Le français dans le monde N°397

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REVUE DE LA FÉDÉRATION INTERNATIONALE DES PROFESSEURS DE FRANÇAIS

le français dans le monde

// MÉMO // N° 397 janvier-février 2015

Des Français animent Charlie Brown et Snoopy Kamel Daoud livre une réplique algérienne de L’Étranger

3 // DOSSIER //

janvier-février 2015

DOSSIER : Comparer les langues pour mieux les comprendre

Comparer les langues pour mieux les apprendre

FIPF

N° 397 -

9 782090 370904

Les dialogues de Mommy créent la polémique au Québec // MÉTIER //

15 €

ISSN 0015-9395 978 2 090 37090-4

// ÉPOQUE //

En Turquie, la classe à l’heure du cartable numérique

Être prof de français au Nordeste brésilien

Tokyo : enseigner l’autonomie



Le français dans le monde sur Internet : http://www.fdlm.org

numéro 397 Métier / Innovation

ÉPOQUE 6. Portrait

Les fiches pédagogiques à télécharger

En classe à l’heure du cartable numérique

raphe : « Chanter » G Décryptage : Dis-moi des mots pour 2014 Poésie : « Quand nous étions enfants » Clés : La notion de phonétique Test et jeux : François Ier

Françoise Moréchand, une missionnaire laïque au Japon

8. Tendance

De la sueur et des âmes

9. Lieu

40

Pathé : un paradis cinéphile retrouvé

10. Économie

Jean Tirole, le prix Nobel qui défie les oligopoles

12. Décryptage

Dis-moi des mots pour 2014

14. Sport

La France, terrain d’accueil

15. Langue

Le français de Mommy

16. Regard

« Ne pas abandonner l’histoire en profondeur »

MÉTIER 20. L’actu 22. Focus

« Les nouvelles technologies n’impliquent pas des innovations didactiques »

24. Mot à mot

Dites-moi Professeur

26. Savoir-faire

Des ateliers pour s’autoévaluer

28. Clés

La notion de phonétique

30. Expérience

Couverture : © Shutterstock / miz’enpage

Le vocabulaire gastronomique en classe de FLE

fiches pédagogiques à télécharger sur : www.fdlm.org

Dossier

Comparer les langues

pour mieux les apprendre « Des grammaires sur mesure valorisant l’expertise des professeurs ».... 50 L’intercompréhension pour chater en classe de langue................ 52 Pratiques innovantes pour un enseignement plurilingue............. 54 Comprendre les langues romanes ............................................... 56

32. Reportage

Un musée des langues à Paris

34. Enquête

Motiver à l’enseignement du français au Brésil

36. Point de vue

Langues de France : un chant à plusieurs voix

38. Zoom

Voyage linguistique à Katmandou

40. Innovation

En classe à l’heure du cartable numérique

42. Ressources

MÉMO 60. À voir 62. À lire 66. À écouter

48 FICHES PÉDAGOGIQUES PAGES 71 À 76

INTERLUDES 4. Graphe Chanter

18. Poésie

Claude Roy, « Quand nous étions enfants »

44. Nouvelle

Fouad Laroui, « Né nulle part »

58. BD

Rencontre au Sommet

68. Test et jeux François Ier

Le français dans le monde, revue de la Fédération internationale des professeurs de français - www.fipf.org, éditée par CLE International – 9 bis, rue Abel–Hovelacque – 75013 Paris Tél. : 33 (0) 1 72 36 30 67 – Fax. 33 (0) 1 45 87 43 18 – Service abonnements : 33 (0) 1 40 94 22 22 – Fax. 33 (0) 1 40 94 22 32 – Directeur de la publication Jean-Pierre Cuq (FIPF) Rédacteur en chef Sébastien Langevin Conseiller de la rédaction Jacques Pécheur Secrétaire de rédaction Clément Balta – Relations commerciales Sophie Ferrand Conception graphique miz’enpage - www.mizenpage.com – Commission paritaire : 0417T81661. 54e année. Imprimé par IME, Baume-les-Dames (25110). Comité de rédaction Dominique Abry, Isabelle Gruca, Valérie Drake, Pascale de Schuyter Hualpa, Sébastien Langevin, Chantal Parpette, Manuela Pinto, Nathalie Spanghero-Gaillard. Conseil d’orientation sous la présidence d’honneur de M. Abdou Diouf, secrétaire général de l’Organisation internationale de la Francophonie : Maguelone Orliange (MAE), Jean-Pierre Cuq (FIPF), Pascale de Schuyter Hualpa (Alliance française), Raymond Gevaert (FIPF), Michèle Jacobs-Hermès (TV5MONDE), Xavier North (DGLFLF), Imma Tor (OIF), Nadine Prost (MEN), Fabienne Lallement (FIPF), Lidwien Van Dixhoorn (RFI), Jean-Luc Wollensack (CLE International).

