux plats se présentent sous la forme de ragoût, comme en Afrique. Plus qu’une influence, je défends le principe d’une complémentarité. Ma cuisine est résolument afro-caribéenne. Quel est l’ingrédient d’origine africaine que l’on retrouve le plus dans les spécialités créoles ? Il y en a une multitude. Les tubercules, la papaye verte, le gombo. Les similitudes de climat et la présence de la mer impliquent que les créoles et les africains possèdent de nombreuses bases alimentaires communes. Une recette consacre un savoir-faire régional. Si un cuisinier créole s’installe à côté d’un cuisinier africain, ils débuteront leur préparation avec de nombreux ingrédients identiques. Il n’y a pas un si grand exotisme à manger créole à Douala ou Abidjan. Certes il y a des originalités qui les distinguent mais le fond est commun.

C’est au "Palanka Restaurant", son adresse du quartier des Halles où il officie, que le chef Christian Abégan propose une nouvelle cuisine africaine inventive et savoureuse. Il nous expose sa passion pour la gastronomie afro-caribéenne. Selon vous, quelles relations entretiennent les gastronomies africaine et créole ? Voilà plus de 20 ans que j’étudie la cuisine africaine. Le lien est évident. Il y a d’abord une similitude dans l’utilisation des légumineuses comme le haricot rouge. On retrouve aussi des procédés de préparation

Quels sont vos projets pour le Palanka en ce début de période estivale ? À l’occasion de l’anniversaire de l’accession à l’indépendance de nombreux états africains, je vais revisiter ma carte. L’été, je propose des plats plus légers avec des produits de qualité. Enfin, je souhaite ouvrir ma carte aux cuisines cubaines et noires américaines. Elles se prêtent très bien à un travail afro-créole.

Retrouvez la cuisine de Christian Abégan au Palanka Restaurant à Paris. Pour plus d’informations : www.lepalanka.com

Le piment, du caractère dans notre assiette Il est le dénominateur commun qui lie cuisine africaine et saveurs

créoles. Ses origines sont difficilement qualifiables et pourtant, nous ne cessons de l’associer à la gastronomie exotique alors que les spécialistes s’accordent à dire qu’il est né au Mexique. Décliné sous diverses formes, le piment effraie autant qu’il fascine. C’est l’ingrédient que l’on avale le regard anxieux. Celui auquel on s’habitue et dont l’absence finit par rendre fade tout ce que l’on goûte. Pourtant, le piment se présente sous des formes variées et possède des vertus médicinales. Le piment cabri, qui pousse dans les Hauts de Salazie à la Réunion, soigne de la grippe et aide à la digestion. Toutefois, cueillez le avant qu’il ne développe une couleur rougeâtre. Élément incontournable de la cuisine créole, le piment oiseau relève viandes et légumes et reste réservé aux plus courageux. Enfin, on ne saurait évoquer le piment sans présenter le « féroce ». Une taille minuscule pour un maximum d’effet. Plus un piment est petit, plus il a du caractère !

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GUIDE PRATIQUE À Paris : Le Waly Fay 6 Rue Godefroy Cavaignac - 75011 Paris Tél. : 01 40 24 17 79 Le Palanka 15 Rue des Lombards - 75004 Paris Tél. : 01 42 77 29 26 www.lepalanka.com À Saint-Barthélémy : La Route des Boucanniers Rue du Bord de Mer Gustavia BP 663 Saint-Barthélémy Tél. : 0590 27 73 00 Île de la Réunion : Ferme-auberge de Mme Annibal Chemin de la Rivière-du-Mât 97412 Bras-Panon Tél. : 0262 51 53 76

Comment s'y rendre : Par Corsairfly : Vols au départ de Paris Orly Sud à destination xxx Renseignements et réservations au 0820 042 042 ou sur www.corsairfly.com

Creole cuisine

a gastronomy under influence As the slave trade brought millions of Africans in the West Indies and in the Indian Ocean, one can obviously note that the Creole food there has inherited from its African roots. First, that influence comes from the fact that the slaves needed to invent recipes in order to struggle against a very poor diet. Thus, they mix ingredients that they could get with local ones. They had to develop their own way of cooking using sweet potatoes, yam or cassava. If some dishes can still be found on the menus of afro-caribbean restaurants, several disappeared. It is the case for the yam soup for example. Nowadays, the richness and diversity of the creole cuisine has to be linked with Africa. Clove, yam, combawa, spice : those basics are found in several preparations. From the zourite in la Réunion island to the antillan blood sausage, various specialities have african origin. However, reducing the creole food to its African root would be a mistake. The French West Indies and la Réunion island are a syncretism of many different origins. And so is the food. From India, Asia or Africa : these are all the influences that can be tasted. It makes the creole food a very unique combination that is more and more spread and appreciated all around the world. (58)


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