9782215132134 20 histoires pour raconter les plus grands tableaux aux enfants

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pour raconter les plus grands


fleurus Direction : Guillaume Arnaud Direction éditoriale : Sarah Malherbe Édition : Charlotte Walckenaer, assistée de Sanandra Collard Direction ar tistique : Élisabeth Heber t Conception graphique : Séverine Roze Mise en pages : Anne Bordenave Direction de fabrication : Thierry Dubus Fabrication : Sabine Marioni © Fleurus, Paris, 2016 Site : www.fleuruseditions.com ISBN : 978-2-2151-3213-4 Code MDS : 652 528 Tous droits réservés pour tous pays. « Loi n°49-956 du 16 juillet 1949 sur les publications destinées à la jeunesse. »


pour   raconter   les   plus   grands

Textes de

Illustrations de

Sabine du Mesnil

Tanja Stevanovic

et Charlotte GrossetĂŞte

fleurus


Sommaire Un mariage à la mode … p:6 Van Eyck : Les Époux Arnolfini Histoire racontée par Sabine du Mesnil

On ne peint pas sans casser des œufs … p.10 Botticelli : La Naissance de Vénus, Histoire racontée par Charlotte Grossetête

Le mystère de la Dame Paysage … p.14 Vinci : La Joconde Histoire racontée par Sabine du Mesnil

Liesse au pays des glaces … p.18 Brueghel l’Ancien : Paysage d’hiver Histoire racontée par Charlotte Grossetête

Tête composée à la royale ! … p.21 Arcimboldo : Vertumne Histoire racontée par Sabine du Mesnil

La chute de l’ange noir … p.24 Caravage : Les Tricheurs Histoire racontée par Sabine du Mesnil

Secret de famille … p.28 Velázquez : Les Ménines

Histoire racontée par Sabine du Mesnil

Les quatre saisons d’un tableau … p.32 Vermeer : La Laitière Histoire racontée par Sabine du Mesnil

Celui qui changeait la poussière en or … p.36 Rembrandt : Le Retour du fils prodigue Histoire racontée par Sabine du Mesnil

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Le Pierrot perdu de la lune … p.40 Watteau : Pierrot ou Gilles Histoire racontée par Charlotte Grossetête

La boîte aux merveilles … p.44 Canaletto : Le Pont du Rialto

Histoire racontée par Charlotte Grossetête

Un peintre et deux pianistes … p.47 Renoir : Jeunes filles au piano Histoire racontée par Charlotte Grossetête

Degas en coulisses … p.51 Degas : La Classe de danse

Histoire racontée par Sabine du Mesnil

Bleu nuit et jaune citron … p.54 Van Gogh : La Nuit étoilée Histoire racontée par Sabine du Mesnil

L’Inca des tropiques … p.57 Gauguin : Arearea no varua ino

Histoire racontée par Sabine du Mesnil

Au paradis endormi de Giverny … p.60 Monet : Nymphéas bleus Histoire racontée par Charlotte Grossetête

Dans la jungle du Jardin des Plantes … p.64 Le Douanier Rousseau : La Charmeuse de serpents Histoire racontée par Sabine du Mesnil

C’est la guerre à Guernica … p.68 Picasso : Guernica Histoire racontée par Sabine du Mesnil

L’ange des couleurs … p.72 Chagall : Les Mariés de la tour Eiffel Histoire racontée par Sabine du Mesnil

Un plongeon dans le lagon … p.76 Matisse : Polynésie, la mer Histoire racontée par Sabine du Mesnil

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Un mariage Ă  la mode

un tableau voyageur Aujourd’hui, tu peux voir ce tableau à Londres, à la National Gallery. Mais depuis sa création au xve siècle, ce tableau est passé de mains en mains. Après les Pays-Bas, il apparaît à Madrid à la fin du xvie siècle. Puis, sans doute volé par les troupes françaises pendant la guerre d’indépendance espagnole, il réapparaît à Bruxelles, où un major anglais l’empor te en Angleterre.

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Les Époux Arnolfini , 1434

– on, Grand-Pa, je n’ai aucune envie de t’accompagner au musée ! La National Gallery, ce n’est pas pour moi ! – Je te comprends, j’étais comme toi à ton âge. Puis j’ai appris à aimer la peinture. Maintenant que je n’y vois presque plus rien, cela me manque ! Alors fais-le pour moi : comme un cadeau de Noël ! Tu me décriras un tableau, et dans mon souvenir, il reprendra des couleurs. Quant à toi, je te promets que tu vas être surpris ! – Bon, d’accord… Nous y voilà ! J’ai choisi pour toi Les Époux Arnolfini… Un monsieur un peu ridicule avec un chapeau grand comme un champignon sur la tête. Tu te souviens ? – Oui… Lui, c’était un banquier italien installé à Bruges, au xve siècle. – À Bruges ? Mais Arnolfini*, c’est un nom italien ! Que vient-il faire dans cette ville du Nord ? Vendre des glaçons ? * En français, on appelait le personnage de ce tableau « Arnoult Fin ». « Fin » comme son grand nez et ses longues mains. Ça lui va bien, non ?

