© 2011, Éditions Hoëbeke, Paris Dépôt légal : octobre 2011 ISBN : 9782-84230-387-7 Mise en pages : Massin Photogravure : Color’Way Imprimé en Italie
D DARD, Frédéric Je dois être l’un des seuls Français à n’avoir
jamais lu le moindre bouquin du pourtant presque incontournable Frédéric Dard. L’auteur, aperçu deux ou trois fois à la téloche, m’avait cependant, à chaque fois, paru plutôt sympathique, mais je n’ai jamais osé m’aventurer dans son univers que je pressentais trop franchouillard et probablement un peu beauf. Je me suis toujours méfié de son incroyable prolixité et aussi de ses couvertures particulièrement laides et du sale métier de commissaire exercé par son héros. Peut-être ai-je eu tort et suisje passé à côté d’une œuvre considérable. DAVIS, Miles Le style de Miles est fait de retenue, son rythme insinuant et rampant, son son voilé et ouaté dans les graves et strident dans les aigus resteront inimitables. Comme tous les autres géants, Monk, Mingus, Coltrane…, une seule note suffit pour l’identifier sans risque de se tromper. Avec eux, le « blindfold test » est un jeu d’enfant ! Une invention diabolique, sans aucun
Décoration
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effet de virtuosité, une sérénité inouïe mais sans nonchalance, une musique pleine de suspense faite autant de silence que de notes, bourrée d’absences et d’allusions. Un swing contenu, bridé mais néanmoins explosif ! « Je joue pour épuiser ma rage ! » disait-il. Sans ce racisme exercé aux États-Unis depuis des lustres par les Blancs sur les Noirs, il n’aurait peut-être jamais embouché une trompette ! Dieu soit loué – ou vendu –, car pour notre plaisir égoïste il faut sûrement le remercier d’avoir mené la vie si dure aux musiciens de jazz : c’est grâce à la douleur et à la colère que nombre d’entre eux nous touchent à ce point. Bien sûr, comme beaucoup, je préfère sa période avec le génial John Coltrane (1955-1958) ou celle de ses concertos orchestrés par Gil Evans (1959-1960), dont l’inoubliable Sketches of Spain, beau à couper le souffle, plutôt que ses derniers disques où il fricote trop, à mon goût, avec tous les gadgets électriques et surtout flirte avec la « pop », Michael Jackson ou Prince ! Mais fermons les yeux, ou plutôt nos oreilles, sur ses ultimes prestations légèrement cassecouilles et ne retenons que le bon. DÉCORATION Bernard Clavel a fait preuve de dignité en la refusant. Bravo ! Marcel Aymé l’avait fait bien avant lui. Son article, à l’époque, m’avait mis en joie : « Pour n’avoir plus à y revenir, je les prierai qu’ils voulussent bien, leur Légion d’honneur, se la carrer au train avec leurs plaisirs élyséens.» Mais le plus important, en fait, ce n’est pas de refuser les honneurs, c’est de ne jamais les mériter ! Quand Jean-Paul Sartre déclina le prix Nobel, Jean Genet me dit : « Trop tard ! Le scandale réside dans le fait qu’ils lui aient proposé : il est souillé à jamais!» Et il ajouta, pour ma plus grande fierté : « Rassurezvous, ni vous, ni moi, ne risquons un tel affront !»
