Trésor des grands livres de mer

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MICHÈLE POLAK

!ALAIN

DUGRAND

TRÉSOR

DES LIVRES DE MER De Christophe Colomb à Marin-Marie


1555

Magnus (Olaus) Historia de Gentibus Septentrionalibus. Romae, Viotti, 1555. Publiée par un évêque suédois au XVIe siècle, cette Histoire des peuples Septentrionaus relate les traditions, l’existence des peuples nord-européens, la mythologie s’y mêlant à des observations humanistes. Olaus Magnus, dit « le Goth », fut évêque d’Uppsala, en Suède, dont l’université était déjà célébrée dans ce XVIe siècle. Il était en résidence auprès du pape à Rome, quand, soudainement, l’envol de la Réforme dans son pays l’empêcha de rejoindre son siège épiscopal. Dès lors, Magnus entreprit la rédaction de ce lourd volume qui constitue la première description géographique et ethnographique de la Scandinavie au XVIe siècle. Magnus voulait constituer une somme aussi imposante par sa riche illustration qu’un contenu destiné à convaincre le souverain pontife d’entreprendre une reconquête du Septentrion. Son Historia, en latin, parut à Rome en 1555. La remarquable carte des pays nordiques qui l’agrémentait ne fut pas pour rien dans sa faveur impressionnante. L’ouvrage fut réédité à Bâle en latin et allemand en 1567, une « édition de poche », un épitomé, sortit des presses de Christophe Plantin, en latin d’abord, en 1558, puis en français, en 1561. On trouve d’extraordinaires gravures sur bois, 473 éléments dans cette édition qui offre un panorama exhaustif de l’histoire, des mœurs, des ressources, des singularités des peuples et territoires de cet extrême nord de l’Europe. Histoire des Goths, usage des runes, description des geysers, des courses de traîneaux, les guerres du Danemark et celles du souverain de Suède, tout un peuple d’hommes des glaces, une des premières représentations de skis, des magiciens de Botnie jusqu’aux « pêcheurs » de phoques apparaissent dans les vignettes. On chasse l’ours, le cerf, une grande variété de monstres marins, dont certains, orques et baleines, ont quelques traits de réalité, alors que la plupart des dessins, alors en vogue, sont de fabuleux bestiaires que l’on rencontre à l’identique, par exemple, dans la cosmographie de Sébastien Munster. Olaus Magnus consacre une longue partie du traité aux navires des Septentrionaux, aux méthodes de pêche, sans omettre quelques spécialités gastronomiques… Ainsi du chapitre intitulé « De piscibus salsis, siccatis et fumigatis », où il confie son goût pour le saumon fumé de Norvège… Pareilles merveilles ne suffirent pas, manifestement, à convaincre le pape d’entreprendre la reconquête espérée que l’impressionnante galerie des monstres clôturant l’ouvrage aurait pourtant rendu méritoire.

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XVIe SIÈCLE

Un jour que la fille d’un riche homme, s’alloit ébatant par les champs avec ses petites chambrières, voicy arriver un grand ours, lequel l’embrassant, après avoir jetté par terre toutes ses compagnes, l’emporte en la forêt en sa teniere, où étant arrivee après avoir contemplé les beaus membres de cette belle fille, surprins d’une nouvelle passion, fut plus soigneus de l’embrasser que de la manger : & changeant le titre de ravisseur en amoureus, accomplit son desir avec elle. Et de là en avant pour la nourrir mieus, sortant du bois, alloit souvent querir de la chair fraiche, tourmentant merveilleusement les troupeaus qu’on gardait hors la forêt : & lui acoutuma, au lieu des delicates viandes, qu’elle vouloit manger, de se paître de chair encore sanglante. Voilà, comment la beauté de cete fille avait mise au bas, & vaincu la cruauté de cete furieuse bête, faisant que celle qui n’atendoit qu’être pâture & viande à l’ours, fut nourrie par lui. Mais cela ne dura pas long temps, car il fut prins & mis à mort par les veneurs. Nature voulant couvrir la déformité de ces noces, fit qu’au bout du terme cete fille enfanta un beau fils… »

