Du camp au goulag

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DU CAMP DE CONCENTRATION AU GOULAG Expériences et témoignages: Varlam Chalamov; Evguénia Guinzbourg; Primo Levi; Ossip Mandelstam; Alexandre Soljenitsyne

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Contenu Articles Camp de concentration

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Camps de concentration nazis

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Camp d'extermination

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Camp d'internement français

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Liste des camps de concentration nazis

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Grandes Purges

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Goulag

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Kolyma

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Evguénia Guinzbourg

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Ossip Mandelstam

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Primo Levi

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Alexandre Soljenitsyne

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Varlam Chalamov

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Références Sources et contributeurs de l'article

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Source des images, licences et contributeurs

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Licence des articles Licence

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Camp de concentration

Camp de concentration On nomme camp de concentration un lieu cloitré de grande taille créé pour regrouper et détenir une population considérée comme ennemie, généralement dans de très mauvaises conditions. Cette population peut se composer des opposants politiques, des résidents d'un pays ennemi, des groupes ethniques ou religieux spécifiques, des civils d'une zone critique de combats, ou d'autres groupes humains, souvent pendant une guerre. Les personnes sont détenues à raison de critères généraux, sans procédure juridique, et non en vertu d'un jugement individuel. Le Entrée du camp de concentration de Struthof. régime nazi a créé une relative confusion en utilisant le terme de camp de concentration pour désigner certains de ses camps d'extermination, il convient de les distinguer, même si les conditions de détention dans les camps de concentration peuvent mener à des niveaux de morbidité et de mortalité extrêmement élevés. L'expression « camp de concentration » fut créée à la fin du XIXe siècle. En effet, l'innovation technique du fil de fer barbelé permit de clore de vastes espaces à peu de frais. La première utilisation de ce terme se fit à propos de la Seconde Guerre des Boers, comme innovation britannique. Il était inspiré du terme espagnol « reconcentración », utilisé par les Espagnols pendant la guerre avec Cuba (1895-1898).

Camps de concentration pour civils ennemis L'internement de civils de pays ennemis Le statut d'un camp de concentration, bien qu'il soit admis par le droit de la Détail du monument antiguerre Bittermark Mahnmal, Dortmund, Allemagne. guerre pour l'internement des civils ennemis, est difficile à justifier en ce sens qu'alors, l'internement constitue une mesure collective et non individuelle, qui ne sanctionne pas des actes individuels, mais une situation indépendante de la volonté de la personne internée. De tels camps sont utilisés en tant que mesure conservatoire militaire : si des ressortissants du pays B vivent dans le pays A lors de la déclaration de guerre entre A et B, le pays A peut considérer que les ressortissants de B sur son territoire sont des ressortissants d'un pays ennemi, qu'il importe d'interner, pour éviter qu'ils rejoignent l'armée adverse ou se lancent dans des opérations d'espionnage. Ainsi, certains responsables des camps d'internement parleront de simples prisons élargies pour recevoir un plus grand nombre d'internés prisonniers, ou même — dans certains pays et hors temps de guerre — de « structures éducatives ».

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Camp de concentration

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L'apparition des camps de concentration : Cuba et la Guerre des Boers La première apparition de la dénomination « camp de concentration » est due aux Britanniques en Afrique du Sud durant leur guerre contre les Boers ; (Guerre du Transvaal, 1899-1902) ; sur ordre du général Frederick Roberts puis de Lord Kitchener, les Britanniques y enfermaient les femmes, les vieillards et les enfants des Boers et des membre de tribus indigènes alliées. L'idée elle-même avait été appliquée un peu plus tôt par les Espagnols à Cuba, pendant la guerre d'indépendance. Le général Valeriano Lizzie Van Zyl, une enfant boer internée et morte Weyler y Nicolau a l'idée en 1897 de « concentrer » les populations dans le camp de concentration britannique de civiles dans des places contrôlées par l'armée pour enlever tout soutien Bloemfontein en Afrique du Sud durant la guerre contre les Boers. à la rébellion, près de 300000 personnes sont ainsi déplacées dans ces camps. Les civils sont invités à rentrer dans ces camps, avec leur bétail, sous le délai de huit jours[1] . Passés ce délai, ceux qui se trouvent à l'extérieur sont considérés comme rebelles et donc tués. Le sénateur américain Redfield Proctor se rend sur place et visite ces camps ; il en rend compte au Sénat américain le 17 mars 1898 : « Une fois déportés, hommes, femmes, enfants et animaux domestiques sont placés sous garde armée à l'intérieur de tranchées fortifiées. [...] Concentration et désolation[2] [...] » Malgré la défaite espagnole, le terme, « re-concentration » (« reconcentración », en espagnol), et son principe est repris par les Anglais pour lutter contre les Boers[3] . Il y a eu également les camps de concentration construits dès 1904 en Namibie (pays d'Afrique) pour éliminer le peuple Herero opposé à la colonisation et aux armées du chancelier Von Bülow. Le désastre humanitaire fut effrayant : plus de 70000 hereros morts avant ou dans les camps de concentrations (pour causes de malnutrition, mauvais traitements, exécutions sommaires des malades ainsi que des plus faibles). Il ne faut pas oublier les expériences anthropologiques, scientifiques et médicales transformant les prisonniers hereros en cobayes humains. Les camps de concentration ne sont apparus qu'après l'invention du fil de fer barbelé, qui permet de clôturer de grandes surfaces pour un coût sans commune mesure avec les moyens de détention classiques tels que les prisons. Il faut souligner le caractère moderne de cette pratique, le traitement historiquement ordinaire pour résoudre le même type de conflit étant plutôt la réduction en esclavage ou la simple mise à mort immédiate (voir génocide). Une telle pratique fait partie des outils utilisés lors des guerres totales.

Évolution historique

Un artiste français, Jean Veber, dénonce en 1901 dans l'Assiette au Beurre, les « camps de re-concentration » du Transvaal.