F FACIÈS Quand mon fils, Sung-Kwon, en
scooter, s’est fait rentrer dans le cul par un connard de chauffeur de taxi belge jeudi dernier rue Tronchet, les pompiers et les flics arrivèrent très vite sur les lieux, prévenus par des témoins. Les premiers, très sympas, mirent précautionneusement le fiston sur une civière pour le transporter en vitesse à l’Hôtel-Dieu, tandis que les seconds se chargeaient du constat d’accident. Ils demandèrent aux pompiers de patienter un peu afin d’avoir le temps de rédiger une prune de 900 balles pour « non-présentation d’attestation d’assurance» que l’un d’entre eux glissa discrètement dans la poche de chemise déchirée de mon fils allongé, sonné et souffrant de multiples fractures. C’est probablement sa tronche d’immigré qui lui a valu cette suprême délicatesse… Encore a-t-il eu du pot de ne pas être massacré et achevé sur place! En Angleterre, on lui aurait même interdit l’accès de l’hosto car il avait un paquet de clopes sur lui! Jeune, Coréen, fumeur et coursier, c’est plus qu’il n’en faut pour être violemment mal vu dans nos démocraties. FANATISME Chaque année, tandis que de sages mécréants restent chez eux, attablés devant un kil de rouge, et bouffent du cochon avant d’en
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Fanfaron
griller une, d’autres, qui croient à une vie après la mort, accélèrent leur trépas en allant à La Mecque se faire piétiner par leurs coreligionnaires hystériques.Tellement excités à balancer des pavetons sur les stèles qui symbolisent le diable, certains de ces forcenés n’hésitent pas à pousser, cogner, fouler au pied et écraser les plus faibles qui les gênent dans leur imbécile jeu de massacre. Religions, pièges à cons ! FANFARON Ni les lesbiennes ni les pédés ne m’ont jamais paru mieux lotis sexuellement que les hétéros et j’ai toujours beaucoup de mal à comprendre pourquoi ils fourrent tellement de «fierté» dans leur slip. Chacune d’entre elles et chacun d’entre eux en tripotent toujours d’autres du même sexe et ne sont, finalement, eux aussi, qu’attirés par un seul type de partenaire. Le fait que ce dernier ne soit pas du sexe opposé au leur ne leur confère pas une supériorité particulière dont ils puissent être « fiers ». Si une bande d’imbéciles défilaient pour clamer leur « fierté » d’être hétérosexuels, ils se feraient, à juste titre, traiter de « réacs » et d’homophobes. Les seuls qui, à mon avis, auraient le droit de ressentir une certaine supériorité sont les « bi », ceux qui peuvent fonctionner un coup à la voile, un coup à la vapeur, les « biques et les boucs » qui prennent du plaisir par, et dans, tous les trous sans discrimination ni préjugés. À côté de ces privilégiés, les autres devraient s’écraser et ne pas la ramener.
Fantasme
78 FANTASME Je me trimbale depuis l’adoles-
cence le fantasme de me farcir une frangine ! Gironde, bien sûr, pas genre Mère Teresa, plutôt Melanie Griffith, Julia Roberts ou Penélope Cruz, et portant des sous-vêtements de pute sous la longue et sévère robe noire. Et pour grimper au paradis en passant par le septième ciel, j’aimerais qu’elle soit, par-dessus le marché, pleinement consentante et même un peu nymphomane sur les bords, car le viol n’a jamais été ma tasse d’athée. Mais avec déjà une couille dans la tombe, je crains de ne jamais croiser sur mon chemin la lubrique catholique de mes rêves. Je me console en me répétant qu’un fantasme, à partir du moment où il est réalisé, cesse d’en être un et qu’il serait dommage d’être privé de cette récurrente obsession ! FARMER, Art Né en 1928, comme moi, il est mort en 1999. J’ai toujours été très sensible à la sonorité du bugle, plus ouatée et raffinée que celle de la trompette, et Art en était un expert. Je le réécoute souvent dans My Funny Valentine extrait du CD On the Road paru en 1976, accompagné seulement par le piano de Hampton Hawes. Cette interprétation est bouleversante de beauté intrinsèque, à tel point qu’il m’est impossible de retenir des larmes de joie. FAUX AMIS En débarquant à l’aéroport de La Nouvelle-Orléans, il y a quelques années, pour aller assister à un festival de jazz, j’avais remarqué avec plaisir des écriteaux qui jalonnaient les couloirs et annonçaient
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Féminisme
partout : « free smoke ». « Liberté de fumer », avais-je traduit mentalement aussi sec, m’empressant d’allumer une clope, heureux et agréablement étonné de ce sympathique accueil. Mais vingt secondes plus tard, un énorme Black me tombait méchamment dessus en vociférant comme un putois dans son jargon de sauvage et m’intimait l’ordre d’écraser illico l’objet du délit. Je me suis mis à gueuler presque aussi fort que lui et, pour prouver ma bonne foi, lui montrai du doigt le panneau, pourtant explicite : « Free smoke », nom de Dieu ! « Fumer librement », lui hurlais-je dans les naseaux en invoquant la Ligue des droits de l’homme et le premier amendement de leur Constitution à la con. Je finis par comprendre, grâce au copain français qui m’accompagnait et qui était plus cultivé en amerloque que moi, que, contre toute attente, « free », dans ce cas précis, signifiait « interdit ». Comme, m’expliqua-t-il ensuite, « free sugar », sur les étiquettes de leurs sodas pourris, informait qu’ils étaient « sans sucre ». Décidément, plus con qu’un Ricain, tu meurs ! FÉMINISME Quelle connerie, cette « Journée de la femme ». Adulée un jour, vilipendée les 364 autres ! Si j’avais été une nana, y a longtemps que j’aurais rué dans les brancards pour obtenir ce qui m’est dû, nom de Déesse (féminin de nom de Dieu) ! J’aurais fait la grève sur le tas (sauf du sexe !). Dans mon couple, c’est moi qui aurais porté la culotte (transparente et en dentelle),
