Murielle rudel
lee village
autrefois
L' ÉPICERIE
UN BUVARD
Petit cadeau de l’épicier à l’effigie des biscottes Gringoire.
L'épicerie d'autrefois, c'est un peu le bazar actuel. En dehors des substances élémentaires dont dispose déjà une population agricole, on y trouve tout ce qui est nécessaire à la vie quotidienne : du sucre, du sel, du café, des pâtes, des boîtes de conserve et des confitures, des légumes secs et des noix conservés dans des sacs de toile, du beurre, du fromage et, à l'occasion, des fruits et des légumes frais. Le vin, la bière et le lait sont vendus dans des bouteilles en verre d'un litre, et l'huile est tirée d'un tonneau et versée dans les bidons apportés par les clients. Un rayon est consacré à la vaisselle, et sur un autre sont disposés divers articles de quincaillerie et de mercerie. S'ajoutent les pains de savon, les balais de coco, l'eau de Javel, etc., tout celà donnant au magasin l'aspect d'une véritable caverne d'Ali Baba. L'épicerie de village est souvent associée à un autre commerce et fait aussi bistrot, restaurant, boucherie ou charcuterie, voire un peu tout cela à la fois… Joliment baptisée « Au bon docteur qui guérit la soif et la faim », celle de Saint-Martin-la-Garenne (Yvelines) compte parmi ces épiceries ultra-polyvalentes si répandues dans la première moitié du xxe siècle. Voici comment elle fonctionnait : dans ce magasin d'une vingtaine de mètres carrés, l'on vendait de l'alimentation générale, des articles de mercerie, des chaussons, des sabots, des marmites et des soupières, du son pour les bêtes, mais ni fruits ni légumes, chacun, dans ce village très agricole, possédant son lopin de terre. En revanche, aucun boulanger ne s'étant fixé dans la commune, on y proposait du pain. Un livreur venu en voiture de Vétheuil, à 3 kilomètres de Saint-Martin, apportait chaque matin des miches et des baguettes ; pendant la guerre, les véhicules ayant été réquisitionnés, il avait dû ressortir sa vieille charrette que tirait un âne et râlait constamment parce qu'un « fou » à l'entrée du village s'amusait à lui jeter des pierres… Le dépôt de pain cessa lorsque le boulanger de Vétheuil se mit à faire des tournées. Avant la guerre, les propriétaires servaient également l'essence à partir d'une pompe à roulettes. Dans un coin de l'épicerie, le rayon charcuterie, et ouvrant sur le magasin, le bar-restaurant-hôtel. La femme servait à l'épicerie et au bistrot et faisait la cuisine, peu de cuisine en réalité, de simples casse-croûte destinés aux « gars de batterie», les ouvriers agricoles qui dormaient sur la paille dans les fermes où ils étaient employés.
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L’ÉPICERIE
DU VILLAGE
Une caverne d’Ali Baba où l’on trouve de tout. Pas de self-service à l’époque : les clients attendent patiemment leur tour.
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LE
MÉDECIN
Pendant longtemps, les villageois ont boudé la médecine. Ils ne sollicitaient le docteur qu’en cas d’extrême urgence, préférant s’en tenir aux remèdes maison pour les maux légers ou recourir au rebouteux pour les foulures, les entorses et autres maladies. À la fin du XIXe siècle, la diffusion des principes d’hygiène par le biais de l’instruction a changé les mentalités. Plus respecté, plus écouté, le médecin est devenu l’un des dignitaires du village, au même titre que l’instituteur et les autres notables. Le domicile du praticien se situe de préférence au cœur du bourg, à proximité des commerces ou de la place du marché. À l’intérieur du logis, une pièce sommairement meublée sert de cabinet de consultation. Contrairement à son homologue citadin, le médecin rural ne reçoit pas ses patients à heures fixes ; il se tient disponible jour et nuit, sept jours par semaine, les villageois préférant consulter avant ou après le travail, tôt le matin ou tard le soir, voire le dimanche après la messe. Il effectue en outre de nombreuses visites à domicile. Sa clientèle s’étalant sur plusieurs communes, il pallie le problème des distances en faisant des tournées à jour fixe ou en groupant ses visites. Dans sa sacoche, il emporte des remèdes, un stéthoscope, du fil et des aiguilles, un bistouri, des forceps, des daviers, le médecin rural pratiquant la menue chirurgie et accouchant les femmes en cas de complications. Au cours de ses tournées, il s’informe auprès des maires et des curés des cas nouveaux qu’il lui faudra traiter : si les malades ne vont pas à lui, le médecin va au-devant d’eux.