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1629

Furttenbach (Joseph) Architectura navalis. Das Ist : Von dem Schiff, Auff dem Meer und Seekusten zugebrauchen. Ulm, durch Jonam Saurn, 1629. Étrange destin que celui de Furttenbach (1591-1667), peintre du Nord, pérégrin par respect de la tradition du Grand Tour propre aux artistes. Il vécut fort longtemps en Italie, puis il s’intéressa peu à peu aux navires et à leur construction. Artiste au graphisme sûr, il lègue de remarquables planches qui seront pillées sans vergogne. Il avance des « méthodes infaillibles et certaines » de construction navale. L’ouvrage parut en 1629 et Joseph Furttenbach fut loué pour son grand savoir. Un bref chapitre termine le volume par une « description d’un grand combat naval », où l’auteur, ayant réuni des témoignages, relate la fameuse bataille de Lépante, 7 octobre 1571, cet affrontement historique de la coalition chrétienne contre la marine du Grand Turc. Jusqu’alors, l’art de la construction navale était artisanal, les « justes proportions » relevaient de secrets familiaux jalousement préservés dans les corporations. Furttenbach côtoie les constructeurs des chantiers, il analyse les méthodes des charpentiers, puis il établira tout ce savoir en s’appuyant sur la géométrie, une science qu’il maîtrise parfaitement. C’est là son grand mérite, car il est l’un des tout premiers à établir l’art des constructeurs avec grand renfort d’explications mathématiques. Il fournit également maints détails sur les constructions de la grande famille des galères. Il faudra longtemps avant qu’un auteur déploie autant d’analyses techniques. Le grand intérêt d’Architectura navalis tient à la méthode de la chose dessinée, au trait et à la géométrie. Peu courants dans l’époque, l’auteur fournit des dessins à l’échelle, coupes, perspectives, puis élévations.

Galée.

Nave.

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XVIIe SIÈCLE

Nave par l’arrière.

Considération, ou avis sur la forme des navires. Disons, dès l’abord, que l’on peut distinguer deux genres de navires : les premiers cas de ces Vasselli (on nomme vasselo dans le langage in genere, le corpus du navire), ont des rames à l’ordinaire : tels sont les Galea, Galeaza, Galeotta, Bergantino, Filucca, Fregata, Liudo, Barchetta et la Piatta, qui peuvent être à tout moment, même en l’absence de vent, conduits par la raison et l’activité efficace des hommes ; mais il est cependant très avantageux de les aider en installant une Antenna et une voile pour capter et profiter le vent favorable à la navigation, en se laissant pousser par lui : pour tout cela, ce premier genre est très hautement apprécié. L’autre comprend les Nave, Polaca, Tartana, Barcone, Caramuzzala et les Barce ordinaires qui avancent et évoluent avec le vent en étant poussées essentiellement par lui…»

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ReprĂŠsentation de diffĂŠrents peuples africains.

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1740

Duguay-Trouin (René) Mémoires de Monsieur Du Guay-Trouin, lieutenant général des armées navales de France, et commandeur de l’ordre royal et militaire de Saint-Louis. 1740. Né dans une famille d’armateurs de Saint-Malo, René Duguay-Trouin (1673-1736) voua son existence au prestige des armées navales de France. Son courage, un génie du commandement et de la guerre de course en firent un bras essentiel de Louis XIV dans la maîtrise des mers et des routes commerciales contre l’Angleterre, l’Espagne et les Pays-Bas. Ainsi reçut-il du roi l’épée d’honneur en 1694. En 1709, anobli, il réunit à son actif la capture de seize navires de guerre et plus de trois cents navires marchands. Ses lettres patentes lui offrent cette devise : Dedit haec insigna virtus, « le courage lui a donné sa noblesse »… Embarqué dès l’âge de 16 ans sur un navire corsaire, capitaine corsaire à 18 ans, capitaine de frégate de la marine royale à 24 ans, ses années de commandement furent accompagnées d’un cortège de victoires retentissantes sur les flottes anglaises et hollandaises. Son unique défaite – il fut capturé par les Anglais en 1694 – fut l’occasion pour le jeune Malouin de s’illustrer lors d’une évasion rocambolesque des geôles de Plymouth. Le plus haut fait d’armes de Duguay-Trouin est la prise de Rio de Janeiro le 21 septembre 1711. Fermée par un goulet plus étroit que celui de Brest, la rade, protégée par sept vaisseaux portugais, est défendue par sept forts armés et 12 000 hommes… La victoire revient aux sept navires de l’escadre de Duguay-Trouin et aux 3 200 hommes débarquant à terre. Cet exploit marqua le terme d’une vie en mer. Duguay-Trouin servit le royaume avec le grade de lieutenant général de la marine, commandant successivement Saint-Malo, Brest, puis l’escadre du Levant et enfin l’anse portuaire de Toulon. Ses Mémoires sont publiés sans son accord en 1730. L’édition de 1740 est la première publiée avec l’autorisation de l’auteur. Elle est expurgée d’un certain nombre de détails sur ses aventures de jeunesse…

Plan de la baie et de la ville de Rio de Janeiro.