Camp de concentration Première Guerre mondiale D'une manière générale, tous les pays liés au premier conflit mondial ont ouvert des camps pour regrouper les civils des nations ennemies : camps pour Allemands en Australie, pour Belges en Afrique allemande, pour Autrichiens en Russie, etc.[4] Au Royaume-Uni, 32000 étrangers ou espions supposés ou Irlandais après 1916, ont été enfermés dans des camps comme le champ de course de Newbury, puis dans une prison de l'île de Man qui n'était pas prévue pour des civils. Des tailleurs juifs de Londres, issus de Galicie (donc de l'Autriche-Hongrie) sont aussi internés dans des camps[5] . La France a utilisé des camps de concentration durant la Première Guerre mondiale, dont celui de Pontmain, pour y enfermer les ressortissants allemands, austro-hongrois et ottomans présents sur son territoire à l'ouverture des hostilités. De nombreuses îles françaises de la Manche, de l'Atlantique et de la Méditerranée ont été utilisées pour implanter de tels camps. Le narrateur du Temps retrouvé, Marcel Proust, mentionne l'existence en France de camps de concentration lors de la Première Guerre mondiale, où furent internés les civils allemands présents sur le sol français lors de la déclaration de guerre. Entre-deux-guerres La France a aussi eu à nouveau recours à des camps de concentration à la fin de la guerre d'Espagne pour regrouper les réfugiés républicains fuyant l'avancée du camp franquiste à Gurs, Rivesaltes, Argelès-sur-Mer et Agde, bien que beaucoup de ces réfugiés n'aient pas été des ennemis. L'utilisation du terme « camp de concentration » dans ce cadre est très discutée : pas de travail forcé, libre déplacement à l'extérieur de ces camps (d'ailleurs très peu étaient fermés). Il faut rappeler qu'environ 450000 réfugiés espagnols arrivèrent en France en moins d'un mois, soit le premier plus grand déplacement de population du XXe siècle. Si au départ la situation de ces camps fut déplorable[6] , très rapidement les choses se sont améliorées. Ajouter le qualificatif de concentration à ces camps est un non-sens historique pour certains historiens[7] . Selon Geneviève Dreyfus-Armand, spécialiste de l'exil républicain espagnol : « Le terme camp de concentration peut choquer ; il est couramment utilisé dans les documents administratifs de l’époque, et le ministre de l’Intérieur, Albert Sarraut, l’emploie dans un sens « lénifiant » lors de sa conférence de presse au début de février 1939 : « Le camp d’Argelès-sur-Mer ne sera pas un lieu pénitentiaire, mais un camp de concentration. Ce n’est pas la même chose. » » Seconde Guerre mondiale Lors de la Seconde Guerre mondiale, de nouveau, le procédé a été employé pour interner les ressortissants des pays ennemis, mais dans ce cas la police française n'a pas fait de différence entre les Allemands et Autrichiens réfugiés en France et les partisans d'Hitler dont certains avaient organisé en France, dès le temps de paix, la « cinquième colonne »[8] . Les Britanniques aussi ont organisé des camps de concentration de civils de l'Axe. C'est ainsi que des civils allemands et britanniques du sexe masculin résidant aux Indes se sont retrouvés en 1940, internés au camp de Deraa Doun, sur les contreforts de l'Himalaya. D'autres camps de concentration ont été ouverts aux États-Unis, notamment ceux destinés aux japonais et aux citoyens états-uniens d'origine japonaise, après l'attaque de Pearl Harbor[9] ,[10] ,[11] . Bien des années après le souvenir de ces rafles de civils japonais et Nippo-Américains a refait surface[10] . Le gouvernement des États-Unis présenta des excuses à ce sujet, en 1988[11] . D'autre camps de concentration ont été instaurés ailleurs, entre 1940 et 1945, comme ceux du Canada destinés aux Nippo-Canadiens[12] et, entre autres, aux ressortissants d'origine italienne et allemande, aux Témoins de Jéhovah pacifistes et aux Québécois refusant la conscription. Des camps de concentration ont été constitués par le régime de Vichy en zone non occupée et en Afrique du Nord entre 1941 et 1944 pour interner des Juifs, des patriotes français récalcitrants et des antifascistes d'Europe centrale qui avaient trouvé refuge en France[13] . Ceux du Sud-Algérien où ont été regroupés des engagés allemands de la

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Camp de concentration

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Légion étrangère, sous la direction d'officiers et sous-officiers vichystes, ont été soumis à un régime tellement atroce, que plusieurs internés ont demandé, pour y échapper, à être rapatriés en Allemagne nazie[réf. nécessaire]. Bien qu'en France la plupart des camps de concentration de la Seconde Guerre mondiale soient imputables au régime de Vichy, celui de Gurs, destiné à regrouper les personnes de nationalité espagnole (fuyant la Guerre civile espagnole et la dictature de Franco) fut l'œuvre de la Troisième République[14] ,[15] . Il faut signaler ici le cas du camp de concentration de Jasenovac, un camp de l'État indépendant de Croatie d'Ante Pavelić. Dans ce camp dirigé par des Oustachis, furent tués de 45000 à 80000 Serbes, Croates, Juifs, Tziganes et opposants. Après 1945 Certains camps nazis ont été « réutilisés » après la libération pour les prisonniers de guerre ou des civils français et allemands[16] , comme par exemple le camp de Zgoda. Des camps de regroupement ont été créés pendant la guerre d'Algérie pour permettre le contrôle des populations algériennes[17] ,[18] . Par contre, les camps de regroupement de harkis après les accords d'Évian ne sont pas des camps de concentration : ils n'en n'avaient pas le caractère (les harkis, loin d'être des ennemis de la France, l'avaient au contraire servie, ils étaient de plein droit citoyens français, et ces camps ne comportaient ni régime carcéral, ni brimades), mais constituaient tout de même des camps de regroupement de la population. Leur durée d'existence, supérieure à dix ans, est allée bien au-delà de celle des simples camps de réfugiés, car les autorités françaises n'ont pratiquement rien fait pour assurer leur intégration.

Camps de concentration nazis À partir de 1933[19] , le Troisième Reich met en place des camps de concentration (Konzentrationslager ou KL) dans des buts punitifs et de discrimination : pour éloigner les opposants au régime puis pour y exterminer immédiatement ou par épuisement au travail et par mauvais traitements les Juifs, les Tziganes, les Témoins de Jéhovah, les homosexuels, les handicapés, les associaux, etc. En 1939, Hitler imputa aux Juifs la responsabilité de la guerre et transforma certains de ces camps de concentration en camps d'extermination.

Le fichage et la numérotation des prisonniers font partie de la dépersonnalisation.

Buts des camps de concentration nazis Les objectifs des camps de concentrations mis en place par le régime nazi sont notamment : • vider un pays de sa population, pour l'empêcher de soutenir des combattants à l'occasion d'une guerre ; • purger la population des personnes considérées comme nuisibles ; • exploiter un grand nombre de travailleurs forcés (camp de travail). Les personnes incarcérées dans de tels camps le sont souvent pour des motifs politiques, religieux, raciaux, d'une façon générale en raison d'une discrimination ou d'un soupçon à leur encontre. Les prisonniers y sont souvent : séparés de leurs proches, gardés dans des conditions précaires et difficiles, mal nourris, forcés à travailler et maltraités par les gardiens. La mortalité y est élevée.


Camp de concentration

Bagne, Katorga et Goulag Contrairement aux camps de concentration, les bagnes faisaient partie du système judiciaire ordinaire de la France et les katorgas de celui de la Russie impériale, mais en partagent les autres mêmes caractéristiques : • confinement ; • installations sommaires et étendues contrairement aux prisons ; • travail forcé, en général dur (beaucoup de prisonniers en mouraient) et sans qualification. Les bagnes furent installés dans les ports comme Toulon, après la suppression de la peine des galères, puis dans des territoires comme la Guyane et la Nouvelle-Calédonie. Les katorgas furent installés en Sibérie et dans les zones peu peuplées de l'Extrême-Orient russe donnant à ces contrées une réputation de punition. Après la révolution soviétique les camps de travail du Goulag de Sibérie ou du Grand Nord, peuvent être comparés à des camps de concentration puisque fonctionnant en dehors d'un système judiciaire régulier et réunissant un grand nombre de détenus dans des conditions très dures.

Relégation (en France) La relégation a été créée par la loi du 27 mai 1885 et a fonctionné en Guyane jusqu'en 1939, puis l'île de Ré a pris la relève. Elle était automatique pour les multirécidivistes jusqu’à la loi du 3 juillet 1954, mais a subsisté — comme facultative — jusqu'en 1970, où elle a été remplacée par la tutelle pénale jusqu'en 1981. C'est cette relégation qui a inspiré la chanson de Léo Ferré et Pierre Seghers, Merde à Vauban.

Actuellement À Cuba, le régime de Fidel Castro utilise des camps de rééducation depuis 1959 et, d'après Le Livre Noir du communisme, 100000 Cubains y ont été déportés depuis cette date. En décembre 2003, l'Assemblée nationale cubaine a également qualifié publiquement la base militaire américaine de Guantanamo comme étant un camp de concentration[20] . Selon certains témoignages de prisonniers politiques nord-coréens passés en Corée du Sud, il existerait plusieurs camps de concentration en Corée du Nord, comme celui de Yodok [[21]] où plus de 200 000 personnes se trouveraient. D'après ces mêmes sources, des humains y seraient l'objet d'expériences médicales, dans le but d'augmenter l'arsenal militaire atomique et biologique de cet Etat.[22]

Bibliographie • Antoine Blanchet, Le camp de concentration de Pontmain, 1914-1920, mémoire de maîtrise, Université du Maine. • Jean-Claude Farcy, Les camps de concentration de la Première Guerre mondiale (1914-1918), Les cahiers de la sécurité intérieure, no 17, 1994, p. 54-64. • Jean-Claude Farcy, Les camps de concentration français de la Première Guerre mondiale (1914-1920), Anthropos, Paris, 1995. • Florent Brayard, La « solution finale de la question juive ». La technique, le temps et les catégories de la décision, Fayard, 2004. • Joël Kotek, Pierre Rigoulot, Le Siècle des Camps : emprisonnement, détention, extermination, cent ans de mal absolu , J.-C. Lattès, 2001 (ISBN 2709618842) • Primo Levi, Si c'est un homme, 1947. • Jean Léger, Petite Chronique de l'Horreur ordinaire, 1999.

