issu01

Page 1


Photo : iStockphoto


LE DÉVELOPPEMENT DE L’AFRIQUE

L’ÉDITORIAL DE GERBA MALAM

L’URGENCE D’UNE NOUVELLE APPROCHE

Q

uelle voie emprunter pour le dévelop­pement? Telle est la grande question que se posaient les pays africains au lendemain de leurs indépendances. Fallait-il poursuivre le chemin en laissant en place le « modèle de développement » légué par le colonisateur ou liquider cet héritage en faisant la révolution? Disons pour simplifier les choses qu’il s’agissait de choisir entre le capitalisme et le socialisme. La plupart des pays choisirent de marcher sur les traces laissées par les anciens colonisateurs capitalistes, en maintenant les structures déjà établies. Ainsi, les cultures de rente restaient la priorité, au détriment des cultures vivrières. Les ressources naturelles continuaient d’être exportées sans la moindre transformation. Le système éducatif privilégiait l’enseignement général et formait surtout la main-d’oeuvre pour l’administration, « la principale industrie des pays d’outre-mer ». Souvent inféodés aux anciennes puissances coloniales, les nouveaux maîtres n’avaient pas de marge de manoeuvre propre. Ne comprenant pas que l’heure était à l’austérité et aux sacrifices, plusieurs d’entre eux se préoccupaient surtout de leurs comptes en banque en Suisse et de leurs villas sur la Côte d’Azur. D’où ce constat impitoyable de l’agronome français René Dumont : « L’Afrique noire est mal partie ».

socialistes, ont instauré, à un moment ou à un autre, le parti unique et aboli le multipartisme. Ils ont tous connu des situations économiques souvent désastreuses et sont passés sous les fourches caudines des programmes d’ajustement structurel. Difficile de le nier, le continent est à la traîne après des décennies d’indépendance. Qui faut-il blâmer? Certains pointent du doigt les modèles de développement importés, qui ne seraient pas adaptés aux réalités africaines. Quelques pays ont expérimenté d’ailleurs les deux modèles sans succès. D’autres expliquent cet échec par les facteurs internes (mauvaise gouver‑ nance, mentalités, dictatures) et/ou par des facteurs externes (économie extravertie, aide publique occidentale, institutions financières internationales, etc.). Il y a une part de vérité dans chacune de ces explications. Ce qui montre bien à quel point le développement est un problème complexe. On ne peut donc le réduire à quelques variables simples, comme ont eu tendance à le faire certaines théories du développement. Ainsi, la

LES PAYS AFRICAINS DOIVENT REPRENDRE EN MAIN LEUR DÉVELOPPEMENT EN DÉFINISSANT EUX-MÊMES LEURS PROJETS, OBJECTIFS ET PRIORITÉS. À l’opposé, certains pays s’engagèrent dans la voie socialiste : marxisme-léninisme au Bénin sous Mathieu Kérékou; socialisme « bantou » ou scientifique au Congo Brazza sous Alphonse Massamba-Débat ou Marien Ngouabi; révolution de Thomas Sankara au Burkina Faso marquée par des réformes majeures pour combattre la corruption, améliorer l’éducation, l’agriculture, le statut des femmes (réintégration des femmes dans la société à l’égal des hommes) et affaiblir le pouvoir des chefs de tribus. Sans renier le modèle capitaliste et à mille lieues du socialisme, la zaïrianisation (au Congo-Kinshasa) mérite d’être signalée. C’est une révolution à la fois nationaliste et culturelle appelée le recours à l’authenticité, qui est en fait une série de mesures pour se détacher de tout ce qui peut rappeler l’Occident et sa domination : suppression des prénoms chrétiens et occidentaux, rejet du port du costume et de la cravate, au profit de l’ « abacost », nouvelle dénomination pour de nombreuses villes, création d’une nouvelle monnaie (le zaïre), nationalisation progressive des biens commerciaux et des propriétés foncières appartenant à des ressortissants ou groupes financiers étrangers. Comme on peut le voir, l’Afrique a été un véritable laboratoire. Force est cependant de constater qu’aucune de ces expériences n’a permis à l’Afrique de progresser véritablement. Tous ces pays indépendants, capitalistes ou

théorie de la modernisation définit le développement comme le passage de la société traditionnelle à la société moderne et que le problème est la mentalité tradition­ nelle, les coutumes qui résistent à la pénétration de la technologie et de l’innovation. De son côté, la théorie de la dépendance estime que le développement est un processus de libération nationale contre l’impérialisme et les classes dominantes internes. Enfin, la théorie de l’identité culturelle soutient que chaque peuple devrait inventer son propre modèle, conforme à son identité culturelle, son histoire et sa mémoire. Tous ces modèles de développement ont créé une certaine confusion en Afrique où après des décennies de tâtonnements, d’essais-erreurs, on ne sait plus où on en est. D’où l’urgence aujourd’hui pour la plupart des pays africains de repenser leur approche du développement. Ils doivent définir eux-mêmes leurs propres projets, objectifs et priorités. Que veulent-ils et où vont-ils? Une chose est sûre : ce développement doit être basé sur les besoins et intérêts des Africains. De plus, ceux-ci doivent en être les principaux acteurs. Et c’est là que réside tout le problème. Combien d’Africains ont jusqu’ici compris qu’au-delà des modèles de développement et des idéologies, ce dont leurs pays ont le plus besoin, c’est de leur patriotisme, de leur sens du sacrifice, de leurs capacités à mettre les intérêts nationaux au-dessus de tout? AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010

3


17PAYS AFRICAINS

14 CAMEROUN

DÉMOCRATIE

17 CONGO RDC

8

28 TCHAD 29 CENTRAFRIQUE 30 NIGERIA 31 BÉNIN

39 CÔTE D’IVOIRE 40 BURKINA FASO 41 MALI 46 NIGER 47 MAURITANIE 48 SÉNÉGAL 49 MADAGASCAR 50 SOMALIE AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010

en AFRIQUE plus tard?

50 ans

16 CONGO-BRAZZAVILLE

38 TOGO

4

Où en est la

15 GABON

32 Pourquoi les pays africains peinent-ils à commercer entre eux et avec le reste du monde?

La fin de la tutelle coloniale a ouvert la voie à la démocratie en Afrique. Un demi-siècle plus tard, son évolution est-elle marquante?

LEdoitCOMMERCE AFRICAIN emprunter la voie rapide LES

ONG

DE CONCURRENTES À PARTENAIRES DE

l’État

43

Considérées comme des relais efficaces de l’aide au développement, les ONG étrangères internationales, religieuses et nationales sont très présentes en Afrique. Avec le temps, elles sont passées de concurrentes de l’État à partenaires dans la lutte contre la pauvreté.


SOMMAIRE

3

L’ÉDITORIAL DE GERBA MALAM

POLITIQUE L’Afrique subsaharienne 10

La démocratie en Afrique subsaharienne

Un accouchement difficile

12

L’AFRIQUE SUR LA SCÈNE INTERNATIONALE

UNE POSITION DE NÉGOCIATION SANS PRÉCÉDENT

économie 20

L’Afrique subsaharienne

La mauvaise gouvernance, un frein au décollage économique

22

L’accès à l’énergie

une priorité en Afrique

24

DÉVELOPPEMENT DE L’AFRIQUE

LA DIASPORA A-T-ELLE FAIT SA PART ?

26

Développement des infrastructures

un vaste chantier

32

Le commerce africain doit emprunter la voie rapide

34

L’Afrique face à la mondialisation

le grand défi de l’intégration

36

LES ENTREPRISES CANADIENNES ET LE MARCHÉ AFRICAIN

UNE LONGUE PRÉSENCE AUJOURD’HUI PAYANTE

SOCIAL 43

LA MAUVAISE GOUVERNANCE

UN FREIN AU DÉCOLLAGE ÉCONOMIQUE

20

Malgré un énorme potentiel en ressources naturelles, l’Afrique n’arrive toujours pas à décoller économiquement. Fautil incriminer la « mauvaise gouvernance » ?

L’accès à l’énergie, une en

PRIORITÉ AFRIQUE

22

Le problème d’insécurité énergétique en Afrique est grand. Et si les gouvernements africains n’intègrent pas cette question dans leur stratégie de développement dans un futur proche, la situation risque de s’aggraver.

DÉVELOPPEMENT DES INFRASTRUCTURES

Un vaste

CHANTIER

Les ONG : De concurrentes à partenaires de l’État

52

L’Afrique à l’horizon de 2050

53

DIGNES DE MENTION

54

Le saviez-vous?

26

Cinquante ans après l’accession de certains pays africains à la souveraineté internationale, les progrès en matière de transports, d’énergie et de technologies de l’information et de la communication (TIC) sont peu remarquables.

AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010

5




AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010

Photo : iStockphoto

8


POLITIQUE

Où en est la

DÉMOCRATIE en AFRIQUE

50 ans plus tard?

Cinq décennies après leur indépendance, 17 pays d’Afrique ont certes fait des progrès en matière de droits de l’homme, de politique, de justice, de liberté d’expression et de la presse. Mais le passage de plusieurs États à la démocratie reste un processus inachevé. Les coups d’État persistent et la notion d’alternance n’est pas largement répandue. Conséquence sur la scène internationale : bon nombre de pays africains ne passent pas pour des modèles de démocratie. Au-delà de ce problème d’image, le continent africain doit redoubler d’efforts pour s’ajuster au contexte de mondialisation entraînant une rude concurrence étrangère, notamment avec les grands ensembles économiques tels que les États-Unis d’Amérique et l’Union européenne. Le vieux rêve panafricaniste lancé au lendemain des indépendances serait-il finalement la voie à prendre afin que l’Afrique, unifiée, puisse s’imposer davantage aux tables de négociations?

AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010

9


La démocratie en

AFRIQUE subsaharienne

Marc Omboui

Un accouchement difficile

our comprendre l’évolution démocratique des pays africains subsaharienne, il faut remonter aux années d’indépendance. En effet, au moment où ils se libèrent de la tutelle coloniale, la situation politique est sensiblement la même dans la plupart de ces pays. On observe la présence d’une multitude de formations politiques qui ont combattu, chacun à sa manière, pour libérer le pays du joug colonial. Mais au moment d’accéder au pouvoir, des dissensions, parfois suscitées, voire entretenues par l’ancienne puissance tutrice, vont se faire jour. Certains partis et leurs leaders, à qui il est revenu de proclamer l’indépendance, sont soupçonnés d’être proches, et même de connivence avec l’ancienne puissance coloniale. L’indépendance acquise, le pluralisme politique va subsister quelques années seulement avant d’être remis en cause. De gré ou de force, les partis politiques sont fondus dans un seul mouvement. Le chef de l’État est en même temps le président du parti; aucune voix discordante n’est tolérée. C’est le triomphe de la pensée unique. Les nouveaux maîtres du pays vont s’employer à interdire ou à réduire au silence les autres forces politiques, désormais considérées

10 AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010

comme des adversaires, des ennemis voire des rebelles qui tentent de déstabiliser le jeune État indépendant. Dans de nombreux pays, pour ne pas disparaître, ces partis sont contraints à la clandestinité et leurs leaders à l’exil. Pour ces « nouveaux » rebelles, les hommes qui avaient succédé aux colonisateurs n’étaient rien d’autre que des pantins à la solde de l’ex-puissance coloniale et du néo-colonialisme. La situation des droits de l’homme n’est, bien entendu, guère meilleure : les libertés civiques et civiles sont bafouées. La presse tant écrite qu’audiovisuelle est presque inexistante.

Un pluralisme au forceps

Il faudra attendre la fin des années 80 pour que l’on assiste, à cause des facteurs exogènes, et probablement aussi du fait de certaines dynamiques internes, à la restauration, généralement dans la douleur, du pluralisme politique. Les pouvoirs en place, soutenus par des partis uniques, vont être contraints de lâcher du lest, cédant ainsi sous la pression de la rue. Émeutes, casses, « villes mortes » font de nombreuses victimes et des dégâts matériels qui laissent des séquelles.

Photo : Shutterstock

P

La célébration en 2010 par 17 pays d’Afrique du cinquantenaire de leurs indépendances, au-delà des festivités, donne l’occasion de mesurer le chemin parcouru dans plusieurs domaines et, notamment, en matière de démocratie. Il va sans dire que, d’une manière générale, en 50 ans d’indépendance, ces pays ont marqué des points importants en matière de pluralisme politique, de libertés d’expression, de la presse et de respect des droits de l’homme. Mais on peut se demander si, au vu de la réalité du terrain, ils ont évolué vers une démocratie véritable.


Une gouvernance politique à parfaire Mais si des progrès sont perceptibles, force est de reconnaître que tout cela ne se passe pas sans quelques résistances et accrocs de tous genres. Certes, l’on a cessé de considérer la démocratie comme « un modèle imposé de l’extérieur ». De même, sauf quelques rares exceptions, des élections sont régulièrement organisées, et parfois remportées par des partis d’opposition; les parlements et les conseils municipaux sont de plus multicolores. Mais l’observation du vécu quotidien laisse clairement transparaître un déficit de culture démocratique. En effet, de nombreux actes sont posés qui tendent à susciter le scepticisme par rapport à la volonté des pays de s’engager résolument dans la démocratie. La séparation des pouvoirs entre l’exécutif, le législatif et le judiciaire est loin

Une presse plurielle prospère un peu partout qui relaie le débat politique et interpelle la classe politique. Les délits d’opinion et les prisons politiques disparaissent progressivement, au moins officiellement. Les violations des droits de l’homme sont de moins en moins tolérées. d’être effective. Les gouvernants ne se sentent pas toujours obligés de devoir rendre compte à leur peuple. Les coups d’État persistent et des présidents élus démocratiquement sont déposés par des juntes militaires, comme on a encore pu le voir ces derniers mois en Guinée Conakry et au Niger, et quelques années plus tôt au Congo Brazzaville. À côté des coups d’État, les assassinats politiques persistent et sont utilisés pour éliminer des adversaires politiques, comme ce fut récemment le cas au Rwanda, un pays pourtant qualifié de « bon élève » de la démocratie. Certains pays, à l’instar de la Côte d’Ivoire, n’ont pas pu organiser la moindre élection depuis une dizaine d’années. Ailleurs, les élections ne sont pas toujours conduites dans la transparence, et même quand elles le sont, les résultats ne sont pas toujours acceptés par les perdants. Récemment, alors que les choses semblaient pourtant bien engagées, la Guinée a encore administré la preuve que le processus électoral est loin d’être maîtrisé. En réalité, les périodes électorales apparaissent encore généralement comme des moments à haut risque de conflits sociaux et d’instabilité politique. On observe par ailleurs une tendance à la « dévolution dynastique » du pouvoir. Des fils prennent la place des pères à la tête des États, comme ce fut le cas au Togo et au Gabon. Les formations politiques au pouvoir se comportent parfois comme des partis uniques. Les notions d’alternance, de dialogue et de tolérance ne sont admises que du bout des lèvres. Les citoyens qui militent dans des partis d’opposition sont perçus avec beaucoup de suspicion et de méfiance par les pouvoirs en place. Dans un tel contexte, il y a lieu d’affirmer que la démocratie n’est pas encore tout à fait un acquis pour les pays d’Afrique subsaharienne bien que des points positifs aient pu être enregistrés en matière de pluralisme politique et des droits de l’homme. On observe comme une évolution inégale, et même un recul de la pratique démocratique selon les États. Et pourtant, pour que ces pays évoluent, il est impératif qu’ils s’engagent résolument dans la voie de la démocratie en respectant ses règles. Faute de quoi, ils prennent le risque de rater le train de l’Histoire.

AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010 11

POLITIQUE

Pour passer du monolithisme au pluralisme, dans un certain nombre de pays, l’on va organiser des conférences nationales, des grands-messes au cours desquelles toutes les forces vives, ou ce qui en tient lieu, se réunissent pour faire l’autopsie du passé, réconcilier les divers acteurs politiques, et élaborer les règles d’une nouvelle vie politique commune. Très souvent, cela a tourné au procès du parti unique, aboutissant généralement à son éviction et à l’instauration d’un gouvernement de transition avant le passage aux élections au terme desquelles de nouvelles formations politiques ont pu accéder au pouvoir. Il faut relever que ce mode de transition n’a pas toujours été heureux. Au Zaïre, devenu RD Congo, il a pratiquement plongé le pays dans le chaos. Dans certains autres pays, les dirigeants en place se sont opposés à ce mode de transition, préférant la voie électorale. Au Cameroun, par exemple, la tenue en 1990 d’une session parlementaire dite « des libertés » a permis d’instaurer un système pluraliste et d’adopter des lois qui vont profondément modifier le paysage politique du pays. Par la suite, une rencontre tripartite va se tenir entre le pouvoir, l’opposition et la société civile, avant l’organisation des élections qui ont vu la victoire de l’ancien parti unique. Dans l’un ou l’autre cas, l’on a abouti à un nouveau paysage politique caractérisé par l’existence d’une multitude de partis politiques, la mise en place de nouvelles institutions dites démocratiques, la fin du monopole de l’État sur les médias audiovisuels ainsi que la fin de la censure administrative dans la presse. Bref, une ère nouvelle s’est ainsi ouverte dont l’un des traits distinctifs est la mise en relief des droits de l’homme et la prise en compte de la société civile. Une presse plurielle prospère un peu partout qui relaie le débat politique et interpelle la classe politique. Les délits d’opinion et les prisons politiques disparaissent progressivement, au moins officiellement. Les violations des droits de l’homme sont de moins en moins tolérées. Autant le dire sans ambages, par rapport à la période précédente, de gros progrès sont réalisés sur le chemin de la démocratie et des droits de l’homme.


L’AFRIQUE IN sur

UNE POSITION DE NÉGOCIATION SANS PRÉCÉDENT

Jean-Louis Roy *

I

Ayant en face d’elle de puissants regroupements régionaux, l’Afrique n’a pas d’autre choix que de se présenter unie à la table de négociations internationales pour défendre ses intérêts. À l’heure où elle est de plus en plus courtisée pour ses abondantes ressources, quelles sont ses capacités réelles de négociation?

nvité à Montréal par le Groupe Afrique Expansion en 2009 pour le Forum Africa, Alpha Oumar Konaré, ancien président du Mali et ancien président de la Commission de l’Union africaine, a fait porter ses interventions publiques sur le besoin d’unité du continent, sur la nécessité de créer les États-Unis d’Afrique. Il y voyait un préalable au développement du continent et à une normalisation de sa place sur la scène internationale. Certains y ont vu une reprise du vieux rêve panafricaniste qui a fasciné les esprits au lendemain des indépen-

intérêts. Cette sortie de la période néocoloniale n’exprime qu’une partie de la tâche urgente sollicitant aujourd’hui le leadership africain pris dans sa totalité : culturel et intellectuel, économique, social et politique.

Les grands ensembles régionaux L’autre partie concerne l’ajustement du continent aux impératifs de la mondialisation. Le continent fait face à des interlocuteurs, anciens et nouveaux, se présentant à toutes les tables de négociations qui comptent, bilatérales ou multilatérales, comme des ensembles

velle-Angleterre, constituées en zones monétaire et fiscale intégrées, en marché commercial commun et en levier pour la négociation internationale. On pense enfin à la Chine, à l’Inde, à l’Indonésie, au Brésil et à quelques autres interlocuteurs majeurs qui ont récemment substantiellement enrichi leurs relations avec le continent africain et dont la dimension démographique, culturelle, intellectuelle, commerciale, financière et économique les situe dans ce club restreint et puissant des grands ensembles qui apparemment sont et seront aux commandes de la géopolitique au XXIe siècle.

dances, un vieux rêve qui ne s’est pas réalisé, mais qui a néanmoins produit quelques résultats : l’Organisation de l’Unité africaine, devenue en 2002 l’Union africaine, un nombre non négligeable de rassemblements professionnels et de la société civile et quelques institutions continentales récentes dont la Cour de Justice et le Parlement africains. D’autres ont vu dans ce projet des États-Unis d’Afrique la chance d’une vraie sortie de la période néocoloniale, tant la division territoriale du continent, telle que scellée par les anciens maîtres européens, constituait alors et constitue toujours le levier d’une politique de contrôle servant d’abord leurs 12 AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010

de grande taille fédérant les intérêts convergents et clairement identifiés d’un grand nombre. On pense notamment aux anciennes puissances coloniales européennes qui sont des petits pays à l’échelle de la planète : la France, la Belgique, le Portugal, l’Angleterre, les Pays-Bas… Seul leur regroupement dans l’Union européenne leur assure une présence et une capacité que chacun d’eux n’aurait pas séparément. On pense aussi aux États-Unis d’Amérique dont la primauté dans les affaires du monde a tenu et tient toujours au fait de cette exceptionnelle conjugaison d’intérêts de régions aussi diverses que la Californie, le « Midwest » et la Nou-

Chacun comprendra que la place de l’Afrique, son poids et son influence sur la scène internationale ne seront pas les mêmes si les 53 pays qui la composent se présentent isolément face à chacun de ces grands ensembles ou s’ils se présentent comme une entité politique disposant de positions communes et de stratégies convergentes. Dans le premier cas, les pays du continent, à quelques exceptions près, ne peuvent raisonnablement espérer obtenir de vrais investissements et la création d’un volume conséquent d’emplois décemment rémunérés, des ressources supplémentaires pour l’éducation, la recherche et l’innovation qui demeurent, dans le cas de l’Afrique,

Photo : Shutterstock

« CHAQUE ACCÈS AUX RICHESSES DU CONTINENT DOIT ÊTRE COMPENSÉ PAR UNE VALEUR AJOUTÉE DE NIVEAU ÉQUIVALENT (…). »


NTERNATIONALE quasi invisibles sur le radar mondial. Dans le deuxième cas, les populations du continent peuvent espérer, aux termes d’âpres négociations, que soient enfin développés sur le continent les domaines qui portent la vraie croissance et le vrai développement auxquels s’ajoutent le pluralisme politique, une justice forte et indépendante et les libertés fondamentales, dont la liberté de parole et d’association… La formule d’Alpha Oumar Konaré n’est pas aussi illusoire qu’elle semble aux yeux de certains tant il apparaît que les intérêts du continent ne pourront pas autrement être pris en

Dans le cas du continent africain, il s’agit de définir et de réussir la mutation d’un paradigme qui, depuis un demi-siècle, n’a pas réussi à sortir une majorité d’Africains de la précarité extrême. Compte tenu de ce que le continent offre au monde, ressources naturelles, énergétiques, minières et végétales, dont l’humanité a un réel besoin, cette situation doit changer radicalement et durablement. Chaque accès aux richesses du continent doit être compensé par une valeur ajoutée de niveau équivalent pour mettre en œuvre l’investissement dans les ressources humaines, la transformation

africaines, après avoir été méprisées et humiliées, prennent une valeur incontestable. Après cette période de racisme réel et dissimulé tout à la fois, l’Occident aura besoin des ressources humaines venues d’ailleurs, venues d’Afrique. Ce besoin imminent et considérable assure à l’Afrique, dans sa relation à l’Europe notamment, une position de négociation sans précédent. Il ne s’agit plus de tel ou tel filon d’or ou de riches dépôts de bauxite, mais de l’ADN commun et reconnu comme tel, d’une vraie reconnaissance de l’égalité en droit de toutes les personnes de toutes les origines.

