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L’AFRIQUE

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L’ÉDITORIAL DE GERBA MALAM

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RENDEZ-VOUS D’AFFAIRES

MINE

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ENQUÊTE MATIÈRES PREMIÈRES : L’AFRIQUE A MAUVAISE MINE EXPLOITATION MINIÈRE AU CAMEROUN : L’IMPÉRATIF

DE TRANSPARENCE

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NIGER : L’URANIUM NE FAIT PAS LE BONHEUR PÉTROLE au congo : OPTIMISER LES GAINS DE L’ÉTAT

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MARCHÉS AFRICAINS KENYA : LES BONS POINTS DE LA GOUVERNANCE LOCALE ARMEMENT EN AFRIQUE : ÇA DÉPENSE À LA DÉFENSE

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DOSSIER HABITAT : LE SAVOIR-FAIRE CANADIEN HABITAT ET LOGEMENT EN AFRIQUE : UNE SITUATION PRÉCAIRE HABITAT ET LOGEMENT : L’EXPERTISE CANADIENNE

AU CŒUR DU DÉVELOPPEMENT

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CONSTRUCTION RÉSIDENTIELLE : Quelques ACTEURS CANADIENS

ÉVÉNEMENTS LE COMICE AGROPASTORAL NATIONAL DU CAMEROUN

a mauvaise

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Le savoir-faire canadien

L’Afrique, c’est 89% des réserves mondiales de platine, 81% de chrome, 61% de manganèse et 60% de cobalt. Mais les pays africains les plus riches en ressources sont aussi, souvent, les moins développés. La raison, elles n’en ont pas réellement le contrôle tant sur l’exploitation que les prix d’achat.

HABITAT ET LOGEMENT

SAVOIR-FAIRE

Le

CANADIEN

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Le secteur de la construction se classe en tête des industries au Canada et au moment où les pays africains veulent combler leur déficit en matière d’habitat et de logement, les entreprises canadiennes peuvent contribuer à la réalisation de nombreux projets par leur expertise.

Faire des affaires en Afrique est devenu incontournable. Le dernier baromètre indique un climat amélioré dans une activité dopée par d’abondantes ressources naturelles qui contribuent au retour sur investissement le plus élevé au monde.

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LE CAMEROUN À L’HEURE D’UNE AGRICULTURE

DE DEUXIÈME GÉNÉRATION

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CAMEROUN : L’AUTOSUFFISANCE ALIMENTAIRE EN DÉSÉQUILIBRE

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MARCHÉS NORD-AMÉRICAINS NOUS EMBAUCHONS ! LE CANADA EN DÉFICIT DE MAIN-D’ŒUVRE

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MONDIALISATION IMMIGRATION : LA CHASSE AU PORTEFEUILLE ÉTUDIANT

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DÉVELOPPEMENT LE BRÉSIL : LE TRANSFERT D’UN SAVOIR-FAIRE EN AFRIQUE

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AFFAIRES - DOING BUSINESS 2011 analyse : ÉCLAIRCIES DANS LES AFFAIRES EN AFRIQUE Investir en Afrique, C’EST TRÈS PAYANT ! FOCUS : LE CLIMAT DES AFFAIRES AU RWANDA LA CULTURE DANS LES AFFAIRES EN AFRIQUE : L’IMPORTANCE

DES RAPPORTS HUMAINS

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DIGNES DE MENTION

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DIVERSITÉS ET COMPÉTENCES HAMIDOU MAMADOU ABDOU : LE SENTIMENT

DU DEVOIR ACCOMPLI

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FLASH INFOS

AFRIQUE EXPANSION Magazine N˚ 36

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SOMMAIRE

ENQUÊTE MATIÈRES PREMIÈRES



LEUNE POUVOIR EN AFRIQUE ENTREPRISE TRÈS RENTABLE

H

ier, c’étaient les chefs d’État d’Afrique subsaharienne qui défrayaient la chronique avec leurs fortunes colossales : 5 milliards de dollars US pour Mobutu Sese Seko du Zaïre, 3 à 5 milliards de dollars pour Sani Abacha du Nigeria, 2 milliards de dollars pour Moussa Traoré du Mali, etc. Aujourd’hui, ce sont les dirigeants de l’Afrique du Nord qui font la manchette pour les mêmes raisons : la famille Ben Ali, avec une fortune évaluée entre 5 et 10 milliards de dollars; les Moubarak, entre 40 et 70 milliards de dollars. Du Nord au Sud, les dirigeants africains se ressemblent donc. Plusieurs d’entre eux ont ainsi la fâcheuse tendance à utiliser le pouvoir comme une inépuisable source d’enrichissement. Leur pays est leur propriété. En fait, plus que des hommes politiques, ils sont surtout des hommes d’affaires qui dirigent des pays qui sont à leurs yeux des entreprises. Celles-ci n’ayant pas de charges (pas de personnel à payer ni d’impôts, pas de loyer, pas de prêts à rembourser), on comprend qu’elles fassent des profits faramineux et que leurs dirigeants, pardon! leurs PDG, soient parmi les personnalités les plus riches au monde.

L’ÉDITORIAL DE GERBA MALAM

nos arrière-petits-fils seront à l’abri du besoin. » Non. Ils continuent de se servir. Pour preuve : le jour même de son départ, Leila Ben Ali est allée à la Banque centrale de Tunisie retirer 1,5 tonne de lingots d’or. Comme quoi, tout ce qu’elle a pu accumuler pendant 23 ans n’était pas assez et qu’il lui en fallait toujours plus. L’accumulation de ces fortunes se fait au moyen des détournements de fonds publics, de grosses commissions prélevées sur les gros contrats accordés par l’État et par le biais des entreprises contrôlant des secteurs clés de l’économie du pays. Quelles entreprises nationales ou étrangères peuvent refuser de faire affaires avec les sociétés appartenant au président, à ses enfants ou ses amis? Aucune, car les résultats sont garantis. Ces biens mal acquis sont rarement investis sur place, car c’est trop risqué. Il faut les mettre en lieu sûr. Les caches sont généralement en Occident. Les destinations les plus connues et les plus courues sont la Suisse, le Liechtenstein, Monaco,

LA PERSISTANCE DE LA CORRUPTION EN AFRIQUE TRADUIT L’ABSENCE DE PROGRÈS SIGNIFICATIFS QUANT AU SENS DES RESPONSABILITÉS DES PERSONNES AU POUVOIR. Comment se fait-il que le pouvoir en Afrique soit synonyme d’enrichissement? Plusieurs raisons expliquent cet état de choses. La première est liée à une certaine mentalité. En effet, alors que sous d’autres cieux, les gens rêvent de pouvoir pour changer en mieux le monde dans lequel ils vivent, en Afrique, bon nombre de dirigeants veulent le pouvoir parce qu’il change d’abord leur vie. Comme ils sont souvent issus des familles modestes, ce pouvoir leur sert de tremplin pour réaliser leurs rêves les plus fous : châteaux, vie de prince, prestige, privilèges…Bref, le pouvoir leur donne accès à tout ce que la vie leur avait refusé jusque-là. Deuxième raison : ils évoluent dans un contexte où ils n’ont de comptes à rendre à personne. C’est tout le contraire de ce que l’on observe dans les pays démocratiques où les dirigeants ont l’obligation de transparence. Ainsi, au début de leur mandat, ils doivent déclarer tous leurs biens. On sait aussi quel est leur revenu annuel. Exemples : le président des États-Unis a un salaire annuel de 400 000 dollars, le premier ministre du Canada, 315 000 dollars, le président français, 240 000 euros, etc. On peut donc vérifier, à la fin de leur mandat, l’état de leur patrimoine personnel. Ce sont ces garde-fous qui sont encore absents dans plusieurs pays africains et qui expliquent cette impunité généralisée. Certes, de plus en plus, la constitution de certains pays (Algérie, BurkinaFaso, Burundi, Cameroun, Côte d’Ivoire, Ghana, Niger, RCA, Sénégal, Tchad, Togo, RDCongo, etc.) prévoit que le nouveau président déclare ses biens. Reste à voir jusqu’à quel point ce texte est réellement appliqué dans les faits. Le plus étonnant dans cet enrichissement illicite des dirigeants, c’est qu’il ne s’arrête jamais tant qu’ils sont au pouvoir. À aucun moment, ils ne se disent : « Bon, ça suffit. Même

les îles Caïmans et le Luxembourg. Ce n’est un secret pour personne que ces paradis fiscaux protègent la criminalité économique et sont complices du pillage des pays du Sud qui leur profite largement. Pourtant, depuis 2003, les Nations Unies ont adopté une Convention contre la corruption dont l’un des principaux objectifs est précisément de « prévenir, détecter et décourager de façon plus efficace les transferts internationaux d’avoirs illicitement acquis et de renforcer la coopération internationale dans le recouvrement d’avoirs ». Même si 144 pays l’ont signée à ce jour, force est de constater que cette coopération judiciaire traîne les pieds et que les résultats sont très en deçà des attentes. En effet, sur les 20 à 40 milliards de dollars qui sont détournés chaque année dans les pays en développement, seuls 5 milliards ont été restitués ces 16 dernières années. En Afrique, le bilan des procédures de restitution de biens ayant abouti est pathétique. Ainsi, le gouvernement malien n’a pu récupérer que 2, 4 millions de dollars sur 2 milliards; l’État nigérian, un peu moins d’un milliard de dollars sur 5 milliards; l’Angola, 21 millions (sur 4, 2 milliards), etc. En somme, une goutte d’eau dans l’océan des avoirs détournés! Comme on peut le constater, la bataille contre la corruption et le recouvrement des avoirs volés s’annonce difficile et longue. Car au-delà des différences entre les systèmes judiciaires d’un pays à l’autre, de la lenteur des procédures et de la nécessité de produire des preuves que les biens ont été mal acquis, il reste que la corruption reste un fléau en Afrique. Sa persistance dans la majorité des pays traduit l’absence de progrès significatifs quant au sens des responsabilités des personnes au pouvoir. AFRIQUE EXPANSION Magazine N˚ 36

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AFRIQUEEXPANSION.COM Face au manque d’électricité qui menace la fragile et récente reprise économique de leur pays, les Zimbabwéens tentent de s’en sortir tant bien que mal. Selon les chiffres officiels, le Zimbabwe a en effet besoin de 2200 mégawatts par mois pour couvrir ses besoins énergétiques, presque le double de ce dont il dispose actuellement, à savoir 1200 mégawatts, importations comprises. Pour lire la suite:

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dies et toujours fiables sur l’actualité économique d’un continent en constante évolution : l’AFRIQUE Vous trouverez également sur le site la VERSION DIGITALE d’AFRIQUE EXPANSION MAGAZINE, plus enrichie avec des dossiers électroniques exclusifs sur des informations pratiques concernant le monde des affaires en Afrique.

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LIBYA 2011

Du 14 au 18 mars 2011 Tunis, Tunisie

Du 28 au 30 mars 2011 Tripoli – Libye

Le Forum 2011 de partenariat du FIC (Fonds d’investissement climatique) aura lieu cette année à Tunis, en Tunisie, du 14 au 18 mars 2011 sous l’égide de la Banque africaine de développement (BAD), un de ses principaux acteurs en Afrique. Le FIC qui a pour mission de contribuer à l’élaboration de solutions efficaces et globales en matière de changement climatique, organise une fois par an une réunion où toutes les parties prenantes de ce fonds peuvent échanger sur les orientations stratégiques, les résultats et les impacts de leur travail au sein du FIC. Près de 450 participants, dont de hauts représentants des gouvernements, des banques multilatérales de développement (BMD) et d’autres institutions, sont attendus à ce Forum.

La 5e édition de la Conférence sur le pétrole et la Géoscience en Afrique du Nord se tient cette année du 28 au 30 mars 2011 à Tripoli, en Libye. Organisé par la compagnie pétrolière libyenne, NOC, et l’Association européenne des géoscientifiques et ingénieurs, l’événement espère rassembler plus de 700 personnes, des experts et cadres supérieurs d’entreprises nationales et multinationales du secteur pétrolier et gazier, des centres de recherche et des universités spécialisés en Géosciences qui auront ainsi l’occasion d’échanger leurs réflexions, leurs idées et leurs expériences sur les problèmes liés à la question de l’énergie. Infos : http://events.infooil.com/event21727/libya.2011.5th.north. african.mediterranean.petroleum.and.geosci.event.aspx

Infos : http://www.afdb.org/fr/news-events/events-calendar/

CONFÉRENCE : « L’AFRIQUE EN ESSOR » FORUM ÉCONOMIQUE MONDIAL SUR L’AFRIQUE Du 14 au 15 mars 2011 Toronto, Canada

Du 4 au 5 mai 2011 Cape Town, Afrique du Sud

Du 14 au 15 mars 2011 aura lieu à Toronto au Canada, la conférence « L’Afrique en essor : aux frontières de l’entreprenariat et de l’innovation », organisée par MaRS Discovery District. Regroupant des chefs de file du milieu des affaires et des sciences ainsi que de hauts fonctionnaires, cette conférence va porter sur plusieurs aspects de l’entreprenariat en Afrique tels que le développement des affaires, les secteurs de croissance, le financement, la commercialisation de la recherche, les nouveaux modèles de développement, les technologies de l’information et des communications, l’innovation dans la gouvernance, etc.

Le 21e Forum économique mondial sur l’Afrique qui a pour thème cette année, « De la vision à l’action, la prochaine étape pour l’Afrique », se tiendra du 4 au 5 mai 2011 à Cape Town en Afrique du Sud. Comme tous les ans, plusieurs dirigeants des pays africains et du reste du monde sont attendus à ce Forum pour partager leurs réflexions sur les grands enjeux économiques du continent.

Infos : http://www.cvent.com/EVENTS/Info/Summary.aspx?e=92ebea91aaf7-4a3e-af12-97b7458580f5

FUTURALLIA KC 2011 Du 18 au 20 mai 2011 Kansas City, États-Unis

Infos : http://www.weforum.org/events/ world-economic-forum-africa-2011

eLEARNING AFRICA 2011 Du 25 au 27 mai 2011 Dar es Salaam, Tanzanie

Après des éditions en Belgique, en Pologne, au Canada, au Qatar, et plus récemment en France, la 16e édition de Futurallia aura lieu dans la ville de Kansas City aux États-Unis. Ce Forum International de Développement des Entreprises qui se tient sur deux jours (18 au 20 mai 2011), prévoit de réunir plus de 800 dirigeants et décideurs des PME et PMI de tout secteur d’activités et originaires de différents pays dans le monde. Des entrepreneurs des pays comme l’Algérie, le Burkina-Faso, le Canada, les ÉtatsUnis, la Chine, l’Inde, la Côte d’Ivoire, la France, le Maroc, le Qatar, etc. sont ainsi attendus. Cet événement unique et de renommée internationale, propose donc à ces professionnels de leur organiser des rencontres professionnelles et individuelles avec les interlocuteurs de leur choix.

Répondant aux besoins de mise en réseau du eLearning et des TIC appliquées à l’éducation à distance, la conférence annuelle « eLearning Africa » est le plus grand rassemblement de professionnels dans ce secteur en Afrique. Cette conférence permet aux participants de développer des contacts et des partenariats à la fois multinationaux et transversaux avec les acteurs du secteur, ainsi que leurs connaissances, savoir-faire et compétences. L’édition 2011 se concentrera sur la jeunesse africaine (qui représente plus de 40% de la population totale) et son énorme potentiel, en examinant entre autres les tentatives de politiques pour inclure les plus désavantagés d’entre eux (ceux sans emploi et non scolarisés) dans l’ère digitale et en explorant comment les nouvelles technologies peuvent leur permettre de devenir une force motrice pour la prospérité sociale et économique du continent africain.

Infos : http://www.futuralliakc2011.com/fr/

Infos : http://www.elearning-africa.com/fra/index.php AFRIQUE EXPANSION Magazine N˚ 36

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RENDEZ-VOUS D’AFFAIRES

FORUM 2011 DE PARTENARIAT DU FIC


ENQUÊTE MATIÈRES PREMIÈRES

L’AFRIQUE

a mauvaise

MINE L’Afrique, c’est 89% des réserves mondiales de platine, 81% de chrome, 61% de manganèse et 60% de cobalt. Avec le pétrole, ces réserves minières permettent la diversification des risques et sont nécessaires à la puissance des pays industrialisés et, désormais, émergents comme la Chine et l’Inde. Mais les pays africains les plus riches en ressources sont aussi, souvent, les moins développés. Et au-delà de la gestion discutable des revenus de ces ressources, il y a lieu de se demander si la part qui leur revient est juste et équitable. Un début de réponse a été apporté par la création de l’Initiative pour la transparence

Léopold Nséké

dans les Industries Extractives (ITIE) en 2002. Cette dernière, lancée par les Britanniques, imposait à ses membres de publier tous les chiffres concernant les revenus de l’exploitation minière et extractive. Une opération suivie de la pression de plusieurs groupes civils, dont plusieurs ONG, qui ont poussé de nombreux pays à renégocier leurs ententes d’exploitation à leur avantage. Malgré la transparence difficile à obtenir dans certains secteurs dits « stratégiques » comme l’exploitation de l’uranium, du cobalt et aujourd’hui du coltan, il faudra absolument savoir ce qui se trame sous les mines africaines.


