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Voulons-nous d’un retour à l’(a)normal ? MWB 24 N° 5 • Mai 2020

Sans que nous n’ayons été consultés, le déconfinement s’amorce. Il amène son lot d’inquiétudes pour les travailleurs et les travailleuses que nous représentons. Notre organisation a mis toute son énergie pour que cette reprise des activités se passe dans les conditions les plus strictes possibles en matière de santé et sécurité.

Avec ce déconfinement, le temps des grandes réflexions semble avoir débuté sur l’après COVID et certains prétendent que ce déconfinement est une première étape vers un retour « à la normale » ?

Ce n’est donc pas la fin d’un chemin qui se présente à nous, mais le début de luttes décisives. ’’

Hillal Sor, Secrétaire général

Même si nous aspirons tous légitimement à pouvoir reconquérir certaines libertés qui ont été mises sous l’éteignoir par le confinement, avons-nous intérêt à retrouver cette normalité tant attendue ? Une normalité dans laquelle les travailleurs devraient être de plus en plus flexibles ? Une normalité dans laquelle les allocataires sociaux vivent en dessous du seuil de pauvreté ? Une normalité dans laquelle les richesses se concentrent de plus en plus dans les mains d’une poignée ? Une normalité qui amène des sociétés entières à sacrifier les plus âgés dans les maisons de repos car elle a été désarmée par le sous-financement des pouvoirs publics ?

De cette normalité là, il est clair que nous n’en voulons pas ! Pas plus que d’un retour à une normalité, où comme après chaque crise, on fait payer la note aux travailleurs.

Pour les Métallos FGTB le message est clair : nous ne paierons pas une deuxième fois la crise.

Mais il ne suffit pas de le dire, nous devons créer les conditions d’un basculement vers un futur à construire. Nous devons créer les conditions d’un changement politique et social au sortir du confinement, en nous appuyant sur les leçons de la gestion désastreuse de la pandémie.

Cela passera par la redéfinition d’une nouvelle conscience de classe, la conscience des intérêts communs des travailleurs (avec ou sans emploi) au-delà des secteurs et des frontières. Les intérêts communs de ceux qui sont les grands perdants du triptyque globalisation / financiarisation / austérité. Les intérêts communs de ceux qui, en première ligne, ont permis à notre société de tenir debout pendant que le « élites » économiques avaient fui le champ de bataille.

Ce n’est que sur cette base que nous pourrons établir le rapport de force nécessaire autour de ceux qui, unis, représentent une force majoritaire pour empêcher ce retour à l’(a)normal.

Ce n’est donc pas la fin d’un chemin qui se présente à nous, mais le début de luttes décisives. Les Métallos de la FGTB y sont prêts.

Ensemble, on est plus forts !

Métallurgistes Wallonie-Bruxelles

L’aéroport de Liège, tête de pont

On a beaucoup parlé de l’aéroport de Liège, en ces temps de pandémie. Pas tant pour des questions de fermeture, de maladies dans le personnel ou de problèmes d’application des réglementations, non. Mais parce que, dans le combat contre le virus, le hub de Liège a été une pièce essentielle, notamment dans le cadre de l’arrivée des fameux masques, quels qu’ils soient.

L’arrivée par avion de produits venus de Chine était, pour certains, une aberration dans les circuits économiques. L’annonce du choix de Liège par un des géants du commerce en ligne, le chinois Alibaba, avait été accueillie de manière extrêmement critique dans certains milieux locaux, qui allaient même jusqu’à demander l’interdiction de ces vols. On peut espérer que la pandémie aura, sur ce plan, ramené la raison. Liège Airport est devenu, au fil des ans, un des maillons essentiels du tissu économique liégeois. Un maillon générateur d’emplois directs ou indirects. Un maillon contrôlé par un tissu syndical solide, empêchant les dérives de type dumping social. Un maillon à ne pas affaiblir, au risque de fragiliser encore plus l’économie locale.