« L’AFRIQUE CONSTITUE AUJOURD’HUI, COMPTE TENU DE SES BESOINS D’ENSEMBLE, DE SON URBANISATION ET DE LA JEUNESSE DE SA POPULATION, L’UN DES RARES VRAIS NOUVEAUX MARCHÉS DU MONDE. » compte, défendus et finalement intégrés au système international.

L’Afrique comme fragment du monde En vérité et stratégiquement, l’Afrique peut et doit occuper sa place à part entière, pour la première fois depuis la période coloniale, comme fragment du monde, comme fragment de l’humanité. En effet, dans les décennies qui viennent, l’ensemble de ses ressources sont et seront en très grande demande sur la planète. Quelles seront, dans l’avenir prévisible, ses capacités de réelles négociations?

en Afrique des ressources naturelles du continent, son accès aux technologies de l’information et des communications et la valorisation de ses ressources intellectuelles et culturelles. Le mouvement est très simple. Il s’agit d’appliquer au continent les mêmes règles qui s’imposent partout ailleurs dans le monde. Il en va de même concernant les relations commerciales avec le continent. Ce dernier constitue aujourd’hui, compte tenu de ses besoins d’ensemble, de son urbanisation et de la jeunesse de sa population, l’un des rares vrais nouveaux marchés du monde. Mais il y a plus. Nous entrons dans un temps où les ressources humaines

Si l’Afrique réussit à s’ajuster au grand jeu de la mondialisation et, enfin, à s’imposer comme fragment de l’humanité, alors et alors seulement elle occupera sa place sur la scène internationale. Et cette place sera significative comme il convient pour un continent qui comptera pour près de 15 % de l’humanité, qui recèle de vieilles mais efficaces formules de négociation et de médiation venues de ses anciennes civilisations et dont les ressources, humaines et naturelles, sont indispensables pour le bien-être et la survie de la famille humaine aujourd’hui. *Ancien secrétaire général de l’Agence intergouvernementale de la francophonie AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010 13

POLITIQUE

la scène


PROFIL

CAMEROUN Population (2010) : 19 406 100 hab. Densité : 34 habitants/km² Superficie : 475 442 km² Langues officielles : Français, anglais Capitale : Yaoundé Monnaie : Franc CFA

E

HISTOIRE

n 1884, les Allemands établissent un protectorat au Cameroun. C’est à ce moment que seront créés le port de Douala et de grandes plantations de cacao, bananes et café. Le territoire subit une scission en 1919 avec le Traité de Versailles (France) signé après la défaite de l’Allemagne après la Première Guerre mondiale. Le pays est alors confié par la Société des Nations à la France (qui héritera de 4/5 du territoire) et au RoyaumeUni. Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, le mouvement de l’UPC (Union des populations du Cameroun), avec à sa tête Ruben Um Nyobe, revendique l’indépendance et la réunification avant d’être interdit, puis lourdement réprimé par le pouvoir colonial français. Um Nyode est abattu en 1958. L’indépendance de la zone française aura lieu le 1er janvier 1960. Le 4 mars 1960, une nouvelle Constitution est promulguée et se tra-

duit par un régime parlementaire spécifique avec un gouvernement responsable devant l’Assemblée nationale et le président de la République. Le 5 mai de la même année, Ahmadou Ahidjo est élu président de la nouvelle République. En 1961, la partie méridionale du Cameroun, alors sous tutelle britannique, est unie à la République du Cameroun pour devenir la République fédérale du Cameroun, la partie Nord ayant opté pour une union avec le Nigéria. En 1966, le multipartisme disparaît et donne lieu à un seul parti : l’Union nationale camerounaise (UNC). Le référendum du 20 mai 1972 conduit à un État unitaire et met fin au fédéralisme. Le 4 novembre 1982, Ahmadou Ahidjo quitte la présidence de la République. Deux jours plus tard, Paul Biya, alors premier ministre depuis 1975, lui succède. Il sera élu en 1984, et réélu en 1988, en 1992, en 1997, de même qu’en 2004.

Quelques chiffres en bref • Éducation (2003-2008) : Taux d’alphabétisation des adultes : 68 % Taux net de scolarisation à l’école primaire : 84 % • Santé (2009) : 0,19 médecin pour 1000 habitants • Produit Intérieur Brut (PARITÉ DE POUVOIR d’ACHAT, 2009) : 42,85 milliards ($ US) • Environnement des Affaires (Doing Business 2010, classement effectué sur 183 économies) : Facilité de faire des affaires : 171e place (-4 par rapport à 2009) Création d’entreprise : 174e (0 par rapport à 2009) Protection des investisseurs : 119e (-5 par rapport à 2009)

14 AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010

Économie Le Cameroun est riche en ressources naturelles. La variété de ses climats et la fertilité de ses terres en font un pays à l’activité agricole développée, la banane, le café et le cacao étant les principales cultures. Son agriculture représente 40 % des recettes d’exportation et est une part importante de l’économie (20 % du PIB). Sa production agroalimentaire lui permet d’être autosuffisant à 95 %. Le secteur des mines et de l’industrie occupe près de 13 % de la population active et contribue pour 33 % du PIB du pays. Le Cameroun possède des réserves de fer, de bauxite et de pétrole. Les ressources pétrolières représentent la principale ressource de son sous-sol (50 % des exportations du pays). Finalement, l’industrie forestière est aussi importante. Les réseaux de transports camerounais sont diversifiés. Le pays est doté de 50 000 km de routes. Le Cameroun a créé en 1998 le Fonds d’Entretien Routier, qui doit accroître de 75 % le réseau bitumé existant d’ici 2015. Le réseau ferroviaire, long de 1361 km, est composé de trois liaisons entre les villes de Douala, Yaoundé, Ngaoundéré et Kumba. Les ports camerounais assurent près de 98 % des échanges extérieurs du pays. Pour faciliter les investissements, le pays a créé un guichet unique qui a été inauguré le 25 août 2000. Depuis 2007, la fibre optique est opérationnelle au pays grâce à la connexion au câble sousmarin SAT3.


Population (2010) : 1 485 832 hab. Densité : 4,6 habitants/km² Superficie : 267 667 km² Langue officielle : Français Capitale : Libreville Monnaie : Franc CFA

L

HISTOIRE

a colonisation du territoire gabonais débute au XVe siècle avec l’arrivée des premiers Européens, les Portugais. La France occupe ensuite progressivement le pays à partir du milieu du XIXe siècle. Le 17 août 1960, comme beaucoup d’autres colonies françaises de l’Afrique subsaharienne, le Gabon accède à l’indépendance avec comme président, Léon Mba. Soutenu militairement par la France (intervention de l’armée française en 1964 à son profit), il reste au pouvoir jusqu’en 1967. Il est remplacé par son directeur de cabinet Albert Bernard Bongo qui très vite instaure le monopartisme avec la création du Parti démocratique gabonais. Il se convertit à l’Islam au milieu des années 70 et adopte alors le prénom musulman d’Omar. Pour faire face à une vague de protestations sociales et politiques à la fin des années 80, Omar Bongo organise en 1990, comme un certain nombre d’autres pays africains, une conférence nationale qui débouche sur le rétablissement du multipartisme.

Après avoir dirigé le Gabon pendant 42 ans, Omar Bongo meurt en 2009. L’intérim est assuré par la présidente du Sénat, Rose Francine Rogombé, avant la tenue d’élections présidentielles en septembre 2009, remportées par Ali Bongo Ondimba, ministre de la Défense et fils du président décédé.

Économie Le Gabon est un pays au sous-sol très riche depuis bien avant les années 60. Les hydrocarbures représentent la moitié de son PNB. Il est le 37e producteur mondial du pétrole qui représente près de 80 % des exportations, 60 % des recettes de l’État et 40 % du PIB. Il constitue donc un secteur d’activité très important dans l’économie gabonaise. Exploité depuis 1962, le manganèse est la deuxième source de richesse du Gabon, après le pétrole. Dès 1964, la production annuelle approchait le million de tonnes pour atteindre

Quelques chiffres en bref • Éducation (2003-2008) : Taux d’alphabétisation des adultes : 86 % Taux net de scolarisation à l’école primaire : 94 % • Santé (2006) : 0,29 médecin pour 1000 habitants • Produit Intérieur Brut (PARITÉ DE POUVOIR d’ACHAT, 2009) : 21,16 milliards ($ US) • Environnement des Affaires (Doing Business 2010, classement effectué sur 183 économies) : Facilité de faire des affaires : 158e place (-7 par rapport à 2009) Création d’entreprise : 152e (-5 par rapport à 2009) Protection des investisseurs : 154e (-3 par rapport à 2009)

2,5 millions de tonnes en 1989 et 2,8 millions en 2005. Le Gabon est le deuxième producteur mondial de manganèse et ses réserves sont estimées à 27 % des réserves mondiales. Par ailleurs, le territoire gabonais est couvert à environ 85 % par la forêt équatoriale. Avant l’essor de l’industrie pétrolière dans les années 70, l’exploitation forestière a occupé jusqu’à un tiers des emplois salariés au Gabon. En 1998, le bois représentait 14 % des exportations du pays. Chaque année, 1,6 million de m3 sont exportés, notamment vers la Chine et la France. L’agriculture gabonaise, constituée essentiellement de cultures vivrières destinées à l’autoconsommation, est peu développée. Selon une étude de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), en 2005, 60 % des vivres dans le pays étaient importés. Du côté des infrastructures, l’augmentation des revenus du pays grâce à l’envolée des cours du pétrole dans les années 70, a permis une politique de grands travaux à Libreville. Ainsi a été construit le port d’Owendo qui a ainsi doublé les installations anciennes de Libreville et le développement de Port-Gentil, vers lesquels converge l’essentiel des productions de l’intérieur du pays, grâce notamment à la réalisation du chemin de fer Transgabonais, inauguré en 1986. Le pays compte également trois principaux aéroports (Libreville, Port-Gentil et Franceville) mais manque cruellement d’infrastructures terrestres et fluviales intérieures. Enfin, le Gabon, comme beaucoup d’États africains aujourd’hui, s’est doté d’un guichet unique d’investissements. AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010 15

PROFIL

GABON


PROFIL

CONGO-BRAZZAVILLE Population (2010) : 3 903 318 hab. Densité : 8,5 habitants/km² Superficie : 341 821 km² Langue officielle : Français Capitale : Brazzaville Monnaie : Franc CFA

L

Histoire

es premiers contacts de la République du Congo, alors royaume du Kongo, avec les Européens ont lieu au XVe siècle. La colonisation débute avec la pénétration française vers 1875. En 1885, le pays devient l’un des quatre États de l’Afrique Équatoriale Française (et Brazzaville, sa capitale). La colonie du Congo français est ensuite créée en 1891. Elle devient une république autonome en 1958 avec Fulbert Youlou comme Premier ministre. Ce dernier est élu président de la République du Congo au moment où celle-ci accède à l’indépendance, le 15 août 1960. Après avoir imposé le monopartisme en emprisonnant les leaders syndicaux, l’ancien prêtre doit faire face à une révolution dite des « Trois Glorieuses », en 1963, qui l’oblige à quitter le pouvoir. En 1965, emprisonné dans un camp militaire, il parvient à s’enfuir du pays plongé alors dans un climat de terreur, avec l’aide de son successeur, Alphonse Massamba-

Débat qui est évincé du pouvoir par le marxiste Marien Ngouabi en 1969. Ce dernier est victime d’un putsch avorté, un an à peine après son arrivée à la présidence. Une autre tentative réussit en 1977. Accusé de l’assassinat du chef de l’État, son prédécesseur, Alphonse Massamba-Débat, est condamné à mort par une cour martiale et exécuté. Son Ministre de la Défense, Denis Sassou-Nguesso, lui succède après avoir été pendant plusieurs mois Vice-président de Yhombi-Opango, président de transition. Il est battu par Pascal Lissouba aux élections présidentielles organisées au lendemain de la Conférence Nationale en 1991. Pendant son absence du pouvoir de 1992 à 1997, le pays connaît deux guerres civiles dans lesquelles il est directement impliqué. En 1997, après plusieurs mois de violences sanglantes, le président Pascal Lissouba et son gouvernement fuient le pays et Denis Sassou-Nguesso se proclame président de la République, poste qu’il occupe jusqu’à présent.

Quelques chiffres en bref • Éducation (2008) : Taux d’alphabétisation des adultes : 81,1 % (un des plus élevés d’Afrique) Taux net de scolarisation à l’école primaire : 86,8 % • Santé (2006) : 0,2 médecin pour 1000 habitants • Produit Intérieur Brut (PARITÉ DE POUVOIR d’ACHAT, 2009) : 15,58 milliards ($ US) • Environnement des Affaires (Doing Business 2010, classement effectué sur 183 économies) : Facilité de faire des affaires : 179e place Création d’entreprise : 166e (-7 par rapport à 2009) Protection des investisseurs : 154e (-3 par rapport à 2009)

16 AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010

Économie L’économie congolaise repose principalement sur l’exploitation des hydrocarbures le long de la côte atlantique. Le pétrole, dont le raffinage est réalisé à Pointe-Noire depuis 1976, représente environ 90 % des exportations du pays et sa production est de 240 000 barils par jour. Il a ainsi supplanté la sylviculture qui garde tout de même une part importante des exportations du pays, dont la surface est couverte de forêts à près de 60 %. L’agriculture de subsistance et l’artisanat tiennent tout aussi une place essentielle dans l’économie congolaise. Le manioc, la banane, le plantain, l’arachide, le maïs, l’ananas et l’avocat constituent les principales cultures de subsistance. Les autres ressources sont représentées par les gisements de gaz naturel, d’or, de plomb et de cuivre. L’activité industrielle repose sur la production de biens de consommation comme le ciment, le tabac, le textile, le savon, la brasserie, les chaussures, etc. Par ailleurs, le Congo offre une importante infrastructure portuaire, qui permet notamment de desservir les pays voisins tels que le Tchad, le Gabon, le Cameroun, la République Démocratique du Congo et la Centrafrique, avec lesquels il a développé d’importants échanges commerciaux dans le cadre de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique (CEMAC). Le pays s’est également doté d’un guichet unique à Brazzaville, mais a placé d’autres antennes départementales, à Pointe-Noire notamment.


Population (2010) : 68 692 542 hab. Densité : 33 habitants/km² Superficie : 2 345 000 km² Langue officielle : Français Capitale : Kinshasa Monnaie : Franc congolais (CDF)

E

n 1885, le roi Léopold II de Belgique accepte la souveraineté sur « l’État indépendant du Congo » (sa propriété) qu’il cède ensuite à la Belgique en 1908 après le scandale des atrocités inhérentes au système d’exploitation acharnée du caoutchouc rouge. C’est la naissance du Congo belge qui obtient son indépendance le 30 juin 1960. Malgré cela, les Blancs gardent le pouvoir dans l’armée de la nouvelle République du Congo, ce qui provoque la colère des soldats congolais qui se mettent à harceler la communauté blanche. Face à la menace de la Belgique d’intervenir militairement, le premier ministre Patrice Lumumba appelle l’Union soviétique à l’aide. Mais il est renversé avant par les soldats congolais, mécontents de leur manque de représentativité dans le gouvernement. Le général Mobutu à la tête de l’armée devenue complètement africaine, prend les rênes et installe un gouvernement de commissaires. Les dignitaires des deux grandes régions minières du pays, le Katanga et le Sud Kasai, profitent de ce coup d’État pour faire séces-

HISTOIRE sion. Abandonné par les troupes de l’ONU censées intervenir pour l’aider, Patrice Lumumba est fait prisonnier par le général Mobutu et déporté au Katanga où il meurt assassiné en 1961. Mobutu, nouvel homme fort du régime, parvient à reconquérir le Katanga et le Sud Kasai, et à pacifier le pays après une guerre civile de trois ans (19621965). Il s’empare ainsi officiellement du pouvoir en 1965. Il commence en 1971 une politique dite de « l’authenticité », africanisation des noms pour les citoyens, les villes, les rivières, la monnaie et le pays lui-même qui devient le Zaïre tout comme le fleuve Congo et le Franc. À partir de 1974, il confisque de nombreux biens des étrangers qui commencent alors à quitter le pays. Après plus de 30 ans au pouvoir, le général Mobutu, devenu depuis Mobutu Sese Seko, est renversé par Laurent Désiré Kabila en 1997 lors de la première guerre du Congo. Il est contraint de fuir le pays. Laurent Désiré Kabila gomme tout rappel à la politique de zaïrianisation de son prédécesseur. Le pays retrouve ainsi son nom de République démocratique du Congo. Trois

Quelques chiffres en bref • Éducation (2009) : Taux d’alphabétisation des adultes : 67,5 % ) Taux net de scolarisation à l’école primaire (2004) : 52 % • Santé (2006) : 0,11 médecin pour 1000 habitants • Produit Intérieur Brut (PARITÉ DE POUVOIR d’ACHAT, 2009) : 21,93 milliards ($ US) • Environnement des Affaires (Doing Business 2010, classement effectué sur 183 économies) : Facilité de faire des affaires : 182e place Création d’entreprise : 154e (-1 par rapport à 2009) Protection des investisseurs : 154e (-3 par rapport à 2009)

ans à peine après son accession au pouvoir, Laurent Désiré Kabila est assassiné par son garde du corps et son fils Joseph Kabila est désigné par un groupe proche du pouvoir pour lui succéder.

Économie Depuis la colonisation belge, l’économie est fortement tournée vers l’exportation, notamment grâce aux produits miniers. Aucune industrie de pointe n’a été développée par les colonisateurs ni les indépendantistes. Par exemple, le cuivre est extrait en grandes quantités, mais il doit être exporté pour être traité, avant de revenir importé sous des formes finies (câbles, fils électriques, etc.). La République Démocratique du Congo possède un important potentiel de ressources naturelles et minérales, les plus importantes étant le diamant, le cuivre et le cobalt. Mais son économie a été durement ralentie depuis le milieu des années 80 à cause de détournements de fonds pendant le régime de Mobutu et de l’exploitation clandestine de ces produits miniers durant la guerre. L’agriculture reste également le principal secteur de l’économie. Les principales ressources agricoles sont le café, le bois et le caoutchouc. Par contre, la situation actuelle de ses infrastructures est jugée catastrophique. La plupart des infrastructures qui existent se trouvent dans un état de dégradation très avancé à cause des guerres. Enfin, la République Démocratique du Congo s’est dotée d’un guichet unique en 2007.

AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010 17

PROFIL

RD CONGO


Photo : Shutterstock

18 AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010


économie

Pourquoi

L’AFRIQUE

n’arrive-t-elle pas à décoller L’Afrique détient 40 % des matières premières stratégiques mondiales avec d’importantes réserves de pétrole, d’or, de diamants, de gaz et d’uranium. Son potentiel énergétique est tout aussi considérable avec le solaire, l’éolien, l’hydroélectricité et la géothermie comme sources possibles. Pourtant, même 50 ans après les indépendances, force est de constater que l’Afrique tarde toujours à décoller au niveau économique. Le sempiternel problème de gouvernance, des infrastructures défaillantes en matière de transports, d’énergie ainsi que de technologies de l’information et de la communication (TIC), la perte du savoir-faire en raison d’un problème de rétention des cerveaux sur le continent, ainsi que l’échec jusqu’à maintenant de l’intégration régionale, pourtant cruciale pour surmonter les barrières commerciales, en sont les principales causes. Les pages qui suivent brossent un tableau exhaustif de l’état des lieux et soulignent les changements souhaitables pour une émergence véritable du continent.

AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010 19


Stéphane Brabant *

L’AFRIQUE subsaharienne

LA MAUVAISE GOUVERNANCE UN FREIN AU DÉCOLLAGE ÉCONOMIQUE L’Afrique détient 10 % des réserves d’eau douce, 15 % des terres agricoles, 10 % des réserves pétrolières et 40 % des réserves d’or, pour ne citer que quelques exemples. Les investisseurs, notamment pétroliers et miniers, du monde entier et non plus seulement d’Occident, se ruent désormais sur le continent, devenu pour beaucoup le nouvel eldorado du XXIe siècle. Et pourtant, malgré cet énorme potentiel, l’Afrique n’arrive pas à décoller économiquement. Faut-il incriminer une « mauvaise gouvernance » ?

O

20 AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010

L’instabilité politique Évaluer la gouvernance des États n’est pas toujours simple, surtout quand il s’agit de déterminer si ces résultats résultent effectivement d’une bonne ou d’une mauvaise gouvernance ou d’autres facteurs. Andy Kalusivikako et Olivier Lumenganeso relèvent de façon pertinente le parallèle qui peut être fait entre l’Afrique et certains États d’Amérique latine. Au-delà de leurs situations économiques respectives au moment de l’indépendance, l’Amérique latine a en effet connu, comme l’Afrique, une

Photo : iStockphoto

n parle beaucoup de les dirigeants de ces mêmes États qui « bonne (ou maune prendront finalement que le risque vaise) gouvernance », de ne pas être réélus. mais sans trop souvent La plupart des organisations intersavoir exactement ce nationales (Banque mondiale et OCDE que recouvre cette expression. notamment) s’accordent pour considéEn droit privé, la « bonne gouverrer que la « bonne gouvernance » se nance » n’est pas un concept juridique mesure à l’aide de différents critères, clairement identifié comme peuvent notamment le fait d’assurer la sécul’être, même si leurs contours varient, rité des citoyens et de leurs biens, de ceux de bonne garantir le foi, de diligence « Des facteurs familiaux et sociaux respect de ou de « gestion loi (nopeuvent être, eux-mêmes, source la en bon père de tion d’État d’une mauvaise gouvernance : de droit), famille ». Elle peut au contraire, choix de collaborateurs sur des de gérer cordans une optique ectement, bases plus ethniques et familiales refficacement internationaliste, que sur celles de la compétence… et de façon faire l’objet, dans une certaine meéquilibrée sure, d’obligations imposées aux États les finances publiques, de garantir notamment dans le cadre de financeque les revenus tirés des ressources ments internationaux et donc justide l’État (notamment les ressources fier, en cas d’inexécution, l’existence naturelles) contribuent au bien-être de sanctions à la fois économiques et général et à la prospérité du pays, de diplomatiques. Ces sanctions vont en favoriser des partenariats équilibrés premier lieu concerner l’État défaillant avec le secteur privé (État partenaire (refus de financements ou d’effaceplutôt qu’État dirigiste); enfin, pour les ment de dette, mauvais classement dirigeants, le fait de rendre compte de par les agences de notation, envolée leurs actions (processus d’évaluation des taux d’emprunt obligataires et du et de contrôle) et de tenir les informamontant de la dette publique) et non tions disponibles et accessibles à tous.