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Les reportages audio des mois de janvier-février 2015 à télécharger : Micro-trottoir : « chanter » (audio et transcription) Littérature : Patrick Modiano, prix Nobel de littérature 2014 (audio et transcription) Littérature : Patrick Modiano, texte lu (audio et transcription) Éducation : le programme d’échanges universitaires Erasmus (audio et transcription)

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sport Le Sud-Africain Bernard Le Roux (à g.) et le Néo-Zélandais Uini Atonio avec le maillot de l’équipe de France, lors du match contre l’Argentine, le 22 novembre dernier.

© PAPON BERNARD

L’utilisation de joueurs étrangers au sein du XV de France ne date pas d’aujourd’hui mais semble s’accentuer. Au point de faire débat, alors que les Bleus peinent à convaincre à moins d’un an de la Coupe du monde.

La France,

terrain d’accueil

I

Par Clément Balta

ls sont tous français. » Début novembre, pour les trois traditionnels test-matchs d’automne du XV de France, le sélectionneur Philippe Saint-André a retenu quatre joueurs étrangers : Bernard Le Roux, qui a connu sa première cape en 2013, et trois bleus chez les Bleus : Rory Kockott, Scott Spedding et Uini Atonio, ce dernier étant néo-zélandais et les trois autres sud-africains. En septembre déjà, une liste élargie évoquait 74 joueurs pouvant être appelés en vue du Mondial anglais dont « dix joueurs étrangers potentiellement sélectionnables ». Cette pratique n’est pas vraiment une nouveauté. Plus d’une dizaine de joueurs nés hors du territoire français ont déjà revêtu le maillot frappé du coq, à l’image du Marocain Abdela-

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tif Benazzi ou du Sud-Africain Pieter de Villiers. Une tendance loin d’être un apanage, seule l’Afrique du Sud n’ayant jamais fait appel à des étrangers en sélection nationale. Mais certains s’inquiètent de l’amplification du phénomène, au risque de diluer l’identité du fameux french flair. Une crainte justifiée de surcroît par la qualité du Top 14. « Quand on voit que les joueurs du monde entier veulent venir jouer dans le championnat de France, on se rend compte que c’est le plus attractif, c’est un fait », clame le troisième-ligne du XV tricolore, Damien Chouly. Or les règles de l’IRB (la fédération internationale de rugby) permettent à tout joueur n’ayant jamais porté le maillot de son pays d’origine d’être sélectionnable pour celui où il évolue en club depuis trois ans. Sans compter qu’en France, pour être naturalisé, un sportif ne doit justifier que deux ans de résidence au lieu des cinq

habituels. Il n’en faut pas plus pour mettre en branle le fantasme d’un XV tricolore à majorité composé d’étrangers, dans un période où il a qui plus est bien du mal à gagner ses matchs. Comme en 14 Pour Pierre Camou, le président de la FFR, c’est un faux débat : « Cela a troublé qu’il y ait des soldats marocains et des tirailleurs sénégalais à nos côtés durant la guerre de 14 ? Spedding a le droit de faire un choix de nationalité ou pas ? Il a le droit d’être français ou ce sont ses origines qui comptent ? » Cela n’empêche pas des grands anciens comme

« Cela a troublé qu’il y ait des soldats marocains et des tirailleurs sénégalais à nos côtés durant la guerre de 14 ? »

Émile N’Tamack de se déclarer non pas « sceptique, [mais] totalement contre ». « Gagner la Coupe du monde avec une équipe constituée de nombreux étrangers naturalisés, je ne sais pas si je pourrais me sentir représenté par ces joueurs-là. » Sportivement, cet apport se justifie par des manques récurrents à certains postes, ceux de buteur ou de pilier droit. Le danger étant parallèlement de menacer la formation des joueurs français. Selon le Secrétaire d’État Jean-Marie Le Guen, c’est « le signe de l’affaiblissement du terreau national. Un système totalement commercial aboutirait à jeu stéréotypé, comme dans le sport américain. » Le député des Pyrénées-Atlantiques Jean Lassalle, dont le fils Thibault est deuxième-ligne à Oyonnax, décèle un mal plus profond qui toucherait non plus le jeu à la française mais la France elle-même : « Nous passons notre temps à nous regarder dans le miroir des États-Unis et de l’Allemagne. Dans le rugby, on se regarde dans le miroir de l’Afrique du Sud et de la Nouvelle-Zélande. On recherche la mondialisation par peur d’être dépassés. » Alors, crise d’identité en vue pour le XV de France ? Le tournoi des VI nations, qui débute le 6 février, apportera un début de réponse. n

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langue Jean-Benoît Nadeau est chroniqueur au quotidien montréalais Le Devoir.