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Gerber, Alain GENET, Jean Quoique hétéro primaire, j’ai toujours éprouvé
une véritable passion pour Jean Genet. D’abord pour l’écrivain, ensuite pour le bonhomme, dès notre rencontre. Je l’ai fréquenté, en tout bien tout honneur, pendant des années, allant le rejoindre, pour le plaisir, en Grèce, en Belgique, en Italie, en Angleterre… car il bougeait beaucoup. On s’amusait comme deux fous (ou deux folles ?). Discuter avec lui était un plaisir divin. Il pouvait parler de sexe de façon très vulgaire et passer à des choses très subtiles et poétiques. De parties de trous du cul à Nietzsche, Rembrandt ou Giacometti, ou de baises sordides au martyre du peuple palestinien. Il était anar jusqu’au bout du gland. Il m’avait fait, un jour, un merveilleux compliment que je n’ai jamais oublié : « Vous, mon cher Bob, quel que soit votre degré de notoriété, contrairement à beaucoup d’autres, vous ne risquez pas d’attraper un jour la légion d’honneur. » GERBER, Alain Quand Alain Gerber prend sa plume et la trempe dans son cœur pour nous parler de jazz, on atteint de rares sommets de bonheur. Pas besoin de joint, le voyage commence dès la première page sans pour autant s’arrêter à la dernière, car même après avoir refermé le livre, on a bien du mal à toucher terre pour reprendre une activité vulgaire. Alain Gerber a l’art de ressusciter les musiciens disparus. Il ouvre grandes les portes du panthéon et les fait redescendre en quelques mots de leur piédestal afin qu’on puisse les serrer très fort dans nos bras. On les entend tous, de nouveau,
Girouette
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rire, plaisanter, échanger des vannes. On peut les palper, les regarder, les sentir et surtout les réécouter jouer! Je ne sais comment ce magicien réussit un tel miracle, mais il est à peine besoin de mettre les disques dont il parle sur sa platine pour s’envoyer encore un peu plus en l’air tellement son art du récit est confondant. GIROUETTE La duplicité et le mensonge sont décidément indissociables des hommes politiques. Aucun n’y déroge, quel qu’ait été son niveau d’honnêteté au moment de son élection. La faculté de revirement de ces girouettes n’a d’égal que leur mépris pour les connards qui ont eu la faiblesse de voter pour eux. Soit par lâcheté, arrivisme ou machiavélisme, ils renient toutes leurs promesses sous le regard incrédule des pauvres types bernés, cocufiés, anéantis. GOSPEL J’ai toujours réussi à écouter cette musique en oubliant qu’elle était sacrée et je hurle « Alléluia ! » avec les fidèles, comme on gueule « Une autre ! » ou « À poil ! » avec un public bourré. Le swing qui se dégage de ces chants religieux est le même que celui des blues profanes chantés par Ray Charles, James Brown ou Koko Taylor. Je ne fais
Grève
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désœuvrés qui, pour exprimer leur spleen et tenter de guérir leur hypocondrie, balancent des pavetons sur la gueule des chauffeurs de bus, cassent un maximum d’abris, salopent les wagons de la SNCF et crament les bagnoles de leur quartier. Il faudrait aussi trouver d’autres moyens de lutte que la grève systématique qui fait payer les pots cassés à des milliers de pauvres types pas dans le coup. Par exemple, ces paysans qui avaient muré les permanences de leurs députés se sont montrés plus intelligents. Bravo! Faire la grève, mais des guichets, en laissant voyager les gens à l’œil est aussi une bonne solution. Elle a l’avantage, en plus, de rendre tous les exploités solidaires et rien de tel pour faire bouger le cul des responsables. Il faut inventer et proposer de nouveaux moyens inédits, efficaces, et qui ne léseraient aucun innocent. Que soient finis ces sempiternels « otages », terminées ces solutions de facilité. GROSSIÈRETÉ Mon vocabulaire de mots grossiers et malsonnants est bien trop restreint pour qualifier comme j’en ai envie les petits führers de tout poil. Alors en empruntant à Céline, vieux compagnon de route – et de déroute – des nazis de souche, quelques-unes de ses invectives réjouissantes pour les dédier aux nabots, j’ai l’impression de faire deux bonnes actions: 1. rendre hommage à la verve de Louis-Ferdinand; 2. les traiter d’avortons comme ils le méritent. Et si, après cette tonifiante bordée d’injures, les gnomes veulent m’intenter un procès, c’est l’affreux collabo qu’ils devront traîner en justice, pas moi! Ha, ha, ha! «Ergotant, Bosco!