« des systèmes politiques de partis uniques, nationalistes, souvent militaires, accompagnés d’un modèle économique de gestion centralisé et souvent peu ouvert, voire peu diversifié au commerce extérieur » (Olivier Lumenganeso et Andy Kalusivikako, précité). Cette instabilité politique a eu pour conséquence une mauvaise gouvernance économique, comme cela aurait certainement été le cas dans tous les pays du monde. D’autres facteurs semblent avoir contribué à l’échec des politiques économiques, parmi lesquels peuvent être cités : (i) Le prix de certaines matières premières et ressources naturelles qui

n’a atteint des niveaux suffisants pour attirer les investisseurs qu’au cours de la dernière décennie (notamment dans le domaine minier, y compris pour financer les infrastructures); (ii) De nombreuses découvertes pétrolières ou minières ou leur mise en exploitation, assez récentes notamment en matière minière, mais aussi pétrolière dans de nouveaux pays; (iii) Des experts ont expliqué que certaines des politiques d’ajustement structurel imposées, loin de favoriser le développement, auraient contribué à détériorer l’investissement en matière d’éducation et de santé ou dans d’autres secteurs publics; (iv) Le poids de l’organisation sociale et familiale en Afrique peut aussi constituer un frein, non seulement à une représentativité politique qui s’émancipe des questions ethniques, mais aussi au développement économique. La « solidarité familiale » peut, sinon empêcher, à tout le moins réduire les capacités d’épargne et d’investissement des populations (notamment en l’absence de couverture médicale, de retraite et de bourses d’études suffisantes). Ces facteurs familiaux et sociaux peuvent d’ailleurs être, eux-mêmes, source d’une mauvaise gouvernance : choix de collaborateurs sur des bases plus ethniques et fa­­mi­liales que sur celles de la comptence qui peuvent, en l’absence de contrôle, être générateurs de tentatives de corruption, de détournements de fonds publics, etc.

Une volonté déclarée de bonne gouvernance La célébration du cinquantenaire de l’indépendance pour de nombreux pays du continent correspond aussi à une réorientation des politiques voulues par les dirigeants actuels, dont les discours sont désormais plus axés vers le développement économique et une volonté déclarée de « bonne gouvernance ». Des premières mesures ont été prises dans certains États. Il s’en est immédiatement suivi une confiance retrouvée des investisseurs privés et des décisions peut-être plus volontaristes de la part d’États étrangers en matière d’effacement de dettes. Il existe ainsi aujourd’hui et de plus en plus, un consensus entre tous

les acteurs politiques et surtout économiques du monde entier, y compris les nouveaux investisseurs en Afrique, « sur la nécessité d’adhérer à la bonne gouvernance et aux réformes démocratiques » qui permettra entre autres « d’avoir le soutien politique et financier nécessaire pour sortir définitivement l’Afrique de la pauvreté » (En ce sens, Rapport McKinsey Global Institute, Lions on the Move : the Progress and Potential of African Economies, juin 2010). Loin de l’angélisme, l’accès généralisé à une information de plus en plus ouverte, notamment avec Internet, est aussi une puissante incitation et un mouvement de fond irréversible. Seules des mesures strictes de contrôle de gestion des recettes et dépenses publiques convaincront définitivement les États des vertus d’une bonne gouvernance, ce qui n’est d’ailleurs pas différent de ce à quoi devrait se soumettre toute organisation étatique ou sociétale dans le monde. Les dirigeants africains pourraient par exemple, lorsque ce n’est pas déjà le cas, envisager de mettre en place des contrôles indépendants effectués par une Cour des comptes locale ou même par des auditeurs externes de réputation internationale désignés par les États et qui remettraient un rapport détaillé de leurs conclusions au Parlement à l’occasion des discussions sur le budget. De telles mesures qui relèvent essentiellement de la gestion des deniers publics (gestion et inspection des finances) ne pourraient que favoriser la confiance des investisseurs, des organismes de financement et des populations, et d’ainsi mieux permettre à l’Afrique d’assurer son avenir... en toute indépendance. Le choix n’est pas d’être afropessimiste ou afro-optimiste; il est sans intérêt de rester dans le simple constat et le jugement. Les enjeux et les besoins du continent africain et de ses Peuples doivent être compris et appréciés avec humilité, à la lumière des dérives et des excès que nos propres pays ont dû combattre depuis des siècles. Les États africains méritent d’abord et surtout des propositions réalistes, constructives, qui pourraient être mises en oeuvre demain. *Avocat au Barreau de Paris, associé du cabinet Herbert Smith (Paris) AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010 21

économie

forte instabilité politique, des conflits souvent violents et une stagnation (voire une croissance négative) de ses économies. L’origine de cette instabilité politique résulterait davantage des suites de la décolonisation et de la difficulté à mettre en place un régime stable que d’une mauvaise gouvernance per se. Indépendance politique ne coïncide pas forcément avec stabilité politique. Dans un contexte politiquement complexe, tant sur les plans nationaux (problème des divisions ethniques résultant des frontières issues du Traité de Berlin de 1885) que dans les relations avec les anciennes puissances coloniales, il est communément admis que « la plupart des gouvernements africains postindépendances » ont choisi


L’accès à l’énergie, une PRIORITÉ en

AFRIQUE

L’Afrique produit près de 9,5 % de l’énergie mondiale totale dont 12,1 % de pétrole brut, 6,6 % de gaz naturel, 4,7 % de charbon brut et 3,1 % d’hydroélectricité, qu’elle exporte en masse, soit l’équivalent de 40 à 45 % de la production du continent. Toutefois, malgré l’abondance de ses ressources énergétiques, sa population est celle qui consomme le moins d’énergie par habitant au monde. En effet, la part de consommation mondiale d’énergie du continent africain n’est que de 3 % alors qu’il abrite 14 % de la population mondiale. Selon les experts, le problème d’insécurité énergétique en Afrique risque de s’aggraver si les gouvernements africains n’intègrent pas cette question dans leur stratégie de développement dans un futur proche. Entretien avec Emmanuel Nzabanita, Chef par intérim de la Division énergie, Régions Est et Sud à la Banque africaine de développement (BAD) et Ingénieur Électricité en chef, sur cette question de plus en plus débattue des ressources énergétiques en Afrique. Propos recueillis par Vitraulle Mboungou

Emmanuel Nzabanita : Non, je ne pense pas, peut-être dans la dernière décennie, mais pas avant. Il ne faut pas oublier qu’après les indépendances, beaucoup de pays sur le continent étaient instables. Par conséquent, les gouvernements se préoccupaient très peu de cette question du développement énergétique. Après, les choses n’ont pas beaucoup évolué non plus. C’est pourquoi je suis très optimiste aujourd’hui pour l’avenir du continent, car partout, les Africains travaillent à développer les ressources énergétiques et la BAD est là pour les aider dans ces efforts. Tout le monde parle du grand potentiel énergétique de l’Afrique. Pourquoi reste-t-il sous-exploité?

22 AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010

Premièrement, le manque des ressources financières disponibles peut à mon sens expliquer cette sous-exploitation du potentiel énergétique africain. Ensuite, les demandes en matière de consommation d’électricité dans chaque pays sont trop insuffisantes. Justement, pourquoi la consommation d’électricité est-elle si faible alors que l’Afrique possède 10 % du potentiel hydroélectrique mondial? Cette faiblesse a un lien avec le PIB parce que si l’Afrique avait beaucoup d’industries, elle n’aurait pas de problème à créer des emplois, ce qui permettrait aux gens d’avoir un pouvoir d’achat plus important et donc d’accroître la demande de consommation en électricité. Plus cette demande augmente, plus le pays s’industrialise et plus l’accès à l’électricité se développe, car on est contraint d’en pro-

duire plus pour répondre à cette demande. C’est donc vital que l’Afrique développe son système énergétique. Je peux vous assurer que ce phénomène a déjà commencé sur le continent, car actuellement, il y a près de 40 pays africains où la demande en électricité ne cesse d’augmenter. Pourquoi jusqu’ici les pays comme la RDC, le Cameroun, qui ont d’énormes ressources hydroélectriques, ont du mal à les partager avec leurs voisins? C’est une question très importante. Ce serait mieux en effet si tous ces pays de l’Afrique centrale très riches en ressources énergétiques se mettaient ensemble afin de vendre leurs ressources et partager ensuite les gains. Ainsi, tout le monde pourrait bénéficier des retombées économiques des exportations des ressources énergétiques africaines. Ce serait véritablement un bon exemple d’intégration ré-

Photo : Shutterstock

AFRIQUE EXPANSION MAG : Depuis les indépendances en Afrique, la situation en matière énergétique a-t-elle beaucoup évolué?


gionale. La BAD travaille déjà beaucoup en ce sens. Nous avons ainsi un bureau spécialisé sur cette question. Nous encourageons les États riches en ressources énergétiques à établir une interconnexion avec leurs voisins qui souffrent d’une crise d’énergies, en s’appuyant sur le secteur privé. Que fait concrètement la BAD aujourd’hui pour résoudre les problèmes liés à l’énergie? Nous finançons actuellement, à hauteur de 220 millions de dollars, un projet d’interconnexion des réseaux électriques sur lequel travaillent cinq pays (la République Démocratique du Congo, le Kenya, l’Ouganda, le Rwanda et le Burundi) et dont l’objectif est de construire et réhabiliter les lignes des systèmes d’interconnexions électriques de ces pays afin d’accroître le commerce d’énergie et d’électricité transfrontière,

AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010 23

économie

Emmanuel Nzabanita

de renforcer la stabilité et la sécurité des continent était de 6 %; il est descendu à 2,5 % pendant la crise et il est actuellement systèmes ainsi que la flexibilité des opéà 5 %, ce qui signifie qu’il a fait un vérirations des réseaux d’interconnexion de table bond en arrière. En somme, l’Africes pays. Ce projet complète d’autres que a énormément besoin de s’approprojets intégrateurs que la BAD a mis visionner en énergie hydroélectrique en place et qui visent à promouvoir une pour faire fonctionner son économie. énergie à faible coût pour l’ensemble de Cependant, je pense qu’elle a besoin à toute la région. Ce projet a été majorila fois de l’énertairement financé « Aujourd’hui, contrairement gie hydroélectripar la BAD, mais des pays comme au passé, les pays sont prêts que et des énergies renouvelables, en le Japon et l’Alà se consulter mutuellement particulier pour lemagne ont égaet à augmenter les échanges les populations lement participé vivant au financement. commerciaux entre eux en éloignées dans les zones À la BAD, nous matière d’énergie et d’électri- rurales même si travaillons donc à cité notamment. Plus personne aujourd’hui, il est ce que l’intégration pour déverégionale dans ce ne reste dans son coin à se urgent lopper l’économie domaine devienne préoccuper de ses affaires africaine, d’avoir une réalité. Résulplus d’énergie tat : aujourd’hui, uniquement. » hydroélectrique. contrairement au passé, les pays sont prêts à se consulter Enfin, beaucoup d’organismes ont d’ores mutuellement et à augmenter les échanet déjà fait des prévisions dans ce domaine ges commerciaux entre eux en matière pour 2030 ou 2050. Quelles perspectives d’énergie et d’électricité notamment. la BAD prévoit-elle justement en termes Plus personne ne reste dans son coin à se d’énergie, d’environnement et de changepréoccuper de ses affaires uniquement. ment climatique pour l’Afrique? Par exemple, désormais, on peut voir La BAD va continuer, dans les la République Démocratique du Congo années à venir, à soutenir et encouratravailler avec les pays de l’Afrique de ger de grands projets dans ce domaine l’Est sur cette question. Je peux égalede l’énergie, des projets qui prônent ment citer l’exemple de l’Ouganda et du l’ouverture vers les zones rurales pour Soudan. Le second partage ses ressourqu’elles aient accès elles aussi aux ces avec le premier, car celui-ci a beauressources énergétiques et participent coup de pipelines, mais pas de pétrole. ainsi au développement économiTous ces exemples ont leur importance. que. Je vais vous donner l’exemple de l’Éthiopie qui, lorsqu’on a commencé à Beaucoup disent que le transport de l’énertravailler ensemble il y a trois ans, avait gie hydroélectrique sur de grandes disseulement 12 % de sa population qui tances n’est pas réaliste et que l’Afrique a avait accès à l’électricité. Aujourd’hui, surtout besoin d’un système décentralisé. 20 % d’Éthiopiens y ont accès. Cela C’est pourquoi les énergies renouvelables veut donc dire que le pays a entamé seraient la solution. Qu’en pensez-vous? une politique d’ouverture, ce qui est synonyme de plus d’opportunités et Il faut distinguer ici deux choses. donc plus de demandes de la part de sa Premièrement, les énergies renouvelapopulation. Ce sont toutes ces raisons qui bles, il n’y en a pas suffisamment en poussent aujourd’hui les investisseurs Afrique. Par exemple, si on prend le et les banques à soutenir leurs efforts. cas d’un pays avec de petites villes qui Ce type d’efforts permet d’accroître sont éloignées du pouvoir central, avoir l’industrialisation du pays qui à son tour recours aux énergies renouvelables est permet de créer beaucoup d’emplois effectivement une bonne idée. Mais si en réduisant par la même occasion la on a besoin de répondre à une demande pauvreté. C’est le seul moyen, de nationale forte, avoir recours aux énermon point de vue, de réduire la gies renouvelables n’est pas recompauvreté sur le continent. C’est mandée à mon avis, car pour ce faire, pourquoi la BAD continuera à le pays concerné a besoin d’un projet encourager l’interconnexion entre les d’envergure. Il ne faut pas oublier que pays détenteurs de ressources les choses sont constamment en train de énergétiques et ceux qui n’en ont pas changer en Afrique. Par exemple, avant afin d’accélérer le développement de l’activité économique du continent. la crise financière mondiale, le PIB du


LA DIASPO DÉVELOPPEMENT DE L’AFRIQUE

A-T-ELLE FAIT SA PART ? Depuis les années 60, c’est par milliers qu’ils ont quitté le continent : intellectuels, étudiants, travailleurs qualifiés, clandestins ou simples réfugiés. Leur principale motivation : améliorer leur quotidien. Geste égoïste? Sans doute. L’Afrique est-elle perdante sur toute la ligne? Difficile d’être formel.

R

ares sont les « pères » des indépendances africaines et leurs successeurs qui ont grâce aux yeux des analystes. Les maigres résultats en matière de respect des droits fondamentaux, de démocratie, de sécurité, de santé, de création d’emplois, d’éducation, d’infrastructures, de lutte contre la corruption et l’arbitraire, etc. sont autant d’éléments du réquisitoire. Autant d’arguments qui ont également incité certains vaillants fils et filles de l’Afrique à choisir le chemin de l’exil. Aujourd’hui, ils sont partout ou presque. En tout cas, il n’y a quasiment pas de grande capitale mondiale qui n’ait son contingent d’intellectuels, travailleurs, artistes, sportifs et entrepreneurs africains. Mais pendant très longtemps, les relations entre ces Africains de la diaspora et le « pays » n’ont pas été simples. Méfiance et incompréhension réciproques ont souvent caractérisé ces relations. Dresser le bilan de l’action de la diaspora africaine, c’est aussi parler de la nature de cette relation. C’est aussi, indirectement, faire le bilan de la fuite des cerveaux.

24 AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010

LONGTEMPS LES MAL-AIMÉS Aussi surprenant que cela puisse paraître, la fuite des cerveaux est aussi vieille, sinon plus, que l’Afrique indépendante. L’euphorie de l’accession à la souveraineté internationale n’empêche pas le départ de 27 000 Africains vers les pays industrialisés entre 1960 et 1975. Ce chiffre monte à 40 000 entre 1975 à 1984. Et depuis 1990, ce sont en moyenne 20 000 cadres, médecins, infirmiers, enseignants, étudiants, etc. qui mettent le cap chaque année sur l’Europe et l’Amérique principalement. La mondialisation ne ralentit pas le phénomène. Au contraire. Heureusement, pourrait-on dire, l’exode ne touche pas tous les pays avec la même ampleur. Selon le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), 60 % des médecins formés au Ghana dans les années 80 ont quitté leur pays. Entre 1995 et 2000, ce sont 15 % des diplômés universitaires maliens qui sont partis. Près de 24 % des médecins et 9 % des infirmières ont trouvé un emploi dans des pays développés, principalement en France. Inutile de dire qu’en première analyse, l’Afrique est la grande per-

dante. Pour remplacer l’expertise partie, les gouvernements font appel aux étrangers qui coûtent cher : environ quatre milliards de dollars pour payer les 100 000 expatriés qui officient dans les administrations et vendent leurs services comme consultants. Si on y ajoute les investissements des pays pour l’éducation initiale de ces cerveaux exilés, les dommages pour l’Afrique sont encore plus manifestes. D’après le PNUD, pour former un étudiant pendant quatre ans, les pays africains dépensent entre 10 000 et 15 000 $ selon les disciplines. Dans le cas des médecins, le montant peut atteindre 40 000 $. Or, c’est dans ces groupes que se trouve le plus gros contingent de candidats au départ. Traduction : les pays africains forment une main-d’oeuvre pour satisfaire les besoins des pays riches. Voilà une première source de malaise entre la diaspora et ceux qui sont restés au pays. Ce n’est pas tout. Bénéficiant de la liberté d’expression dans les pays d’accueil, certains membres de la diaspora profitent de la moindre tribune pour dire tout le mal qu’ils pensent de la gestion des affaires dans les pays qu’ils ont quittés. Tant à Paris, à Londres qu’à Washington ou à Ottawa, bien des dirigeants africains en visites officielles ont dû affronter l’accueil bruyant de compatriotes armés de pancartes et scandant des slogans hostiles. Au pays d’origine, on le leur rend bien : les protestataires sont accusés de manquer de patriotisme. Ils sont qualifiés d’agitateurs déconnectés de la réalité du pays, de parvenus, de déserteurs ou de traîtres qui méprisent

Photo : Shutterstock

Didier Oti


économie

RA

« Pour être utile, l’Africain n’a pas besoin de résider en Afrique »

la terre qui les a vu naître. Sans surprise, nombreux sont ces Africains de la diaspora, sans double nationalité et sans droit de vote, qui ne peuvent peser sur le cours des choses dans leur pays d’origine. Deuxième source de malaise. Lorsqu’il faut dresser le bilan de l’apport de la diaspora à l’édification de la maison Afrique, certains seraient tentés de ne retenir que cela : la rhétorique creuse, la critique frisant le dénigrement de la part de ceux et celles qui préfèrent se la couler douce au sein des sociétés qui font la fierté des Occidentaux plutôt que d’aller pétrir la glaise d’où jaillira la nouvelle Afrique. Mais, illustration que la critique est aisée et l’art difficile, certains anciens membres de la diaspora, jadis pourfendeurs de leurs pays, ne font guère mieux lorsqu’ils sont appelés aux affaires. Ils s’accommodent plutôt bien des pratiques qu’ils jugeaient autrefois abjectes. Bref, qui veut monter un dossier à charge contre la diaspora pour inaction au cours des 50 premières années d’indépendance des pays africains, ne serait pas à court d’arguments. Même si une telle opération serait foncièrement injuste.

ILS SONT DE PLUS EN PLUS COURTISÉS L’argent, dit-on, c’est le nerf de la guerre. Dans le cas de la diaspora, on pourrait dire que c’est le réconciliateur. L’envoi constant des fonds dans les pays d’origine a beaucoup contribué à apaiser la relation tendue avec les Africains de l’extérieur et ceux de l’intérieur. Depuis quelques années maintenant, les transferts de fonds

des migrants dépassent de loin le montant de l’aide publique au développement et le volume des investissements directs étrangers. C’est tout dire. Quelques exemples. En 2005, les Marocains de France ont expédié dans leur pays d’origine 4074 millions d’euros, soit 9 % du Produit intérieur brut du pays et 750 % de l’aide publique au développement. Le Sénégal a reçu la même année 1254 millions d’euros, soit 19 % de son PIB. En 2007, le Mali a perçu de sa diaspora 212 millions de dollars, soit 3,3 % de son PIB. Jadis boudée, la diaspora est donc aujourd’hui courtisée. Lorsque ce n’est pas le président sénégalais Abdoulaye Wade qui organise une Conférence des intellectuels d’Afrique et de la diaspora, c’est l’Éthiopie qui lance un programme à destination de ses fils éparpillés à travers le monde, pour qu’ils viennent partager leurs compétences avec leurs compatriotes. Pour la petite histoire, on estime à près de 1,5 million le nombre d’Éthiopiens installés à l’étranger (ÉtatsUnis, Canada, Suède, Royaume-Uni, Allemagne, Pays-Bas, pays du Golfe). De plus en plus de pays africains dédient des ministères entiers à leurs compatriotes de l’étranger. Même l’Union africaine s’en est mêlée, faisant de la participation de la diaspora africaine au développement du continent l’un des axes de ses politiques et programmes, et de la lutte contre la fuite des cerveaux, une des priorités du continent. Par ailleurs, les « cerveaux exilés » ne sont pas fermés à l’idée de retourner au pays. Certains y voient même une obligation morale. Mais rares sont ceux

qui voudront démissionner d’un emploi rémunéré à 50 000 $ par an au Canada ou aux États-Unis pour aller gagner 10 fois moins en Afrique. Rares sont les Africains qui vont renoncer à la stabilité et à la quiétude occidentale pour l’incertitude. Il est vrai que la fermeture progressive de plusieurs pays occidentaux à l’immigration africaine est un incitatif au retour. Cela dit, pour être utile à son pays, l’Africain doit-il y exercer? Pas forcément. À l’heure de la mondialisation et de l’usage croissant des nouvelles technologies de l’information et de la communication, la présence physique n’est plus un préalable à toute action porteuse. Les nombreux universitaires, écrivains, informaticiens, artistes africains, etc. ont-ils été moins utiles à leur pays du fait de leur présence continue à l’étranger? Pas sûr. Récemment, on a fait appel à M. Mamoudou Gazibo, professeur à l’Université de Montréal depuis 10 ans, pour diriger le comité de rédaction de la nouvelle constitution du Niger. À titre personnel, des membres de la diaspora, bien placés dans des institutions nationales ou internationales, posent des gestes, prennent des décisions qui affectent le sort des pays africains. Une attitude d’autant plus méritoire qu’elle n’est pas rémunérée. Résumons. En cinquante ans, les méfiances entretenues de part et d’autre ont limité la contribution de la diaspora au développement de l’Afrique. À présent, les dirigeants africains semblent enfin prêts à composer avec cette diaspora qui s’impose comme un partenaire incontournable. Pourvu que ça dure.

AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010 25


Un vaste

CHANTIER

L

La volonté de l’Afrique de rattraper le retard qu’elle accuse en matière de transports, d’énergie électrique et des technologies de l’information et de la communication (TIC) plaide en faveur d’un investissement accru dans ces secteurs, notamment dans des projets intégrateurs pouvant bénéficier au plus grand nombre.

es transports, l’énergie électrique et les technologies de l’information et de la communication figurent généralement en bonne place des indices permettant d’évaluer le niveau de développement d’un pays ou d’un continent. Cinquante ans après l’accession de nombreux pays à la souveraineté internationale, force est de constater que l’Afrique accuse encore des insuffisances à la

26 AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010

fois quantitatives et qualitatives sur ces trois points. Ce qui freine la croissance économique de manière considérable et entrave le développement humain et social dans ce continent.

Les transports : encore d’énormes lacunes La route a toujours été et demeure le moyen de transport dominant en Afri-

Badjang ba Nken

que. Elle représente 80 à 92 % du trafic interurbain et inter-États de marchandises. Important moyen d’intégration, la route représente dans de nombreux cas le seul moyen d’accès aux zones rurales où se trouvent les bassins de production agricole et pastorale. L’Afrique se caractérise par une faible densité routière : 7 km pour 100 km2, contre 13 km pour 100 km2 en Amérique latine et 19,5 km pour 100 km2 en Asie. Par sous-région, on enregistre les statistiques suivantes : Afrique centrale, 4,3 % de routes bitumées; Afrique de l’Est, 9,7 %; Afrique du Nord, 65,1 %, Afrique australe, 21,3 %, Afrique de l’Ouest, 23,2 %. Soit un total de 24,7 % de routes bitumées pour l’ensemble du continent. La situation du transport aérien en Afrique n’est guère plus reluisante. Le continent ne représente que 4,7 % du trafic mondial. En 2008, les 44 compagnies africaines membres de l’Association des Compagnies Aériennes Africaines (AFRAA) ont transporté 37,2 millions de passagers, ce qui représentait un tiers du marché africain. Plusieurs raisons permettent d’expliquer le retard de l’Afrique dans le développement des infrastructures de transport. La plupart des jeunes États indépendants ayant hérité d’une infrastructure embryonnaire, il a fallu supporter financièrement les investissements lourds à réaliser. Et comme ces États devaient en même temps faire face aux problèmes d’éducation de santé, de défense nationale, etc., ils ont dû procéder aux arbitrages qui n’ont pas toujours privilégié les infrastructures de transport. Par ailleurs, la crise économique et financière des années 80 et 90 a donné un coup d’arrêt aux nombreux projets existants ici et là. En raison du faible développement des infrastructures de transport en Afrique, l’Organisation des Nations unies a proclamé, à la demande des pays africains, deux décennies pour les transports et les communications en Afrique (1978-1988 et 1991-2000) afin de focaliser les efforts des États partenaires au développement sur les questions spéci-

Photo : Shutterstock

DÉVELOPPEMENT DES INFRASTRUCTURES


Les TIC : le fossé numérique Depuis une vingtaine d’années, on évoque de plus en plus la possibilité d’accélérer le développement de l’Afrique en ayant recours aux technologies de l’information et de la communication (TIC). Les promoteurs de cette idée étaient convaincus que la mise en place de la société de l’information stimulerait la croissance et procurerait de nouvelles opportunités dans les domaines de l’éducation, de la santé, du commerce, de la création d’emplois et de la sécurité alimentaire, aidant ainsi les pays à se développer rapidement et à augmenter leur niveau de vie. Tout est parti de l’organisation en 1995 à Addis-Abeba (Éthiopie) d’un colloque régional africain sur la télématique au service du développement. La large consultation qui a suivi, a permis à l’Afrique de se doter d’une véritable vision de la société de l’information, et d’un plan d’action correspondant. Cette vision a été adoptée par l’Organisation de l’unité africaine (OUA) lors du sommet de juillet 1996 à Yaoundé, puis retenue au titre de la composante régionale du volet TIC du Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD). D’autres initiatives ont vu le jour par la suite. Malgré tout, l’Afrique est restée à la traîne dans le secteur des TIC. Le fossé numérique entre les pays développés et l’Afrique s’est même agrandi. Si l’on prend le cas de la téléphonie mobile, on constate que depuis les années 90, on se rend certes compte que le taux de couverture a rapidement progressé et les prix ont fortement baissé, mais il existe un important potentiel inexploité et de fortes inégalités de dessertes entre différents pays et au sein des pays eux-mêmes. Selon les statistiques de l’Union internationale des télécommunications (UIT), le taux de pénétration de la téléphonie mobile

était de près de 33 % en Afrique en 2008, 50,1 % dans les pays en développement non africains et de près de 60 % dans le reste du monde. S’agissant de l’accès à Internet, les tendances sont pratiquement les mêmes avec des disparités plus grandes en fonction du niveau de développement des sous-régions. De façon générale, le niveau de pénétration technologique en Afrique est très faible comparativement à celui des pays développés. En 2007 : • une personne sur 5 possède un appareil radio • une personne sur 15 possède un téléviseur • une personne sur 30 possède un téléphone mobile • une personne sur 40 possède une ligne téléphonique fixe • une personne sur 136 possède un ordinateur personnel (pc) • une personne sur 150 utilise l’Internet • une personne sur 400 est abonnée à la télévision payante Un grand nombre de pays africains ont désormais une meilleure vision de leur participation à la société planétaire de l’information. L’heure n’est plus à s’interroger sur ce qu’il convient de faire, mais de mettre leurs décisions en pratique.

L’énergie électrique : le financement comme nerf de la guerre Le développement de l’Afrique passe par la maîtrise et une gestion rationnelle de ses principales ressources naturelles, dont l’eau. D’où l’importance accordée, ici et là, à la construction des barrages hydro-électriques dont le rôle clé dans le développement socio-économique de l’Afrique n’est plus à démontrer. Avec sept grands fleuves : le Nil, le Niger, le Congo, le Sénégal, l’Orange, le Limpopo et le Zambèze, l’Afrique recèle de 10 % du potentiel hydro-électrique mondial avec, malheureusement, de très faibles niveaux de consommation de l’énergie par habitant. Mais pour que l’Afrique bénéficie effectivement de ce potentiel, il lui faut disposer de financements.

CINQUANTE ANS

après les indépendances, l’Afrique accuse un grand retard en matière de transports, d’énergie et de TIC. Mais elle peut mieux satisfaire les attentes de ses populations (...) en réalisant des projets intégrateurs à l’échelle sousrégionale qui, de l’avis d’experts, son plus porteurs. Pour cela, ses États ont de plus en plus recours à la Banque mondiale qui les encourage à investir dans ce secteur, en finançant parfois jusqu’au quart des capitaux étrangers nécessaires à l’investissement. De l’avis du président du groupe de la Banque africaine de développement (BAD) Donald Kaberuka, « les changements climatiques, la quête d’énergies propres et le besoin de l’Afrique en sources énergétiques durables plaident largement en faveur d’un investissement accru dans le secteur hydro-électrique. » Certes, les États africains déploient individuellement des efforts pour se doter de l’énergie hydro-électrique; cependant, ils n’hésitent pas à se donner la main dans le cadre de l’intégration sous-régionale. C’est ainsi que le barrage hydro-électrique d’Inga, dans la province du Bas Congo, en République démocratique du Congo, est au centre des enjeux économiques pour l’intégration industrielle de l’Afrique, comme prévu dans la mise en œuvre des projets intégrateurs d’énergie électrique du Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD). Cinquante ans après les indépendances, l’Afrique accuse un grand retard en matière de transports, d’énergie et de TIC. Mais elle peut mieux satisfaire les attentes de ses populations en poursuivant certes la réalisation des projets nationaux, mais surtout en réalisant des projets intégrateurs à l’échelle sousrégionale qui de l’avis d’experts, sont plus porteurs.

AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010 27

économie

fiques des transports et des communications en Afrique. L’évaluation de ces 20 ans d’efforts consacrés aux transports a montré que les infrastructures et les services de transport existants étaient encore loin de permettre la réalisation du développement socioéconomique et l’intégration du continent.


PROFIL

TCHAD Population (2010) : 10 329 208 hab. Densité : 8,8 habitants/km² Superficie : 1 284 000 km² Langues officielles : Français, arabe Capitale : N’Djamena Monnaie : Franc CFA,

L

Histoire

es frontières de la République du Tchad résultent des négociations entre les Français, les Anglais et les Allemands à l’époque coloniale dans les années 1880. Considéré comme un protectorat français à partir de 1900, le pays est érigé en colonie en 1920 dans le cadre de l’AEF (Afrique équatoriale française). Devenu république autonome en 1958, il obtient son indépendance le 11 août 1960 sous la présidence de François Tombalbaye qui mène, dès le début, une politique de marginalisation des populations musulmanes nordistes. Ce qui ravive la rivalité séculaire entre le Sud, dominé jusqu’à la colonisation française, et le Nord ancien dominateur, où l’administration militaire n’a jamais cessé de s’exercer durant toute la période coloniale. En 1962, François Tombalbaye supprime les partis politiques et seul son parti, le PPT (Parti Progressiste

Tchadien), est autorisé. Il est assassiné en 1975 à la suite de la guerre civile entre les populations musulmanes du Nord menées par le Front de libération nationale du Tchad (Frolinat) soutenu par le Soudan, et celles chrétiennes du Sud. Il est oblige de solliciter l’aide des troupes françaises en 1968. À sa mort, le pouvoir échoit au général Félix Malloum qui est contraint de le céder à Goukouni Oueddei à la suite de la première bataille de N’Djamena en 1979. Un an après, il évince, lors de la seconde bataille de Ndjamena, son rival Hissène Habré, avec l’aide décisive des troupes libyennes. Celui-ci prend sa revanche en parvenant à le renverser en 1982, mais l’année suivante, il doit faire appel aux troupes françaises toujours très présentes dans le pays, pour contenir une tentative d’invasion libyenne. Il est son tour chassé du pouvoir en 1990 par Idriss Déby Itno qui est toujours président.

Quelques chiffres en bref • Éducation (2003-2008) : Taux d’alphabétisation des adultes : 26 % Taux net de scolarisation à l’école primaire : 36 % • Santé (2006) : 0,04 médecin pour 1000 habitants • Produit Intérieur Brut (PARITÉ DE POUVOIR d’ACHAT, 2009) : 19,21 milliards ($ US) • Environnement des Affaires (Doing Business 2010, classement effectué sur 183 économies) : Facilité de faire des affaires : 178e place (-2 par rapport à 2009) Création d’entreprise : 182e place Protection des investisseurs : 132e place (-5 par rapport à 2009)

28 AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010

Économie L’économie tchadienne repose principalement sur l’agriculture (en particulier l’agriculture de subsistance), l’élevage et la pêche qui occupent plus de 80 % de la population active pour 22,6 % du PIB. Les principales cultures vivrières sont le sorgho, le mil et l’arachide tandis que le coton, la canne à sucre et le tabac sont cultivés à des fins de rente. Les troupeaux sont constitués de bovins, chèvres, moutons, chameaux et volailles. Par ailleurs, le Tchad est un pays exportateur de pétrole depuis 2003, après plus de 30 ans de prospection par différentes compagnies internationales. Avant l’exploitation des réserves pétrolières, le coton représentait 40 % des exportations du pays. Les premières ressources d’exportation du Tchad sont donc le pétrole, le coton, le bétail et le sucre. Le Cameroun et le Nigeria sont les principaux débouchés du marché tchadien en Afrique, tandis que la France, l’Allemagne et le Portugal sont ses premiers clients en Europe. Et comme beaucoup d’autres pays africains, le secteur informel est plus développé que le secteur formel. Par ailleurs, les autorités tchadiennes ont beaucoup investi dans les infrastructures routières et ont depuis peu mis en place un guichet unique de l’investissements.


Population (2010) : 4 511 488 hab. Densité (2007) : 7 habitants/km² Superficie : 622 984 km² Langue officielle : Français Capitale : Bangui Monnaie : Franc CFA

E

HISTOIRE

n 1800, Ngoura, le leader des Kogobili, fonde la nation Zandé. En 1889, Bangui est fondée par Dolisie et Uzac. C’est vers la fin du 19e siècle que les Français colonisent la région et l’administrent sous le nom d’Oubangui-Chari. En 1949, Barthélemy Boganda, premier prêtre catholique de l’Oubangui-Chari, fonde le Mouvement pour l’Évolution Sociale en Afrique Noire (MESAN). Le 1er décembre 1958, l’Oubangui-Chari prend le nom de République centrafricaine. Boganda devient alors le premier chef de l’État. Il meurt l’année suivante dans un accident d’avion dont les causes n’ont jamais été élucidées. L’indépendance de l’État centrafricain est proclamée le 13 août 1960. Le cousin de Boganda, David Dacko, lui succède, mais est renversé fin 1965 par un coup d’État orchestré par son cousin, le capitaine Jean-Bedel Bokassa qui se fait couronner empereur à vie en 1977 avant d’être renversé en 1979.

David Dacko reprend alors le pouvoir. Il en sera chassé en 1982 par le général André Kolingba qui installe un régime militaire et restera au pouvoir jusqu’en 1993. Le courant de démocratisation lancé par le sommet de La Baule fera naître les premières élections multipartites. Ange-Félix Patassé est ainsi élu président de la République et sera réélu en 1999. En 2001, une tentative de coup d’État provoque de violents affrontements dans la capitale, Bangui. En mars 2003, un putsch a lieu et le général François Bozizé prend le pouvoir. Des élections présidentielles et législatives devaient avoir lieu en avril 2010, mais la Commission électorale indépendante (CEI) a décidé de les reporter sans préciser de date. Malgré l’accord de paix de Libreville signé en 2008 par les principaux groupes rebelles, différents groupes armés continuent en effet de contrôler certaines zones dans le Nord, et le gouvernement semble craindre une crise politique si des élections devaient avoir lieu.

Quelques chiffres en bref • Éducation (2003-2008) : Taux d’alphabétisation des adultes : 49 % Taux net de scolarisation à l’école primaire : 59 % • Santé (2009) : 0,08 médecin pour 1000 habitants • Produit Intérieur Brut (Parité dE pouvoir d’achat, 2009) : 3,3 milliards ($ US) • Environnement des Affaires (Doing Business 2010, classement effectué sur 183 économies) : Facilité de faire des affaires : 183e place (0 par rapport à 2009) Création d’entreprise: 159e (+9 par rapport à 2009) Protection des investisseurs: 132e (-5 par rapport à 2009)

Économie Les coups d’État et les mutineries qui ont déchiré la Centrafrique depuis l’indépendance ont fait de ce pays un État dépourvu de capacité institutionnelle significative, et occupant la 179e place sur 182 dans l’Indice de développement humain de l’ONU. Le Nord-Ouest et le centre du pays représentent un bassin agricole important pour les cultures de coton et de la canne à sucre. Le secteur de l’agriculture contribue à plus de la moitié du PIB du pays. Toutefois, la faiblesse des infrastructures et du soutien à la production limite très fortement les rendements du pays. Depuis 2003, on peut observer un retour massif à de simples cultures vivrières, destinées à une consommation interne et locale. L’industrie forestière contribue également au PIB, en raison d’importantes ressources en bois tropicaux, comptant pour 16 % des recettes d’exportation. Finalement, l’industrie du diamant génère 40 % des recettes d’exportation. Depuis août 2008, la Centrafrique possède un Guichet unique de formalités des entreprises, une salle où sont regroupés tous les services impliqués dans les procédures de reconnaissance officielle des entreprises.

AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010 29

PROFIL ÉVENEMENT

CENTRAFRIQUE


PROFIL

NIGERIA Population (2010) : 152 217 341 hab. Densité : 137 habitants/km² Superficie : 923 768 km² Langue officielle : Anglais Capitale : Lagos Monnaie : Naira

L

HISTOIRE

e Nigeria découpé en plusieurs protectorats devient une colonie anglaise en 1914 et obtient son indépendance totale en 1960 après avoir eu un gouvernement représentatif pendant neuf ans. Le pays, qui fait partie du Commonwealth, est gouverné par un Premier ministre, Abubakar Tafawa Balewa. Celui-ci est renversé en 1966, lors d’un coup d’État fomenté par différents groupes militaires menés par le général Johnson Aguiyi Ironsi, un Ibo (ethnie majoritaire de l’Est du pays) qui lui-même est assassiné quelques mois plus tard par le général Yakubu Gowon. Ce dernier agrandit le pouvoir du gouvernement fédéral et change la subdivision du pays qui est désormais constitué de 12 États. Les Ibos sont alors victimes de représailles raciales sanglantes qui aboutissent en 1967 à la sécession de la région orientale du pays, le Biafra, qui s’autoproclame République du Biafra. S’ensuit une guerre civile qui s’achève par une capitulation des

indépendantistes en 1970. En 1975, une fois de plus, un coup d’État conduit le général Murtala Ramat Mohammed au pouvoir qui est à son tour tué dans un autre coup d’État plusieurs mois après. Il est remplacé par son second, le général Olusegun Obasanjo qui établit une nouvelle constitution en 1977. Shhu Shagari gagne les premières élections organisées dans le Nigeria en 1979. Mais un nouveau coup d’État en 1983 replonge le pays sous la coupe du conseil militaire suprême jusqu’en 1993, date à laquelle le général Sani Abacha arrive à la tête de l’État. Après sa mort en 1998, son successeur Abdulsalami Abubakar rétablit la constitution de 1979 et organise les premières élections démocratiques depuis 16 ans. Elles sont gagnées par Olusegun Obasanjo, qui est réélu en 2003 et laisse sa place en 2007 à Umaru Yar’Adua qui décède en 2010. Le Nigeria est depuis dirigé par Goodluck Jonathan, l’ancien vice-président.

Quelques chiffres en bref • Éducation : Taux d’alphabétisation des adultes (2003-2008) : 72 % Taux net de scolarisation à l’école primaire (2003-2008) : 63 % • Santé (2006) : 0,28 médecin pour 1000 habitants • Produit Intérieur Brut (Parité dE pouvoir d’achat, 2009) : 339 milliards ($ US) • Environnement des Affaires (Doing Business 2010, classement effectué sur 183 économies) : Facilité de faire des affaires : 125e place (-5 par rapport à 2009) Création d’entreprise : 108e (-13 par rapport à 2009) Protection des investisseurs : 57e (-4 par rapport à 2009)

30 AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010

Économie Le Nigeria est le 10e producteur mondial de pétrole avec une production quotidienne évaluée à 1,7 millions de barils en 2009. Il est ainsi placé parmi les six premiers pays exportateurs de pétrole. Pourtant, le pays est souvent en pénurie de carburant, de nombreuses raffineries sont sous-exploitées voire inexploitées et à peine un quart de la population bénéficie des revenus du pétrole. Malgré tout, le Nigeria est la deuxième puissance économique du continent après l’Afrique du Sud. Par ailleurs, le système routier constitue un élément essentiel de l’économie nigériane. Au début des années 90, il était l’un des plus étendus d’Afrique. Le réseau ferroviaire comprend seulement deux lignes qui, par manque de fonds de maintenance et de suivi du développement, se sont détériorées au fil des années, ce qui a contribué à réduire le trafic jusqu’à l’abandon de la standardisation des voies. Le système maritime quant à lui repose sur trois complexes portuaires, dans les provinces de Lagos, Rivers et Delta avec Lagos qui accapare l’essentiel du trafic de marchandises. Le secteur agricole, qui emploie plus de 70 % de la main d’œuvre et génère 35 % du PIB nigérian, tient également une place importante dans l’économie du pays. Il s’agit principalement d’une agriculture de subsistance. Enfin, le Nigeria possède depuis 2010 un « guichet unique pour les investissements » installé dans l’État de Cross River, dans le sud-est du pays.


Population (2009) : 8 791 833 hab. Densité (2009) : 60 habitants/km² Superficie : 114 000 km² Langue officielle : Français Capitale : Porto-Novo Monnaie : Franc CFA

E

HISTOIRE

x-Dahomey, le Bénin sera placé sous tutelle française avec le Traité de Ouidah de 1890. En avril 1959, la première Assemblée nationale dahoméenne est élue sans majorité politique distincte. Hubert Maga qui reçoit le soutien de l’Union démocratique dahoméenne (UDD-RDA) de Justin Ahomadégbé, est élu premier président du Dahomey, le 26 juillet 1960 et proclame l’indépendance du pays le 1er août de la même année. Suivront deux coups d’État jusqu’à ce que la nouvelle Constitution, approuvée en mars 1968, établisse un régime de type présidentiel. Émile Derlin Zinsou devient président, mais est renversé par un nouveau coup d’État qui le remplace par une direction militaire en décembre 1968. Un Conseil présidentiel composé des trois partis traditionnels est instauré en mai 1970. En 1972, le général Mathieu Kérékou s’empare du pouvoir et établit un gouvernement militaire. Le pays devient la République populaire du Bénin,

adhère au marxisme-léninisme et le Parti de la révolution populaire du Bénin (PRPB) est créé. Kérékou fait adopter en 1977 une nouvelle constitution qui restera en vigueur jusqu’en 1990. Modèle pour la démocratie en Afrique, le Bénin est le premier État à tenir la Conférence nationale souveraine qui a lieu du 19 au 28 février 1990. Il en découle une nouvelle Constitution qui est adoptée lors d’un référendum en décembre de cette année-là. Ainsi est créé un multipartisme intégral. En 1991, 22 partis d’opposition se regroupent au sein de la « Convention Nationale des Forces de Changement », ce qui leur permet de faire élire le président Nicéphore Soglo. En février 1996, les élections présidentielles sont remportées par Mathieu Kérékou qui est réélu en mars 2001 pour un second mandat de cinq ans. En mars 2006, Yani Boni est élu à la présidence de l’État béninois. Il mettra à jour en juillet 2009 l’un des plus gros scandales de détournements de fonds publics au Bénin.

