Le français dans le monde 406

Page 1

REVUE DE LA FÉDÉRATION INTERNATIONALE DES PROFESSEURS DE FRANÇAIS

N°406 juillet-août 2016

3 // ÉPOQUE //

Mahmoud Chokrollahi l’Iranien et Laura Alcoba l’Argentine : écrire en français Liège, cité ardente de Belgique

// DOSSIER //

COURS EN LIGNE FIPF

PRATIQUES D’ENSEIGNANTS, PARCOURS D’APPRENANTS // MÉMO //

// MÉTIER //

Les éclats de rire ivoiriens de l’humoriste Mamane

Le français dans les universités en Chine

Être prof de français à Kaboul



ABONNEMENT INTÉGRAL

ACHAT AU NUMÉRO

OFFRE DÉCOUVERTE

1 an : 49,00 € HT

9,90 € HT/numéro

6 mois : 26 € HT

Offre abonnement 100 % numérique à découvrir sur www.fdlm.org

POUR VOUS ABONNER :

Avec cette formule, vous pouvez : Consulter et télécharger tous les deux mois la revue en format numérique, sur ordinateur ou sur tablette. Accéder aux fiches pédagogiques et documents audio à partir de ces exemplaires numériques. Il suffit de créer un compte sur le site de Zinio : www.zinio.com ou bien de télécharger l’application Zinio sur votre tablette. L’abonnement 100% numérique vous donne accès à un PDF interactif qui vous permet de télécharger directement le matériel pédagogique (fiches pédagogiques et documents audio). Vous n’avez donc pas besoin de créer de compte sur notre site pour accéder aux ressources. Les « plus » de l’édition 100 % numérique ■ Le confort de lecture des tablettes ■ Un accès direct aux enrichissements ■ Un abonnement « découverte » de 6 mois ■ La possibilité d’acheter les numéros à l’unité ■ La certitude de recevoir votre revue en temps et heure, où que vous soyez dans le monde.

ABONNEMENT PAPIER + NUMÉRIQUE POUR LES PARTICULIERS JE CHOISIS ■

JE M’ABONNE

Abonnement DÉCOUVERTE

ABONNEMENT 1 AN

6 MAGAZINES PAPIER DU FRANÇAIS DANS LE MONDE + 3 MAGAZINES DE FRANCOPHONIES DU SUD + ACCÈS À L’ESPACE ABONNÉ EN LIGNE*

88€

ABONNEMENT 2 ANS

12 MAGAZINES PAPIER DU FRANÇAIS DANS LE MONDE + 6 MAGAZINES DE FRANCOPHONIES DU SUD + ACCÈS À L’ESPACE ABONNÉ EN LIGNE*

158€

Abonnement FORMATION ABONNEMENT 1 AN

6 MAGAZINES PAPIER DU FRANÇAIS DANS LE MONDE + 3 MAGAZINES DE FRANCOPHONIES DU SUD + 2 NUMÉROS DE RECHERCHES ET APPLICATIONS + ACCÈS À L’ESPACE ABONNÉ EN LIGNE*

105€

ABONNEMENT 2 ANS

6 MAGAZINES PAPIER DU FRANÇAIS DANS LE MONDE + 3 MAGAZINES DE FRANCOPHONIES DU SUD + 4 NUMÉROS DE RECHERCHES ET APPLICATIONS + ACCÈS À L’ESPACE ABONNÉ EN LIGNE*

189€

JE RÈGLE ET J’ENVOIE :

LE FRANÇAIS DANS LE MONDE 9 BIS, RUE ABEL HOVELACQUE 75013 - PARIS

NOM : ................................................................................................................................ ..............................................................................................................................................

JE RÈGLE

CHÈQUE BANCAIRE À L’ORDRE DE SEJER :

VIREMENT BANCAIRE AU NOM DE SEJER : Préciser les noms et adresse de l’abonné ainsi que le numéro de facture si vous l’avez. Joindre la copie du virement.

CRÉDIT LYONNAIS 30002 - 00797 - 0000401153D CLÉ 08 IBAN FR36 3000 2007 9700 0040 1153 D08 BIC/SWIFT : CRLYFRPP

PRÉNOM : ...................................................................................................................... ADRESSE : ..................................................................................................................... .............................................................................................................................................. .............................................................................................................................................. ..............................................................................................................................................

CARTE BANCAIRE (VISA, EUROCARD-MASTERCARD)

Numéro de carte

CODE POSTAL : ........................................................................................................ VILLE : ............................................................................................................................

Date de validité

PAYS : .............................................................................................................................. TÉL. : ................................................................................................................................ COURRIEL : ...................................................................................................................

* L’espace abonné en ligne vous permet de télécharger : magazines, fiches pédagogiques et transcriptions des doc audio (en PDF) + documents audio (en MP3) + les bonus. Pour tout renseignement : contacter abonnement@fdlm.org / + 33 1 72 36 30 67 Les frais d’envoi sont inclus dans tous les tarifs (France et étranger).

Signature

POUR LES INSTITUTIONS

Contactez abonnement@fdlm.org ou + 33 (1) 72 36 30 67 ou aller sur le site www.fdlm.org


numéro 406

Abonné(e) à la version papier Créez en quatre clics votre espace en ligne sur www.fdlm.org pour accéder aux suppléments pédagogiques

Pour profiter de fiches pédagogiques, des documents sonores et de leur transcription ainsi que des suppléments en ligne, ne perdez pas une minute pour créer votre Espace abonné sur le site du Français dans le monde. Suppléments en ligne et PDF des deux derniers numéros ■ L’espace « Suppléments en ligne » offre des prolongements aux articles parus dans la revue : l’accès aux clips des artistes présentés dans la rubrique « À écouter » et aux bandes-annonces des films de la rubrique « À voir », des informa-

tions complémentaires aux articles parus dans la revue, des prolongements pédagogiques au dossier… Téléchargez le PDF complet des derniers numéros de la revue. Fiches pédagogiques ■ Les fiches pédagogiques en téléchargement : des démarches d’exploitation d’articles parus dans Le français dans le monde et produits en partenariat avec l’Alliance française de Paris - Île-de-France. Dans les pages de la revue, le pictogramme « Fiche pédagogique à télécharger » permet de repérer les articles exploités dans une fiche.

