Cap sur les SUI Sailing Awards !
SailGP, préparation de l’America’s Cup, Route du Rhum, Bol d’Or Mirabaud, TF35, olympisme, les grands sujets de la voile helvétique se sont égrainés au fil des mois dans Skippers 2023 fait figure d’excellent millésime pour nos sportifs. À cet égard, la couverture de ce numéro rend hommage à la performance de Maud Jayet, récemment auréolée du titre de vicechampionne du monde en ILCA 6 (anciennement Laser Radial). Peu médiatisée, la voile olympique est pourtant l’un des formats de régate les plus exigeants et nous tenions à mettre en lumière cet exploit inédit. Les titres de champion du monde et d’Europe ont été nombreux cette saison : en GC32, Surprise, J70, Nacra 15, ou encore en kitefoil. Les projets des différentes écuries sont tout aussi haletants : Alinghi Red Bull Racing, SailGP Team Switzerland, trois campagnes en vue du Vendée Globe, une myriade de projets Mini et bien sûr le Rösti Sailing Team en passe de conclure de la plus belle des manières son aventure avec la course impeccable de Simon Koster sur la Route du Rhum. Tout cela démontre le potentiel, le dynamisme et la créativité de la Suisse en tant que nation vélique. Le jury des SUI Sailing Awards a eu la tâche compliquée de trancher et désigner les nominés qui vous sont présentés en page 76. Gageons que le public, dont le vote compte pour 30 % de la note finale, aura également fort à faire pour désigner les marins des années 2021-2022. Dès à présent, rendez-vous sur skippers.ch pour voter et contribuer à couronner nos marins, nos équipes et nos projets. La communauté nautique helvétique compte sur votre soutien !
Quentin Mayerat Rédacteur en chef
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La Sardaigne et ses îles 1’000 raisons d’y revenir
Texte ) Quentin Mayerat
Photos ) Sébastien Aubord & Louis Taurel
Située au nord-est de la Sardaigne, Olbia est un véritable hub de la croisière. Proximité avec l’aéroport, infrastructures portuaires modernes, commerces et vastes flottes de charter lui confèrent une place de choix sur la Costa Smeralda, ou littéralement côte d’émeraude en référence à ses criques enchanteresses. Quand il s’agit d’y programmer une navigation, rien n’est simple. Nous avons l’embarras du choix ! Partir au sud pour longer les falaises de Dorgali ? Cap au nord pour se perdre dans le dédale insulaire de la Maddalena ? Ou forcer la marche pour s’élancer vers la Corse ? Nous prenons possession de notre bateau à la base Dream Yacht Charter d’Olbia où s’organisent
chaque semaine les traditionnels chassés-croisés de la location. Après le briefing sécurité-météo, il est déjà 17 h. Nous sommes au mois d’octobre et le soleil devrait bientôt nous fausser compagnie. Pas question de passer une nuit au port, nous larguons les amarres et nous nous empressons d’élire notre premier mouillage du voyage.
Au royaume d’Ubu
En Sardaigne, difficile d’être déçu. La moindre plage est charmante, mais certaines sont carrément spectaculaires. Notre première destination, choisie à la hâte, se nomme Spiaggia Le Saline. La crique, protégée par le capo Figari et le capo Ceraso, reste complètement plate la plupart du temps. On y trouve une grande plage de sable fin, très populaire à Olbia. Vu la saison, nous constatons avec bonheur que nous ne croiserons ni foule de touristes, ni hordes de bateaux sur notre trajet. En effet, les mouillages sardes ont la réputation d’être quelque
On a beau y revenir, la Sardaigne réserve à chaque croisière son lot de merveilles.
Rendez-vous à Olbia au mois d’octobre pour une escapade d’une semaine au gré du vent.
peu compacts en haute saison. Seulement quelques minutes au moteur suffisent après la sortie du chenal pour trouver Spiaggia Le Saline. Déjà se dessine dans le fond de cette carte postale l’impressionnante île Tavolara dont le tour complet à la voile s’imposera le lendemain. Peuplée d’une poignée d’habitants et bordée de falaises vertigineuses, cette île possède une histoire cocasse. Elle est en fait le théâtre d’une querelle de territoire depuis le XIXe siècle, entre l’Italie et les descendants de la famille Bertoleoni, premiers habitants de l’île. Lors d’une rencontre en 1836, le roi Charles-Albert de Sardaigne aurait accordé au berger Giuseppe Bertoleoni le titre de roi de
Tavolara. Lui et ses descendants ont toujours revendiqué leur souveraineté sur ce bout de caillou bien que l’État italien ne l’entende pas ainsi. Le gouvernement a d’ailleurs cédé dans les années 1960 l’un de ses spectaculaires promontoires rocheux à l’Otan qui y a fermement ancré une antenne radio, au nez et à la barbe du souverain !