Quelques chiffres en bref • Éducation (2003-2008) : Taux d’alphabétisation des adultes : 41 % Taux net de scolarisation à l’école primaire : 67 % • Santé (2006) : 0,04 médecin pour 1000 habitants • Produit Intérieur Brut (Parité dE pouvoir d’achat, 2009) : 13,6 milliards ($ US) • Environnement des Affaires (Doing Business 2010, classement effectué sur 183 économies) : Facilité de faire des affaires : 172e place (0 par rapport à 2009) Création d’entreprise : 155e (-4 par rapport à 2009) Protection des investisseurs : 154e (-3 par rapport à 2009)

Économie Le Bénin est membre de l’Union économique et monétaire ouestafricaine et jouit d’une stabilité politique. Son économie est libéralisée depuis 1990 avec l’élimination ou la diminution de la plupart des taxes à l’entrée des marchandises et la mise en place d’un programme de privatisation des sociétés publiques. C’est un pays au sous-sol pauvre, qui vit essentiellement de ses activités portuaires et agricoles. Ses principales ressources proviennent de la culture du coton (qui compte pour 80 % des recettes d’exportation) et de la pêche. Par ailleurs, des gisements de pétrole ont été découverts au large de ses côtes. L’État dispose également d’atouts touristiques, géographiques et culturels non négligeables quoiqu’encore peu développés. Ce pays possède un bon réseau d’infrastructures. Cinquième port d’Afrique de l’Ouest, le port en eau profonde de Cotonou dispose d’une capacité d’accueil de deux millions de tonnes ainsi que de onze postes à quai. L’Aéroport international de Cotonou est desservi par de grandes compagnies mondiales qui relient les principales villes internationales. Le réseau routier en pleine expansion relie l’Atlantique aux pays de l’Hinterland (Mali – Burkina Faso – Niger) et les grandes métropoles des pays côtiers : Lomé (Togo) et Lagos (Nigeria). Quant au réseau ferré, il s’étend sur 800 km entre le Bénin et le Niger. Pour faciliter les échanges commerciaux, le dédouanement a été informatisé et on a instauré un guichet unique. AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010 31

PROFIL

BÉNIN


LE COMMERCE AFRICAI doit emprunter la voie rapide

Marie-Claude Fafard

Le commerce des marchandises entre pays africains reste inférieur au commerce intra-régional pratiqué ailleurs sur le globe, tant dans les zones développées qu’en voie de développement. Quant aux exportations hors continent, le portrait n’est guère plus reluisant avec une part de l’Afrique d’à peine 2 % par rapport à la balance des exportations mondiales. Qu’est-ce qui explique cet écart? Pourquoi les États africains peinent-ils à commercer entre eux?

Des causes multiples Les raisons qui peuvent expliquer le faible rendement commercial africain sont nombreuses. En tête de liste, on retrouve un système de transport peu fiable et défaillant entre pays africains.

32 AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010

En effet, la médiocrité du réseau routier est le plus important obstacle au commerce africain, en particulier pour les pays sans littoral. Selon le ministre du commerce du Kenya, il en coûte plus cher de transporter du coton tanzanien jusqu’aux filatures du Kenya, un pays voisin, que d’importer du coton d’Asie! En outre, les chemins de fer et les routes existants conduisent souvent au port plutôt que de relier les pays entre eux. Les tarifs douaniers relativement élevés pèsent aussi considérablement dans la balance. La moyenne des tarifs douaniers pratiqués en Afrique est de 19 % contre 12 % pour le reste du monde. Il est donc plus économique d’exporter vers les pays industriels que vers d’autres pays africains. Mentionnons aussi des mesures protectionnistes appli-

quées entre les blocs régionaux africains qui s’ajoutent aux coûts d’exportation. Par exemple, la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC) applique un taux moyen de protection pondéré de 13 % à l’ensemble des pays du monde, alors qu’il est de 21 % pour l’Union économique et monétaire ouest africaine (UEMOA).

Des solutions sur la table Selon le rapport 2009 de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et développement (Cnuced), l’intégration économique régionale devrait faire partie intégrante des politiques des gouvernements africains visant à stimuler et à diversifier la croissance économique et la compétitivité. En effet, elle aurait

Photo : iStockphoto

L

e commerce entre pays africains ne représente que 7 % des échanges du continent. Dans la majorité des communautés, plus de 80 % des exportations restent destinées à des marchés en dehors de l’Afrique. En fait, les États africains commercent davantage avec l’Union européenne (UE) qu’avec leurs pairs. Comparativement, le commerce intra-régional se chiffre à plus de 20 % pour l’Amérique latine, et à près de 40 % pour l’Asie.


L’Afrique, un poids plume Les experts de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) prévoient une hausse de 10 % de l’ensemble des échanges internationaux pour l’année 2010, les pays émergents contribuant pour beaucoup à ce rebondissement économique. L’Asie fait bonne figure avec un net accroissement de ses exportations. Le commerce chinois connaît notamment un formidable essor, enregistrant une hausse de 41 % à l’exportation et 44 % à l’importation. Or, l’Afrique est loin derrière. Son apport dans le commerce mondial est bien mince, ayant même régressé pour s’établir à 2 % aujourd’hui contre 8 % dans les années 1990. Un faible rendement donc, et ce, malgré l’évolution des régimes préférentiels dont l’Accord UE-ACP (Afrique, Caraïbes, Pacifique), l’AGOA ou encore l’Initiative d’accès au marché canadien. C’est que les pays africains n’ont pas pu tirer le meilleur parti de ces accords commerciaux en raison notamment de problèmes importants liés à l’offre et à la compétitivité. Accusant un retard dans l’industrialisation, l’Afrique

ne fait pas le poids devant les autres pays émergents, confrontée qu’elle est à des problèmes de production. Ainsi, moins de 30 % des exportations de l’Afrique subsaharienne comprennent des produits manufacturés, par rapport à une moyenne de 70 % pour tous les pays en voie de développement. Par ailleurs, les exportations reposent sur un nombre limité de pays. Ainsi, l’Afrique du Sud, le Nigeria, le Kenya, l’Égypte et la Tunisie représentant à eux seuls 68 % du volume total des exportations africaines. Cependant, la marginalisation de l’Afrique subsaharienne dans les échanges mondiaux n’est pas une fatalité. Le rapport 2009 de la Cnuced souligne une évolution considérable de la part du commerce intra-africain au fil des ans et qu’il présente un fort potentiel de croissance. Par ailleurs, les membres du Consortium pour les infrastructures en Afrique (ICA), réunis en mai 2010, à Tunis, ont convenu de prioriser des investissements massifs dans l’infrastructure transfrontalière, ce qui permettrait, selon eux, d’ajouter deux points de pourcentage à la croissance du PIB du continent et d’améliorer la productivité de 40 %.

économie

IN

pour effet de renforcer les capacités des pays africains à diversifier leur production et ainsi alléger la forte dépendance à l’égard d’un petit nombre de marchés et de produit de base, accroître les économies d’échelle, élargir la taille des marchés et attirer davantage d’investissements étrangers directs. L’une des priorités est de s’attaquer aux problèmes de commerce des services en améliorant les infrastructures de base comme les transports, les télécommunications et les finances, en renforçant le secteur privé de façon à favoriser sa participation. Une suppression ou une réduction des barrières à l’importation encouragerait par ailleurs la production et les exportations en plus de rendre plus compétitives les entreprises africaines. La profusion de communautés économiques régionales a eu également comme effet pervers de devenir le principal obstacle à l’intégration en Afrique, puisque plusieurs États appartiennent à un, deux, et parfois même à trois ensembles. Une réduction du nombre de communautés régionales diminuerait les coûts administratifs et libérerait des fonds pour améliorer les opérations courantes et pour financer les projets.


l’Afrique face à la mondialisation

Badjang ba Nken

Le grand défi de l’INTÉGRATION

Q

uels que soient sa superficie, sa d é m o g r a p h i e, son poids économique… aucun État ne peut vivre en autarcie. D’où la mise sur pied de regroupements sous-régionaux et régionaux qui offrent à leurs membres un poids plus important, notamment dans les négociations internationales. C’est le cas de l’Union européenne dont l’intégration économique, est, de l’avis des experts, l’une des plus poussées, avec l’achèvement du Marché unique, complété par une union douanière, l’Euro comme monnaie commune et le passeport qui permet la libre circulation dans l’espace européen. À côté de l’Union européenne émergent d’autres organisations régionales comme l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) ou l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN). L’Afrique n’est pas restée totalement

34 AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010

insensible à ce mouvement. Toutefois, il convient de relever que les tentatives de réalisation de son intégration sont restées mitigées.

De l’OUA à l’UA La première tentative a été le fait de l’Organisation de l’unité africaine (OUA) qui a vu le jour en 1963 à Addis-Abeba, capitale éthiopienne. Mais de l’avis de nombreux experts, en 39 ans d’existence, cette organisation n’a pas su répondre aux aspirations des peuples d’Afrique. En effet, au regard des objectifs qui lui avaient été assignés, notamment à l’article 2 de sa Charte fondatrice, à savoir le renforcement de la solidarité entre États et la coordination de leurs politiques, le bilan de l’OUA est jugé globalement négatif. Ces objectifs n’ont pas été atteints en raison notamment des égoïsmes nationaux, en d’autres termes, de la difficulté de faire accepter

l’idée de partage de souveraineté. Par ailleurs, la défense de l’intégrité et de l’indépendance de certains États membres a été contrecarrée par l’incapacité à régler les conflits dans des points chauds du continent. En outre, le nonpaiement de leurs cotisations par de nombreux États a privé l’OUA de sa première source de financements et l’a contrainte à solliciter régulièrement des appuis extérieurs. C’est dans l’espoir de remédier à ces insuffisances que l’Union africaine (UA) a été créée. L’UA a officiellement pris la succession de l’OUA à Durban (Afrique du Sud) en 2002 en application de la déclaration de Syrte (Libye) du 9 septembre 1999. Selon les pères fondateurs de cette organisation, la création de l’UA est la preuve de leur détermination à ne ménager aucun effort pour consolider l’union et la cohésion des Africains, et, ce faisant, de permettre le décollage économique du continent. Le Guide de la Jamahiriya

Photo : Shutterstock

L’Organisation de l’unité africaine n’ayant pas atteint les principaux objectifs qui lui étaient assignés, à savoir le renforcement de la solidarité entre États et la coordination de leurs politiques, l’Union africaine qui lui a succédé ne peut relever le défi de l’intégration que si elle évite les écueils du passé et tire avantage des expériences des autres.


l’inverse, l’UA se donne un droit de regard dans certaines situations (génocides, crimes de guerre). Face aux opportunités et aux défis de la globalisation, de nombreux pays africains ont été contraints d’intégrer leur économie, de créer des blocs économiques plus ou moins compétitifs. Objectif : peser d’un poids plus important dans les échanges internationaux. C’est ainsi qu’ont vu le jour entre autres l’Union du Maghreb arabe (UMA), la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), la Communauté économique des pays des Grands Lacs (CEPGL), la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC). De l’avis des experts, ce grand nombre d’organisations (deux à trois dans la même sous-région) a notamment favorisé la dispersion des ressources, freiné

à l’UA pour soutenir le processus d’intégration; • adopter un système de normes pour la mise en œuvre du programme d’intégration; • élaborer un mécanisme rigoureux de coordination et de suivi des progrès accomplis; • stimuler le commerce intrarégional; • renforcer les capacités de l’Afrique à jouer un rôle important sur le marché mondial; • améliorer les systèmes de transport et de communication; • mettre en valeur le potentiel d’échange énergétique à travers le continent; • rendre les États membres comptables des valeurs communes : État de droit, bonne gouvernance politique Des avancées notables et économique, respect des droits de l’homme; Née de la volonté de relancer le pro• rationaliser les communautés souscessus d’intégration politique qui régionales en les recadrant sur l’UA apparaît indispensable aux et le NEPAD (Nouveau parte« Il est grand temps que les Africains se yeux des dirigeants africains nariat pour le développement pour la croissance éconode l’Afrique). considèrent comme des citoyens africains mique du continent, l’UA a Principal projet intégralibres de se déplacer dans tous les pays réalisé deux avancées notateur à l’échelle du continent, bles sur le papier. D’abord, le NEPAD a été adopté par le africains. Une Afrique sans frontières, ses nouvelles institutions sommet de l’OUA d’Abuja en une Afrique avec une monnaie unique, témoignent, du moins dans octobre 2001. La démarche une Afrique avec un seul passeport. » la forme, d’une intention de du NEPAD intègre une multipartage de l’autorité. En eftude d’initiatives antérieures qui fet, au sein de l’OUA, la seule source le processus d’intégration du continent, s’inhibaient mutuellement et inutilede décision était la Conférence des et mis à mal les capacités et les ressourment. La forme d’élaboration et d’adopchefs d’État. Avec l’UA, cet organe ces des gouvernements obligés de faire tion du document du NEPAD sous la se maintient certes, mais devrait parface à différents agendas et exigences responsabilité des seuls chefs d’État et tager son pouvoir avec le parlement de gouvernement, sans implication et africain appelé à s’ouvrir aux opposiparticipation préalables des populations Préalables à remplir tions des États membres. Le Conseil ni des parlements ni même des cadres Afin de permettre à l’Afrique d’avanéconomique, social et culturel (ECOnationaux rappelle, de l’avis des experts, cer sur la voie de l’intégration, l’Union SOCC), nouvel organe, est quant à lui les problèmes récurrents du statut des africaine doit non seulement éviter composé des membres de la société États nations en formation. Par ailleurs, les écueils du passé, mais aussi tirer civile. Autre caractéristique de l’UA : estiment ces experts, le cadre temporel avantage des expériences positives son organisation s’inspire de celle de du NEPAD 2000-2015, pour autant d’ailleurs. Pour de nombreux universil’Union européenne. C’est ainsi que qu’on se réfère à certaines projections taires africains, experts de la Commule secrétariat général de l’OUA a été explicites, présente certes l’avantage nauté économique des Nations Unies remplacé par la Commission de l’UA d’exister comme repère et de coller à pour l’Afrique et autres politiques qui qui a un pouvoir d’initiative et non la Déclaration des Nations Unies sur ont eu à s’exprimer ici et là dans le caplus seulement exécutif. le Millénaire en lui empruntant pour dre de séminaires, colloques, forums, La Cour de justice, la Cour afril’essentiel les grands objectifs de déveen vue d’accélérer la réunification de caine des droits de l’homme et des loppement et d’élimination partielle de l’Afrique en un bloc dynamique, des peuples et le Conseil de paix et de séla pauvreté en 2015, mais il ne recèle préalables doivent être remplis. Il s’agit curité complètent les organes qui popas moins l’inconvénient d’un horizon notamment de : sent les jalons de l’intégration africaitrop court pour un travail approfondi • sensibiliser les peuples africains aux ne. S’agissant de la question cruciale de prospective qui tienne compte du enjeux de l’intégration en les assode la prévention des conflits, l’OUA, poids des variables lourdes sur le déveciant au processus; ancêtre de l’UA, prônait le respect de loppement économique et social d’un • donner une assise financière solide la souveraineté et la non-ingérence. À continent en proie à de nombreux défis.

AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010 35

économie

arabe libyenne, Mouammar Kadhafi, qui a joué un rôle décisif dans la création de l’UA, a toujours exhorté ses homologues africains à accélérer la mise en application des objectifs de la Déclaration de l’organisation panafricaine dont les mécanismes de la création des États-Unis d’Afrique. « L’atteinte des objectifs fixés est l’une des conditions sine qua non de la prospérité de notre continent », ne cesse de proclamer Kadhafi. Et d’ajouter : « Il est grand temps que les Africains se considèrent comme des citoyens africains libres de se déplacer dans tous les pays africains. Une Afrique sans frontières, une Afrique avec une monnaie unique, une Afrique avec un seul passeport. »


Les entreprises

CANADIENNES ET LE MARCHÉ AFRICAIN

UNE LONGUE PRÉSENCE AUJOURD’HUI PAYANTE

L

a présence des compagnies canadiennes en Afrique remonte aux années 60. L’une de nos plus grandes entreprises, SNCLavalin, a commencé sa longue association avec le continent en 1968. Depuis ce temps, l’entreprise est actuellement active dans 50 États, du nord au sud, de l’est à l’ouest. C’est une performance très rare et certainement unique au Canada. Un très grand nombre de petites et grandes entreprises ont fait du travail dans tous les pays. Que ce soit dans le secteur agricole, manufacturier, du génie, des infrastructures, de la formation technique et professionnelle, des systèmes informatiques, de la pisciculture, de la pharmacologie, de la défense et de la sécurité, nous avons une belle présence sur le continent.

36 AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010

DES DÉBUTS TRÈS DIFFICILES Certains facteurs n’ont pas favorisé la présence de notre pays dans certains marchés. Nous pouvons citer le fait indéniable que pour toutes nos compagnies, nous avions affaire à des situations nouvelles. Nous ne connaissions pas le climat des affaires, nous n’étions pas familiers avec les structures gouvernementales et leurs dirigeants et surtout nous n’avions pas d’histoire sur le continent. Nos principaux concurrents étaient les pays européens qui avaient, eux, un solide ancrage dans la majorité des pays, ayant été des États colonisateurs. De plus, nous étions craints par certains et plus souvent qu’autrement, n’étions pas les bienvenus parmi ces compétiteurs. Par ailleurs, il y a la distance qui, pour tout Nord-américain, peut constituer un

obstacle majeur en raison des coûts de transport des marchandises et des personnes. Le dernier facteur, mais non le moindre, c’est la représentation restreinte de notre gouvernement sur le continent. En effet, le Canada n’a jamais eu un très grand nombre d’ambassades sur le terrain, jamais plus de 21 ambassades pour couvrir les 53 pays. Nous avons encore réduit ce nombre au cours des dernières années. Ceci contraste avec la présence beaucoup plus soutenue de la part des autres membres du G8 et des 31 ambassades africaines au Canada. Les entreprises canadiennes se battent depuis plusieurs années pour que cette situation soit corrigée, mais malheureusement, les ambassades et les ressources humaines canadiennes continuent plutôt de diminuer en Afrique. Le défi est donc grand à surmonter pour nos entreprises.

PREMIER INVESTISSEUR ÉTRANGER Malgré cela, nos entreprises ont quand même joué un rôle dans le développement économique de l’Afrique. Je crois que le plus significatif vient du secteur minier. L’Afrique possède 13 % des ressources minières du monde et le Canada, 3 %. Ces 3 % représentent quand même une expérience extrêmement précieuse, à tel point que plusieurs diront, avec raison, que le Canada s’est développé grâce à ses mines. C’est en 1989 que le Canada a commencé à investir dans le secteur des mines en Afrique. Depuis ce temps, des centaines de compagnies canadiennes tant dans le domaine de l’exploration, de la production que des équipements ont investi en Afrique. Aujourd’hui, 21 ans plus tard, le Canada a investi plus de 21 milliards $ pour devenir le premier investisseur étranger. Ce qui n’est pas peu direct! Ces investissements ont créé et

Photos : Shutterstock

L’Afrique d’aujourd’hui n’est pas ce qu’elle était il y a cinquante ans, quoi qu’en disent certains pessimistes. L’héritage colonial et la disponibilité de ressources ont certes créé des réalités très différentes d’un pays à l’autre, mais il n’en reste pas moins Lucien Bradet * que nous avons été témoins de grands changements dans tous les secteurs de l’activité humaine : gouvernance, développement économique, culturel et social. Présent sur le continent avant même la période d’indépendance, le Canada s’est d’abord investi dans le domaine de la formation en créant par exemple la première université du Rwanda en 1963. Elle existe encore aujourd’hui et accueille au-delà de 10 000 étudiants annuellement. Mais au-delà de la coopération et de l’aide au développement, le Canada entretient aujourd’hui avec ce continent une véritable relation d’affaires.


appuyer leurs efforts. Ce programme a fait l’objet de plusieurs évaluations au fil des ans, et plusieurs critères ont été modifiés. Après une année de réflexion et de consultation, le Programme a été transféré au Ministère des Affaires étrangères et du Commerce international avec un nouveau mandat au début de 2010. Quant à Exportation et développement Canada (EDC) très active en Afrique, elle accompagne les compagnies canadiennes depuis plusieurs années. Elle joue un rôle financier très significatif pour les entreprises canadiennes, mais aussi pour les acheteurs africains. Au cours des sept dernières années, son volume total d’affaires en Afrique se chiffre à plus de 11 milliards $ avec une excellente année en 2007, avec 2,5 milliards $. Nous parlons ici d’environ 400 compagnies canadiennes impli-

LES ENTREPRISES CANADIENNES SE BATTENT DEPUIS PLUSIEURS ANNÉES POUR QUE LE GOUVERNEMENT CANADIEN SOIT PLUS PRÉSENT EN AFRIQUE, MAIS MALHEUREUSEMENT, LES AMBASSADES ET LES RESSOURCES HUMAINES CANADIENNES CONTINUENT PLUTÔT DE DIMINUER DANS CETTE PARTIE DU MONDE. LE DÉFI EST DONC GRAND À SURMONTER POUR NOS ENTREPRISES. À titre d’exemple, ce sont les collèges canadiens, sous le leadership de l’ACCC (l’Association de collèges communautaires du Canada), qui forment maintenant les formateurs tanzaniens dans le secteur minier pour s’assurer ainsi que les Tanzaniens occupent les emplois locaux dans l’ensemble des corps de métiers nécessaires à l’exploitation minière dans ce pays.

