Compte rendu du colloque :
« Identification, saisie et confiscation des avoirs criminels » Strasbourg 15 septembre 2009
15 septembre 2009
colloque
Chantal CUTAJAR
Le colloque « Identification, saisie et confiscation des avoirs criminels », placé sous le haut patronage de Jacques Barrot, vice-président de la Commission européenne, a été organisé par le GRASCO (Groupe de recherches approfondies, Laboratoire du Centre du droit de l’entreIdentification, saisie prise de l’Université de Strasbourg) sous la direction scientifique de Chantal Cutajar, directeur, et confiscation des avoirs criminels professeur affilié à l’École de management de Strasbourg. Dans une communication au Parlement européen et au Conseil, « Produits du crime organisé, garantir que le crime ne paie pas » du 20 novembre 2008 (COM(2008) 766 final), la Commission européenne propose dix priorités stratégiques pour améliorer la confiscation et le recouvrement des produits du crime en « frappant les criminels au point le plus sensible » (Jacques Barrot). La confiscation des produits du crime constitue, en effet, l’un des moyens les plus efficaces pour contrer la criminalité organisée. En ce domaine, une action européenne est indispensable parce que les criminels profitent de la liberté de circulation au sein de l’Europe. Le colloque, qui a réuni des personnalités du monde de l’université, de la justice, de la gendarmerie, de la police, des douanes et des institutions européennes, a permis de mettre en perspective l’état du droit français et les pratiques policières et judiciaires au regard des priorités stratégiques préconisées par la Commission européenne. Il constitue une contribution importante au développement d’un arsenal communautaire plus efficace pour lutter contre la criminalité organisée dans le respect des libertés individuelles. Sous le Haut patronnage de Jacques BARROT, Vice-Président de la Commission européenne
Renseignements pratiques Droits d’inscription • 50 €
• Exonération de droits d’inscription pour les étudiants et les enseignants de l’Université de Strasbourg, les magistrats, policiers et gendarmes
Contact
Virginie Renaud Ecole de Management Strasbourg 61, avenue de la Forêt-Noire 67085 Strasbourg cedex tél: 03.90.41.42.51 virginie.renaud@em-strasbourg.eu
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Lieu du colloque
depuis l’aéroport : • Navette train gare Entzheim à gare Strasbourg
École de Management Strasbourg Amphi commun 61, avenue de la Forêt-Noire 67000 Strasbourg
depuis la gare de Strasbourg : • Tram A direction Illkirch Changement station «Homme de Fer» • Tram C direction Esplanade Arrêt «Observatoire»
Centre du Droit de l’Entreprise
Le constat Les quatre décisions-cadres prises pour garantir, au sein de l’Union européenne, une approche commune en matière de confiscation en 2001 (décision-cadre 2001/500/JAI du Conseil du 26 juin 2001 concernant le blanchiment d’argent, l’identification, le dépistage, le gel ou la saisie et la confiscation des instruments et des produits du crime, JO L 182 du 5.7.2001, p. 1) ; 2003 (décision-cadre 2003/577/JAI du Conseil du 22 juillet 2003 relative à l’exécution dans l’Union européenne des décisions de gel de biens ou d’éléments de preuve, JO L 196 du 2.8.2003, p. 45) ; 2005 (décision-cadre 2005/212/JAI du Conseil du 24 février 2005 relative à la confiscation des produits, des instruments et des biens en rapport avec le crime, JO L 68 du 15.3.2005, p. 49) et 2006 (décision-cadre 2006/783/JAI du Conseil du 6 octobre 2006 relative à l’application du principe de reconnaissance mutuelle aux
décisions de confiscation, JO L 328 du 24.11.2006, p. 59) n’ont été que partiellement et inégalement transposées par les États membres. En outre, le principe de reconnaissance mutuelle des décisions de justice, un des piliers de la justice européenne, est mis à mal par des textes déficients.