À 25 ans, Xavier Dolan a déjà cinq films au compteur. Son dernier, Mommy, a fait plus d’entrées en France (un million) qu’au Québec (presque 300 000). Une réussite d’autant plus sensationnelle que la langue en est le personnage principal.

Le français de Mommy M Par Jean-Benoît Nadeau

ommy (diminutif affectueux de « maman » en anglais) raconte l’histoire d’une mère monoparentale aux prises avec son ado violent, souffrant de trouble du déficit de l’attention avec hyperactivité. Ces deux personnages, enfermés dans une relation destructrice, s’expriment dans le parler québécois le plus obscur, mêlant les anglicismes improbables et une vulgarité sans nom à la cadence d’une mitraillette et avec une diction à la grenade. Rien d’étonnant à ce que le film soit sous-titré en France : même un Québécois comme moi, qui ne répugne pas au registre populaire, a besoin de soustitres pour discerner les nuances de ce magma verbal. Précisons tout de suite que la langue de Mommy n’est pas le québécois. Xavier Dolan s’inspire d’un registre parlé populaire appelé joual (déformation du mot cheval). Mais c’est

un joual d’artiste, scripté, magnifié, qui sert de support aux émotions brutes. Ce choix langagier de Xavier Dolan fait polémique au Québec, où la langue française s’inscrit au cœur de l’identité commune et affirmée. Mais quelle langue, au fait ? Celle des élites ou celle du peuple ? Cette tension entre l’acceptabilité des deux parlers est source d’une légère schizophrénie collective, mais aussi de créativité. Les expressions col-

Même un Québécois comme moi, qui ne répugne pas au registre populaire, a besoin de sous-titres pour discerner les nuances de ce magma verbal

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lectives ou personnelles de honte quant au parler sont courantes. Mais les créateurs québécois, eux, jouent avec ces niveaux de langue. Parmi les plus brillants, citons le dramaturge Michel Tremblay, auteur de la pièce Les Belles-Sœurs, traduite en une vingtaine de langue. Bousculer les postures sur la langue À l’instar des Belles-Sœurs en 1968, Mommy marquera une date charnière dans l’histoire linguistique du Québec parce qu’il bouscule toutes les positions et les postures assumées sur la langue. Car on ne peut nier ni le succès du film à l’étranger ni le fait que le film marche parce que les personnages s’expriment dans une langue indigente. Xavier Dolan pousse la provocation jusqu’à appuyer sur le métier du personnage de la mère – elle est

traductrice –, magnifiant ainsi son incapacité à s’élever au-dessus de la mêlée langagière. Je crois que ce film fera aussi date dans l’histoire générale du français. J’ai déjà écrit à quel point les Français avaient évolué quant à l’acceptation de l’accent québécois en général. Mais on passe à un autre niveau avec la démarche de Xavier Dolan, plébiscité par un million de Français, qui acceptent l’idée que le parler des personnages soit d’une inintelligibilité assumée. Le succès français de Mommy est-il lié au fait que le réalisateur s’est totalement affranchi de la norme linguistique des écoles ? Si c’est le cas, comme je le crois, cela atteste assurément un changement important. Et c’est le propre des grands artistes, comme Xavier Dolan, de sentir le vent. n

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savoir-faire

Dans les salles de cours de l’Institut français de Tokyo (Japon).

Des ateliers pour s’autoévaluer À L’autonomie des apprenants ne se décrète pas, elle se construit en collaboration. Grâce à des ateliers mis en place à l’Institut français de Tokyo, étudiants et enseignants produisent ensemble des outils d’autoévaluation et d’autonomisation.

Christian Pelissero est enseignant à l’Institut français de Tokyo et doctorant à l’université du Maine.

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Par Christian Pelissero

l’Institut Français du Japon de Tokyo, des cours nommés « Ateliers de français » sont nés d’un fort intérêt pour les relations de co-construction entre l’autonomisation des apprentissages et l’autoévaluation. Ils ont quatre fondements didactiques. D’abord, leur intitulé, est emprunté à N. A. Tremblay qui définit le concept d’atelier de cette manière : « Réunion d’un petit nombre de personnes en vue de réaliser un objectif bien délimité et accepté par chacun […] et de favoriser le développement de l’autonomie et de l’esprit d’initiative. Le contenu même du cours doit se prêter au travail en atelier, les apprenants doivent également se rejoindre au niveau de

leurs intérêts et de leurs besoins. » En deuxième lieu, les recherches de G. Scallon qui montre que pour qu’il y ait une véritable autoévaluation, il faut plus qu’une simple liste de critères à cocher donnée par l’enseignant ou le manuel car, dans ce cas, on parle plutôt d’autocorrection ou d’autobilan. Ensuite, la notion d’« apostrophe évaluative » empruntée à A. Jorro et qui désigne le questionnement des savoirs à acquérir (Comment ? Pourquoi ?) et des tâches à réaliser (Quelles sont leurs particularités ? Comment les décrire ? Quelles sont