AUSCULTATION
Le médecin de campagne se déplace à domicile plus souvent qu’il ne reçoit ses patients.
L’ACCOUCHEMENT
En l’absence d’une sage-femme au village, le médecin intervient lors des accouchements.
UNE SALLE D’ATTENTE
Avec le temps, les cabinets de consultation évoluent. Au XIXe siècle, beaucoup ne disposaient pas de salle d’attente. Les clients patientaient dans la cuisine du médecin.
LA 2 CV DE CAMPAGNE Tellement plus rapide que la carriole ou la bicyclette !
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L ES
LAVOIRS
Longtemps, les femmes ont lavé le linge dans les rivières, les mares ou les abreuvoirs, ce qui posait d’importants problèmes d’hygiène. Pour y remédier, les communes ont décidé d’édifier des bâtiments réservés à la lessive : les premiers apparaissent au XVIIIe siècle, mais les lavoirs ne se généralisent véritablement qu’au siècle suivant. Situés à l’écart ou au centre des villages, selon l’emplacement des points d’eau, ces édifices présentent une grande diversité architecturale : les bassins, doubles en général, sont ovales, rectangulaires, ronds ou en arc de cercle ; certains lavoirs sont clos de murs et percés d’arcades, d’autres sont couverts sur un ou deux côtés par un toit en appentis ou à double pente, ce qui permet de recueillir l’eau de pluie ; les lavoirs dits « à impluvium », inspirés des atriums romains, montrent quatre toits en appentis qui laissent à découvert le centre du bassin. Quelques édifices se parent d’ornements ou de maximes peintes : « Ici, le battoir besogne mieux que la langue », « Tous les linges sales ne se lavent pas ici », lit-on parfois sur les murs. La lessive du gros linge, draps, torchons, etc., a lieu deux fois par an et s’étale sur trois jours. Le premier jour, la ménagère entasse le linge dans un grand cuvier de bois qu’elle recouvre d’un drap de chanvre. Au fond du cuvier, elle a déposé un sachet de thym, de lavande ou de laurier pour parfumer la lessive. Sur la toile de chanvre, elle répand une épaisse couche de cendres tamisées, celles-ci tenant lieu de savon, et verse une chaudronnée d’eau bouillante.La ménagère recommence l’opération une dizaine de fois. Le lendemain, en route pour le lavoir… Le linge est décrassé à la brosse et au battoir et parfois savonné dans le premier bassin, puis rincé dans le second. Une fois essoré, il est mis à sécher sur des tréteaux ou sur des haies ; le jour suivant, on le retourne et, quand il est bien sec, on le charge comme à l’allée sur la brouette ou dans la hotte. LAVOIR À CIEL OUVERT
Les femmes s’activent, agenouillées dans des caissettes en bois garnies de coussinets pour éviter les douleurs.
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LE SAVON DE MARSEILLE Idéal pour obtenir du linge immaculé.
LAVOIR AVEC TOIT EN APPENTIS Le toit protège les laveuses des intempéries et du soleil. Le bassin est découvert pour recueillir l’eau de pluie.
APRÈS LE NETTOYAGE
À défaut de tréteaux sur place, le linge est mis à sécher sur des haies.
LAVOIR ATYPIQUE Joli petit lavoir, ici à Pont-Aven.
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La place du village et son café, le marché, l’épicerie où l’on trouve de tout, le bal du 14 Juillet à la lueur des lampions, le cortège de mariage déambulant dans les rues ou encore M. le maire ajustant son écharpe avant son discours du 11 Novembre devant le monument aux morts, telles sont les images qui surgissent à l’évocation du Village autrefois. De la place principale aux terrains communaux, en passant par la mairie, l’école ou l’église, chaque chapitre du livre permet de découvrir, à travers une riche et amusante documentation photographique, les acteurs incontournables du village (M. le curé, M. le maire ou l’instituteur, par exemple, mais aussi l’épicière et le facteur), ainsi que la vie quotidienne des villageois telle qu’elle était encore dans la première moitié du xx e siècle. Véritable invitation à aller sur place, au cœur des 36 000 communes de France, voir ce qu’il reste encore de ces traditions, à retrouver le parfum unique de son enfance et à plonger avec délice dans l’atmosphère d’un passé pourtant si proche, cet ouvrage abondamment illustré prolongera dans les nouvelles générations le souvenir d’une vie en apparence plus simple.
12,90 € ISBN : 9782-84230-503-1