28

FLE EN FRANCE

UNE PRIORITÉ : L’INTÉGRATION ÉPOQUE

08. Portrait

Mahmoud Chokrollahi, la Perse en français

09. Portrait

Laura Alcoba, une histoire franco-argentine

10. Région

Liège, passion ardente de la Wallonie

12. Tendance

Garçon, un coffice s’il vous plaît !

13. Sport

« Je suis le porte-drapeau de la francophonie »

14. Idées

Abonné(e) à la version numérique Tous les suppléments pédagogiques sont directement accessibles à partir de votre édition numérique de la revue : n

liquez sur le picto « fiche C pédagogique » sur les pages lors de la lecture pour télécharger la fiche d’exploitation de l’article en question.

n Rendez-vous directement sur les

pages « À écouter » et « À voir » : cliquez sur le nom des artistes ou des œuvres pour visionner les vidéos ou les bandes annonces des films.

n Cliquez sur les

liens ci-dessous pour télécharger les reportages audio et leur transcription.

« La géopolitique envahit nos imaginaires »

16. Langue

« Enseigner la logique de l’orthographe »

18. Métiers des langues

Interprète en langue des signes

19. Mot à mot

Dites-moi Professeur

MÉTIER

22. Réseaux 24. Vie de profs

Professeur de français à Kaboul : plus qu’un métier

DANS VOTRE ESPACE ABONNÉ SUR FDLM.ORG LES REPORTAGES AUDIO - Micro-trottoir : « étonnant » -A griculture : le Salon de l’agriculture et la colère des agriculteurs -P atrimoine : Monumenta 2016 et l’installation de Huang Yong Ping -S ciences : Comment naissent les étoiles ?

02

26. Savoir-faire

Enseigner une grammaire de l’oral aux débutants DES FICHES PÉDAGOGIQUES POUR EXPLOITER LES ARTICLES -R égion : Liège, passion ardente de la Wallonie - BD : Quand c’est pas le jour -M némo : L’incroyable histoire de l’impératif

28. FLE en France

Une priorité : l’intégration

30. Manières de classe

Participer à un débat d’idées

32. Zoom

Chine : apprendre et enseigner autrement Le français dans le monde | n° 406 | juillet-août 2016


Le français dans le monde sur Internet : http://www.fdlm.org

MÉMO

34. Initiative 36. Tribune

60. À écouter 62. À lire 66. À voir

38. Que dire, que faire ?

INTERLUDES

« Ne pas décevoir les amoureux du français » Le FOU, passerelle pour l’université Comment faire pratiquer le français en dehors des cours ?

06. Graphe

40. Focus

20. Poésie

42. Innovation

46. En scène !

44. Ressources

56. BD

René Depestre : « Adieu à la révolution »

À l’heure de l’hybride

Bon appétit !

Les Nœils : Quand c’est pas le jour

48

DOSSIER

COURS EN LIGNE : PRATIQUES D’ENSEIGNANTS, PARCOURS D’APPRENANTS « Les technologies pour varier les approches pédagogiques ».............................. 50 La vogue des cours en ligne dans le Réseau......................................................... 52 Les nouveaux rôles de l’enseignant de langues................................................... 54 « Enseigner à des étudiants de différents continents »......................................... 56

OUTILS

OUTiLS | fiche

par paOLa berTOcchini eT edvige cOSTanzO (italie)

fiche acTiviTéS

expLOiTaTiOn deS pageS 30-31

parTiciper à Un débaT d’idéeS Un débat d’idées est une discussion sur un sujet donné qui a lieu entre des personnes ayant des opinions différentes. Les activités qui suivent se proposent de donner à l’enseignant des suggestions utiles pour préparer un débat avec ses apprenants afin de les aider à jouer le jeu et les encourager à prendre la parole !

69. Mnémo

L’incroyable histoire de l’impératif Spécial congrès de Liège

hybride (présentiel / à distance, en salle de classe / forums de discussion)

ACtiVité 4

Avant le débat. Chaque participant devra, avant le débat, organiser ses idées et préparer un plan d’intervention. Préparez un exemple de plan.

Une SéqUence hybride aUTOUr d’afficheS de fiLm

La gestuelle. La prise de parole en public peut comporter, pour certains apprenants, des problèmes auxquels l’enseignant est appelé à faire face. Préparez deux fiches conseils : a) pour aider les apprenants à lutter contre le trac b) pour leur apprendre àavec accrocher les auditeurs par leadolescents regard, la voix, les gestes. qui disposent de multiples outils de Lorsqu’on travaille quotidiennement des publics de grands et d’adultes, communication personnels à usage privé, professionnel ou de formation, la modalité de travail hybride permet d’exploiter au maximum laACtiVité relation 6 pédagogique entre l’enseignant et les apprenants. Elle offre également l’avantage de démultiplier les temps d’apprentissage ces derniers, d’augmenter leurpour disponibilité pour les interactions de toute nature. L’espace.de Soigner la disposition de la sallesensiblement de classe comme un véritable débat. Pour permettreQuelle aux apprenants réaliser l’activité à?distance, l’enseignant devra au préalable avoir créé deux forums d’interdisposition de spatiale proposez-vous vention et avoir donné pour consigne de s’y rendre successivement. Le rôle de l’enseignant est à la fois d’animer et de modérer les forums pour veiller à la participation active de tous les apprenants. Il est aussi celui d’un tuteur qui encourage, accompagne ACtiVité la 7 réalisation des tâches à distance. et suit régulièrement Le débat a lieu. Le président introduit brièvement la réunion en rappelant le sujet et l’objectif du débat. Puis il donne la parole aux intervenants qui exposent leur point de vue (5 minutes chacun). Il lance ensuite le débat invitant les participants à prendre la parole. Le tout ne dépassera pas les 30 minutes. De temps en temps le président peut résumer ce qui a été dit pour relancer le débat. séancEpeut-il 1 (Enfaire PrésEntIEL) a) Quel autre type d’intervention le président pour relancer le débat ? mise en route Le Secrétaire, à son tour, note l’essentiel de la discussion. Mais la prise de? notes ne va ?pas de soi.au Préparez mémento pour vos apprenants. Les affiches de b) films : Pourquoi comment Projeter tableauune les fiche affiches des films ci-dessous. À la fin du débat le président tire les conclusions pour clore le débat.

