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giraudet
100 ans
de maison
Collection Mémoire de fabrique © Les Éditions de l’Épure. Paris, 2010.
Textes de Sonia Ezgulian Photographies d’Emmanuel Auger
giraudet
100 ans
de maison
GIRAUDET 100 ANS DE MAISON 7 Préface 9 Giraudet, une histoire de famille 41 Marie-Laure Reynaud, une nouvelle ère 45 La quenelle, une histoire ancienne 49 La Maison Giraudet, un savoir-faire à mi-chemin entre l’artisanat et l’industrie 61 La quenelle à la main 69 Ils parlent des quenelles Giraudet Jean-Jacques Bernard, Luc Jacquet, Georges Blanc 73 Rencontre avec Michel Porfido 81 La sauce Nantua 89 Le beurre d’écrevisses, la petite touche de couleurs et de saveurs 93 La nouvelle identité graphique de Giraudet 99 Recettes 180 Remerciements
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Préface Quenelle, fleuron de la gastronomie lyonnaise, emblème d’un savoir-faire bressan.
C’est avec le fond d’artichaut au foie gras, la volaille
des colères terribles quand les quenelles étaient
demi-deuil et la quenelle au gratin que ma grand-
prêtes avant que les clients aient terminé leur plat
mère, Eugénie Brazier, la Mère Brazier, a bâti sa
précédent, elle faisait recommencer une autre
réputation de grande cuisinière dès le 10 avril 1921,
fournée pour que les quenelles servies dans son
ouverture de son premier restaurant 12 rue Royale.
restaurant ne “fassent pas la planche” ! Le maître
Originaire de la Bresse, Eugénie avait mis au point
d’hôtel et les cuisiniers coordonnaient leurs efforts
sa propre recette, difficile à réaliser pour une mé-
pour satisfaire “la Mère” et les quenelles faisaient
nagère, avec un tour de main particulier, pour des-
fièrement leur entrée dans la salle du restaurant,
sécher la farce. Elle était très fière du “gonflement”
gonflées comme des édredons sur leur lit de sauce
de ses quenelles. Ma grand-mère se mettait dans
champignons. Jacotte Brazier, petite-fille d’Eugénie Brazier, cuisinière du restaurant “La Mère Brazier” à Lyon
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Sur cette gravure, l’atelier de Henri Giraudet au moment de sa crÊation vers 1910.
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Giraudet, une histoire de famille
Une étrange procession serpente chaque dimanche
Henri Giraudet, ouvrier pâtissier, maître d’hôtel
à la sortie de la messe, depuis le parvis de l’église
puis propriétaire de l’hôtel-restaurant avec son
Notre-Dame de Bourg-en-Bresse jusqu’à l’entrée
épouse Marie-Louise, connaît aussi un véritable
du restaurant du Bugey, situé place Neuve, juste
engouement pour la qualité de ses quenelles.
derrière l’église. Les fidèles, munis de leurs petites
Quelques années plus tard, conforté par son suc-
berthes à lait, attendent patiemment leur tour
cès, Henri Giraudet décide de se consacrer unique-
pour acheter de la sauce Nantua ou de la sauce
ment à la fabrication et à la vente des quenelles.
financière pour accompagner leurs quenelles
Il transforme son restaurant en atelier et lance la
dominicales. L’adresse jouit d’une belle réputation
marque de quenelles Giraudet en 1910.
dans toute la région.
Après la guerre de 14-18, l’activité commerciale
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reprenant de plus belle, Henri Giraudet déplace la fabrique dans un espace plus vaste au rezde-chaussée d’un immeuble appartenant à ses parents, situé 12 place de l’Étoile. L’affaire familiale est florissante, la seule ombre au tableau réside dans la discorde entre Henri Giraudet et son fils aîné Gabriel, tous deux ayant une forte personnalité. Par mesure de rétorsion, Gabriel est envoyé en apprentissage dans les plus grands restaurants de l’époque comme le prestigieux Royat-Palace à Royat et d’autres établissements tout aussi réputés à Nevers ou à Monte-Carlo. Gabriel Giraudet sera marqué par cette période rude, les journées très longues en cuisine, l’exigence des chefs, les conditions de travail à un rythme effréné, sept jours sur sept. Il acquiert aussi une belle maturité qui lui sera très utile car, en 1924, son père Henri Giraudet, victime d’une attaque, ne peut plus assumer ses fonctions de dirigeant. À 24 ans seulement, Gabriel prend la relève et assume
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Au comptoir de la boutique, Gabriel et Alberte Giraudet en compagnie de Jean Giraudet, discutent avec un client.
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Devant la boutique-atelier, Gabriel Giraudet tient un magnifique brochet. À l’arrière, sa femme Alberte et son frère Jean. L’homme au chapeau est probablement un client.
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aussi l’éducation de ses trois frères et sœur plus jeunes, Marguerite, l’aînée des enfants Giraudet, étant déjà mariée. Gabriel Giraudet est un excellent cuisinier, il expérimente de nombreuses recettes, les consigne soigneusement dans un carnet. Il est aussi lié avec la famille Blanc et la famille Chapel. Avec quelques employés, il fait prospérer la fabrique en commercialisant des quenelles fraîches et en conserve. Quelques années plus tard, Georges Giraudet rejoint son frère Gabriel et à la mort de Henri Giraudet, en 1929, l’entreprise est baptisée “Maison Giraudet”. Au sens propre comme au figuré, la “Maison Giraudet” au rez-de-chaussée est aussi celle de la famille Giraudet à tous les étages. Gabriel le patriarche habite avec sa femme Alberte au premier étage. La veuve de Henri Giraudet, MarieLouise, règne sur le deuxième étage avec Yvonne, la benjamine des enfants, responsable de la boutique. L’appartement sera ensuite repris par Jean,
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La Maison Giraudet, un savoir-faire à mi-chemin entre l’artisanat et l’industrie
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Dans les panières, la fameuse panade à base de semoule de blé dur, d’œufs et de lait, celui des producteurs bressans. Les trois ingrédients sont mélangés et rapidement cuits pour former des sortes d’éclats de semoule agglomérée qui reposent pendant 24 h dans une salle réfrigérée. Cette étape est l’un des secrets qui signent la particularité des quenelles Giraudet.
Les pains de 10 kg de beurre sont coupés en morceaux et incorporés très froids dans la panade.
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Dès l’aube, du beurre, des œufs, du lait et du sel sont mélangés dans un grand robot, un cutter d’une capacité de 250 kg, jusqu’à obtention d’un foisonnement particulier. Comme le cuisinier au-dessus de sa marmite, le responsable de ce poste juge et dose les ingrédients en fonction de la température, de la pression atmosphérique, de l’hygrométrie, du lait plus gras en été, de la récolte du blé pour les semoules.
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ReCETTES
Quelques recettes requièrent des quenelles spécifiques, saisonnières ou en édition limitée. Vous pouvez contacter Giraudet pour connaître leurs disponibilités ou les confectionner en suivant les conseils de Michel Porfido avec la recette de la quenelle de brochet, en remplaçant le brochet par l’ingrédient de votre choix ou en variant les type de farines ou d’assaisonnement.
Sauf indication contraire, les recettes sont proposées pour quatre personnes
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Préparez une grande casserole remplie d’eau frémissante. À l’aide de deux cuillères à soupe, moulez les quenelles et pochez-les une vingtaine de minutes en veillant à ce que l’eau ne bouille jamais. Retirez les quenelles de la casserole à l’aide d’une écumoire et laissez-les refroidir avant de les apprêter avec la recette de votre choix.
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Assiette de tapas aux quenelles
Pour les bouchées aux tomates cerises et à la mozzarella - 2 quenelles nature de 80 g chacune - 10 tomates cerises - 100 g de mozzarella - 5 cl d’huile d’olive - 2 pincées d’origan séché
Pour les bouchées aux pruneaux - 2 quenelles nature de 80 g chacune - 10 pruneaux dénoyautés - 10 petites tranches de lard fumé
Découpez les quenelles en rondelles de 1 cm d’épaisseur. Coupez les tomates cerises en deux, la mozzarella en petits dés et saupoudrez le tout d’origan et d’huile d’olive. Disposez un dé de mozzarella et une demitomate sur chaque rondelle de quenelle. Fixez le tout avec un pique en bois et réservez dans un plat.
Découpez les quenelles en rondelles de 1 cm d’épaisseur. Taillez les pruneaux dénoyautés en deux, enveloppez-les d’une demi-tranche de lard fumé et piquez-les sur chaque rondelle de quenelle. Réservez aussi dans un plat.
Lorsque la préparation de tous les tapas est terminée, enfournez les trois plats à 180˚ C pendant 6 à 7 mn.
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Pour les bouchées à la mimolette et au cumin - 2 quenelles nature de 80 g chacune - 150 g de mimolette jeune - 1⁄2 cuillère à café de cumin en poudre
Découpez les quenelles en rondelles de 1 cm d’épaisseur. Coupez la mimolette en dés et disposez-en un sur chaque rondelle de quenelle en le fixant avec une pique en bois. Saupoudrez de cumin et réservez dans un plat.