Préconisations de la Commission européenne Pour parvenir à priver les criminels des profits générés par les trafics illicites, la Commission a donc dégagé dix priorités qui, mises en œuvre, pourraient modifier profondément le dispositif de confiscation des avoirs criminels à l’échelle européenne, et partant celui des États membres. Ces dix priorités s’articulent autour de préconisations concernant la refonte du cadre juridique européen de la
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confiscation, la mise en place effective des bureaux de recouvrement des avoirs (BRA) et la mise en œuvre efficace des procédures de confiscation dans les États membres.
Les conclusions du colloque La Première session Placée sous la Présidence de Jacques Beaume, procureur général près la Cour d’appel de Colmar, intitulée « Vers une refonte du cadre juridique européen ? », elle a été l’occasion de faire le point sur la faisabilité juridique et l’opportunité politique d’introduire en France « La confiscation des avoirs criminels sans condamnation pénale » (Chantal Cutajar, université de Strasbourg). Une analyse détaillée du « délit français de non-justification de ressources : retour d’expériences » (Alexandre Malo, direction générale de la Gendarmerie nationale) et de « L’obligation de fournir des informations sur les comptes bancaires : le fichier français FICOBA » (Hervé Robert, Juridiction interrégionale de Paris) met en lumière deux mécanismes susceptibles d’être étendus à l’échelle européenne. Enfin, la présentation de « La proposition de loi visant à faciliter la saisie et la confiscation en matière pénale » (Maxence Delorme, direction des Affaires criminelles et des Grâces, ministère de la Justice) a permis de situer la France dans l’ordonnancement juridique européen relatif à la captation des avoirs criminels.
Confiscation sans condamnation pénale La question de la consécration à l’échelle européenne de la confiscation des avoirs criminels sans condamnation pénale fait débat. Cette procédure n’est pas une création ex nihilo de la Commission européenne. S’il est vrai que dans la plupart des États membres, la confiscation est une sanction liée à une condamnation pénale, certains États comme l’Italie l’ont adoptée pour tenter de freiner l’expansion économique des mafias. En dehors de l’Union européenne, le même type de procédure a été adopté par plusieurs États dont le Canada et les USA. La confiscation sans condamnation pénale poursuit une finalité propre. L’objectif exclusif des organisations criminelles est d’accumuler des profits illicites et de les blanchir en les réinjectant dans les circuits économiques licites. Cette procédure vise uniquement à intercepter ces actifs pour éviter qu’ils ne gangrènent l’économie licite. Par exemple, dans la procédure italienne, le tribunal peut ordonner la 212
saisie des biens dont dispose la personne contre laquelle la procédure a été engagée si deux conditions sont réunies. Tout d’abord, des indices suffisants, tels que la disproportion considérable entre le train de vie et les revenus apparents ou déclarés doivent permettre d’estimer que ces biens constituent le produit d’activités illicites ou leur emploi. Ensuite, la personne faisant l’objet de la procédure doit appartenir à une organisation « de mafia ». Si la provenance légitime des biens n’est pas démontrée, le tribunal ordonne la confiscation des biens saisis. Dans le cas contraire ou si la demande de confiscation est rejetée, il révoque la saisie. Dans sa communication, la commission vise trois hypothèses dans lesquelles une confiscation sans condamnation préalable pourrait être envisagée. La première concerne le cas où il est soupçonné que les avoirs concernés sont le produit de graves infractions, compte tenu de leur disproportion par rapport aux revenus déclarés de leur propriétaire et du fait que celui-ci entretient habituellement des contacts avec des personnes connues pour leurs agissements criminels. La seconde vise l’hypothèse où la personne soupçonnée de certaines infractions graves est décédée, en fuite depuis un certain temps ou ne peut, pour tout autre motif, faire l’objet de poursuites. Enfin, la confiscation sans condamnation pénale pourrait être envisagée lorsque de l’argent liquide est saisi par les autorités douanières en violation du règlement communautaire relatif aux contrôles de l’argent liquide entrant ou sortant