AFRIQUE EXPANSION Magazine N˚ 36

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cameroun

L’impératif de

transparence minièrE

dans l’Exploitation Badjang Ba Nken

Le secteur des mines représente aujourd’hui l’une des plus grandes perspectives d’investissement pour le Cameroun : plus de 10 milliards de dollars US selon des sources crédibles. Seulement, l’existence de nombreux réseaux mafieux fait craindre des pertes importantes tant pour l’État que pour les populations riveraines.

L

e Cameroun est, selon des experts, un scandale géologique. Plusieurs s’accordent en effet sur le potentiel du sous-sol camerounais qui serait, selon eux, l’un des plus riches en Afrique. Du reste, au cours des deux dernières décennies, de nombreux gisements de classe mondiale (bauxite, rutile, nickel, cobalt, cuivre, fer, or, manganèse, diamant, etc.) ont été mis en évidence. Et depuis lors, il y a un tel ramdam autour de ces richesses que les populations, dans leur immense majorité, attendent toujours avec impatience le printemps minier qui pourrait contribuer de façon déterminante à l’amélioration de leurs conditions d’existence. 2001 est une année importante dans la promotion du secteur

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minier au Cameroun. C’est cette année qu’ont été publiés la carte thématique minière et son livre explicatif « Ressources minérales du Cameroun », des documents actualisés qui font un inventaire des ressources dont regorge le pays. Un des coauteurs de ces manuels, Paul Ntep Ngweth, fait remarquer que depuis lors, l’attrait des investisseurs et des opérateurs miniers est soutenu avec un intérêt remarquable pour l’exploitation du sous-sol du Cameroun. Jusqu’à la fin des années 1990, l’extraction minière au Cameroun – à l’exception du pétrole – s’est limitée à des petits chantiers informels. Mais depuis une dizaine d’années, l’État cherche à développer l’exploitation industrielle. Pour faciliter l’arrivée des investisseurs, il a fait adopter en 2001 par l’Assemblée nationale un code minier. Ce code a été révisé par le par-

lement en juin 2010 pour le rendre plus attractif. Par ailleurs, l’État a créé en 2003 une structure d’encadrement et de développement du secteur, le Cadre d’appui et de promotion de l’artisanat minier (CAPAM). La recette a fonctionné : aujourd’hui, 53 permis d’exploration sont en cours de délivrance, contre seulement deux en 2003, indique Paul Ntep Ngweth, coordinateur du CAPAM. Les sociétés qui les détiennent, sont pratiquement toutes étrangères. C’est ainsi qu’une entreprise américaine, Geovic, lancera l’exploitation du cobalt et du nickel de Lomié. Une autre petite compagnie américaine, Hydromine, s’intéresse, elle, à deux sites très riches en bauxite situés dans l’Adamaoua. À Mbalam (Est), l’entreprise australienne Sundance Resources Ltd va lancer d’importants travaux qui permettront d’exploiter un gros


gisement de fer. Dans l’Est, à Mobilong, c’est le Coréen Cameroon and Korea Mining Incorporation (C&K Mining) qui exploitera le diamant tandis que le Sud-africain Africa Aura explore depuis deux ans l’or dans une autre partie de la région. « Le secteur des mines représente aujourd’hui la plus grande perspective d’investissements pour le Cameroun : plus de dix milliards de dollars », se réjouit Paul Ntep Ngweth.

Les acteurs majeurs S’agissant du projet de bauxite de Ngaoundal et de Minin-Martap, deux permis de recherche ont été octroyés à l’entreprise américaine Hydromine qui a introduit dans son actionnariat Dubaï Aluminium (DUBAL) et Hindalco, une entreprise indienne pour 45% des parts chacune. Le gisement est évalué à 1 milliard de tonnes dont 30 à 40% d’alumine. L’investissement s’élève entre 4 et 5 milliards de F CFA. Il prévoit notamment le traitement local de la bauxite pour fabriquer l’alumine, le renforcement du barrage hydroélectrique de Mbakaou et le renforcement du transcamerounais (chemin de fer) pour l’évacuation du minerai vers la côte. Hydromine a déjà sollicité un permis d’exploitation. Quant au gisement de cobalt-nickel-manganèse de la région de Lomié (Est Cameroun), il est de classe mondiale. Le permis d’exploitation a été octroyé en 2003 à l’entreprise américaine Geovic. Avant la crise de 2008, le financement était pratiquement bouclé, mais le montage financier a par la suite été remis en cause, ce qui a retardé la mise en œuvre du projet. La Société nationale d’investissement va acquérir pour le Cameroun 39% du capital de Geovic. Bon à savoir, il existe des cas de joint-ventures pour l’exploitation minière au Cameroun. C’est le cas du diamant de Mobilong dans l’Est Cameroun. Il sera exploité par l’entreprise coréenne C&K Mining Inc et le CAPAM.

Depuis l’adoption du code minier de 2001, deux entreprises seulement ont reçu le permis d’exploitation de minerais au Cameroun. Il s’agit de Geovic pour le cobalt – nickel – manganèse de Lomié et de C&K Mining Inc pour l’exploitation du diamant de Mobilong dont les Coréens évaluent le gisement à plus de 700 millions de carats. Pour l’exploitation de ce diamant dont la production annuelle est estimée à 6 millions de carats, C&K Mining Inc détient 70% des parts de capital, le CAPAM, 10%, les privés camerounais, l’État, 10% (obtenus gratuitement). En effet, selon le code minier, après l’attribution d’un permis d’exploitation, l’État du Cameroun a automatiquement et gratuitement au moins 10% des parts de la société d’exploitation. Toutefois, s’il

Les ONG plaident pour une plus grande transparence et militent pour la mise sur pied d’un cadre de concertation qui réunirait la société civile, l’État et les entreprises. le désire, il peut encore acquérir 15% du capital. L’État a également droit à 38,5% d’impôt sur la société, et perçoit 2,5% de taxes sur la valeur du produit extrait. Cette taxe est répartie de la manière suivante : 50% pour l’État, 25% pour la mairie et les populations riveraines ; 25% pour la structure de suivi et de contrôle. Des gains sociaux sont également prévus pour les populations riveraines : construction d’écoles, de structures sanitaires, aménagement de pistes rurales, indemnisations. À Mobilong, on prévoit ainsi la création de 4000 emplois directs et indirects.

À qui profite l’exploitation de l’or ? Par ailleurs, dans la perspective de la construction et de la mise en eau du barrage-réservoir de LomPangar dans la région de l’Est Cameroun, une opération de sauvetage de l’or de Bétaré-Oya a été

lancée en 2007 par le gouvernement camerounais. La raison pour justifier cette action est des plus logique : une bonne partie de la région sera ennoyée après la mise en eau du barrage, engloutissant environ 13 tonnes de poudre d’or. Il est donc question d’en extraire l’essentiel avant l’échéance fatidique. La société C&K Mining Inc, chargée de l’exécution de cette opération, a déployé des moyens techniques importants dans cette région où l’exploitation minière séculaire est essentiellement artisanale. En plus de l’urgence de sauvetage de la richesse de la région de Bétaré-Oya, les populations ont demandé un plan de développement soutenu. Avec notamment la mise sur pied d’un programme de création de structures pouvant promouvoir l’épanouissement social des habitants de cette région en matière de santé, d’éducation, d’épargne, de création d’activités génératrices de revenus, etc. Aujourd’hui, la question, toujours d’actualité, qui est sur toutes les lèvres, garde toute sa pertinence: à qui profitera cette nouvelle donne et même l’exploitation de l’or en général au Cameroun ? Entre l’informel – selon les experts, ce secteur engouffre près de 90% de la production nationale – les réseaux mafieux et d’autres dysfonctionnements dans la filière, les orpailleurs artisanaux ne sont toujours pas à l’abri de la malédiction du cordonnier mal chaussé. Afin de prévenir les conflits, les ONG plaident pour une plus grande transparence et militent pour la mise sur pied d’un cadre de concertation qui réunirait la société civile, l’État et les entreprises. Une telle plate-forme existe déjà pour le suivi de la construction et de la gestion du pipeline Tchad-Cameroun, en service depuis 2004. Elle n’a pas permis de résoudre tous les problèmes, mais a au moins donné la possibilité de les exposer, selon les ONG. Elles espèrent que cet espace de dialogue, s’il est un jour créé, permettra aussi de lever le voile sur les clauses des contrats passés entre l’État et les compagnies.

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ENQUÊTE

MATIÈRES PREMIÈRES L’AFRIQUE A MAUVAISE MINE


NIGER

L’URANIUM NE FAIT PAS LE BONHEUR

Avec une production annuelle d’environ 3000 tonnes, le Niger est le 3e producteur mondial d’uranium après le Canada et l’Australie. Sauf que l’essentiel de cette production est contrôlé par la France par le biais du groupe Areva. Ce dernier tire annuellement du sous-sol nigérien 40% de sa production mondiale, ce qui devrait assurer des ristournes conséquentes à Niamey. Or, il n’en est rien et comme paradoxe très curieux, le Niger est considéré comme l’un des pays les plus pauvres du monde.

C’

est sous la forme d’un accord de défense que naît le premier véritable contrat d’exploi­tation du précieux minerai. Le 24 avril 1961, Paris, Abidjan, Porto-Novo et Niamey tombaient (secrètement) d’accord sur une « protection » de l’ancien colonisateur contre l’exploitation de ressources minières. Une espèce de tribut en somme fourré dans un mélange d’intérêts divers profitant naturellement à la France qui en décide arbitrairement la valeur en promettant de soutenir les régimes en place sans toutefois s’engager à intervenir en cas d’agression extérieure. Alors que le commerce de l’uranium prospère au fil des années, Niamey commence à émettre de timides protestations conduisant à une première révision des accords « secrets ». Ce qui fait qu’en 1969, la France propose d’élever l’uranium au prix fixe d’un milliard de F CFA, au titre d’une aide au développement. Mais Hamani Diori, alors président du Niger, qui avait émis le vœu de rediscuter les termes de l’accord, sera renversé en 1974 en pleins pourparlers.

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Léopold Nséké

Il faudra attendre 2007 avec l’arrivée des Chinois et la montée spectaculaire du cours de l’uranium pour voir le gouvernement nigérien de Mamadou Tandja (renversé en 2010) exiger la révision des prix quasiment figés depuis 1960.

Des pertes financières colossales Selon les estimations de plusieurs analystes, le Niger a perdu au change entre 14,5 et 21 milliards d’euros depuis 1960. Si on établit que ce pays a produit entre 100 000 et 150 000 tonnes depuis 1960 au prix moyen de 27 300 F CFA le kilo (soit 42 euros) et nettement en dessous du cours moyen mondial de 122 000 F CFA le kilo (187 euros) sur la période, la vente de l’uranium du Niger est chiffrée entre 4,2 milliards et 6,3 milliards d’euros. Or, avec une application du prix international, les actionnaires (État et partenaires) se seraient partagés entre 18,7 milliards et 28 milliards. Autant dire que depuis l’indépendance nigérienne, les actionnaires de l’uranium du Niger ont perdu entre 14,5 et 21 milliards d’euros. Ce qui est ahurissant pour un pays qui dispose d’à peine 2 milliards de dollars de PIB et dont le minuscule budget dépend de l’aide publique au développement pour plus de la moitié.


NIGER

3 PRODUCTEUR MONDIAL D’URANIUM e

PREMIER PRODUIT D’EXPORTATION 5 % DU PIB 5% DES RECETTES FISCALES

Le minerai, qui représente 60% des exportations du pays, ne semble pas ramener de grosses sommes dans les caisses de l’État. On entend cependant dire que depuis 2007, les choses ont bougé avec la signature d’un nouvel accord ayant permis de doubler à 40 000 F CFA, le prix d’achat de l’uranium au Niger. Ce qui, malgré tout, ne représente même pas 50% du cours international.

Le diktat d’un ogre industriel

AREVA AU NIGER LE MONOPOLE D’UN GÉANT 1er PRODUCTEUR MONDIAL D’URANIUM EN 2009 2/3 DE LA PRODUCTION VIENT DU NIGER

production annuelle

3500 5000 tonNES ( 2009 )

( HORIZON 2013 )

Qui dit uranium au Niger, dit Areva. Ce dernier, né en septembre 2001 de la fusion de Framatome (FrancoAméricaine de constructions atomiques) et de la Cogema (Compagnie générale des matières nucléaires), fait figure de géant de l’industrie nucléaire mondiale, avec des activités qui s’étendent de l’extraction d’uranium au traitement des déchets en passant par la conception des réacteurs. En 2007, plus d’un tiers de l’uranium acheté par le groupe français provenait du Niger. Areva y exploite deux gisements, dans la région d’Arlit et d’Akokan et le groupe dirigé par Anne Lauvergeon a décroché, en 2008, le permis d’exploitation du gisement d’Imouraren, présenté comme le deuxième plus important du monde et le premier d’Afrique. Areva a annoncé son intention d’investir 1,2 milliard d’euros dans le site d’Imouraren, qui devrait produire sa première tonne d’uranium en 2013 et 5 000 tonnes quand la mine tournera à plein régime. Le Niger deviendrait alors le deuxième producteur mondial de ce minerai stratégique. Au terme du contrat passé entre Areva et le gouvernement, les deux tiers des revenus tirés de cette exploitation iront au Niger et le tiers restant à la société française (après paiement des impôts et taxes), précise-t-on du côté français. Pour un produit largement recherché, surtout avec la relance de l’industrie nucléaire dans le monde, l’uranium ne rapporte pas beaucoup au Niger. Le minerai, qui représente 60% des exportations du pays, ne semble donc pas ramener de grosses sommes dans les caisses de l’État. Si c’est le cas, c’est que les données contractuelles sont manifestement et largement à l’avantage du groupe Areva qui annonce pourtant pompeusement dans ses documents officiels contribuer au développement et au bien-être des populations locales à travers des projets durables.

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ENQUÊTE

MATIÈRES PREMIÈRES L’AFRIQUE A MAUVAISE MINE


CONGO

Thierry Sylvane Noungou

BRAZZA

La forte domination des sociétés étrangères

Depuis les conventions d’établissement signées au cours des années 1960 jusqu’aux systèmes plus actuels de contrats dits de partage de production, l’État du Congo semble s’être efforcé à « voir clair » dans le partage des revenus pétroliers. Face à la prépondérance des sociétés étrangères, la création d’une société nationale, opérateur à part entière dans le secteur et conseil de l’État, s’est inscrite dans cette logique. La tâche n’est pourtant pas des plus aisée, au regard des exigences, en terme de capitaux à investir et d’expertise à mobiliser.

L D

e secteur pétrolier congolais est caractérisé par une domination notable des sociétés étrangères, visiblement seules capables de mobiliser, au moins pour l’heure, les investissements, la technologie et l’expertise que requiert l’exploitation pétrolière en onshore comme en offshore. Même le privé congolais semble n’y voir goutte. Sa présence dans ce secteur se limite d’ailleurs à des soustraitances dans des tâches moins essentielles à la production pétrolière. Parmi les géants qui règnent dans cet univers pétrolier congolais, le groupe français Total E&P Congo est de loin le plus représentatif. Présent au Congo depuis les années 60, ce groupe anciennement connu sous l’appellation d’Elf Congo, représente un peu plus de 50% de la production congolaise du brut et offre plus de 900 emplois directs. Il a découvert 65% des réserves initiales répertoriées dans le pays.

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D’autres opérateurs d’origine étrangère parmi les plus importants sont ENI Congo, filiale de la multinationale italienne, Murphy Exploration & Production Company, Chinese National Off-Shore Oil Company, Premier Oil, etc. De tous ces opérateurs, la société italienne ENI est celle qui s’est taillé une place prépondérante, se classant deuxième opérateur après Total dont il est le partenaire dans certains permis exécutés au Congo. Face à cette prépondérance des acteurs étrangers, la valorisation des droits de la République du Congo se faisait par une participation minoritaire au capital des sociétés opérant dans le pays (moins de 10%) et à l’administration des sociétés pétrolières. Mais ce système consacré par les conventions d’établissement s’est révélé de peu d’intérêt pour le pays, aussi bien en termes de revenus (dividendes) que de formation des cadres nationaux.

Ce constat a conduit à des réformes à partir de 1982 qui, en 1994, ont abouti à l’adoption d’un code des hydrocarbures qui a fait apparaître pour la première fois la notion de Contrat de partage de production (CPP) dans le droit congolais. Ce nouveau système est fondé sur le partage du profit (profit oil) entre l’État et ses sociétés partenaires. Le souci d’optimiser le revenu étatique est sans doute à l’origine de la création de la Société nationale des pétroles du Congo, la SNPC, qui est devenue le terreau de l’objectif stratégique de créer un pôle de compétence national, afin de voir clair dans le domaine pétrolier.

La SNPC : valoriser les intérêts de l’État À sa création en 1998, la SNPC exerçait des fonctions à la fois administratives et commerciales


envisagées comme complémentaires. Ainsi, elle avait des activités économiques propres comme opérateur ou associé dans des champs pétroliers, ou comme une société mandataire de l’État, à côté des activités para administratives ou de conseil interne pour l’État. Mais une réforme entreprise au début de l’année 2010 la recentre sur son métier de société pétrolière, avec les fonctions essentielles d’une société d’État à vocation commerciale. Dotée d’un important capital de 81 milliards de F CFA détenu à 100% par l’État congolais, elle a repris à son actif la commercialisation des hydrocarbures autrefois exercée par sa filiale COTRADE dissoute, alors qu’à travers la Congolaise de raffinage (CORAF), elle assure le raffinage du brut, de même qu’elle mène, au titre de certains contrats avec l’État, des activités de recherche et d’exploitation. L’opérateur national, dont la part dans la production pétrolière nationale, rappelons-le, n’est que symbolique, ne joue pas pour autant un rôle moins important dans la valorisation des intérêts de l’État congolais auprès de qui il joue le rôle de conseiller. Que ce soit en termes de revenu ou de formation des cadres congolais, les études réalisées par le conciliateur indépendant, relevant de la mise en œuvre de l’Initiative sur la transparence dans les industries extractives (ITIE), illustrent une évolution positive. Le tableau ci-après, synthétisant les données de la direction générale des hydrocarbures, le relevé des recettes comptabilisées par le trésor public et les travaux du cabinet international KPMG, permet de faire la comparaison entre la production et les droits de la République.