Être autonome, c’est l’être grâce aux autres et c’est là toute la particularité des ateliers, centrés avant tout sur le travail de groupe

les étapes qui mènent à leur réalisation ?). Cette apostrophe évaluative est menée en classe par l’enseignant qui pour entamer la réflexion pose aux apprenants une question telle que : « Savez-vous ce qu’est un résumé de texte ? » Autonome grâce aux autres C’est aussi par le questionnement des qualités de la production à réaliser que se définissent les critères de réussite. Ces critères sont proposés, justifiés et acceptés par l’ensemble de la classe, enseignant compris. Cette réflexion est importante dans la mesure où elle constitue un véritable moment d’autonomie. En effet, comme le rappelle son étymologie, « autonomie » désigne la capacité d’une personne à se donner des règles, à faire siennes celles produites par le plus grand nombre

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La production finale est évaluée par les apprenants qui jugent de leur réussite ou encore le simple fait de recevoir d’une autorité la possibilité de gérer certains aspects de son existence. Battant ainsi en brèche toutes les conceptions de l’autonomie comme démarche d’apprentissage solitaire. Être autonome, c’est l’être grâce aux autres et c’est là toute la particularité des ateliers, centrés avant tout sur le travail de groupe. Le dernier fondement est celui de l’autorégulation qui désigne la capacité d’un apprenant à modifier son action afin qu’elle corresponde mieux aux critères retenus pour la tâche. Il existe plusieurs façons de procéder : les apprenants demandent l’avis de l’enseignant sur l’étape en cours ou comparent les résultats de leur étape avec un autre groupe. Il s’ensuit non seulement un apprentissage vicariant(1), très important au Japon, mais une possible coévaluation des résultats des étapes. Aider pour débloquer Concrètement, les contenus du premier cours sont choisis par l’enBibliographie Anne Jorro, L’Enseignant et l’évaluation. Des gestes évaluatifs en question, De Boeck, 2006. n Maria Palmira Alves, « Les Tensions entre l’hétéro-évaluation et l’autoévaluation, l’autonomie et l’hétéronomie : des points aveugles dans l’évaluation des dispositifs », in Actes du congrès de l’Actualité de la recherche en éducation et en formation (AREF), Université de Genève, 2010. n Gérard Scallon, L’Évaluation des apprentissages dans une approche par compétences, De Boeck, 2007. n Nicole Anne Tremblay, L’Autoformation. Pour apprendre autrement, Les Presses de l’Université de Montréal, 2003. n Lev Vygotski, Mind in Society. The Development of Higher Psychological Processes, Harvard University Press, 1978 n

seignant puis, avant une nouvelle session, ils sont proposés par les apprenants au moyen d’une enquête qui pose une simple question du type : « Que désirez-vous étudier le trimestre prochain ? » Les résultats sont collectés et les besoins les plus récurrents retenus. Les besoins ne correspondant pas au niveau des apprenants sont écartés. À partir de ce corpus, l’enseignant élabore des pratiques à réaliser en groupe : compréhension d’un texte, compréhension d’un document vidéo, résumé, présentation orale, etc. Dans le cas d’une compréhension de texte par exemple, les apprenants doivent répondre en groupe à des questions créées par l’enseignant ou élaborer eux-mêmes des questions qu’ils poseront aux autres groupes. Dans le cas d’un résumé, les séances commencent comme précisé plus haut par une question visant à savoir si les apprenants connaissent déjà cet exercice. Cette étape est suivie par une phase de découverte et de comparaison entre un résumé et son texte d’origine. À partir de cette comparaison, des critères de qualité sont produits par les apprenants et l’enseignant afin de décrire au mieux ce que doit être un résumé (voir ci-contre). Finalement, s’engage une réflexion sur les stratégies et les étapes qui mènent à sa réalisation. Durant les phases de réalisation, les apprenants, toujours en groupe, ont la possibilité de se référer à ces stratégies utiles et aux critères finaux décrivant la production idéale attendue, tout en demandant l’avis de leur enseignant. Celui-ci le donne, valide les étapes ou bien aide les groupes. Cette aide a pour finalité de débloquer une situation qui freine la réalisation de la tâche. Son but n’est pas de faire à la place de l’apprenant mais de faire avec l’apprenant, et se situe dans la Zone de proche développement décrite par L. Vygotski comme une période où un individu ne peut accomplir une tâche sans l’aide d’un autre plus expérimenté. Cette période peut être limitée dans le temps.