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Camp de concentration • Manuel Razola et Mariano Constante, Triangle bleu. Les républicains espagnols à Mauthausen, Gallimard, Paris, 1969. • Gaston Davoust (H. Chazé) : « Le crime des bagnes nazis: le peuple allemand est-il co-responsable » [23], Franche-Comté Libération, 1945.

Voir aussi Articles connexes • Camp d'extermination Sur les différents camps dans différents pays • au XIXe siècle : • les camps de Cuba durant la Guerre hispano-américaine ; • au XXe siècle : • Camps de concentration allemands 1914-1918 ; • Camp de concentration français qui tente de comptabiliser les camps français au XXe siècle, le Camp des Milles, Drancy, font partie de la quarantaine recensée ; • • • • • • • •

Camps de concentration franquistes ; Enric Marco ; Liste des camps de concentration nazis ; Les camps de rééducation de Corée du Nord ; Camp de Tarrafal ; Le Goulag soviétique ; Le Laogai chinois ; Omarska, Prijedor, et d'autres villes du nord de la Bosnie-Herzégovine ont abrité les camps de concentration mis en place par les autorité de la République serbe de Bosnie en 1991 et 1992 ; • Long Kesh est également considéré comme un camp de concentration par les républicains irlandais. • • • • • • • • •

Système de marquage nazi des prisonniers Kapo Primo Levi David Rousset Réfugiés et exilés de la guerre d'Espagne Varlam Chalamov Alexandre Soljenitsyne Robert Antelme auteur de L'espèce humaine. Un camp de travail vu psychologiquement Zoran Mušič

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Liens externes • Sur le site Mémoire Juive et Éducation [24], une page pour faire la différence entre camps de concentration et camps d'extermination. • Goulag soviétique [25] • L'histoire du système concentrationnaire [26] • Interner en République : le cas de la France en guerre d’Algérie. [27] • Existe-il un modèle français du camp ? [28] • Le site du mémorial de la Shoah [29] : archives, documents pédagogiques, témoignages.

Références [1] Annette Becker, « La genèse des camps de concentration : Cuba, la Guerre des Boers, la Grande Guerre, De 1898 aux années vingt », article paru dans la Revue d'Histoire de la Shoah, no 189, juillet-décembre 2008, Violences de guerre, violences coloniales, violences extrêmes avant la Shoah. [2] Redfield Proctor, discours du 17 mars devant le Sénat des États-Unis, cité par Annette Becker. [3] Burridge Spies, Methods of Barbarism? Roberts and Kitchener and Civilians in the Boer Republics, 1900-1902, Human and Rousseau, Le cap, 1978, p. 47-148, cité par Annette Becker, « La genèse des camps de concentration... », op. cit. [4] Annette Becker, « La genèse des camps de concentration... », op. cit., p. 115. [5] Annette Becker, « La genèse des camps de concentration... », op. cit., p. 116. [6] De février à juillet 1939, 15000 personnes meurent dans ces camps, la plupart de dysenterie. [7] Bartolomé Bennassar, La Guerre d'Espagne et ses suites, coll. « Tempus ». [8] Pierre Miquel, La Seconde Guerre mondiale, éd. Fayard, 1986, Paris (ISBN 2-7242-3370-0) ; rééd. Club France Loisirs, Paris, 1987, p. 57.

(en) Hirasaki National Resource Center : « Resources – Frequently Asked Questions » (http://www.janm.org/nrc/q-a.php#all), sur le site du Japanese American National Museum (en), janm.org, consulté le 28 octobre 2009. [10] Élise Prébin, « Mémoire des camps américains. L’exemple japonais » (http:/ / ateliers. revues. org/ document91. html), Ateliers, no 30, « Ethnographies japonaises », avril 2006, p. 251-282, mis en ligne le 8 juin 2007, consulté le 28 octobre 2009. [9]

[11] [pdf] Daniel Sabbagh, « Le statu des « Asiatiques » aux États-Unis – L’identité américaine dans un miroir » (http:/ / www. ceri-sciencespo. com/ publica/ critique/ article/ ci20p69-92. pdf), Critique internationale no 20, juillet 2003, p. 77-78, sur le site ceri-sciencespo.com, consulté le 28 octobre 2009. [12] (en) « Japanese Canadian Internment » (http:/ / www. lib. washington. edu/ subject/ Canada/ internment/ intro. html), Information at the University of Washington Libraries and Beyond, sur le site lib.washington.edu, consulté le 28 octobre 2009. [13] Assemblée nationale, « Proposition de loi no 171 du groupe communiste tendant à assurer le droit à réparation pour les résistants déportés, emprisonnés et internés en Afrique du Nord (1940-1944) » (http:/ / www. groupe-communiste. assemblee-nationale. fr/ Propos_loi/ ppl171. htm), 20 août 1997. [14] (en) United States Holocaust Memorial museum, (Mémorial de l'Holocauste des États-Unis), Holocaust Encyclopedia, « Gurs » (http:/ / www. ushmm. org/ wlc/ en/ index. php?ModuleId=10005298), sur le site ushmm.org. [15] Le camp de Gurs est construit par le gouvernement d'Édouard Daladier entre le 15 mars et le 25 avril 1939 pour accueillir des anciens combattants de la Guerre civile espagnole après la prise de pouvoir du général Franco [16] Voir le cas du camp de Margueritte près de Rennes : (http:/ / assoc. orange. fr/ memoiredeguerre/ convoi44/ vie-prison. htm) et (http:/ / perso. orange. fr/ bastas/ pga/ index. htm#Sommaire) [17] La visite de Pierre Macaigne à Bessombourg sert de référence aux articles qu’il a publiés le 22 juillet 1959, puis le 6 et le 7 octobre suivant (http:/ / colliotte. free. fr/ marquis. htm). [18] La triste affaire du camp de Zitouna ex Bessombourg : « Il s' agit d'enfants [...] Sous des conditions inhumaines, des parties entières des huit millions que comptait la population algérienne étaient tenues dans les camps de l'armée française. [...] En 1957, pour des raisons de stratégie militaire le village de Ziabra s'est retrouvé en zone interdite : résultat de ce découpage, 2774 habitants de ce village vont être rassemblés à Bessombourg (Zitouna), dans la presqu'île de Collo, un ancien centre d'exploitation forestière au milieu de la montagne. » (http:/ / www. geocities. com/ gouffi2003/ Appel. html) [19] Le camp de Dachau est mis en service le 31 mars 1933. [20] « La base de Guantanamo est un « camp de concentration » » (http:/ / www. elcorreo. eu. org/ article. php3?id_article=1308), Associated Press, La Havane, in El Correo, 26 décembre 2003. [21] http:/ / en. wikipedia. org/ wiki/ Yodok_concentration_camp [22] Informations tirées du docummentaire "Les Héritiés du Docteur Mengele" diffusé sur Arte en 2010 http:/ / webdocs. arte. tv/ 2010/ 05/ 12/ les-heritiers-du-dr-mengele-cobayes-humains-pendant-la-guerre-froide/ [23] http:/ / cf. geocities. com/ hemeis2003/ jt24_chaze. html [24] http:/ / www. memoire-juive. org/ camps_concentration. htm [25] http:/ / www. gulagmuseum. org/ index_eng. htm [26] http:/ / www. lescamps. org