Cap sur Tahiti
Le contournement de la Tavolara occupe une bonne partie de notre première journée de navigation toutes voiles dehors. Nous passerons la nuit à Spiagia delle Formiche, non loin de Porto Taverna. On apprécie la côte granitique pittoresque, mais malheureusement, la vie sous-marine y est à peu près morte. La faute au tourisme ?
Alors qu’un régime de faible brise se dessine à l’horizon, notre unique option est de nous diriger vers les fameuses Bouches de Bonifacio qui
L’ENTRÉE DANS LE PORT DE BONIFACIO EST TOUJOURS SPECTACULAIRE.
constituent le détroit entre la Corse et la Sardaigne et qui ont l’avantage d’offrir un vent régulier quasiment toute l’année. Cap au nord donc : le parc naturel de la Maddalena nous tend les bras. La cala Coticcio, au nord-est de Caprera (île située sur la bordure est de l’archipel), est surnommée la « petite Tahiti ». Ici, le sable d’un blanc immaculé et l’eau turquoise donnent la réplique à des rochers blancs aux formes saugrenues. Hors saison, cet éden miniature vous appartiendra, mais l’été, les vacanciers ne renonceront pas devant les 45 minutes de marche qui les séparent de la route. Eux aussi viendront préempter leur part de sable blanc, jusqu’au dernier centimètre carré. Attention, avant de pénétrer dans la zone du parc naturel, n’oubliez pas de vous acquitter d’une taxe d’entrée directement sur le site de l’institution… Un contrôle est vite arrivé. Quitter Caprera sans partir découvrir ses petits sommets sauvages à pied serait dommage. On y trouve notamment le Memorial Garibaldi sur les terres de ce qui fut l’ultime demeure de Giuseppe Garibaldi (1807-1882), l’un des pères de la nation italienne.
Naviguer dans la Maddalena est une entreprise ludique. On y slalome à travers une myriade d’îles et de rochers. Attention donc au balisage et aux excès de confiance, plus d’un marin aguerri y a égratigné son lest ! À une grosse vingtaine de milles de Caprera se trouvent les majestueuses falaises blanches de Bonifacio.
Indémodable
Sur notre route, les îles Lavezzi s’imposent comme l’une des merveilles de la Corse. Reflets
bleus, verts, rochers de granite et une riche vie sous-marine érigent cet endroit en zone d’intérêt majeure. Il s’agit de l’une des zones les plus ventées du détroit qui sépare la Corse de la Sardaigne, car le passage entre les deux plus grandes îles, Lavezzo et Cavallo, offre un puissant venturi. Par vent d’ouest ou d’est, il existe plusieurs mouillages offrant une bonne protection, mais encore une fois, attention à la réglementation, car cet archipel est protégé. Prenez à nouveau garde aux courants, aux cailloux et hauts-fonds éparpillés, pour le bien de votre navire !
L’entrée dans le port de Bonifacio est toujours un événement. Son imprenable citadelle et ses imposantes falaises de calcaire blanc dominent de façon spectaculaire l’entrée dans le port. Au cours des siècles, la mer a considérablement rongé le mur de calcaire sur lequel repose la vieille ville, si bien que cette dernière paraît comme en suspension au-dessus des flots. Pour prendre toute la mesure de cette géographie exceptionnelle, un sentier bordant les falaises commence en bas de la citadelle et vous emmènera jusqu’au Gouvernail, point le plus au sud de l’île.
Le terme de notre voyage approche, mais avant de pointer notre étrave sur Olbia, nous optons pour une dernière halte sur un groupe d’îles dont la réputation n’est plus à faire. Le trio formé par Budelli, Santa Maria et Razzoli se situe sur la frange septentrionale de la Maddalena. Il forme en son cœur une immense baie ouverte sur l’ouest. Bien abrités sous le vent de Budelli, nous plantons notre ancre dans le sable. Le vent d’ouest nous permet même de sortir nos engins de plage des coffres. Windfoil, wingfoil et windsurf vont nous permettre de quadriller ce somptueux territoire quasiment vierge de tout artefact humain. À terre, une curiosité vaut incontestablement le détour. Budelli possède en son sein une plage de sable rose qui tient sa couleur d’un micro-organisme logeant dans des coquillages. Interdiction formelle de se baigner et de fouler le sable.
Une petite semaine plus tard, le temps nous semble avoir fondu comme neige au soleil. La richesse des côtes sardes permet de vivre à chaque croisière une expérience unique. Encore le temps de profiter d’une belle journée de navigation grâce au puissant flux d’ouest qui nous pousse et nous voici à nouveau à Olbia. Les images de notre voyage seront pour longtemps présentes dans les esprits de l’équipage.