MASTER « Architecture, Villes, Ressources » ENSAG 2015-2016
Gildwen Mallejac & Valentin Poirson Directrice d’étude Clémence Dupuis
女川町
Onagawa : le nouveau rivage de tohoku
MASTER 「建築都市リソース」 ENSAG 2015-2016
Gildwen Mallejac & Valentin Poirson 研究のディレクター Clémence Dupuis
女川町
女川:新しい海岸東 北
フランス語版
SOMMAIRE
*. INTRODUCTION 1. DÉCROCHAGE D’UNE VILLE PROSPÈRE
1.1 Le développement d’Onagawa 1.2 Exode périurbain 1.3 Le choc du 11/03
14 28 42
2. RÉACTION POST-CATASTROPHE
2.1 En attendant ... 2.2 Plan de reconstruction 2.1 Un changement nécessaire
54 68 82
3. LE NOUVEAU RIVAGE
3.1 3.2 3.3 3.2
Ruralisation : l’opportunité d’un nouvelle attractivité Reconstruire à l’abri Un quartier résidentiel à développer Le lien de sol «Chi.en»
#. CONCLUSION
90 104 112 120
*
*
INTRODUCTION
Onagawa, petite ville japonaise de moins de 7000 habitants, est à un tournant de son histoire.
C’est dans la région montagneuse de Tohoku (signifiant littéralement «Nord-Est») et plus particulièrement dans la préfecture de Miyagi que se situe la petite ville portuaire. La région est connue pour son climat difficile et son paysage accidenté, effectivement les massifs en amande de la chaîne des ``monts Ou’’, sont souvent recouverts de neige et entourés de nappes de brume.
Onagawa située face à l’océan Pacifique jouit d’un climat plus tempéré que dans le reste de la région et sa configuration géographique de Ria (port naturel) lui a valu de se développer comme un des ports de pêche majeur de la région. Dans les années 80, malgré la baisse économique liée à son activité maritime, la ville a connu une période économique florissante grâce l’arrivée d’une centrale nucléaire sur son territoire. La ville a alors développé des infrastructures et des services qui lui ont garanti une bonne attractivité résidentielle et l’accueil de nombreuses PME dans les années 90. Mais comme bon nombre de secteurs périurbains au Japon, Onagawa connaît depuis les années 2000, une déprise démographique préoccupante, et si la ville peut toujours compter sur son activité portuaire, elle peine pourtant à retenir ses habitants.
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La situation d’Onagawa fait écho à l’état général du Japon, caractérisé par une santé économique en convalescence (crise boursière et immobilière de 1990), ainsi que par une décroissance démographique générale amorcée en 2005. On assiste alors à un nouvel exode rural, puisque les populations suivent le travail dans les grands centres métropolitains, où se crée aussi un phénomène d’opportunité résidentielle grâce à la chute des prix de l’immobilier. A l’heure où la ville doit se reconstruire à la suite du passage destructeur d’un tsunami de 15 m de haut , quelles pourraient être les ressources et les offres qui parviendraient à redonner de l’attrait à ce petit territoire coincé entre la montagne et la mer? Alors que les villes touchées, rehaussent le niveau des sols et érigent à prix d’or de nouvelles digues pour accueillir des taux de population qu’elles ne connaîtront plus. Nous nous positionnons ici dans le scénario de la mise en place d’un nouveau dialogue entre la ville et son rivage, permettant de miser sur la richesse de ses ressources naturelles et le potentiel touristique de son paysage remarquable. Le projet considère alors la proximité de grands centres urbains et d’un accès ferroviaire direct pour proposer une offre touristique ainsi qu’un outil de travail et de cohésion social pour les habitants restés sur place malgré les difficultés.
JAPON, RÉGION DE TOHOKU, PRÉFECTURE DE MIYAGI.
Tohoku IDÉCROCHAGE ntroduction D’UNE VILLE PROSPÈRE
MIYAGI
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Carte personnelle
PRÉFECTURE DE MIYAGI Ce territoire est bordé par de hautes montagnes à l’ouest et le long de la côte nordest, cependant la plaine centrale entourant Sendai, sa capitale, est très large. Bien que la pêche et l’agriculture soient importantes dans cette préfecture, l’économie est dominée par les industries implantées autour de Sendai (la plus grande ville de Tohoku avec 1.063.103 habitants), en particulier l’électronique, l’électroménager et l’agroalimentaire.
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Carte personnelle
AIRES URBAINES D’ISHINOMAKI ET D’ONAGAWA
DÉCROCHAGE D’UNE VILLE PROSPÈRE
A une cinquantaine de kilomètres au Nord-Est de Sendai, Onagawa prend place à l’entrée de la presqu’île d’Oshika (la corne de Miyagi). La ville est la voisine directe d’Ishinomaki, une ville moyenne de 160.847 habitants, connue pour son port de pêche et son inclination pour la culture Manga. Les deux villes sont séparées par la baie du Mangokuura et leurs périphéries bâties sont distantes de seulement 3 Km.
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Carte personnelle
ONAGAWA GÉOGRAPHIE EN RIA
1 DÉCROCHAGE D’UNE VILLE PROSPÈRE Onagawa fait partie de ces petits secteurs ruraux
japonais qui par la proximité d’une aire urbaine proche en développement, se sont transformés en secteurs résidentiels et zone d’activités périurbaines. Mais après une croissance importante la ville est affectée successivement par un phénomène de désetalement urbain que connaît le Japon aujourd’hui et par une catastrophe naturelle majeure qui a frappé les côtes du Tohoku.
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1.1
LE DÉVELOPPEMENT D’ONAGAWA Proche d’un centre urbain important, dans une petite enclave naturelle accessible directement par le train, s’est développée une petite ville prospère.
ORIGINE
O
« na-gawa» signifie «la rivière des femmes» en japonais, ce nom lui a été donné à la suite d’une ancienne bataille entre deux clans de samouraï. La guerre de Zenkunen ou l’Ancienne guerre de neuf ans est une lutte pour le pouvoir dans la région de Tohoku entre 1051 et 1063. Le clan Abe qui contrôlait la région, avait alors perdu les faveurs du clan impérial qui envoya une armée les assaillir. Rapidement mis en difficulté, le clan Abe finit acculé dans le port d’Onagawa. Mais ce jour-là, un massacre fut évité. A la discrétion d’un épais brouillard qui montait de la mer vers les reliefs environnants, le clan put évacuer les femmes et les enfants en longeant un ruisseau appelé Onagawa. Cette histoire raconte bien la nature du lieu en Ria: une enclave naturelle formée par la rencontre des montagnes et de la mer.
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Carte personnelle
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https://ssl.panoramio.com/photo
DÉCROCHAGE D écrochage d’une D’UNE ville prospère VILLE PROSPÈRE
PORT DE PÊCHE MAJEUR ET RELAIS TOURISTIQUE
Malgré sa petite taille, la richesse des ressources de la ville lui permet une bonne autonomie quant au développement de services liés au commerce, aux loisirs et à la santé (Onagawa possède un centre hospitalier). Cette indépendance se confirme en 2005 quand Onagawa ne rejoint pas la fusion de la ville voisine, Ishonomaki, avec six autres communes pour devenir la deuxième plus grande métropole de la préfecture de Miyagi. La ville est connue pour ses élevages de pétoncle et de saumon ainsi que pour son activité ostréicole. De plus, sa situation géographique, à proximité de la rencontre de courants marins chaud et froid, favorise la présence de nombreuses espèces de poissons qui offre toute sa richesse au marché de pêche d’Onagawa. Comme beaucoup de villes portuaires, sa culture et son économie sont largement tournées vers l’univers de la pêche. Bien que la ville voisine offre plus ou moins les mêmes atouts dans un contexte urbain plus développé, Onagawa peut faire valoir le pittoresque de son paysage et sa proximité directe avec un espace naturel classé. La ville a donc aussi quelques ambitions touristiques orientées vers la gastronomie issue des produits de la mer et elle fait parti d’un réseau de bateaux-navettes reliant les destinations touristiques le long de la côte et vers les îles proches. Les dix-neuf premiers ports de pêche du Japon
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Carte personnelle
DÉCROCHAGE D écrochage d’une D’UNE ville prospère VILLE PROSPÈRE
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The Fishing Communities 1949: https://library.osu.edu/projects/bennett-in-japan
VENIR EN TRAIN OU EN BATEAU-NAVETTE
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Carte personnelle
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http://www.onagawa.org/archives
DÉCROCHAGE D écrochage d’une D’UNE ville prospère VILLE PROSPÈRE
PROXIMITÉ AVEC UN TERRITOIRE NATUREL PROTÉGÉ
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Minami Sanriku Kinkasan Quasi-National Park (depuis 1979)
http://www.protectedplanet.net
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http://www.onagawa.org/archives
DÉCROCHAGE D écrochage d’une D’UNE ville prospère VILLE PROSPÈRE
INSTALLATION D’UNE CENTRALE NUCLÉAIRE
Construite en 1980, à une quinzaine de kilomètres au Sud sur la presqu’île d’Oshika, la centrale nucléaire d’Onagawa, vient compléter la série de centrales électriques thermiques et nucléaires installées dans des bourgs côtiers de la région. Cette énergie est proposée par l’opérateur Tepco dès 1955 au département de Fukushima quand le gouvernement japonais lance un programme nucléaire civil. C’est alors un moyen pour ces régions de pallier la position excentrée du littoral par rapport à l’axe de développement le long de la plaine de Fukushima, dans le prolongement de la mégalopole. 1
La présence de la centrale a permis d’enrayer temporairement la decroissance démographique. A cette époque, alors que l’industrie du poisson commence à décliner, la municipalité voit d’un bon œil l’arrivée de subventions pour l’accueil de la centrale. La ville en a alors profité pour mettre en place des avantages fiscaux, ce qui lui permit d’attirer bon nombre d’entreprises à cette occasion. C’est pendant cette période que la ville a pu investir dans des équipements publics, tentant par ce biais de pérenniser son attractivité.
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fr.wikipedia.org/wiki/Centrale_nucléaire_d%27Onagawa
1. Rémi SCOCCIMARRO, Spatialisation de la catastrophe, Ebisu n.47 , Catastrophes du 11 mars 2011, désastre de Fukushima : fractures et émergences
DÉVELOPPEMENT URBAIN EN 2010
www.google.fr/maps/place/Onagawa+Onagawahama,+Onagawa-chō,+Oshika-gun,+Miyagi-ken+986-2261,+Japon
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1.2
EXODE PÉRIURBAIN Après une croissance économique et démographique continue jusque dans les années 90 (crise économique japonaise), Onagawa connaît un ralentissement économique et une sérieuse inflexion de sa courbe démographique.
ONAGAWA EN DÉCROISSANCE DÉMOGRAPHIQUE
Au Japon la population a atteint un pic en 2004 et après une période de stagnation,
sa diminution apparaît comme inéluctable. La baisse de la fécondité est à l’origine de ce déclin qu’une très faible immigration ne peut compenser. Si cette évolution a récemment commencé à affecter les grandes villes de manière très hétérogène, les conséquences sont déjà sérieuses dans les régions rurales et périurbaines. Appartenant à un secteur périurbain, Onagawa n’échappe pas à la tendance et est victime d’un déclin démographique et d’un vieillissement rapide de sa population. Les jeunes quittent d’abord la ville pour suivre des études et restent dans les grandes métropoles pour s’installer où le travail se concentre. En 1980, la ville avait une population d’environ 16 000 habitants qui a ensuite, régulièrement régressé jusqu’à atteindre moins de 10.000 habitants en 2010. La proportion de personnes âgées de plus de 65 ans était alors de 33,8%. En 2010, une banque locale a publié une projection qui annonçait qu’à l’horizon 2035 la population d’Onagawa se réduirait encore pour ne compter plus que 6.000 habitants.