de la Communauté. La question de savoir si le droit français peut envisager d’accueillir une procédure de confiscation en dehors de toute condamnation pénale n’a pas fait l’unanimité. Pour Maxence Delorme, qui s’exprimait au nom de la Chancellerie, une telle procédure ne serait pas compatible avec le droit constitutionnel français. L’auteur de ces lignes s’est appliqué à démontrer au contraire l’absence d’obstacles juridiques dirimants. Pour que le droit puisse accueillir une nouvelle institution, il faut que celle-ci puisse se couler dans un moule, dans une catégorie juridique qui permettra de la soumettre au régime juridique correspondant. La confiscation sans condamnation pénale pourrait se couler dans le moule des mesures de sûreté. En effet, la confiscation sans condamnation pénale vise à faire cesser une situation dangereuse en dehors de toute notion de culpabilité, et cela, indépendamment de toute idée de faute. Elle répond à la définition des mesures de sûreté qui poursuivent une finalité qui leur est propre, qui ne se rapportent pas à l’accomplissement d’un acte illicite déterminé, mais à un ensemble de comportements constituant la conduite que la loi érige en signe d’un danger social. La qualification de mesures de sûreté présente des avantages certains tant en ce qui concerne le principe de
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l’application immédiate de la loi nouvelle qu’en ce qui a trait au respect de la présomption d’innocence. S’il n’existe pas d’empêchement dirimant qui interdise d’introduire en droit français la confiscation sans condamnation pénale, une loi serait néanmoins nécessaire pour l’introduire dans l’ordonnancement juridique français. En effet, aux termes de l’article 34 de la constitution, la loi détermine les principes fondamentaux du régime de la propriété. Toute atteinte au droit de propriété doit être faite dans le respect des droits fondamentaux et du principe de proportionnalité. Si la faisabilité juridique est démontrée, l’opportunité politique d’introduire en droit français la confiscation sans condamnation pénale n’est cependant pas démontrée. À l’heure où l’on ne cesse, à raison, de critiquer l’inflation législative et la croyance naïve en l’effet magique de la loi, la question de savoir si le pouvoir politique doit ou non légiférer mérite d’être passée au crible d’un double critère : le principe d’utilité et le principe de justice. Une telle loi ne devrait s’imposer au pouvoir politique que si elle est utile et juste. Cet examen doit être conduit dans l’ordre interne et dans l’ordre international. En effet, apprécier l’utilité d’introduire en France une nouvelle procédure de confiscation en dehors de toute condamnation pénale nécessiterait avant tout de dresser un état des lieux précis de la mise en œuvre des procédures de gel/saisie et confiscation. Les témoignages parcellaires sur l’inadaptation du dispositif de confiscation ne permettent pas de conclure avec certitude à l’utilité de l’introduction d’une telle procédure. Dans l’ordre international, la question revêt une importance considérable dans le cadre de la coopération judiciaire, notamment avec l’Italie. Un arrêt rendu le 4 juin 2009 par la 2e Chambre civile de la Cour de cassation illustre la complexité des procédures exercées sur le fondement des dispositions de la loi du 13 mai 1996 (la saisie du produit du blanchiment sur le territoire français, note sous Civ. 2e, 4 juin 2009, D. 2009, 2250) en matière de saisie et de confiscation des produits du crime dans un contexte de coopération internationale. Dans le prolongement de l’arrêt Crisafulli qui a donné lieu à un arrêt du 13 novembre 2003, la Cour de cassation fait droit à l’exécution en France d’une décision de confiscation préventive prononcée par les juridictions italiennes. En conclusion, si, en droit, la confiscation sans condamnation pénale est juridiquement envisageable, il n’est pas démontré qu’elle soit opportune. Elle ne saurait être envisagée sans qu’un état des lieux précis ne soit effectué sur la mise en œuvre des procédures existantes. Il conviendrait, en outre, de prendre en compte les effets de la nouvelle saisie pénale instituée par la proposition
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de loi Warsmann. Il faut garder en mémoire, en effet, que les lois inutiles affaiblissent les lois nécessaires (Montesquieu, L’Esprit des lois).