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Jan Van Eyck



Van Eyck, agent secret Peintre ordinaire* du duc de Bourgogne, il est aussi nommé valet de chambre et se retrouve chargé de multiples tâches très variées, notamment de missions diplomatiques. Le duc l’envoie à Lisbonne peindre des por traits de la princesse Isabelle, fille du roi du Por tugal. Le duc dut être conquis par le por trait de sa fiancée, et le mariage fut décidé ! * Cela signifie qu’il suit le duc dans ses déplacements et qu’il peint habituellement pour lui.

– Surely not ! Il y aurait été envoyé par son père, banquier à Lucques, en Toscane. Bruges était une ville dynamique et florissante : on y faisait commerce du drap de Flandre ! Philippe le Bon, le duc de Bourgogne, voulait que sa ville soit aussi rayonnante que Venise ou Florence. Il fallait y être ! – C’était the place to be ! Et l’Italie ne lui manquait pas ? – Si, l’Italie devait bien lui manquer un peu parce qu’à ses côtés se trouve une jolie jeune femme… italienne ! Elle va bientôt devenir son épouse… – C’est elle ? Avec sa grande robe couleur grenouille ? Quelle drôle de coiffure ! On dirait que son voile coule sur ses épaules comme de la crème Chantilly ! Hi hi ! – Alors là, non, on ne rigole pas ! Avec tes yeux tout neufs, admire ce travail ! Tu sais que le peintre, Van Eyck, était miniaturiste ? Un génie du détail, le champion de la finesse ! – Oui, c’est vrai, je vois même les poils fins du chien, et la douceur des fourrures, c’est fou ! Pour revenir à la dame, on dirait qu’elle attend un bébé, non ? – Non, elle prend simplement une pose à la mode de l’époque : un peu cambrée, comme les Saintes Vierges du Moyen Âge. Avec sa main, elle remonte les plis de sa robe sur son ventre. C’est une promesse. Elle est prête à donner la vie ! – Si c’est un mariage, pourquoi ces chaussons rouges qui traînent au fond ? Ça fait désordre ! – Oui, mais c’est très beau. Les fiancés se sont déchaussés, en souvenir d’un vieux passage de la Bible, dans l’histoire de Moïse : « Ôte les chaussures de tes pieds, car le lieu où tu te tiens est une terre sainte. » – Une « terre sainte », le parquet de la chambre ? – Une « terre sainte », le moment où ils vont se marier, en se donnant la

Van Eyck, génie du détail Dans sa jeunesse, Van Eyck fut d’abord enlumineur, et miniaturiste pour Jean III, prince de Liège, surnommé « Jean sans Pitié », qui le contraignait à travailler sur de tout petits suppor ts. Plus tard, Van Eyck garda pour le détail un goût et un savoir-faire inégalé !

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main. C’est un instant important, ils le savent ! – Et ces chaussures rigolotes en bas à gauche ? – Ce sont des sabots de liège qui protègent les pieds de la boue. – Et si l’on est en plein jour, pourquoi cette bougie allumée ? Et, d’ailleurs, pourquoi est-elle toute seule, cette bougie ? C’est un anniversaire ? – Non, c’est un signe d’unité et de présence divine. Ils croient que Dieu est là, avec eux. – Tiens, c’est vrai ! Où sont les témoins ? Normalement, il y a des témoins lors des mariages ! – Regarde bien, ils sont cachés ! Tu les trouves ? – Non, je ne vois personne ! – De mémoire, il y a un objet rond au fond, c’est un miroir. Si tu regardes bien, tu verras nos deux époux, de dos, et deux autres personnages qui assistent au mariage. Et puis au-dessus du miroir une inscription. Le peintre n’a pas seulement signé le tableau, il a écrit : « Jan Van Eyck fut ici ». Le témoin caché, c’est lui ! Le tableau devient presque un document attestant le mariage… Allez, tu veux rentrer à la maison ? – Non, c’est super, dis donc ! On peut rester encore un peu ?