En conclusion, sur les trois années considérées, les droits de la République du Congo ont représenté 48% de la production de pétrole, les encaissements correspondants 40% et les versements au Trésor 38% (les écarts entre les encaissements et les versements correspondent à la part du brut livré à la raffinerie pour la consommation intérieure, à la vente de cargaison de la SNPC et aux paiements directement versés par les opérateurs conformément à certains anciens contrats). Néanmoins, il va de soi que la tendance à l’augmentation des droits perçus par l’État s’est poursuivie ces dernières années sous les effets conjugués des mesures de renforcement de la transparence, de la pression des institutions de Bretton Woods, et de la flambée des prix sur le marché pétrolier mondial, notamment. Plusieurs contrats de partage de production garantissent en effet, à l’État congolais « un taux de recettes d’au moins 30% sur la base d’un prix du baril d’environ 25 dollars US, un taux de 44% pour un prix du baril à 40 dollars, un taux de 52% pour un baril à 60 dollars ». Il n’en demeure pas moins, par ailleurs, qu’en parlant de l’optimisation des recettes de l’État, certaines sensibilités congolaises suggèrent le renforcement des moyens de contrôle des coûts pétroliers avancés par les opérateurs (ces coûts, cost-oil, constituent un des éléments déterminants du partage de production).

Les défis du secteur forestier À l’image du secteur pétrolier, les autres domaines de l’activité d’exploitation

Milliards Production Droits D.R.C/Prod Encaissements Encaissements Recettes FCFA (Prod.) D.R.C % certifiés /Prod Constaté Du Trésor Année 2004 1506,6 635,9 42% 457 30,3% 424 Année 2005 2385,5 1140,9 47% 903 38,0% 917

Année 2006 Total

3124,9

1606,7 51%

1463,9 46,6%

1350

7016,5

3383,5 48%

2823,9 40,0%

2691

Source : Rapport du conciliateur indépendant sur les recettes pétrolières de la République du Congo

Comme dans le secteur pétrolier, les autres domaines de l’activité d’exploitation des ressources naturelles connaissent également une domination des entreprises d’origines étrangères, à l’instar des secteurs de l’exploitation minière et forestière. des ressources naturelles connaissent également une domination des entreprises d’origine étrangères, à l’instar des secteurs de l’exploitation minière et forestière. L’industrie forestière, par exemple, en dépit de sa faible contribution actuelle au PIB (1,2% en 2004), n’en est pas moins le deuxième secteur d’exportation du pays, avec le bois. Elle offre par ailleurs, une importante capacité d’offre d’emplois modernes, deuxième employeur après la fonction publique. Cependant, cette activité est tenue par des privés étrangers dont les plus visibles sont la Congolaise industrielle du bois (CIB), filiale du groupe allemand Feldmeyer-Tropical Timber et l’Industrie forestière de Ouesso (IFO) à capitaux également allemands, liée au groupe Danzer. Des études menées au milieu des années 2000 avaient relevé que le secteur forestier congolais était caractérisé par la modicité des transferts des recettes au trésor public, la faiblesse du cadre réglementaire et le manque de transparence et de concurrence dans l’octroi des concessions (PNUD, Rapport national sur le développement humain 2006, p.58). Il paraît néanmoins qu’à la faveur des programmes de renforcement de la gouvernance menés avec les institutions financières internationales, une évolution est constatée dans ce secteur, ayant abouti à la certification de plusieurs concessions forestières par des labels connus internationalement en la matière. L’une des solutions appliquées par le gouvernement du Congo pour accrocher les recettes forestières a consisté en leur certification par un cabinet d’audit de réputation internationale.

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ENQUÊTE

MATIÈRES PREMIÈRES L’AFRIQUE A MAUVAISE MINE


KENYA

LES BONS POINTS DE LA GOUVERNANCE LOCALE

Badjang ba Nken

Pays politiquement stable et reconnu mondialement pour la qualité de ses produits touristiques, le Kenya qui dispose par ailleurs d’une économie en expansion, a une longueur d’avance sur de nombreux pays africains en matière de bonne gouvernance.

A

ncienne colonie britannique indépendante depuis le 12 décembre 1963, le Kenya, pays de l’Afrique de l’Est, est une République multipartite à régime présidentiel. Le président est à la fois chef de l’État et chef du gouvernement. Le pouvoir exécutif est aux mains du gouvernement tandis que le pouvoir législatif est partagé entre le gouvernement et l’Assemblée nationale. Le pouvoir judiciaire est indépendant des deux premiers. Le président au Kenya est élu par le peuple à la majorité absolue pour un mandat de cinq ans. Mwai Kibaki qui est à son deuxième mandat, a été élu pour la première fois à la magistrature suprême en 2002. Le pouvoir législatif est détenu par l’Assemblée nationale qui comporte une seule chambre de 224 membres, dont 210 sont élus pour un mandat de cinq ans dans des circonscriptions à siège unique, 12 sont nominés par les partis politiques proportionnellement à leur représentation, et 2 membres ex-officio. Quant au pouvoir judiciaire,

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il est détenu par la Haute Cour, juridiction suprême, composée d’un président, d’un collège de juges ainsi que des juges de la Cour d’appel, tous nommés par le président. Avec une superficie de 580 367 km² pour une population de près de 40 millions d’habitants, le Kenya bénéficie depuis son indépendance d’une grande stabilité politique, malgré les convulsions socio-politiques enregistrées au lendemain de la présidentielle de 2007.

Une économie en expansion Le Kenya est la plus grande économie en Afrique de l’Est et un important centre financier régional. Après l’indépendance, ce pays a connu une croissance économique rapide grâce aux investissements publics, à l’encouragement de la production agricole, notamment des petits exploitants, et aux mesures incitatives en faveur des privés (souvent étrangers) qui interviennent dans le secteur industriel. Après avoir connu des taux de croissance relativement élevés (plus de 5%) entre 1960 et 1970, l’économie kenyane a évolué par la suite en dents de scie.

C’est ainsi que la croissance économique du pays a chuté de 7% en 2007 à 1,6% en 2008 avant de remonter légèrement à 2,6% en 2009. En 2010, la croissance économique devrait s’établir entre 4% et 5%. La hausse des prix du pétrole et des denrées alimentaires, ainsi que la crise financière globale en 2008, ont contribué à ralentir le retour à la croissance. Toutefois, les perspectives économiques du Kenya demeurent positives, car les réformes économiques engagées notamment avec le FMI se poursuivent. En juin 2008, le gouvernement a lancé une stratégie de développement à long terme, la vision 2030 et le premier plan de développement à moyen terme de 2008-2012. L’accent a été mis sur la reconstruction, les réformes structurelles approfondies, la gouvernance, l’amélioration de l’infrastructure, la réduction des inégalités dans la répartition du revenu et la création d’emplois. Les performances actuelles de l’économie kenyane sont tributaires de ces réformes, comme le témoigne la croissance de l’emploi dans le secteur privé et dans le secteur public, respectivement de 3,1% et 2,4% en 2009.


La stratégie de développement du Kenya s’appuie sur quatre piliers : renforcer la croissance économique, développer les infrastructures physiques, améliorer la gouvernance et investir dans le capital humain. L’aide apportée par la Commission européenne (CE) pour stimuler le développement économique et réduire la pauvreté consiste à soutenir les secteurs jugés essentiels au développement du pays. Le document de stratégie par pays pour le Kenya (2008-2013) présente la politique de coopération de la CE avec le Kenya au titre du 10e Fonds européen de développement (FED). Celle-ci est axée sur l’intégration économique régionale, qui repose sur la construction d’infrastructures de transport et le développement agricole et rural afin d’améliorer la capacité des foyers ruraux pauvres à augmenter leurs revenus. Ces mesures seront complétées par une aide budgétaire générale et une aide budgétaire sectorielle destinée à des politiques et des stratégies sectorielles spécifiques. Cette stratégie permettra au gouvernement de mieux cibler les fonds en fonction des priorités dictées par l’éradication de la pauvreté, notamment en ce qui concerne l’investissement dans le capital humain constitué par les populations pauvres. Une aide supplémentaire permettra de renforcer les capacités des institutions publiques et le rôle des acteurs non étatiques, d’améliorer la gouvernance et de créer un climat favorable au développement du secteur privé et aux exportations. Il convient de relever que les devises rapportées par l’horticulture sont passées de 833 millions de dollars en 2008 à 947 millions de dollars en 2009. L’année 2007 détient toujours le record avec 1,12 milliard de dollars.

Quant aux exportations de thé, elles ont rapporté 928 millions de dollars en 2009 contre 250 millions en 2008. L’Afrique est la principale zone d’exportation des produits kenyans, suivie par l’Union européenne. S’agissant de l’African Growth of Opportunity Act (AGOA), elle profite aussi au Kenya qui exporte des vêtements vers les États-Unis. Toutefois, ces exportations ont chuté passant en valeur de 265 millions de dollars en 2006 à 195 millions en 2009.

a le choix entre les safaris, les randonnées, le sport ou la visite des sites et lieux touristiques. Le moyen le plus courant de découvrir la diversité de la vie sauvage du Kenya est le safari à bord d’un minibus. Pour les randonnées pédestres, le mont Kenya est la destination favorite des marcheurs et ses sentiers sont très fréquentés. Pour les adeptes des sports nautiques, les stations balnéaires longeant Coral Coast, au nord et au sud de Mombasa, proposent de belles plages de sable et des récifs coralliens.

Un paradis touristique

Appui à la gouvernance

L’abondance de la faune et la beauté des plages de sable blanc attirent environ un million de visiteurs étrangers au Kenya, chaque année. Le tourisme rapporte, d’après les estima-

Bien que ne disposant pas d’un soussol riche, le Kenya attire non seulement pour la qualité de ses produits touristiques et sa stabilité politique, mais aussi pour ses efforts en matière de renforcement de la gouvernance locale. Financé par l’Agence canadienne pour le développement international (ACDI) et le gouvernement kenyan, le programme d’appui à la gouvernance au Kenya vise à renforcer les organisations non gouvernementales (ONG) et de surveillance pour les amener à exiger une responsabilité, une transparence, une efficacité et une efficience accrues des institutions gouvernementales à répondre à ces demandes grâce à une meilleure prestation de services et à une gestion financière, notamment par l’entreprise de trois volets : la réforme de la Fonction publique ; la réforme de la gestion des finances publiques et la gouvernance démocratique. Ce projet contribue à la réussite du deuxième volet en aidant le gouvernement du Kenya à élaborer un cadre budgétaire conforme aux priorités et aux politiques du gouvernement, en améliorant la qualité des dossiers du gouvernement et des pratiques d’approvisionnement, et en renforçant les systèmes de la fiscalité et des revenus.

Le Kenya attire non seulement pour la qualité de ses produits touristiques et sa stabilité politique, mais aussi pour ses efforts en matière de renforcement de la gouvernance locale. tions, plus de 800 millions de dollars par an de recettes, si bien que ce secteur est devenu la plus importante source d’opérations de change du pays. D’après un rapport de l’ONU sur le tourisme durable au Kenya, les stations touristiques situées sur la côte attirent plus de 60% de visiteurs. Le secteur touristique emploie 11% de la maind’œuvre kenyane. Il diversifie l’économie et bénéficie à d’autres secteurs comme les transports, la restauration, les spectacles et l’industrie textile. Cette fréquentation touristique est excellente pour les affaires, mais met à rude épreuve les plages les plus populaires. Le touriste qui se rend au Kenya

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MARCHÉS AFRICAINS

Les quatre piliers du développement


Léopold Nséké

Depuis les indépendances, les forces armées africaines ont toujours occupé le haut des priorités budgétaires de la quasi-totalité des États. Après l’Éducation et la Santé, c’est un poste de dépense qui ne se dément pas au fil des décennies malgré les besoins criants dans d’autres secteurs essentiels au développement. 18 AFRIQUE EXPANSION Magazine N˚ 36

L

e Stockholm International Peace Research Institute (SIPRI), un « think thank » de référence mondiale, publie chaque année un rapport sur les dépenses militaires sur la planète. On y relève que « les dépenses militaires mondiales en 2009 ont atteint les 1531 milliards de dollars »; des dépenses qui ne cessent de grimper au fil des années et qui correspondent aux achats d’armements, aux coûts des opérations de maintien de la paix et des guerres menées. Une hausse de 49% par rapport à 2000.


Les dépenses militaires en Afrique Cette tendance est tout aussi marquée sur le continent africain avec une hausse de 83,8% pour les budgets en armement sur la décennie 1998-2008. L’Algérie et l’Afrique du sud représentent à eux seuls 35% de ces dépenses. Alger l’explique par des raisons de lutte contre le terrorisme et Prétoria par le renouvellement des équipements. On explique aussi que la production de pétrole, source potentielle de conflits, nécessite la protection des différents sites, ou tout du moins est une justification pour certains pays africains d’augmenter leurs achats d’armes. Ce qui n’occulte pas non plus le fait que plusieurs font parader leurs forces armées suréquipées pour une démonstration de force face à d’éventuels « ambitieux » de l’intérieur. Le SIPRI met en exergue trois États dans ce cas : l’Angola (3,2 milliards $), le Nigeria (1,5 milliard $, une poussée de 101% par rapport à 2000) et le Tchad (436 millions $). Le plus inquiétant dans ces opérations est qu’elles se font au détriment d’autres investissements, essentiels au développement. Par exemple, l’éducation qui est l’un des instruments les plus puissants qui existent pour réduire la pauvreté et les inégalités en posant les bases d’une croissance économique soutenue, ne retient que dans les 2% du PIB au Tchad. Pourtant dans ce même pays, classé 163e dans le Rapport mondial sur le développement humain (2010), on consa-

MARCHÉS AFRICAINS

L’Occident, principal pourvoyeur d’équipements militaires, dépense énormément d’argent pour la R&D dans le secteur. Ce dernier, noyauté par le privé, lorgne désormais vers une rentabilité à court terme. Ce qui n’est pas nécessairement le cas des nations comme la Chine qui continuent à faire de leurs forces armées un élément de dissuasion et de persuasion à la fois. Sur cette tendance mondiale, les États-Unis d’Amérique sont premiers dépensiers avec 661 milliards $, suivis de la Chine, 100,4 milliards $, de la France, 63,8 milliards $, du Royaume-Uni, 58,33 milliards $ et de la Russie 58,32 milliards $.

cre 6,6% du PIB aux dépenses en armement, soit près de 6 fois plus que l’Afrique du Sud, locomotive économique et puissance militaire. Même observation pour le Burundi (4% du PIB en armement) et la Mauritanie (3,7%). Par comparaison, les États-Unis, épinglés comme hautement militaristes, ne consacreraient que 4,3% de leur PIB à l’armement. C’est dire !

L’armement, un investissement durable ? Selon l’analyste du SIPRI, Elisabeth Sköns, les dépenses militaires sont une évaluation grossière des sommes attribuées par les gouvernements à des fins militaires. Elles permettent ainsi d’évaluer la priorité donnée aux moyens militaires d’assurer la sécurité - selon la façon qu’a chaque gouvernement d’évaluer la sécurité nationale - ou d’atteindre d’autres types d’objectifs nationaux définis dans les doctrines de sécurité nationale. Si les dépenses directes qui vont de la recherche aux équipements peuvent avoir valeur d’actifs, les dépenses indirectes ne sont pas liées directement à l’entretien du potentiel de combat, mais influencent sa formation. Il peut s’agir du remboursement de la dette, les frais des opérations humanitaires et la réparation des dommages de la guerre, les indemnités versées aux familles des militaires morts au cours des opérations de maintien de la paix. Le caractère improductif de ces dépenses provoque la croissance de la consommation improductive de l’État, ce qui entraîne une perte d’efficacité dans la répartition des ressources budgétaires, exprimée par la relation entre les missions, les objectifs et le déficit des moyens pour leur réalisation, bénéfices ratés dont le résultat est la diminution des possibilités de croissance économique, de la consommation et du niveau de vie. Cette démonstration de l’universitaire camerounaise Thérèse Félicitée Azeng conclut que si on admet l’idée que des dépenses militaires excessives absorbent des ressources qui pourraient servir à répondre à des besoins essentiels, la mesure dans laquelle les dépenses sont considérées comme excessives dépend de l’importance du déficit de services sociaux et d’infrastructures de base. Or, les données générales disponibles sur

La tendance aux achats d’équipements militaires est tout aussi marquée sur le continent africain avec une hausse de 83,8% sur la décennie 1998-2008. L’Algérie et l’Afrique du sud représentent à eux seuls 35% de ces dépenses. l’Afrique indiquent une variation du simple au double entre la part budgétaire allouée aux armées et celles destinées à l’Éducation et à la Santé, moteurs du développement social. Le transfert de ressources de l’armée vers les services publics devient alors une mesure préliminaire qui permet au service public de faire face à ses besoins. Y a-t-il un moyen de renverser la tendance ? Certains spécialistes ont récemment proposé de lier l’aide au développement à l’assistance financière des organismes internationaux. Non seulement cette décision pourrait obliger à faire de meilleurs choix budgétaires mais elle permettrait également de freiner les ardeurs des multiples lobbies qui œuvrent en coulisses. Certes, les menaces de déstabilisation n’ont plus le même visage que lors des indépendances, mais les mêmes intérêts continuent de susciter les mêmes appétits.