Pyramide des ages Japon : chiffres et prévision
1950
2000
2050
Millions
Millions
Millions
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http://www.economie.gouv.qc.ca/objectifs/exporter/pays-et-territoires/asie/japon
LA MONNAIE ATOM : OUTIL DE REDYNAMISATION
En juin 2010, face au déclin latent de la ville, un groupe d’entrepreneurs locaux, épaulé par la ville et la chambre de commerce ont ensemble lancé un «groupe d’étude sur la construction de la ville». Servant de coordinateur, ce groupe a alors, avec les habitants, lancé des discussions sur la façon dont ils pourraient mettre un terme à l’hémorragie démographique de la ville.
DÉCROCHAGE D écrochage d’une D’UNE ville prospère VILLE PROSPÈRE
Les discussions ont rapidement abouti à la mise en œuvre d’actions concrètes, comme celle de la chambre de commerce, qui a mis en circulation une monnaie locale. Cette monnaie à l’effigie du petit robot le plus populaire du Japon: Astroboy, est publiée par le ’’Réseau pour l’avenir de l’environnement et du bien-être’’. Si cette initiative a comme vocation de soutenir l’économie des villes en perte de vitesse, elle a un deuxième volet d’action qui vise à favoriser la protection de l’environnement. Grâce à un système de Points Eco-Action elle récompense les comportements limitant les émissions de gaz à effet de serre en attribuant un tôt de change privilégié aux commerçants faisant une transition vers l’usage d’énergies renouvelables.
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LE PÉRIURBAIN EN CHUTE DÉMOGRAPHIQUE
A l’échelle de la région de Tohoku, on observe que l’évolution
démographique est déterminée par la force d’attraction des cœurs urbains. Alors que les plus grandes métropoles continuent à gagner de la population, les districts ruraux et périurbains les plus éloignés des villes, voient leurs populations diminuer fortement. Il en est de même pour la moyenne d’âge, qui est nettement plus élevée dans les secteurs les plus reculés de la région.
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Répartition de la population du Tohoku en 2005
Évolution démographique entre 1995 et 2005
Proportion de personnes âgées en 2005
Sendai
Onagawa
Ishinomaki
Ishinomaki
Onagawa
Sendai
Onagawa
Les tendances démographiques ne devraient pas être négligées: le vieillissement et le dépeuplement de Tohoku Masateru Hino, Professeur, Université de Tohoku, 9 Avril, 2011
Onagawa
PRÉVISION D’UN PHÉNOMÈNE DURABLE
L’institut statistique de la population publique Japonaise, prévoit que la tendance se poursuive et accentue le phénomène de déprise démographique du périurbain. De la même manière, on peut observer le progrès du vieillissement qui se fera sentir toujours de manière inégale entre les grandes agglomérations urbaines et les secteurs qui en sont éloignés.
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Répartition de la population du Tohoku en 2005
Projection de l’évolution démographique en 2020
Projection de la proportion de personnes âgées en 2020
Sendai
Onagawa Ishinomaki
Ishinomaki
Onagawa
Sendai
Onagawa
Les tendances démographiques ne devraient pas être négligées: le vieillissement et le dépeuplement de Tohoku Masateru Hino, Professeur, Université de Tohoku, 9 Avril, 2011
Onagawa
INVERSION DE L’ÉTALEMENT URBAIN, POUR UNE RÉTRACTION DES VILLES JAPONAISES
Origines de la morphogenèse des villes Japonaises / Le modèle
urbain Japonais de la fin du 20ème siècle, villes basses et étalées, trouvait son origine dans l’expansion démographique et économique que le Japon a connu durant les Trente Glorieuses. Plusieurs conditions s’associaient à la pression démographique urbaine, comme le coût élevé du sol, de lourdes contraintes parcellaires et une réglementation libérale, pour expliquer la toute-puissance de la propriété foncière et l’exclusion des classes moyennes des centre-villes. C’est donc essentiellement des logiques de marché et les stratégies des opérateurs privés qui ont présidé à la morphogenèse des aires urbaines caractérisées par une forte poussée centrifuge. A noter le rôle prédominant des «compagnies ferroviaires privées généralistes» qui dans le but de générer des revenus complémentaires, ont pris en charge la promotion de zones résidentielles le long de leurs lignes et équipé les gares de multiples services (locaux commerciaux, restaurant, équipement sportif, etc...). En résulte que les villes se structurent selon un fort coefficient d’emprise au sol du bâti mais sur de faibles hauteurs. La densité humaine est donc très diluée en comparaison avec les métropoles européennes, entraînant le principe de séparation entre lieu de résidence et lieu de travail avec des migrations pendulaires importantes (jusqu’à quatre heures par jour).
Éclatement de la bulle immobilière / Depuis le début des années 1990,
la crise économique a brutalement marqué l’arrêt de la hausse ininterrompue des prix du foncier depuis l’après-guerre et mis un terme à la croissance exceptionnelle qui soutenait l’économie. D’ores et déjà, une nouvelle forme d’urbanisation voit le jour, caractérisée par l’inversement du processus d’étalement urbain vers un phénomène de rétraction périurbaine.2
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L’effondrement des prix du foncier est spectaculaire, atteignant 50% pour les appartements et jusqu’à 70% pour les bureaux dans les centres des grandes agglomérations. En 2001, pour tenter de stabiliser les prix, le gouvernement a lancé une politique de «renouvellement urbain» (toshi saisei). Des «périmètres spéciaux d’intervention d’urgence» ont été délimités dans le centre des plus grandes villes, au sein desquels les coefficients d’occupation des sols ont été relevés afin de stabiliser les valeurs foncières en augmentant les droits à construire. Tout ceci a pour conséquence de renforcer le flux migratoire vers les grandes villes car l’offre résidentielle des périphéries se voit désormais concurrencée par de nombreuses opérations immobilières entreprises dans les centres urbains. Effectivement la conjoncture économique ouvre de nouvelles opportunités avec la baisse des prix du foncier et se conjugue avec la demande de retour dans les centre-villes des populations vieillissantes en perte de mobilité. 2. Estelle DUCOM, Quand les processus s’inversent : Étalement et désétalement urbains au japon, manifestations et enjeux
Expansion urbaine et déploiement du réseau ferroviaire de Tokyo
Dynamiques démographiques de Tokyo selon la distance au centre
de 0 à 10 km
Taux dʼévolution de la population en %
35
de 10 à 20 km
30
de 20 à 30 km
25
de 30 à 40 km de 40 à 50 km
20
DÉCROCHAGE D écrochage d’une D’UNE ville prospère VILLE PROSPÈRE
www.toshiseibi.metro.tokyo.jp/plan/pe-014.htm
15
39
10 5 0 -5
1970 - 1975
1975 - 1980
1980 - 1985
-10
Tokyo Statistical yearbook, national institute of population and security research
1985 - 1990
Périodes
1990 - 1995
1995 - 2000
L’URBANISME AU GRÉ DE LA BULLE SPÉCULATIVE
«
«
«
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Les Japonais ont tendance à considérer le terrain exclusivement sous l'aspect de sa valeur matérielle et se montrent réticents envers toute restriction concernant la constructibilité. Au Japon, il existe d'ailleurs l'expression « mythe du terrain » [tochishinwa] qui veut qu'un terrain acquis ne fasse que s'apprécier et fructifier. Il semblerait que ce mythe ait transformé les Japonais en adeptes de la liberté de construire. Shigeki Kubo
L. Charrier
Mais que vont devenir « les Tokyoïte? Sont-ils condamnés, comme le suggérait une récente émission de télévision, à ne plus pouvoir accéder à la propriété à moins de deux heures de transport de leur lieu de travail?
«
Tokyoïte:
«
L’exemple
En comparaison avec l'Europe, l'urbanisme est peu efficace. Une des raisons, souvent évoquée, est le pouvoir sans limite du privé et l'influence quasi nulle des organismes publics. (…) La puissance du consensus économique et l'exiguïté du territoire sont des conditions telles qu'elles ne permettent pas de donner à l'architecture une portée esthétique transcendant la valeur d'échange.
Marc Bourdier et Philippe Pelletier, 1989
Tokyo land corporation/2006 http://laboratoireurbanismeinsurrectionnel.blogspot.fr
«
«
En créant un cercle vicieux selon lequel les anticipations sur la hausse des prix provoquent celle-ci, ces agents immobiliers et marchands de biens ont donc diffusé la flambée du centre vers la périphérie et du marché de bureaux à celui des logements.
«
Natacha Aveline 1995
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Ainsi après vingt ans de croissance et de dilution spatiale illimitée sous la pression d’une énorme force centrifuge, Tokyo commence, par endroits, à se rétracter, selon des processus centripètes jusque-là inconnus. Il en résulte une situation de crise pour les secteurs les plus reculés de la grande banlieue où un processus de dévitalisation est déjà à l’œuvre
«
Laboratoire Urbanisme Insurrectionnel
Estelle Ducom 2008
DÉCROCHAGE D écrochage d’une D’UNE ville prospère VILLE PROSPÈRE
«
Les prix de l'immobilier dans les grandes villes chutent progressivement de 70% et sont retombé à leur niveau de 19841985. La " bulle " se dégonfle doucement : en 2004, la valeur d'une propriété de standing à Tokyo située dans les quartiers financiers correspondait à 1 % de la valeur d'avant 1990
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ONAGAWA, FIGURE DE LA DÉPRISE DU PÉRIURBAIN
Comme on l’a vu plus tôt, Onagawa est très proche d’Ishinomaki et sans la présence
de la baie du Mangoku ura, leurs aires urbaines se seraient très probablement rejointes dans les années 90. Si dans les faits, les deux villes ont gardé leur indépendance, nombre de résidents et de PME installés à Onagawa, ont en réalité plus à voir avec Ishinomaki. Effectivement la promotion des banlieues pavillonnaires à l’origine des compagnies ferroviaires, concerne Onagawa qui grâce à sa gare est à moins d’une demi-heure du centre de la commune voisine et à 10 minutes en voiture de ses quartiers les plus proches. Dans ce contexte Onagawa est à l’image des banlieues de Tokyo, touchée par le phénomène de rétraction urbaine et présente des signes inquiétants de dévitalisation.
www.google.fr/maps/place/Onagawa
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1.3
LE CHOC DU 11/03 Pendant son développement, la ville s’est étendue toujours plus près des côtes. La pression foncière a progressivement fait oublier le principe de précaution face au risque de tsunami. Ainsi, des secteurs résidentiels ont été bâtis près du rivage sans même que la population est conscience du danger.
ONAGAWA EST TOUCHÉ
UN TREMBLEMENT DE TERRE DE MAGNITUDE 9,0 ENGENDRE UN TSUNAMI
11/03 Le 11 mars 2011, une vague de plus de 14 mètres de haut a frappé le port détruisant environ 70% de la ville et prenant la vie de 827 personnes (9% de la population). Après la catastrophe, la population est brutalement passée de 10,000 à 6,885 habitants et le scénario sur la chute démographique prédit pour 2035 est devenu réalité du jour au lendemain.