Van Eyck, alchimiste Van Eyck n’a pas inventé la peinture à l’huile, comme on le prétend souvent, mais il a pris l’habitude de mélanger directement de l’huile aux pigments de couleurs. Cela permettait de superposer les couches de peinture, et de donner aux couleurs beaucoup plus de luminosité et de profondeur !

Mystère et boule de gomme… Ce n’est pas le peintre qui donna son titre à ce tableau : aujourd’hui encore, on se pose la question de l’identité exacte des personnages. Peut-être s’agit-il bien des époux Giovanni et Giovanna Arnolfini, mais peut-être pas ! À l’époque, les époux pouvaient se marier en échangeant leur promesse, en se tenant la main droite. Mais si tu regardes bien, l’homme donne sa main gauche. Ce qui voudrait dire qu’il épouse une femme d’origine plus modeste que lui, qui n’héritera pas de ses biens. Il ne s’agirait donc pas de Giovanni Arnolfini (qui, on le sait, épousa une épouse noble) mais de son frère Michele, et de sa fiancée Elisabetha ! 9


s a p t n i e p e n On sans casser des Ĺ“ufs

Sandro Botticelli

La Naissance de VĂ©nus, vers 1585

Maria marche avec précaution dans les rues de Florence. Elle porte,

sans le balancer, un panier contenant les deux douzaines d’œufs commandées par le peintre Sandro Botticelli. C’est la première fois que la fillette est chargée de ce transport, à la place de son frère, qui, trop insouciant, a cassé des œufs lors de sa dernière course. – Signore Botticelli, voici vos œufs, annonce Maria lorsqu’elle atteint enfin l’atelier. – Merci, sourit le peintre. Pas d’omelette, cette fois ? – Non, monsieur.

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La technique de la tempera La Naissance de Vénus a été peinte a tempera. Cette technique, datant de l’Antiquité, consiste à lier les pigments de peinture avec des œufs (tempera maigre) ou avec de la graisse (tempera grasse). Vers l’an 1 500, la technique de la tempera sera remplacée par la peinture à l’huile.

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La Vénus médicéenne Si Botticelli a pris pour modèle la ravissante Simonetta Vespucci, il s’est inspiré pour la posture de Vénus d’une statue antique que possédaient les Médicis dans leur immense collection d’objets d’ar t. Cette statue en marbre, aujourd’hui exposée au musée des Offices, à Florence, comme la Naissance de Vénus, montre la déesse nue à sa sor tie de la mer, un dauphin à ses pieds.

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– Tes parents n’ont bien récolté que des œufs pondus en ville, n’est-ce pas ? Les poules de la campagne font des œufs trop colorés pour obtenir une peinture souple et éclatante. – Oui, mes parents me l’ont expliqué, monsieur. Tout en parlant, Maria promène des yeux émerveillés à travers l’atelier. Des portraits de la Vierge y côtoient des visages de saints ou de nobles aux traits parfaits. Le regard de Maria s’arrête sur un grand tableau posé contre le mur. – Mais… cette dame est toute nue ! s’exclame-t-elle avec la spontanéité de son âge. Botticelli éclate de rire. – C’est Vénus, la déesse de l’amour chez les Romains. La légende dit qu’elle est sortie de la mer après avoir été engendrée par Ouranos, le dieu des origines du monde. Mais regarde ! Même si Vénus est l’une des plus ravissantes déesses de la mythologie – elle fera tourner bien des têtes, croismoi –, elle cache son corps avec soin. – Elle est belle, répond la fillette en observant le visage rêveur de Vénus. Le regard de Botticelli se voile de tristesse. – Oui. Tu es trop jeune pour avoir connu le modèle dont je me suis inspiré. C’était Simonetta Vespucci, la plus belle femme de notre siècle. Elle est morte il y a neuf ans, en 1476. À l’âge de vingt-trois ans… Maria se détourne de Vénus pour jeter un coup d’œil au peintre. Botticelli est ému. A-t-il été amoureux de cette jeune femme ? Pour changer de sujet, la fillette effleure le tableau du doigt : – Ce n’est pas du bois ! Mes parents m’ont dit que vous peigniez sur du bois ! – Tu es observatrice. Il s’agit d’une toile. La famille Médicis m’a commandé ce tableau pour une maison de campagne. Le transport sera plus aisé, et la toile fera bel effet là-bas. À l’évocation des Médicis, la fillette s’incline avec respect. Cette puissante famille règne sur Florence et compte Botticelli parmi ses protégés. – Qui sont ces anges ? demande-t-elle en désignant le couple ailé. La question amuse Botticelli. – Il n’y a pas d’anges dans la mythologie ! C’est Zéphyr, le dieu du vent, qui pousse Vénus vers la côte, aidé de son épouse, la nymphe Chloris. – Et cette dame ? demande Maria en montrant la droite de la toile. – C’est Heure, la déesse du printemps. Elle tend un manteau pourpre à Vénus. La pourpre est une couleur royale : je ne pouvais en imaginer une autre pour la déesse.