AFRIQUE EXPANSION Magazine N˚ 36 19



DOSSIER

HABITAT ET LOGEMENT

SAVOIR-FAIRE

Le

CANADIEN Léopold Nséké

Le secteur de la construction se classe en tête des industries au Canada et notre dernière parution faisait état de l’expertise de ce pays en matière de génie-conseil. La démonstration de ce savoir-faire dans les grands travaux comme les barrages, ponts et autres complexes architecturaux se répercute naturellement au niveau du bâtiment. Et au moment où les pays africains se donnent de nouveau les moyens de combler leur déficit en matière d’habitat et de logement, les entreprises canadiennes pourraient certainement contribuer à la réalisation de nombreux projets dans la construction résidentielle.

AFRIQUE EXPANSION Magazine N˚ 36 21


UNE SITUATION PRÉCAIRE

DOSSIER

Habitat et logement en Afrique

22 AFRIQUE EXPANSION Magazine N˚ 36

Avec un taux d’urbanisation galopant qui frisera les 50% en 2050, selon les derniers chiffres de l’ONU-Habitat, l’Afrique a plus que jamais besoin de se définir une politique du logement et de l’habitat plus conséquente. Jusqu’ici, tout se faisait de façon plutôt anarchique au grand dam de populations déjà aux prises avec un quotidien des plus difficiles. Différentes perspectives sont proposées pour permettre de trouver une solution à des besoins qui se chiffrent aux alentours de 6 millions d’unités par an.

E

n 2009, l’Afrique a dépassé le milliard d’habitants, dont 395 millions (40%) vivaient dans des zones urbaines et les projections les plus réalistes avancent le chiffre de 2 milliards pour 2050, avec 60% de la population cantonnée dans les villes. D’autre part, alors que près d’un milliard de personnes vivent dans des établissements informels, irréguliers et non planifiés dans les pays en voie de développement, c’est particulièrement en Afrique subsaharienne que la situation est indécente avec 2/3 des 304 millions de citadins installés dans des taudis. Bien évidemment, cette situation est principalement liée à l’urbanisation rapide, le manque d’opportunités d’emplois décents et des lacunes dans la planification et la gestion des cités.

Des mesures importantes à prendre Cette transition urbaine en accéléré impose pourtant aux services publics d’en faire des domaines d’action prioritaire avec des investissements notables, des structures de bonne gouvernance, une fourniture équitable des services et des logements à coût abordable. Ce qui fait que le développement du logement et l’amélioration de l’habitat en Afrique passent nécessairement par une amélioration globale des conditions de vie des populations. Des mesures visant à adapter les codes du bâtiment, à modifier les règlements de zonage et à remettre en cause les politiques dépassées ou restrictives ont par ailleurs été prises dans de nombreux pays africains avec des fortunes diverses. Cette voie à encourager fait partie d’une définition de stratégies réalistes en milieu urbain imposant des solutions pérennes à coût abordable avec, comme recommandation, l’apport de ressources matérielles locales.

Comme le précisent les experts de l’ONU-Habitat dans leur dernier rapport intitulé « L’état des Villes Africaines 2010 : Gouvernance, inégalités et marchés fonciers urbains », ce changement indispensable exige entre autres l’adoption d’une réglementation mieux adaptée et plus réaliste en matière de planification et de construction à la portée des citoyens pauvres, et dont l’ambition soit de faciliter, et non de limiter, la création et la pérennité des moyens de subsistance en milieu urbain. En d’autres termes, la planification et la gestion de la mise en valeur de l’espace urbain devraient moins s’inspirer de la théorie inapplicable de la planification et des notions importées de l’esthétique urbaine ou des normes réglementaires inaccessibles. Bien au contraire, elles doivent adopter les normes qui reflètent les ressources de l’État, des municipalités et des familles, ainsi que les capacités réelles des institutions. La construction résidentielle, particulièrement en milieu urbain, est donc un défi à relever au plus tôt par les Africains dans un contexte de développement durable. Et il y a de l’espoir puisque selon le même rapport ONUHabitat, l’Afrique dans son ensemble a démontré, ces dernières années, que l’on peut s’attaquer aux taudis et bidonvilles de manière efficace. 24 millions d’Africains pauvres ont en effet vu leurs conditions de vie s’améliorer entre l’an 2000 et 2010. Ces progrès ont toutefois été très inégaux à travers le continent. L’Afrique du Nord dans son ensemble a réussi à faire reculer de 20 à 13% la part des habitants des taudis et bidonvilles dans sa population urbaine. L’Égypte, le Maroc et la Tunisie ont le mieux réussi à cet égard. Toutefois, au sud du Sahara, le nombre d’habitants des taudis et bidonvilles n’a baissé que de 5% (17 millions), le Ghana, l’Ouganda et le Sénégal se situant au tout premier rang avec des réductions de plus de 20%.


DÉVELOPPEMENT

L’industrie canadienne de la construction domiciliaire est un des poumons économiques du pays à la feuille d’érable avec des investissements annuels chiffrés en dizaines de milliards de dollars qui représentent 12 % du PIB. Près de 520 000 travailleurs œuvrent dans ce secteur à la recherche de nouveaux débouchés.

E

xporter cette expertise sur les marchés étrangers a été un souci pour plusieurs entrepreneurs soucieux de développer de nouveaux marchés en raison du ralentissement du marché domiciliaire canadien. Les constructions résidentielles obéissent à plusieurs paramètres qui vont de la situation économique à la configuration de la société. Ainsi, le vieillissement de la population couplé à l’endettement des ménages est un mauvais indicateur pour la croissance du secteur. Ce qui fait qu’au sein des différentes associations de constructeurs, on conseille aux membres de développer des trésors d’imagination pour « attaquer » l’étranger. Est visé au premier plan, le marché des Amériques. Les opérateurs canadiens se distinguent par l’utilisation récurrente de matériaux « traditionnels » en raison de la particularité du climat qui sévit en Amérique du Nord. Ainsi, le bois fait largement partie des composantes des habitations individuelles et collectives. Le béton, si prisé ailleurs, se retrouve beaucoup plus dans les grands projets commerciaux, tours à bureaux notamment. Il en résulte l’utilisation d’un large éventail de nouvelles technologies auxquelles se rajoutent l’apparition de normes environnementales et plusieurs projets éco-responsables

pour une réduction de la consommation de l’énergie.

Le « marché » africain À prime abord, il n’y a pas de proximité évidente avec l’Afrique. Mais la particularité de l’habitat social africain tient à sa proximité avec l’environnement et l’adaptation des techniques rompues à l’univers canadien serait facilement transposable même si le continent varie beaucoup du Caire au Cap en matière de géographie. Terre, sable, argile et bois ont longtemps été à la base du logis africain et les chercheurs ont pu, avec le temps, en remodeler la constitution. Cela dit, la forte suggestion de normes évolutives a également fini par convaincre les entrepreneurs, africains ou étrangers, de s’adapter « au terrain ». Car avant les modèles architecturaux, il y a à la base les fameux ciments qui vont des schistes aux composites. Ces derniers, liés aux travaux dits de finition, déterminent généralement le prix des projets. Et puisque l’habitat est devenu de nos jours un produit financier, il est absolument nécessaire de l’ajuster au pouvoir d’achat local pour ne pas donner l’impression de bâtir pour les mieux nantis et laisser les pauvres à la rue. À ce chapitre, les entrepreneurs canadiens sont hautement concurrentiels d’autant plus qu’ils ont cette

tendance à ne pas être frileux par rapport au transfert de technologies contrairement aux Européens, longtemps cités en exemple. Car c’est bien sur le plan des moyens techniques que la différence se fait sur le terrain. Des partenariats peuvent ainsi être ouverts autour des nouvelles technologies de construction, pour le calcul informatique des composantes d’un habitat et même la domotique qui permet de le contrôler, l’automatiser et le programmer. Enfin, comme valeur rajoutée, on doit citer les normes de construction du Canada qui sont parmi les plus rigoureuses au monde. En 2010 par exemple, pas moins de 800 modifications techniques ont été apportées dans la foulée des progrès technologiques, et en réponse aux préoccupations en matière de santé et de sécurité dans la construction.

Solutions de financement Mais il reste à trouver de l’argent pour tout cela puisque la promotion de l’habitat et du logement passe par un financement conséquent. C’est ici que des solutions comme celle de Shelter-Afrique ont une certaine importance. Ce groupe, qui se présente comme « la réponse de l’Afrique en matière de logements », promeut la mobilisation des ressources financières et techniques affectées au financement de plusieurs types. C’est le cas notamment du financement de l’habitat résidentiel dont le programme cible la construction de logements pour toutes les catégories de revenus. Ce portrait global vient rassurer sur les conditions dans lesquelles peuvent évoluer les experts et les entreprises canadiennes de la construction résidentielle. Des besoins aux garanties, l’Afrique a décidé de prendre le train des réformes essentielles pour replacer le bien-être des populations au centre de ses préoccupations de développement. AFRIQUE EXPANSION Magazine N˚ 36 23

DOSSIER

L’EXPERTISE CANADIENNE au cœur du

HABITAT ET LOGEMENT


DOSSIER

HABITAT ET LOGEMENT

CONSTRUCTION RÉSIDENTIELLE Quelques ACTEURS CANADIENS Dans un secteur exigeant et soumis à des règles serrées, les dizaines d’entreprises qui se font concurrence sur le marché canadien, offrent pratiquement les mêmes prestations. Toutefois, les grandes firmes de génie-conseil ont pour elles l’avantage d’offrir des solutions intégrées. Ces dernières, couplées aux ressources « locales », permettent de mettre sur pied des projets originaux et durables. «Plus bas», des constructeurs de moyenne importance affichent une croissance intéressante grâce à une expertise plus pratique. GÉNIVAR

DESSAU

Un demi-siècle d’existence, ça donne une grande expérience dans le domaine du génie-civil Performante et à la croissance fulgurante, cette firme canadienne a affiché un chiffre d’affaires de près de 500 millions $CAN en 2010. De nos jours, les bâtiments durables sont ceux qui affichent une performance améliorée et une efficacité accrue des systèmes de chauffage, de climatisation, de ventilation et d’éclairage. Ils créent des environnements de grande qualité qui ont un effet positif sur la santé et la productivité. Le groupe GÉNIVAR assure s’employer à trouver des solutions durables qui respectent les budgets, sans compromettre la qualité des bâtiments. Leurs spécialistes peuvent ainsi assurer un rendement accru du capital investi, réparti sur la durée de vie des constructions.

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MODULEX INTERNATIONAL Société en activité depuis 1965 et entreprise familiale québécoise, Modulex International Inc. se classe parmi les chefs de file canadiens dans le domaine des habitations préfabriquées à structure de bois. Elle s’est forgée rapidement une solide réputation, fondée sur la qualité de ses produits et son service hors pair, qui s’étend aujourd’hui à l’ensemble de la planète. Confort, efficacité énergétique et environnement se hissent au sommet de ses priorités. Modulex International Inc. cumule au-delà de 20 000 projets réalisés dans plus de 25 pays, principalement aux ÉtatsUnis, en Angleterre, en Espagne, en Suisse, en Allemagne, en France et au Japon. Plusieurs projets ont également été réalisés en Turquie, en Chine, en Guadeloupe, à Tahiti, en Uruguay, au Venezuela, en Irlande, en Russie, en Afrique, à Cuba et au Chili. Pour ces défis, Modulex International Inc. compte sur l’expertise de son équipe pour construire une grande variété de bâtiments adaptés aux besoins et aux budgets des promoteurs. 24 AFRIQUE EXPANSION Magazine N˚ 36

Domaines d’expertise :

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Domaines d’expertise :

* Maisons unifamiliales * Résidences de luxe * Chalets * Multifamiliales (en rangée, à appartements et en duplex) * Logements sociaux de différents types * Logements sociaux de différents types



LE CAMEROUN

À L’HEURE D’UNE AGRICULTURE DE DEUXIÈME GÉNÉRATION Marc Omboui Visite du Président Biya et son épouse à l’usine de montage de motoculteurs d’Ebolowa

Le comice agropastoral national du Cameroun, que l’on pourrait comparer à un salon de l’agriculture, s’est tenu à Ebolowa, la capitale régionale du Sud du 17 au 22 janvier 2011. L’État du Cameroun y a investi la somme de 40 milliards de F CFA. Et, de l’avis général, ce forum, attendu depuis 23 ans, a connu un succès retentissant. Au-delà, ce comice a permis aux autorités camerounaises de s’engager dans une agriculture de deuxième génération.

I

l a fallu beaucoup de temps pour que le sixième comice agropastoral national du Cameroun se tienne en cette deuxième moitié du mois de janvier 2011. D’abord prévu pour le mois de décembre dernier, il a été renvoyé d’un mois par une décision du président de la République. Un report qui a fait craindre pour la qualité et la quantité des produits à exposer. Mais il n’en a rien été. Le ministre Issa Tchiroma saluant le chef du SDF (parti de l’opposition) John fru Ndi, à son stand. 26 AFRIQUE EXPANSION Magazine N˚ 36


Le Président Biya serrant la main du ministre d’État secrétaire général de la présidence, Laurent Esso.

Le comice d’Ebolowa constituait en lui-même un défi et comportait de nombreux enjeux. Un défi pour les autorités publiques pour qui cet événement capital pour la vie du monde rural et l’économie nationale nécessitait d’énormes moyens financiers. Or, depuis le milieu des années 80, le Cameroun est entré dans une crise économique dont il essaye de sortir seulement depuis le début des années 2000. L’organisation du comice d’Ebolowa constituait de ce fait le signe que le Cameroun avait vu le bout du tunnel et pouvait envisager son avenir avec optimisme. Le comice était aussi l’occasion de remettre l’agriculture au centre de la stratégie économique du Cameroun au moment où la découverte de quelques gisements de mines peut faire diversion.

Une rencontre entre le président et ses frères Mais parce qu’Ebolowa se situe dans la région natale de l’actuel chef de l’État camerounais, et dans la mesure où l’élection présidentielle doit avoir lieu au cours de cette année 2011, le comice prenait nécessairement une connotation politique indéniable. Et de fait, pour nombre d’observateurs, Ebolowa 2011 a été l’occasion d’une rencontre symbolique entre Paul Biya et ses frères, qui en ont profité pour lui renouveler leur soutien indéfectible. Manifestation éloquente de ce soutien, l’homme a été élevé à la prestigieuse dignité de Nnom Ngii, qui signifie chez les peuples de la forêt du Cameroun « le maître suprême de la science et de la sagesse millénaire », alors que son épouse était faite Nya Meyong, c’est-àdire « la mère des peuples ».

Par ailleurs, compte tenu de la taille relativement modeste de la ville d’Ebolowa, de sa faible capacité hôtelière et de son déficit en infrastructures de base, il était évident que l’organisation de ce grand forum dans ce contexte allait connaître quelques difficultés. Le gouvernement, après une période d’attentisme, a dû mettre les bouchées doubles. Certes, les travaux de construction de l’hôtel du comice qui ont commencé seulement au milieu de l’année dernière n’ont pas pu être achevés, mais des solutions palliatives ont pu être trouvées qui ont permis aux cinq mille participants de passer un séjour assez agréable dans la métropole régionale. Les autres travaux d’infrastructure ont pu quant à eux être menés à terme : routes, alimentation en eau et en électricité, construction et réfection de certains bâtiments administratifs, etc.

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ÉVENEMENT

COMICE AGRO-PASTORAL DU CAMEROUN


Le Premier ministre Philémon Yang remettant une médaille à une agricultrice

Le village du comice a été bâti sur un site de 40 hectares. Quant à l’organisation pratique, le comité d’organisation présidé par le Vice-Premier ministre chargé de l’Agriculture, M. Jean Nkuété, a confié la régie à un opérateur privé qui s’en est tiré à bon compte.

Un hommage aux seigneurs de la terre Pour ce qui est du comice proprement dit, il s’est agi d’une véritable démonstration de force. Le Cameroun a ainsi voulu montrer à la face du monde les meilleurs produits de son agriculture, de son élevage et de sa pisciculture. Il a voulu par ce biais rendre un hommage bien mérité à ces hommes et ces femmes qui consacrent leur vie au travail de la terre et dont les efforts permettent de nourrir des dizaines de millions de personnes au Cameroun, en Afrique centrale et ailleurs dans le monde. Des prix en espèces sonnantes, environ 250 millions de F CFA, et en matériels agricoles ont été offerts à nombre d’entre eux. Certains autres

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Le chef de l’État, Paul Biya, saluant le DG du Fonds National de l’Emploi,Camille Mouthé à Bidias

ont reçu des médailles en guise de la reconnaissance de la nation. Le président Paul Biya relève pertinemment que « l’agriculture est notre vraie richesse ». Et les agriculteurs, des « seigneurs de la terre ». Petits producteurs et producteurs plus importants, ils sont venus des quatre coins du pays et ont occupé les 1200 stands qui ont été aménagés à cet effet, soit le double de ce qui avait été fait à Maroua. Ils y ont exposé les meilleurs produits de leur labeur, au total 113 spéculations : des tubercu-

les d’igname et de manioc de dimension à peine imaginable, d’immenses régimes de banane plantain, du maïs, du riz, des pommes de terre. Des produits vivriers, mais aussi des produits de rente : cacao, café, coton. Du bétail : des porcs de 450 kilogrammes, des taureaux de plus d’une tonne, des chameaux ; de la volaille : des poulets de plus 15 kilogrammes. Sans oublier l’élevage non conventionnel. Tout ce que, grâce à l’extrême générosité de la nature et aux efforts des hommes, le Cameroun produit.