AIRES TOUCHÉES PAR LA MONTÉE DES EAUX
Ishinomaki
Onagawa
Zones représentant l’avancée du tsunami dans les terres Secteurs résidentiels gravement endommagés. Tsunami Damage Mapping Team, Association of Japanese Geographers anso.env.nagoya-u.ac.jp/20110311/map/index_e.html
UNE CONFIANCE MEURTRIÈRE
Les événements qui se sont enchaînés le 11 mars 2011 ont donné lieu à une triple
catastrophe. En effet, aux deux aléas naturels, séisme et tsunami, s’est ajouté un accident industriel majeur concernant la centrale nucléaire de Fukushima. Les conséquences sont terribles et impliquent un territoire immense, puisqu’aux destructions localisées sur les côtes s’ajoute une contamination de grande ampleur dont les conséquences sont encore mal connues. La localisation du tsunami du 11 mars 2011 est peu surprenante, en effet la région fait souvent l’objet d’alerte au tsunami à la suite de séisme de plus ou moins grande importance. Encore récemment en 2003 et 2005 Onagawa avait déjà été atteinte par des tsunamis allant jusqu’à 4,4 mètres de hauteur. Mais cette fois l’ampleur de la catastrophe provoquant la destruction de villes parmi les mieux protégées au monde, pose la question des limites d’un certain modèle de développement urbain.3 Tout d’abord, le séisme malgré sa durée, près de dix minutes en comptant les répliques, a été relativement peu destructeur. Son mouvement, essentiellement latéral, a limité l’impact. Ce constat est rassurant et montre que les villes ont été construites selon des normes parasismiques efficaces. En revanche, le littoral a été affecté par une subsidence (affaissement du sol) de l’ordre de 0,8 m à 1 m en moyenne et cela eut notamment comme conséquence d’abaisser le niveau de protection des brise-lames et des digues. Ensuite, lorsque le système d’alerte au Tsunami fonctionne (les coupures d’électricité peuvent le rendre inopérant), les habitants sont alors prévenus et disposent d’une vingtaine de minutes pour évacuer les secteurs inondables et se mettre à l’abri dans les hauteurs. A la différence des plaines, la topographie de Ria rend Onagawa particulièrement vulnérable car la vague gagne mécaniquement en importance lorsqu’elle se retrouve enserrée par les reliefs environnants. Néanmoins, la population est plus accoutumée à ce type d’événements et elle a développé des comportements adaptés, « tenden-ko » (la fuite à tout va). 52
Mais voilà, ce risque n’a pas freiné le développement de la ville dans les années 80, et la proportion de résidents installés dans les secteurs exposés a augmenté. En effet, la foi dans les dispositifs de protection comme les digues et les brise-lames, a offert un dangereux sentiment de sécurité. Les populations ont perdu leurs réflexes ancestraux et il est devenu petit à petit acceptable de faire tomber les restrictions des zones classées non-constructibles. Le 11/03/2011 malgré la proximité immédiate de nombreux reliefs constituant des refuges sûrs, certains habitants moins au fait de l’ampleur du danger ou trop fragiles pour fuir se sont réfugiés dans les étages hauts de leurs habitations pensant à tort échapper à l’inondation. 3. Rémi SCOCCIMARRO, Spatialisation de la catastrophe, Ebisu n.47 , Catastrophes du 11 mars 2011, désastre de Fukushima : fractures et émergences
DÉCROCHAGE D écrochage d’une D’UNE ville prospère VILLE PROSPÈRE
Cet événement démontre bien qu’il y a coévolution entre risque et société, ainsi les mesures de sécurité ont leur limite et ne peuvent maîtriser tous les effets destructeurs des catastrophes, qu’elles soient naturelles ou technologiques 4. D’autant que les réflexes traditionnels comme le tenden-ko ou inochi («Sauve-qui-peut» ou «chacun pour soi») ne peuvent être la seule solution, en particulier dans des régions vieillissantes. Effectivement, les plus âgés requièrent une assistance pour se déplacer, et les limites de ce «sauve qui peut» se lisent dans les caractéristiques démographiques des victimes, dont les plus de 75 ans représentent les deux tiers, soit le double de leur part dans la population locale.
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http://allcinema.club/njtojj-tsunami-damage.asp
4. Marie Augendre, Un modèle géographique de la catastrophe, Ebisu n.47 , Catastrophes du 11 mars 2011, désastre de Fukushima : fractures et émergences
2 RÉACTION POST-CATASTROPHE
Les habitants d’Onagawa font preuve d’une vigueur inattendue face au désastre, ainsi les initiatives individuelles et collectives se multiplient pour continuer de vivre. D’un autre côté un ambitieux plan de reconstruction est lancé afin de rehausser le niveau de la plaine et de rebâtir tous les secteurs détruits de la ville. Mais la question se pose du bien-fondé de la remise en œuvre des stratégies de séparation entre la ville et la mer qui ont pourtant aggravé les conséquences du tsunami du 11/03. D’autre part l’ampleur de l’investissement semble en décalage avec la trajectoire d’une ville en phase de décroissance démographique prononcée et durable.
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2.1
EN ATTENDANT ... Face au désastre, les rescapés n’ont d’autre choix que de réagir et de se mobiliser pour rétablir la situation. Tous les habitants ont été affectés par la catastrophe mais le choc à stimulé un reflex d’entraide et un nouveau dynamisme se fait sentir dans la ville.
INITIATIVE CITOYENNE
Au
lendemain du 11/3 / La mairie ayant été durement touchée par le tsunami, l’équipe municipale d’Onagawa n’a pas été en mesure de prendre des mesures immédiatement après la catastrophe. Alors, pour assister les forces de secours déployées dans la ville, les habitants ont été prompts à réagir et ont rapidement mis en place un réseau d’entraide et participé au redressement de la situation. Il y a notamment l’exemple d’un chef d’entreprise de construction locale, qui voyant la route impraticable pour acheminer les fournitures humanitaires, a entrepris de déblayer les décombres. Suite à son intervention, les véhicules de la force d’autodéfense (SDF) ont pu atteindre le gymnase public dans lequel une partie des sinistrés avait trouvé secours. Avant cela, le SDF devait livrer les fournitures par hélicoptère et rationner l’aide apportée aux habitants.
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La communauté d’Onagawa a fait preuve d’un volontarisme inattendu étant donnée la gravité de la situation dans laquelle chacun d’eux se trouvait. Un habitant témoigne, «Ici personne ou presque n’a été épargné par la disparition d’un membre de sa famille ou d’un ami proche et pourtant tous ont pris des mesures et réfléchi à quelle aide il pouvait apporter». Alors que dans d’autres villes plus grandes ce genre de réflexe ne s’est pas toujours généralisé, à Onagawa la communauté n’a pas attendu l’aide extérieure pour s’organiser.
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http://www.shin-yahiro.com/shinyahiro
DÉCROCHAGE R éaction Post-catastrophe D’UNE VILLE PROSPÈRE
LOGEMENTS PROVISOIRES
Par la suite, le gouvernement n’a eu de cesse de trouver des solutions pour loger les
quatre vingt mille personnes réfugiées. A Onagawa, les sinistrés ont vécu pendant six mois dans des villages de tentes ou dans les espaces semi-privatifs du centre de réfugiés. L’attente dans ces camps a été une épreuve supplémentaire puisque personne n’avait une vision claire du dénouement de la crise et le manque d’intimité a éprouvé l’endurance de tous. Désormais, des villages d’appartements provisoires préfabriqués ont été installés en fond de vallée. Les conditions sont vétustes mais l’arrivée dans ces logements individuels a marqué un tournant dans le rétablissement des sinistrés. Les unités d’habitation vont de 12m² pour les personnes seules ou en couple, jusqu’à 24m² pour les familles avec enfants. Chaque logement temporaire a un équipement assez basique pour les normes japonaises, avec un réfrigérateur, un cuiseur à riz et une bouilloire électrique. Les habitants s’accrochent à leur espoir de voir la ville revivre de nouveau et ne manquent pas une occasion de donner une bonne image de la situation aux visiteurs en répétant « Gambate Nipon ! » (courage Japon). Néanmoins, la situation perdure et chacun commence à réaliser que ces maisons et ces conditions, pourraient ne pas être si temporaires. Certains abandonnent et commencent à quitter la ville pour reconstruire leur vie ailleurs. Le choc du tsunami s’est estompé et laisse parfois la place à un sentiment croissant de «Munashi» (dépréssion), un sentiment de manque qui fait suite à tant de mois sans emploi ni maison.
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Waka Suzuki vit au centre de réfugiés avec son mari, ils attendent un logement proposé par le gouvernement. Elle m'évoque son histoire et me parle de ses souvenirs et désirs [...] .« Pour le futur, j'ai plein de rêves » lance-t-elle. « D’abord, je veux voyager comme avant ! » Elle sort des photographies panoramiques de ses voyages qu'elle a pu retrouver dans les décombres. Elle parle de Singapour, d'Osaka ou de son séjour préféré à Kyoto lors de la fête de Gion. Elle les passe et repasse en silence. Puis sa gorge se noue en disant à nouveau: «oui, j’ai beaucoup de rêves»..Ces rêves dont elle parle sont inaccessibles et en deviennent douloureux. Le passé existe sous quelques images retrouvées, les photographies permettent alors de s'évader quelques instants. Mais, la réalité de ce présent difficile revient vite faire surface. Les photos du passé renvoient alors à ce qui fut à jamais perdu. Le choc est tel que pour longtemps, toutes projections futures deviennent inabordables.
Waka Suzuki, Centre de réfugiés Undôjô sôgô taikukan par Sébastien Lebègue
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http://sebastienlebegue.photoshelter.com
DÉCROCHAGE R éaction Post-catastrophe D’UNE VILLE PROSPÈRE
VILLAGE KASETSU JUTAKU
Parmi
les sinistrés vit le bonze YAMATO Bijo, volontaire pour venir vivre habiter le village temporaire. Il rend visite aux personnes et parle longuement avec elles. Le culte n’est pas sa priorité même si le réconfort par la prière est important en cette période de commémoration. Il constitue un des maillons d’un réseau d’entraide et d’échange qui se construit par la force des choses entre les membres de la communauté.
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http://sebastienlebegue.photoshelter.com
DÉCROCHAGE R éaction Post-catastrophe D’UNE VILLE PROSPÈRE
“KIBOUNOKANE” SHOPPING STREET
Le 1er Avril 2011, l'association des mareyeurs a redémarré le marché aux poissons. Le même jour, la chambre de commerce a ouvert un petit centre commercial, mis en place à l'aide des conteneurs de fret offerts par des entrepreneurs locaux.
Les commerçants expliquent que comme l’initiative venait du secteur privé, l’organisation a été souple et a pu aboutir rapidement. «Nous avons choisi qui devaient être locataires du centre commercial et leur avons demandé de nous rejoindre par ordre de nécessité. Ce dont nous avions le plus besoin à l'époque était d’un fleuriste pour les hommages. Nous avions aussi besoin de magasins de premières nécessités pour vendre des légumes et des produits frais, car il n'y avait pas de magasin à distance de marche du centre de secours. Ensuite, comme l’expérience était concluante nous avons pu inviter des restaurants et d’autres boutiques, de moins grandes priorités, à nous rejoindre.» Au début de mai, un marché a eu lieu dans la cour de récréation de l'école primaire d’Onagawa, qui a attiré beaucoup de monde. Inspiré par l'événement, un plan pour construire une véritable zone commerciale temporaire a été lancé, qui est devenu finalement le ’’Bell for Hope Shopping Mall’’, le plus grand centre commercial temporaire du Japon (ouvert en avril 2012). Le nom de ‘‘Bell for Hope Shopping Mall’’ fait référence aux quatre grandes cloches de la gare, qui étaient chargées d’annoncer l’arrivée des trains. Le chant des cloches symbolisait la connexion d’Onagawa au reste de son territoire. L’une d’elles a été récupérée intacte après le tsunami. Associée au centre commercial, elle symbolise désormais l’espoir de voir la ville se redresser.
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Recyclage des outils de redynamisation / Aujourd’hui, la monnaie Atom prend une nouvelle dimension puisqu’en plus de ses ambitions écologiques elle vient désormais renforcer la dynamique de reconstruction. Un nouveau système d’échanges permet de récompenser les actions d’aide sociale, tel que le bénévolat dans l’aide à la reconstruction. L’argent ainsi distribué peut être dépensé dans les commerces locaux et continu de nourrir la dynamique économique locale.