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[27] http:/ / www. univ-brest. fr/ amnis/ documents/ Thenault2003. pdf [28] http:/ / barthes. ens. fr/ clio/ revues/ AHI/ articles/ preprints/ camp. html#fnB7 [29] http:/ / www. memorialdelashoah. org/

Camps de concentration nazis Les camps de concentration nazis sont des centres de détention de grande taille créés par le Troisième Reich à partir de 1933 et jusqu'à la fin de la Seconde Guerre mondiale, pour interner, exploiter la force de travail et tuer des opposants politiques, des résidents d'un pays conquis, des groupes ethniques ou religieux spécifiques, etc. Ce sont les détenus qui sont forcés de construire ces camps, les victimes travaillant dans des conditions inhumaines, y laissant souvent leur vie. Le Troisième Reich utilisa des camps de concentration, comme Dachau ou Buchenwald pour éloigner et terroriser les opposants politique au régime, puis ensuite pour y interner les tziganes, les Témoins de Jéhovah,les homosexuels et les « éléments asociaux » comme les criminels, vagabonds, etc. Après le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale, ces camps se multiplient pour y enfermer les résistants et opposants de toute l'Europe occupée, mais aussi pour constituer un réservoir de main-d'œuvre servile. Le travail y était épuisant, la nourriture insuffisante, les soins pratiquement inexistants, les mauvais traitements réguliers et la mortalité élevée. Tout visait à déshumaniser les victimes et à les conduire à une mort rapide. Cet appareil répressif a été complété à partir de 1939 par des camps mixtes, servant à la fois de camps de concentration et de camps d'extermination, comme Auschwitz-Birkenau et Majdanek, et par des camps uniquement consacrés à l'extermination des Juifs, comme Chełmno, Belzec, Sobibor et Treblinka.

Évolution dans le temps

Carte des camps de concentration nazis


Camps de concentration nazis

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La création des premiers camps Les premiers camps de concentration sont créés par la SA, comme Oranienburg en mars 1933[1] . Dès cette époque, on dénombre une quarantaine de camps de toutes tailles en Allemagne[] , comme ceux de Bredow, près de Stettin, créé par le chef SA Karpfenstein, ancien Gauleiter de Poméranie, de Breslau, dirigé par Edmund Heines, de Wuppertal[2] , de Kemna ou Benninghausen . La torture y est courante et fait l'objet de plaintes transmises à Adolf Hitler par le Ministre de la Justice, Franz Gürtner : « Les prisonniers n'ont pas seulement été frappés à coup de fouet et d'outils jusqu'à en perdre connaissance, et sans aucune raison, comme dans le camp d'internement de sécurité de Bredow près de Stettin, mais ils ont aussi été torturés d'autre façon »[] . Le mémorial du camp de concentration de Kemna

À Berlin, la SA ouvre une cinquantaine de « microcamps de concentration », installés dans des caves ou des dépôts où leurs victimes sont battues à mort, torturées ou égorgées[3] . Le premier chef de la Gestapo, Rudolf Diels, déclare après la guerre, à propos des prisons berlinoises de la SA : « Les interrogatoires avaient commencé et fini par un passage à tabac. À quelques heures d'intervalle, une douzaine de gars avaient frappé leurs victimes avec des barres de fer, des matraques en caoutchouc et des fouets. Dents brisées et os cassés témoignaient des tortures. À notre entrée, ces squelettes vivants couverts de plaies suppurantes étaient allongés les uns à côté des autres sur leur paillasse putréfiée »[4] . Le camp de Kislau est créé le 21 avril 1933 et géré par le Ministère de l'Intérieur du Land de Bade, celui de Lichtenburg par la police du Land de Saxe-Anhalt, Bad Sulza est financé par le Ministère de l’Intérieur et dirigé par la police du Land de Thuringe et gardé par des SA. La Columbia Haus à Berlin est tout d'abord une prison illégale de la Gestapo avant de devenir un camp géré par la SS. Ces « camps sauvages », selon l'expression d'Olga Wormser-Migot[5] , sont gérés par des amateurs : il s'agit de « camps éphémères, de camps en rodage »[5] , qui n'ont généralement qu'une brève existence, à l'exception notable de Dachau, dont la création est annoncée par le préfet de Munich début mars 1933[6] et dont la garde est transférée de la SA à la SS le 11 avril 1933[7] . Les « camps sauvages » sont pour la plupart dissous lors l'organisation du système concentrationnaire par Theodor Eicke.


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L'organisation mise en place par Theodor Eicke, 1933-1939 En juin 1933, Theodor Eicke est nommé par Himmler commandant du camp de concentration de Dachau[8] , où sont alors détenus 2000 prisonniers[9] . Il y met immédiatement en place les bases du système concentrationnaire nazi, notamment en ce qui concerne l'obéissance aveugle des gardiens aux ordres, et le système de surveillance, de discipline et de châtiment des détenus, dont « le but est de briser psychologiquement, moralement et physiquement les prisonniers »[10] . Avec Papa Eicke, surnom qui lui est donné par les gardiens de camp[11] , on passe de la brutalité indisciplinée de la SA à la terreur planifiée de la SS. Ses résultats font forte impression sur Himmler qui le promeut SS-Brigadeführer le 30 janvier 1934, puis SS-Gruppenführer, ce qui le place au second rang de la hiérarchie SS[12] . À partir du 4 juillet 1934, Eicke est nommé inspecteur des camps de concentration et commandant des unités Totenkopf (Inspekteur des Konzentrationslager und Führer des SS [13] Totenkopfverbände) . En tant qu'inspecteur des camps, il dépend du RSHA dirigé par Reinhard Heydrich, et plus particulièrement de la Gestapo ; comme commandant des Totenkopfverbände, il relève du bureau central de la SS, le SS-Hauptamt, et prend ses ordres directement auprès de Himmler[14] . Dès 1936, Eicke plaide pour l'agrandissement des camps existants et la construction de nouveaux centres de détention et envisage de les utiliser comme réservoir de main-d'œuvre servile[15] .

Theodor Eicke

Eicke lance une profonde réorganisation du système concentrationnaire achevée en 1939. Il ferme peu à peu les premiers camps pour regrouper, pendant l’été 1937, les détenus dans quatre camps principaux : Dachau, Sachsenhausen, Buchenwald et Lichtenberg, pour les femmes[16] . Après cette diminution du nombre des camps, on assiste à une augmentation, avec la création en 1938 de Flossenbürg , en préparation au démembrement de la Tchécoslovaquie et de Mauthausen, immédiatement après l'Anschluss, puis par le camp de femmes de Ravensbrück en 1939[17] . Durant l’invasion de la Pologne, la SS ouvre à Dantzig le camp du Stutthof ainsi que sept autres camps prévus pour y interner des Polonais suspects. Cinq mois après l’invasion de la Pologne, la création d’Auschwitz est décidée[18] . Eicke met également en place le règlement interne de Dachau, promulgué le 1er octobre 1933[19] et rapidement généralisé à l’ensemble des camps. Selon la formule d'Olga Wormser-Migot, il peut être résumé par la phrase : « Tolérance signifie faiblesse. »[] . « Quiconque fait de la politique, tient des discours ou des réunions de provocation, forme des clans, se rassemble avec d'autres dans le but d'inciter à la révolte, se livre à une nauséabonde propagande d'opposition ou autre sera pendu en vertu du droit révolutionnaire; quiconque se sera livré à des voies de fait sur la


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personne d'un garde, aura refusé d'obéir ou se sera révolté sous quelque forme que ce soit, sera considéré comme mutin et fusillé sur-le-champ ou pendu. » — Extrait du règlement régissant la discipline et la répression des détenus de Dachau, rédigé par Theodor Eicke[20] . Dans tous les camps se mettent en place une violence, une cruauté contrôlées et disciplinées, un véritable système de terreur bien codifié qui se poursuit après le départ de Eicke. Il est notamment appliqués par des commandants de camp créés par Eicke, comme Rudolf Höß à Auschwitz, Franz Ziereis à Mauthausen et Karl Otto Koch à Sachsenhausen et Buchenwald.