Le pays a voulu montrer ce qu’il est capable de faire en matière de transformation et de conservation des produits alimentaires ; les résultats auxquels sa recherche scientifique a pu aboutir pour améliorer les semences et augmenter la productivité et la production, mais qui ne sont pas toujours exploités par les producteurs, l’organisation du monde paysan en groupes d’initiatives communes, etc..

La nouvelle politique agricole Le comice d’Ebolowa a été l’occasion de marquer un temps d’arrêt pour affiner les options politiques, évaluer les politiques et les stratégies mises en place et les réorienter au besoin. D’éminents universitaires et autres experts ont été mis à contribution pour réfléchir dans

le cadre d’un colloque sur le thème : « produire mieux : la marche assurée vers l’émergence du Cameroun à l’horizon 2035 ». On comprend ainsi la présence du chef de l’État en personne pendant quatre jours sur les cinq qu’aura duré ce forum. À côté du chef de l’État, l’ensemble du gouvernement et tout ce que le Cameroun compte d’élite politique et administrative. Si le Cameroun peut se vanter d’être un grand producteur agricole, le comice d’Ebolowa lui a donné l’occasion de se poser des questions : comment avec tout ce qu’il produit, le pays ne connaît-il pas l’autosuffisance alimentaire ? Pourquoi est-il obligé d’importer des quantités astronomiques de denrées alimentaires, ce qui déséquilibre de manière dramatique

Martin Belinga Eboutou, Directeur du Cabinet civil de la Présidence de la République et Jean Nkuete, vice-premier ministre, ministre de l’Agriculture et du développement rural, à travers les stands

« SI LE CAMEROUN PEUT SE VANTER D’ÊTRE UN GRAND PRODUCTEUR AGRICOLE, LE COMICE D’EBOLOWA LUI A DONNÉ L’OCCASION DE SE POSER DES QUESTIONS : COMMENT AVEC TOUT CE QU’IL PRODUIT, LE PAYS NE CONNAÎT-IL PAS L’AUTOSUFFISANCE ALIMENTAIRE ? »

Ambiance au Comice

sa balance commerciale? La réponse à ces questions, c’est Paul Biya qui la donne quand il affirme : « Nous produisons ce que nous ne consommons pas et consommons ce que nous ne produisons pas ». Comment sortir de cette situation paradoxale ? Certains proposent que des subventions soient accordées aux petits producteurs sous forme de prime à la production, que l’on mette l’accent sur l’amélioration des semences, qu’on plafonne l’importation de certaines denrées, etc. Pour sa part, le chef de l’État instruit pratiquement une nouvelle politique agricole dont les principaux axes sont : la mise en place d’une unité de production des engrais, la construction d’une usine de montage de machines agricoles, la réhabilitation des fermes semencières, la préparation d’une réforme foncière, le renforcement du dispositif de financement des activités rurales par l’ouverture de la banque agricole et la banque des PME-PMI. Il donne six mois au gouvernement pour que cette politique soit mise en œuvre et produise des résultats. Le Cameroun compte sur son agriculture pour atteindre son autosuffisance alimentaire, mais aussi pour créer des emplois pour les jeunes, se développer et devenir un pays émergent à l’horizon 2035. Il y a lieu d’espérer qu’Ebolowa a permis aux autorités camerounaises de s’engager dans une agriculture de deuxième génération qui permettra de produire plus et mieux afin de consolider le Cameroun dans sa position de mamelle nourricière de l’Afrique centrale.

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ÉVENEMENT

COMICE AGRO-PASTORAL DU CAMEROUN


CAMEROUN

L’AUTOSUFFISANCE ALIMENTAIRE EN

déséquilibre

Bien que le pays ne souffre pas à proprement parler de famine, sa situation alimentaire est devenue depuis quelque temps un sujet de préoccupation majeure pour les populations et le gouvernement camerounais. D’autosuffisant et même exportateur de denrées alimentaires, le Cameroun en est devenu un grand importateur.

G

râce à sa grande diversité agro-écologique, le Cameroun est potentiellement capable de produire une gamme variée de spéculations susceptibles de satisfaire ses besoins alimentaires. Il est aussi un pays où l’on peut pratiquer l’élevage du gros et du petit bétail. Par ailleurs, du fait de son exposition à l’océan atlantique et de l’existence d’un vaste réseau hydrographique, la pêche peut y être pratiquée, tout comme on pourrait y développer la pisciculture. Tout cela mis ensemble a contribué à faire de cette « Afrique en miniature » un pays autosuffisant au plan alimentaire. D’autant plus que l’État a créé quelques complexes agroindustriels, des instituts de recherche et des structures d’encadrement du monde paysan. En conséquence, le Cameroun produit en quantité importante des bananes, des tubercules (manioc, igname, patate), des légumineuses et des céréales, qui satisfont une bonne partie de la demande locale. Mieux, il est resté longtemps considéré comme le grenier de l’Afrique centrale, et l’est même encore dans 30 AFRIQUE EXPANSION Magazine N˚ 36

une certaine mesure. Nombre de pays voisins, la Guinée Equatoriale, le Gabon et, dans une moindre mesure, le Nigeria, viennent en effet s’approvisionner au Cameroun en produits alimentaires. Il en est de même du bétail qui part des régions septentrionales pour approvisionner les marchés nigérians.

La concurrence des produits de rente Les exportations massives de ces vivres procurent des revenus substantiels aux producteurs agricoles mais, en même temps, elles sont régulièrement la cause du renchérissement du prix de ces denrées et exposent parfois les populations aux pénuries. À un moment donné, priorité a semblé être accordée aux cultures de rente (caco, café coton) qui sont dans la plupart des zones de production, l’apanage des hommes. En conséquence, les Camerounais produisent ce qu’ils ne consomment pas et consomment ce qu’ils ne produisent pas. Cela d’autant plus que les cultures vivrières, considérées à tort comme secondaires, ont été abandonnées aux femmes. Or, ces dernières sont généralement de

Marc Omboui

petits producteurs qui pratiquent une agriculture extensive, et ne sont pas toujours perméables aux techniques modernes. À cela, il faut ajouter les importantes pertes après récolte et le mauvais état des routes qui ne facilite pas l’évacuation des produits alimentaires des zones de production vers les divers marchés notamment en saison des pluies. Par ailleurs, l’on observe que la démographie camerounaise a évolué de telle sorte que, alors qu’il y a une trentaine d’années, environ 75% de la population vivaient en campagne, et donc se consacraient aux activités rurales, aujourd’hui, c’est la moitié, sinon plus, de la population qui vit dans les villes. En conséquence, de moins en moins de gens travaillent dans le secteur rural en général et dans les domaines de l’agriculture et de l’élevage en particulier ; alors que les bouches à nourrir sont de plus en plus nombreuses. Sous les effets conjugués de l’exode rural, de la croissance démographique, de certaines pénuries, du renchérissement des produits alimentaires et de l’évolution des habitudes alimentaires, les populations se sont tournées vers les produits d’importations pour satisfaire leurs besoins alimentaires. Dans les grandes villes, la banane plantain est hors de prix pour les petites bourses qui se rabattent sur le riz et les pâtes alimentaires généralement importés. De la même manière, manger du poulet ou de la viande de bœuf devient un luxe pour de nombreuses familles. Il faut reconnaître que la crise économique qui a frappé le pays du milieu des années 80 au début des années 2000 a été pour beaucoup dans la détérioration de la situation alimentaire du Cameroun, en ce sens qu’elle a contraint l’État à se désengager des secteurs productifs et à mettre en berne les structures d’encadrement du paysannat.


ÉVENEMENT

De moins en moins de gens travaillent dans le secteur rural en général et dans les domaines de l’agriculture et de l’élevage en particulier, alors que les bouches à nourrir sont de plus en plus nombreuses.

Un recours massif aux importations Aujourd’hui, le Cameroun importe massivement du riz, du poisson, de la farine de blé et des huiles végétales. Pendant longtemps, le poulet congelé était lui aussi importé en grande quantité, et il a fallu prendre des mesures draconiennes et encourager la production locale de volaille pour inverser la tendance. Pendant les fêtes de fin d’année 2010 par exemple, il y avait tellement de poulets de chair localement produits sur les marchés de Yaoundé et de Douala que les prix ont sensiblement chuté. Pour ce qui est par exemple du riz, pour satisfaire ses besoins nationaux qui s’élèvent à environ 500 000 tonnes par an, le Cameroun a recours aux importations massives en vue de compléter sa production qui se situe autour de 130 000 tonnes par an. Il en est de même du poisson, de la farine de blé et des huiles végétales et parfois même du sucre. Une situation d’autant plus préjudiciable que, en même temps qu’elle décourage d’une certaine manière la production locale, elle contribue à déséquilibrer la balance commerciale du pays.

Par ailleurs, les ruptures en approvisionnement de ces denrées importées créent régulièrement des pénuries. L’Assemblée nationale s’en est émue au point que, lors de sa session du mois de novembre 2010, un député a interpellé le ministre en charge de l’Agriculture au sujet du dispositif mis en place par le gouvernement pour garantir l’autosuffisance alimentaire et développer les productions agricoles.

L’implication de l’élite Pour sa part, le gouvernement se dit préoccupé et déploie son action sur deux plans : d’abord, la poursuite de la modernisation de la petite agriculture par la mobilisation des réserves de productivité et, ensuite, la promotion des moyennes et grandes exploitations agricoles par la mobilisation d’importantes réserves en terre qui existent. Quant aux populations, on observe comme une amélioration de l’image de l’agriculture qui est de moins en moins considérée comme une activité mineure. Force est de constater qu’une bonne partie de l’élite administrative et politique s’investit dans le secteur agricole et dans l’élevage et pratique des techniques de cultures intensives sur des

surfaces de plus en plus importantes. Et du fait de la chute il y a quelques années des cours du cacao et du café, les hommes se sont résignés à la pratique des cultures vivrières qui trouvent preneurs sur le marché local. Cette revalorisation du secteur rural, ajoutée aux mesures incitatives que prend le gouvernement, est susceptible de restaurer l’autosuffisance alimentaire de manière durable. Il y va de la souveraineté même du pays car, comme l’a relevé le chef de l’État camerounais dans son discours en janvier dernier devant le corps diplomatique accrédité à Yaoundé, il est urgent de s’affranchir d’une dépendance qui s’est constituée au fil des années. En plus de satisfaire ses besoins alimentaires propres, le Cameroun compte sur le développement du secteur rural pour développer son économie et devenir dans une vingtaine d’années un pays émergent. Il y a tout intérêt d’ailleurs dans la mesure où, au-delà de la zone de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC), un marché plus grand s’offre à lui avec le Nigeria et la R.D. du Congo. AFRIQUE EXPANSION Magazine N˚ 36 31


NOUS EMBAUCHONS! LE CANADA EN DÉFICIT DE MAIN D’ŒUVRE Claude Gervais

Un taux de natalité qui n’augmente pas assez vite, des provinces en compétition dans la course aux meilleurs talents, des secteurs de pointe qui craignent la décroissance : le Canada vit à vitesse «grand V» le drame économique des sociétés occidentales. Seule voie de salut, l’immigration.

Q

ui n’a pas vu ces immenses banderoles qui ornent les murs de nos usines ? Elles sont omniprésentes dans les parcs industriels de banlieues. « Nous embauchons », clament-elles, haut et fort ! Depuis deux ou trois ans, la plupart des entreprises de tous les secteurs économiques se sont mises en mode recrutement. De nombreuses études l’avaient prédit. Dès 2010, la pénurie de maind’œuvre irait en s’aggravant. Or, en ce début de 2011, les perspectives d’amélioration ne sont guère visibles. C’est le cas au Québec. Au rythme où vont les choses, il manquera 363 000 travailleurs d’ici 2030. Dès 2007, le Conference Board du Canada prévoyait que cette pénurie de main-d’œuvre pourrait faire chuter de moitié la capacité de croissance de l’économie québécoise. 32 AFRIQUE EXPANSION Magazine N˚ 36

De nouvelles stratégies Les entreprises n’auront pas le choix d’adapter leurs pratiques et leurs stratégies. Elles ont d’ailleurs déjà commencé à augmenter les salaires pour attirer et retenir la maind’oeuvre. Elles investissent aussi de plus en plus dans de nouveaux moyens de production susceptibles d’accroître leur productivité. Une autre stratégie vise à accroître le taux d’emploi de la population québécoise, à commencer par ses immigrants, en accélérant la reconnaissance de leurs compétences professionnelles. Mais il est clair que ce ne sera pas suffisant. L’étude du Conference Board soutient clairement que «l’immigration nette deviendra le principal moteur de la croissance démographique au cours des prochaines années ». On peut s’attendre à ce que la migration internationale annuelle nette augmente au Québec d’une moyenne de 34 400 immigrants en 2006 à

54 150 en 2030. Mais il faut aussi prévoir qu’une moyenne de 11 839 personnes partira chaque année vers d’autres provinces, compétition à l’interne oblige !

Les secteurs les plus touchés au Québec Lorsque l’industrie forestière redémarrera, elle aura besoin de nouveaux travailleurs. Le président sortant du Conseil de l’industrie forestière du Québec, Guy Chevrette, disait récemment que si la reprise avait lieu maintenant, il manquerait à l’industrie de 2 000 à 3 000 travailleurs certifiés. Les sociétés minières sont en pleine expansion, mais la moitié de ses travailleurs ont plus de 50 ans. Au Québec, selon le Comité sectoriel sur la main-d’oeuvre de l’industrie minière, ce secteur aurait besoin de 1000 nouveaux travailleurs par année durant 10 ans pour combler ses besoins. Et ce chiffre serait conservateur.


La pénurie de la main-d’oeuvre en Ontario Un manque important de travailleurs qualifiés menace de freiner toutes sortes de projets d’envergure, particulièrement dans le domaine des énergies « propres » en Ontario. Additionnez à cela des coûts de développement à la hausse et d’importants délais dans la construction des équipements et vous avez un scénario qui énerve les autorités de cette province. La situation se complique quand on sait que des centaines d’ouvriers du secteur énergétique doivent bientôt prendre leur retraite alors que ces projets vont créer 50 000 emplois. Des emplois payants qui vont de la construction de champs d’éoliennes et de panneaux solaires à l’ingénierie de ces équipements et aux technologies qui les concernent. Il est clair qu’il faudra recruter ailleurs qu’au Canada pour trouver une bonne partie de ces ressources humaines. L’Ontario devra trouver des milliers d’électriciens ayant de l’expérience dans l’installation de systèmes photovoltaïques. Une tâche ardue et presque impossible parce que ce type de spécialité ne court tout simplement pas les rues. « C’est exactement ce qui s’est produit en Alberta il y a trois ans pour l’extraction et la transformation des sables bitumineux », raconte

Om Malik, le président d’un grand organisme professionnel pour l’avancement de la technologie sur la scène internationale (IEEE). Une pénurie importante d’ouvriers a, ou bien allongé indûment le temps de réalisation de certains projets, ou bien forcé carrément leur annulation.