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XVIIIe SIÈCLE

Embrasement du Devonshire.

C’étoit en escaladant le mur qui séparoit la rue d’avec le jardin, que j’avois projetté de me sauver, lorsque mon capitaine amoureux me croiroit le plus occupé à disposé sa maîtresse en sa faveur. J’avois ordonné, pour cet effet, à mon valet de chambre, qui avoit la liberté de sortir pour acheter des provisions, & à mon chirurgien, qui alloit panser nos blessés à l’hôpital, de ne pas manquer de se trouver sur les quatre heures du soir derriere le mur en question, & de m’y attendre, pour me conduire à l’endroit où je devois retrouver mes bons amis les Suedois. Ce jour, tant désiré, arriva enfin ; le capitaine ayant vû entrer l’objet de ses vœux dans l’auberge, ne fit aucune difficulté de me laisser sortir de ma chambre, avec un de mes officiers, qui de son consentement, étoit entré dans la confidence. Il nous pria seulement de ne pas le laisser languir, & de le faire avertir le plûtôt qu’il nous seroit possible ; mais à peine avois-je marqué ma reconnoissance à cette amie salutaire, que plein d’impatience, je sautai par-dessus le mur du jardin avec mon camarade. Mon chirurgien & mon valet nous attendoient derriere ; ils nous conduisirent au rendez-vous marqué, où nous trouvâmes sic braves Suedois bien armés, qui nous firent faire deux bonnes lieues à pied, & nous accompagnerent jusqu’à la chaloupe. »

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1771

Bougainville (Louis Antoine) Voyage autour du monde, par la frégate du Roi la Boudeuse et la flûte l’Étoile ; en 1766, 1767, 1768 & 1769. Paris, Saillant & Nyon, 1771. Né à Paris en 1729, mousquetaire noir, mathématicien et avocat au parlement de Paris, Bougainville publie un Traité de calcul intégral. En 1763, la flotte du chevalier Bougainville débarque aux Malouines. Malgré les violentes protestations des Espagnols qui revendiquent ces îles comme appartenant à l’Amérique du Sud, il en prend possession au nom de Louis XV. En 1766, il entreprend un tour du monde afin de reconnaître l’océan Pacifique à bord de la frégate la Boudeuse. Le vaisseau l’Étoile le rejoint à Rio de Janeiro en 1767. Lors de cette escale brésilienne, le botaniste Philibert Commerson, embarqué sur l’Étoile, identifie la fleur qu’il nommera bougainvillée. Empruntant sans le savoir la route suivie par l’Anglais Wallis quelques mois auparavant, Bougainville découvre Tahiti. Il laissera une description paradisiaque de ce temple de nature et de sensualité qu’il nomma Nouvelle-Cythère. Au retour de l’expédition, l’équipage, dévoré par le scorbut, dut son salut à la consommation des rats du bord. On sait aujourd’hui que la chair des rongeurs jugule l’épidémie en fixant la vitamine C… Bougainville était bien plus lucide que ses compagnons quant à l’existence idyllique de la société polynésienne. Comme chez les Indiens du Canada, où il fut aide de camp de Montcalm (1758-1759), il est confronté à la guerre, à l’esclavage et aux sacrifices humains, dont il minimisera l’importance dans l’édition du voyage. Dans son journal, il se montre sarcastique à l’égard de Rousseau et des théories du bon sauvage. Bougainville devait rentrer au pays accompagné d’un jeune Tahitien, Aotourou, qui allait périr lors de son retour à l’île de France, aujourd’hui île Maurice. Le Voyage autour du monde est l’œuvre d’un philosophe et d’un équipage convaincus des Lumières du XVIIIe siècle. Pendant deux cents ans, l’Europe puisera dans ces pages une utopie du bonheur et de la justification de l’idée comme du projet colonial. L’expédition Bougainville sera la dernière conduite par un humaniste. Avec Cook commence l’époque des spécialistes et des relevés scientifiques.