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Faire un résumé

Liste des critères décidés en Atelier de français pour composer un résumé satisfaisant :

La technique

Il faut comprendre le texte avant de faire le résumé. Un résumé est plus court que le texte d’origine (d’environ un tiers). Il n’y a pas de phrases copiées du texte d’origine. Il n’y a que les informations essentielles du texte d’origine. Les informations essentielles du texte ont été « contractées » (réduites). Les informations essentielles contractées sont reliées entre elles de manière cohérente. Les informations contractées du résumé ont le même sens que les informations essentielles du texte. Il y a quelques mots du texte mais ces mots expriment le thème du texte.

Généralités

« Comprendre », ça veut dire : comprendre les mots du texte ; repérer le plan du texte ; connaître les relations logiques entre les informations du texte. Le résumé contient des paragraphes. Il faut relire son résumé et chercher les fautes de grammaire et d’orthographe. Il faut faire relire le résumé par une autre personne pour savoir s’il comprend le résumé sans avoir lu le texte. Le résumé est plus simple à comprendre que le texte d’origine. n

L’autre comme un miroir La production finale est évaluée par les apprenants qui jugent de leur réussite. Elle est ensuite soumise à l’enseignant car, comme le précise M. Palmira Alves, on a besoin de l’autre comme un miroir dans lequel se regarder et par là même mieux s’évaluer. Cette évaluation débouche sur une remédiation qui fait aussi l’objet d’une discussion avec le groupe-classe ou quelques apprenants, ce qui permet de constituer des sous-groupes, appelés « groupe d’intérêts », travaillant sur un aspect particulier de la tâche alors que les autres avancent dans sa réalisation. Les résultats de ces processus de remédiation sont alors à nouveau évalués et décision est prise de poursuivre la tâche ou d’entamer une

autre remédiation. Au terme de cette pratique, on se rend compte que plus les apprenants auront appris à exprimer des critères, à se poser des questions sur leur apprentissage (en tant que finalité ou processus), à autoévaluer leurs stratégies, leurs compétences et leurs savoirs, plus ils auront développés une autonomisation qu’ils réinvestissent dans la capacité à s’autoévaluer. Ce processus est aussi une marque d’autonomie, puisqu’un dispositif autonome est un dispositif autopoïétique, c’està-dire qui produit les moyens de sa propre réalisation. n 1. Ce que l’étudiant peut apprendre en marge du discours de l’enseignant proprement dit : en regardant faire et en écoutant ceux qui savent faire ou encore, par extension, en analysant la production de ceux qui savent faire.

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entretien

Prendre en compte la langue maternelle des apprenants de français : tel est le principe de base des grammaires contrastives. Retour sur les mécanismes et la pertinence de ces pratiques grammaticales avec Jean-Claude Beacco, responsable de la collection « Grammaires contrastives ».

« Des grammaires

sur mesure valorisant

l’expertise des professeurs » Propos recueillis par Sébastien Langevin

Jean-Claude Beacco est professeur émérite de linguistique et de didactique des langues et des cultures, à l’université Sorbonne Nouvelle – Paris III, membre du GRAC (Grammaire et contextualisation) et du DILTEC EA 2288. Il est également expert pour le Conseil de l’Europe (Unité des politiques linguistiques) depuis 1998.

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Pouvez-vous reprendre en quelques mots le fonctionnement de l’approche contrastive dans l’enseignement des langues ? Jean-Claude Beacco : On ne peut pas vraiment parler d’approche contrastive. En fait, les enseignants mettent en place « spontanément » des activités isolées qui rapprochent la langue cible de la langue première des apprenants. Celles-ci sont de nature variée ; on les nomme constrastives, mais elles portent sur les différences ou les ressemblances entre les deux systèmes linguistiques. Ces descriptions parallèles visent à faire prendre conscience aux apprenants des fonctionnements différents des

systèmes linguistiques. Cette préoccupation semble aller de soi, mais elle est rarement reconnue ou encouragée. Ces activités concernent des faits de langue dont les enseignants savent, par expérience, qu’ils sont sources d’erreurs récurrentes, comme l’emploi de à devant les compléments d’objet directs animés (*j’aime à mes amis) pour des hispanophones, ou, pour des italophones, celui de c’est et il y a. D’où l’idée de rechercher des traces de telles activités de classe dans des inventaires de fautes fréquentes disponibles ou dans les grammaires rédigées par des collègues étrangers. C’est là le projet du groupe de recherche Grammaires et contextualisation (GRAC). D’où aussi l’idée d’élaborer des grammaires sur mesure, langue par

langue (et rédigées dans la langue des apprenants) qui récupèrent et valorisent cette expertise des professeurs comme les grammaires en cours de publication chez CLE International. Comparer les langues pour les apprendre : quels sont les fondements théoriques de cette méthode qui semble empirique et intuitive ? J.-C. B. : La comparaison entre des faits de langues ne suffit pas par ellemême à apprendre : ce qui facilite l’acquisition est l’intériorisation par l’emploi. Mais celle-ci doit en passer par la « dénativisation » car l’appréhension d’une langue inconnue s’effectue à travers les catégories de langue première (processus de « nativisation »). Il faut donc faire accé-