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Grosz, George
Pisseux! Fiotte, Gugusse! Cul-de-jatte! Pilon! Infâme cul pourri! Informe ! Caca ! Larveux ! Biglouseux ! Troufignoleur ! Chiasse ! Pot-de-Pisse! Infect! Fêlure! Hernie! Ecchymose! Étron! Prostré! Glaireux ! Face d’Omelette fripée ! Bignolle ! Hareng ! Péroreur ! Indic ! Stratagémeux ! Bourrique ! Latrine ! Poubelle ! Pourceaux ! Viande ! Tapette ! Mouchard ! Foireux ! Empaffé ! Choléra ! Pignouf ! Crapaud ! Chiure de Vache ! Betterave ! Engeance ! Énergumène ! Suppôt ! Emplâtré ! Déjecture ! Étripeur ! Vérole ! Hargneux Cocu ! Maquereau! Puant ! Ganache ! Crétin-la-Grelotte ! Goitreux! Poisseux ! Encaqué ! Cagneux ! Casse-Bite ! Roupane ! Égout ! Margoulin! Barbeau mou! Charogne! Fétide!Vermine! Grimace! FausseFace ! Moumoute ! Cocorique ! Goujat ! Pissat ! Pelure ! Pourriture ! Escogru! Barbouillé Salaud! Sale être! Malagaufre! Cliche!» Un vrai régal, non ? Quel dommage que cet écrivain de génie ait été du côté de ces fumiers… Imaginez un Céline de gauche… Putain, ça manque ! GROSZ, George On reste sur le cul devant la violence et la haine de ce mec qui a collectionné, à l’époque, plein d’emmerdes de la part du clergé et de l’armée, ses deux bêtes noires. Inscrit au Parti communiste dès 1918, son premier procès a lieu en 1921 pour « offense à l’armée ». Son recueil de dessins Ecce Homo est saisi en 1923. En 1924, nouveau procès pour « atteinte à la morale publique » et condamnation pour « blasphème » en 1928 ! En 1933, devant la montée du nazisme et désespéré de l’attitude de ses contemporains, il finit par se casser à New York. « Mon art est, à la fois, un fusil et un sabre ; des plumes à dessin ne sont que des pailles vides et inutiles dès lors qu’elles ne participent pas au combat pour la liberté. » Mis à part son talent transcendant qui nous écrase tous, on ne peut
Penguin Books Ltd
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résolument contre bien sûr, sachant quelles têtes il aimerait faire tomber, mais, dans mon for intérieur, j’avoue que je suis pour en ce qui concerne tous les criminels de guerre et tous les hommes (si on peut les appeler comme ça) politiques d’extrême droite. PENGUIN BOOKS LTD J’ai lu il n’y a pas longtemps un livre paru en Angleterre qui raconte la vie du patron des Éditions Penguin, Sir Allen Lane, de 1935 à 1970. Apparemment ce monsieur était très important et respecté dans la profession. L’un de ses collaborateurs, Tony Godwin, lui suggéra en 1963 de publier, sous son célèbre label, un recueil de mes dessins. Malgré ses réticences, il accepta, car il tenait à rester « dans le coup » auprès de son jeune public, mais n’en avertit pas ses divers directeurs. Il commanda une préface à Malcolm Muggeridge, directeur de Punch, un admirateur de mes dessins, pour justifier son audace. La sortie fut programmée pour 1966. Le 5 octobre, il convoqua tous ses directeurs et leur montra le livre intitulé Siné Massacre en français. Quatre d’entre eux étaient résolument contre (« distasteful, blasphemous, vicious, incompatible with the company’s image… »), deux mollement pour, les trois autres refusèrent de prendre position, prétextant que leur opinion personnelle n’importait pas et que seule la ligne éditoriale de la boîte comptait : des dégonflés quoi !