La seconde session Elle a réuni, sous la présidence de Jean-François Thony, directeur de l’École nationale de la magistrature, les participants à la table ronde sur la reconnaissance mutuelle des décisions de gel et de confiscation. Universitaire (Juliette Lelieur, université de Rouen), magistrat de liaison (Teresa Angela Camelio, Italie), représentant d’Eurojust (Gérard Loubens), de la Gendarmerie nationale (Nicolas le Coz), de la Commission européenne (Peter Csonka), du ministère de la Justice français (Maxence Delorme), du Réseau judiciaire européen (Claude Lafont) et du GRECO (Christophe Speckbacher, Conseil de l’Europe) ont ainsi pu mettre en évidence les carences de la reconnaissance mutuelle des décisions de gel et de confiscation sur le fondement des décisions-cadres du 22 juillet 2003 et du 6 octobre 2006. Les débats ont permis d’identifier des difficultés inhérentes au fonctionnement des décisions-cadres elles-mêmes. Il apparaît ainsi que les délais de transposition ne sont pas respectés. Le praticien rencontre des difficultés pour déterminer les États où la décision-cadre est applicable. Les certificats aux fins d’exécution de la décision interne se révèlent d’une grande complexité à renseigner pour des praticiens peu ou pas formés. La décision-cadre sur le gel est plus particulièrement difficile à mettre en œuvre. Outre qu’elle présente un caractère facultatif, il s’avère impossible de mettre en œuvre les investigations susceptibles d’assurer la réalisation effective du gel, par exemple, une perquisition ou bien le transfert du bien vers l’État requérant. Par ailleurs, elle ne vise que les biens présentant un lien avec l'infraction, alors que les décisions-cadres sur la confiscation concernent la possibilité de confiscations élargies à l'ensemble du patrimoine. Il y a donc une discordance entre les champs d'application de la décision-cadre 2003/577/JAI sur le gel et celle référencée 200/783/JAI sur la confiscation, alors qu'elles sont susceptibles d'être mises en œuvre l'une à la suite de l'autre dans une même procédure. Les praticiens en viennent légitimement à s'interroger sur la plus-value apportée par la décision-cadre sur le gel par rapport aux instruments classiques résultant des conventions sur l'entraide pénale du 20 avril 1959 (au sein du Conseil de l'Europe) et du 29 mai 2000 (au sein de l'Union européenne). D’autres difficultés sont directement liées au système juridique français. Ainsi, jusqu’à une période récente, il existait une corrélation parfaite entre le contenu de la 213
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législation et la culture du magistrat en ce sens que seuls pouvaient être saisis et confisqués les éléments de preuve, l’instrument et l’objet du crime. Il était nécessaire d'établir un lien direct entre la chose confisquée et l’infraction. L’élargissement du champ des confiscations entraîne des difficultés, notamment pour déterminer le type de confiscation, obligatoire ou facultative, élargie aux biens dont le condamné n’a pu justifier l’origine, ou à la totalité du patrimoine qui peut correspondre à tel type d’infraction, ou encore pour déterminer dans quels cas une saisie préalable peut intervenir. Une autre source de difficulté provient du maintien de la procédure civile pour la saisie et la confiscation de biens meubles immatériels ou d’immeubles et de l’empilage des lois de transposition des conventions internationales en matière de saisie et de confiscation. En réalité, les ouvertures législatives constatées n’ont pas entraîné une modification fondamentale de la culture du magistrat. Quand elles existent, les nouvelles décisions de confiscation pèchent parfois par un défaut de motivation, notamment d'indication de la base juridique qui les