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Descriptions des niveaux de référence du CECR par langue (dits DNR) à savoir, pour le français, avec les contenus grammaticaux des Niveaux pour le français A1, A2, B1… Ce qui ne pose que des problèmes techniques de répartition et de progressivité. L’intercompréhension entre les langues romanes, chère à Claire Blanche-Benveniste, participe-telle des mêmes logiques que les grammaires contrastives ? J.-C. B. : Sinon la même logique, du moins les mêmes principes qui consistent à tirer profit des ressources linguistiques et de solliciter les capacités réflexives des apprenants, d’un côté pour la compréhension de textes et de l’autre pour la prise de conscience des fonctionnements internes de langue cible.

La grammaire contrastive lusophone.

« Ces descriptions parallèles servent à faire prendre conscience aux apprenants des fonctionnements différents des systèmes linguistiques » La grammaire contrastive hispanophone.

der les apprenants aux catégories de langue cible par des activités de réflexion métalinguistique, comme les exercices de conceptualisation de H. Besse. Cela peut aussi s’effectuer par le biais de descriptions du français élaborées en fonction de la langue première, comme par exemple présenter le complément d’objet en à comme étant le cas datif pour les langues à cas. D’autres activités contrastives des enseignants, moins radicales, traitent ensemble de faits de langue présentés traditionnellement de manière séparée (comme par et pour) où elles sont amenées à préciser des emplois (par exemple c’est et il est) qui ne font pas problème pour des natifs et ne sont donc pas décrits précisément dans les grammaires du français pour francophones.

Cette approche ne s’oppose-t-elle pas à la méthode directe, encore largement utilisée dans les faits, dans l’enseignement du français langue étrangère ? J.-C. B. : Je ne vois pas très clairement ce que vous entendez par « méthode directe ». Ce que je crois savoir est que les activités grammaticales sont encore dominantes dans l’enseignement du français. Je suis persuadé qu’elles peuvent gagner en efficacité au niveau de la qualité du discours grammatical : celui-ci peut être rendu plus abordable par les apprenants au moyen de ces rapprochements contrastifs, auxquels certains enseignants ont recours mais que d’autres s’interdisent, comme c’est majoritairement le cas au Japon par exemple. Il importe d’analyser ces pratiques de mise en relation

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explicite des descriptions des deux langues et d’en évaluer la pertinence de manière à les légitimer, les faisant passer du statut de « bricolage » empirique à celui de pratiques grammaticales contextualisées. De quelle manière peuvent concrètement s’articuler une grammaire contrastive et le CECR ? J.-C. B. : Le CECR souligne l’importance pour la compétence grammaticale de la contrastivité (CECR 6.4.7.5 et 6, p. 116). La question de l’articulation ne se pose donc pas à ce niveau. Comme le CECR ne concerne aucune langue en particulier, les activités contrastives sont à mettre en place en relation avec les contenus grammaticaux spécifiés langue par langue par les

Pour l’instant, dans votre collection de grammaires contrastives, seules existent des ouvrages à destination d’apprenants locuteurs de langues romanes (espagnol, italien, portugais). Peut-on imaginer des grammaires contrastives pour des langues beaucoup plus éloignées du français, comme l’arabe ou le mandarin ? J.-C. B. : Deux ouvrages sont en préparation pour l’anglais et l’allemand. Mais la réalisation de grammaires contrastives de ce type ne dépend pas de la distance entre les langues, d’autant que plus les systèmes linguistiques sont distants, plus leurs différences sont apparentes et donc offrent plus facilement matière à activités contrastives. Elle est en fait relative à l’existence, à la quantité et à la qualité des pratiques contrastives effectives qui sont accessibles pour que l’on puisse s’en servir comme de matériau de base pour de tels ouvrages. Et, pour la petite histoire, ce projet est en partie né des pratiques d’un enseignant chinois de français, racontées par Henri Besse, qui s’est rendu compte que les classifieurs du chinois avaient des équivalents dans nos banc de poisson, gerbe de fleurs ou essaim d’abeilles. n

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à ecouter en bref Jean Guidoni revisite l’œuvre d’Allain Leprest, l’un des plus grands auteurs de chansons de notre époque, disparu en août 2011. L’album Paris-Milan contient une vingtaine de titres, et plus de la moitié inédits. Les musiques sont signées Romain Didier, un fidèle de Leprest. Sa voix et son sourire sont familiers aux français depuis des décennies: l’éternel jeune homme qu’est Julien Clerc (67 ans) a sorti début novembre son 23e album studio intitulé Partout la musique vient. Il y chante sur des rythmes plus dansants que d’habitude la séparation, la mélancolie et le temps qui passe.