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XVIIIe SIÈCLE

La poligamie paroît générale chez eux, du-moins parmi les principaux. Comme leur seule passion est l’amour, le grand nombre des femmes est le seul luxe des riches. Les enfans partagent également les soins du pere & de la mere. Ce n’est pas l’usage à Taiti que les hommes, uniquement occupés de la pêche & de la guerre, laissent au sexe le plus faible, les travaux pénible du ménage & de la culture. Ici une douce oisiveté est le partage des femmes, & le soin de plaire leur plus sérieuse occupation… Quoi qu’il en soit, les femmes doivent à leurs mari une soumission entiere ; elles laveroient dans leur sang une infidélité commise sans l’aveu de l’époux. Son consentement, il est vrai, n’est pas difficile à obtenir, & la jalousie est ici un sentiment si étranger, que le mari est ordinairement le premier à presser sa femme à se livrer. »

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1801

Pigafetta (chevalier) Premier voyage autour du monde par le chevalier Pigafetta sur l’escadre de Magellan. Paris, H. J. Jansen, an IX, 1801. L’Italien Antonio Pigafetta (1480-1534) se livre très tôt à l’étude des mathématiques pour ce qui s’en rapporte à la navigation. Il appartient comme volontaire à l’expédition Magellan, partie de Sanlúcar, en Andalousie, le 20 septembre 1519, Pigafetta se lie vite au grand explorateur qu’il sert activement, notant jour par jour événements et détails du voyage. Il est blessé au combat à Cebu, îles Philippines, où Magellan et nombre de ses compagnons trouvent la mort. Pigafetta suit Cano, devenu amiral, aux Moluques. Après avoir frôlé les plus grands dangers, doublé le cap de BonneEspérance, il débarque le 8 septembre 1522 à Séville avec seulement seize des compagnons qui avaient bouclé ce premier tour du monde. Sans le journal de Pigafetta, composé d’après ses notes, on ne saurait rien des détails de la célèbre circumnavigation de Magellan. Ce récit a été retrouvé à la bibliothèque Ambrosienne de Milan et publié en français grâce au docteur Amoretti. On doit à Pigafetta les premiers vocabulaires des langues des Philippines et des Moluques. Malgré une infinité de détails réels, cette relation de Pigafetta souffre d’un grand nombre de fables et d’erreurs. Nous présentons ici la première édition française complète. En effet il existe une édition du XVIe siècle imprimée à Paris chez Simon de Colines, qui consiste en un extrait du manuscrit d’Amoretti.

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XIXe SIÈCLE

Les hommes et les femmes sont bien bâtis et conformés comme nous. Ils mangent quelque fois de la chair humaine : mais seulement celle de leurs ennemis. Ce n’est ni par besoin ni par goût qu’ils s’en nourrissent, mais par un usage qui, d’après ce qu’ils nous disent, s’est introduit chez eux de la manière suivante. Une vieille femme n’avoit qu’un seul fils qui fut tué par les ennemis. Quelque tems après le meurtrier de son fils fut fait prisonnier, et conduit devant elle : pour se venger, cette mère se jeta comme un animal féroce sur lui, et lui déchira une épaule avec les dents. Cet homme eut le bonheur non-seulement de se tirer des mains de cette vieille femme et de s’évader, mais aussi de s’en retourner chez les siens, auxquels il montra l’empreinte des dents sur son épaule ; et leur fit croire (peut-être le croyoit-il lui-même) que les ennemis avoient voulu le dévorer tout vif. Pour ne pas céder en férocité aux autres, ils se déterminèrent à manger réellement les ennemis qu’ils prendroient dans les combats, et ceux-ci en firent autant. Cependant ils ne les mangent pas sur le champ ; ni vivans : mais ils les dépècent, et se les partagent entre les vainqueurs. Chacun porte chez soi la portion qui lui est échue, la fait sécher à la fumée, et chaque huitième jour il en fait rôtir un petit morceau pour le manger.

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1823

Franklin (Sir John) Narrative of a Journey to the Shores of the Polar Sea. London, John Murray, 1823. Sir John Franklin, né en 1786 à Spilsby, dans le comté de Lincoln, entre dans la marine comme aspirant à l’âge de 14 ans. Il assiste à la bataille de Copenhague le 2 avril 1801, puis il accompagne le capitaine Flinders dans son voyage d’exploration de l’Australie. Placé à bord du vaisseau de ligne le Bellorophon, officier chargé des signaux, il se distingue devant Trafalgar en 1805. Envoyé sur les côtes américaines lors de la guerre des États-Unis avec l’Angleterre (1812-1815), il est grièvement blessé lors de la bataille de La Nouvelle-Orléans. Il sera promu lieutenant pour sa belle conduite. En 1818, le gouvernement britannique lance une expédition qui a pour objet d’identifier une voie de passage vers les Indes au nord du Spitzberg par la mer polaire. Pour cette occasion, Franklin assumait le commandent du Trent, l’un des deux bâtiments armés. Sa conduite, malgré cette croisière infructueuse, établit sa réputation de marin hardi autant qu’habile, et celle d’un observateur scientifique rigoureux. En 1819, le lieutenant Franklin reçoit le commandement d’une expédition – qui compte le distingué médecin naturaliste Richardson, MM. Hood et Back, aspirants, et deux matelots anglais –, afin de joindre la baie d’Hudson aux rivages de mer Arctique, puis de déterminer la position de la rivière de Cuivre et ses détours sur la côte est. Le 30 août, ils parviennent, sains et saufs, à la factorerie d’York, sur les rivages de la baie d’Hudson. Ils entreprennent alors les préparatifs d’une longue et difficile expédition, ils recueillent soigneusement les renseignements qu’ils obtiennent des trappeurs, marchands de fourrures de ces contrées. Partie de Fort York le 9 septembre, l’équipe Franklin parvient à Cumberland House le 22 octobre suivant, après avoir franchi une distance de 690 miles. La saison touche à son terme, aussi Franklin décide de rejoin-