justifient. En tout état de cause, les décisions des cours d'assises statuant en matière de criminalité organisée sont, quant à elles, juridiquement non motivées, ce qui peut entraîner des difficultés pour l'exécution à l'étranger des mesures de confiscation qui auraient été prononcées dans ce cadre. Ces constats ont amené les participants à formuler des propositions. Ainsi, conviendrait-il, au plan international, de séparer la recherche à l’étranger des éléments de preuve et la saisie d’éléments de patrimoine situés sur un territoire étranger et pouvant faire l’objet d’une confiscation ultérieure. La création d’un site internet au niveau de l’Union européenne, peut-être dans le cadre du Réseau judiciaire européen en matière pénale, pourrait permette de connaître facilement l’état de transposition des décisions-cadres, plus particulièrement de celles qui constituent la mise en œuvre du principe de reconnaissance mutuelle des décisions de justice en matière pénale. Les magistrats souhaitent attirer l'attention sur le fait que, pour parfaitement compréhensibles qu'elles soient sur le plan politique, les initiatives, décisions qui aboutissent à la création de plusieurs espaces judiciaires, même au sein de l'Union européenne, par le biais notamment des coopérations renforcées, sont sources de difficulté pour les praticiens (Claude Lafont).
représentant de la Plateforme d’identification des avoirs criminels (Romain Stieffel, adjoint de la PIAC, ministère de l’Intérieur), d’Europol (Wolfgang Nöske), d’Eurojust (Gérard Loubens), de la douane judiciaire (Laurence Larhant) et du Réseau Carin (Brigitte Marmeys). Une lutte efficace contre la criminalité organisée exige que les États membres de l’Union européenne échangent rapidement les informations permettant le dépistage et la saisie des produits du crime et, plus généralement, des biens appartenant aux criminels. Pour faciliter cet échange d’informations, sur demande ou de manière spontanée, la décision n°2007/ 845/JAI du Conseil du 6 décembre 2007 prévoit la mise en place, au sein des États membres, de bureaux nationaux de recouvrement des avoirs ayant des compétences dans ces domaines. La décision du 6 décembre 2007 cantonne le rôle des BRA au dépistage, à l’identification, la préparation des saisies et l’échange de renseignements, c’est-à-dire pour toutes les phases essentielles qui vont permettre, en amont, la récupération des avoirs criminels. Le bureau ne dispose donc d’aucune compétence en matière de recouvrement au sens français du terme. Cependant, la communication de la Commission au Parlement et au Conseil du 20 novembre 2008 propose d’élargir le rôle des BRA à la gestion des avoirs saisis. En France, c’est la Plateforme d’identification des avoirs criminels (PIAC) qui a été désignée, par décision du 8 avril 2009 du secrétariat général des Affaires européennes du Premier ministre, comme « bureau de recouvrement des avoirs » pour la France. Au 15 septembre 2009, quatorze BRA avaient déjà été créés au sein des États membres. Nous assistons à la naissance et au développement d’un nouvel outil pour la lutte contre la criminalité organisée transfrontière. Celui-ci implique néanmoins, pour être performant, une collaboration active entre BRA. La Commission européenne, en collaboration avec Europol, vient de créer une plate-forme de recouvrement des avoirs qui se réunira trois fois par an pour discuter de questions d’ordre juridique et assurer l’échange d’informations opérationnelles entre BRA. Dans tous les cas, Europol aidera les États membres dans cette entreprise, notamment en mettant à leur disposition des canaux sécurisés pour l’échange d’informations déjà disponibles. Eurojust devrait également participer à cette coordination. (Jérôme Lasserre-Capdeville).