Invitation à couler une Yelle Complètement fou, le troisième disque de Yelle – de son vrai nom Julie Budet, jeune femme brune et élancée née en Bretagne il y a 31 ans – a été produit par Dr Luke, qui a œuvré notamment avec les Américaines Pink et Katy Perry. Un opus gentiment déjanté qui démontre que l’on peut faire danser le plus naturellement du monde notre belle langue française sur des rythmes technos. Saluons l’artiste, qui a en effet choisi – ce qui est plutôt rare aujourd’hui

Dans Le Petit Bal perdu, le plus manouche des chanteurs français, Sanseverino, reprend des chansons des années 30 aux années 60 (Vian, Mireille, Montand, Trenet, etc.) en les arrangeant à sa manière. Le patrimoine de la chanson française prend ici un coup de swing inattendu. C’est une bonne nouvelle assez inattendue pour les fans, les albums se suivent à un rythme soutenu pour le groupe rock français Shaka Ponk. Après avoir écumé les festivals pendant des mois, le voici déjà de retour avec un nouvel opus, The Black Pixel Ape, sorti moins de huit mois après le précédent.

Détroit est le nouveau groupe de Bertrand Cantat (ex-Noir Désir) et Pascal Humbert (ex-Passion Fodder). Après leur premier album, Horizons (2013) sort En concert à La Cigale, emmené par le magique « Creux de ta main », le bouleversant « Droit dans le soleil » et de nombreuses réécritures, bienvenues, de Noir Désir. Le quintette Fauve nous a transportés, début 2013, avec le très cru « Nuits Fauves » : rock fébrile et textes parlés chantés bruts, introspectifs. Même atmosphère avec son premier album, Vieux Frères – Partie 1, et son « Voyous » hyperréaliste qui tourne sur le Trio pour piano et cordes n° 2 de Schubert.

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© DR

C’est l’un des meilleurs guitaristes de blues de l’hexagone : Paul Personne est de retour à 64 ans avec Puzzle 14. L’album s’inscrit dans la continuité de l’artiste : chaque composition est prétexte à quelques riffs bien sentis et à des solos inspirés qui enchanteront les aficionados.

chez les artistes hexagonaux – de s’exprimer en français. Découverte sur Internet en 2005, Yelle s’impose désormais parmi les chanteurs français les plus connus à l’étranger. Sa musique électro pop s’exporte aux quatre coins du monde, tout particulièrement dans les pays anglo-saxons. Aux États-Unis, elle vient ainsi d’effectuer sa cinquième tournée avec 24 dates, pour la plupart à guichets fermés ! n E. S.

Chanter à pleines dents ! Cela fait aujourd’hui plus de 25 ans que « Chanson Plus Bifluorée » écume les scènes de France avec ses sketches burlesques et sa bonne humeur contagieuse. Ce groupe vocal étonnant propose une mise en scène où chaque chanson est une saynète qui parvient à générer une véritable interactivité avec le public. Leur dernier cédé, Le Grand Casting, est issu du spectacle du même nom qu’ils ont présenté notamment pendant deux mois, fin 2014, dans la

prestigieuse salle de l’Alhambra à Paris. Un spectacle qui s’inscrit dans la grande tradition du music-hall, où artistes et groupes se succèdent devant un jury pour tenter de décrocher le contrat qui leur ouvrira les portes du showbiz. Les trois compères y jouent à la fois le jury et les candidats, nous dévoilant une galerie d’artistes plus délirants les uns que les autres à travers de nouvelles chansons, parodies et sketches, que l’on retrouve sur l’album. n E. S.

Le français dans le monde // n° 397 // janvier-février 2015


Par Jean-Claude Demari et Edmond Sadaka

Coups de cœur

In French in the text

Livres à écouter Par Sophie Patois Élu « Prix Audiolib 2014 », L’Extraordinaire Voyage du fakir qui était resté coincé dans une armoire Ikea (par un jury de lecteurs, blogueurs et internautes) est le premier roman (publié) de Romain Puertolas. Une aventure comique et loufoque d’un faux-vrai fakir qui voyage à travers l’Europe dans une armoire de la célèbre marque suédoise qui a séduit les éditions Dilettante et a valu à son auteur la reconnaissance et le succès public. Lue par Dominique Pinon, un des acteurs fétiche de Jean-Pierre Jeunet (Le Fabubeux Destin d’Amélie Poulain), cette fiction contemporaine aborde avec humour et humanité le thème des clandestins que l’auteur connaît bien en tant que lieutenant de police analyste à la police des frontières ! C’est ce qu’il explique dans l’interview « bonus » de cet audiolib des plus plaisants. Dans un registre beaucoup plus grave mais tout aussi « hors normes », sans pesanteur aucune, la lecture que fait Marilys de Ke-