Une grille d'entrée avec l'inscription en allemand “ARBEIT MACHT FREI” signifiant en français “LE TRAVAIL REND LIBRE” au camp de concentration de Dachau.

« A cette époque, combien de fois n'ai-je pas dû me dominer pour faire preuve d'une implacable dureté ! Je pensais alors que ce qu'on continuait à exiger de moi dépassait les forces humaines ; or, Eicke continuait ses exhortations pour nous inciter à une dureté encore plus grande. Un SS doit être capable, nous disait-il, d'anéantir même ses parents les plus proches s'ils se rebellent contre l'État ou contre les conceptions d'Adolf Hitler. »

— Rudolf Höß[21] Jusqu'au début de la Seconde Guerre mondiale, des libérations restent possibles mêmes si elles sont rares. Les internés qui recouvrent la liberté sont contraints au secret, règle qu'ils respectent généralement, de peur de se voir à nouveau internés. Cette possibilité de « rédemption » et de libération est confirmé par un texte du commandant d' Esterwegen signé par Eicke lui-même. « Chaque prisonnier en détention de sécurité a la liberté de réfléchir sur le motif pour lequel il est venu au camp de concentration. Ici, l'occasion lui est offerte de changer de sentiments intimes à l'égard du peuple et de la patrie, et de se dévouer à la communauté populaire sur la base nationale-socialiste, ou bien, s'il y attache plus de prix, de mourir pour la sale IIe ou IIIe Internationale juive d'un Marx ou d'un Lénine. » — Document signé par Theodor Eicke, début 1933[22] Eicke semble apprécié par ses troupes, ce qui explique vraisemblablement son surnom de Papa Eicke. D'après Wolfgang Sofsky, il met systématiquement en place une politique de copinage, à l'opposé des traditions militaires qu'il déteste : Eicke demande à ses hommes de se tutoyer, fusionne les mess des sous-officiers et des officiers, protège ses hommes, même en cas d'entorse aux règles, sauf s'il manifestent un sentiment de pitié envers les détenus, cherche le contact, lors de ses fréquentes tournées d'inspection, avec les hommes du rang, en l'absence de leurs supérieurs[23] . Lorsque des gardiens abattent un détenu pour tentative de fuite, il demande qu'on leur évite de subir un interrogatoire, pour ne pas les inquiéter[24] .

La WVHA et l'internationalisation 1939-1945 Au fur et à mesures des conquêtes allemandes, les camps se peuplent de détenus de 22 nationalités différentes, Tchèques en 1938, Polonais en 1939, Hollandais, Français, Belges et Luxembourgeois à partir de 1940, mais dont la majorité ne sont internés qu'à partir de 1943 et 1944, antifacistes italiens, républicains espagnols, Danois et Norvégiens, Russes... Ce mélange des nationalités accroît les rivalités internes et instaure une hiérarchie entre déportés, en fonction de leur origine, mais aussi de leur connaissance de l'allemand[25] Le 2 janvier 1941, Reinhard Heydrich, chef du RSHA, établit par circulaire une classification des camps en trois catégories[26] : • I : camps pour détenus susceptibles d'être amendés ; Dachau, Sachsenhausen et Auschwitz • II : camps pour détenus à la conscience chargée mais tout de même encore susceptibles de rééducation ; Buchenwald, Flossenburg, Neuengamme, Birkenau • III : Mauthausen.


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Selon Olga Wormser-Migot, cette note « semble plutôt exprimer la volonté de camoufler la réalité concentrationnaire aux yeux mêmes de ceux qui en actionnent les rouages, que celle d' établir une relation rationnelle entre le degré du crime et l'importance du châtiment »[] . L'Office central administratif et économique de la SS (en allemand SS-Wirtschafts- und Verwaltungshauptamt), dirigé par Oswald Pohl est chargé, le 3 mars 1942, de la gestion de tous les camps, mais aussi de celle des entreprises de la SS[27] .

Le fonctionnement des camps Les déportés Généralités Les premières victimes du système concentrationnaire sont des allemands opposants politiques au nazisme, au premier rang desquels les marxistes : les militants du Parti communiste d'Allemagne (KPD), du Parti social-démocrate d'Allemagne (SPD), du Parti communiste d'Allemagne - opposition (KPO), et du Parti socialiste ouvrier d'Allemagne (SAP). Ils y sont rapidement rejoints par des militants syndicalistes, par des membres de partis centristes ou de droite qui n'adhèrent pas aux thèses nazies et plus généralement par des personnes suspectées par la SS ou la Gestapo. Dès 1936, Theodor Eicke impulse l'arrestation et l'internement dans les camps de nouvelles catégories de détenus qui n'ont aucun rapport avec les opposants au régime, « mendiants, criminels, récidivistes de la petite délinquance, ivrognes, chômeurs professionnels, clochards, Tziganes et zélateurs de sectes religieuses »[28] . En 1938, après l'Anschluss, des Autrichiens, devenus citoyens du Reich sont internés dans les camps. Au fur et à mesure des annexions ou des conquêtes militaires, l'origine des détenus s'élargit pour atteindre 22 nationalités différentes, y compris des républicains espagnols réfugiés en France après la victoire de Franco[29] . A l'exception des Tziganes, et au contraire de l'extermination des Juifs, les déportés ne sont pas internés en raison de leur prétendue race ou de leur nationalité, mais pour leur dangerosité réelle ou supposée pour la société allemande ou le régime nazi. Selon Olga Wormser-Migot, au total, entre 2000000 et 2500000 auront été internées pour un temps plus ou moins long dans les camps[30] . Les différentes catégories Les prisonniers politiques Immédiatement après l'incendie du Reichstag, le 28 février 1933, près de 4000 membres du Parti communiste d'Allemagne sont internés dans les camps[31] . Son président, Ernst Thälmann est interné, passe de prison en prison pour aboutir à Buchenwald où il est assassiné en août 1944[31] . La mise création du Deutsche Arbeitsfront le 10 mai 1933, qui supprime les syndicats, puis l'instauration du NSDAP comme parti unique, le 14 juillet 1933 permettent d'arrêter à leur tour les membres des partis interdits, au premier rang desquels ceux du Parti socialiste et les militants syndicaux[31] . Ces militants de gauche sont rejoints par tous les opposants politiques au nazisme, membres d'un parti politique interdit ou sans appartenance précise[32] . La catégorie des politiques reprend également des membres du parti nazi ayant commis des délits au sein de celui-ci, des soldats de la Wehrmacht condamnés pour vol, désobéissance grave