La quatrième session La troisième session Elle a réuni autour d’une table ronde sur « Le bureau de recouvrement des avoirs », présidée par Claude Mathon, avocat général à la Cour de cassation, un universitaire (Jérôme Lasserre-Capdeville, université de Strasbourg), un 214
Elle a réuni autour de David Galtier, général de brigade, sous-directeur de la Police judiciaire à la direction générale de la Gendarmerie nationale, un universitaire (Olivier Ribaux, université de Lausanne), des magistrats (Philippe Bourion, vice-procureur à la section financière du
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parquet de Paris ; Hervé Robert, vice-président chargé de l'instruction à la Juridiction interrégionale de Paris), des représentants de la Commission européenne (Christian Tournie), des douanes (Denis Bertuit, direction nationale du Renseignement et des Enquêtes douanières ; Laurence Larhant, SNDJ), de la police (Christophe Perez-Baquey, chef de l'Office central pour la répression de la grande délinquance financière) et de la gendarmerie (François Giere, chef de bureau de la police judiciaire de la direction générale de la Gendarmerie nationale), pour aborder la question du renforcement des enquêtes financières et de l’analyse financière criminelle. La table ronde a permis de mettre en évidence que l’ensemble du dispositif qui inclut les enquêtes financières est encore en construction. Ces enquêtes spécifiques visent à apporter les éléments constitutifs qui permettront aux magistrats de prendre des mesures de saisie et de confiscation des avoirs criminels. Elles cherchent, par exemple, à identifier des avoirs criminels par la détection de flux atypiques ou à montrer la constitution frauduleuse et l’ampleur d’un patrimoine. Que l’argent ciblé circule par des transactions électroniques ou des transferts physiques, tout l’édifice de lutte repose sur la capacité de traiter suffisamment rapidement et solidement des informations. Il est donc impossible de mener à bien ces enquêtes sans pouvoir accéder à l’information, en maîtriser les flux, l’échanger, la visualiser et raisonner dans un cadre structuré et harmonisé afin d’assister des enquêteurs et des magistrats qui travaillent souvent en équipe, à l’échelle internationale et dans plusieurs langues. C’est ainsi que l’analyse criminelle se couple aux enquêtes financières pour former l’analyse financière criminelle. La constitution de cette discipline a débuté depuis quelques années en Europe et se perçoit résolument comme un moyen de renforcer l’ensemble du dispositif. La table ronde a permis de constater que
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le dispositif qui consiste à cibler les avoirs criminels se met en place. Les instruments juridiques, les organisations, les méthodes, et les outils informatisés évoluent et se combinent. Beaucoup de structures et d’acteurs sont en mouvement simultanément pour rechercher un équilibre vers un système efficace et efficient respectueux des libertés fondamentales. Cela pose inévitablement des séries de problèmes qui se résolvent en fonction des situations rencontrées. Les avis et les sensibilités divergent sur les mesures les plus appropriées et les cultures professionnelles se confrontent. Mais les postulats fondamentaux semblent être acceptés, tels que la nécessité de cibler les avoirs criminels, de procéder à l’échelle internationale, de développer de nouvelles méthodologies et outils d’enquêtes et d’intégrer l’analyse financière criminelle dans le dispositif. Si les instruments juridiques font l’objet d’une attention particulière au-delà du système judiciaire, en revanche, le développement des méthodes et outils d’enquêtes reste encore confiné dans les environnements policiers et judiciaires qui les pratiquent. Pourtant, les universités proposent leurs services et leur expérience pour aider à conceptualiser, à développer et à tester de nouvelles approches, ainsi qu’une infrastructure et des compétences dédiées à l’enseignement. Mais c’est encore d’autres cultures qu’il s’agit de (ré)concilier. Pour cela, le prestige des institutions et les compétences formellement attestées par des titres et des fonctions ne suffiront pas. Le succès résidera dans l’engagement des acteurs et leur volonté de créer des relations de confiance (Olivier Ribaux).
Chantal CUTAJAR, Directrice du Master 2 « Prévention des fraudes et du blanchiment » à l’Université Robert Schumann à Strasbourg
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