Trop de chanteurs rock français ont choisi l’anglais. Mais des artistes anglophones ont eux opté, le temps d’une phrase ou d’un album, pour le français. « Michelle, ma belle, sont des mots qui vont très bien ensemble… » Dès 1965, les Beatles font un clin d’œil au français à travers l’un de leurs titres les plus repris, entre autres par Ben Harper. Le refrain aurait été écrit par une professeure de français, Jane Vaughan… rangal de son roman Réparer les vivants, largement salué par la critique (Roman des étudiants France-Culture Télérama notamment), traduit tout simplement la justesse et le rythme de ce texte qui se lit et s’entend comme une véritable épopée d’une transplantation cardiaque. Un roman qui touche au cœur et palpite réellement ! n Réparer les vivants de Marilys de Kerangal, Écoutez lire Gallimard L’Extraordinaire Voyage du fakir qui était resté coincé dans une armoire Ikea de Romain Puertolas, Audiolib

Et comment ne pas citer « The Partisan » de Leonard Cohen, qui reprend les paroles de « La Complainte du partisan » écrites à Londres en 1943 par Emmanuel d’Astier de La Vigerie ?

aller sur

www.fdlm.org pour retrouver toutes les références des albums

Bertignac, boss de la Gibson Louis Bertignac naît le 23 février 1954 à Oran. En 1971, il rencontre à Paris Corinne Marienneau, Richard Kolinka et Jean-Louis Aubert, ses futurs acolytes de Téléphone. Mais sa route passe d’abord chez Jacques Higelin, pour une tournée et l’album Irradié. De 1976 à 1986, ce sera la saga Téléphone. On résume : deux ans chez Higelin, dix chez Téléphone. Le reste en solitaire : Bertignac vient ainsi de sortir son treizième album, Suis-moi. Et ça déménage. La connexion Bertignac-Téléphone-Rolling Stones est présente sur de nombreux titres (« Suis-moi », « Mes icônes » et « Embrasse-moi »), où l’art de la guitare électrique se fait pleinement sentir. Amusant rock rétro, « Minilou » montre clairement aux BB Brunes qui est le boss… Vibrants moments : « Bientôt les clones » et « Confidences de ma Junior », en hommage à sa guitare Gibson Les Paul. Bertignac arbore aujourd’hui cheveux et barbe poivre et sel. Mais Eric Clapton et quelques autres nous le prouvent : la guitare conserve sacrément bien. Cet album aussi. n J.-C. D.

Le français dans le monde // n° 397 // janvier-février 2015

En 1970, c’est l’Américaine Melanie qui chante en français tout un couplet de son célèbre « What Have They Done to My Song, Ma ? » En 2000, nos deux francophones préférés, Arno et Stephan Eicher, en enregistreront une reprise bilingue. En 1981, le groupe Blondie consacre à la langue de Molière plusieurs couplets de « Sunday Girl » : « Dépêche-toi, dépêche-toi et attends… ». Une récidive après « Denis » (1978) et même « Call Me » (1980). En 81 toujours, les baroques britanniques de l’Electric Light Orchestra chantent en français un couplet de « Hold on Tight », à l’inoubliable clip second degré : « Accroche-toi à ton rêve / Quand tu vois ton bateau partir… » Pas du Baudelaire, mais une louable volonté linguistique… Francophile et francophone, le Britanno-américain Brian Molko de Placebo a marqué les esprits avec, en 2004, le petit bijou « Protège-moi », version française du mémorable « Protect Me From What I Want ». Autre groupe mythique, les Talking Heads. En 1977, « Psycho Killer » comporte un long passage en français : « Ce que j’ai fait ce soir-là / Ce qu’elle a dit ce soir-là… » Mots reflétant les pensées d’un tueur en série, mais bon… L’ultime degré du bilinguisme pop est atteint par l’Anglo-Libanais Mika, qui livre en 2012 quatre titres en français, dont le potache « Elle me dit », au clip inoubliable avec Fanny Ardant.

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REVUE DE LA FÉDÉRATION INTERNATIONALE DES PROFESSEURS DE FRANÇAIS

le français dans le monde

// MÉMO // N° 397 janvier-février 2015

Des Français animent Charlie Brown et Snoopy Kamel Daoud livre une réplique algérienne de L’Étranger

3 // DOSSIER //

janvier-février 2015

DOSSIER : Comparer les langues pour mieux les comprendre

Comparer les langues pour mieux les apprendre

FIPF

N° 397 -

9 782090 370904

Les dialogues de Mommy créent la polémique au Québec // MÉTIER //

15 €

ISSN 0015-9395 978 2 090 37090-4

// ÉPOQUE //

En Turquie, la classe à l’heure du cartable numérique

Être prof de français au Nordeste brésilien

Tokyo : enseigner l’autonomie


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