Comment les travailleurs ont-ils vécu, au quotidien, cette période chahutée ? De manière assez similaire, quelle que soit l’entreprise concernée… Des premiers moments un peu tendus avant la définition et la mise en places des règles et des protections. Puis, un travail plus serein, mais dans un climat de grande vigilance. Un accroissement de la charge de travail, parfois. Et l’attente, désormais, d’un retour à une certaine normalité.

Petit tour de démonstration dans certaines entreprises symboliques des lieux Liège Airport, tout d’abord. Ici, on s’occupe de faire fonctionner la structure : avitaillement (c’est-à-dire fourniture de carburant aux avions), détermination et transmission des plans de vol, entretien de la signalisation au sol… « Il y a eu un peu de flottement au début » explique Luc Hocke, le président de la délégation FGTB Métal. « Notre activité est indispensable pour le fonctionnement de l’aéroport en général, et nous avons craint d’être touchés par la maladie, ce qui aurait eu de grosses conséquences en aval. On ne savait pas non plus quel volume d’activité allait être maintenu. Et il y a eu bien sûr des frictions sur la mise en œuvre des procédures et sur la fourniture du matériel de protection. Il a quand même fallu un peu taper du poing sur la table. Mais nous avons pu obtenir très vite que tout soit mis aux normes. Le volume de nos activités n’a pas baissé, et nous avons eu la chance, il faut bien le dire, de ne pas déplorer de malades. »

de vols en provenance de Chine, dont les fameux masques ». De quoi flipper un peu en effet, d’autant que le tonnage traité a flambé de 30 % environ. « C’était plus encore que d’habitude du non-stop, des heures supplémentaires... Nous avons pu organiser tout cela au mieux. » Une nouvelle étape pour une entreprise qui emploie près de 400 travailleurs et qui, avant la crise, avait connu quelques vagues d’embauches et de passages CDD vers CDI. « Les gens sont suivis, se réjouit Caudio, même si les précautions à prendre ne sont pas toujours facile à suivre au quotidien… On en revient progressivement au régime normal, même si on peut rien prévoir encore pour l’avenir, notamment sur le plan des produits frais qui, eux, ont été impactés. » Mais tout le monde sent bien, ici, que la croissance de Lachs sur Bierset n’est pas finie et doit être soutenue par tous les acteurs.

Quelques hangars plus loin, nous voici chez Fedex, un des mastodontes mondiaux du secteur et, avec 1.800 travailleurs, la plus grosse boîte de l’aéroport de Liège. « C’était évidemment complexe à mettre en place » explique le président de la délégation FGTB Métal Hassan Lyazghi. « Il y a des problèmes pratiques. Par exemple, il est strictement impossible de charger en soute en respectant les règles de la distanciation sociale. Il a donc fallu décider de ne pas utiliser les soutes et se contenter de charger par le haut dans le fuselage. » Les matériels de protection ont été fournis en abondance et la décision a été prise de réunir, une fois par semaine, un CPPT extraordinaire pour débattre des problèmes constatés. Il a aussi fallu organiser une certaine souplesse à la pointeuse, tant à l’entrée qu’à la sortie, pour éviter d’ingérables bouchons (et des pertes de prestation…) devant les machines. Sur le plan du volume, Fedex, peu impliqué dans le traitement des produits liés au virus, contrairement à Lachs, a évidemment souffert de l’effondrement du commerce mondial. « En journée, pour les volumes cargo, on a perdu certains jours 80 %. La nuit, en express, on allait avec des pertes de l’ordre de 40 %. Cela a eu des conséquences, bien sûr, pour les intérimaires auxquels on fait appel en journée », déplore Hassan. Qui croise évidemment les doigts pour un retour à la normale qui semblait poindre au moment d’écrire ces lignes.

Ceux qui n’ont jamais visité l’aéroport ou n’ont jamais parlé avec les travailleurs donnent souvent des conditions de travail à Liège une image désastreuse. La crise Covid aura montré que la réalité de terrain était toute autre, avec la capacité des Métallos de la FGTB à imposer, sur le site, respect strict de dignes conditions de travail et développement des activités. n

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