ÉCHANGES COMMERCIAUX EN FORTE CROISSANCE En plus des investissements, il faut jeter un regard sur les exportations et les importations entre le continent africain et le Canada. Il est très difficile d’avoir

des produits pétroliers tant du Maghreb que de l’Afrique subsaharienne. On peut identifier deux institutions canadiennes qui ont grandement contribué à la présence de nos entreprises en Afrique : le Programme de Coopération Industrielle (PCI) de l’Agence canadienne de développement international et Exportation et Développement Canada (EDC). Créé il y a 32 ans (1978), le PCI a appuyé des centaines de compagnies canadiennes à développer leur présence en Afrique. Je dirais que la très grande majorité des compagnies canadiennes présentes en Afrique aujourd’hui, le sont grâce à ce programme qui, à un moment ou à un autre, est venu

quées annuellement dans ces transactions et dans plus de 40 pays africains. Le Conseil canadien pour l’Afrique (CCAfrique) croit que l’accroissement des relations économiques est le plus puissant moteur du développement durable des pays. Sans ces échanges commerciaux, ces transferts de technologies et ces investissements dans les ressources naturelles, le continent africain ne pourra se développer pleinement. CCAfrique espère que le Canada se donnera prochainement tous les outils nécessaires pour accroître sa présence et ainsi jouer son rôle de partenaire à part entière des pays africains. * P.D.G., Conseil canadien pour l’Afrique.

AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010 37

économie

continueront de créer pour plusieurs décennies des emplois en Afrique. Les technologies y sont transférées et les compétences locales sont formées pour remplacer graduellement les expatriés.

un portrait exact de la situation puisque Statistique Canada tient compte uniquement des données concernant les marchandises; donc, les exportations de services ne sont pas comptabilisées. Cette approche ne reflète pas la réalité de nos relations économiques. Concernant les exportations de marchandises pour tout le continent, le chiffre est passé de 1 milliard $ en 2000 à 4 milliards $ en 2008 avec une légère baisse en 2009. Par contre, au niveau des importations, les chiffres sont beaucoup plus impressionnants, passant de 2 milliards $ en 2000 à 12 milliards $ en 2008 avec une légère baisse en 2009. Si l’on considère les pays d’Afrique subsaharienne uniquement, on passe à 2,6 milliards $ d’exportations et à 5,5 milliards $ d’importations. On doit noter ici qu’une très grande partie des importations canadiennes en provenance de l’Afrique sont


PROFIL

TOGO Population (2010) : 5 858 673 hab. Densité : 95 habitants/km² Superficie : 56 785 km² Langue officielle : Français Capitale : Lomé Monnaie : Franc CFA

L

HISTOIRE

e Togo (qui tire son nom de Togodo [L’autre Rive] aujourd’hui Togoville, première capitale du pays située à l’est de Lomé) devient un protectorat allemand en 1883 avant d’être partagé en deux entre la France et le Royaume-Uni en 1919. Après l’indépendance du pays acquise le 27 avril 1960 suite à un accord avec l’administration française, sous le contrôle de l’ONU (l’autonomie interne remonte à 1956), le pouvoir est confié à Sylvanus Olympio qui devient Premier ministre. Il meurt trois ans après en 1963, lors d’un coup d’État mené par des vétérans de l’armée française, dont une grande partie avait combattu en Algérie et en Indochine, qui demandaient à être intégrés dans les forces de sécurité togolaises. Il s’agit du premier coup d’État de toute l’histoire de l’Afrique noire après les Indépendances. Il est remplacé par un civil, Nicolas Grunitzky, destitué à son tour par un coup d’État en 1967qui l’oblige à fuir le pays. Il décède en 1969 à Paris dans

un accident de voiture. Étienne Gnassingbé Eyadema, un des organisateurs du coup d’État de 1963, est alors promu président. Il supprime d’emblée les partis politiques, crée le Rassemblement du peuple togolais (RPT), fait adopter une nouvelle constitution en 1979 et instaure la troisième république. En 1990, suite à de violentes manifestations, une Conférence nationale conduit à la nomination d’un premier ministre issu de l’opposition. Après le décès de Gnassingbé Eyadéma (après 38 ans de présidence consécutifs) le 5 février 2005, l’armée prend le pouvoir, en enfreignant la Constitution et le confie à un des fils du président mort, Faure Gnassingbé, qui finit par démissionner sous la pression de l’opposition et de l’Union Africaine avant d’être officiellement réélu trois mois après. Mais l’élection est accompagnée de violences qui ont fait entre 400 et 500 morts selon le rapport d’enquête de l’ONU. Après des élections législatives qui lui sont favorables en 2007, il est réélu à la tête de l’État en mars 2010.

Quelques chiffres en bref • Éducation (2003-2008) : Taux d’alphabétisation des adultes : 53 % Taux net de scolarisation à l’école primaire : 77 % • Santé (2006) : 0,04 médecin pour 1000 habitants • Produit Intérieur Brut (Parité dE pouvoir d’achat, 2009) : 5,643 milliards ($ US) • Environnement des Affaires (Doing Business 2010, classement effectué sur 183 économies) : Facilité de faire des affaires : 165e place (+1 par rapport à 2009) Création d’entreprise : 170e place (+11 par rapport à 2009) Protection des investisseurs : 147e place (-4 par rapport à 2009)

38 AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010

Économie L’économie togolaise repose principalement sur la culture vivrière qui représente 40 % du PIB. Le territoire du Togo est à 25 % cultivé. L’agriculture a ainsi permis au pays d’arriver à une autosuffisance alimentaire à peu près complète. Elle fait vivre environ 80 % de la population et représente 65 % des travailleurs. Le reste de la main-d’œuvre vit de la culture du cacao, du café, du coton (principale culture industrielle et 1er produit d’exportation agricole), mais surtout des mines de phosphates. Le Togo est d’ailleurs le 5e producteur mondial de phosphates qui représente plus de 40 % des recettes d’exportation. Le pays a entre autres beaucoup investi dans les infrastructures de transports portuaires et routières. Ainsi, le port autonome de Lomé est le seul port en eau profonde de la sous-région disposant d’infrastructures et d’équipement adaptés à des trafics diversifiés. Et l’axe reliant Lomé à Dapaong (Nord-Sud), à la frontière burkinabè, constitue le principal axe de communication du pays. Il favorise les échanges commerciaux avec les pays sahéliens. Le Togo, comme de nombreux autres pays africains, s’est doté d’une zone franche dès la fin des années 80, qui offre aux entreprises exportatrices agréées un des meilleurs environnements réglementaires d’Afrique de l’Ouest. Le pays dispose depuis peu d’un guichet unique.


Population (2010) : 20 579 429 hab. Densité (2007) : 64 hab./km² Superficie : 322 460 km² Langue officielle : Français Capitales : Yamoussoukro (politique) Abidjan (économique) Monnaie : Franc CFA

C

HISTOIRE

e sont les Portugais, qui au 15e siècle, colonisèrent l’Afrique de l’Ouest pour pratiquer notamment le commerce de l’ivoire. À partir de 1830, l’amiral français Bouet signe plusieurs contrats de monopole dans la région avec des chefs de différentes tribus portant sur le commerce de l’or, de l’ivoire, du caoutchouc et de l’huile de palme. Les Français s’installent ainsi au fil des ans sur toute la côte jusqu’à ce qu’ils soient chassés par les Anglais en 1870. Cependant, ils décident de leur tenir tête et plantent notamment du café. Le 10 mars 1893, la Colonie de Côte d’Ivoire est créée et Louis Gustave Binger tient le rôle de gouverneur, non pas sans se heurter à la résistance des populations. Durant la Seconde Guerre mondiale, la pression économique et le durcissement du régime accroissent le mécontentement de la population et la montée du nationalisme. En 1951, le député de la Côte d’Ivoire à l’Assemblée française, Félix HouphouëtBoigny, adopte une stratégie de coopération avec le gouvernement français. Le 4 décembre 1958, la Côte d’Ivoire

devient une république au sein de la Communauté française, HouphouëtBoigny assumant les fonctions de premier ministre. Il proclame le 7 août 1960 l’indépendance ivoirienne. À travers un régime de parti unique, il parvient à établir une stabilité politique du pays, ce qui favorisera la forte croissance économique des années 60 et 70. En 1990, Houphouët-Boigny cède à la pression des manifestations et instaure le multipartisme. En octobre 1990, il est réélu pour un septième mandat de cinq ans. Son décès le 7 décembre 1993 provoque une instabilité politique qui conduit au putsch de Robert Gueï en 1999. En octobre 2000, Laurent Gbagbo devient le 4e président. Suivra une crise politico-militaire qui débutera en septembre 2002 et qui prend fin avec la signature de l’Accord politique de Ouagadougou le 4 mars 2007. Reportée à maintes reprises depuis 2005, l’élection présidentielle devrait avoir lieu le 31 octobre 2010, ce qui représente un défi de taille compte tenu de nombreux problèmes liés à l’organisation de cette élection comme l’établissement d’une liste électorale définitive.

Quelques chiffres en bref • Éducation (2003-2008) : Taux d’alphabétisation des adultes : 49 % Taux net de scolarisation à l’école primaire : 62 % • Santé (2006) : 0,12 médecin pour 1000 habitants • Produit Intérieur Brut (Parité de pouvoir d’achat, 2007) : 34,9 milliards ($ US) • Environnement des Affaires (Doing Business 2010, classement effectué sur 183 économies) : Facilité de faire des affaires : 168e place (-5 par rapport à 2009) Création d’entreprise : 172e (-2 par rapport à 2009) Protection des investisseurs : 154e (-3 par rapport à 2009)

Économie L’agriculture, la sylviculture et la pêche représentent la plus grande part du PIB du pays pour une proportion de 28,3 % (2008). Avec 40 % de la production mondiale, la Côte d’Ivoire est le premier producteur mondial de cacao. La production de café et de cacao représentent par ailleurs 40 % des recettes d’exportation du pays et 20 % du PIB. L’industrie du coton joue également un rôle important dans l’économie agricole ivoirienne. Elle connaît cependant une baisse depuis 2003, mais un plan de relance est en cours. Le redressement de l’économie ivoirienne s’est poursuivi en 2009, malgré le contexte de crise internationale. La Côte d’Ivoire a par ailleurs bénéficié fin 2009 d’une annulation de dette de 209 milliards de F CFA (424 millions $) par l’État français. Afin de favoriser l’investissement, le gouvernement a mis en place, en 2008, un Service du guichet unique à Abidjan. Le pays fait par ailleurs partie de la Commission économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). La Côte d’Ivoire dispose d’un réseau d’infrastructures modernes et en évolution constante. Dans le domaine des routes, l’État réalise une relative avancée dans la sous-région. On retrouve par ailleurs trois aéroports internationaux (Abidjan, Yamoussoukro, Bouaké). Le pays dispose aussi de deux ports internationaux (Abidjan, San-Pedro). Son réseau ferroviaire, qui relie la Côte d’Ivoire au Burkina Faso, est long de 1 260 km. Le réseau de télécommunication est également bien développé et fiable, particulièrement avec l’avènement du câble sous-marin SAT3. AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010 39

PROFIL

CÔTE D’IVOIRE


PROFIL

BURKINA FASO Population (2008) : 15 746 232 hab. Densité : 48 habitants/km² Superficie : 274 000 km² Langue officielle : Français Capitale : Ouagadougou Monnaie : Franc CFA

C’

HISTOIRE

est en 1896 que le royaume mossi d’Ouagadougou devient un protectorat français. La majeure partie de la région correspondant à l’actuel Burkina est con­ quise en 1898. En 1919, la colonie de Haute-Volta est créée. Elle est démembrée en 1932. Le centre et le sud sont alors annexés à la colonie de la Côte d’Ivoire, le nord, intégré au Soudan français et l’est, au Niger. Pour des raisons d’économies budgétaires, la colonie est dissoute en 1932. Sous la direction de Maurice Yaméogo, chef de l’Union démocratique voltaïque (UDV), la Haute-Volta devient une république autonome en 1958 au sein de la Communauté francoafricaine. C’est le 5 août 1960 que la Haute-Volta accède à l’indépendance. En 1966, le président Yaméogo, qui avait mis en place un régime de parti unique, est chassé du pouvoir lors d’un soulèvement populaire. L’histoire politique tumultueuse de ce pays sera ensuite marquée par plusieurs coups d’État. En 1970, le colonel Sangoulé

Lamizana fait adopter une Constitution instaurant l’élection du président au suffrage universel pour quatre ans et garantissant le multipartisme. En 1980, un autre coup d’État militaire survient, portant au pouvoir le colonel Saye Zerbo. En 1982, de jeunes officiers le renversent, et mettent en place un nouveau gouvernement militaire dirigé par le capitaine Thomas Sankara. Le révolutionnaire est arrêté en août 1983, alors qu’il est premier ministre, ce qui déclenche l’intervention de l’armée et provoque une frénésie révolutionnaire à travers le pays. Libéré et désormais président du Conseil national de la révolution (CNR), Sankara instaure des « comités de défense de la Révolution » et décide de pratiquer une politique économique nationaliste. Le 4 août 1984, Sankara donne officiellement à son pays le nom de Burkina Faso, qui signifie « le pays des hommes intègres ». Il est assassiné en octobre 1987 lors du coup d’État orchestré par son plus fidèle compagnon et frère d’armes, Blaise Compaoré, qui est toujours au pouvoir.

Quelques chiffres en bref • Éducation (2003-2008) : Taux d’alphabétisation des adultes : 29 % Taux net de scolarisation à l’école primaire : 47 % • Santé (2006) : 0,06 médecin pour 1000 habitants • Produit Intérieur Brut (PARITÉ DE POUVOIR D’ACHAT, 2009) : 18,81 milliards ($ US) • Environnement des Affaires (Doing Business 2010, classement effectué sur 183 économies) : Facilité de faire des affaires : 147e place (+8 par rapport à 2009) Création d’entreprise : 115e (0 par rapport à 2009) Protection des investisseurs : 147e (-4 par rapport à 2009)

40 AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010

Économie Le Burkina Faso est un pays en voie de développement, en partie en raison de la faiblesse de ses ressources naturelles et des prix de celles-ci sur le marché mondial sans compter l’aridité des sols et l’absence de mise en valeur durant la période coloniale qui n’ont pas favorisé le développement du pays. Premier producteur de coton en Afrique subsaharienne, il est confronté depuis 2006 à la chute des cours mondiaux et s’est tourné vers la culture du coton transgénique. L’agriculture représente par ailleurs 32 % de son PIB et occupe 80 % de la population active. Mentionnons quelques productions minières qui se développent de plus en plus en raison de la conjoncture mondiale : cuivre, fer, zinc et surtout or. En terme d’infrastructures, on retrouve un réseau routier inventorié d’une longueur totale de 61 367 km dont 15272 km sont classés. Les grands axes routiers du pays sont en assez bon état. Il est notamment possible d’effectuer NiameyBamako sur une route goudronnée. Un corridor ferroviaire long de 1252km relie par ailleurs le port d’Abidjan à Yako. C’est la Société nationale d’électricité du Burkina (SONABEL) qui fournit principalement les besoins en électricité du pays. Le Projet d’interconnexion 225 KV Bolgatanga-Ouagadougou devrait augmenter l’offre d’électricité de 30 MW supplémentaires d’ici à 2012 et de 100 MW à partir de 2016. Le Burkina Faso est membre de l’Union économique et monétaire ouest-africaine. Le pays s’est doté d’un guichet unique implanté à Dédougou depuis mars 2008 pour faciliter les investissements.


Population (2010) : 14 517 176 hab. Densité : 8,87 habitants/km² Superficie : 1 241 238 km² Langue officielle : Français Capitale : Bamako Monnaie : Franc CFA

L

HISTOIRE

e Mali devient une colonie française sous le nom de Soudan français en 1883. Il se regroupe avec le Sénégal en 1959, pour former la Fédération du Mali qui accède à l’indépendance le 20 juin 1960. Mais deux mois plus tard, le Sénégal se retire et proclame son indépendance. Le Soudan français qui conserve son nom du Mali, obtient également l’indépendance la même année, sous la conduite de Modibo Keïta qui est renversé en 1968 par un coup d’État mené par un groupe d’officiers ayant à leur tête Moussa Traoré qui instaure une dictature. Il reste au pouvoir jusqu’en 1991, année où il est à son tour renversé par le général Amadou Toumani Touré. Après une période de transition, celui-ci restaure la démocratie avec les élections présidentielles de 1992 remportées par Alpha Oumar Konaré qui est réélu en 1997. En 2002, son prédécesseur Amadou Toumani Touré, qui a quitté l’armée pour se présenter aux Présidentielles, reprend

démocratiquement le pouvoir. Il a été réélu en 2007 à la magistrature suprême.

Économie Le territoire du Mali est à 65 % désertique ou semi-désertique avec une activité économique essentiellement limitée autour de la région fluviale irriguée par le fleuve Niger. Près de 80 % de la population malienne travaille dans l’agriculture ou la pêche et le reste dans l’industrie et les services. Le Mali est devenu, avec une production de 63 tonnes en 2002, le troisième producteur d’or en Afrique derrière l’Afrique du Sud et le Ghana. En 2006, l’or est la première exportation qui rapporte 394,4 milliards de francs CFA. Il représente 15 % du PIB et 70 % des recettes d’exportation. Le coton est après l’or la deuxième source d’exportation du pays, mais récemment, le Mali s’est engagé dans un intense programme d’exploration pétrolière. Par ailleurs, la culture du riz contribue

Quelques chiffres en bref • Éducation (2003-2008) : Taux d’alphabétisation des adultes : 23 % Taux net de scolarisation à l’école primaire : 43 % • Santé (2006) : 0,08 médecin pour 1000 habitants • Produit Intérieur Brut (PARITÉ DE POUVOIR D’ACHAT, 2009) : 15,7 milliards ($ US) • Environnement des Affaires (Doing Business 2010, classement effectué sur 183 économies) : Facilité de faire des affaires : 156e place (+6 par rapport à 2009) Création d’entreprise : 139e (+18 par rapport à 2009) Protection des investisseurs : 147e (+4 par rapport à 2009)

à hauteur de 44 milliards de francs CFA au PIB, soit 5 %. La productivité de la filière riz au Mali est l’une des plus importantes en Afrique. La principale zone de production est celle de l’Office du Niger qui représente 40 % de la production totale. L’élevage qui représente 10 % du PIB, est la principale ressource de 30 % de la population malienne. Le bétail est le troisième produit exporté par le Mali, après l’or et le coton. Avec 80 milliards de francs CFA générés en 2005, le tourisme est également devenu un secteur important de l’économie du Mali. Il est essentiellement concentré dans les régions, le pays dogon, Djenné, Mopti et Tombouctou, sites classés au patrimoine mondial de l’humanité par l’UNESCO. Le manque d’infrastructures hôtelières et l’état des routes restent des freins au développement de cette industrie. Le Mali compte seulement une seule ligne de chemin de fer qui va du port de Koulikoro via Bamako à la frontière avec le Sénégal et continue à Dakar. Par ailleurs, le pays possède un réseau routier d’environ 18 563 km (en 2000), dont près de 4 450 km de routes pavées. En 2007, on comptabilisait 29 aéroports au Mali, dont le principal est l’aéroport international de Sénou de Bamako, qui offre des vols vers les pays voisins et en Europe. Le Mali dispose également comme beaucoup d’autres États africains d’un guichet unique d’investissement.

AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010 41

PROFIL

MALI


DÉVELOPPEMENT INTERNATIONAL DESJARDINS CÉLÈBRE SES 40 ANS

LA COOPÉRATION UN MODÈLE FINANCIER D’AVENIR ET LE GAGE D’UNE PROSPÉRITÉ DURABLE

Il y a 40 ans, dans le but d’assister et d’outiller les populations des pays en développement, le Mouvement Desjardins mettait en place Développement international Desjardins (DID). Aujourd’hui, les actions de DID, organisme à but non-lucratif et un acteur de niveau mondial pour la promotion du secteur de la finance de proximité dans les pays en développement, rayonnent dans plus de 25 pays sur quatre continents et permettent à plus de 7 millions de familles dans le monde d’avoir accès à des services et produits financiers adaptés à leurs besoins.

La priorité :

permettre aux familles de répondre à leurs besoins de base « La mission de DID, indique Anne Gaboury, présidente-directrice générale de DID, est de procurer aux leaders du secteur de la microfinance un savoirfaire, des outils et des méthodologies qui leur permettent de renforcer des institutions financières formelles, démocratiques, rentables, qui répondent aux besoins de leur milieu tout en servant son développement socio-économique, tant en milieu rural qu’urbain. » Les interventions de DID sont une manifestation concrète des valeurs coopératives du Mouvement Desjardins et de son désir de partager son expérience

afin de favoriser l’autonomie des populations dans les pays en développement, de stimuler le développement économique et de contribuer au développement d’un patrimoine collectif.

Le lieu de ses premiers mandats : en Afrique

C’est en Afrique de l’Ouest, notam­ ment au Burkina Faso, que DID a réalisé ses premiers mandats : avec le modèle des caisses populaires Desjardins du Québec pour inspiration, DID a entrepris de mettre en place des institutions de microfinance, de développer une offre de produits et service adaptés aux besoins exprimés localement et de soutenir le recrutement des premiers membres.

La Confédération des institutions financières (CIF) d’Afrique de l’Ouest, qui a vu le jour avec la complicité de DID et qui regroupe six réseaux de microfinance de cinq pays, constitue un opérateur de premier plan dans la région en matière de finance de proximité. Au fil des 40 dernières années, près de 400 projets ont été menés par DID dans plus de 60 pays. Son expérience lui permet d’offrir à ses partenaires plusieurs solutions spécialisées pour la microfinance et les institutions coopératives telles que la mobilisation de l’épargne, le financement agricole, les solutions technologiques, la formation, la microassurance et plus encore.