Camps de concentration nazis ou désertion, mais aussi des allemands qui ont enfreint la législation sur les devises ou écouté des radios étrangères, ou des personnes dénoncées à la Gestapo pour de motifs de vengeance personnelle sans aucun rapport avec une quelconque opposition politique[32] . Presque tous les étrangers internés après le déclenchement de la seconde guerre mondiale sont également versés dans la catégorie des détenus politiques, de même que 4000 à 5000 pasteurs protestants et prêtres catholiques[32] . Les criminels Remis à la Gestapo par la Kriminalpolizei, les « criminels »[33] sont répartis en deux catégories. Ils comprennent d'une part les détenus internés par mesure de sécurité (Sicherungsverwahrteverbrecher ou SV), condamnés de droit commun qui purgent leur peine dans un camp de concentration alors que leur place est en prison. D'autre part, on y retrouve les « détenus préventivement à titre de justice » (Befristete Vorbeungshäftlinge ou BV) dont les initiales en allemand signifient également « criminels professionnels » (Berufsverbrecher), ayant déjà purgé plusieurs peines en fonction du droit commun. Cette deuxième catégorie est le vivier des Kapos les plus brutaux. Les homosexuels Le triangle rose (en allemand : Rosa Winkel) était dans l'univers concentrationnaire nazi le symbole utilisé pour marquer les homosexuels. De taille supérieure aux autres triangles, ce symbole de persécution, de discrimination, a été repris par la communauté homosexuelle comme symbole identitaire. Dans les camps nazis, les déportés homosexuels doivent porter un triangle rose, pointe tournée vers le bas, qui les identifie comme tels. La hiérarchie concentrationnaire les place au plus bas de l'échelle sociale des camps. Les « asociaux » Les « asociaux » constituent sans doute la catégorie la plus hétérogène au sein des déportés. On y trouve notamment des vagabonds, braconniers, voleurs à la tire, ivrognes, souteneurs mais aussi des personnes dénoncées à la Gestapo par de « bons nazis » pour être arrivées en retard à plusieurs reprises à leur travail, avoir pris congé sans avertissement préalable ou avoir déplu à leur patron[34] .

Les témoins de Jéhovah Après l'incarcération des dirigeants des Témoins de Jéhovah à Magdebour en 1934, une vague d'arrestations frappe leurs membres en 1936, amplifiée en 1937 suite à une ordonnance du Ministre de l'Intérieur qui les livre à la Gestapo[35] . Poursuivis pour leur refus absolu de porter les armes ou de prêter serment au national-socialisme, environ 3000 Bibelforscher sont déportés dans les camps[36] . Les Tziganes Sur les 700 000 Tziganes, ou Roms, que comptait l'Europe à l'époque, entre 300 000 et 500 000 ont été exterminés après la signature par Heinrich Himmler, chef des SS, d'une circulaire désignant ce peuple comme « un ennemi biologique, de race étrangère et de sang étranger ». Dans la typologie raciale nazie, les Tziganes étaient classés comme une catégorie « hybride » dont la non-sédentarité caractérisait la « dégénérescence ». A Auschwitz, les Tziganes étaient internés séparément, dans le Zigeunerfamilienlager. D'autres camps d'internement provisoires étaient construits en particulier en Europe centrale où les Tziganes étaient parqués avant de partir pour les camps de concentration.

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Camps de concentration nazis La politique d'annihilation des populations tziganes en Europe durant la Deuxième Guerre Mondiale est appelée Porajmos, et a été qualifiée de génocide à plusieurs reprises en Allemagne, notamment en 1982 par une déclaration du Bundestag. Les Juifs Les déportations de juifs débutèrent en 1941 et faisaient suite aux persécutions dans les ghettos et à des exécutions par fusillades. Sur 5 100 000 de juifs morts pendant la Shoah, 2 700 000 ont péri dans les camps de concentration et les camps d'extermination[37] .

Kapos et Prominenten A l'intérieur des camps ou pour surveiller le travail des détenus dans les kommandos, les gardiens confient de nombreuses tâches à des détenus, des doyens de block (Blockälteste) qui assistent les Blockführer aux Kapos[38] . Ces tâches sont de préférence déléguées aux triangles verts, avec lesquels les déportés politiques mènent une lutte féroce pour le contrôle de la hiérarchie interne. Certains postes permettent à des détenus d'augmenter ou de diminuer les chances de survie des internés, comme ceux des kapos des cuisines ou du Revier (infirmerie). Les déportés nommés à des postes de responsabilité, les Prominenten disposent d'une influence décisive pour la désignation de leurs adjoints (secrétaires de block ou du Revier...). Pour 1000 détenus, on compte environ 25 Prominenten, dont le statut précaire reste à le merci des SS, la perte de celui-ci signifiant le plus souvent la mort. De par cette délégation, les nazis exacerbent les rivalités entre les détenus (verts contre rouges, communistes contre socialistes, allemands contre français...).

Les bourreaux Organisation administrative La Kommandantur A la tête de chaque camp de concentration, on trouve un commandant. La Kommandantur a officiellement autorité sur toutes les affaires de service et de personnel, mais ses pouvoirs sont en réalité limités par la division des responsabilités au sein de l'administration des camps[39] . Les commandants passent la majeure partie de leur temps de travail dans leur bureau, à « vérifier et signer des circulaires, des lettres, des rapports et d'innombrables formulaires »[40] . Il n'en reste pas moins qu'être commandant d'un camp de concentration devient une profession dans l'Allemagne nazie: Richard Baer débute ses activités à Dachau, puis passe par Neuengamme, le "SS-Wirtschafts- und Verwaltungshauptamt", Auschwitz et Dora-Mittelbau; Kurt Franz participe au programme d'euthanasie, puis fait carrière a Auschwitz, Belzec etTreblinka; Friedrich Hartjenstein exerce ses activités à Sachsenhausen, Birkenau, au Struthof et à Flossenburg ; pour Rudolf Höss, il s'agit de Dachau, Sachsenhausen et Auschwitz, et la liste de ces professionnels passant d'un camp à l'autre peut également comprendre, sans être exhaustive, les parcours de Karl Otto Koch, Max Koegel ou Joseph Kramer.

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Camps de concentration nazis La section politique Le chef de la section politique[41] est nommé par le RSHA et dépend directement de celui-ci. Cette « section vitale, chargée d'assurer la continuité de la répression » est notamment responsable de l'enregistrement des détenus, de la tenue à jour du fichier et des interrogatoires. Les tâches de sécrétariat sont assurées par des détenus (82 à Buchenwald). La section de la détention La section de la détention[42] est dirigée par un Schtuzhaftlagerfürher et est responsable de toutes les activités concernant les détenus : correspondance, nourriture, sanctions, liste des malades et des détenus au travail... Du Schtuzhaftlagerfürher dépend le Rapportführer, assisté par les Blockführer : celui-ci est en charge de l'appel, de l'établissement de la liste des punitions, de celles des détenus malades et de l'effectif détaillé des kommandos travaillant au sein du camp ou à l'extérieur de celui-ci. Sous les ordres des Blockführer se trouvent les membres de la hiérarchie des déportés, les Prominenten (détenus prééminents), doyens de block (Blockältester), de chambre (Stubbenältester) et leurs adjoints (Stubedienst).

