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PRIX DES ARTISANES

Doigts de fée

LE 14 OCTOBRE DERNIER, À LA FONDATION LOUIS VUITTON, LES MAGAZINES “ELLE”, “ELLE DÉCORATION” ET “ELLE À TABLE”, AVEC LE SOUTIEN DU GROUPE LVMH, ORGANISAIENT LA PREMIÈRE ÉDITION DU PRIX DES ARTISANES QUI RÉCOMPENSE QUATRE FEMMES DÉPOSITAIRES ET COURROIES DE TRANSMISSION DE SAVOIR-FAIRE ARTISANAUX. PORTRAITS DE DEUX LAURÉATES.

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PAR SOLINE DELOS

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Métiers du design MANON BOUVIER

ORFÈVRE DE LA PAILLE

« Attendez une seconde, je mets mes écouteurs pour continuer à travailler ! », s’exclame la lauréate du Prix des Artisanes (catégorie « Métiers du design ») quand on la contacte. De fait, Manon Bouvier qui en 2016, à seulement 23 ans, montait Paelis, son atelier de marqueterie de paille, croule sous les projets. C’est tardivement, à l’occasion d’un stage, et après une formation en ébénisterie et des études à l’école Boulle dans cette même spécialité, que Manon découvre ce savoir-faire. Un coup de foudre. « Je suis tombée amoureuse de la paille, de sa luminosité, sa flexibilité, sa fragilité, sa délicatesse », livre-t-elle. Dans son atelier à Lyon, elle innove avec audace et talent, mixe modernité et tradition, s’inspire de tableaux abstraits ou de détails d’architecture pour imaginer des motifs jamais vus, naviguant entre les outils traditionnels et son imprimante 3D.

Depuis son premier coup d’éclat, “Bayan”, un meuble habillé de marqueterie tout en nuances de bleu présenté à la Design Week en 2017, elle a conquis de nombreux architectes – Elliott Barnes, Flavia de Laubadère, Charlotte Biltgen entre autres –, sublimé l’intérieur d’une nouvelle malle secrétaire Louis Vuitton, et marqueté une sculpture tout en pointes et cavités de l’artiste Thierry Martenon, un exploit. « Ce qui m’intéresse, dit-elle, c’est casser les codes et pousser la technique toujours plus loin. » Alors qu’il n’existe aucun enseignement dans ce domaine, cette meilleure Ouvrière de France qui a déjà formé deux artisans – cinq mois dédiés à chacun – compte bien, en 2022, agrandir encore sa petite entreprise, « frustrée de refuser les projets » qu’on lui propose. Pas de doute : avec Manon Bouvier, la marqueterie de paille a de beaux jours devant elle !Q 34, rue de la Tête-d’Or, Lyon. paelis.com

1. Un travail de précision. Manon Bouvier à l’ouvrage avec règle et cutter. 2. Jeu de construction. Les motifs géométriques sont la meilleure manière de mettre en valeur la paille, selon la créatrice. 3. Work in progress. La paille est écrasée grâce au plioir en os, un outil spécifique à cette marqueterie.

Florence Branchard ; Samuel Cortes ; Béatrice Prestage pour la fondation BP

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Margaret Zayer ; La Maison du Pastel

1. Dégradé maîtrisé

Isabelle Roché devant les pâtes à pastel, un mélange de pigments purs et de liants, dont la recette bien gardée se transmet de génération en génération.

2. Large palette

Farandole de couleurs avec plus de 1 650 teintes. Un exploit.

3. Phase finale

Les bâtonnets roulés à la main sont massicotés avant que soit apposé sur chacun d’eux le sceau ROC, les trois premières lettres de Roché.

Métiers de la sauvegarde du patrimoine ISABELLE ROCHÉ

ALCHIMISTE DU PASTEL

C’est en découvrant les pastels de la Maison du Pastel – ceux qu’Edgar Degas, Edouard Vuillard et Serge Poliakoff utilisaient – que le peintre Sam Szafran s’est mis à cette technique. L’anecdote en dit long sur cette manufacture familiale prestigieuse, vieille de 300 ans, qui aurait sans doute périclité si Isabelle Roché, lauréate du Prix des Artisanes (catégorie « Métiers de la sauvegarde du patrimoine »), n’en avait pas repris les rênes en 2000. Un revirement à 180° pour cette ingénieure de profession, qu’elle explique ainsi : « C’était comme un appel. » Son but ? Revenir à l’esprit de son aïeul pharmacien chimiste, Henri Roché qui, en reprenant la maison en 1877, l’avait hissée au firmament, approvisionnant de nombreux artistes et créant une gamme inouïe de 1 650 teintes, laquelle n’avait cessé de s’amenuiser après sa disparition.

Pour relever cette maison à bout de souffle, Isabelle s’appuie sur les secrets de fabrication à l’origine d’une intensité de couleurs unique, lance des teintes irisées, des pastels à base de pigments naturels, et s’attelle à faire revivre le nuancier vertigineux de son aïeul. Travail de titan – chaque pastel est fait à la main ! – qu’elle mène d’abord seule pendant dix ans, puis avec Margaret Zayer, jeune étudiante en art américaine, venue pour faire un stage et qui est finalement restée. Parmi les nouveaux clients séduits, des superstars de l’art, à commencer par Richard Serra, Jenny Saville, Nicolas Party ou encore l’artiste américaine Katie Rodgers (558 000 abonnés sur Instagram) qui vient de créer deux assortiments de couleurs, avec leur boîte. « Cet été, précise Isabelle Roché, nous venons de dépasser le cap des 1 650 couleurs. » Objectif atteint, haut la main ! Q 20, rue Rambuteau, Paris-3e. lamaisondupastel.com

Et aussi

 Dans la catégorie « Métiers de la mode », la plumassière Janaïna Milheiro s’est distinguée par son travail. A son actif, des pièces pour les plus grandes maisons de couture, réalisées à partir de plumes d’oiseaux élevés pour une consommation alimentaire.  Dans la catégorie « Métiers du palais », c’est Elise Bougy, vigneronne en Champagne, qui a remporté le prix. Depuis 2016, elle est à la tête du domaine fondé par son arrière-grand-père en 1920.

Coco, fauteuil tambour en rotin,219€.

PhotoparJean-PierreLagainpourlesPariziensetMélinaVernant

Sir TerenceConran danssa chaiseCoco.

©PopperfotoviaGettyImages/GettyImages

LEFAUTEUILDESIRTERENCE

C’estparluiquetoutacommencé.Lui,c’estle siègeCoco,imaginéparSirTerenceConran, fondateurd’Habitaten1964,alorsqu’ilétait encoreétudiant.Assiseprofondedanslaquelleonseloveetaudacedumélange osier/métal,cettealliancedeconfortet dedesigninspiredepuistoujourslestudiodecréationHabitat.

HABITAT OUL’ARTDE S’ASSEOIR

NÉILYA PRÈSDE60ANS AUTOUR DE L’IDÉEQUENOTRE INTÉRIEUR POURRAIT DEVENIR SOURCEDEBIEN-ÊTREET DE JOIE DE VIVRE, HABITAT PLACEFAUTEUILSET CANAPÉS AUCENTREDE TOUT.RENCONTRE AVECFRANCKGALIBERT, DIRECTEUR DE COLLECTION.

Elle Déco :Enquoil’approche Habitat del’assise est-ellespécifique ? FranckGalibert: Le fauteuilHabitatreprend ce quifait l’essence dela marque,une alliancesingulière deconfort – que nous nous posonscomme uneobligation –etde designpourtousettousles intérieurs.Une autre de noslignes directrices:l’obsessionpour laqualité, qu’ils’agisse de notreexigence pour les dessins,les designs,les matériaux– tissusetbois notamment –oulafabrication.C’estpourquoinos meublessont enmajorité réalisés dans des atelierseuropéens.Enfin,lapraticité restel’unde nos piliers;unfauteuil doit être facile àdéplacer etadapté à la vie dechacun ; aux petitsespacescomme aux plus grands. E.D.:Commenttravaillez-vousleur design ? F. G.: Nous faisons nôtrel’esprit Bauhauset cettecroyance qu’un objet usuelse doitd’êtreesthétiqueetd’ apporter ce« beau» au plus grand nombre.ChezHabitat,le design sert le produit et son usage. Noslignes s’oriententalorsversune forme desimplicité.Versla couleuraussi.Depuisle début, nous favorisonsl’irruptiondecette dernière, afinde permettre à chacund’exprimer sapersonnalité.Un studio de designinterneest, parailleurs, dédié à l’assise.Ses prioritéslorsqu’il penseetdessine des modèles:le confort et lapraticité. Notammentquandil réinterprète,comme nous aimons le faire, de grandsclassiques del’assise(fauteuilVoltaire,Tambour,Boudoir,Corbeille…).Régulièrement, nous nous associons aux regards de designersextérieurset explorons d’ autresvocabulairescréatifs. E.D.:Etvous, quellepiècepréférez-vous ? F. G.: J’ai une tendresse particulière pour Chester, présentdans noscollections depuis25 ans,sanscesse réinventéetdéclinéenfauteuilcommeen canapé.Avecsondessintrès précis,sagrande profondeurd’ assiseet ses accoudoirs à laparfaitehauteur, il possèdeun volume justeet essentiel. Lorsque j’étaisétudiant,c’était LA pièce à s’offrirdanssonpremierappartementd’adulte.Mais moi, j’étais fou du fauteuil Naoko, deson style japonisant,et c’estplutôt luique j’aifoncé acheter, àpeine quittéle domicile de mes parents !

PhotoparJean-PierreLagainpourlesPariziensetMélinaVernant

Naoko, fauteuilentissubordeaux, fabriquéenEspagne,549€.

TROISICÔNES DUDESIGN

Parce quelesalon est lelieu du partageenfamilleouentre amis,les assises quel’on choisitpour lui se font statutaires, unmoyend’expressionpermettantde marquer sonidentité. Panorama entroisclassiques auxunivers designbiendistincts.

NAOKO,UNJAPONISMEMODERNE

Imaginéeparladesigneusenippone NaokoKanehira, Naokoest uneicônedudesignquicasselescodes.Sonaccoudoirasymétrique etsahauteurd’assisebasserappellentl’artdevivrejaponais. Interchangeables,sondossieretsonaccoudoirluipermettentde changerdefonctionetdepièceaugrédesenvies.

CAJOU,LENÉO-CORBEILLE

Réinventantl’assisecorbeilleduXIXe siècle, Cajouestunfauteuil enveloppant,commeuncocon,pouvantaisémentpasserdela chambreausalon.ImaginéparAdrien Carvèsauseindustudiode designHabitat,lefauteuilsedéclinetantôtentissu,tantôtenvelours etdansunegrandevariétédecouleurs.

JEDOUL’ESPRITSCANDINAVE

Mixantallure«countryside»etespritscandinaveàlafoisminimal etchaleureux,Jedrésumebienl’approche«lessismore»d’Habitat. Dessinéspar DavidIrwin,sesaccoudoirsenboistournémontrent, eux,toutlesavoir-fairedelamarque.Ilrevientcettesaisonenédition limitéehabilléd’untissuitalien.

Jed, fauteuilenchêne massifettissugris,fabriqué enItalie,449€. Cajou, fauteuil enveloursjauneet entissubleuclair, fabriquéenEspagne, 499€.

BARÀTISSUS:UNVERT?

Pourlamajoritédesesmodèles,Habitat proposed’apportersatouchepersonnelleen choisissantlerevêtementdesoncanapéoude sonfauteuilparmilestextilesproposésdans sonBaràtissus.100%d’origineitalienne,ces étoffesdéveloppéesparlestudiodelamarque frappentparleurgrandequalité,maisaussileur intemporalitéetpraticité(antitachesoufaciles ànettoyer).Bellagio,CopparoouSuperVelvet, toustravaillentlatexture:lesreliefs,leschinés ouledouxvelours.Grisvertoujaunemoutarde, leplusdurrestedesedécider!

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