DÉCROCHAGE R éaction Post-catastrophe D’UNE VILLE PROSPÈRE
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http://blog.globis.co.jp/hori_english/2013/03/kibow-onagawapr.html
EL FARO : UNE OFFRE HÔTELIÈRE MOBILE
Lorsque le désastre est survenu, Yosuke Komatsu (31 ans), originaire de la préfecture
de Miyagi, travaillait à Recruit, une importante société de publicité basée à Sendai. Il fut très touché par la situation des zones côtières du miyagi, un secteur dont il était responsable des ventes et où il se rendait régulièrement. Komatsu a alors immédiatement décidé de participer à l’effort de rétablissement et pris congé de son travail pour rejoindre des amis habitant les secteurs sinistrés. Sa visite lui a fait comprendre l’ampleur de la tâche et les limites du soutien financier du gouvernement qui suffisait juste à reconstruire le contexte bâti. Il comprit que le vrai défi du redressement de la région, était de rebâtir son environnement socio-économique afin de redonner de la vie à ces secteurs sinistrés. Finalement, en septembre 2011, Komatsu a quitté son emploi pour mettre en place un projet portant le nom de “Behind-the-scenes / Support pour la restauration et la redynamisation des secteurs affectés du Miyagi”. Son idée a été de proposer un système de logement sur remorque pour l’installation des travailleurs de la reconstruction, des bénévoles ou des visiteurs de la ville qui ne disposaient plus d’offre hôtelière pour résider sur place. Sans hébergement temporaire supplémentaire que ceux destinés aux sinistrés, la ville s’interdisait de capter le flux de gens venus à Onagawa et qui devaient s’en aller, faute de point de chute sur place. Le raisonnement de Komatsu est que si une auberge est construite sur des remorques, elle pourrait être considérée comme une voiture en stationnement ce qui permettrait de la déplacer à loisir au fur et à mesure de l’évolution des travaux.
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Alors que la plupart des villes n’ont pas pris au sérieux sa proposition, il a été traité de façon totalement différente à Onagawa. Takahiro Aoyama (40 ans) de la chambre de commerce l’a mis en contact avec quatre aubergistes locaux dont les établissements avaient été détruits et qui ont à leur tour montré de l’intérêt pour l’idée de Komatsu. Utilisant son réseau professionnel, Komatsu a engagé un entrepreneur et un architecte qui ont conçu et construit les remorques. De son côté Komatsu a développé un plan d’affaires pour obtenir des subventions gouvernementales. A la fin de décembre 2012, l’auberge El Faro a ouvert ses portes et on peut désormais réserver son séjour à Onagawa sur trip-advisor. Komatsu a continué à travailler non seulement dans l'entreprise El Faro, mais aussi dans le groupe de travail de la reconstruction pour la préparation d’un plan de tourisme d'affaires.
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http://en.re-tohoku.jp/movie/9968
DÉCROCHAGE R éaction Post-catastrophe D’UNE VILLE PROSPÈRE
BAILA ONAGAWA : SYMBOLE DE LA RÉSILIENCE
Dès 2013 une association locale, parrainée par la préfecture de Miyagi, a
lancé un festival annuel sur la culture espagnole. Cet événement est l’occasion pour la ville d’affirmer sa capacité à dépasser le traumatisme. C’est aussi le lieu de promotion des productions locales comme les spécialités anciennes mais aussi pour les nouvelles initiatives qui ont vu le jour après le tsunami. Pour l’édition 2015 c’est l’installation El Faro qui devient le fond de scène d’un concert de flamenco. Autour, de nombreux pensionnaires de la rue commerciale temporaire proposent leurs marchandises aux festivaliers.
68 http://onagawa-town.com/fes/
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2.2
PLAN DE RECONSTRUCTION Toute une partie de la ville est en friche et l’attente de voir disparaître les signes du traumatisme est pesante. L’ambition est grande pour la reconstruction et l’afflux rapide de fonds d’aide nationale et internationale encourage l’espoir aveugle de restaurer la situation au point même de retrouver la ville telle qu’elle était dans les années 80.
MAINMISE DU PRIVÉ SUR LA RECONSTRUCTION
Comme on l’a vu, l’équipe municipale d’Onagawa n'a pas été en mesure de reprendre
en main la situation immédiatement après la catastrophe alors que le secteur privé d’Onagawa a été prompt à réagir. Yoshihide Abe, qui est responsable de gestion d'un centre de distribution de journaux, a recommencé à livrer des journaux à domicile seulement trois jours après la catastrophe. Le siège de Takamasa, un industriel de premier plan dans Onagawa qui transforme et vend du poisson, est un de ceux que le tsunami a épargné, et il est naturellement devenu un des pivots de l’organisation et de l'information de la reconstruction. Lorsque Yoshihide Abe a rencontré Masanori Takahashi, le PDG de Takamasa lors d’une livraison, ce dernier lui a demandé si il pouvait accueillir différents exploitants du secteur dans ses locaux pour organiser une réunion sur les actions à entreprendre au lendemain de la catastrophe. Finalement Abe fit le tour de la ville lui même pour inviter les différents intéressés et organiser la réunion. Ce moment a été le début de l'initiative de reconstruction de la ville, engagée par le secteur privé.
Organiser le plan d’action / Le regroupement de quatre grandes associations
commerciales à Onagawa, parmi lesquelles, la chambre de commerce, l'association de tourisme, l’industriel Takamasa et l'association des mareyeurs, a donné lieu le 19 Avril 2011, à la création de l’Association de coordination de la reconstruction (FRK) et un bureau temporaire a été immédiatement construit sur le site de Takamasa. L’association se présente comme une locomotive du secteur privé qui se propose de conseiller la municipalité sur la façon de procéder à la reconstruction de la ville. C‘est Takahiro Aoyama (40 ans) de la chambre de commerce, qui est en charge d’exécuter l'étude de la reconstruction de la ville et qui est devenu le chef du bureau de la FRK. Aoyama confit que si Onagawa a rapidement mis en place la FRK, c’est qu’il avait déjà l'expérience du groupe d'étude (voir «La monnaie Atom : outil de redynamisation» p.33 ).
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En Septembre 2011, la municipalité d’Onagawa a convenu d’un plan de reconstruction. La ville serait zonée par fonction; la zone d’activité sera placée à proximité de la mer et les secteurs résidentiels seront construits sur les hauteurs. Il n’y aura pas d’édification de grande digue mais c’est toute la ville qui sera surélevée de 5 à 15 mètres à l’aide de monticules. Ce plan de reconstruction reflète dans les grandes lignes les propositions de la FRK.
Un œil sur les décisions / Cependant, quand le bureau municipal a fonctionné
de nouveau, la FRK a constaté que leurs propositions étaient souvent rejetées. Elle a alors formulé l’idée que, pour que la ville soit reconstruite rapidement, la collectivité devait se doter d’un nouveau maire plus flexible, dynamique et capable de prise de décision rapide. La FRK a alors travaillé à promouvoir l’organisation d’une nouvelle élection municipale (les dernières ayant été reportée à la suite de la catastrophe) et ont dépêché un candidat, Yoshiaki Suda (39 ans). Suda a été élu en Novembre 2011 et
deux maires adjoints ont été nommés pour soutenir ce dernier afin de répondre aux tâches urgentes. En Janvier 2012, la FRK a soumis à la ville un document de 60 pages, qui décrit le grand dessein de l’avenir d’Onagawa associé à un slogan présentant les ambitions pour la reconstruction. Le message clé est «Restez, venez et revenez vivre à Onagawa».
DÉCROCHAGE R éaction Post-catastrophe D’UNE VILLE PROSPÈRE
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La reconstruction de la ville ne peut pas être ce que la chambre de commerce projette habituellement, mais si les résidents d’Onagawa ne peuvent pas travailler ou élever leurs enfants, il n’y aura pas de renouveau possible. Le gouvernement a ses propres perspectives et priorités mais comme la FRK était la première instance en action, le secteur privé a pris l’initiative dans la reconstruction, le gouvernement municipal ne peut pas l’ignorer. Takahiro Aoyama
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Yoshiaki Suda (39 ans) Maire d’Onagawa
Takahiro Aoyama, Responsable bureau FRK
SURÉLEVER LA VILLE UN CHANTIER PHARAONIQUE
Poussée par un reflex de résilience, la municipalité a fait le choix de reconstruire la ville au même endroit que les secteurs détruits de la plaine inondable. Des travaux de remblaiement ont pour but de surélever le niveau du sol, grâce à l’aménagement de plateaux talutés de cinq à quinze mètres de hauteur. Malgré les réserves de certains organismes comme Architecture for Humanity, la reconstruction est de nouveau basée sur la confiance en la technique pour protéger la ville des futurs tsunamis. Les travaux vont durer plusieurs années (2014-2018) et coûter 100 milliards de ¥Ens (800 millions d’euros) soit l’équivalent de 20 années de budgets municipaux d’Onagawa avant la catastrophe de 2011.
UNE RECONSTRUCTION EN PLUSIEURS PHASES: 1. Aménager les pentes en terrasses 2. Surélever les zones à risques 3. Protéger avec une route surélevée
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DÉCROCHAGE R éaction Post-catastrophe D’UNE VILLE PROSPÈRE
«
Ces mesures ont leur limite, que tendent à masquer le discours suffisant qui les accompagne et la confiance en la technique. En réalité elles ne peuvent prétendre maîtriser tous les effets destructeurs des aléas, qu’ils soient naturels ou technologiques. [...]. Cette gestion probabiliste a débouché sur des dommages matériels, sanitaires et environnementaux irréparables, latents voire héréditaires, en tout cas de long terme.
«
Marie AUGENDRE Un modèle géographique de la catastrophe
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http://www.nippon.com/fr/in-depth/a04302/
Niveau du nouveau remblaiement
Au premier plan, une des levées de
terre qui accueilleront de nouveaux bâtiments. Au second plan, sur la droite on aperçoit le complexe hospitalier de la ville. Disposé sur un plateau plus élevé, le bâtiment a résisté à la vague du 11/03 mais a néanmoins été inondé à hauteur de son premier étage. Le niveau de sécurité des secteurs non résidentiels a été fixé sur la hauteur des tsunamis survenus en 2003 et 2005 dont les hauteurs culminaient à 4,5m de haut.
DÉCROCHAGE R éaction Post-catastrophe D’UNE VILLE PROSPÈRE
Niveau de montée des eaux du 11/03
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STRATÉGIE CONTRE LA MONTÉE DES EAUX
«
Nous allons voir la mer. Elle est toujours là, avec son flux et son reflux permanent. De là vient le danger, mais comment l’éviter ? Faut-il, comme le suggèrent les architectes et les urbanistes, construire face à la mer une autoroute surélevée à huit mètres de hauteur permettant une substantielle protection contre sa violence dévastatrice ? Les rangées de tétrapodes de béton placées dans la mer nous paraissent, aujourd’hui, bien dérisoires.
«
Murielle HLADIK, Enjeux de la reconstruction
La nouvelle route surélevée constitue une digue
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Carte personnelle
DÉCROCHAGE R éaction Post-catastrophe D’UNE VILLE PROSPÈRE
Nouveaux secteurs résidentiels en hauteur
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Carte personnelle
UN AXE MAJEUR ENTRE LA GARE ET LE PORT
Le 21 mars 2015 a été fêté le premier départ d’un train depuis la nouvelle gare
d’Onagawa. Cet équipement dessiné par Shigeru Ban doit redevenir un pôle d’activité et la liaison permet de reconnecter la ville au reste de la région. La stratégie urbaine mise en place dans le plan de reconstruction s’appuie sur le rayonnement de cette nouvelle gare. Depuis cette dernière une promenade vient marquer une ligne droite en direction des quais. Cet axe traverse une zone commerciale et se termine dans un parc paysagé contenu par la nationale 398 et deux routes desservant les abords des quais. Comme il ne se reconstruira pas de logement dans la plaine à moins de quinze mètres de hauteur, la municipalité prévoit d’installer en plus du secteur commercial, une zone d’activités comprenant des lieux de production et des petits immeubles de bureaux.