Les conditions de vie Outre les assassinats et les brutalités perpétrés par les gardiens ou les Kapos, les principales causes de mortalité dans les camps découlent de la sous-alimentation chronique des détenus, de l'épuisement par le travail, des conditions d'hygiène déplorables et de l'absence de repos physique ou psychique.[43] On appelle musulman le prisonnier qui, ayant cédé à la pression physique et morale, est devenu une sorte de mort-vivant, de spectre errant. Cette expression d'origine incertaine aurait été forgée par les SS par référence aux Arabes censés accepter le destin avec fatalisme, ou en raison des pansements portés par les prisonniers qui évoquaient le turban. L'exploitation économique Avant le déclenchement de la seconde guerre mondiale, l'exploitation économique des internés est à usage interne. Les détenus sont notamment utilisés pour l'extension du système concentrationnaire. En mars 1938, un kommando de Dachau entame la construction du camp de Mauthausen, et en janvier 1939, 500 prisonniers d'Oranienburg font de même à Ravensbruck[44] . Le 29 septembre 1941, Oswald Pohl organise par circulaire l'exploitation économique des détenus[45] , en organisant l' Arbeiteinstaz. Sur la base de cette circuclaire, les effectifs de détenus aptes au travail, mais aussi leurs compétences professionnelles, font l'objet d'un fichier dans chaque camp et d'un fichier central à l'inspection générale des camps à Oranienburg. Environ deux millions de détenus des camps sont employés dans les industries du Reich de 1941 à la fin du conflit, aux côtés de travailleurs étrangers, volontaires ou forcés, et de prisonniers de guerre. A titre d'exemple, l'usine de Krupp à Essen emploie, début 1942, 55000 travailleurs étrangers, 18000 prisonniers de guerre et 5000 détenus. Le 30 avril 1942 marque un tournant radical en « instaurant le caractère désormais productif du camp et la règle de l'extermination par le travail »[46] . Lors d'un exposé à Heinrich Himmler, Pohl précise que « l'internement des prisonniers pour les seules raisons de sécurité, d'éducation ou de prévention n'est plus la condition essentielle ; l'accent est à porter maintenant sur le côté économique... [ce qui nécesite] de prendre certaines mesures ayant pour but de transformer les camps de concentration en organisations mieux adaptées aux tâches économiques, alors qu'ils ne présentaient auparavant qu'un intérêt purement politique ». Ses ordres aux commandants des camps et aux responsables du travail des détenus sont très clairs : « le commandant du camp est seul responsable de l'emploi de la main-d'œuvre disponible, cet emploi doit être total au sens propre du mot, afin d'obtenir le rendement maximum. [...] Il n'y a pas de limites à la durée du travail... ». Cette nouvelle orientation déclenche une féroce rivalité entre Himmler, qui souhaite privilégier les entreprises dépendant directement du WVHA, Albert Speer, ministre de l'armement, Hermann Göring, responsable du plan de

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Camps de concentration nazis quatre ans et Fritz Sauckel. Elle entraîne également une multiplication des kommandos extérieurs dépendant des camps et la création de nouveaux comaps dont la finalité première est économique, comme Buna Monowitz, l'un des trois camps du complexe d' Auschwitz, destiné à la production de caoutchouc synthétique par IG Farben qui verse à la SS quatre marks par jour pour un ouvrier qualifié et trois marks pour un manœuvre, ou Dora, usine souterraine de fabrication des VI et VII, tout d'abord kommando de Buchenwald, en août 43, puis camp indépendant à partir d'octobre 44, avec 40 camps ou komamndos extérieurs .

La libération des camps Dès juillet 1944, les troupes soviétiques découvrent et libèrent les premiers camps, sans forcément prendre conscience de l’ampleur du phénomène ; le 27 janvier 1945 Auschwitz, le dernier camp d'extermination, encore en activité est à son tour libéré par les soviétiques. La majorité des camps sont libérés par les troupes alliées au fur et à mesure de leur progression: les russes libèrent notamment Sachsenhausen le 22 avril, et Ravensbrück le 30 ; les britanniques Bergen-Belsen le 14 avril, les américains Flossenburg le 23 avril, Dachau le 29, Neuengamme le 4, et finalement Mauthausen le 5 mai. Quant au camp de Buchenwald, une partie des déportés en prennent le contrôle le 11 avril 1945, quelques heures avant l'arrivée des américains.

Les marches de la mort Entre la fin 1944 et 1945, précédant l'arrivée des soviétiques à l'est, de nombreux camps (Stutthof, Auschwitz mais aussi de nombreux camps annexes) ont été évacués de leurs prisonniers. Les nazis souhaitaient conserver une main d'œuvre pour l'effort de guerre. Les prisonniers évacués à pied et peu fréquemment en train, par petits groupes, souvent sans nourriture et avec très peu de vêtements dans des conditions climatiques hivernales très dures sont morts soit d'épuisement, soit liquidés parce que ne pouvant plus avancer. On a appelé cette évacuation les "marches de la mort". Bien peu ont pu se cacher et s'échapper en attendant l'arrivée des russes. Des hommes, des femmes, de nombreux juifs (car les plus faibles et les plus éprouvés dans les camps), mais aussi des français, des polonais, des hongrois ont ainsi péri au moment d'être libérés. Une carte des pérégrinations serait à publier.

Bilan On estime à plusieurs millions (4 à 6 généralement) le nombre de personnes qui ont transité dans un camp de concentration nazi[47] . Après la capitulation du pouvoir nazi, et les procès des responsables des crimes contre l'humanité de la Deuxième Guerre mondiale, pour les victimes et les générations futures s'est posé la question de la mémoire de ces atrocités. Pour contrer le négationisme et éviter absolument la reproduction du totalitarisme rasciste, les camps de concentration accueillent partout en Europe des mémoriaux et des musées consacrés aux brutalités qui y ont été commises. Auschwitz, Majdanek, Dachau et au Struthof, sont désormais des lieux de mémoire et de pédagogie. La mémoire de ces lieux a été l'occasion de nombreux conflits comme par exemple entre la communauté juive et les catholiques à Auschwitz, ou par exemple dans l'ancien camps de concentration nazi de Potulice aui a été utilisé après la victoire sur le fascisme comme camps d'internement des minorités allemandes sur le chemin de leur expulsion de Pologne. Avec la chute du Mur et la politique de réconciliation historique, la commémoration à ces deux évènements est désormais rassemblée en un lieu[48] .

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Voir aussi Bibliographie • • • • • • • • • • •

Amicale d'Oranieneburg-Sachsenhausen, Sachso, Paris, Plon, 1982. Robert Antelme, L'Espèce humaine, Gallimard, 1985. Lucy S. Dawidowicz, La Guerre contre les Juifs, Hachette, 1977 Raul Hilberg, La Destruction des Juifs d'Europe (3 volumes), Gallimard, coll. « Folio-histoire », 2006 Rudolf Höss, Le commandant d'Auschwitz parle, Paris, La découverte, 2005. (ISBN 2707144991) Heinz Höne, L'ordre noir, Histoire de la SS, Casterman, Tournai, 1972. Ian Kershaw, Hitler, 1936-1945, Paris, Flammarion, 2001. (ISBN 2082125297)Ouvrage de référence. Guido Knopp, Les SS, un avertissement de l'histoire, Paris, Presses de la Cité, 2006. (ISBN 9782258064171) Primo Levi, Si c'est un homme, Paris, Julliard, 1987 (éd. or. 1947). Arno J. Mayer, La « solution finale » dans l'histoire, La Découverte, Paris, 1990. (ISBN 2707136808) Eugen Kogon, L'état SS. Le système des camp de concentration allemands, Paris, Seuil, coll. Points Histoire, 1993 (éd. or. La jeune parque, 1947). (ISBN 2020141361) • David Rousset, Les jours de notre mort, Paris, Hachette, 1993, 2 vol. (ISBN 2010212479) • Wolfgang Sofsky, L'organisation de la terreur, Paris, Calmann-Lévy, coll. Liberté de l'esprit, 1995. (ISBN 2702124291)

• • • •

Albert Speer, L'empire SS, Robert Laffont, Paris, 1982. (ISBN 2221009002) Olga Wormser-Migot, L'ère des camps, Paris, Union générale d'éditions, 1973. Eugen Kogon, Der SS Staat, Das System der deutschen Konzentrationslager éditions Seuil, Points Histoire. Daniel Blatman, Les marches de la mort - la dernière étape du génocide nazi - été 1944-printemps 1945 éditions Fayard 2009 (ISBN 978-2-213-63551-4).