Le défi reste entier : accroître la portée des services financiers

Au cours des prochaines années, le défi sera d’accroître de façon considérable la portée de l’accès aux services financiers pour assurer une croissance économique soutenue dans les pays en développement. DID doit donc demeurer pertinent et novateur dans son approche et dans les solutions spécialisées mises au service de ses partenaires. Il le fera en s’inspirant des pratiques de ses partenaires du Sud, auprès desquels DID valorise les possibilités d’échange et de complémentarité, et de l’expérience plus que centenaire du Mouvement Desjardins, le plus grand groupe financier coopératif au Canada. www.did.qc.ca/fr/40portraits


DÉVELOPPEMENT LES

ONG DE CONCURRENTES À PARTENAIRES DE

l’État

Photo : iStockphoto

Marc Omboui

AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010 43

SOCIAL

AIDE AU


Les organisations non gouvernementales (ONG) sont nées dans un contexte particulier marqué par l’érosion du pouvoir d’achat des populations et l’amoindrissement des capacités d’intervention de l’État. D’aucuns ont cru qu’elles pouvaient se substituer aux pouvoirs publics pour impulser le développement. Mais force est de constater que devant l’étendue des difficultés, plutôt que de concurrencer l’État, les ONG en sont devenues des partenaires.

44 AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010

Si d’aucunes construisent des écoles et des dispensaires, quelques-unes par contre ont des préoccupations qui ne semblent pas toujours être celles des populations locales. Certaines sont installées au Cameroun depuis les années 60, d’autres sont arrivées plus récemment. On les reconnaît à leurs gros moyens : véhicules 4X4, personnels expatriés, bonne expérience, un personnel qualifié et motivé et des ressources importantes pour mener à bien leurs activités.

La marque des ONG religieuses Il y a ensuite les ONG religieuses, notamment catholiques et protestantes. Elles comptent parmi les plus anciennes du pays. À l’époque du parti unique, alors même que les lois étaient particulièrement répressives à l’endroit des associations, elles ont réussi à se faire accepter. Elles se sont énormément investies dans les domaines sociaux, l’éducation et la santé en particulier. Dans la partie méridionale du pays, elles détiennent quelques-uns des meilleurs établissements scolaires, et aussi les hôpitaux parmi les plus réputés. Elles ont par ailleurs investi dans l’encadrement des personnes âgées et des orphelinats, des secteurs où l’État est presque totalement absent. Ces ONG jouissent généralement d’une certaine crédibilité. Mais contrairement à une idée répandue, les ONG religieuses ne se limitent pas

Photos : Shutterstock

L

a scène se déroule dans une petite localité de la région de l’Est au Cameroun: Plan International, une organisation non gouvernementale basée au Cameroun depuis quelques années, remet à une communauté de femmes Bororo, une tribu autochtone nomade, quelques machines à coudre pour une valeur de moins d’un million de Francs CFA. En réalité, pas grand-chose. Mais, devant les caméras de la télévision nationale, ces jeunes femmes, tout émues, disent leur gratitude à cette ONG qui leur permet ainsi de changer leur statut d’assistées, de se stabiliser et finalement de jouer un rôle dans la société. Des scènes comme celles-ci sont courantes au Cameroun. Comme Plan International, des organisations non gouvernementales, étrangères ou nationales, essayent, de diverses manières et dans divers domaines, d’œuvrer pour alléger les souffrances des populations défavorisées. n gros, trois catégories d’ONG opèrent au Cameroun. D’abord, les ONG étrangères ou internationales. Elles se comptent par dizaines et ont noms Care International, Save the children, WWF, SNV, DDR, FES, Plan International, etc. Elles sont américaines, suisses, allemandes, hollandaises, françaises, etc. Elles couvrent divers champs : lutte contre la pauvreté, santé, éducation, promotion des droits de l’homme, protection de l’environnement, etc. Les ressources de ces organisations proviennent essentiellement des fonds privés.


AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010 45

SOCIAL

ques jugées inefficaces, corrompues et éloignées des qu’aux domaines sociaux. De plus en plus, on les préoccupations des populations-cibles. voit s’intéresser aux droits de l’homme, à la promoLes organisations non gouvernementales intion de la démocratie et de la paix, à la transparenterviennent alors comme l’alternative idéale. Les ce électorale. Ce qui ne manque pas de provoquer ONG sont généralement créditées de flexibilité quelques incompréhensions avec le pouvoir politiet de proximité par rapport aux populations. Par que qui les accuse de se mêler de ce qui ne les regarailleurs, on considère que leurs activités, parce que de pas. La Commission Justice et paix, une ONG plus adaptées, répondent bien aux attentes des porattachée à l’église catholique locale, par exemple, pulations-cibles. Les financements affluent, ce qui s’est beaucoup investie dans le processus électoral a pour effet d’aiguiser des appétits. En l’espace de au Cameroun, a milité en faveur de l’adoption d’un quelques années, on assiste à une prolifération de code électoral, participé à la surveillance des élecces organisations. En 1990, un Collectif des organistions et publié des rapports critiques sur le déroumes de participation au développement au Camelement de ces élections, non sans faire des proposiroun (Copad) voit le jour dans le but de coordonner tions pour une meilleure gestion de ces élections. les diverses interventions sur le terrain afin d’éviter La troisième catégorie est constituée des ONG les chevauchements, recouper et mettre des donnationales. À vrai dire, plusieurs sous-groupes se nées fiables à la disposition des bailleurs de fonds, retrouvent ici. On y compte en effet des structuet servir d’interface entre les ONG et les pouvoirs res bien organisées et dotées d’importants moyens. publics. Ce collectif peut se prévaloir d’avoir inspiré La Fondation Chantal Biya (FCB), que préside l’adoption en 1999 d’une loi sur les ONG. L’on ne l’épouse du chef de l’État camerounais, fait partie saurait pour autant affirmer de manière pérempde celles-là. La FCB dispose des structures hospitatoire que ce collectif a permis aux ONG de mener lières, œuvre pour la santé de la mère et de l’enfant, leurs activités de maconstruit des écoles, nière concertée. vient en aide aux « Il serait illusoire de penser que les Somme toute, femmes rurales à qui ONG ont les capacités (…) de se l’apport des ONG elle distribue du matériel de travail, mais peut être considéré substituer à l’État pour drainer toute aussi des vivres, etc. comme positif. Leur l’aide et prendre en charge le déveMadame Chantal implantation terriBiya a par ailleurs toriale est apprécialoppement du pays. Car, en effet, leur lancé Synergies afrible et leur influence action est loin d’être suffisamment caines, une ONG dans l’encadrement panafricaine qui a et l’éveil des conscienprégnante pour entraîner à grande l’ambition de lutter ces des populations échelle des changements importants contre le sida et les n’est pas négligeable. souffrances à l’échelOn observe qu’elles sur la qualité de vie des populations. » le du continent. interviennent de plus Certaines autres organisations, peut-être moins en plus aux côtés de l’État et parfois dans des doloties, n’en font pas pour autant moins parler maines où ce dernier est absent. Elles visent des cid’elles. C’est le cas de l’Association citoyenne pour bles qui ne sont pas toujours prises en compte par la défense des intérêts des consommateurs (Acdic), l’État, notamment les populations défavorisées. Elune ONG qui encadre les paysans, et d’une males présentent l’avantage de donner leur chance à la nière générale, les producteurs agropastoraux. société civile et en particulier aux syndicalistes que Elle publie un journal, La voix du paysan, qui s’est les fonctionnaires de l’État, eux, ne prennent pas battu pour l’interdiction de l’importation du poutoujours en compte. let congelé au Cameroun et s’illustre ces derniers Mais il serait illusoire de penser que les ONG temps dans une campagne visant à promouvoir la ont les capacités, ainsi qu’on a voulu le faire croire « souveraineté alimentaire ». Incomprise au déà un moment, de se substituer à l’État pour drainer part, l’Acdic est aujourd’hui devenue le partenaire toute l’aide et prendre en charge le développement du gouvernement. du pays. Car, en effet, leur action est loin d’être suffisamment prégnante pour entraîner à grande Au commencement échelle des changements importants sur la qualité de vie des populations. Tout au plus peuvent-elles était la crise aider à accompagner ou à compléter l’action des Pour apprécier le rôle des ONG au Cameroun, il pouvoirs publics en concentrant leurs efforts pour faut en effet remonter à la crise économique des résorber les besoins primaires. années 80-90 qui a littéralement laminé le pouvoir Former, sensibiliser, organiser, mobiliser les pod’achat des populations et entamé les capacités d’inpulations, afin qu’elles puissent elles-mêmes se prentervention de l’État. Si, pour certains, l’État ne peut dre en charge, tel semble être le rôle que jouent au plus à lui tout seul résoudre les problèmes des popumieux les ONG. Une contribution finalement non lations, d’autres par contre vont plus loin, et croient pouvoir disqualifier carrément les institutions publinégligeable pour l’émancipation des populations.


PROFIL

NIGER Population (2010) : 15 878 271 hab. Densité : 10 habitants/km² Superficie : 1 267 000 km² Langue officielle : Français Capitale : Niamey Monnaie : Franc CFA

A

HISTOIRE

ncienne colonie française devenue indépendante en 1960, le Niger a été présidé durant ses quatorze premières années d’indépendance par Hamani Diori qui a instauré le système du parti unique. En 1974, il est victime d’un coup d’État mené par le lieutenant-colonel Seyni Kountché qui va diriger le pays avec un petit groupe de militaires jusqu’à sa mort en 1987. Son successeur, le colonel Ali Saibou, promulgue une nouvelle constitution et instaure un nouveau régime démocratique et multipartite au début des années 90. De nouveaux partis et mouvements civiques font ainsi leur apparition et une conférence nationale est organisée en juillet 1991. Elle permet la formation d’un gouvernement de transition qui se maintient jusqu’à la fondation des institutions de la Troisième république, en avril 1993, où Mahamane Ousmane est investi président après avoir été élu démocratiquement. Les résultats des élections législatives de 1995 poussent le président à nommer un gouvernement de cohabitation mené par son rival, Ibrahim Baré

Maïnassara; ce qui crée une paralysie gouvernementale qui aboutit à l’abandon de la Troisième République en 1996. Après avoir rédigé une nouvelle constitution qui établit la Quatrième République, Ibrahim Baré Maïnassara organise la même année des élections présidentielles d’où il sort vainqueur. Commence alors un climat de terreur dans le pays. Par exemple, face aux demandes des Touaregs qui réclament une plus grande autonomie et souhaitent bénéficier des retombées économiques des activités minières qui s’effectuent sur leur territoire, le gouvernement répond par les armes, via l’armée nationale. Le 9 avril 1999, Ibrahim Baré Maïnassara est assassiné dans un coup d’État mené par le commandant Daouda Malam Wanké qui établit un régime de transition avant les législatives et l’élection présidentielle remportée par Mamadou Tanja qui est réélu en décembre 2004. En 2009, grâce à un référendum constitutionnel (contesté dans tout le pays), il rallonge son mandat de trois ans qu’il ne finit pas, car le 18 février 2010, il est renversé par Salou Djibo, chef d’escadron de l’armée nigérienne.

Quelques chiffres en bref • Éducation (2003-2008) : Taux d’alphabétisation des adultes : 30 % Taux net de scolarisation à l’école primaire : 38 % • Santé (2006) : 0,03 de médecin pour 1000 habitants • Produit Intérieur Brut (PARITÉ DE POUVOIR d’ACHAT, 2009) : 10,09 milliards ($ US) • Environnement des Affaires (Doing Business 2010, classement effectué sur 183 économies) : Facilité de faire des affaires : 174e place (par rapport à 2009) Création d’entreprise : 157e (+4 par rapport à 2009) Protection des investisseurs : 154e (-3 par rapport à 2009)

46 AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010

Économie L’économie du Niger repose essentiellement sur l’agriculture qui représente 40 % du PIB et mobilise 91 % de la population active Il comprend une zone agro-pastorale au sud, suffisamment humide pour permettre une culture de céréale, du mil notamment, et une autre zone uniquement pastorale au nord. Mais le pays régulièrement touché par les pénuries alimentaires à cause de la sécheresse, a souvent besoin de l’aide internationale pour subvenir aux besoins de sa population. Le Niger possède pourtant d’importantes réserves d’uranium dans la région d’Arlit (dans le désert du Sahara au nord du pays) qui représentent 72 % des recettes liées à l’exportation, faisant de lui l’un des plus importants producteurs d’uranium au monde. Ses exportations, notamment vers la France, constituent une part importante de son revenu extérieur. Par ailleurs, les mines de charbon de la région de Tchirozerine, au nord du pays, sont les plus profondes du monde. Le Niger est également devenu un pays pétrolier qui entrera officiellement dans le cercle des pays producteurs de pétrole en 2012, date à laquelle va commencer l’exploitation de son pétrole. Cependant, le pays manque cruellement d’infrastructures de qualité et de masse. Ainsi, il n’existe aucune voie ferrée et on compte seulement deux aéroports internationaux à Niamey et à Agadez, mais ce dernier a été fermé à cause de la rébellion en cours actuellement. Le Niger s’est lui aussi doté d’un guichet unique dans sa capitale Niamey.


Population (2010) : 3 364 940 hab. Densité : 3 habitants/km² Superficie : 1 030 700 km² Langues officielles : Arabe, français Capitale : Nouakchott Monnaie : Ouguiya

L

Histoire

a Mauritanie est décrétée colonie française en 1920 avant d’être déclarée territoire d’outre-mer de l’union française en 1945. Elle devient officiellement autonome en 1958 avec la proclamation de la République islamique le 28 novembre, deux ans avant la déclaration d’indépendance nationale (28 novembre 1960) octroyée en vertu des accords franco-mauritaniens de restitution de souveraineté. Mokhtar Ould Daddah est le premier président de la nouvelle République islamique, membre fondateur de l’Organisation de l’Unité africaine. Il est déposé en 1978 par les militaires, à la suite du conflit du front Polisario avec le Maroc concernant le partage du Sahara occidental, conflit qui prend fin en 1979. Commence alors une série de putschs. En l’espace de six ans (1978-1984), le pays va

changer trois fois de président dont deux par coups d’État. C’est ainsi donc que Maaouiya Ould Sid’Ahmed Taya, chef d’état major des armées, accède au pouvoir le 12 décembre 1984. Il est lui-même destitué, le 3 août 2005, par Ely Ould Mohamed Valla qui va rester seulement deux ans à la tête de l’État avant d’être battu démocratiquement par Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi, premier civil à être élu démocratiquement depuis l’indépendance de la Mauritanie. Un vent d’espoir souffle sur le pays durant sa courte présidence, avec plus de liberté accordée à la presse et l’apparition des nouvelles organisations politiques. Il est à son tour victime le 6 août 2008, d’un coup d’État militaire mené par le général Mohamed Ould Abdel Aziz, toujours au pouvoir.

Quelques chiffres en bref • Éducation (2003-2008) : Taux d’alphabétisation des adultes : 56 % Taux net de scolarisation à l’école primaire : 57 % • Santé (2006) : 0,11 médecin pour 1000 habitants • Produit Intérieur Brut (PARITÉ DE POUVOIR DU POUVOIR, 2009) : 16,65 milliards ($ US) • Environnement des Affaires (Doing Business 2010, classement effectué sur 183 économies) : Facilité de faire des affaires : 161e place (-5 par rapport à 2009) Création d’entreprise : 149e place (-9 par rapport à 2009) Protection des investisseurs : 147e place (-4 par rapport à 2009)

Économie Les secteurs miniers et de pêche sont les moteurs essentiels de la croissance de la Mauritanie. Ce pays est une des régions les plus poissonneuses du monde grâce à un écosystème littoral exceptionnel. Mais la pêche est surtout exploitée par des sociétés étrangères. L’élevage, principalement de dromadaires de boucherie et de bœufs africains, constitue la base de quelques grandes fortunes du pays. Pratiqué par les nomades depuis le XVIe siècle, il n’est pratiquement pas exporté (il représente seulement moins de 2 % de l’exportation total). La Mauritanie est également le 13e producteur mondial de fer qui constitue près de 40 % de ses exportations. Le total du fer exploité correspond à 10,4 millions de tonnes par an. Il s’agit donc de sa plus importante source de revenus (94,9 %). Par ailleurs, le pays est devenu producteur de pétrole début 2006 suite à la découverte d’un gisement de pétrole dans l’océan Atlantique. Sa production était alors estimée à de 75 000 barils par jour. Elle est descendue depuis à 15 000 barils. Le port en eau profonde construit en 1986 aux environs de la capitale de Nouakchott, constitue la principale infrastructure du pays qui s’est doté d’un guichet unique en 2009.

AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010 47

PROFIL

MAURITANIE


PROFIL

SÉNÉGAL Population (2010) : 14 086 103 hab. Densité : 66,58 habitants/km² Superficie : 196 723 km² Langue officielle : Français Capitale : Dakar Monnaie : Franc CFA

L

HISTOIRE

La conquête coloniale du Sénégal commence dès la découverte de ces terres en 1442 par les Portugais qui se lancent alors dans la traite des Noirs. Mais très vite, ils vont faire face à la concurrence des négriers britanniques, français et hollandais à travers le Commerce triangulaire. En 1959, le Sénégal fusionne avec le Soudan français, l’actuel Mali, pour former la Fédération du Mali, qui devient complètement indépendante en 1960. Rapidement, le Sénégal se retire de la fédération du Mali et proclame son indépendance la même année. Le pays va, plusieurs années plus tard, en 1982, s’unir à la Gambie pour former la Confédération de Sénégambie qui n’a jamais été mise en application. Elle est finalement dissoute en 1989. Par ailleurs, depuis 1982, des affrontements ont lieu de manière irrégulière entre les séparatistes installés dans le sud de la Casamance et les forces gouvernementales. Après plusieurs tentatives infructueuses, un nouvel accord est finalement signé le 30 décembre 2004. Excepté ce conflit, le Sénégal est l’un des pays les

plus stables du continent africain car il n’y a jamais eu de coup d’État. À son indépendance et sous la présidence de Léopold Sédar Senghor, leader charismatique et poète célèbre, le pays adopte le modèle politique français de 1958. En 1982, il quitte le pouvoir et est remplacé par son Premier ministre, Abdou Diouf, qui perd l’élection présidentielle de 2000 au profit d’Abdoulaye Wade, réélu en 2007 et toujours à la tête du pays.

Économie Le Sénégal possède la troisième économie de la sous-région ouest-africaine après le Nigéria et la Côte d’Ivoire et fait partie des pays africains les plus industrialisés. Contrairement aux autres pays du continent africain, il est très pauvre en ressources naturelles. Ses recettes proviennent essentiellement de la pêche qui constitue la principale source de devises du pays. La réduction de la taxe de douane a dopé l’exportation, au détriment cependant, de l’écosystème des fonds marins. Le tourisme développé surtout sur le littoral avec de

Quelques chiffres en bref • Éducation (2003-2008) : Taux d’alphabétisation des adultes : 43 % Taux net de scolarisation à l’école primaire : 58 % • Santé (2006) : 0,06 médecin pour 1000 habitants • Produit Intérieur Brut (PARITÉ DE POUVOIR D’ACHAT, 2009) : 22,37 milliards ($ US) • Environnement des Affaires (Doing Business 2010, classement effectué sur 183 économies) : Facilité de faire des affaires : 157e place (-5 par rapport à 2009) Création d’entreprise : 102e place (-8 par rapport à 2009) Protection des investisseurs: 165e place (-1 par rapport à 2009)

48 AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010

grands complexes hôteliers internationaux et des hôtels locaux de grande qualité, est également un élément important de l’économie sénégalaise. Le secteur agricole emploie, quant à lui, 70 % de la population. Mais le manque de pluie et la crise du secteur de l’arachide, principale culture de rente du pays, ont réduit la contribution de l’agriculture à moins de 20 % du PIB. Les plus importantes productions agricoles du pays sont les céréales, le riz de la Casamance ainsi que les fruits et légumes tels que les tomates ou légumes verts. Par ailleurs, les transferts financiers venus de la diaspora sénégalaise en Europe et aux États-Unis, représentent aujourd’hui une rente non négligeable. Pour ce qui est des infrastructures, l’aéroport international de Dakar-Léopold Sédar Senghor est le principal point d’entrée aérien au Sénégal. Le réseau routier est bon à l’ouest, mais se dégrade de plus en plus en allant profondément dans le pays. Le réseau de transport est bien développé dans les grandes villes avec les taxis, bus ou les « cars rapides » plus ou moins en bon état. En outre, la gare de Dakar est la plus ancienne du pays. Elle n’offre plus qu’une seule destination, Bamako (la capitale malienne), la liaison avec Saint-Louis étant désormais réservée au transport de marchandises. Le transport maritime est constitué soit de chaloupes pour rejoindre l’île de Gorée à partir de Dakar, soit de bateaux pour des croisières sur le fleuve Sénégal, soit de gros bateaux de transport de marchandises qui bénéficient de l’un des trois ports en eau profonde de l’Afrique et d’un terminal pour les containers. L’État sénégalais dispose par ailleurs d’un guichet unique pour les investissements à Dakar.


Population (2010) : 20 563 556 hab. Densité : 30,73 habitants/km² Superficie : 587 041 km² Langues officielles : Français, malgache, anglais Capitale : Antananarivo Monnaie : Ariary

A

HISTOIRE

ncienne colonie portugaise et française, Madagascar prend le statut de territoire français d’outremer (TOM) en 1946 et devient une république semi-autonome en 1958. Philibert Tsiranana, chef du Parti social démocrate, accède alors à la présidence. C’est le 26 juin 1960 que le pays devient indépendant. La République malgache décide dès lors d’instaurer une politique de bilinguisme : le français et le malgache deviennent les deux langues officielles. En mai 1972, une révolution survient alors que Tsiranana, pourtant réélu avec 99,72 % des suffrages en janvier de cette année-là, cédera aux grèves étudiantes et aux vagues de violence. Il remet les pleins pouvoirs au général Gabriel Ramanantsoa. Le sentiment national est encore renforcé en 1975 avec l’élection de Didier Ratsiraka à la présidence. Celui-ci impose une politique de « malgachisation », qui donnera lieu à la suppression de l’enseignement en français et à la nationalisation des principales entreprises. En

1991, l’opposition au président Ratsiraka augmente et des manifestations populaires se multiplient. Puis, une nouvelle constitution est adoptée en 1992. Albert Zafy, candidat de l’opposition, occupe la présidence, mais Didier Ratsiraka est réélu aux élections de 1996. Aux élections de 2001, le candidat d’opposition, Marc Ravalomanana, se proclame vainqueur, et forme son propre gouvernement dans la capitale malgache, Antananarivo, pendant que Ratsiraka fait de même dans la ville de Toamasina. Finalement, Ratsiraka abandonne et quitte le pays. Ravalomanana devient président en mai 2002, est réélu en 2006, mais est évincé du pouvoir par l’armée en mars 2009. Le maire de la capitale, Andry Rajoelina, nomme alors un gouvernement qui ne tiendra pas en place. Cependant, sous la pression de la communauté internationale qui refuse de valider ce qui est somme toute un coup d’État, le pays tente de trouver une sortie de crise. Rajoelina occupe aujourd’hui la présidence de la Haute autorité de la Transition.