Promenade piétonne & rue commerciale
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Carte personnel
DÉCROCHAGE R éaction Post-catastrophe D’UNE VILLE PROSPÈRE
Principe urbain de zoning
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Carte personnelle
PROMENADE SOUS LES TUNNELS DE LA N398
Même si nous mettons en place une belle zone commerciale, les gens installés « dans des quartiers résidentiels isolés sur les collines préféreront aller au centre commercial
AEON9 près de Ishionomaki. Quelle différence il y aura avec ce magnifique secteur commerçant installé en face de la gare, si il n’est pas adapté au parcours naturel des habitants dans la ville? Presque aucune! Normalement, les commerces devraient se mêler aux habitations. Si nous suivons la logique du plan actuel, Onagawa va devenir comme Okushiri après son tremblement terre. Là-bas, ils ont réuni les boutiques en face de la gare et ont créé un quartier commercial moderne. Mais, à peine les commerçants installés, il a dépéri.
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M.Sato Habitant d’Onagawa
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http://www.town.onagawa.miyagi.jp
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http://www.town.onagawa.miyagi.jp
DÉCROCHAGE R éaction Post-catastrophe D’UNE VILLE PROSPÈRE
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2.3
UN CHANGEMENT NÉCESSAIRE Alors que les destructions engagent la ville dans un long processus de reconstruction, la question se pose de savoir s’il ne s’agit pas là d’une opportunité pour changer de stratégie d’aménagement du territoire. La ville peut profiter du choc du 11/03 pour établir un nouveau dialogue entre l’espace urbain et l’espace sauvage et anticiper une transition annoncée vers la ruralisation.
L’ENGOUEMENT POUR LA RECONSTRUCTION
Les villes touchées par la catastrophe ont toutes à cœur de se relever au plus vite et de
laisser définitivement le traumatisme derrière eux. D’un point de vue extérieur, on peut même avoir le sentiment que cet événement a entraîné un dynamisme nouveau dans ces secteurs pourtant en déclin de vitalité ces deux dernières décennies. La catastrophe a suscité l’émoi dans tout le pays et les histoires de personnes venues aider les sinistrés et qui ont fini par rester vivre sur les lieux du désastre se multiplient. Ce phénomène a déjà été observé à la suite d’autres événements similaires au Japon et même s’il est délicat de parler d’opportunité dans ce genre de situation, beaucoup y voit l’occasion d’un nouveau départ et de lancer de nouveaux projets. Cet optimisme dont font preuve ces villes est remarquable et Onagawa fait office d’exemple dans la région pour la rapidité avec laquelle elle a réagi à ce désastre. Néanmoins, certains observateurs s’alarment des stratégies de reconstruction qui sont à l’œuvre tout le long de la côte du Tohoku. Les villes comme Onagawa qui ont été presque entièrement défigurées par le passage du tsunami, sont sur le point de se reformuler selon les mêmes fondements de l’aménagement du territoire qui ont valu au Japon le sobriquet d’État-BTP et qui se caractérise par un syndrome de la pelle mécanique 5. Pourtant les logiques de séparation artificielle de l’espace social et l’espace sauvage ont entraîné dans le temps, un phénomène d’occultation des risques liés à la mer et a renforcer l’attrait de la proximité de l’habitat avec les ressources halieutiques. C’est bien le «sappudo», le «tue-milieu» qui est à l’origine de l’oubli de l’histoire et notamment de la hauteur atteinte par de précédents tsunamis.
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Une autre crainte pour ces villes à reconstruire, est l’oubli des tendances démographiques observées au Japon. Les projections à moyen et long terme montrent que la déprise démographique du périurbain constitue un processus durable et non un phénomène ponctuel. Ainsi la situation à Onagawa est délicate du fait de l’attente des habitants d’une reconstruction rapide d’une ville à l’image de l’Onagawa des années quatrevingt qui était alors trois fois plus peuplée. Le choix de la municipalité de tabler sur la même emprise urbaine en réaménageant toute la plaine, laisse à penser que la stratégie territoriale retenue, mise sur une projection très (trop?) optimiste de la croissance économique et démographique. Le risque étant que l’aménagement de la ville soit surestimé et finisse par être difficile à assumer et inadapté pour une ville de plus en plus modeste. Car si la ville peut compter sur l’aide financière de l’état dans cette période difficile, les plus pessimistes anticipent déjà les effets politiques de l’organisation des jeux olympiques en 2020 et d’un probable désintérêt soudain pour ces territoires fragilisés. Mais la ville peut aussi capitaliser sur de nombreuses ressources disponibles et à toutes les raisons d’être optimiste sur la qualité de vie qu’elle peut développer. D’un point de vue social, les habitants traumatisés, ont par la force des choses tissé un solide réseau d’entraide et de partage. Ainsi la ville peut compter sur ce terreau associatif énergique. 5. Marie Augendre, Un modèle géographique de la catastrophe, Ebisu n.47 , Catastrophes du 11 mars 2011, désastre de Fukushima : fractures et émergences
«
Dans cinq à dix ans, Onagawa sera soit une ville fantôme, soit une ville animée, il n’y a pas d’alternative. Si la proposition de la reconstruction sur laquelle nous avons travaillé ces deux dernières années réussit, je pense que nous pouvons espérer une ville relativement peuplée et dynamique. Si elle échoue, Onagawa sera déserte.
«
- Yoshihide Abe, directeur du Umemaru journal et membre de la FRK
6.Estelle DUCOM,Quand les processus s’inversent : Etalement et désétalement urbains au Japon, manifestations et enjeux, www.hal.archives-ouvertes.fr
DÉCROCHAGE R éaction Post-catastrophe D’UNE VILLE PROSPÈRE
D’un point de vue économique, bien qu’il faille prendre en compte l’arrêt de l’exploitation de l’usine nucléaire, la ville peut durablement compter sur son activité portuaire et l’activité de transformation alimentaire qui en découle. Si la petite ville risque de peiner à concurrencer la métropole voisine quant à son attractivité résidentielle, elle peut se targuer d’offrir un paysage pittoresque et garde un potentiel jusque-là peu exploité de tourisme de proximité. D’autre part les destructions offrent l’opportunité de redéfinir un nouveau paysage plus à même de séduire les citadins qui rêvent des bienfaits des campagnes et des bords de mer. Ainsi un modèle de ville moins dense au sein d’un système agro urbain inspiré des paysages traditionnels de la période Édo (post 1868), ouvre à de nombreuses perspectives tant écologiques et économiques que des aménités urbaines.6
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LOST CITY
Maquette «souvenir de la ville natale» Exposition, mémoire des villes touchées par le tsunami du 11/03, décembre 2014 Sendai, préfecture de Miyagi, Japon
3 UN NOUVEAU RIVAGE L’objectif de ce chapitre est de formuler une stratégie de reconstruction alternative à celle retenu par la ville aujourd’hui. Le parti pris est d’assumer la déprise démographique et de revaloriser les ressources naturelles de la ville afin de stimuler l’économie locale et l’attractivité touristique.
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3.1
RURALISATION : L’OPPORTUNITÉ D’UNE NOUVELLE ATTRACTIVITÉ Onagawa s’inscrit dans un paysage naturel remarquable et bénéficie d’une connexion ferroviaire directe avec les grandes villes voisines. Alors, en misant sur un nouvel aménagement de la plaine inondable pour valoriser ses ressources naturelles, la ville a l’occasion de construire l’image d’un site touristique de premier plan dans la région.
LABORATOIRE DU PÉRIURBAIN JAPONNAIS
Dans les années quatre-vingt, la ville d’Onagawa avait développé une attractivité
résidentielle grâce à sa proximité avec Ishinomaki et avait attiré des PME avec des avantages fiscaux permis par l’installation de la centrale nucléaire sur son territoire. Désormais la tendance démographique, la fin de l’activité nucléaire et l’arrêt brutal du cours habituelle de la ville, remet en question sa raison d’être. La catastrophe a accéléré le processus de dévitalisation à l’œuvre à Onagawa et la ville doit maintenant se redéfinir dans la perspective de devenir une ville plus modeste.
Phénomène de ruralisation / Après le 11/03/2011, les activités de pêche,
d’ostréiculture, de pisciculture ainsi que les activités de transformation alimentaire associées, ont pu être relancées rapidement. En revanche beaucoup de PME du secteur secondaire et tertiaire qui souffraient déjà de la situation de crise ne se relanceront peut-être jamais. Ainsi, beaucoup de personnes actives ont perdu leurs emplois suite aux destructions et nombre d’entre eux ont quitté la ville voyant qu’elle ne redeviendrait plus ce qu’elle était. La majorité des personnes restées sur place sont donc ceux ayant à voir avec les secteurs halieutiques et les personnes âgées à la retraite, attachées à leurs terres.
L’atout d’une nouvelle image pour un nouveau lieu de séjour touristique/ Onagawa est située à la limite d’un territoire naturel remarquable et
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bénéficie d’un paysage exceptionnel. Alors la ville se redéfinit comme résolument rurale son réaménagement peut être l’occasion de capitaliser sur ses ressources naturelles et de construire l’image d’une ville réconciliée avec son environnement. Ainsi Onagawa pourrait aussi correspondre davantage à une destination de séjour touristique notamment pour les habitants des métropoles voisines comme Sendai (moins de 50 km) et Ishinomaki (moins de 20 km), qui aspire à quitter de temps en temps l’atmosphère des villes denses, pour respirer l’air de la mer et bénéficier de ses bienfaits.
DÉCROCHAGE U n nouveau rivageD’UNE VILLE PROSPÈRE
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Capture, souvenirs de Marnie, film de Hiromasa Yonebayashi
CHANGER DE RELATION AVEC LE RIVAGE
Au moment où la côte du Tohoku a été urbanisée et industrialisée, des
systèmes de protection ont été érigés pour tenter de pallier aux risques de tsunamis. Ce modèle de développement a transformé les hameaux ruraux et les terres agricoles d’origine par un mitage urbain progressif sous la forme de lotissement et de zone d’activités. La confiance dans ces protections en dur a permis d’aménager les secteurs inondables de seulement 3 m à 4 m d’altitude. Dans certains cas la présence de la mer à proximité n’était presque plus perceptible et les habitants des lotissements peu au fait des dangers de la mer n’ont pas eu le réflexe de se mettre à l’abri. Si on peut considérer le tsunami du 11/03 comme exceptionnel, des niveaux d’inondation équivalents ont déjà été relevés en 1896 (Meiji Sanriku) et il apparaît déraisonnable de miser sur la réurbanisation de secteurs si vulnérables. La protection « dure » : Mer de tétrapodes et digues géantes
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Rémi SCOCCIMARRO
D’un autre côté il est possible d’établir une autre relation avec le rivage et comme c’était le cas traditionnellement, de développer des comportements adaptés. En cas de séisme il s’agit du «tenden-ko» la fuite à tout va, qui nécessite d’être en pleine possession de sa mobilité et pour les bateaux de prendre le large pour éviter d’être projetés sur la côte. Car malgré le risque important, chacun dispose de plusieurs dizaines de minutes à la suite d’un séisme pour quitter le rivage et les professionnels savent lire les signes de l’arrivée du tsunami avec le retrait rapide des eaux sur les plages et dans les ports. Dans la situation d’Onagawa de nombreuses activités d’agriculture et d’aquaculture pourraient prendre place dans les secteurs inondables sans pour autant nécessiter la mise en place de protections massives. Car pour diminuer les risques c’est bien la conscience du danger et la possibilité de devoir évacuer au premier signe de séisme qui doit primer.
DÉCROCHAGE U n nouveau rivageD’UNE VILLE PROSPÈRE
La protection « souple » : Prévention, marquage et entraînement des populations
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Limite plaine inondable
HYPOTHÈSE : EXCLURE LA PLAINE INONDABLE DES SECTEURS À RECONSTRUIRE
Le plan de reconstruction de la ville fait le choix
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du réaménagement de la plaine inondable en remontant le niveau des terres mais sans pour autant parvenir à la rendre assez sûre pour y réinstaller du logement. Il est alors prévu l’implantation de diverses activités du secteur secondaire et tertiaire sous la forme d’une zone commerciale, de hangar ou d’immeuble de bureaux. Au vu de la trajectoire de la ville, la question se pose du bien-fondé d’un tel investissement sans assurance de voir ces secteurs d’activité se remplir et qui entraînerait la construction d’une une ville zonée par fonctions.
Reconstruire la ville à partir de la courbe de niveau +15m / La ville a connu plusieurs tsunamis comparables à celui de 2011 dans son histoire. C’est bien ce dernier qui a entraîné le plus haut niveau d’inondation jamais enregistré et peut à ce titre, raisonnablement servir de référence pour déterminer les secteurs à risques.
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Carte personnelle
DÉCROCHAGE U n nouveau rivageD’UNE VILLE PROSPÈRE
INTÉGRER LA PLAINE INONDABLE DANS LE RÉSEAU DE PARCS NATURELS PROTÉGÉS
En excluant le secteur inondable des surfaces 102
à rebâtir, il devient possible d’aménager un espace de transition entre le rivage et l’espace urbain. Cette «zone franche écologique» redonne au rivage un caractère plus naturel et constitue un corridor vert afin de relier les secteurs naturels protégés entre eux. Onagawa a alors l’occasion de représenter plus qu’une simple étape vers les destinations touristiques que sont les parcs naturels mais aussi un site de découverte à part entière. Un lieu où l’activité de l’homme s’inscrit en cohérence avec son environnement.
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Carte personnelle
DÉCROCHAGE U n nouveau rivageD’UNE VILLE PROSPÈRE
NOUVELLE ÉCONOMIE: PARCOURS TOURISTIQUE ET EXPLOITATION ARTISANALE
Ici un travail réalisé au premier semestre de l’aménagement d’une partie de la plaine en site d’exploitation artisanale et en centre de découverte. Ce projet profite de l’affaissement du sol pour remplacer le réseau viaire des secteurs détruits en réseau de canaux. Les différents programmes s’installent sur les empreintes des bâtiments détruits en mémoire du quartier disparu. Fonctionnant sur le rythme des marées, le niveau d’eau découvre et recouvre les empreintes et modifie le paysage soulignant l’impermanence de toute chose. Le site accueille des cultures d’algues, des parcs ostréicoles et des fermes de pisciculture.
2.
3.
4.
5.
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DÉCROCHAGE U n nouveau rivageD’UNE VILLE PROSPÈRE
1. Perspective depuis relief sur la plaine inondable. 2. Dispositif d’aménagement & programme. 3. Perspective intérieure, les pieds dans l’eau. 4. Coupe & structure légère : laisser place à l’éphémère. 5. Photographie maquette : un territoire de canaux.
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1.
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3.2
RECONSTRUIRE À L’ABRI Si les secteurs détruits par le tsunami ne reprennent pas place dans la plaine, il s’agit de trouver des lieux où reconstruire les logements manquants pour les habitants des villages temporaires ainsi que des services et des commerces au plus près de ces nouveaux secteurs bâtis.
TERRAIN À BÂTIR AU DESSUS DE 15 M D’ALTITUDE
Pour reconstruire, l’idée émerge alors de tirer parti de la situation géographique et de
relocaliser les zones à bâtir sur les hauteurs naturelles environnantes et ainsi de prévenir de façon moins coûteuse les dommages récurrents occasionnés par les tsunamis.
Une recherche algorithmique de terrains à l’abri du risque d’un tsunami / Yuzuru ISODA, un professeur de l’université de Tohoku a réalisé une étude pour l’association de géographie qui vise à déterminer par un outil algorithmique les sites aptes à l’accueil de constructions.7 Dans le port d’Onagawa, tout le secteur de la plaine a été inondé, y compris 116,4 hectares de zone bâtie. Sans se soucier de la décroissance démographique Yuzuru ISODA joue le jeu dans cette étude de trouver des terres de remplacement pour ces 116,4 hectares.
Les trois critères / L’approche de modélisation cartographique va étudier chaque
emplacement dans la zone d’étude selon plusieurs critères, et puis superposer les résultats pour obtenir une note générale par secteur. Dans la recherche de secteurs propices aux nouvelles constructions, sont considérées trois conditions: la pente, la surface du site candidat et la distance qui le sépare la zone bâtie initiale.
Note globale / Il apparaît qu’une grande partie des sites les mieux notés se
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situent à la base de la montagne de Washinokami Aza, au Sud du port ainsi que le plateau situé au Nord du port où sont déjà installés quelques équipements publics. Les meilleurs candidats pour accueillir de nouvelles constructions sont des terrains situés dans le prolongement de quartiers épargnés par le tsunami et sont déjà distribués par des routes existantes.
7. The 2011 East Japan Earthquake Bulletin of the Tohoku Geographical Association 31 May, 2011 (http://tohokugeo.jp/articles/e-contents19.html)
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Carte personnelle
DÉCROCHAGE U n nouveau rivageD’UNE VILLE PROSPÈRE
Exemple d’emplacement de terrain à bâtir retenu par l’étude algorithmique
ARTICULATION DES USAGES SUR LA COURBE DE NIVEAU +15M
Si l’on se réfère à l’ancien plan de la ville, les nouveaux secteurs résidentiels à bâtir
tendent à s’éloigner des services et des commerces, qui jusqu’alors se concentraient aux alentours de la gare et du port. Pour s’adapter à cette situation et éviter la formation de quartiers zonés par fonction (zone d’activités, centre commercial, lotissement résidentiel, etc...) notre proposition est de répartir les équipements et services le long de la périphérie de la plaine inondable.
Le quartier résidentiel Sud isolé / Dans la répartition actuelle, quatre
secteurs se distinguent (voir page ci-contre) avec au Nord le pôle gare/mairie, à l’Est le port, à l’Ouest le secteur épargné, et au Sud un quartier résidentiel ou se concentrent les zones à rebâtir. Mais si les trois premiers secteurs gardent de manière héréditaire des usages variés et spécifiques à chacun, le secteur Sud abrite quasi-exclusivement du tissu résidentiel pavillonnaire.
Un circuit de navette pour lier les quartiers entre eux
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Carte personnelle
Équilibrer les services entre quatre quartiers
2. La criée
3. Commerces
DÉCROCHAGE U n nouveau rivageD’UNE VILLE PROSPÈRE
1. La gare
女川コンテナ村商店街 2013/8/15
4. Tissu résidentiel Date de l'image : août 2013
Les photos sont protégées par les droits d'auteurs de leurs propriétaires.
Hiroaki Kurita Photo
1. 2.
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3.
4.
Carte personnelle
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3.3
UN QUARTIER RÉSIDENTIEL À DÉVELOPPER. Ce quartier monofonctionnel au Sud de la ville et qui est appelé à s’étendre pour accueillir les habitants des villages temporaires, offre un potentiel intéressant. Situé face au port et au pied de la montagne Washinokami Aza, son aménagement pourrait enrichir le quotidien de nombreux habitants et représenter un lieu d’accueil privilégié pour les visiteurs venus apprécier les richesses de la ville.
ENJEUX MUTUELS ENTRE LES RIVERAINS ET LES VISITEURS
Afin de répondre aux enjeux soulevés par cette nouvelle stratégie d’aménagement, nous
allons nous pencher sur le quartier résidentiel Sud qui accueille une partie des terrains pour la reconstruction mais ne dispose pas encore d’équipement collectif ni de service de proximité dédié. En plus de sa destination résidentielle, le secteur est favorable à l’accueil touristique puisqu’il se situe tout près du départ des bateaux-navettes et juste au pied d’un sommet où se trouve l’un des plus beaux points de vue du parc national.
Lieu d’échanges et de partage / Alors que la communauté s’est resserrée à la suite de la catastrophe, le démantèlement progressif des logements et équipements temporaires ne doit pas entrainer la dislocation du tissu associatif. Au contraire il convient de permettre la pérennisation des initiatives nées de cette période transitoire et de le faire valoir auprès des habitants des villes voisines.
Services de proximité / Plusieurs installations commerciales provisoires sont apparues aux quatre coins de la ville pour approvisionner les habitants qui avaient tout perdu. Grâce à cette proximité, même les habitants privés de voiture pouvaient s’en sortir sans avoir à se rendre au centre commercial d’Ishinomaki. Ce principe, s’il est maintenu peut répondre à l’enjeu de prolonger l’autonomie d’une population vieillissante et en perte de mobilité mais aussi de proposer des points de vente de produits locaux aux visiteurs de passage.
Accessibilité d’un quartier à fort dénivelé et accès au sommet /
Si la construction sur les reliefs répond à la nécessité de reconstruire à l’abri du risque de tsunami, cela représente aussi un défi, lorsque près de la moitié de la population aura plus de 65 ans en 2020. La mise en place d’une voie de tramway à câble offre la possibilité de desservir l’ensemble du quartier déjà existant et à venir mais aussi de constituer une attraction touristique pour les promeneurs désireux de profiter d’un accès facilité au sommet du parc national en surplomb.
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1. Promenade dans la plaine
2. Navette
Un site sur la périphérie de la plaine inondable, face au port, constitue un point de départ favorable vers les sommets.
2.
1.
Site projet Circuit navette Voie tramway à câble Zones d’extension urbaine
4.
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3.
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3. Escaliers dans une rue en pente
4. Randonnée au sommet
L’INSTALLATION D’UN TRAMWAY A CÂBLE
La voie de tramway à câble a à charge de parcourir un secteur urbain en pente
régulière mais aussi un site montagneux plus escarpé, soit des pentes variant entre 10 et 60 %. Le premier tiers de la voie est déjà équipé en matière d’infrastructures routières et oriente le choix d’un dispositif pouvant emprunter ses voiries existantes. Le câblecar, symbole des pentes de San Francisco, est un bon exemple du partage des voies routières et peu s’adapter aux rues étroites. La technologie motrice choisie est celle du câble sans fin. Ce système fermé, couplé à l’utilisation de deux rames, nécessite peut d’énergie motrice, la rame descendante compensant tout ou une partie du poids de la rame ascendante. La ligne parcourt une voie ferrée unique et comporte un évitement à mi-hauteur. Les deux rames se croisent, sans intervention du conducteur excluant tout risque de collisions. En ce qui concerne les véhicules, le premier est destiné au transport de voyageurs et le second aux transports de matériel et de marchandise. Cette dernière peut servir de monte charge au quotidien à destination des commerces ou plus ponctuellement pour un déménagement de particulier par exemple. On peut aussi imaginer que cet équipement prenne part à la reconstruction en offrant un moyen d’acheminement de matériaux pour le chantier de la partie supérieure du quartier en devenir.
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Station amont
Station aval
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Système d’entraînement
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Flying Dutchman, Afrique du Sud
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3.4
LE LIEN DE SOL «CHI.EN» Le Chi.en désigne le lien social qui se noue entre les personnes qui partagent le même espace de vie quotidien. Il est encore utilisé au Japon pour nommer les «communautés de quartier» qui entretiennent la qualité de l’environnement communautaire. Mais depuis peu la situation démographique met à mal ces réseaux d’entraide mutuelle. Ici l’objectif est de formuler un espace de cohésion pour accueillir le monde associatif d’Onagawa et le mettre en relation avec les visiteurs.
LA PARCELLE, LE RUISSEAU ET LA ROUTE ABANDONNÉE
Le site choisi est situé en tête de proue du quartier. La base Sud de la parcelle est
enserrée dans le tissu résidentiel et la pointe Nord opère une avancée à la périphérie de la plaine inondable. Deux routes bordent les flancs Est et Ouest du terrain et se rejoignent sur la pointe en direction du Port.
Le ruisseau / C’est l’apparition d’un cours d’eau qui fait dévier la route Est et donne cette forme particulière à la parcelle. La tranchée formée par le passage de l’eau est très profonde et a été par endroits, flanquée de pierre et de béton.
La route abandonnée / Une fine ligne de bitume témoigne de l’ancien passage d’une ruelle dans la ville disparue. Désormais la route ne distribue plus rien mais constitue un parcours périphérique alternatif pour les mobilités douces.
Le modèle type dans la pente / Les constructions dans la pente répondent toutes aux mêmes principes : ne terrasse en béton joue le rôle de socle et une structure à ossature légère est recouverte d’un bardage extérieur.
1. Le ruisseau
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3. La parcelle face à la plaine
2. La route abandonnée
4. Maison sur socle
1.
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2.
3.
4.
Site projet Circuit navette Voie tramway à câble
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LA VIGIE ET LE HAMEAU RELAIS
Avec sa position dans le paysage, cet équipement collectif doit revêtir une dimension
symbolique pour les habitants, car le bâtiment constitue un élément-clef du «Bosai» (prévention des désastres), mis en place dans cette nouvelle stratégie d’aménagement. Effectivement, la construction prend place à la limite du secteur inondable de la ville et à ce titre il signale physiquement la frontière entre les secteurs sûrs et ceux à risque. Au Japon de nombreux dispositifs urbains tiennent ce rôle face aux «Tensai» (catastrophes naturelles) et chacun d’eux par leur nature spécifique, représente un «retour d’expérience» suite à un cataclysme, qui a finalement mené à une modification des règles d’urbanisme.8
Le Buraku (hameau) / C’est la désignation pour un espace d’habitations groupées mais est aussi utilisé pour parler d’une communauté basée sur les relations sociales et culturelles. Dans sa forme et son fonctionnement, le projet réinterprète ce concept de regroupement qui accueillait historiquement les communautés de marchands et d’artisans et qui servait souvent d’étapes dans les circuits d’échange économiques et sociaux. Dans cette démarche l’équipement s’adresse à la communauté des habitants d’Onagawa, tant les résidents «exclusifs» que les artisans, les pêcheurs ou les agriculteurs, mais il va aussi intégrer des services adaptés aux visiteurs en séjour dans la ville.
Le Gokaido (nœud de mobilité) / En référence au célèbre réseau de cinq grandes voies terrestres qui irriguaient l’archipel à l’époque d’Edo (1600-1900), ce bâtiment-relais considère et organise les cinq moyens de locomotions qui s’y croisent, la marche, le vélo, la voiture, le tramway à câble et le bus-navette.
Eki Shonaikai (gare communautaire) / La gare est une figure très
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importante des villes japonaises. Depuis les années 30 c’est aux compagnies ferroviaires privées que revient la politique urbaine via la promotion immobilière et à ce titre, les gares deviennent rapidement beaucoup plus que de simples équipements de transport. Elles cristallisent l’effervescence, organisent et polarisent la croissance des villes, particulièrement dans le périurbain. Mais dans ce projet c’est à la communauté associative que revient la politique de ce lieu de rayonnement, car à la suite du séisme de Kobe, les «NPO» (non profit organization) qui ont largement démontré leur capacité à réagir aux désastres naturels, peuvent désormais bénéficier du statut de personne morale et prétendre à profiter des subventions à la reconstruction. En effet dans le contexte démographique actuel du Japon, les liens de solidarité et la restauration du lien social contre l’isolement des personnes, font partie intégrante de la gestion du risque et de l’effort de reconstruction en cas de catastrophe. 8..Matsubara Kosuke, la prévention des désastre, le vocabulaire de la spatialité japonaise, CNRS, 2013
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Circuit bus-navette Voie tramway à câble Voie verte
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CIEL, TERRE, HOMME, Ten-Chi-Jin
Cette expression a longtemps été considérée au Japon, comme l’énoncé des trois
éléments constituants de l’univers et elle est à l’origine d’une notion esthétique dominante au Japon: la composition asymétrique. Sur la base de cette trilogie, est fondé un principe d’équilibre par la composition de formes naturelles et imprévisibles. La particularité de cette loi de composition morphologique est l’absence d’axe qui ouvre la voie à un équilibre dynamique. De cette esthétique ressort un principe fondamental de l’architecture Japonaise qui est de trouver l’équilibre dans l’inachevé, un idéal de composition n’atteignant jamais la perfection et qui laisse la porte ouverte à des modifications de l’ouvrage au fil du temps.9
Yane (Le toit) /
Dans ce projet, c’est de la géométrie du toit que découle l’organisation générale de l’édifice. Inspiré d’un modèle de «Kusudama» (variante de l’origami), le motif semble pouvoir se prolonger à l’infini. Sa répétition en cascade dans la pente ménage des entrées de lumière et ouvre la vue depuis l’espace couvert sur la plaine. La trame qui organise la toiture a été calibrée pour s’adapter à la forme particulière de la parcelle et pour dessiner à l’aide des descentes de charges l’emprise des terrasses accueillant les différents programmes.
Jimen (le sol / Le travail du sol s’inspire directement des constructions proches. Des
terrasses s’inscrivent et ménagent des surfaces planes dans la pente. Aux deux séries de terrasses entourant la rue couverte est associée une troisième série de l’autre côté du ruisseau. Ces dernières ne seront pas couvertes et projettent le motif d’implantation vers la plaine.
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Façade Nord
1 0
5
9. Philippe Bonnin et Nishida Masatsugu, Ten-Chi-Jin, le vocabulaire de la spatialité japonaise, CNRS, 2013
1 0
10
10 5
20
20
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Mouvement de toiture
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Disposition des terrasses
LA TERRE SELON LE VENT, Fudo
Ce terme parle du rapport qu’entretient une société humaine à l’environnement. Le mot original chinois est défini par «les coutumes du pays» et «le climat d’une région». Il se réfère à la fois à la nature et à l’humain pour souligner comment l’environnement marque la société sans oublier la subjectivité de cette dernière. Augustin Berque dans le vocabulaire de la spatialité japonaise, synthétise l’idée de Fudo par ces mots: «le rapport d’une société humaine à l’environnement, s’établit dans la contingence de l’histoire, et il est donc toujours singulier. Le milieu incarne l’histoire, et l’histoire donne sens au milieu».
Le climat / Si le projet se présente comme une vaste toiture, c’est dans l’optique
symbolique de réunir autour d’un lieu commun. Le toit revêt un sens très particulier puisqu’il a été dans l’architecture japonaise le premier dispositif de délimitation spatiale. Alors qu’en Europe, la façade concentre toute l’attention, au Japon c’est le toit qui a été pendant longtemps le signe apparent du statut social des occupants d’une maison. L’égard porté aux toitures prend sa racine dans la nature humide du climat qui est particulièrement marqué dans la région du Tohoku. Les quatre mois de l’été sont très chauds et pluvieux ce qui les rend particulièrement étouffants, alors que les longs hivers voient arriver les courants d’air froid provenant de la Sibérie accompagnés d’importantes chutes de neige sur les montagnes et de précipitations dans les plaines.
La mise en scène des eaux pluviales / Les pentes de toit entraînent
l’eau de pluie soit en périphérie, soit au centre de la toiture vers la rue couverte. En périphérie l’eau ruisselle directement du toit et est absorbée par une ceinture périphérique composée d’un cheminement de galets. Alors que dans la rue couverte l’eau est accompagnée et alimente une noue végétalisée qui joue le rôle de jardin intérieur traversant. Finalement, l’ensemble des eaux d’écoulement se rejoignent dans un petit bassin de rétention avant de se déverser dans le ruisseau.
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Hakusui Nursery School / Yamazaki Kentaro
Écoulement EP
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Pentes de toit
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Rideau d’eau sur la noue
LA RUE COMMERÇANTE COUVERTE, Shotengai
A l’époque d’Edo la réglementation parcellaire s’arrêtait au seuil de la façade et
ne prenait pas en compte le prolongement des toitures sur la rue. Ainsi laissés à la discrétion du propriétaire, il n’était pas rare de voir les auvents se projeter allègrement sur l’espace public pour accueillir l’étal d’un magasins et ainsi rentabiliser la taxe foncière. Bien que cette caractéristique du paysage urbain Japonnais ait disparu à la suite d’une réforme fiscale qui a rendu ce procédé illégal, le principe des rues commerçantes couvertes s’est perpétré avec les Shotengai construites spécialement pour proposer cette typologie d’espace. Ici la rue couverte est polarisée entre l’arrêt de tramway, côté plaine au Nord et l’arrêt de bus, côté quartier résidentiel au Sud. Ainsi réunis autour de cet axe, chaque commerce et services bénéficient de l’affluence des autres et mutualisent un espace de lien social. Les abords du projet qui ne donnent pas directement sur les deux entrées de la rue principale, sont reliés par de petites venelles transversales
Shotengai
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1
10 5
0
20
1. Arrêt tramway, parc à vélos
2. Arrêt Bus
3. Préau des fêtes, marché couvert / Grenier 4. Office du tourisme / bureau des associations 5. Boutique-café, Restaurant / Terrasse collective 6. Alimentation, Tabac ,presse , produits locaux 7. Salle des associations, atelier , théâtre, Musique 8. Bains publics
3.
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5.
1.
4.
7.
133 6.
2. 8.
LE LIEN, En
Cheminement de galets et franchissements
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LA GALERIE EXTÉRIEURE COUVERTE, Engawa
Le long des deux routes qui bordent le projet, est proposé un parcours couvert. Passant
DÉCROCHAGE U n nouveau rivageD’UNE VILLE PROSPÈRE
sur l’emprise des socles, ces deux linéaires offrent un cheminement alternatif à la pente, puisqu’ils sont agrémentés de volées d’escaliers. Ce dispositif établi aussi un espace de transition entre les espaces intérieur et extérieur autour duquel, ils se superposent sans ordre apparent. S’ouvrant sur l’Engawa, la plupart des programmes peuvent profiter de cet espace comme d’une extension ou d’un accès direct et pratique pour les livraisons par exemple.
135
100
10 0 cm
Liaison, sol/socle/ossature 10 0 cm
100
LA CONSTRUCTION PARASISMIQUE
Pour répondre à l’enjeu de la résistance de l’édifice aux épisodes sismiques, nous
optons pour la méthode dite de l’isolation sismique de la base. Cela consiste à étudier la nature du sol pour en connaitre son spectre de réponse aux vibrations et de s’en éloigner dans la fondation du bâtiment pour créer un phénomène d’isolation.
Le socle comme diaphragme rigide/ Dans la plaine d’Onagawa la nature
du sol est sédimentaire et par conséquent assez souple. Pour obtenir une isolation, il convient alors de réaliser un socle rigide afin que la période du mouvement de réaction aux vibrations soit découplée par rapport avec celle du sol. Ainsi, en dissociant le mouvement du sol et le mouvement de la structure, cela permet de réduire les forces transmises à cette dernière. Les forces qu’exercent les séismes sur la structure isolée sont normalement de l’ordre de 3 à 10 fois plus petites que les forces pouvant s’appliquer à la structure non isolée.
Un lit et une ceinture de galets / Le socle de béton repose sur un lit de galets
roulés qui permet à la dalle, une fois la résistance au frottement atteinte, de se mettre à glisser et ainsi de s’isoler des mouvements horizontaux du sol. D’autre part la bande de galets encerclant le socle du projet (qui sert notamment à l’écoulement des eaux pluviales), permet de laisser une marge de déplacement à l’édifice en cas de séisme.
L’ossature souple et légère / Une fois le socle isolé, il reste à la structure
d’accepter les mouvements résiduels et de dissiper leur énergie. Pour se faire il faut réduire au maximum les contraintes appliquées aux éléments d’ossature en allégeant les masses. Le profil de la structure permet un contreventement de la toiture en partie haute, tout en laissant une liberté de mouvement aux poteaux en cas de séisme.
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SYSTEME FILTRATION
SYSTEME FILTRATION
EGOUTS
1
EGOUTS
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0
Coupe transversale entrée Sud et bains
1 0
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10 5
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3
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Emprise socle béton
Ossature poteaux tube /poutres IPN
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SYSTEME FILTRATION
EGOUTS
1
Coupe transversale salle des assos et alimentation
10 5
0
1 0
20
10 5
20
STRATÉGIE THERMIQUE DE FAIBLE EFFUSIVITÉ
Pour
atteindre un bon niveau de confort thermique tout en limitant les coûts de fonctionnement, le projet propose des matérialités sélectionnées pour leur caractéristique de faible effusivité. Étant donner que les programmes accueillent exclusivement des activités diurnes, le recours au chauffage peut être limité au maximum en évitant l’effet de paroi froide qui oblige à maintenir élevée la température de l’air. D’autre part, si la stratégie thermique retenue s’éloigne de celles habituellement rencontrées en France (forte isolation et inertie), ce choix est directement inspiré des méthodes couramment adoptées au japon pour des raisons contextuelles. Effectivement, l’intelligence constructive développée là-bas traduit le besoin de réduire les masses afin de prévenir l’impact des épisodes sismique.
L’ossature hourdée/
Pour construire l’enveloppe des espace clos, nous mobilisons ici un savoir faire japonais traditionnel: le «Kabe» (壁), une fine paroi de torchis. Si la méthode est ancestrale, elle n’en a pas pour autant été oubliée et souligne le paradoxe japonais du grand écart établi entre modernité et tradition. La technique est conçue spécialement pour les structures à ossature puisqu’elle consiste à remplir les espaces laissés vides entre les montants. Dans ce cas, la terre n’est pas porteuse et peut être largement mélangée avec de la paille hachée finement ou de la sciure de bois pour favoriser une caractéristique thermique de faible effusivité. «Pour constituer la paroi, l’espace vide à combler est quadrillé de montants, des demibambous placés verticalement et horizontalement, mawatashi 間渡, « qui relient les espaces entre poteaux », et sur lesquels sont liées les fines lattes du « petit lattis », komai 小舞. L’« hourdis de terre », kabe tsuchi 壁土, est appliqué directement sur le petit lattis.» 10
Flexibilité des espaces / Dans le cadre d’une activité associative, les besoins
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peuvent évoluer et se redéfinir en fonction de nouvelles appropriations inattendues. Le choix de ce type de parois légères peut aussi permettre l’adaptation du plan à un changement d’usage. Ainsi sur la base de la trame d’ossature, la surface intérieure peut être subdivisée, mais c’est aussi l’enveloppe qui peut être modifiée pour incrémenter ou retrancher un espace laissé à l’extérieur ou à l’intérieur au moment de la construction fondatrice.
10. Conférence de Nicolas Fiévé, Histoire de l’architecture et des jardins du Japon pré-moderne, 2011.
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Salle des associations
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Mise en œuvre des panneaux de Kabe
LE PRÉAU DES FÊTES ET LE GRENIER
Vue depuis la plaine
LA BOUTIQUE / CAFÉ / RESTAURANT
Vue depuis la terrasse
#
#
CONCLUSION
La question de l’avenir des secteurs périurbains est un sujet préoccupant au Japon. Avec
la chute des prix de l’immobilier, de nombreux terrains au cœur des villes, qui étaient autrefois réservés à la spéculation, se libèrent et accueillent de nouveaux programmes de logements. Après une dilution extrême de ses aires urbaines, le gouvernement Japonais promeut un modèle de ville plus compacte et plus écologique. Désormais, les classes moyennes, longtemps repoussées hors des centres-villes par la pression foncière, bénéficient de ces nouvelles offres résidentielles et apprécient la perspective de réduire la durée de leur trajet pendulaire. Il en résulte un exode périurbain, comme dans la banlieue de Tokyo où le phénomène de désetalement urbain est accéléré par la démesure de la ville. Des quartiers entiers se vident et laissent les populations les plus fragiles isolées dans un milieu urbain en voie de délabrement. Dans le cas d’Onagawa la table rase opérée par le tsunami nous permet de proposer un nouvel aménagement et ainsi d’adapter la ville à cette problématique. En ce sens elle constitue un laboratoire propice afin d’échafauder des stratégies d’aménagement ajustées pour ces territoires en mutation. Ici il est question de joindre l’utile à l’agréable en valorisant les richesses naturelles disponibles et ainsi de saisir l’opportunité de réorienter l’économie et la stratégie d’attractivité vers le tourisme de proximité. Le projet a aussi comme objectif affiché d’être le support d’une communauté soudée qui est essentiel au bon fonctionnement du lien social dans la ville.
146
Mais qu’en est-il des banlieues d’immeubles de logements et du tissu pavillonnaire qui ont colonisé de vastes étendues à la hâte lorsque la pression foncière était au plus haut? Aujourd’hui ces secteurs ne voient plus leurs habitants se renouveler et représenteront bientôt des hectares de terrains artificiels et minéralisés sans utilités. On peut spéculer sur leur avenir en imaginant qu’ils pourraient s’agir d’opportunités futures si les prix du foncier devaient réaugmenter, mais il reste que le désetalement urbain amorcé va continuer pendant au moins quelques années et que les secteurs périurbains les moins attrayants se transforment déjà en ville fantôme. Le gouvernement japonais se penchent déjà sur ces problématiques et la réponse passe parfois par le re-tissage des réseaux d’entraide. Petit à petit, les services publics ferment et le vieillissement produit des déséquilibres au sein des communautés où les relations d’entraide établies entre les habitants se trouvent fragilisées. Il y a par exemple dans la région rurale d’Akita, un vaste plan d’action nommé «Bien être dans nos villages» qui encourage la coopération au sein des communautés locales. Avec comme slogan «un rôle par habitant» il est notamment question de sensibiliser les enfants et les personnes âgées à l’assistance mutuelle contre l’isolement.
11 Les défis du déclin démographique et de la croissance métropolitaine, Alain Faure, Natacha Aveline, Annes Mevellec, Mario Gauthier. 2012.
Un autre levier d’action expérimenté est le partenariat public-privé dans la relance des activités agricoles, de sylviculture et d’agrotourisme. L’organisation de réseaux économiques de proximité a pour ambition de créer de nouvelles opportunités d’emploi et de préserver les liaisons de transport.11
La situation que vit le Japon rend caduc l’ancien principe de développement urbain fondé sur l’anticipation d’une croissance continue. La perspective que des circonstances similaires puissent apparaître en Europe ouvre sur la question de l’anticipation de tels phénomènes. De la même manière les outils d’action expérimentaux mis en œuvre au Japon pour lutter contre l’isolement peuvent inspirer nos moyens de réagir à la désertification de nos campagnes.
DÉCROCHAGE C onclusion D’UNE VILLE PROSPÈRE
Mais ces chantiers sociaux sont encore marginaux et bien souvent c’est par de vastes chantiers bien réels qu’est traitée indirectement la question de la déprise démographique et du vieillissement dans le périurbain. Effectivement le choix fait à Onagawa d’une reconstruction de grande ampleur nécessitant des moyens et des délais importants, peut se lire à travers le prisme politique et la nécessité de redistribuer les richesses des centres métropolitains vers les périphéries par le biais d’emplois dans les travaux publics.
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Capture, POMPOKO de Isao Takahata
BIBLIOGRAPHIE Alain Faure, Natacha Aveline, Anne Mevellec, Mario Gauthier, Les défis du déclin démographique et de la croissance métropolitaine, HAL, 2012 Estelle Ducom,Quand les processus s’inversent: etalement et desetalement urbains au japon, manifestations et enjeux, HAL, 2008 Estelle Ducom, L’involution démographique et urbaine dans l’aire tokyoïte, HAL, 2007 Estelle Ducom, Vieillissement et aménagement: le «laboratoire» japonais, Cairn, 2007 Laetitia Fontaine, Romain Anger, Bâtir en terre, Belin, 2009. Marie Augendre, un modèle géographique de la catastrophe, Ebisu 47, 2012. Murielle Hladik, Enjeux de la reconstruction: recoudre le tissu urbain, renouer le lien social, Ebisu 47, 2012. Muriel Jolivet, Tokyo instantanés, Elytis, Bordeaux, 2012. Muriel Jolivet, Confidences du Japon, Elytis, Bordeaux, 2014. Natacha Aveline, Un financement original, la valorisation des gares au Japon, HAL, 2004
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Philippe Bonnin, Nishida Masatsugu, Inaga Shigemi, Vocabulaire de la spatialité japonaise, CNRS, 2014. Rémi Scoccimarro, Séisme et tsunami du 11 mars 2011: spalialisation de la catastrophe, Ebisu 47, 2012. Valérie November, Marion Penelas, Pascal Viot, Presses polytechnique et universitaires romandes, 2011. Venturi, Scott Brown, Izenour, L’enseignement de Las Vegas, Mardaga, 2008.
SOURCES 2.0 Ivar Ekeland, TOKYO | Capitale Post-Moderne, 2013. http://laboratoireurbanismeinsurrectionnel.blogspot.fr/2013/01/tokyo-capitalepost-moderne.html Kikuchi Masanori, Onagawa: la vie reprend, quatre ans après le tsunami, 2015. http://www.nippon.com/fr/in-depth/a04302/ Masateru HINO, Demographic trends should not be overlooked: aging and depopulation in Tohoku,2011. http://tohokugeo.jp/articles/e-contents6.html Nicolas Fiévé, Conférence de l’histoire de l’architecture et des jardins du Japon prémoderne, 2011. http://ashp.revues.org/1535?lang=en
Sébastien Lebègue, ONAGAWA March 2012 Japan Tsunami, 2012. http://sebastienlebegue.photoshelter.com/gallery/ONAGAWA
FILMOGRAPHIE I WISH, Hirokazu Koreeda. L’UTOPIE DU DÉSASTRE La «maison pour tous» de Rikusentakata, Richard Copans POMPOKO, Isao Takahata. SOUVENIRS DE MARNIE, Hiromasa Yonebayashi
DÉCROCHAGE D’UNE VILLE PROSPÈRE
Rémi Scoccimarro, Portail cours et documents de l’université Jean Jaurès, Toulouse. http://japgeo.free.fr/LiensV2.htm
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REMERCIEMENTS Nous tenons à remercier chaleureusement notre directrice d’études Clémence Dupuis pour sa grande implication dans le suivi de notre travail. Merci à Stéphanie David et à l’ensemble de l’équipe enseignante du Master «architecture villes, ressources» qui nous ont fait profiter de leurs connaissances avec passion. Merci aussi d’avoir élaboré cette nouvelle formule pédagogique très enrichissante. Merci à nos familles qui nous ont soutenu et qui nous ont permis de nous engager pleinement dans ces études qui le méritent. Merci à tout notre entourage pour leur amitié et leur soutien.
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« Architecture, Villes, Ressources » Responsable Master Stéphanie David
O
nagawa est une ville côtière qui cristallise de nombreux enjeux auxquels est confronté le Japon aujourd’hui. Situé non loin de Sendai, ce territoire périurbain connait une transition difficile face au phénomène de déprise démographique et de vieillissement rapide de sa population. D’autre part la ville portuaire est un exemple signifiant de la relation qui s’établit depuis peu au Japon entre une nature parfois violente et la société humaine. Le choc qu’a connu Onagawa lorsque un tsunami a frappé ses côtes le 11/03/2011, ouvre le débat sur le recours systématique à la technique et aux aménagements invasifs qui tendent à rompre la coexistence établie entre l’espace social et l’espace sauvage qui apporte bienfait ou destruction.
« Architecture, Villes, Ressources » Responsable Master Stéphanie David