Les doubles pronoms

Une séquence hybride autour d’affiches de film

75. Fiche pédagogique

Disparue, une série française

ACtiVité 8

Après le débat. Vous allez construire une grille d’observation qui vous permette, ainsi qu’à des apprenants que vous aurez choisis comme observateurs, d’évaluer la capacité des apprenants à participer à un débat d’idées.

77

Le français dans le monde | n° 406 | juillet-août 2016

71. Test

73. Fiche pédagogique

ObjecTifs de cOmmuNicaTiON ACtiVité 3 cOmpéTeNces visées n Exprimer son avis à l’écrit et à l’oralindispensable à partir de documents écrits,de iconographiques Préalable à la prise parole : tout débat demande deplateforme la part des participants une bonne capacité d’écoute et le respect n Interagir sur une ou un forum de discussion et audiovisuels mutuel. Le groupe classe doit donc être habitué à organiser débats. contenues dans des documents sonores et visuels n Repérerdes les informations n Réagir et interagir dans des contextes et deàcommunication Préparez une d’apprentissage fiche à distribuer vos apprenants pour n qu’ils révisent les collaborative, mécanismes de la prise de parole et de l’argumentation. Travailler de façon enlinguistiques groupe, en interaction

ACtiVité 5

70. Quiz

OUTiLS | fiche

ACtiVité 1

Préparer la documentation. Pour se débat tous les apprenants auront à leur disposition, une semaine avant le Jour J, un dospar WaLmir mike rOdrigUeS nObrega (alliance française de préparer São paulo,au brésil) sier multimédia contenant une série de documents sur le thème en question. Chacun en analysera au moins trois, mais il est libre aussi d’autres documents, expLOiTaTiOn dUd’apporter dOSSier deS pageS 48 à 57 l’objectif étant de contribuer à la discussion avec ses propres compétences. Étant donné le thème choisi « Le commerce équitable pour une économie éthique », quels documents pourriez-vous choisir sur la toile ObjecTifs sOciOLiNguisTiques eT sOciOcuLTureLs Niveau : B1/B2, ADULTES ET GRANDS ADOLESCENTS pour vos apprenants ? Faites une recherche et choisissez-en au moins cinq. n Aborder l’univers du cinéma et de sa promotion publicitaire Temps : 4 SéANCES DE TRAVAIL (2 à distance, 2 en présentiel) n Analyser des affiches de films français (anciens et récents) ACtiVité 2 n Découvrir les évolutions et les enjeux des représentations par l’image (aspects Tâches La distribution des les rôles. Dans le cas d’un débat on nomme un polémiques, président etc.) du débat et un secrétaire qui, respectivement, donnent historiques, sociaux, n Aborder l’univers cinématographique à travers affiches de film du cinéma françaisd’idées, la parole et contrôlent la duréeàdes n Lire, analyser, comprendre des documents iconographiques viséeinterventions. de communica- Tous les apprenants ont le droit de participer sans être pourtant obligés ; chacun doit cONTeNus LiNguisTiques tion et de promotion écouter les idées des autres, réfléchir, argumenter son opinion à partir des documents dont il dispose. n Reprise des temps : passé composé, présent, futur? proche et imparfait l’enseignant ces rôles ? Y a-t-il d’autres rôlesverbaux qui vous semblent nécessaires Lesquels ? Motivez votre opinion. n Réaliser un documentComment de communication associantpeut-il texte etattribuer image n Enrichir le lexique cinématographique à partir de supports autour des affiches de film

tâche 1 Créer des trinômes. Les apprenants échangent entre eux sur les questions suivantes : Quelle importance accorder aux affiches de cinéma ? Dans quels lieux a-t-on l’occasion d’en voir ? Quel rôle jouent-elles dans la promotion des films ? À quelles conditions peut-on dire qu’une affiche de film est ratée ou réussie ? Vous rappelez-vous d’une affiche de film qui vous a particulièrement donné envie d’aller au cinéma ? Faire la mise en commun en grand groupe. tâche 2 Proposer aux apprenants de regarder à nouveau les affiches de l’étape précédente et de lister les éléments qui participent à la création d’une affiche de film (titre, personnage, choix des caractères et des images, couleurs, etc.). Le français dans le monde | n° 406 | juillet-août 2016

77. Fiche pédagogique

Participer à un débat d’idées

Être ensemble

L

e dossier de ce numéro du Français dans le monde explore les nouvelles opportunités offertes par la révolution numérique aux professeurs de français : les cours en ligne font désormais partie du quotidien d’un nombre croissant d’enseignants de langues. Mais un prof ne peut se contenter de voir le monde à travers un écran. Même si les rencontres virtuelles comme les visioconférences permettent de communiquer instantanément avec le monde entier, rien ne remplace le contact physique et les discussions de visu. Un congrès de la Fédération internationale des professeurs de français est ainsi le lieu par excellence des échanges didactiques et du plaisir d’être ensemble. Le congrès de Liège regroupe en ce mois de juillet plus d’un millier de participants venus de tous les coins de la planète : de telles retrouvailles ne se produisent qu’une fois tous les quatre ans, sachons en profiter. Ce congrès est bien est plus qu’un rendez-vous institutionnel et professionnel : du 14 au 21 juillet, Liège est une fête ! n Sébastien Langevin

© Stéphane Beaujean

Travailler l’oral en interaction

68. Jeux

édito

Étonnant

73

Le français dans le monde, revue de la Fédération internationale des professeurs de français - www.fipf.org, éditée par CLE International – 9 bis, rue Abel–Hovelacque – 75013 Paris Tél. : 33 (0) 1 72 36 30 67 / Fax : 33 (0) 1 45 87 43 18 • Service abonnements : 33 (0) 1 40 94 22 22 / Fax : 33 (0) 1 40 94 22 32 • Directeur de la publication Jean-Pierre Cuq (FIPF) Rédacteur en chef Sébastien Langevin • Conseiller de la rédaction Jacques Pécheur • Secrétaire de rédaction Clément Balta • Relations commerciales Sophie Ferrand Conception graphique miz’enpage - www.mizenpage.com • Commission paritaire : 0417T81661. 55e année. Imprimé par Imprimeries de Champagne (52000) • Comité de rédaction Michel Boiron, Christophe Chaillot, Franck Desroches, Manuela Ferreira Pinto, Isabelle Gruca, Chantal Parpette, Gérard Ribot, Pascale de Schuyter Hualpa • Conseil d’orientation sous la présidence d’honneur de Mme Michaëlle Jean, Secrétaire générale de l’Organisation internationale de la Francophonie : Laurent Galissot (MAE), Jean-Pierre Cuq (FIPF), Franck Desroches (Alliance française), Raymond Gevaert (FIPF), Évelyne Pâquier (TV5MONDE), Loïc Depecker (DGLFLF), Youma Fall (OIF), Nadine Prost (MEN), Fabienne Lallement (FIPF), Lidwien Van Dixhoorn (RFI), Jean-Luc Wollensack (CLE International).

Le français dans le monde | n° 406 | juillet-août 2016

03


ÉPOQUE | LANGUE

« ENSEIGNER LA LOGIQUE DE L’ORTHOGRAPHE » Professeur des universités et recteur honoraire de l’Agence universitaire de la Francophonie, Bernard Cerquiglini a fait partie des experts consultés pour proposer, en 1990, des « rectifications orthographiques » de la langue française. Retour sur une « réforme » qui fait encore parler d’elle. PROPOS RECUEILLIS PAR SÉBASTIEN LANGEVIN

L’intégralité des « rectifications orthographiques» de 1990 a été publiée dans le numéro 239 (février-mars 1991) du Français dans le monde, à retrouver sur fdlm.org

16

Imaginiez-vous que cette réforme ferait encore des vagues 25 ans après ? Bernard Cerquiglini : Oui et non… Oui, parce que la langue en France est une longue querelle. Il ne faut pas oublier que le premier livre consacré à la langue française n’est pas la Grammaire française de Louis Meigret de 1550 comme on le dit souvent, mais le pamphlet que le même Louis Meigret a dirigé contre l’orthographe en 1542. La linguistique française commence donc par une polémique : Meigret attaque l’orthographe, propose une réforme et reçoit une volée de bois vert. Depuis, on va d’une querelle à l’autre. Donc, pas d’étonnement : les francophones n’ont cessé de s’étriper sur la langue. Mais non, je ne pensais pas que 25 ans après, la scène serait rejouée par les mêmes acteurs, et avec le même texte. J’ai entendu les mêmes arguments. Par exemple : « Avec votre réforme de l’orthographe, il faudra rééditer les classiques. » Mais quand on lit Le Cid aujourd’hui, on lit un texte dont près de la moitié des mots ont changé depuis la première parution, en 1637 ! Donc, cette petite réforme de 1990, qui touche moins d’un mot par page, est anodine par rapport à tout ce qui a déjà été fait. Ces rectifications sont modestes, mais on avance un peu. À force les plus importantes anomalies seront corrigées, je l’espère… Quels sont les arguments des réformateurs d’un côté et des conservateurs de l’autre ? À la Renaissance, les positions sont les suivantes, et elles n’ont pas varié fondamentalement depuis. Le discours réformateur tient, en gros, à

la thèse « un son / une lettre ». C’est ce que j’appelle un discours phonocentriste : la parole est première, la maîtrise de la langue est avant tout orale. L’orthographe doit transcrire la parole sans ambiguïté. Ce que les réformateurs détestent le plus depuis Meigret, ce sont les lettres superflues : pourquoi « temps » et pas « tan » ? Il y a derrière tout ça une conviction démocratique : il faut que tout le monde puisse lire, notamment les femmes et les enfants. Or le savoir de tous sur lequel s’appuyer,

« Les francophones n’ont cessé de s’étriper sur la langue. Mais je ne pensais pas que 25 ans après, la scène serait rejouée par les mêmes acteurs, et avec le même texte » c’est la maîtrise du français oral. Il faut donc que l’orthographe soit transparente vis-à-vis de la langue orale, qu’elle soit calculable. En face, les conservateurs ne sont pas des démocrates – et ce n’est pas une critique. Ils veulent surtout prendre en considération ceux qui écrivent. Quel est le savoir commun de l’élite qui écrit ? À l’époque, le latin. Pourquoi écrit-on « temps » ? Car il y a un savoir derrière, c’est tempus. Les conservateurs ont compris les règles de l’écrit. Pour les réformateurs, l’écrit est transparent à l’oral, c’est une transcription. Or ce n’est pas le cas, l’écrit est une forme, au sens de Hjelmslev, de la langue. C’est une forme décontextualisée, où il faut lever les ambiguïtés. Et les

conservateurs aiment les formes, car l’écriture est un monument de la langue. Il y a également une esthétique dans l’écrit. Les francophones, autres que les Français, ont-ils leur mot à dire ? Jusqu’en 1932, l’Académie française décide pour la France, donc pour le monde. Deux évènements ont changé les choses. L’arrivée d’une autre autorité sur l’orthographe : la science, les linguistes. C’est le développement dans les années 1960 d’une linguistique française solide. Et l’autre évènement, c’est l’arrivée des francophones. La francophonie a le français en partage, elle doit donc également avoir sa réforme en partage. Ce qui est un problème toujours actuel. Il y a maintenant d’autres académies, des linguistes belges, québécois… Si l’on veut faire un nouveau mouvement orthographique, il faut inclure tous ces acteurs. C’est ce que nous avons fait en 1990. Mettre à la même table Académie française, linguistes et savants francophones. Le français appartient à ceux qui le parlent, à ceux qui l’écrivent ! Quels étaient les principaux objectifs de la réforme de 1990 ? Les savants sont conscients que l’on ne peut pas faire une réforme complète, tout remettre à plat, car bien sûr, il y a l’habitude visuelle, toutefois des anomalies restent à corriger. Nous savons bien, que, grâce à Jules Ferry, en France presque tout le monde sait lire. Et grâce au numérique, tout le monde lit. Donc notre mémoire visuelle devient hypertrophiée : il est difficile maintenant de faire bouger les choses. Il faut par

Le français dans le monde | n° 406 | juillet-août 2016


DR

« août »… Si c’était à refaire, nous ne toucherions d’ailleurs pas au circonflexe. Les conservateurs l’adorent, ils ne veulent pas le voir disparaître et ils oublient tout le reste de la réforme de 1990, dont le plus important porte sur la néologie. Le rôle des enseignants est prépondérant. Il s’agit d’éclairer, d’expliquer, de donner aussi une dimension historique car l’orthographe a une histoire qu’on néglige souvent, ce qui amène les gens à penser qu’elle est immuable depuis toujours. En fait, elle est stable depuis peu.

conséquent s’adresser à l’avenir. Aux enfants qui arrivent à l’écriture, leur enseigner quelque chose de cohérent, leur enseigner « évènement » avec un accent grave, que justifie la prononciation, avec e ouvert. Et aussi penser à tous ces mots que l’on va créer… C’est une partie de la réforme de 1990 qui m’a passionné, la néologie. Préfigurer les mots qui vont venir, pour les scripteurs de demain, les enfants.

Les professeurs devront peutêtre enseigner une orthographe qu’ils n’utilisent pas forcément… Les instituteurs de Jules Ferry parlaient breton ou basque et ils enseignaient en français. Ce n’est pas gênant. D’autant plus que, la réforme de 1990 concerne peu de mots : 400 mots de l’école, 800 pour la conversation courante, et c’est principalement le circonflexe sur « maître »,

Avez-vous également pensé à ceux qui apprennent le français comme langue étrangère ? Bien sûr ! L’idée était aussi de lutter contre cette image du français comme une langue bourrée d’exceptions. Nous avons voulu mettre un peu plus de régularité. D’ailleurs, l’orthographe est plutôt rigoureuse. Mais malheureusement, un certain enseignement a monté en valeurs les exceptions. C’est un peu le rôle de la dictée dans l’enseignement fran-

UNE RÉFORME EN QUESTION

Rectifications qui datent en fait d’un bon quart de siècle, et sont la conséquence d’un groupe d’étude, le Conseil supérieur de la langue française, dont la présidence avait été justement confiée au Secrétaire perpétuel de l’Académie d’alors, Maurice Druon. Entre recommandations et règles d’applications générales (valables donc pour l’enseignement), ces rectifications ne consistent, dit le texte publié au Journal Officiel du 6 décembre 1990, « en aucune manière

à simplifier des graphies résultant d’une évolution étymologique ou phonétique, mais visent à mettre fin à une anomalie, à une incohérence, ou, simplement, à une hésitation (…), à souligner une tendance phonétique ou graphique constatée dans l’usage, ou encore à faciliter la création de mots nouveaux, notamment dans les domaines scientifique et technique, et, de manière générale, à rendre plus aisés l’apprentissage de l’orthographe et sa maîtrise ». Simplification qui concerne

La polémique soulevée en début d’année par la réforme de l’orthographe montre combien toucher à la langue française reste un sujet sensible au pays de Molière… Le terme excessif de « réforme » utilisé en est lui-même une preuve. Puisque, précise l’Académie française chargée de veiller « à la défense et à l’illustration de la langue française », c’est bien de « rectifications » orthographiques dont il faut parler.

Le français dans le monde | n° 406 | juillet-août 2016

« Si c’était à refaire, nous ne toucherions pas au circonflexe. Les conservateurs l’adorent et ils oublient le reste de la réforme de 1990, dont le plus important porte sur la néologie » çais. C’est une course aux anomalies, une dictée ! La dictée donne l’image d’une langue qui est faite d’exceptions, alors qu’elles sont infimes. Ce qui est important, ce sont les pluriels, les accords. Les professeurs ont un rôle crucial : enseigner l’orthographe grammatical, la logique, les règles. Pour les exceptions ou les mots difficiles, enseignez le dictionnaire ou le correcteur orthographique. Donc privilégier la logique de l’orthographe, son histoire, sa cohérence, tout ce qui est grammatical et laisser à l’exception un statut exceptionnel, tandis que l’enseignement traditionnel valorise l’anomalie. n

aujourd’hui environ 2 000 mots et au premier chef les mots composés, les verbes en -eler ou –eter, le participe passé des verbes pronominaux, les marques du nombre, ou encore l’usage des accents, et notamment celui de l’accent circonflexe qui a suscité tant de commentaires. n

EN SAVOIR PLUS : http://academie-francaise.fr/sites/academie-francaise.fr/files/rectifications.pdf

17


20

DR

POÉSIE

© sabino.parente – Fotolia.com

INTERLUDE |

RENÉ DEPESTRE René Depestre est né en 1926 en Haïti. Il a participé à la fondation du Parti communiste haïtien et au renversement du dictateur Élie Lescot avant d’être condamné à l’exil en 1946. Il passera près de vingt ans à Cuba, exerçant d’importantes fonctions aux côtés de Fidel Castro et Che Guevara, avant de fuir les dérives castristes pour Paris. L’auteur de Minerai noir (1956) vit depuis plus de trente ans en France, dans les Corbières, où il « met en ordre le chaos de sa vie » à travers l’écriture. Il a reçu en 1988 le prix Renaudot pour Hadriana dans tous mes rêves.

Le français dans le monde | n° 406 | juillet-août 2016


u e i d A la Révolution à J’ai cessé d’être un « poète noir » sur le qui-vive à la porte de la Maison des Amériques(1) j’ai quitté le foyer deux fois natal : mes rêves en morceaux tiennent dans un mouchoir. Je regarde dans les yeux mes jours élargir un nouveau ciel de poète en moi, je fais mes adieux à tout ce qui est mort sur pied dans ma vie, je mets à mort la foi et l’espérance qui ont failli truquer mon art de vivre. Je voyage désormais à la belle étoile des mots d’Alexandre Dumas père. Mon voyage est un enfant du pardon. S’étant trompé de chemin de croix mon cheval innocent s’éloigne comme un voilier remis à neuf pour l’aventure océane. Ma tête grise a poussé dans les hauteurs des mots en pleine forme qui firent la pluie et le beau temps au jardin de la jeune madame Colette : vive le dieu émerveillé d’une langue française aussi ronde en chair et en soleil que la courbe au lit de la femme en état de poésie.

Le français dans le monde | n° 406 | juillet-août 2016

Vive les petits matins maternels de la langue française ! ils me font des signes de frères tout en haut des mots au galop bien créole d’Aimé Césaire ! Vive la prose à monsieur André Gide ! j’ai sa fraîche aurore à la gorge j’ai les mots frais du français-de-France je m’imagine fraîcheur du soir taillée dans la saison des îles pour couvrir le parcours saharien du siècle. Au fond du panier d’années d’exil où mûrissent mes travaux et mes jours – très loin du désert cubain qui pipait les dés du fond de mon âme – voici un sang et un horizon d’homme libre criblés de rivières et de rêves en crue, voici la charrue des mots à donner en vrac à la bonne et fraîche illumination d’autrui, en prose et en poésie, voici la pirogue qu’il faut pour descendre en chantant les tout derniers rapides du xxe siècle. n René Depestre, Écrire la « parole de nuit », 1994

1. Casa de las Americas : fondé par le gouvernement de Fidel Castro en 1959, cet organisme du régime communiste cubain dirigea la « révolution culturelle » à coups d’anathèmes et d’arguments d’autorité.

21


MÉTIER | RÉSEAUX

Après deux mandats à la tête de la Fédération internationale des professeurs de français, Jean-Pierre Cuq passe le relais lors du congrès de Liège. Retour sur huit années riches en actions, en projets et en rencontres. PROPOS RECUEILLIS PAR SÉBASTIEN LANGEVIN

« LA FIPF, UNE ÉVIDENCE DANS LE PAYSAGE FRANCOPHONE »

Quelles ont été les différentes étapes de vos deux mandats ? Jean-Pierre Cuq : Au début, en 2008, nous avons eu une période de reconstruction. La Fédération avait besoin de retrouver une certaine crédibilité par rapport à ses partenaires. Elle avait également besoin de montrer qu’elle était capable d’agir avec professionnalisme dans son secteur. Les deux Secrétaires générales avec qui j’ai eu la chance

22

de travailler ont été tout à fait exceptionnelles de ce point de vue-là. Ensuite, il y a eu la période où nous avons pu lancer quelques grands projets, où nous avons pu mettre en place des choses fortes, jusqu’en 2012. Puis, sur mon second mandat, nous avons connu une période vraiment critique, pendant près de trois ans. Ça a été très difficile, au point que la baisse des subventions a mis en péril l’existence même de la FIPF. Grâce à Fabienne Lallement, nous avons réussi à éviter le pire et nous avons continué à avoir une activité soutenue, sans sacrifier de grands projets malgré les difficultés de gestion. Enfin, la dernière période, qui a démarré à l’automne 2015, où on a le sentiment d’une prise de conscience de nos partenaires principaux, et en particulier de l’Organisation internationale de Francophonie, que je remercie beaucoup de son soutien constant. Nous avons non seulement stabilisé

les choses, mais nous allons pouvoir présenter une Fédération en état de marche pour nos successeurs, ce qui n’était pas gagné il y a quelques mois encore. Quels ont été les grands projets de votre présidence ? Nous avons essayé d’avoir une vraie cohérence dans nos actions pendant ces huit ans. En premier, il s’agissait de remettre en ordre de marche nos systèmes de communication. Ça a été le grand projet du nouveau Français dans le monde et de son supplément Francophonies du Sud, dont je suis très fier ; la revue Recherches et Applications, qui a pris sa place dans le monde scientifique ; la transformation de Dialogues et Cultures ; la création puis la rénovation récente du site de la FIPF ; la prise en charge de francparler-oif.org ; la présence de la FIPF sur les réseaux sociaux. Cela fait beaucoup de choses qui ont une

cohérence forte du point de vue pédagogique pour les professeurs, du point de vue de la recherche mais aussi en termes de visibilité. Le livre blanc et le projet CECA (Culture d’enseignement et culture d’apprentissage) sont également en cohérence. Ce sont deux études approfondies que j’ai souhaité mener. La première, c’est « Que se passet-il dans la classe » (CECA). Et la seconde, « Que se passe-t-il en dehors de la classe » (le livre blanc). Nous aurons abouti dans les deux cas à un certain nombre de publications universitaires, ce n’est pas négligeable du point de vue de la connaissance de ce qu’est la vie d’un professeur de français, aussi bien dans son travail de classe quotidien que dans son environnement. En termes politiques, les efforts de rénovation que nous avons faits, le sérieux budgétaire dont nous avons fait preuve ont convaincu nos partenaires. Eux aussi vivent

Le français dans le monde | n° 406 | juillet-août 2016


Remise des palmes académique à J.-P Cuq par Raymond Gevaert, vice-président de la FIPF, en 2011.

© Léo Paul Ridet

associatif ne peut pas être le même au xxi e siècle que ce qu’il a été jusque-là. Ce qui change également, c’est la conscience que les collègues, en tout cas ceux qui sont dans nos associations, prennent de la nécessité impérieuse d’être toujours en formation continue. Tous le disent : il faut de la formation continue, et souvent les associations sont prêtes à s’engager pour en être des acteurs.

« Avoir cette chance de voir le métier non pas de façon théorique ou universitaire, mais le voir à travers la vue des autres, la vie des autres, c’est irremplaçable » des périodes difficiles d’un point de vue budgétaire, ils peuvent être tentés d’élaguer dans leurs partenariats. Ils ont fini par se dire que leur partenariat avec la FIPF ne pouvait pas être sacrifié. Nous n’avons pas connu une période d’expansion, mais il faut savoir naviguer par gros temps… Je crois que nous avons réussi, avec le bureau et la Secré-

taire générale, à faire que la FIPF devienne vraiment une évidence dans le paysage francophone. Avez-vous pu noter des évolutions fortes dans le métier de professeur de français ? Ce qui ne change pas, c’est l’amour que les collègues portent à la langue et aux cultures qui sont développées par le français. Ce qui ne change pas non plus, c’est le militantisme de nombre d’entre eux, qui font l’effort d’adhérer à des associations. Ce qui change peut-être, c’est la façon d’être militant. Comme nous avons essayé de le faire, la prochaine équipe devra certainement accompagner le changement profond de civilisation que nous vivons en ce moment. Forcément, l’engagement

Le français dans le monde | n° 406 | juillet-août 2016

Quel regard personnel portezvous sur ces huit années de présidence de la FIPF ? Ce qui m’aura marqué le plus, au terme de ces huit ans, c’est quand même l’extraordinaire expérience humaine que cela représente. C’est vraiment une expérience de vie presque au quotidien, avec les collègues professeurs du monde entier. Pour quelqu’un comme moi qui a fait toute sa vie professionnelle dans l’enseignement, à tous les degrés, qui s’est spécialisé en français langue étrangère, avoir cette chance de voir le métier non pas de façon théorique ou seulement universitaire, ou bien à l’inverse à travers ma seule expérience professionnelle propre, le voir à travers la vue des autres, la vie des autres, c’est irremplaçable. Quels moments forts retiendrez-vous en particulier ? Il y en a vraiment beaucoup, c’est difficile de faire un choix… Je pense par exemple à la Fête de la francophonie dans un théâtre de bois d’une petite ville au Brésil. Il n’y avait pas beaucoup de monde, mais les gens étaient là, des étudiants, des personnes âgées qui apprenaient le français. Ce n’était pas du tout une Fête de la francophonie sous le strass et les paillettes, mais justement… Je cite cette expérience, mais il pourrait y en avoir tant d’autres ! Des moments où l’on se retrouve avec des collègues. Et à l’inverse des évènements

XIVE CONGRÈS DE LA FIPF À LIÈGE

Plus de 1 300 personnes venant de 103 pays différents participent au grand rassemblement proposé par la Fédération internationale des professeurs de français et par l’Association belge des professeurs de français, qui se tiendra à Liège, en Belgique, du 14 au 21 juillet. Ce congrès s’ouvrira par une conférence plénière de Pierre Mertens, l’un des écrivains belges majeurs, et se clôturera par l’intervention de Daniel Maximin, l’écrivain et poète guadeloupéen renommé. Les participants pourront partager l’expérience de plus de 539 communicants répartis dans 9 symposiums aux thèmes riches et variés, touchant à la pédagogie ou aux stratégies des classes actives comme aux politiques linguistiques ; se penchant tant sur l’enseignement précoce que sur la formation initiale ou continue des enseignants et utilisant aussi bien la littérature, le jeu que les technologies numériques comme support. 22 conférences semi-plénières seront proposées par des experts de la langue et de la didactique du français. n Pour en savoir plus : http://liege2016.fipf.org/cms/

beaucoup plus solennels comme les 40 ans de la FIPF à l’Académie française, beaucoup de rencontres pendant les congrès où l’on a senti ce plaisir de se rassembler autour de la langue, en partageant des expériences culturelles. J’ai vraiment vécu tous ces moments, ceux qui paraissent les plus petits comme les plus grands, d’une manière très heureuse. n

23


MÉTIER | QUE DIRE, QUE FAIRE ? Lorsqu’ils n’habitent pas dans un pays francophone, les apprenants n’ont pas souvent l’occasion de parler français en dehors des cours. Cette difficulté est souvent une cause de démotivation chez les étudiants, qui ne voient pas d’utilité immédiate à leur apprentissage. Manque de temps, de nécessité, d’interlocuteurs ou simplement d’informations, les raisons de cette absence de pratique sont multiples. Pourtant, les occasions d’utiliser le français en dehors des cours peuvent bel et bien se trouver. C’est ce que nous disent ces témoignages d’enseignants, qui partagent spécialement pour vous leurs petites astuces.

D

ans mes classes au collège tous les élèves ont Facebook, donc je leur ai demandé comme « mission » d’avoir au moins trois amis francophones sur leur compte puis d’échanger avec eux en français. Ça a marché ! J’ai même l’impression que quelques « cyber-couples » se sont créés… LISE HARRIS, Australie

J

’invite les apprenants à assister aux évènements culturels organisés par l’Alliance française. C’est une occasion de rencontrer des interlocuteurs différents et de s’ouvrir à la culture française. À ceux qui ne participent pas, je dis qu’ils ratent une belle occasion de pratiquer le français ! ANNE PRÉVOST, Brésil

COMMENT FAIRE PRATIQUER LE

J

e propose à tous mes apprenants de s’inscrire sur TalkTalkbnb. C’est un site qui permet de pratiquer des langues étrangères et de voyager gratuitement. Je leur conseille non seulement de voyager mais aussi d’héberger des francophones chez eux via ce site.

S

ouvent, à la fin du cours, je montre un forum sur un sujet que nous avons travaillé en classe. Nous lisons les commentaires laissés par les internautes, nous identifions et corrigeons les fautes (il y en a souvent beaucoup !) puis je demande aux apprenants d’écrire chez eux un commentaire s’ils souhaitent réagir.

RUBRIQUE ANIMÉE PAR ADRIEN PAYET www.fle-adrienpayet.com

38

HÉLOÏSE DUVAL, Royaume-Uni

I

l y a beaucoup d’exercices à faire seul à la maison pour continuer à pratiquer le français. Je donne des liens, par exemple vers TV5Monde, RFI, Bonjour du Monde et vers les exercices du Point du FLE.

J

e travaille avec des jeunes adultes très cinéphiles donc je leur propose de voir des films. À la fin de chaque cours je leur donne un lien sur YouTube pour voir un court ou moyen métrage (je m’arrange pour trouver les versions originales sous-titrées). Au début du prochain cours on en parle, ça permet de commencer la leçon en douceur. Maintenant, de plus en plus, c’est eux qui proposent des films en français. AUDE PERRIN, États-Unis

ANTONELLA PASINI, Italie MICHELLE VIAL, France

Le français dans le monde | n° 406 | juillet-août 2016


L

’année dernière nous avons mis en place un projet de correspondance dans mon collège. Ça a été une expérience extraordinaire ! Les élèves ont adoré échanger avec les Français. Ils ont communiqué par courriel et sur Skype. Certains couples se sont même formés à distance, c’est dire s’ils étaient motivés ! ROSA HELENA FLORES, Mexique

J P

our moi, écouter des chansons c’est le meilleur moyen de rester en contact avec la langue française, c’est ce que je dis régulièrement à ma classe ! On peut écouter de la musique partout (ou presque !) et il y a de tout. Je sélectionne des titres qui plaisent aux jeunes et je leur donne le lien URL pour les retrouver.

e travaille avec des préados (10/13 ans). Je sais qu’ils passent beaucoup de temps à jouer aux jeux vidéo. J’ai donc eu l’idée de leur donner des liens pour télécharger des jeux en français. Ça m’est arrivé aussi de leur demander de mettre leur téléphone ou leur tablette en langue française. Ça leur permet d’avoir un environnement francophone en dehors de la classe. THOMAS FRITZ, Autriche

JUAN AGUIRRE PÉREZ, Espagne

J

e conseille d’écouter la radio en français (notamment le journal en français facile de RFI) et de lire des articles de la presse française sur Internet. Si je trouve un article intéressant ou une émission qui me semble pertinente, je leur envoie le lien en privé sur notre groupe Facebook. C’est vraiment bien pour les étudiants qui se préparent au DELF. EVA FERRER, Canada

FRANÇAIS EN DEHORS DES COURS ? Le français hors les murs La diversité des propositions montre bien qu’il existe de nombreux moyens de rester en contact avec le français et qu’Internet est pour cela un allié précieux. Sur la Toile, on peut proposer des exercices comme le fait Antonella, faire regarder des films et écouter des chansons comme le proposent Aude et Juan. On se rend compte à travers les témoignages que les enseignants utilisent les centres d’intérêt des apprenants pour les inciter à poursuivre leur pratique de la langue. C’est le cas de Thomas avec les jeux vidéo et appareils paramétrés en

français ou encore l’excellente idée de Lise avec les amis francophones sur Facebook. Je retiens encore l’intérêt des sites collaboratifs comme TalkTalkbnb mais aussi Couchsurfing ou Contactsfrancophones, qui permettent une réelle rencontre avec des interlocuteurs de la langue cible. Enfin, pratiquer l’écrit par la correspondance comme Rosa Helena ou via les forums comme Michelle est aussi un moyen fort pratique et à disposition de tous. Voilà des propositions très intéressantes que vous pouvez soumettre aux apprenants à la fin de votre prochain cours ! n

Merci aux personnes qui ont partagé leur expérience. Rendez-vous sur le Facebook du FDLM à la rubrique forum pour participer au prochain numéro. Le français dans le monde | n° 406 | juillet-août 2016

Rejoignez FACEBOOK/LeFDLM www.fdlm.org

J

e demande aux élèves de dire une phrase en français à quelqu’un dans la rue puis d’exposer au cours suivant comment la personne a réagi. C’est toujours très drôle ! Selon le niveau, l’enjeu peut être soit de se faire passer pour un Français et donc d’imiter l’accent, soit d’oser simplement s’exprimer en français si possible devant un francophone. Il y en a plus qu’on ne le croit ! SARAH RAYNAL, Espagne

N

ous avons un blog au sein de notre institution, créé par et pour nos élèves. C’est l’occasion pour eux de s’exprimer en français, de s’entraider, de s’inviter mutuellement ou encore de diffuser les projets réalisés dans les différentes classes. La création du blog a été finalement plus facile que je ne pensais au début et c’est un outil qui s’est avéré très utile. © SHUTTERSTOCK

À RETENIR

ÉTIENNE MARTY, France

39


DOSSIER |

L

es outils numériques en général et Internet en particulier viennent bousculer nombre de certitudes et de pratiques concernant la transmission des savoirs. Leur utilisation pour l’enseignement-apprentissage des

langues occupe une place grandissante dans les offres de formation, selon différentes modalités. Dans l’entretien qui suit, Enke Nissen explique ainsi que les dispositifs hybrides, qui associent activités numériques à distance et cours dans la salle de classe, sont fréquem-

FICHE PÉDAGOGIQUE DISPONIBLE EN PAGES 73-74

COURS EN LIGNE :

PRATIQUES D’ENSEIGNANTS, 48

Le français dans le monde | n° 406 | juillet-août 2016


ment préférés aux cours 100 % en ligne. Deux offres bien différentes, qui sont proposées par de nombreux Instituts et Alliances dans le monde, comme le montre notre enquête. Dans un cas comme dans l’autre, le professeur de français est amené à jouer de nouveaux

rôles, notamment d’accompagnement numérique et de tutorat des apprenants. Exemple : le témoignage de Nathaliia, enseignante ukrainienne qui donne ses cours de français exclusivement en visioconférence. Un cas bien concret des ces formations virtuelles. n

, PARCOURS D’APPRENANTS Le français dans le monde | n° 406 | juillet-août 2016

49



Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.