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Le « Patron » ayant toujours raison annonça la mise en place du livre à partir du 1er novembre. Il accepta néanmoins de publier un communiqué destiné à tous les libraires et les représentants dont il confia la rédaction à Muggeridge qui n’y alla pas avec le dos de la cuillère : « Siné is a cartoonist and graphic artist of international reputation and importance, occupying a position in the satirical tradition of Hogarth, Goya, Daumier and Grosz… » Putain, la classe ! Sir Allen croyait ainsi échapper au tombereau d’insultes qui suivit et qui dépassait de loin les prévisions les plus pessimistes : des centaines de lettres sanglantes, indignées ! Comment une maison aussi sérieuse que Penguin Books Ltd pouvait-elle se permettre pareil écart? Ce fut un tel tollé que la suite devient un vrai régal, et c’est un certain George Nicholls qui la raconte : « Un soir, vers minuit, je dormais, le téléphone sonne, c’était Bosley. “Je suis avec Sir Allen au bureau, il tient à ce que vous rappliquiez immédiatement !” Aussitôt, je me lève, m’habille et fonce au bureau. Là, en plus de Sir Allen, il y a Bosley, Derek Singleton et une autre personne que je ne nommerai pas. Il me dit : “Ouvrez l’immeuble, voulezvous ?” et je l’entends maugréer « ces satanés Siné » (those bloody Siné’s). J’ouvre donc le building et nous fonçons au magasin de stockage. “Je fais le tour avec Singleton dans le camion et on récupère tous ces maudits Siné avec le chariot élévateur. TOUS ! George ! Ce putain de comité m’a désavoué, je vais me venger ! Et vous allez me promettre de garder le secret et de ne jamais en piper mot à qui que ce soit.Vu ?” » Le témoignage s’arrête malheureusement là mais l’auteur du livre poursuit : « À partir de ce moment, les spéculations commencent
U USURPATION Les électroniqueurs exacerbés,
pourtant accros à la souris, ont le culot d’employer, depuis peu, le mot « chat », mais en l’utilisant dans son sens amerloque qui signifie : causette, parlotte, bavette, caquetage, bla-bla, jactance… Merde, les internautes, faites pas chier : bavassez autant que vous le désirez par écran interposé si ça vous fait marrer, mais inventez-vous des mots à la con comme vous en avez le secret plutôt que de nous piquer l’un des plus beaux mots de la langue française pour camoufler vos papotages débiles. UTILE Personnellement, le culte de l’efficacité, de la réussite, de la performance, du rendement m’a toujours gonflé. « Utile » n’est pas un mot qui me branche, pas plus que « profitable », « avantageux » ou « nécessaire ». Un vote utile est le contraire d’un vote chaleureux, engagé, libre. C’est un geste réfléchi, gambergé, pesé, pesant, pris sans conviction, uniquement par devoir, raison et calcul ! Toute ma vie, je préférerais l’excès à la pondération, la licence à la retenue, le superflu à l’indispensable, le désordre à l’organisation, le cœur à la raison.
Utopie
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Voter utile, c’est comme se forcer à bouffer un truc qu’on n’aime pas ou à baiser une nana dont on n’a pas envie ! UTOPIE Je sais, je sais, on me l’a assez répété, je suis un utopiste. Je fais partie, dans la galaxie anarchiste, de l’« eschatologique » selon la classification de Michel Onfray. En effet, je rêve de la fin de l’exploitation, de la misère, de la pauvreté et de la disparition de la police, de l’armée et des curés (entre autres). Je reconnais qu’on ne peut guère être plus utopiste que ça ! Mais je n’oublie jamais la belle phrase de Théodore Monod, pour qui j’avais une grande admiration : « L’utopie ne signifie pas l’irréalisable mais l’irréalisé. » Je garde donc l’espoir, chevillé aux couilles !