Quelques chiffres en bref • Éducation (2003-2008) : Taux d’alphabétisation des adultes : 71 % Taux net de scolarisation à l’école primaire : 76 % • Santé (2006) : 0,29 médecin pour 1000 habitants • Produit Intérieur Brut (Parité dE pouvoir d’achat, 2009) : 20,15 milliards ($ US) • Environnement des Affaires (Doing Business 2010, classement effectué sur 183 économies) : Facilité de faire des affaires : 134e place (+ 10 par rapport à 2009) Création d’entreprise : 12e place (+ 48 par rapport à 2009) Protection des investisseurs : 57e place (-4 par rapport à 2009)

Économie Pays en voie de développement, Madagascar possède une économie qui repose essentiellement sur l’agriculture. Ainsi, les cultures vivrières (riz, manioc), l’élevage bovin extensif et la pêche sont les bases de l’activité nationale. Premier producteur mondial de vanille (environ 60 %), Madagascar produit aussi du café, du girofle et de la canne à sucre, qui composent les principales exportations du pays. L’exploitation minière, notamment du cobalt et du nickel, fait aussi partie des ressources de l’île. L’industrie du textile malgache est également un secteur d’activité performant, mais l’éviction du pays de l’African Growth and Opportunity Act (AGOA) en décembre 2009 en guise de sanction de la part des États-Unis a eu sur cette industrie des répercussions dramatiques. Ne bénéficiant plus de cette loi qui facilite l’accès au marché américain à la majorité des pays africains, bon nombre d’entreprises installées dans la zone franche ont dû fermer leurs portes. Du côté des infrastructures, Madagascar compte plusieurs aéroports, dont cinq internationaux. L’île compte par ailleurs 17 ports, dont cinq internationaux. Le pays dispose d’un réseau ferré de 895 km, constitué du réseau nord AntsirabeAntananarivo-Toamasina, et du réseau sud Fianarantsoa-Manakara. Le pays a adopté comme secteurs prioritaires de financement pour la période 2000-2007 les infrastructures routières et le développement rural, et le bilan global est positif. Le réseau routier national s’est nettement amélioré, notamment celui reliant la capitale aux quatre principaux ports du pays et les autres routes nationales, desservant les régions productrices de cultures à l’exportation. AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010 49

PROFIL

MADAGASCAR


PROFIL

SOMALIE Population (2010) : 9 832 017 hab. Densité : 8,51 habitants/km² Superficie : 637 657 km² Langues officielles : Somali, arabe Capitale : Mogadiscio Monnaie : Shilling somalien

D

urant les années 1880 et 1890, la France, la Grande-Bretagne et l’Italie se battent pour acquérir le territoire de la Somalie qui finit aux mains des Britanniques et des Italiens. Le territoire est alors divisé en deux, avec au Sud, les colonies italiennes (Somalia) et britanniques au Nord (Somaliland). En 1960, ces deux zones réunies proclament leur indépendance et deviennent officiellement la République de Somalie. De 1960 à 1969, le premier président somalien, Aden Abdullah Osman Daar, ainsi que son successeur, Abdirashid Ali Shermarke, tentent d’instaurer un gouvernement démocratique, mais sans réel succès à cause des luttes tribales entre le Nord et le Sud et des relations tendues avec les pays limitrophes. En 1969, le général Siad Barre arrive au pouvoir par un coup d’État. En 1977, il tente en vain de prendre le contrôle de l’Ogaden, un territoire éthiopien. Entre 1988 et 1990, Siad Barre doit faire face à un climat de mécontentement généralisé qui le contraint à abandonner le

HISTOIRE pouvoir en 1991. Ce qui entraîne le pays dans une guerre civile entre les partisans du président intérimaire Ali Mahdi Mohamed et ceux du Général Mohamed Farah Aidid. L’ONU intervient avec l’envoi à Mogadiscio, en 1992, des Casques Bleus qui subissent de lourdes pertes au point que des pays comme les États-Unis viennent à leur secours avec l’opération « Restore Hope » (Rendre l’espoir) qui est un véritable fiasco (19 soldats américains tués lors de la bataille de Mogadiscio en 1993). En 1997, la partie nord-ouest du pays s’autoproclame République du Somaliland avec comme président Mohamed Ibrahim Egal qui meurt en 2002, tandis que le nord-est se déclare autonome en 1998 sous le nom de Puntland. En 2000, Abdiqassim Salad Hassan est élu président par le Parlement de transition en exil. Le même parlement élit un nouveau président en 2004, Yusuf Ahmed, président du Puntland. Les institutions somaliennes qui siègent au Kenya par mesure de sécurité n’ont aucun contrôle sur le pays en dehors de certains quartiers de

Quelques chiffres en bref • Éducation : Taux d’alphabétisation des adultes : pas de données * Taux net de scolarisation à l’école primaire : pas de données • Santé (2006) : 0,04 médecin pour 1000 habitants • Produit Intérieur Brut (PARITÉ DE POUVOIR D’ACHAT, 2009) : 5,665 milliards ($ US) • Environnement des Affaires (Doing Business 2010, classement effectué sur 183 économies) : Facilité de faire des affaires: pas de données Création d’entreprise : pas de données Protection des investisseurs : pas de données *Absence de certains chiffres du fait de la guerre civile 50 AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010

la capitale et leur autorité n’y est pas reconnue. En 2008, le président Abdullahi Yusuf Ahmed démissionne en regrettant de ne pas avoir réussi à mettre un terme à ce conflit. Il est remplacé par le cheikh Sharif Ahmed, ancien dirigeant de l’Union des tribunaux islamiques.

Économie La guerre civile a énormément entravé le développement économique du pays. L’économie somalienne repose principalement sur l’agriculture qui emploie 75 % de la population active et sur l’exploitation des mines de sel. Elle est également assistée par l’aide internationale et les rentrées de devises de la diaspora (rentrées estimées évaluées à plus de 60 % du PIB en 2007). Avant les conflits, les principales cultures étaient le sorgho, le maïs et le sésame. La canne à sucre et les bananes, cultivées dans les vallées du Sud, sont destinées à l’exportation. Les principaux produits de la sylviculture de Somalie sont l’encens et la myrrhe, qui sont aussi exportés. Par tradition, l’élevage du bétail représente l’activité essentielle, même si le cheptel a été réduit de près d’un tiers pendant la guerre civile. Par ailleurs, presque aucune infrastructure du pays n’a survécu à la guerre civile. Il n’existe ainsi aucun opérateur de télécommunications et le réseau téléphonique a été totalement détruit pendant la guerre.



ÉNERGÉTIQUE AFRICAIN

Le défi

Selon le rapport de l’organisme américain Population Reference Bureau (PRB), publié en partenariat avec l’Agence d’aide du gouvernement américain (USAID), la population africaine qui a déjà atteint un milliard, devrait doubler d’ici 2050 si sa croissance annuelle de 24 millions de personnes se poursuit. Le rapport prévoit également que le nombre de jeunes sur le continent africain pourrait atteindre 349 millions, soit 29 % de la jeunesse mondiale en 2050. Par ailleurs, une étude réalisée en avril 2007 par le Développepent des études économiques de la Société Générale, démontre que la population africaine représentera 22 % de la population mondiale active. En effet, la part du continent dans la population mondiale en âge de travailler évoluera de 12,1 % en 2005 à 17 % en 2030, pour atteindre 22,1 % en 2050, grâce notamment à cette croissance rapide de la jeunesse africaine. Malgré une petite baisse entre 2030 et 2050, cette croissance de la population africaine, et de sa population active en particulier, restera assez élevée en comparaison avec les autres régions du monde. Le rythme de cette croissance ne sera naturellement pas le même en Afrique subsaharienne et en Afrique du Nord, les deux zones étant à des stades différents de leur transition démographique. (Sources : Les Afriques, PRB et USAID)

IMPACT

L’Afrique à l’horizon de 2050

EXPLOSION AFRICAINE de la POPULATION

dans le contexte mondial

Du fait de la croissance rapide et continue de sa population, l’Afrique va multiplier sa consommation d’énergie par trois en 2050, constate l’étude sur L’Énergie en Afrique à l’horizon 2050, menée par l’Agence Française de Développement en collaboration avec la Banque africaine de développement (BAD). Elle rappelle que le continent utilise actuellement moins de 7 % de sa capacité énergétique hydroélectrique, ce qui lui donne beaucoup de possibilités pour s’engager dans d’autres formes d’énergies renouvelables non exploitées comme le solaire, l’énergie éolienne et l’énergie de la biomasse abondante dans les zones les plus arrosées. Mais la production de cette dernière risque d’être réduite dans ces régions à cause du changement climatique. (Source : Agence Française de Développement et BAD)

2050 en

du

CHANGEMENT

CLIMATIQUE

sur l’agriculture et la sécurité alimentaire en

AFRIQUE

Selon un rapport de l’Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture (FAO) paru en septembre 2009, le changement climatique représente une grave menace pour l’agriculture et la sécurité alimentaire en Afrique à l’horizon 2050. Ce continent pourrait en effet connaître un déclin de 9 à 21 % de sa productivité agricole potentielle totale à cause du réchauffement de la planète qui, selon ce document, est susceptible d’affecter les systèmes agricoles et forestiers. À court terme, la fréquence de phénomènes extrêmes tels que les sécheresses, les vagues de chaleur, les inondations et les violentes tempêtes devrait augmenter, ce qui aurait des répercussions sur la sécurité alimentaire. Comme par exemple, altérer les conditions de sécurité sanitaire des aliments en intensifiant la pression exercée par les maladies à transmission vectorielle et les maladies d’origine hydrique et alimentaire. Il pourrait en résulter un déclin considérable de la productivité du secteur agricole, y compris de la main-d’œuvre, qui se traduirait par une augmentation de la dépendance de nombreux pays africains vis-à-vis des importations alimentaires, de la pauvreté et des taux de mortalité. L’impact du changement climatique sur l’agriculture africaine sera d’autant plus grave que la région accuse déjà les taux les plus élevés de pauvreté et d’insécurité alimentaire, et affiche la plus forte contraction des revenus agricoles. (Source : FAO) 52 AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010

VERS

L’ÉRADICATION DU SIDA? L’Organisation mondiale de santé (OMS) a fait le pari d’éradiquer le virus de VIH d’ici 2050. Un pari qui paraît presque comme une mission impossible en Afrique, continent le plus touché par cette épidémie. Soixante-trois pourcent de malades au niveau mondial sont en effet originaires d’Afrique ainsi que 65 % de décès dus au Sida. Le scénario de l’institution onusienne se base sur la stratégie du « Test and treat » (Dépister et traiter), plébiscitée par tous les grands acteurs de la lutte contre le sida. Celle-ci consiste à soumettre annuellement tous les volontaires à un test de détection du virus, suivi d’une mise sous traitement immédiate pour les personnes contrôlées comme séropositives. Cette stratégie se base sur de nombreuses publications qui démontrent que le risque de transmettre le VIH est réduit chez les personnes suivant un traitement trithérapique efficace. Une première avancée a d’ores et déjà été faite dans le sens de ces ambitieux objectifs malgré les réticences de plusieurs associations de lutte contre le sida. Ainsi, l’OMS prévoit une mise en place des traitements antirétroviraux de façon plus précoce avec des médicaments « simplifiés et moins toxiques ». Ce qui permettrait d’augmenter de 49 % le nombre de personnes traitées et de faire baisser le nombre des décès de 20 % d’ici à 2015 à l’échelle mondiale. Encore faudrait-il que les politiciens suivent cette stratégie de l’OMS. Et pour cela, il faudrait qu’ils prennent conscience que cette épidémie ne s’en prend pas seulement aux générations actuelles; elle met également en péril l’avenir de l’Afrique, en fragilisant son économie et ses sociétés, souvent de façon insidieuse. (Source : OMS)


LA RÉVOLUTION PAR LA

CONFÉRENCE NATIONALE

Depuis 1974, le Bénin vivait sous le régime marxiste-léniniste imposé par le général Mathieu Kérékou. Un regroupement de près de 500 représentants de toutes les couches sociales allait toutefois renverser la vapeur. À la faveur d’une Conférence nationale dite « des forces vives de la nation » tenue du 19 au 28 février 1990, ils vont mettre fin au parti unique et instaurer les bases de nouvelles institutions crédibles et respectueuses des droits de l’homme. Ils s’entendent pour démettre l’ancien gouver­ nement, dissoudre l’Assemblée nationale et créer un poste de premier ministre. Ils se donnent un an pour élaborer les fondations de la Constitution qui garantissent les libertés d’expression, d’opinion et de presse. Ils s’engagent aussi à organiser des élections libres et démocratiques et faire passer un discours de lutte contre la torture et la violation des droits de l’homme. Le 26 mars 1990, les écoles rouvrent après plus d’un an de fermeture et les fonctionnaires en grève réintégrent le travail. Le 4 avril 1991, le général Kérékou se soumet au verdict des élections et cède sa place à Nicéphore Soglo. Le Bénin devient ainsi un modèle démocratique et plusieurs pays comme le Togo et le Congo (ex-Zaïre) lui emboîteront le pas.

SÉNÉGAL PRÉSIDENT

PREMIER AFRICAIN DÉMISSIONNAIRE

Élu le 5 septembre 1960, peu de temps après l’indépendance du Sénégal, Léopold Sédar Senghor est le premier président africain à abandonner volontairement le pouvoir en 1980 pour vivre une retraite paisible en France. Une grande première en Afrique francophone. À la fois homme politique, professeur et poète, il est né le 9 octobre 1906 dans la ville de Joal, au Sénégal. En 1945, il est élu député du Sénégal et publie son premier recueil Chants d’ombre. Dix ans plus tard, il occupe le poste de secrétaire d’État à la présidence du conseil, puis devient maire de Thiais en 1956, et enfin ministre-conseiller du gouvernement de la République française en 1959. Il sera également le premier Africain à siéger à l’Académie française en 1983. Sa devise d’homme politique « Assimiler sans s’être laissé assimiler » valait également pour son art poétique, parfois contesté, car, comme il aimait à le répéter, cet art était « trop blanc pour les Africains et trop noir pour les Blancs ». Symbole de collaboration entre la France et ses anciennes colonies pour ses partisans ou de néo-colonialisme aux yeux de ses détracteurs, Senghor s’éteint en France le 20 décembre 2001.

GABON PHARAONIQUE L’ŒUVRE DE BONGO

Le 30 décembre 1986, le président français Jacques Chirac, le président congolais Denis Sassou Nguesso et bien d’autres personnalités politiques montent à bord du premier Transgabonais. La ligne de chemin de fer de 650 km relie Owendo, port minéralier situé à proximité de la capitale Libreville, à Franceville, située sur le fleuve Ogooué. L’oeuvre qualifiée par plusieurs de pharaonique est née de la volonté du président du Gabon Omar Bongo Ondimba qui a dû convaincre les bailleurs de fonds de contribuer à la concrétisation de la ligne qui passait en pleine jungle. Il a eu pour effet positif de désenclaver le pays, mal desservi par le réseau routier, avec seulement 900 km de routes bitumées, et de favoriser l’exploitation de ses richesses naturelles. Le coût total des ambitieux travaux s’est élevé à l’époque à 1 500 milliards de francs CFA, soit environ 3 milliards $.

NIGÉRIA PRIX NOBEL PREMIER DE LITTÉRATURE

Grand écrivain nigérian, Wole Soyinka est né à Abeokuta le 13 juillet 1934. Son œuvre passe à l’histoire alors qu’il sera le premier auteur africain et le premier auteur noir à recevoir le prix Nobel de littérature en 1986. Après avoir fait des études aux universités d’Ibadan au Nigeria et de Leeds, en Angleterre, il fonde plusieurs troupes théâtrales de retour dans son pays natal. Il est l’initiateur de l’association « The Pyrate » qu’il fonde en 1952 à l’université d’Ibadan afin de combattre la mentalité coloniale. En 1962, il s’oppose au célèbre concept de « négritude » de l’homme politique et poète Léopold Sédar Senghor. Il sera emprisonné au Nigeria entre 1967 et 1969 pour avoir soutenu le mouvement d’indépendance du Biafra, un État sécessionniste de 1967 à 1970 situé dans la partie Sud-Est du Nigeria. Après sa libération, il reste au Nigeria pour enseigner aux départements d’art dramatique d’Ife et d’Ibadan. Contraint à l’exil en 1994 après avoir été condamné à mort par le gouvernement du général Sani Abacha, il ne rentrera au pays qu’après la mort du dictateur en 1998. Son œuvre comprend treize ouvrages dont Le lion et la perle (1959, La mort de l’écuyer et du roi (2002) et Il te faut partir à l’aube (2007).

AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010 53

DIGNES DE MENTION

BÉNIN


Le saviez-vous?

73 COUPS D’ÉTAT Le NigEria Top 10 en Afrique depuis 1960

Depuis les années 60, le continent africain a connu pas moins de 73 coups d’État dont la grande majorité a eu lieu durant les années 1970. Après le non-respect des nombreuses promesses faites au lendemain des indépendances et l’instabilité politique dans certains pays, les militaires ont eu tendance à prendre le pouvoir par la force. On dénombre par exemple 12 coups d’État entre 1963 et 1969, le premier ayant lieu au Togo avec Emmanuel Bodjollé qui a renversé Sylvanius Olympio, le dirigeant de la lutte pour la conquête de l’indépendance nationale et premier président du Togo. Ce chiffre va doubler durant la décennie suivante.

dans le des pays les plus peuplés au monde Le Nigeria est le seul pays africain à faire partie du Top 10 des pays les plus peuplés au monde avec une population estimée à 149 229 090 d’habitants en 2010 par CIA (Central Intelligence Agency). Ce qui fait de ce pays, l’État le plus peuplé d’Afrique. Il compte pour un sixième de la poplation du continent (1 milliard) sur à peine un trentième de sa surface (environ 3 %). Le pays compte au moins 24 villes peuplées de plus de 100 000 habitants alors même qu’une large majorité de la population (plus de 75 %) vit dans les zones rurales.

Les langues africaines

les plus parlées

Éthiopie

seul pays africain à avoir échappé à la colonisation totale et exclusive Née il y a près de 3 000 ans, l’Éthiopie est le seul État africain qui n’a pas connu de colonisation totale et exclusive de la part des Occidentaux. Ce pays, dont l’histoire débute vers le VIIIe siècle, a connu plusieurs régimes (Royaume D’mt, d’Aksoum, l’Empire d’Éthiopie, le gouvernement du Derg, la République populaire démocratique d’Éthiopie et l’actuelle République fédérale démocratique d’Éthiopie) qui ont toujours férocement combattu toute forme d’invasion coloniale. Même si l’Italie a presque réussi pendant quelques années. Après une guerre contre l’Italie fasciste de Mussolini qui a débouché sur une défaite éthiopienne, le pays a été occupé partiellement de 1936 à 1941, année où l’État éthiopien réussit grâce à une résistance nationale très bien organisée et avec l’aide des troupes alliées, à chasser les Italiens. L’Éthiopie est membre de la Société des Nations depuis 1923, ce qui fait de lui le premier pays africain à y avoir adhéré.

Avec une population d’un milliard d’habitants, l’Afrique compte près de 2000 langues vivantes, soit environ 1/3 des langues du monde. Contrairement aux idées reçues, les langues africaines traditionnelles, en dehors des langues officielles héritées des colons, occupent une place importante sur le continent. Le haoussa, les langues swahilies, le lingala, le peul, le wolof ainsi que le dioula sont les six langues les plus parlées en Afrique avec près de 160 millions de locuteurs. Ainsi, les langues swahilies sont parlées dans dix pays africains (la Tanzanie, le Kenya, l’Ouganda, le Rwanda, le Burundi, la République Démocratique du Congo, la Somalie, les Comores, le Mozambique et le Malawi). Le haoussa, considéré comme une langue véhiculaire de l’Afrique de l’Ouest et de l’Afrique centrale, est majoritairement parlée dans les grandes villes commerciales comme Dakar, Abidjan, Lomé, Cotonou, Ouagadougou, Bamako, Conakry, Bangui, etc. et diffusée dans les radios du monde comme Voice of America (VOA), BBC en Grande-Bretagne et RFI en France. Le peul fait également partie d’une des langues les plus parlées (une vingtaine d’États d’Afrique occidentale et centrale, des rives du Sénégal à celles du Nil) par les ethnies peules, peuple nomade.

1255, rue University, bureau 401 Montréal (Québec) Canada H3B 3B6 Tél.: (514) 393-8059, Fax :(514) 393-9024 E-mail : info@afriqueexpansion.com www.afriqueexpansion.com Directeur de la Rédaction : Gerba Malam Rédacteur en chef : Didier Oti Directrice générale : Amina Gerba Rédaction Gerba Malam Didier Oti Marie-Claude Fafard Claude Gervais Vitraulle Mboungou Correspondants France : États-Unis : Cameroun : Congo : Gabon : Côte d’Ivoire: Afrique du Sud :

Isaac Ebwélé Étienne de Tayo Aziza Albou Traoré Jean-Marie Watonsi Marc Omboui Badjang ba Nken Parfait N. Siki Thierry Sylvane Noungou Antoine Lawson Alexis Koumba Jean Samuel Kondo Amadou Touré

AFRIQUE EXPANSION MAGAZINE est édité par

GERAM COMMUNICATIONS INC

Président, Directeur de la publication Gerba Malam Vice-Présidente, Marketing et Ventes Amina Gerba Marketing et Développement des affaires Fernando Abad Abonnements / Diffusion : Habiba Nouhou Graphisme et illustration Gladiola Castro Impression Beloin Graphique Administrateur Web Khadim Ndiaye * AFRIQUE EXPANSION MAGAZINE Dépôt légal Bibliothèque nationale du Québec, 2010 Bibliothèque nationale du Canada, 2010 ISSN 1488-0504 Postes Canada Convention no. 40033111 AFRIQUE EXPANSION MAGAZINE est indexé dans le CANADIAN ADVERTISING RATES AND DATA

CARD

Tous droits de reproduction réservés pour Reproduction interdite de tous articles sauf accord écrit de la Direction. 54 AFRIQUE EXPANSION Magazine HORS-SÉRIE 2010




Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.