– J’aime ce paysage ! s’exclame Maria. On dirait qu’il n’est pas vrai, que c’est un rêve. Votre coquille Saint-Jacques est grande comme un bateau. Je trouve jolie l’écume qu’elle soulève… Botticelli sourit : la fillette, timide à son arrivée, est un vrai moulin à paroles, à présent ! – Et Vénus est si légère qu’elle ne pèse pas sur le coquillage. Comment peut-elle tenir debout ? On dirait qu’elle va tomber ! Le peintre ne se vexe pas : – Légère, c’est le mot. La grâce et la beauté sont légères. Je veux des personnages aériens. Voilà pourquoi les fleurs volent, la brise soulève l’eau, les chevelures et les étoffes dansent aux souffles du vent. Maria a oublié qu’elle tenait toujours son panier à la main. Il penche dangereusement ! Le son de deux coquilles qui s’entrechoquent la ramène à la réalité. – Oh ! dit-elle en déposant sa marchandise sur une table. J’ai failli… Le peintre éclate de rire. – J’aimerais vous voir fabriquer de la peinture, demande Maria. – Je vais te montrer. Allons, cassons-les, ces œufs, mais pas n’importe comment !

Un joli surnom Sandro Botticelli s’appelait en réalité Alessandro di Mariano di Vanni Filipepi ! Au sujet du surnom sous lequel il est devenu célèbre, les historiens ont deux hypothèses. Soit il l’a adopté en l’honneur de l’orfèvre Botticello, ami de son père, chez qui le jeune Sandro avait été placé en apprentissage. Soit il doit ce pseudonyme à son frère, qui, assez corpulent, aurait été surnommé Botticello qui signifie « petit tonneau » en italien !

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Le mystère e m a D a l e d Paysage

LĂ©onard de Vinci

La Joconde, entre 1503 et 1519

« Une déesse sous-marine » As-tu remarqué ? La ligne d’horizon du paysage est très haute. Elle arrive au niveau des yeux de Monna Lisa. Chez les autres peintres, elle est souvent bien plus basse. Selon l’historien d’ar t Kenneth Clark, c’est ce qui donne l’impression que la femme est immergée dans le paysage, comme une « déesse sous-marine ».

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La foule est en liesse en ce jour de juillet 1515. Au cœur de la ville de

Lyon, un messager arrive au triple galop. Il annonce la joyeuse nouvelle de l’arrivée du roi, le jeune François Ier ! La ville a disparu sous sa parure de fête : des tapisseries habillent les murs de couleurs éclatantes, des toiles blanches couvrent les rues comme un ciel de bienvenue ! De belles dames attendent le cortège royal, accoudées aux fenêtres… Voilà le roi ! Il entre dans la ville, au son des fifres et des tambours. Tout à coup, la foule se tait. Un lion s’avance, déployant vers le roi ses pattes menaçantes et ses mâchoires puissantes.


Le sfumato Le terme sfumato désigne les paysages lointains, en fond de toile, peints dans des nuances de gris… avec des contours flous, comme enveloppés dans de la fumée, d’où le terme italien de sfumato.

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Un jeune page s’écrie… – Un automate de M. de Vinci ! – Leonardo, du village de Vinci, en Toscane, précise, à l’oreille du monarque, un ambassadeur italien. – On dit qu’il est curieux de tout, comme moi ! souffle le petit page. – Bientôt, je ferai sa connaissance… songe le roi. Il rêve : il va marcher vers l’Italie, conquérir ses villes… et ses artistes !

Qui a volé la Joconde ? Pendant l’été 1911, la Joconde disparaît du musée du Louvre. La France est sous le choc ! Deux ans plus tard, on la retrouve en Italie. Le coupable, Vincenzo Peruggia, connaissait bien la Joconde ; il avait travaillé comme vitrier au Louvre ! Un soir, il s’était laissé enfermer dans le musée pour s’emparer du chef-d’œuvre… On dit qu’il voulait ramener Monna Lisa dans son pays. Cette affaire a sans doute contribué à rendre ce tableau si célèbre !