Liens connexes • • • • • • • •

Camp de concentration Camps d'extermination Nazisme Shoah Liste des camps de concentration nazis L'élimination des malades mentaux Catégorie:Déporté et Catégorie:Déporté-résistant Porajmos

Liens et documents externes • • • • • •

(de) Shoa.de [49] (fr) Site de la Fédération nationale des déportés et internés résistants et patriotes [50] (fr) Une liste très complète des camps et lieux d'internement [51] (en) Mémorial de l'Holaucauste [52] (de) Banque de données des lieux de détention et des camps sous le nazisme de 1933 à 1945 [53] (de) Ministère de la justice d'Allemagne fédérale : répertoire des camp de concentration et de leurs camps annexes [54]

• (fr) Témoignage d'un déporté d'Auschwitz-Birkenau (vidéo) [55]

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Références [1] Jacques Delarue, Histoire de la Gestapo, Fayard, Paris, 1962, p. 52 [2] J. Delarue, op. cit., p. 58 [3] Heinz Höne, L'ordre noir, Histoire de la SS, Tournai, Casterman, 1972, p. 63 [4] Ian Kershaw, Hitler, vol.1 1889-1936, Paris, Flammarion, 1999, p.708 [5] Olga Wormser-Migot, L'ère des camps, Paris, Union générale d'éditions, 1973, p. 33 [6] O. Wormser-Migot, op. cit, p.33 [7] Mario R. Dederichs, Heydrich, Tallandier, Paris, 2007, p. 69 [8] G. Knopp, op.cit., p. 65 [9] Arno J. Mayer, La « solution finale » dans l'histoire, La Découverte, Paris, 1990, p.153 [10] A. Mayer, op.cit., p. 372 [11] G.Knopp, op.cit., p.64 [12] A. Mayer, op.cit.p.172 et 196 [13] Georges H. Stein, Histoire de la Waffen SS, Paris, Stock-Le livre de poche, 1977, p.31 [14] Wolfgang Sofsky, L'organisation de la terreur, Paris, Calmann-Lévy, 1995, p.46-47 [15] A. Mayer, op. cit., p. 186 [16] A. Mayer, op. cit., p. 185 [17] W. Sofsky, op.cit., p. 48 [18] O. Wormser-Migot, op. cit., p. 64 [19] O. Wormser-Migot, op. cit. , p. 56 [20] G. Knopp, op.cit., p.64 [21] R. Höss, op. cit., p. 107 [22] O. Wormser-Migot, op. cit., p. 35 [23] W. Sofsky, op.cit., p.132 [24] Eugen Kogon, L'Etat SS, Le système des camps de concentration allemands, Paris, Seuil, coll. Points Histoire, 1993, p.396 [25] O. Wormser-Migot, op. cit., p. 193 [26] O. Wormser-Migot, op. cit. , p. 99-102 [27] O. Wormser-Migot, op. cit., p.163-164 [28] Arno J. Mayer, op. cit., p.186 [29] O. Wormser-Migot, op. cit., p.193 [30] O. Wormser-Migot, op. cit., p. 248 [31] O Wormser-Migot, op.cit., p. 32-33 [32] E. Kogon, op.cit., p. 40-41 [33] L Cette section se base sur E. Kogon, op. cit., p. 38-39 [34] E. Kogon, op. cit., p. 39 [35] E. Kogon, op.cit., p. 41 [36] Les témoins de Jéhovah (http:/ / memorial-wlc. recette. lbn. fr/ article. php?lang=fr& ModuleId=153) sur le site de l'encyclopédie mondiale de la Shoah [37] Raul Hilberg, La Destruction des Juifs d’Europe, éd. Gallimard, collection Folio, 2006, tome III, p. 2272. [38] sauf mention contraire, la présente section se base sur O. Wormser-Migot, op. cit., p. 206-214 [39] W. Sofsky, op. cit., p. 134 [40] W. Sofsky, op. cit., p. 141 [41] O. Wormser-Migot, op. cit. , p. 135-136 [42] O. Wormser-Migot, op. cit. , p. 139-140 [43] O. Wormser-Migot, op. cit., p. 214-217 [44] O. Wormser-Migot, op. cit., p. 43 [45] sauf mention contraire, le texte qui suit se base sur O. Wormser-Migot, op. cit., p. 160-185 [46] O. Wormser-Migot, op. cit., p. 132 [47] Encyclopædia Universalis, Thesaurus, p. 842. [48] Potulice: One place - different memories (http:/ / www. geschichtswerkstatt-europa. org/ expired-project-details/ items/ potulice. html) [49] http:/ / www. shoa. de [50] http:/ / www. fndirp. asso. fr/ index. html [51] http:/ / www. memoire-juive. org/ liste_camps. htm [52] http:/ / www. memorial-museums. net [53] http:/ / www. keom. de/ denkmal/ [54] http:/ / bundesrecht. juris. de/ begdv_6/ anlage_6. html [55] http:/ / www. dailymotion. com/ Yann333/ video/ x7na3i_charles-gottlieb-rescap-dauschwitzb_news

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Camp d'extermination

Camp d'extermination Un camp d’extermination est un lieu organisé pour l’exécution en masse de personnes. Ce terme désigne généralement les camps d’extermination du régime nazi pendant la Seconde Guerre mondiale. Ils se distinguent des camps de concentration par leur unique activité : l'assassinat de masse et prennent la relève des activités des Einsatzgruppen. Les camps d’extermination nazis réalisent la mise en pratique de méthodes industrielles pour le massacre organisé des Juifs, des homosexuels, et des Tziganes. Dans le cas des Juifs, cette politique d’extermination fut appelée « la solution finale de la question juive » par les fonctionnaires nazis, Les camps en Europe durant la Seconde Guerre mondiale. finalisée lors de la conférence de Wannsee le 20 janvier 1942. Le premier camp d'extermination fut celui de Chelmno qui ouvrit dans le Warthegau au printemps 1942 (la partie de Pologne annexée à l'Allemagne en décembre 1941). Le plus grand camp d'extermination fut celui d'Auschwitz-Birkenau.

Handicapés Une tentative d'extermination totale des handicapés physiques et mentaux (programme T4) avait déjà été tentée sur le territoire du Reich avant la mise en œuvre de la solution finale de la question juive. C'est dans ce cadre que les premières exécutions au gaz (oxyde de carbone) ont été réalisées, mais après que les malades ont été rendus somnolents par l'administration de médicaments[1] . Les nazis ont été contraints d'y mettre fin suite à l'émotion et à la protestation d'une partie de la population allemande, relayée par les églises protestante et catholique[2] .

Ghettos et tueurs Le processus d'extermination des Juifs commence avant la réalisation des camps d'extermination. Les ghettos dans lesquels sont regroupés de force les Juifs des territoires occupés à l'Est par les Allemands visent déjà à les détruire par la faim, les maladies et les mauvais traitements. L'extermination systématique des Juifs commence avec l'invasion de l'Union soviétique au printemps 1941. Elle y est menée à l'arrière du front par des troupes spécialisées, des groupes de tuerie mobiles (les Einsatzgruppen) qui feront environ un million de victimes, auxquelles il faut ajouter des centaines de milliers tuées par d'autres unités mobiles, qui ne portaient pas le nom d'Einsatzgruppen mais en avaient toutes les caractéristiques, et la mission. Les camps d'extermination commencent à fonctionner à partir du début de l'année 1942. Ils sont six, tous situés sur le territoire de la Pologne occupée (sauf le camp d'extermination de Jasenovac) : • • • •

Auschwitz-Birkenau ; Majdanek ; Treblinka ; Sobibor ;

• Belzec ; • Chełmno.

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Camp d'extermination Auschwitz-Birkenau et Majdanek sont des camps mixtes, à la fois centre de mise à mort et camps de travail forcé. Treblinka, Sobibor, Belzec et Chelmno sont uniquement des centres de mise à mort immédiate. Ce ne sont pas à proprement parler des camps dans la mesure ou rien n'est prévu pour loger les déportés qui sont exécutés immédiatement après leur arrivée. Quelques déportés, très peu nombreux, sont cependant affectés au fonctionnement du camp dans des unités spéciales appelées Sonderkommandos. Il ne s'agit pour eux que d'un sursis, car ils sont régulièrement exterminés à leur tour. Le camp d'extermination de Jasenovac ouvert en 1941 est une exception située dans la Croatie d’Ante Pavelić. