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REVUE DE LA FÉDÉRATION INTERNATIONALE DES PROFESSEURS DE FRANÇAIS
le français dans le monde
lefrançais le monde dans
N° 372 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2010
// MÉTIER //
NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2010 ■ DOSSIER : Interprétations de l’histoire, questions de mémoire
L’approche actionnelle version télé-réalité, d’Helsinki à Montpellier
// DOSSIER //
Interprétations de l’histoire
Questions de mémoire
N°372
// ÉPOQUE //
FIPF
-
www.fdlm.org
13 €
ISSN 0015-9395 ISBN 978-2-090-37063-8
Vizavi, un site de mutualisation pour les enseignants du bilingue en Espagne
Fred Pellerin raconte Saint-Élie-de-Caxton, Québec
// MÉMO //
Alain Mabanckou et l’enfant de Pointe-Noire
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Sommaire
Métier
Les fiches pédagogiques à télécharger
ÉPOQUE 4. Portrait Fred Pellerin, conteux et poète québécois
6. Tendance Philosopher, poussez la porte et entrez…
7. Sport
L’Amérique latine fête le bicentenaire des indépendances
Lucie Décosse, du judo au journalisme
8. Regard « La singularité est revendiquée par tous »
10. Économie Les métiers d’art, entre tradition et renouveau
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• Graphe : « Fête » • Sport : Lucie Décosse, du judo au journalisme • Économie : Les métiers d’art, entre tradition et renouveau • Exposition : Paris est tout petit… • La notion d’erreur fiches pédagogiques • Dossier : histoire à télécharger sur : et mémoire www.fdlm.org • Jeux
Dossier
Interprétations de l’histoire Questions de mémoire
12. Exposition Paris est tout petit…
13. Évènement Un hommage à la générosité des photographes
Entretien Rachid Bouchareb .......................50 Décryptage À qui appartient l’histoire ? ........52 Analyse De l’usage politique des symboles historiques.............................54 Enquête Enseigner l’histoire aujourd’hui .......56
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14. Librairies francophones Placer hors du temps les livres et les lecteurs
Le français dans le monde sur Internet : http://www.fdlm.org MÉTIER 18. L’actu
32. Reportage France et États-Unis échangent leurs enseignants
20. Focus Vers une nouvelle légitimation des activités grammaticales
34. Innovation Vizavi : lieu de mutualisation pour les enseignants du bilingue
22. Mot à mot Dites-moi Professeur…
36. Initiative
MÉMO 60. À voir 62. À lire 66. À écouter INTERLUDES 2. Graphe « Fête »
Les lycéens décernent leur Goncourt
24. Clés
16. Poésie
La notion d’erreur
38. Témoin
Victor Hugo, « Quiconque est amoureux… »
26. Zoom
Aux origines de l’enseignement du français en Afrique : Jean Dard
44. Nouvelle
Chacun sa chaussure
Jean-Marie Laclavetine, « Conte de Noël »
40. Célébration
Couverture : miz’enpage
28. Savoir-faire
L’Amérique latine fête le bicentenaire des indépendances
56. BD
Delf-Dalf : priorité à la dimension interculturelle
30. Expérience
42. Ressources
68. Jeux
L’approche actionnelle, version télé-réalité
Outils pour la classe et multimédia
Le vocabulaire de Noël…
Pascal Placeman, « Question piège » et «Bons parents»
Le français dans le monde, revue de la Fédération internationale des professeurs de français - www.fipf.org, éditée par CLE International – 9 bis, rue Abel Hovelacque – 75 013 Paris Tél. : 33 (0) 1 72 36 30 67 – Fax. 33 (0) 1 45 87 43 18 – Service abonnements : 33 (0) 1 40 94 22 22 – Fax. 33 (0) 1 40 94 22 32 – Directeur de la publication Jean-Pierre Cuq (FIPF) Directeur de la rédaction Jacques Pécheur (Ministère de l’Éducation nationale – FIPF) Secrétaire général de la rédaction Sébastien Langevin Relecture/correction Marie-Lou Morin Relations commerciales Sophie Ferrand Conception graphique Miz’enpage - www.mizenpage.com – Commission paritaire : 0412T81661. Comité de rédaction Dominique Abry, Isabelle Gruca, Valérie Drake, Pascale de Schuyter Hualpa, Chantal Parpette, Jacques Pécheur, Florence Pellegrini, Nathalie Spanghero-Gaillard, Conseil d’orientation sous la présidence d’honneur de M. Abdou Diouf, secrétaire général de l’Organisation internationale de la Francophonie : Jean-Pierre Cuq (FIPF), Pascale de Schuyter Hualpa (Alliance française), Raymond Gevaert (FIPF), Michèle Jacobs-Hermès (TV5), Xavier North (DGLFLF), Soungalo Ouedraogo (OIF), Florentine Petit (MEN), Jean-Paul Rebaud (MAEE), Madeleine Rolle-Boumlic (FIPF), Vicky Sommet (RFI), Jean-Luc Wollensack (CLE International).
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mémo // à voir
par Bérénice Balta
Brèves C’EST L’HISTOIRE D’UN MEC… Voilà un premier film réjouissant. Différent et drôle ! Les Barons (MK2 vidéo), signé du jeune Nabil Ben Yadir, dépeint la vie d’une bande des quartiers de Bruxelles, sans préjugés et avec beaucoup d’humour. « Infiltrant » la communauté maghrébine de la capitale belge, il suit principalement Hassan, garçon talentueux dans le domaine du rire, mais qui n’ose pas vivre son rêve. Du coup, il s’accroche à la philosophie des Barons qui ont érigé la glande comme mode de vie.
LE COMBAT DE M’MAN TINE… C’est un classique universel en version restaurée que propose Carlotta Films. Adapté du roman antillais de Joseph Zobel, Rue CasesNègres d’Euzhan Palcy a secoué tous ceux qui l’ont découvert à sa sortie, en 1983. Couvert de Prix dans les festivals, le film raconte, à l’aube de l’Exposition coloniale de 1931, le combat de M’man Tine pour que son petit-fils José, qu’elle élève seule, reçoive une bonne éducation et une véritable instruction. Une édition bien documentée grâce à ses bonus et utile pour la classe.
SUR LES AILES DE LA DANSE… Quand Frederick Wiseman, l’un des plus grands documentaristes du monde, pénètre dans les coulisses et sur la scène de l’Opéra de Paris, il entraîne le spectateur à sa suite, dans un labyrinthe fascinant où tulle, collants et chaussons rivalisent avec la sueur des artistes. Ainsi, La Danse, le ballet de l’Opéra de Paris se savoure avec une réelle délectation.
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Jacques Demy l’enchanteur Le cinéma de Jacques Demy (trop tôt disparu il y a vingt ans, à 59 ans) reste enchanté et enchanteur. Par les sujets traités, inspirés de contes et légendes, ou même lorsqu’il dépeint la vie réelle, emprunts de féerie. Parce qu’il a choisi la comédie musicale comme genre principal d’expression. Cependant, à y regarder de plus près, il n’est pas rare de déceler une certaine noirceur dans ses films et un penchant pour les ambivalences. L’édition de cinq de ses œuvres majeures, par Arte Vidéo, Lola, La Baie des anges, Les Parapluies de Cherbourg, Les Demoiselles de Rochefort et L’évènement le plus important depuis que l’homme a marché sur la lune, révèle des subtilités et des finesses que seuls des DVD peuvent nous offrir… C’est également l’occasion de redécouvrir L’évènement le plus important depuis que l’homme a marché sur la lune, moins connu que Les Parapluies de Cherbourg, Palme d’or du Festival de Cannes 1964. Le
Un Bourvil, sinon rien !
thème pourtant est on ne peut plus moderne puisque Jacques Demy aborde – on est en 1973 – le thème de la grossesse masculine. L’homme « enceint » n’est autre que le génial Marcello Mastroianni qui interprète un moniteur d’autoécole marié à une coiffeuse, Catherine Deneuve. Cet état hors norme va attirer sur ce petit couple une célébrité planétaire et fulgurante… Comme le disait, non sans justesse, le réalisateur, à propos de ce long-métrage inattendu : « C’est une rêverie bien sûr, mais c’est toujours basé sur des petites réalités. » Remarque qui vaut pour tous ses films ! Ces éditions sont accompagnées de nombreux bonus qui éclairent et enrichissent la vision du travail de ce cinéaste dont on trouve aujourd’hui des hommages dans Jeanne et le garçon formidable de Ducastel et Martineau ou Les Chansons d’amour de Christophe Honoré. Raison de plus pour se (re)plonger dans cet univers unique.
En voilà une bonne idée ! Proposer en DVD, une fois n’est pas coutume, non pas l’un des nombreux films de Bourvil (pseudonyme pris en référence au village de son enfance), décédé il y a tout juste quarante ans, mais l’une de ses pièces mythiques : La Bonne Planqueécrite pour lui par Michel André et mise en scène par Roland Bailly. La version que les Éditions Montparnasse offre n’est autre que l’enregistrement de cette truculente comédie au théâtre du Vaudeville à Bruxelles, en 1964, pour la télévision belge. Il y joue Antoine Perrin, tranquille fonctionnaire, chez qui un truand, flanqué de sa bonne amie Lulu, se réfugie. Et là, place au rire ! Tout le, ou plutôt, les talents (acteur, comique, chansonnier…) de Bourvil y sont exploités, ce qui ne peut que réjouir l’amateur de ce comédien tant aimé du public. Outre des bonus de bon aloi, un CD nous permet, en prime, de réécouter ses plus grands succès musicaux, tels « Les crayons » ou « Salade de fruits »… Joli, joli, on vous dit !
Le français dans le monde // n° 372 // novembre-décembre 2010
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Secret de famille Olivier Ducastel et Jacques Martineau sont deux réalisateurs formidables. Tout comme leurs six longs-métrages de fiction réalisés entre 1998 et 2010, dont le dernier, L’Arbre et la forêt, sort en édition DVD chez Ad Vitam. Outre le film, ce DVD permet de découvrir le documentaire Paragraphe 175, de Rob Epstein et Jeffrey Friedman. L’un et l’autre abordent la question de la déportation des homosexuels durant la Seconde Guerre mondiale, le premier par le biais de l’histoire de Frédérick qui révèle, à la mort de son fils, le secret douloureusement gardé, le second grâce aux témoignages de survivants, pudiques mais puissants. Et puis, L’Arbre et la forêt, au-delà de son sujet, donne à voir deux comédiens magnifiques, bien qu’assez rares au cinéma, Guy Marchand et Françoise Fabian, couple d’écran étonnant, mais dont la sincérité et la justesse entraînent les spectateurs jusqu’au plus profond d’eux-mêmes.
Le fantastique, version québécoise… Âmes sensibles s’abstenir ! L’auteur, Patrick Sénécal, a été surnommé « le Stephen King québécois »… C’est dire ce qui attend le spectateur avec l’adaptation, de l’autre côté de l’Atlantique, de deux de ses romans, Les 7 Jours du Talion, réalisé par Podz et 5150, rue des Ormes (prix du Public au dernier Festival du film fantastique de Gérardmer) par Éric Tessier. Frisson garanti donc, si on se laisse embarquer dans ces thrillers d’épouvante où bizarreries, vengeance, justice, le dispute au machiavélisme des différents protagonistes. On pense au terrible Seven de David Fincher… Et pour cause, ici aussi on se réfère beaucoup à Dieu, à la justice divine et autres péchés capitaux. C’est habile, terrifiant et, il faut bien le reconnaître, assez hypnotique. Deux films proches et pourtant différents qui donnent envie de mieux connaître la littérature ou le cinéma québécois. Ou, pourquoi pas, les deux. Le français dans le monde // n°372 // novembre-décembre 2010
ALLEZ, LES FILLES ! En adaptant son œuvre Une pièce espagnole à l’écran sous le titre Chicas, Yasmina Reza n’a pas seulement changé le titre, elle s’est approprié l’espace cinématographique avec une belle ampleur grâce à tout ce qui en compose l’essence même, musique, décors, acteurs… Pour autant, l’intrigue – une mère veut présenter son nouveau fiancé à ses filles – reste identique à celle de la pièce. On reste séduit par l’humour, la lucidité, la pertinence du propos et l’élégance de l’auteur…
AU THÉÂTRE AVEC OLIVIER PY La coopérative de production audiovisuelle théâtrale, la Copat, regroupe un grand nombre de théâtres de l’espace francophone et permet à un large public, grâce à des captations et des adaptations pour l’écran, l’accès à des œuvres d’auteurs et/ou metteurs en scène majeurs. Aujourd’hui, on peut donc appréhender différents travaux d’Olivier Py dont son monumental Les Enfants de Saturne, terrible instantané du temps présent créé en septembre 2009 à l’Odéon. Excès et audaces côtoient, parfois, un certain ennui, mais comme c’est fait avec brio, on excuse.
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mémo // à lire jeunesse
Roman
Par Agnès Ceccaldi
L’enfant de Pointe-Noire
Hugues Beaujard, En route vers Bagdad, Dadoclem Éditions
Robinsonnade écologique Maxime a 15 ans. Ses parents l’envoient passer ses vacances sur une île méditerranéenne, dans une famille modeste. Un jour, alors que le garçon se promène en montagne avec les enfants de la maison, un typhon s’abat sur l’île. Au milieu de la nature ravagée et de l’orage qui continue de gronder, les trois jeunes gens vont vivre les jours les plus intenses de leur vie. Une robinsonnade contemporaine, sur fond de prise de conscience écologique et d’une histoire d’amour naissante… Roland Godel, Prisonniers du chaos, Éditions Thierry Magnier, 2010.
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© C Hélie / Gallimard
Le pêcheur de Bagdad Majid, jeune pêcheur vivant dans la région de Bassora, part à Bagdad à la recherche d’un remède pour sauver son père malade. Au fil de sa quête, il va découvrir les formidables apports de la civilisation arabe dans les domaines de la médecine, des arts ou des mathématiques… Cette intrigue, située au Moyen Âge, constitue le premier tome d’une trilogie qui mènera le lecteur à Byzance et à Aix-la-Chapelle, au cœur des Empires byzantin et carolingien. Alliant l’exigence du récit historique et l’espièglerie du roman d’aventures, voilà un livre particulièrement bien adapté pour les 10-14 ans.
Par Sophie Patois et Bernard Magnier
Maman Pauline, Papa Roger, ses secrets, « ses deux maisons » et son admiration pour le « chanteur à moustache qui pleure son copain le chêne », Tonton René, l’oncle communiste et riche, Caroline et les premiers émois amoureux, son frère Lounès, le meilleur ami… Alain Mabanckou – pardon, Michel, le héros de son dernier roman Demain j’aurai vingt ans – convoque ses proches pour de grandes retrouvailles avec l’enfance dans les années 1970 à Pointe-Noire au Congo… L’occasion de feuilleter l’album des souvenirs, vrais ou inventés, d’en restituer les couleurs, les bruits… et les saveurs. Les copains d’école, la magie du premier radio-cassette, les films indiens et Jean-Paul Belmondo « qui ne tombe jamais » dans les bagarres… La politique du pays avec les années marxistes, le PCT et le « camarade président » Marien Ngouabi et, au dehors, la vie du monde avec la fuite du chah d’Iran, les frasques meurtrières d’Idi Amin Dada, Valéry Giscard d’Estaing et ses cadeaux… Il y a aussi les livres, bien sûr, Tintin, Blek le Roc et Marcel Pagnol, mais aussi les San Antonio découverts dans la bibliothèque des parents,
et un clin d’œil à Rimbaud et un autre, à la dérobée, à Tchicaya U Tam’si . Alain Mabanckou garde l’humour tout en baissant la garde de la tendresse et en regardant le passé à travers la lorgnette faussement naïve d’un enfant de dix ans. B. M. Alain Mabanckou, Demain j’aurai vingt ans, Gallimard
Dans les ténèbres Les larmes de la guerre d’une mère Mars 1957, en Algérie, le capitaine André Degorce et le lieutenant Horace Andreani, compagnons d’armes en Indochine, se retrouvent une nouvelle fois impliqués dans la tourmente de l’Histoire. Méprisant Andreani, fasciné par la noblesse de son ennemi, Tahar, Degorce finit par vaciller. Explorant ce temps de désastre, Jérôme Ferrari décrit sous la forme d’une lente décomposition morale le destin d’une « belle âme » (Degorce) confrontée à la réalité sordide du combat et de la torture. Sans céder au manichéisme, en imprégnant son récit d’une patte résolument spirituelle, Jérôme Ferrari offre avec Où j’ai laissé mon âme une saisissante réflexion sur la condition humaine. S. P.
Une femme algérienne, seule, écrit à son fils qui vient d’être assassiné ce qu’elle n’a pu ni osé lui dire. Elle dit sa solitude, les vraies tendresses des uns, les fausses larmes des autres. Elle découvre Assia, l’amie du fils, rencontre Kheïra, une mère, comme elle, victime du même drame… L’assassin est là aussi, connu, à portée de vengeance… Et derrière cette bouleversante confession (Puisque mon cœur est mort) écrite dans une langue à fleur de poésie, l’Algérie d’aujourd’hui partagée dans l’oubli, le déni des années grises de douleurs et de drames. « Tu fais partie de ceux dont l’histoire ne retiendra pas le nom, de ceux qu’elle se hâte d’oublier »… B. M.
Jérôme Ferrari, Où j’ai laissé mon âme, Actes Sud
Maïssa Bey, Puisque mon cœur est mort, Éditions de l’Aube
Le français dans le monde // n° 372 // novembre-décembre 2010
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Poches francophones
Le destin de trois « fantômes » Avec Sympathie pour le fantôme, Michaël Ferrier, qui vit et enseigne la littérature au Japon, propose un roman vif et érudit, situé dans le Tokyo du XXIe siècle, mais centré sur la culture française ! Professeur « moderne et polyvalent » comme il se décrit lui-même, le narrateur travaille aussi pour la télévision japonaise. Il planche sur le projet d’une émission qui proposerait une Histoire de France « sous un jour nouveau ». Et choisit d’évoquer le destin de trois « fantômes » ou oubliés de l’Histoire : le marchand d’art Ambroise Vollard, né à La Réunion, qui découvre Cézanne, Van Gogh, Picasso…, la noire maîtresse de Baudelaire, Jeanne Duval, et Edmond Albius, petit esclave qui « invente » la vanille. Si le roman ne manque pas de diatribes contre la culture « globalisante », l’université et la télévision, il fourmille aussi de références littéraires et d’enseignement sur le Japon. Bref, une fiction pleine d’esprit et d’échanges culturels… S. P. Michaël Ferrier, Sympathie pour le fantôme, Gallimard
Le français dans le monde // n°372 // novembre-décembre 2010
Ils se retrouvent, une couleur de peau et un malêtre en partage… à moins que l’amour ne vienne à la rescousse… Sous la plume de Léonora Miano, Tels des astres éteints : deux Camerounais et une Guyanaise à Paris ou trois façons de vivre son identité noire dans la capitale. Léonora Miano, Tels des astres éteints, Pocket
Betty, une jeune femme africaine exilée en Europe, se lie de tendresse avec l’une de ses voisines qui sera placée contre son gré dans une maison de retraite… Inassouvies, nos vies ou la solitude est toujours ce qu’elle était selon Fatou Diome… Fatou Diome, Inassouvies, nos vies, J’ai Lu
La quête d’une bibliothécaire invitée à participer à un colloque sur la littérature érotique dans le monde arabe. Entre journal amoureux, citations de textes anciens, et réflexions sur le sujet. Poète et romancière syrienne résidant à Paris, Salwa Al Neimi a participé à la « libre » traduction de La Preuve par le miel, publié initialement en arabe. Salwa Al Neimi, La Preuve par le miel, Pocket
La vie n’est pas simple lorsqu’enfant, on naît bossu et fils de sorcier, ou soupçonné de l’être… Conteur congolais installé en Belgique, Pie Tsibanda offre avec Je ne suis pas un sorcier une plongée en terres traditionnelles mais aussi sur les pistes nauséabondes de l’exclusion… Pie Tsibanda, Je ne suis pas un sorcier, Pocket
POCHES
Laurent Cohen, Sols, Actes Sud
Gisèle Pineau, Morne Câpresse, Folio
POCHES POCHES
Véritable OLNI (Objet littéraire non identifié) que ce premier roman signé Laurent Cohen ! Le titre, Sols, fait référence à la Kabbale et aux sols spirituels qui correspondent aux sept ciels qui, selon elle, séparent l’homme de l’Infini. La première partie du roman évoque la rencontre entre deux érudits : Loïc Rothman, historien spécialiste de Vichy et S.G., théologien spécialiste des anges. Le premier a besoin du second pour décrypter un carnet écrit dans les années 1940, sorte de journal de l’Occupation tenu par un intellectuel cosmopolite, truffé de références mystiques. Ce document commenté par S.G. et Loïc Rothman constitue la deuxième partie du récit. Émaillée de notes et références ésotériques précises, cette singulière fiction s’apparente à une espèce de quête intellectuelle jubilatoire. S. P.
Une jeune femme part à la recherche de sa sœur qu’elle suivra des bas-fonds d’un bidonville jusqu’au sommet du Morne Câpresse où s’est réfugiée une communauté de filles perdues soumises à d’étranges rigueurs… Une nouvelle plongée de Gisèle Pineau dans les douloureux tourments d’une femme guadeloupéenne.
POCHES POCHES
La traversée des sols
Par Bernard Magnier
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mémo // à lire bande dessinée
Par Sébastien Langevin
Un monument de la BD restauré John Difool, détective privé de classe (R), revient dans de nouveaux habits : une belle occasion pour (re)découvrir L’Incal, série-phare de la bande dessinée française des années 1980. Au cours de l’une de ses enquêtes, John Difool, minable enquêteur de seconde zone, trouve un étrange objet triangulaire qui semble avoir de fantastiques pouvoirs : la possession de l’Incal va attirer vers lui tous les extraterrestres et autres dirigeants gourmands de l’univers. Dans cet univers futuriste, aussi loufoque qu’inquiétant, une folle coursepoursuite s’engage.
essais
Quête mystico-humoristique, L’Incal s’est imposé en six albums comme la série de référence de la bande dessinée de science-fiction. Au scénario, Alexandro Jodorowsky alterne avec brio scènes d’action, gags délirants et pauses philosophiques. Cette saga intergalactique sacrera Mœbius, alias Jean Giraud, comme l’un des maîtres internationaux du graphisme épuré et onirique. Grâce à un minutieux travail sur les planches originales, cette somptueuse intégrale restitue les couleurs acides des années 1980 : 300 pages de bonheur ! Alexandro Jodorowsky et Mœbius, L’Incal, l’intégrale, Les Humanoïdes associés
Par Philippe Hoibian
SOIXANTE ANS DE CULTURE ET DE PASSIONS
LA GUERRE ET LA PAIX
L’hebdomadaire Télérama porte depuis plus de soixante ans un regard curieux, critique, engagé sur la vie culturelle. Soixante ans de culture et de passions. En guise de bilan et d’hommage à ses collaborateurs et à ses lecteurs, il nous propose une sélection d’entretiens, d’enquêtes et de photos qui illustrent l’évolution de la revue : le simple supplément de La Vie catholique est devenu un magazine « multiculturel » de référence qui commente l’actualité du cinéma, de la littérature, de la musique, de la chanson, de la danse, des arts , des médias… Son souhait a toujours été de rendre la culture plus familière et plus accessible, de déchiffrer, à travers la création, l’état d’une société, ses désirs et ses manques, ses interrogations et ses mutations. On y retrouvera des coups de cœur et des coups de gueule, avec une part croissante consacrée à l’actualité qui fait l’Histoire. Le magazine est complété aujourd’hui par les hors-séries illustrés (sur les grandes expositions, les grands hommes, les grands thèmes de société) et un site Internet (qui propose en plus ses propres productions audio et vidéo : http://www.telerama.fr). Télérama se veut un guide de ceux pour qui « la culture n’est pas seulement un divertissement mais le suc et le sel de l’existence ». Pour Umberto Eco, « ce qui forme une culture, ce n’est la conservation mais le filtrage », c’est-à-dire le choix, la liberté d’aimer, de détester, de laisser de côté ou d’encenser. Télérama 60 ans : nos années culture tomes 1 et 2, Les Arènes
UN ANGE PASSE
La série de films, diffusée en six épisodes sur France 2 (disponible en DVD), témoigne de l’horreur de la Deuxième Guerre mondiale (elle aurait fait 50 millions de morts, plus de victimes civiles que militaires) en présentant les faits militaires et le vécu quotidien des gens ordinaires, à partir d’images d’archives auxquelles on a rendu les couleurs et les sons d’origine. Le site d’Apocalypse est sur www.france2.fr. Le livre propose le texte intégral du commentaire, illustré d’une large sélection d’images. L’ensemble veut raconter une histoire de la guerre qui ne soit pas la victoire d’un camp sur l’autre mais la défaite de tous. « Si tu veux la paix, connais la guerre », disait Gaston Bachelard.
L’auteur (journaliste anglais plurilingue) est depuis des années à l’écoute de ce que chaque langue sait dire de particulier. Il affectionne des mots intraduisibles comme schadenfreude (« la joie devant le malheur d’autrui »; en allemand), gedogen (« tolérer tout en désapprouvant » ; en néerlandais), lagom (« le juste milieu valorisé » ; en suédois), sisu (« mélange de courage de dureté, de dépit face à l’adversité » ; en finlandais). Il s’amuse d’entendre des expressions comme « cela s’appelle reviens », « un ange passe », « it takes two to tango » et apprécie les différentes façons de déclarer son amour : « Ti voglio bene » (« je t’aime beaucoup » ; en italien), « Taisetsu » (« tu m’es précieux » ; en japonais). Aux lecteurs de compléter sa liste de favoris !
Daniel Costelle, Isabelle Clarke, Apocalypse, la 2e guerre mondiale, Acropole
Alex Taylor, Bouche bée, tout ouïe : comment tomber amoureux des langues, J.C. Lattès
LA VIE ET LA MORT Quoi de plus éternel, universel, culturel que la mort ? Quoi de plus lié à la vie, à une société, à une époque ? Ce dictionnaire est un voyage à travers mille mots, une approche plurielle des différentes façons de côtoyer et de penser la mort, ses métamorphoses, ses rituels, ses mythes. Les commentaires sont passionnants, sur des noms attendus comme « au-delà,camp
d’extermination,incinération,religion» et sur des mots moins attendus comme « abandon, beauté, carnaval, cinéma, tango »… Historiquement, on est passé progressivement d’une mort familière, « apprivoisée », à une mort effacée qui la rend impensable et indicible. Ce qui n’est pas vrai pour tous les pays : que l’on pense au Japon, au Mexique ou à la Chine… Philippe di Folco (S/D), Dictionnaire de la mort, Larousse, collection In extenso
Le français dans le monde // n° 372 // novembre-décembre 2010
POCHES
POCHES POCHES
POCHES POCHES
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Par Claude Olivieri
Rire… de quoi ? pour quoi ?
Coffret de trois volumes pour cette adaptation théâtrale par Jean-Michel Ribes et Jean-Marie Gourio des Brèves de comptoir . Il s’agit d’une mise en scène de citations authentiques recueillies dans la vie de tous les jours par Jean-Marie Gourio, depuis 1988, surtout dans les bars et bistrots. L’absurde, l’humour mais aussi l’actualité et parfois la philosophie se côtoient ici de manière cocasse. Jean-Michel Ribes, Jean-Marie Gourio, Brèves de comptoir, Actes Sud-Papiers
Rire : pour quoi faire ? Le nouveau thème inscrit au programme du Brevet de Technicien supérieur a incité J. Destaing et P. Labaune à publier une anthologie de textes littéraires, articles, chansons, accompagnée de supports iconographiques variés. L’ouvrage situe dans l’histoire les théories et pratiques du rire, de Rabelais aux humoristes actuels, et présente les fonctions du rire sous trois angles : rire pour unir ou uniformiser, rire pour critiquer, rire pour résister.
Le Meilleur de L’Os à Moelle regroupe les numéros les plus caractéristiques de ce journal mythique lancé en 1938 par Pierre Dac, une grande figure de l’humour loufoque que ses sketches avec Francis Blanche ont popularisé auprès du public de l’après-guerre. Dépêches farfelues, reportages saugrenus, conseils incongrus, offres d’emploi inattendues : cette anthologie est à faire découvrir de toute urgence aux jeunes générations ! Une référence obligée de l’humour français.
J. Destaing et P. Labaune, Rire : pour quoi faire ? GF Flammarion, coll. Étonnants classiques
Le Meilleur de L’Os à Moelle, Seuil, coll. Points
Créateur d’Astérix, de Lucky Luke, du Petit Nicolas ou d’Iznogoud, René Goscinny appartient à notre patrimoine culturel, tant par l’imagerie gauloise qu’il a créée que par les expressions qu’il a mises à la mode. Sous le titre Goscinny. Faire rire, quel métier !, Aymar du Chatenet et Caroline Guillot retracent le parcours insolite de celui qui, depuis son plus jeune âge, voulait faire rire et qui, en renouvelant l’art de la parodie, a donné à la BD ses lettres de noblesse.
Avec Une histoire des haines d’écrivains, Anne Boquel et Étienne Kern nous livrent une version originale et réjouissante de notre histoire littéraire. Cet essai, aussi léger que bien documenté, nous donne à voir le spectacle des mesquineries, des jalousies, des rivalités. Les traits d’esprit les plus fins, les mots les plus féroces, les propos les plus acerbes ont pour unique but que de couvrir l’ennemi de ridicule sur la place publique. Aussi méchant que divertissant !
Aymar du Chatenet, Caroline Guillot, Goscinny. Faire rire, quel métier ! Découvertes Gallimard
Anne Boquel, Étienne Kern, Une histoire des haines d’écrivains, Flammarion, coll. Champs essais
Polar
fantastique
Par Nathalie Ruas
Luminescence des échanges en milieu éclairé En postulant auprès du Groupe, Charlotte rêvait d’ « un monde sans bêtise sans incompétence ». Vinh voulait simplement rejoindre les meilleurs. De mission en mission, les deux héros de Cleer. Une fantaisie corporate évoluent, bien au-delà d’une simple ascension professionnelle. Avec des gimmicks du monde de l’entreprise, des variations autour des multinationales et des clins d’œil à la littérature générale et SF, L. L. Kloetzer compose une fantaisie brillante. L. L. Kloetzer, Cleer, Une fantaisie corporate, Denoël
La soif du mâle Et si le Benelux était devenu dans les années 1970 une dictature féministe ? Telle est l’uchronie qui sous-tend Les Assoiffées, premier roman de Bernard Quiriny, auteur et universitaire belge. Que verraient alors des intellectuels français invités à visiter l’Empire ? Et quel serait le quotidien d’une infirmière propulsée favorite de la Bergère ? Entre l’écho des voyages en URSS et le portrait d’une dictatrice ivre de pouvoir et d’elle-même, cette fable se boit comme du petit lait mais avec un arrièregoût amer… Bernard Quiriny, Les Assoiffées, Seuil
Par Nathalie Ruas
OISEAU DE MAUVAISE AUGURE
LE JUGE ÉTAIT PRESQUE PARTIAL
Harold n’apparaît sans doute pas au générique des Oiseaux d’Hitchock. Mais Louis-Stéphane Ulysse en a fait le héros de son roman éponyme, véritable tragédie grecque dans les États-Unis des années 1960. Le corbeau protecteur et confident frappe parfois comme le destin, dans un tourbillon de névroses hollywoodiennes et de crimes mafieux. Un roman noir corbeau d’une grande envergure.
Un brocanteur à la routine pleine de rituels débusque presque par hasard un tableau de maître dans une vente aux enchères à Montauban. Il voit dans cette aubaine le début d’une nouvelle vie. Hélas, le tableau lui échappe… comme il échappa en son temps à celui qui l’a peint. L’enquête du marchand de tableau décrite dans le premier roman de Patrick Weiller est plus palpitante que la dimension policière de la fin du livre. Elle fait du Jugement de Salomon un récit à lire pour sa toile de fond.
Louis-Stéphane Ulysse, Harold, Le Serpent à plumes
Patrick Weiller, Le Jugement de Salomon, Biro éditeur
Le français dans le monde // n°372 // novembre-décembre 2010
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mémo // à écouter
Par Jean-Claude Demari et Edmond Sadaka
coups de cœur
Des rengaines en reggae Le reggae est devenu en quelques décennies un genre planétaire… Bon nombre d’artistes francophones ont choisi de s’exprimer sur cette musique née en Jamaïque dans les années 1960. Sélection. Originaire de Grenoble, le collectif français Sinsemilia a su renouveler le reggae en version française avec des textes militants et une musique flirtant parfois avec le rock. Dub Inc fait partie du vivier dynamique du reggae français. Ce groupe de huit musiciens propose un reggae traditionnel, avec des apports ragga et orientaux. Au fil des ans, son audience s’est considérablement élargie. Raggasonic revient après une absence de plus de dix ans. Big Red et Daddy Mory se sont réconciliés. Ils ont participé cette année à plusieurs festivals, et notamment à la Fête de l’Humanité en septembre 2010. Un album est attendu pour 2011.
Zaz, chansonnière à controverse L’été 2010 a été marqué par un « tube » réputé anti-consumériste, « Je veux ». Jolie mélodie, paroles espiègles, voix légèrement fêlée : il était difficile de bouder son plaisir. Oui, mais après on s’est intéressé à l’album et l’air du soupçon a commencé à tourner. À côté de réussites comme « La fée », « Prends garde à ta langue » ou « Les passants », on trouve sur cet album les affligeants « Le long de la route », « Dans ma rue » (second degré ?) et « Éblouie par la nuit »… Alors, Zaz, chanteuse révoltée ou interprète réaliste récupérée avant que d’être née ? Incontestablement, sa musique et son univers sont plus proches de ceux de l’agaçante Cœur de Pirate que de ce qui meut les titis parisiens de Java. Le jazz manouche et la chanson réaliste, comme l’enfer, sont pavés de bonnes intentions. J.-C. D.
Pierpoljak est l’un des rares artistes blancs à s’être imposé dans ce style sur la scène française. Il est revenu en 2010 avec Légendaire sérénade en faisant le choix d’une musique plus acoustique. K2R Riddim, groupe français de reggae et de ska, a été formé en 1992. Il a choisi la voie de l’autoproduction et a réussi à s’imposer dans la durée en fidélisant un large public… Avant de disparaître en 2007. Ils sont angevins et depuis 1995, ils brassent le reggae dub, le trip hop et l’électro dans un savant dosage. Le quintette Zenzile a sorti un douzième album l’an dernier. Tonton David est l’un des pionniers du raggamuffin français (style dérivé du reggae avec un tempo plus rapide). Ces dernières années, il a semblé s’essouffler. Il reste, grâce à ses textes revendicatifs, une valeur sûre. Il est le précurseur et le symbole du reggae africain : l’Ivoirien Alpha Blondy a littéralement secoué l’Afrique de l’Ouest dans les années 1980. Il a atteint une consécration internationale avec « Jérusalem » en 1986. Autre voix forte de l’Afrique militante (Ivoirien lui aussi) : Tiken Jah Fakoly. Ce fils spirituel de Bob Marley est l’un des porte-parole de la jeune génération ivoirienne. Le prix RFI Découvertes lui a été décerné en l’an 2000.
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Stromae, maestro électro Il est peu courant d’entendre de la house bien fraîche sur laquelle danse un Français bien charpenté. C’est la performance que réalise, avec son premier album, Cheese, Paul Van Haver, dit Stromae, né le 12 mars 1985 à Bruxelles. « Alors on danse » a été l’électron libre de l’été en Belgique, en Allemagne, en France et en Suisse. Ses paroles, cruelles, sont bien mises en avant : telle est la marque de Stromae. « Dodo », encore plus culotté, fait sautiller sur une dénonciation crue de l’enfance maltraitée… Mais l’album comporte
aussi des moments plus festifs : « House’llelujah », « Rail de musique »… Stromae s’est d’abord illustré dans le rap puis l’a quitté pour se diriger sur les pas de son concitoyen Jacques Brel. Il serait difficile de le lui reprocher. J.-C. D.
Le français dans le monde // n° 372 // novembre-décembre 2010
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en bref livres à écouter Par Sophie Patois
Le premier album de Peau, Première Mue, conjugue de façon exigeante l’école électro et celle de la pop folk, un peu plus loin que Björk ou Camille. Fusion rare en France, couronnée de réussites : « Enola Gay », « Une petite pluie »…
Dans Les Témoins de la mariée, Didier van Cauwelaert, sous la forme d’une fable un peu grinçante, disserte sur les limites de l’amitié. Marc Hessler, séduisant et célèbre photographe, meurt dans un accident de voiture cinq jours avant son mariage avec une jeune Chinoise. Comment ses amis vont-ils annoncer la triste nouvelle à la fiancée ? Pour cette lecture à plusieurs voix, le prix Goncourt 1994 (Un aller simple) se fait chaleureusement accompagner par l’auteure de polar et animatrice de radio Sophie Loubière et les comédiens Pierre Tissot et Stéphane Ronchewski.
Écrit en 1939, Tropismes de Nathalie Sarraute figure au panthéon de la littérature française moderne. Enregistrés entre 1980 et 1999 avec l’auteure et les comédiennes Madeleine Renaud et Isabelle Huppert, ces textes qui indiquent le chemin vers une nouvelle voie littéraire, forte des expressions d’un « for intérieur », font désormais partie du patrimoine culturel français. Un classique du genre donc.
Audiolib
Bibliothèque des voix, Éditions Des femmes
Incontestablement, il swingue, Yannick Noah, dans Frontières, son huitième album ! « Ma pomme », premier morceau, parle énergiquement de sa vie à New York. Mais pour le reste, l’ancien champion n’innove guère, même s’il fait passer quelques bons moments de musiques du monde aux côtés d’Angela Davis, de Barack Obama et de l’abbé Pierre… Jamaïca, groupe français d’électro-rock, fait songer à ses aînés de Phoenix : mélodies bien pensées, rythmes énergiques. Comme eux, malheureusement, Jamaïca s’exprime en anglais. On aime quand même beaucoup « I Think I Like U 2 », « Short and Entertaining » et « Junior ». Pour quand la V. F. ? La Québécoise Lynda Lemay a conquis le cœur des Français dans les années 1990. Son douzième album Blessée a été enregistré lors de sa dernière tournée européenne. Il compte 18 chansons dont 13 inédites.
Le retour de Guy Béart Auteur, compositeur et interprète, il appartient indéniablement à la catégorie des maîtres de la chanson française. Guy Béart a fêté ses 80 ans le 16 juillet dernier. Il est aujourd’hui doublement sur le devant de la scène : il a sorti fin septembre Le meilleur des choses,un CD de 12 nouvelles chansons (quinze ans après son dernier album studio Il est temps). Parmi les nouveaux titres : « Télé Attila », un
pamphlet sur le petit écran. Ce nouvel album sort en même temps qu’un coffret Best Of de trois CD qui comprend ses chansons les plus connues telles que « La vérité », « L’eau vive », « Les couleurs du temps » ou encore « Le grand chambardement ». Au total, 60 chansons qui sont autant de « tubes » indémodables pour cet artiste injustement oublié depuis de longues années. E. S.
Le français dans le monde // n°372 // novembre-décembre 2010
On ne dit jamais assez aux gens qu’on aime qu’on les aime : c’est le titre du dernier opus de Louis Chédid (en collaboration avec son fils M). « Maman, maman » est un hommage à sa mère Andrée Chédid.
aller sur ■ www.fdlm.org pour retrouver toutes les références des albums.
Elle est l’une des artistes majeures de la scène française : Véronique Sanson revient avec Plusieurs Lunes. On retiendra notamment « La nuit sait attendre », une salsa chantée en français et en espagnol.
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