L’expédition traversant Point Lake sur la glace (du côté de la Coppermine River, près de Fort Entreprise).

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XIXe SIÈCLE

Canot faisant chapelle au lever du soleil.

dre Chipeweyan, à l’extrémité occidentale du lac Atlabasca, afin d’organiser les préparatifs de l’expédition de l’été suivant. Véritable chef-d’œuvre d’une aventure humaine de ce temps, le récit de Franklin constitue un sommet de la littérature savante à l’orée du XIXe siècle. Au-delà de la navigation, les enseignements du voyage des courageux marins qui avaient parcouru 550 miles furent d’une importance considérable pour l’avancée des savoirs géographiques. En compagnie de ses amis, Franklin regagne l’Angleterre sans événement fâcheux. En 1823, loin d’être découragé par les malheurs d’une précédente expédition, il propose à son gouvernement de repartir afin de relever les mesures de la côte à l’ouest de la rivière Mackenzie. Le récit du second voyage sera publié en 1828. En 1845, Franklin repart une nouvelle fois à la recherche du passage du Nord-Ouest. Il ne reviendra jamais. Londres enverra de nombreuses expéditions à sa recherche. En 1851, le Français Joseph Bellot se joindra aux recherches à bord du Prince-Albert, une expédition financée par Lady Franklin.

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L’expédition doublant le cap Barrow.



1953

Bayle (Luc-Marie) Le Voyage de la Nouvelle Incomprise. Illustrations de l’auteur. Paris, éd. Ozanne, 1953. Fils de marin, petit-fils de marin – son grand-père avait commandé le croiseur Duguay-Trouin dépêché en Pacifique pour réprimer les soulèvements des îles Raïatéa et Tahaa (1896-1897) –, Luc-Marie Bayle (1914-2000) intègre l’École navale en 1932. Il navigue sur différents bâtiments de la Marine nationale, effectue une campagne en Chine sur le Balny en 1935. Après un passage à l’École des fusiliers marins de Lorient, puis au Service Presse Information Marine à Paris, il accomplit deux missions vers la terre Adélie en 1948 et 1949 sur le bâtiment polaire Commandant Charcot. Le capitaine de frégate Max Douguet l’avait accepté dans son état-major à la condition qu’il sache se servir d’une caméra de cinéma. À bord, le lieutenant de vaisseau Bayle assure des missions de photographe, d’historiographe et de peintre officiel. Durant les trois mois du voyage, il compose une tapisserie commémorant l’équipée de Dumont d’Urville de 1840. Outre la rédaction du journal de bord des deux premières expéditions, il signe Le Voyage de la Nouvelle Incomprise. Luc-Marie Bayle commandera la Marine française de Polynésie de 1956 à 1958. Peintre officiel de la Marine depuis 1944, puis directeur des musées de la Marine de 1972 à 1980, il fut élu à l’Académie de marine en 1975.

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XXe SIÈCLE

La Nouvelle Incomprise avait pu imaginer bien des choses pendant cette lente et patiente navigation du voyage d’aller, tout calculer, tout supputer… Tout, sauf qu’elle arriverait droit dans une Pâtisserie… C’était pourtant bien cela, on entrait manifestement chez le Grand Glacier, et la boutique semblait de taille… on naviguait dans la crème Chantilly, le lait d’amandes, les sirops et les sorbets en contournant les îles flottantes… Comme une mouche dans une jatte de crème fouettée, la Nouvelle Incomprise, ayant bu et mangé tout son saoul, commence à s’engluer les pattes dans toute cette gelée pleine de noyaux et de pépins, à se coller les ailes à ces rochers de nougat, à se cogner dans ces morceaux de sucre… Tout étourdie, elle arrive à remonter sur les bords, et pensant qu’elle s’est présentée à la mauvaise porte, remet sa visite au jour suivant.»

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BAYLE (LUC-MARIE)

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XXe SIÈCLE

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