Parmi les aides familiaux résidants et les ouvriers agricoles, on notait trop de plaintes faisant état d’abus de toutes sortes. Le gouvernement conservateur a modifié la loi pour leur éviter à l’avenir de faire l’objet « d’exploitation et de mauvais traitement ». Ainsi, une évaluation plus rigoureuse sera faite de l’authenticité de l’offre Immigration permanente d’emploi présentée par les employeurs ou travailleurs étrangers voulant recruter des travailleurs étrantemporaires ? gers temporaires. Les employeurs « qui ne respectent pas leurs engagements Le Canada a toujours été un pays envers les travailleurs en ce qui a trait d’immigration et les politiques migraà la rémunération, aux conditions de toires ont largement favorisé le recrutravail et à l’emploi » ne pourront tement de travailleurs étrangers par la embaucher des travailleurs étranvoie de la sélection, assortie de la résigers pendant deux ans. Les dence permanente. C’est cette travailleurs étrangers temimmigration qui poraires se verront imposer a façonné une limite à leur séjour au t u l’histoire Canada avant leur e v nada , économiretour dans leur pays. Les Si le Ca orer son sort li que et employeurs seront donc nt amé vraime ra accélérer le és sociale du désormais évalués en v m lô il de ip d Canada fonction de leur respect e ment d et du Quéantérieur des exigenrecrute ers dans des t bec. Même ces d’Ottawa, avant étrang e pointe, tou d e r si déjà, il y a s qu’une autorisation ît e a in n a n co e dom r e d quarante ans, le leur soit accordée. t suran s Canada procédait Comme on peut en s’as lidité de leur la va parallèlement au s le constater, le e c n e recrutement de tracompét Canada est en train vailleurs étrangers, le de se doter d’une politique minombre de personnes gratoire à deux vitesses : une pour les concernées demeurait limité. qualifiés, l’immigration permanente Ainsi, durant le dernier siècle, le avec tous les droits, une autre pour les Canada a donné l’image d’un pays non-qualifiés, l’immigration temporaire favorisant l’immigration permanente. avec peu de droits. Mais depuis environ dix ans, cette Ce faisant, il ne fait qu’imiter image s’est considérablement transd’autres pays développés, aux prises formée en raison des changements avec une dénatalité sévère et difficilecruciaux dans le contexte économique ment réversible. Mais si le Canada veut et démographique. vraiment améliorer son sort, il devra La politique d’immigration acaccélérer le recrutement de diplômés tuelle fait l’objet de nombreuses étrangers dans des domaines de pointe, critiques de la part des employeurs qui tout en s’assurant de reconnaître la la considèrent inefficace, surtout en validité de leurs compétences. raison du long processus de sélection qui empêche de répondre rapidement ada , le Can ys r e i à des besoins immédiats. Les pressions n r e pa le d de la part des employeurs sont donc Le sièc l’image d’un n io é très grandes pour lier directement a donn nt l’immigrat is a u emploi et travailleur. Ceci se traduit favoris te. Mais dep e a par la mise sur pied de programmes de n e ag n perma ans, cette im on travailleurs temporaires visant à la fois dix rais des emplois qualifiés et non qualifiés. environ up changé en iaux c Jason Kenney, le ministre fédéral de la beauco gements cru ique Citoyenneté, de l’Immigration et du m an des ch ntexte écono Multiculturalisme dit qu’ « après tout, o . c e dans le émographiqu ils constituent un élément essentiel de et d la réussite économique du Canada ». AFRIQUE EXPANSION Magazine N˚ 36 33

MARCHÉS NORD-AMÉRICAINS

Les industries manufacturières recherchent des techniciens qualifiés, en mécanique, en soudure, en électricité, ou en chimie : des programmes de formation ne suffisent pas à la tâche. Selon un sondage mené par la Fédération des chambres de commerce du Québec, la pénurie de travailleurs hautement spécialisés frappe très dur hors des grands centres où 38% des entreprises disent vivre ce problème alors qu’à Montréal, c’est 14% et 19% à Québec. Il y a le secteur secondaire qui manque de relève pour sa production de papiers et de textiles spécialisés. La pénurie se fait aussi sentir dans les domaines de la finance et de l’assurance, sans compter les secteurs de la santé et de la restauration. L’agriculture, dont les besoins en travailleurs temporaires recrutés en Amérique latine vont grandissant, reste un secteur en demande.


IMMIGRATION

LA CHASSE AU PORTEFEUILLE

ÉTUDIANT

Vitraulle Mboungou

Oxford, Harvard, Stanford, MIT, etc. sont autant d’établissements prestigieux qui font rêver de nombreux étudiants dans le monde. L’admission dans ces universités est synonyme de réussite dans la vie. Mais la réalisation de ces rêves a un coût souvent très élevé, avec d’importants frais de scolarité. D’où l’agressivité de ces établissements dans le recrutement de ces étudiants étrangers, car les retombées financières sont nombreuses aussi bien pour elles que pour les pays d’accueil.

L’

Amérique du Nord et l’Europe demeurent les destinations préférées des étudiants étrangers. Et pour cause, les plus grandes universités nord-américaines et européennes se livrent une concurrence féroce pour les attirer dans leurs établissements pour la simple et bonne raison que les frais d’inscription de ces étudiants étrangers, largement supérieurs à ceux des nationaux, constituent une part non négligeable dans leur budget. Ainsi, elles rivalisent d’ingéniosité et de créativité en matière de politique de séduction, chacune jouant entre autres sur sa particularité. En 2008, selon les statistiques de l’OCDE, les universités américaines ont 34 AFRIQUE EXPANSION Magazine N˚ 36

accueilli près de 19% des 3,3 millions d’étudiants étrangers recensés dans le monde contre 10% pour le RoyaumeUni, deuxième du classement et 7% pour l’Allemagne, la France et l’Australie, troisième ex aequo. Aux États-Unis, pays fédéral, le système universitaire étant décentralisé, les établissements jouissent d’une très grande autonomie et souplesse qui leur permettent d’établir notamment leur propre politique de recrutement des étudiants. Concernant les frais d’inscription, par exemple, ceux-ci varient en fonction de la nature de l’université (publique ou privée) et de son prestige. Ainsi, l’année universitaire coûte près de 6 500 dollars dans une université américaine d’État. Ce tarif, comprenant l’héberge-

ment sur le campus (obligatoire la première année) et d’autres services, peut grimper jusqu’à plus de 50 000 dollars dans des universités prestigieuses et internationalement reconnues comme Harvard au capital de 20 milliards de dollars. Durant cette dernière décennie, les universités américaines ont fait face à une chute importante et continue du nombre d’inscriptions d’étudiants étrangers, et cela malgré un rattrapage amorcé vers la fin des années 2000. Ainsi, selon le rapport 2009 du Council of Graduate Schools (CGS, association d’enseignement supérieur), les candidatures des étudiants internationaux aux cycles supérieurs entre 2008 et 2009, n’ont progressé que de 4% après trois années de croissance relativement lente (plus 6% en 2007-2008 et plus 9% en 2006-2007). La politique internationale des États-Unis au lendemain des attentats du 11 septembre 2001 à New York explique en partie cette baisse de demandes d’inscription, tout comme la crise financière mondiale de 2008.

Plans marketing et communication accrocheurs Face à ce contexte particulièrement défavorable, les établissements américains


Les autorités politiques au secours des universités Souvent, les universités font appel aux autorités pour les aider dans cette tâche de recrutement d’étudiants étrangers hautement qualifiés originaires de pays émergents. Dans le cas américain par exemple, le Département d’État est venu prêter main forte aux universités en jouant

un rôle actif dans cette politique d’incitation. Il a pris certaines mesures assez significatives pour accélérer, entre autres, l’examen des demandes de visas des étudiants, créer des postes supplémentaires d’agent consulaire, négocier des accords prolongés de réciprocité de façon à ce que ces étudiants n’aient pas à faire tous les ans une demande de visa ou de titre de séjour, comme c’est le cas en France où ces jeunes sont soumis à une sélection très sévère et souvent injuste pour obtenir ou renouveler leur visa. Le Département d’État a également demandé à ses ambassades et consulats de donner la priorité aux étudiants et universités lorsqu’ils fixent les dates d’entretien obligatoire pour la délivrance d’un visa. Les autorités américaines aident ainsi ces établissements publics avec ces mesures, car elles sont conscientes que les frais d’études excessivement élevés aux ÉtatsUnis peuvent constituer un obstacle et un

(étudiants européens), car ils payent des frais d’inscription qui sont 5 à 7 fois plus élevés. Ce secteur de l’éducation internationale, devenu une activité économique mondiale, constitue donc une importante source de bénéfices pour les économies des pays d’accueil de ces étudiants étrangers. D’où le « coup de main » des gouvernements auprès des universités. Ainsi, selon le ministère canadien, Citoyenneté et Immigration, ce pays a accueilli en 2008, 6% des 3,3 millions d’étudiants étrangers recensés dans le monde pour un apport financier de 6,5 milliards de dollars (frais de scolarité, services de logement et autres dépenses) à l’économie nationale. Ce secteur a également généré 83 000 emplois et contribué pour 291 millions de dollars au trésor public canadien. L’on imagine donc aisément les énormes retombées financières pour des pays comme les ÉtatsUnis, premier du classement des pays d’accueil des étudiants internationaux.

Le Canada a accueilli en 2008, 6% des 3,3 millions d’étudiants étrangers recensés dans le monde pour un apport financier de 6,5 milliards de dollars à l’économie nationale. frein de taille pour ces étudiants étrangers ainsi courtisés. 78% d’entre eux couvrent ces frais grâce à l’aide de la famille et aux ressources personnelles. Ces universités misent donc sur la solvabilité des familles issues des nouvelles classes moyennes assez bourgeoises des nouveaux pays émergents. Des familles qui sont prêtes à débourser 45 000 dollars par an, parfois plus, afin d’envoyer leurs enfants étudier dans une université anglo-saxonne. En Grande-Bretagne, l’accueil des étudiants étrangers est également devenu, au cours de ces dernières années, une priorité pour le gouvernement qui ne s’en cache pas. Ainsi, en 2000, le ministère chargé de l’enseignement supérieur a investi 5 millions de livres (soit près de 7,8 millions de dollars) pour soutenir la mise en place du programme « Education UK », véritable stratégie commerciale des universités britanniques envers les étudiants étrangers, en particulier les non-ressortissants de l’Union européenne. Cette politique se justifie par le fait que beaucoup de ces universités européennes vivent en partie grâce à cette manne que représentent ces étudiants étrangers non-ressortissants de l’Union européenne, qui sont financièrement plus intéressants que les étudiants communautaires AFRIQUE EXPANSION Magazine N˚ 36 35

MONDIALISATION

d’enseignement supérieur ont donc multiplié les efforts pour attirer les étudiants étrangers, grâce notamment à la mise en place de politiques de recrutement attractives et incitatives. Pour les responsables des cycles supérieurs de ces universités, les étudiants étrangers non boursiers -car c’est de bien d’eux qu’il s’agit-, constituent un enjeu crucial pour la bonne marche financière de leurs établissements. Ainsi, même les doyens n’hésitent pas à retrousser leurs manches pour aller à la chasse de ces étudiants et de leur portefeuille en particulier. Selon l’étude 2007 de la CGS, 87% des doyens des universités américaines ont participé, durant les deux années précédentes, à des activités visant à faire connaître leurs établissements et près de la moitié se serait même rendue à l’étranger afin de mettre sur pied un partenariat d’échanges, notamment en Inde et en Chine, les deux pays qui comptent le plus d’étudiants aux États-Unis (98 510 étudiants chinois pour l’année 2008-2009). Et toujours dans le même registre, douze établissements d’enseignement supérieur canadiens ont organisé en novembre 2010, à Dakar, la capitale sénégalaise, un salon destiné aux parents et étudiants sénégalais afin de leur « vendre la destination Canada ». Durant deux jours, ces universités venant de sept provinces canadiennes sont donc allées « démarcher » les étudiants sénégalais mais surtout les parents qui sont souvent réfractaires à cause des coûts élevés des études au Canada. Pour ces universités, l’enseignement supérieur est devenu comme un marché international au sein duquel elles se doivent d’être compétitives. Dès lors, l’étudiant étranger est naturellement perçu comme un client potentiel qu’il faut séduire avec une stratégie de marketing et de communication adaptée, convaincre par une offre académique et autres avantages sur mesure et satisfaire grâce un accueil soigné et un suivi individuel continu. Pour ce faire, leurs sites Internet sont de véritables outils de promotion à l’international qui aident par exemple les futurs étudiants à se familiariser avec le système d’enseignement supérieur de leur futur pays d’accueil.


LE BRÉSIL

LE TRANSFERT D’UN SAVOIR-FAIRE EN AFRIQUE S’affirmant dans son hymne national, géant par sa propre nature, le Brésil n’est plus seulement “l’hyperpuissance du football”. Ce pays-continent, doté de 200 millions d’habitants et 8,5 millions de km2, est la 8e puissance économique. Créancier des institutions de Bretton Woods et candidat à un siège permanent au Conseil de Sécurité des Nations Unies, il est un futur joueur clé sur le continent africain. À l’heure où de nombreux pays en Afrique aspirent à devenir dans une ou deux décennies des pays émergents, le cas du Brésil mérite d’être étudié.

L

a première phase d’industrialisation du Brésil remonte au sortir de la Première Guerre mondiale. Cependant, le succès économique du Brésil actuel est dû à la rigueur érigée en valeur cardinale par les Présidents Cardoso et Lula. Nous vivons donc en réalité 16 ans de rigueur budgétaire, de contrôle des dépenses publiques et de maîtrise de l’inflation, sans oublier une politique sociale qui a permis de réduire la pauvreté et d’élargir la base de sa classe moyenne. Lors d’un colloque sur le Brésil organisé au Sénat français en 2002, Christian Poncelet, Président d’alors, mentionnait que l’inflation était passée de 22 à 5% entre 1995 et 2002.

Des réformes sociales sans précédent L’on estime que le taux de pauvreté est passé au Brésil de 46 à 16% entre 1990 et 2008. Selon Euronews, depuis 7 ans, 29 millions ont rejoint la classe moyenne, et 20,5 millions sont 36 AFRIQUE EXPANSION Magazine N˚ 36

Serge Tchaha sortis de la pauvreté. Il est clair que le programme Bolsa Familia y est pour beaucoup. Selon le gouvernement brésilien, c’est un programme visant à verser, sous certaines conditions, une bourse aux familles qui sont pauvres ou extrêmement pauvres. Cette allocation peut aller jusqu’à 100 euros/ mois. Ce programme est utilisé par 12 millions de familles. De plus, selon la journaliste Anne Denis de Slate. fr, le salaire minimum a augmenté, hors inflation, de quelque 55% en 8 ans. Cette mesure profite à près de 30 millions d’employés et à 18 millions de retraités. L’ensemble de ces mesures a naturellement contribué à augmenter substantiellement le pouvoir d’achat des Brésiliens et améliorer leur capacité de consommer et de faire tourner l’appareil de production. Parallèlement à ces mesures, la diplomatie « imaginative » du président Lula a contribué à renforcer la dimension d’économie globale du pays. Dans un entretien accordé au journal Le Monde, Kourliandsky, chercheur à l’Institut des Relations Internationa-

les et Stratégiques, mentionne que : « dès son accession au pouvoir, en 2003, Lula a clairement marqué sa volonté de voir le Brésil jouer un rôle nouveau dans la gouvernance mondiale. Dans cet esprit, il a amorcé un rapprochement avec l’Inde et l’Afrique du Sud. L’objectif était de constituer un groupe de pression capable de modifier le processus de prise de décision au sein de l’OMC […] Par la suite, le Brésil a multiplié les initiatives transversales, c’est-à-dire Sud-Sud, ce qui était totalement inédit. Des groupes de concertation pérennes ont ainsi été créés, entre l’Amérique du Sud et la Ligue arabe en 2005, mais aussi entre l’Amérique du Sud et l’Afrique noire. Cela n’a cependant pas empêché le pays de participer à des structures verticales Nord-Sud, comme le G4 avec l’Allemagne, l’Inde et le Japon – structure destinée à promouvoir la candidature de ces quatre pays comme membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU – ou le groupe de travail conjoint avec les États-Unis sur l’éthanol en 2007». Le Brésil est également un élément moteur de


Les liens avec l’Afrique : le transfert du savoir-faire Au-delà cependant de cette volonté d’être un acteur majeur sur la scène internationale, le Brésil accorde aujourd’hui une importance particulière à sa relation avec l’Afrique. Certes, cette relation, en termes de volume d’échanges, est encore cinq fois inférieure à celle que la Chine entretient avec ce continent, mais elle est génétiquement constituée par plusieurs éléments qui seront essentiels pour son succès. Primo, ce sont les plus soft mais ils ont toute leur pertinence. Il s’agit du football, de la samba, du festival de Rio. Et du fait que le Brésil a désormais une aura internationale plus grande que l’ex-colonisateur, le Portugal. Ce cocktail donne au Brésil une image sympathique et aide les Africains à se reconnaître dans certaines valeurs de ce géant. Rappelons-nous que la consommation des produits a une valeur symbolique et émotive. C’est pour cela que des anti-Américains boycottent Macdonald et Coca-Cola. De même, les Chinois avaient boudé les produits français suite à la polémique relative à l’accueil réservé à la flamme olympique. Le « made in Brazil » pourrait aussi bénéficier d’un positionnement de premier choix, car il y a de la part des Brésiliens une claire volonté de transmettre leur savoir-faire aux Africains. Selon la Présidence ivoirienne, lors du sommet spécial CÉDÉAO-Brésil du 3 juillet 2010, le Président Lula a affirmé : « Au-delà du commerce, nous souhaitons créer les conditions de transferts de technologies en faveur de l’Afrique ». Un autre élément est la place de leader incontesté qu’occupe la république fédérative aux 26 États dans ces différents créneaux :

1. Agriculture et industries agroalimentaires Tant pour des pays de la CEEAC (Communauté économique des États d’Afrique centrale) qu’avec les pays de la CEDEAO (Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest), la coopération avec le Brésil mise sur le tourisme, l’agriculture, et l’agroalimentaire.

DÉVELOPPEMENT

l’intégration en Amérique du Sud. C’est le cas avec le marché commun : le MERCOSUR.

Étant premier exportateur mondial de soja, de sucre et d’éthanol, de bœuf, de poulet ou de jus d’orange (Rapport Sénat français, 2008), le Brésil a matière à transmettre un savoir-faire reconnu et vocation à nouer des partenariats d’affaires avec les Africains. Toujours selon la présidence ivoirienne, Lula a indiqué « […] le Brésil est partenaire de l’Afrique dans cette initiative. Dans ce sens, nous pouvons reproduire la révolution agricole brésilienne dans la CEDEAO ».

Le Brésil, comme les autres puissances, s’intéresse à l’Afrique, peut être avec plus d’humanité, de solidarité - car plus proche par les liens de sang et chair. 2. Énergies propres et biocarburants Selon la Brésilienne PETROBAS, c’est depuis 1970 que remontent leurs premières études sur l’éthanol. Aujourd’hui, ce pays est avec les États-Unis, leader dans la production de biocarburants.

3. Mines D’après la BBC, la Brésilienne Vale a investi 1,3 milliard de dollars au Mozambique dans une mine de charbon. On parle de 11 millions de tonnes par an. Ce pays deviendra deuxième producteur de charbon du continent après l’Afrique du Sud.

4. Exploration pétrolière Bien que futur géant pétrolier, le Brésil s’intéresse au pétrole africain. En témoigne un document de Panapress

qui signale que High Resolution Technology-HRT déterminera le potentiel pétrolier d’un bassin de 800 000 km2 en RDC. À l’avenir, verra-t-on un partenariat Brésil-COMIFAC (Commission des forêts de l’Afrique centrale)? Le Brésil et les pays de la COMIFAC gagneraient en effet à travailler ensemble, car ils forment un réservoir planétaire de biodiversité et sont les poumons de la planète. Sur le plan géopolitique mondial, c’est donc une alliance qui pourrait servir leurs intérêts respectifs. Par ailleurs, ne serait-il pas intéressant pour des pays africains d’offrir aux Afro-brésiliens des circuits touristiques qui les aideront à retracer leurs origines? Le Brésil, comme les autres puissances, s’intéresse à l’Afrique, peut être avec plus d’humanité, de solidarité - car plus proche par les liens de sang et chair - mais les Brésiliens sont sans doute d’accord avec S.E M. Alpha Oumar Konaré, ancien président du Mali, qui avait déclaré au quotidien montréalais LA PRESSE - dans le cadre du forum Africa 2009 - « Dans 40 ans, vous n’allez pas vendre aux Chinois, vous n’allez pas vendre aux Indiens. Le nouveau marché, c’est nous [les pays africains]. Le plus jeune marché du globe, c’est nous. Le marché où il y a tout à faire, c’est nous ». Aux leaders africains d’en avoir conscience!

LES POIDS LOURDS DE L’INDUSTRIE BRÉSILIENNE Embraer : 3ème constructeur aéronautique mondial; 5,5 milliards de CA; 17000 employés Petrobas : Bénéficiaire de la plus grande ouverture du capital au monde, on parle de 70 milliards de dollars; 76 625 employés; Implanté dans 27 pays différents Vale :

24,36 milliards de CA; 140 600 employés; Présent dans 34 pays dont 7 afri- cains (Afrique du Sud; Angola, Gabon, Guinée; Mozambique; RDC; Zambie)

(Source : Easybourse.com; Euronews; PETROBAS; VALE)

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AFFAIRES

DOING BUSINESS 2011

ÉCLAIRCIES DANS LES AFFAIRES EN AFRIQUE Léopold Nséké

La crise n’aura manifestement pas eu prise sur la volonté de modifier les procédures et règles entourant les modalités d’investissement dans le monde. Lancé en 2002, le projet Doing Business analyse les performances des PME au niveau national dans chaque pays et mesure la réglementation à laquelle elles font face sur tout le cycle de leur exercice.

L

e rapport 2011, qui couvre 11 ensembles d’indicateurs dans 183 pays évalués entre juin 2009 et juin 2010, révèle des points intéressants. Une synthèse rapide indique que les décideurs du monde entier ont pris des mesures visant à faciliter la création et l’exploitation d’entreprise au niveau local. Ces initiatives ont été d’autant plus importantes qu’au cours de la période 2009/2010, la plupart des entreprises ont ressenti les répercussions de la crise financière. Au niveau du classement, Maurice reste le pays le plus propice aux affaires en Afrique avec une 20e place, inchangée par rapport à 2010. Suivent dans le top 100, Afrique du sud (34e), Botswana (52e), Rwanda (58e), Ghana (67e), Namibie (69e), Zambie (76e), Égypte (94e), Seychelles (95e) et Kenya (98e). Les 10 économies ayant rendu leur cadre réglementaire plus favorable aux entreprises sont la Géorgie, le Rwanda, le Bélarus, le Burkina Faso, l’Arabie Saoudite, le Mali, la République kirghize, la Croatie, le Kazakhstan et le Ghana. Toutes ont mis en œuvre, pendant les cinq dernières années, plus d’une dizaine de réformes dans les domaines évalués par Doing Business.

Spectaculaire Rwanda ! Déjà mentionné dans le précédent rapport avec un bond de 76 places, Kigali 40 AFRIQUE EXPANSION Magazine N˚ 36

se distingue de nouveau en passant de la 70e à la 58e place. Ce qui place le pays des Grands Lacs dans le groupe des nations les plus réformatrices dans les domaines évalués par Doing Business. En effet, depuis 2005, le Rwanda a mis en œuvre 22 réformes concernant la réglementation des affaires et les résultats sur le terrain sont visibles. En 2005, neuf procédures et un coût de 223% du revenu par habitant étaient nécessaires pour créer une entreprise au Rwanda. Aujourd’hui, les entrepreneurs peuvent enregistrer une nouvelle entreprise en trois jours en s’acquittant des frais officiels représentant 8,9% du revenu par habitant. Plus de 3 000 entrepreneurs ont tiré parti de ces améliorations en 2008, soit un chiffre en nette augmentation par rapport à la moyenne annuelle de 700 entrepreneurs auparavant. En 2005, un transfert de propriété prenait plus d’un an (371 jours), et les frais associés représentaient 9,8% de la valeur de la propriété. Cette formalité prend aujourd’hui deux mois et coûte l’équivalent de 0,4% de la valeur de la propriété. D’autres économies telles que le Ghana et le Mali, ont adopté une approche inscrite dans la durée, améliorant le climat des affaires sur plusieurs années. Le Ghana a appliqué des mesures dans 6 domaines, a mis sur pied son premier registre d’information sur le crédit, informatisé le regis-

tre du commerce et réorganisé son régime de transfert de propriété, passant d’un système d’enregistrement des actes à un système d’enregistrement des titres. Effectuée sur plusieurs années, cette réforme a réduit le délai de transfert de propriété de 24 à 5 semaines. Au Mali, la réforme de la réglementation a également progressé et parmi les principales réalisations, il faut noter les réformes douanières, un nouveau guichet unique pour la création d’entreprise et la modification du code de procédure civile en 2009 qui a renforcé la protection des actionnaires minoritaires et amélioré les procédures (toujours longues) du tribunal pour le règlement des différends commerciaux.

Le commerce inter-états plébiscité en Afrique Sur un tout autre plan, environ la moitié de l’ensemble des réformes liées à la facilitation du commerce transfrontalier menées en 2009/2010 ont eu lieu en Afrique subsaharienne (9 réformes), au Moyen-Orient et en Afrique du Nord (6 réformes). Plusieurs de ces réformes ont été motivées par l’intégration régionale, certains de ces efforts s’appuyant sur des initiatives existantes telles que l’Union douanière de l’Afrique australe. En Afrique de l’Est, l’instauration du contrôle unique a contribué à accélérer le franchissement de la frontière entre le Rwanda et l’Ouganda. S’il est vrai que des systèmes différents de gestion des données électroniques continuent d’être utilisés par les douanes du Kenya, de la Tanzanie et de l’Ouganda, des efforts sont cependant en cours pour créer une interface unique entre ces systèmes. Au total, 27 des 46 économies d’Afrique subsaharienne ont mis en application des réformes préconisées par Doing Business, soit un ensemble de 49 mesures de réforme.


Ces investisseurs étrangers qui ont ainsi décidé de miser sur l’Afrique, sont très souvent originaires des pays du BRIC. C’est particulièrement le cas de la Chine, du Brésil et de l’Inde qui ont profité de la désertion sur ce continent, de nombreuses entreprises occidentales en provenance des anciens empires coloniaux comme la France, pour s’y implanter durablement. Les Chinois ont par exemple investi 1,025 milliard de dollars au Nigeria en 2010. Le fait que l’Afrique soit la troisième région du monde en termes de croissance économique, attire aussi de nombreux investisseurs. En effet, d’après la Banque mondiale et le Fonds monétaire international (FMI), l’inflation en Afrique est actuellement deux fois moins élevée que dans les années 90. Une situation qui s’explique notamment par les bonnes performances dans le secteur agricole et la diminution des conflits armés durant cette dernière décennie. Une étude de 2009 menée par Paul Collier, économiste et directeur du Centre d’étude des économies africaines de l’université d’Oxford, sur les entreprises cotées dans les bourses africaines entre 2000 et 2007, a ainsi démontré que leur retour sur investissement

DOING BUSINESS 2011

Investir en Afrique, C’EST TRÈS PAYANT !

Les flux de capitaux privés vers le continent africain en 2010 ont atteint 55 milliards de dollars contre 49 milliards en 2007, faisant de l’Afrique, le continent au taux du retour sur investissement le plus élevé au monde. étrangers. Pour Shanta Devarajan, l’économiste en chef de la Banque mondiale, interrogé par Reuters, l’explication réside dans « le fait que les décideurs politiques africains ont répondu à la crise économique et financière internationale par des politiques prudentes ».

Les pays du BRIC les nouveaux investisseurs Le Nigeria, l’Angola, pays réservoirs d’hydrocarbures ainsi que l’Afrique du Sud, seul pays émergent du continent africain, arrivent sans surprise en tête du top 10 (ils reçoivent à eux seuls 40% des IDE) des marchés les plus prospectés par les investisseurs étrangers qui sont surtout intéressés par l’agriculture, les matières premières, en particulier le secteur minier et énergétique, le transport maritime et aérien mais également les infrastructures. Les télécommunications, la grande distribution et les banques qui n’ont pas été impliquées dans la crise des « subprimes » aux États-Unis, sont également très prisées, du fait notamment de la démocratisation de la téléphonie mobile et de l’Internet et de l’émergence d’une classe moyenne africaine au pouvoir d’achat de plus en plus élevé.

était en moyenne de 65% plus élevé que celui de leurs homologues asiatiques, notamment en Chine, Inde et Vietnam, car les coûts du travail ont, semble-t-il, excessivement augmenté dans ces pays. De même, la création des bourses au Sénégal, au Maroc et au Nigeria ainsi que la progression de l’intégration régionale sur le continent sont également autant d’éléments qui rendent l’Afrique attractive aux yeux des investisseurs étrangers. De grandes multinationales comme les suisses Nestlé (un des principaux acteurs de l’agroalimentaire dans le monde) et Swissport international (numéro un mondial de l’assistance aérienne au sol) ont affirmé dans leurs rapports annuels qu’une partie de leur taux de croissance le plus élevé se trouve en Afrique. Pendant que de nombreux pays se débattaient contre la récession mondiale, le continent africain a ainsi réalisé une croissance économique d’environ 2%. Une tendance qui va se poursuivre selon la Banque mondiale et le FMI qui prévoient pour 2011, des perspectives de croissance avoisinant les 5% (taux le plus élevé en dehors de l’Asie et des économies des pays comme le Brésil, la Russie, le Mexique ou encore l’Europe centrale). AFRIQUE EXPANSION Magazine N˚ 36 41

AFFAIRES

L’

Afrique est le continent qui possède le taux du retour sur investissement le plus élevé. La Banque mondiale l’évalue pour 2010, entre 24 et 30%, contre 16 et 18% pour les pays développés. Déjà, en 2008, au moment où les investissements directs étrangers (IDE) ont chuté de 20% un peu partout dans le monde, ces flux avaient littéralement grimpé de 16% pour atteindre 61,9 milliards de dollars, leur niveau le plus haut, selon un rapport de l’Organisation pour la coopération et le développement économique (OCDE). Et en 2010, ils ont Vitraulle Mboungou connu quasiment le même scénario avec une augmentation de 17% malgré un recul de 12,3% l’année précédente. Cette tendance confirme ainsi le positionnement de l’Afrique comme destination privilégiée des capitaux


AFFAIRES

DOING BUSINESS 2011

FOCUS

Léopold Nséké

Kigali, nouvelle

destination des affaires

Une décennie après la tragédie nationale qui lui a coûté cher, le Rwanda est redevenu fréquentable sur plusieurs plans. Cette destination est désormais recommandée par plusieurs rapports qui attestent d’un climat extrêmement favorable aux investissements.

D

ans sa dernière livraison, Doing Business classe le pays de Paul Kagamé au 58e rang du classement général de la facilité de faire des affaires sur 183 économies. Une progression de 12 places par rapport à 2009. Comment un pays à ce point exsangue au début des années 90 a pu amener les décideurs à lui trouver un environnement aussi favorable ? La principale raison en est la volonté politique des autorités rwandaises. Avec un budget provenant de dons extérieurs pour moitié, Kigali n’avait pas d’autre choix que de trouver de nouvelles avenues pour son développement. Secteur privé en tête, une batterie de mesures ont été initiées pour inciter les investisseurs locaux et étrangers à se lancer dans les affaires.

Des réformes salutaires Le Rwanda part en effet de très loin. Près de 10 millions d’habitants sur 26 338 km2. Une population très jeune dont 63% vivant sous le seuil de la pauvreté de 1 $US par jour. Il devenait indispensable de mettre sur pied un plan d’attaque pour créer les conditions idéales à travers le commerce et l’industrie pour doper la croissance. Kigali a regroupé tout cela dans un programme intitulé « Vision 2020 » et dans lequel il est question entre 42 AFRIQUE EXPANSION Magazine N˚ 36

autres de transformer l’agriculture en un secteur productif à haute valeur ajoutée, orientée vers le marché et développer un secteur privé efficace guidé par la compétitivité et l’esprit d’entreprise. Avec le principe de bonne gouvernance en première ligne, le niveau de corruption en a pris aussi pour son grade et le Rwanda est devenu sans surprise l’un des pays où il est le plus aisé de faire des affaires. De la création d’entreprises à la délivrance de permis en passant par les formalités douanières, tout a été simplifié et un plan d’incitation à l’investissement avec des allègements fiscaux très attractifs a également vu jour. De plus, dans son rapport « Investir sans frontières » publié en novembre dernier, la Banque mondiale démontrait que le Rwanda était l’un des pays les plus ouverts à la participation extérieure au capital d’investissement, avec une absence de restrictions à la propriété juridique sur des dizaines de secteurs de l’économie. On y note ainsi qu’une entreprise étrangère n’a pas besoin de procédures particulières pour démarrer ses activités, en dehors de l’obtention d’une licence de commerce, qui ne prend qu’une journée. De même, demander un agrément des investissements est facultatif pour les étrangers, sauf s’ils souhaitent bénéficier d’incitations à l’investissement diverses prévues par la loi.

Tout cela devrait logiquement mousser l’activité et doper le taux de croissance qu’on situait autour des 6% en 2010 et qui devrait atteindre les deux chiffres assez vite.

Secteurs de croissance Afin d’assurer cette poussée, le Rwanda compte sur la hausse de la demande mondiale pour ses principales exportations que sont le café, le thé, les minerais et dont la production a connu de bons chiffres ces trois dernières années. À ces données, il faut ajouter l’amélioration des liquidités dans le secteur bancaire où le Rwanda sert également de modèle. Il n’est donc pas surprenant de voir l’intérêt manifesté à l’égard de ce pays par plusieurs groupes industriels internationaux, surtout du BRIC, qui y sont à pied d’œuvre. On les retrouve principalement dans les mines et l’économie du savoir dont le Rwanda veut être un pays-phare en mettant sur pied un secteur des services compétitif. La Rwanda Development Board (RDB), organisme gouvernemental créé pour faciliter les investissements, rajoute à cette initiative les autres domaines prioritaires que sont les infrastructures, l’énergie, l’agroalimentaire, l’éducation et le tourisme. C’est ce portrait, sans fard, qui justifie pour une large part la très bonne presse dont jouit désormais ce petit pays d’Afrique de l’Est auprès de la communauté des affaires. Un territoire à convoiter et qui se donne les moyens de prétendre à un développement durable, dans tous les sens du terme.


L’IMPORTANCE DES RAPPORTS HUMAINS Vitraulle Mboungou

Aujourd’hui, l’environnement des affaires est de plus en plus ouvert au monde et devient de ce fait très interculturel. Stratégiquement, il est donc primordial pour les gens d’affaires de connaître la culture de l’autre.

T

out ce qu’un Européen, un Canadien ou un Américain peut prendre pour agréable ou acceptable dans sa culture, peut avoir une connotation négative dans la culture d’un client potentiel et compromettre toute démarche de construire une relation commerciale durable. Ainsi, une malheureuse bavure comme une attitude mal interprétée, peut provoquer la perte d’un contrat. Les entrepreneurs qui souhaitent faire des affaires à l’international, en particulier sur le continent africain, sont désormais très attentifs aux particularités culturelles de leur partenaire. Il arrive même que certains assistent à quelques sessions de formation en communication interculturelle, un domaine devenu très en vogue dans les entreprises et assez lucratifs pour certaines firmes de communication qui se spécialisent là-dessus. Nombreux sont donc les hommes d’affaires occidentaux qui ont compris que de nos jours, le commerce international nécessite d’accorder plus d’attention à ces « détails » qui peuvent vraisemblablement faire le succès ou l’échec d’une collaboration professionnelle internationale.

Des différences sous-estimées Il existe des différences culturelles évidentes entre les entrepreneurs africains et occidentaux même si ces derniers les sous-estiment souvent. Cette attitude leur a d’ailleurs quelquefois joué des mauvais tours. Ainsi, pendant longtemps, les hommes d’affaires européens et français en particulier, se rendaient en

Afrique et tentaient d’imposer leurs principes et méthodes sans faire aucun effort pour s’adapter aux habitudes culturelles de leurs homologues africains. Résultat de courses, les Africains se sont tournés vers des partenaires qui prenaient le temps de les écouter avant de leur proposer des projets répondant à leurs attentes ou en accord avec leurs besoins. Des partenaires comme les Chinois qui connaissent actuellement un véritable succès sur ce continent où ils raflent presque tous les marchés, au grand dam des Français dont c’était le pré carré. Ils ont réussi là où ces derniers ont échoué. En s’accommodant à la façon de conduire les affaires des Africains, les Chinois ont donc su franchir les barrières culturelles pour une meilleure collaboration avec eux. Et qu’en est-il des Nord-américains? Quels sont les points de convergence ou de contradiction entre les approches américaines ou canadiennes (notamment québécoises) et africaines? Beaucoup de Nord-américains, lorsqu’ils arrivent en Afrique, font souvent l’erreur de penser qu’elle est une, sorte de grand pays avec plusieurs provinces ou États alors même que ce continent se distingue particulièrement pour sa diversité caractérisée par une mosaïque de peuples et de cultures. Ainsi, à l’intérieur d’un seul pays, on peut remarquer de grandes différences culturelles d’une ethnie à une autre. Alors vous imaginez bien sur l’ensemble du continent! Mais en dépit de ces différences, les entrepreneurs africains partagent globalement certaines valeurs culturelles essentielles telles que l’importance de la parole donnée. En effet, de nombreux hommes d’affaires africains considèrent la parole donnée devant témoin comme un engagement sur l’honneur qui suffit donc à conclure

une transaction de plusieurs millions de F CFA parfois, car ils font confiance à leurs partenaires qu’ils considèrent alors comme faisant partie de la famille ou de la tribu. Évidemment, cette confiance, il faut la gagner. Et ce n’est pas avec un voyage éclair de quelques jours, comme font souvent les Canadiens que cette relation de confiance peut s’établir. Les contacts directs (le face à face) ont pour eux plus d’intérêt que les emails ou les fax. Ils accordent beaucoup d’importance au côté humain. Ils s’attendent ainsi à ce que les relations d’affaires soient aussi des relations d’amitié. Les Canadiens, en particulier les Québécois, sont réputés être directs dans leur approche. Fonctionnant à un rythme accéléré, ils exigent souvent que les projets soient conduits dans un délai relativement court. Leurs principaux mots d’ordre sont « le temps, le coût et la précision ». Cependant, l’homme d’affaires québécois partage avec certains de ses homologues africains quelques affinités culturelles comme la chaleur humaine et l’intégrité. En Afrique, les Nigériens et les Burkinabés ont effectivement la réputation d’être des entrepreneurs chaleureux et intègres qui désirent conduire leurs affaires sans tromper personne. L’humilité et la discrétion font également partie des principaux traits de caractère des entrepreneurs africains qui, malgré leurs richesses, font preuve de beaucoup plus de retenue, contrairement à certaines sociétés où l’on n’hésite pas à étaler sa fortune. Ainsi, beaucoup d’hommes d’affaires africains croient sérieusement au proverbe « Pour vivre heureux, vivons caché » par crainte du « mauvais œil ». AFRIQUE EXPANSION Magazine N˚ 36 43

AFFAIRES

DOING BUSINESS 2011


DIGNES DE MENTION

PAYS ÉMERGENTS L’AFRI-

CONSOMMATION LES ENJEUX

QUE DU SUD REJOINT LE BRIC

DE LA FILIÈRE DU LAIT EN AFRIQUE

L’Afrique du Sud a été récemment invitée par les États membres du groupe des pays émergents BRIC (Brésil, Russie, Inde et Chine), à les rejoindre en tant que membre à part entière. Ce groupe qui devrait, selon le Fonds monétaire international, représenter 61% de la croissance mondiale en 2014, devient donc BRICS (orthographe anglaise de l’Afrique du Sud-South Africa). Le pays arc-en-ciel déjà membre du G20 et qui a la plus forte économie du continent africain avec un produit intérieur brut représentant 25% du PIB africain, est considéré comme favorable aux affaires (34e au classement Doing Business de la Banque Mondiale de 2011), car il a réussi à ouvrir son économie au monde et attirer de nombreux grands groupes industriels internationaux. En l’intégrant ainsi dans ce groupe, ces pays espèrent étendre leur influence économique et politique sur la scène internationale et le géant africain espère, lui, prendre plus de poids dans la gouvernance mondiale. Source : AFP

IDÉ

LES PAYS EN DÉVELOPPEMENT DEVANCERONT LES PAYS RICHES EN 2010

Le lait, source de protéines et de bien d’autres nutriments représente un enjeu majeur en Afrique, car il assure un revenu régulier aux éleveurs qui le produisent. Mais il est souvent concurrencé par le lait européen très souvent moins cher. Une concurrence qui a un coût important dans les économies locales dans la mesure où ces importations à bas prix des produits laitiers constituent un frein de plus au développement de l’ensemble de l’économie africaine et plus particulièrement des filières agricoles. En dépit de cette concurrence, des initiatives africaines ont permis l’émergence d’une véritable filière laitière dans certains pays. Ainsi, au Burkina Faso, les troupeaux comptent entre 5 et 20 têtes avec une productivité estimée à 110 litres de lait par vache et par an, contre une moyenne de 28 têtes par troupeau et pouvant aller jusqu’à 100 bêtes ou plus en Europe, pour une productivité moyenne de 6000 litres par vache et par an. Cette différence s’explique en partie par les conditions difficiles de la production laitière en Afrique même si le continent dispose aujourd’hui de solutions techniques qui, quand elles sont associées, permettent d’améliorer la productivité des troupeaux. Selon certains spécialistes, cette filière laitière peut se développer si elle est aidée et protégée. Au Kenya, le soutien aux petits producteurs a permis l’autosuffisance (une production annuelle moyenne de plus de 2,9 millions de tonnes dont 80 % est assurée par des petits éleveurs). L’industrie laitière kenyane est ainsi devenue l’une des plus développées d’Afrique subsaharienne.

Selon un rapport de la Conférence des Nations Unies pour le commerce et le développement, les flux d’investissements directs étrangers (IDE) vers les pays en développement ont dépassé, pour la première fois en 2010, ceux des économies des pays riches affectées par une reprise économique relativement lente. Ils ont ainsi atteint 1 122 milliards de dollars contre 1 114 milliards en 2009, soit une très faible progression de 0,7%. Ce sont l’Asie et l’Amérique latine qui ont surtout porté ce mouvement de hausse, à l’exception de l’Inde qui a vu ses IDE reculer de 31,5% tandis que la Chine a franchi la barre symbolique des 100 milliards de dollars (101 milliards) de flux d’investissements. Les pays développés ont donc vu leur flux d’investissements directs étrangers baisser de 6,9% en 2010, malgré un rebond aux États-Unis. Ces résultats ont été particulièrement plombés à cause de l’Europe dont les investissements étrangers ont reculé de près de 20% à 289,8 milliards de dollars tandis que ceux des États-Unis ont bondi de 43,3% à 186,1 milliards de dollars, un résultat positif même s’il reste toujours « divisé par deux » comparé à leur niveau de 2008 (324 milliards).

Douze hauts dirigeants de quatre compagnies multinationales pétrolières accusés d’avoir détourné 100 millions de dollars, ont récemment été interpellés par les autorités nigérianes. Parmi ces personnes arrêtées pour corruption et dont les passeports ont immédiatement été saisis en attendant la conclusion des enquêtes, se trouvent selon un communiqué de la Commission des crimes économiques et financiers (EFCC), les responsables de Noble Inc., Tidewater Inc., Murphy Shipping et Transocean. Ces opérations ont été effectuées sur la base des pots-de-vin présumés proposés à des responsables et d’un montant de plus de 100 millions de dollars, selon ce même communiqué.

Source : AFP

Source : AFP)

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Source : Afrique Avenir

PÉTROLE

LES AUTORITÉS NIGÉRIANES FONT LE MÉNAGE


DIVERSITÉ ET COMPÉTENCES

Hamidou Mamadou Abdou LE SENTIMENT DU DEVOIR ACCOMPLI Vitraulle Mboungou

L’excellence est le principal mot d’ordre d’Hamidou Mamadou Abdou qui en a fait le moteur de sa carrière et de sa vie.

C

e Canadien d’origine nigérienne a toujours visé l’excellence dans tout ce qu’il a entrepris, depuis ses années d’études en ingénierie à l’école Polytechnique de Montréal qu’il a intégrée justement grâce à une bourse d’excellence octroyée par le Programme canadien des bourses de la Francophonie, à son poste actuel d’Associé Senior, Viceprésident et Directeur principal de la section internationale de CIMA+, une des plus importantes firmes d’ingénierie en Amérique du Nord connue pour son savoir-faire et classée Employeur de choix au Canada. Après 5 années passées à étudier en Chine, Monsieur Mamadou Abdou retourne dans son pays d’origine, le Niger, à la recherche de son premier emploi. Mais très vite, il prend conscience qu’il a besoin d’approfondir ses connaissances, grâce notamment à un doctorat qui va lui permettre d’obtenir son premier poste à SNC-Lavalin (autre chef de file en ingénierie au Canada qui figure dans le top 5 des firmes en Amérique du Nord) avant d’intégrer en 2000 CIMA International.

De nouveaux défis Soucieux de contribuer au développement de son continent d’origine à partir de son pays d’accueil, Hamidou Mamadou Abdou parvient, dès sa prise de fonction, à convaincre le conseil d’administration de cibler les affaires de la compagnie essentiellement vers l’Afrique, car c’est, selon

lui, le continent qui a le plus besoin d’infrastructures et qui importe beaucoup d’expertise, en particulier dans le domaine qui les concerne. Depuis, CIMA International, présent dans 27 pays africains, est devenue la firme d’excellence presque 100% axée sur l’Afrique. Animé ainsi du sentiment d’un devoir accompli envers un continent qui l’a tant aidé, Monsieur Mamadou Abdou se sent aujourd’hui, comme il l’affirme si bien, « épanoui professionnellement et personnellement ». Il ne regrette donc aucunement sa décision d’être resté au Canada suite à ses études car il a été plongé presque immédiatement dans un milieu où il a su se réaliser, ce qui a énormément facilité son intégration au sein de la société québécoise. C’est pourquoi il conseille aux nouveaux venus de ne surtout pas s’isoler à leur arrivée, d’aller à la rencontre des nationaux, d’échanger avec eux, car ils sont prêts à les accueillir les bras ouverts et cela d’un point de vue aussi bien personnel que professionnel. Il considère donc que l’un des plus grands défis qui se présentent à tout nouvel arrivant au moment de son intégration, notamment professionnelle, est la capacité d’adaptation aux exigences de performance des compagnies canadiennes où le travail est toujours axé sur le résultat. Il est donc important, pour ce faire, de se concentrer très vite sur l’essentiel pour parvenir à atteindre ses objectifs en y mettant les efforts nécessaires. Par ailleurs, Hamidou Mamadou Abdou est fier d’avoir pu exporter dans son pays d’origine les connaissances et l’expertise acquises professionnellement au Québec, en ouvrant le premier

bureau de CIMA en Afrique à Niamey, la capitale nigérienne où travaillent une centaine de ses compatriotes dont une partie dans d’autres bureaux de la compagnie à travers l’ensemble du continent. Cela d’autant plus que, selon lui, il aide mieux ainsi son pays en influençant son développement, que s’il y était retourné comme beaucoup d’autres compatriotes. Il considère donc son travail avec CIMA au Niger et en Afrique en général, comme un retour d’ascenseur envers ce pays et ce continent dont il se sent si redevable. Face à l’énorme potentiel du continent en besoin d’infrastructures, Monsieur Mamadou Abdou travaille déjà à relever de nouveaux défis en partenariat avec ses clients, et à poursuivre par là-même la croissance de CIMA International. En plus de ses activités professionnelles au sein de cette société employant plus de 1800 personnes au Québec et à l’étranger, Hamidou Mamadou Abdou consacre une partie de son temps libre au conseil d’administration du Conseil Canadien pour l’Afrique en tant que membre et à plusieurs autres associations caritatives. AFRIQUE EXPANSION Magazine N˚ 36 45


FLASH INFOS

LES INFRASTRUCTURES RESTENT LA PRIORITÉ DE

LA BAD

La Banque africaine de développement (BAD) continue de cibler le secteur de l’infrastructure dans sa stratégie d’action sur le continent africain, en le posant comme axe prioritaire d’interventions dans la répartition sectorielle des approbations de prêts et de dons pour ses opérations à moyen terme (2008-2012). En 2010, les investissements de la BAD dans ce secteur ont représenté ainsi deux tiers du total de ses opérations. L’institution privilégie essentiellement les projets avec un gros impact et susceptibles d’instaurer un climat favorable à l’investissement du secteur privé, d’accroître la compétitivité et la productivité, de créer des emplois et de favoriser une croissance durable dans l’espoir de contribuer au développement du continent en matière de développement agricole, de sécurité alimentaire, de développement humain et d’intégration régionale. Elle a ainsi investi près de deux milliards de dollars dans des projets d’envergure dans des domaines comme les transports (900 millions de dollars), l’accès à l’eau potable et aux services d’assainissement (près de 700 millions de dollars) et l’énergie (environ 1,2 milliard de dollars). Source : La BAD

LE RÉCHAUFFEMENT ET L’AUGMENTATION DE LA POPULATION À L’ORIGINE DE PÉNURIES ALIMENTAIRES D’ICI 2020 Selon un rapport d’experts privés publié par l’Universal Ecological Fun, une organisation non gouvernementale argentine, le réchauffement possible d’au moins 2,4 degrés de la température du globe d’ici 2020 combiné à une forte augmentation de la population (7,8 milliards d’individus, soit plus de 900 millions par rapport à aujourd’hui), va créer des pénuries mondiales dans la production des principales cultures. Cette combinaison entraînera des pénuries pour trois des quatre principales cultures du globe : le blé qui va subir un déficit de 14% par rapport à la demande, le riz, 11% et le maïs, 9%. L’eau et le climat, deux éléments très importants à la production alimentaire, seront également affectés par le réchauffement. Ainsi, l’Afrique devrait voir les deux tiers de ses terres arables disparaître d’ici 2025 en raison de la sécheresse. Source : AFP

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TENDANCES DE L’ÉCONOMIE MONDIALE : DES PERSPECTIVES POSITIVES POUR L’AFRIQUE

« L’Afrique subsaharienne affiche des perspectives économiques positives à court terme », selon le recueil bisannuel de la Banque mondiale, « Global Economic Prospects » sur les tendances de l’économie mondiale. Selon ce rapport, le PIB du continent africain a fait un bond en avant de 4,7% en 2010, une tendance qui devrait se maintenir en 2011 (5,3%) et en 2012 (5,7%). La forte demande des matières premières constitue l’un de nombreux facteurs à l’origine de ce regain de la croissance. Ainsi, le Congo, qui tire l’essentiel de ses recettes de la production pétrolière, enregistre pour 2010, le taux de croissance (10,3 %) le plus élevé en Afrique tandis que l’Afrique du sud, principale économie du continent, affiche un taux de croissance relativement modeste (2,7%). En outre, avec une augmentation de 17% en 2010 des investissements directs étrangers, l’Afrique confirme son statut de destination privilégiée des capitaux étrangers, même s’il faut reconnaître que 40% de ces capitaux sont repartis entre trois pays (Afrique du Sud, Angola et Nigeria). Source : Banque mondiale

L’AQUACULTURE, UN

SECTEUR PROMIS À UN BEL AVENIR EN AFRIQUE Selon un rapport de l’Union Africaine, le secteur de la pêche en Afrique contribue énormément à la sécurité alimentaire et nutritionnelle d’au moins 200 millions de personnes et fournit du revenu à plus de 10 millions d’Africains engagés dans la production, le développement et le commerce de cette denrée. Soucieuses d’une pénurie éventuelle de stocks naturels de poissons, les autorités des pays africains multiplient les initiatives pour développer la production de l’aquaculture qui, avec ses milliers de kilomètres de côtes, offre un potentiel important pour l’essor de ce secteur. Ainsi, tous les pays membres de la FAO, l’Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture, viennent de lancer à l’instar du Pdaa (programme détaillé de développement agricole pour l’Afrique), le Spada (programme spécial pour le développement de l’aquaculture en Afrique), destiné à améliorer la gestion des stocks naturels de poissons, le développement de la production de l’aquaculture et le renforcement du commerce du poisson sur les marchés domestiques, régionaux et internationaux. Source : Afrique Avenir

1255, rue University, bureau 401 Montréal (Québec) Canada H3B 3B6 Tél.: (514) 393-8059, Fax :(514) 393-9024 E-mail : info@afriqueexpansion.com www.afriqueexpansion.com Directeur de la Rédaction : Gerba Malam Rédacteur en chef : Léopold Nséké Directrice générale : Amina Gerba Rédaction Gerba Malam Didier Oti Léopold Nséké Marie-Claude Fafard Claude Gervais Vitraulle Mboungou Correspondants France : États-Unis : Cameroun : Congo : Gabon : Côte d’Ivoire: Afrique du Sud :

Isaac Ebwélé Étienne de Tayo Aziza Albou Traoré Jean-Marie Watonsi Marc Omboui Badjang ba Nken Parfait N. Siki Thierry Sylvane Noungou Antoine Lawson Alexis Koumba Jean Samuel Kondo Amadou Touré

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