Un soir, dans un palais de Bologne, le roi fuit les conversations sérieuses et la musique des danses. Il rejoint Léonard, au calme dans le jardin parfumé d’orangers. Il n’a qu’une idée : l’inviter en France… – Je vous ferai « premier peintre, ingénieur et architecte du roi ! » Très âgé, Léonard hésite… Puis, avant l’arrivée des neiges, il se décide. Il rassemble ses cahiers et ses tableaux dans de grandes sacoches de cuir, et se met en route vers les Alpes… À son arrivée sur les bords de la Loire, le roi l’accueille au château du Cloux. Le petit page l’aide à s’installer. L’enfant découvre la belle Joconde, l’observe… puis se met à courir d’un bout à l’autre de la pièce en regardant le tableau ! – Que fais-tu donc ? lui demande Léonard. – Elle me regarde ! Elle me suit ! s’exclame l’enfant. – Attention ! s’écrie Léonard. – Ses mains ont l’air si proches, si douces ! Je voulais seulement les toucher… Un peu inquiet pour sa toile, Léonard murmure dans sa barbe : « Je vais lui montrer tout le mouvement qu’il y a dans ma peinture, sans bouger ! » – Viens, je t’emmène te promener dans mon tableau, mon petit. Pose ton regard sur ses mains… Tu es prêt ? Moi, je vais à gauche. Je remonte les plis de la robe sur le bras, comme un chemin qui serpente et qui monte. Tiens, je vais explorer ce qui se cache derrière ces rochers. Un trésor, peut-être ? Et toi ?

Une commande jamais livrée ! La Joconde n’a jamais été livrée à son commanditaire, l’époux de Monna Lisa. Alors que Léonard y travaille, il reçoit une lourde commande : peindre une scène de bataille à la gloire de la ville de Florence. Léonard conserve le por trait, qu’il retouchera sans cesse. Il devient même le suppor t de ses réflexions. Par exemple, il y peint un pont, signe du temps qui passe.

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– Moi, je vais à droite, dit l’enfant, j’attrape la lumière sur l’épaule, et hop ! D’un bond, j’arrive sur le pont, je traverse le fleuve. C’est drôle… elle est comme un paysage, cette dame… Mais il sursaute… Le roi ! – Pardonnez-moi d’interrompre votre promenade… Quel magnifique portrait ! Qui est cette femme ? – C’est la Signora Lisa, l’épouse de Francesco del Giocondo. Tout heureux de la naissance de ses deux fils, il m’avait commandé ce portrait, pour embellir son palais. – Elle a l’air en deuil ! Si elle est heureuse, pourquoi ne pas avoir peint des fleurs ? Des oiseaux de couleur ? ose l’enfant. – C’est l’usage, pour les femmes mariées, de porter des voiles ! Et les vêtements sombres sont à la mode en Italie. Pour faire chic, comme à la cour d’Espagne ! Le roi paraît perdu dans la contemplation du tableau. – Je ne peux détacher mes yeux de son sourire. Vous êtes le premier à peindre un tel sourire, n’est-ce pas ? – Un demi-sourire, c’est cela, le secret ! Lisa est une femme respectable. Son sourire est contenu, tout comme la pose de ses mains. Regardez ces mains ! On dirait que l’une va nous dire quelque chose, mais que l’autre la retient ! Le page trouve le temps long. Il commence à s’impatienter. – C’est étrange, on dirait qu’elle est assise dans les rochers ! – Non ! Regarde bien, tu verras autour d’elle les deux colonnes d’une loggia qui se détache du paysage : Monna Lisa se rapproche de nous. Mais l’accoudoir et son bras devant nous forment une double barrière : Monna Lisa s’éloigne. Voilà le mystère ! – Le mystère ? murmurent le roi et le page. – Oui ! Le mystère de cet instant… un petit instant… que j’ai voulu saisir. Grâce à son sourire, cette femme apporte la vie dans ce décor de la nuit des temps.

Léonard, inventeur des effets spéciaux Il ne nous reste aujourd’hui qu’une quinzaine de tableaux de Léonard, mais il a couver t des milliers de feuilles de dessins de machines militaires ou hydrauliques. Fasciné par la mécanique et les automatismes, il a imaginé des jeux d’eaux et de lumières pour les bals et les fêtes, ainsi que les ancêtres de l’hélicoptère ou du scaphandre, avec beaucoup de précision !

Une carte géographique cachée dans le paysage À l’époque où Léonard peint la Joconde, il travaille à réaliser une car te géographique de la Toscane. Le paysage derrière le personnage correspond à la vue de cette car te en perspective. On y voit le lac Trasimène en haut à droite, et le val d’Arno, marécageux, en bas à gauche. Aujourd’hui, ce lac et ces marécages ne sont pas reliés par un cours d’eau, mais ils l’étaient peut-être il y a quelques siècles !

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16,90 € TTC France www.fleuruseditions.co m

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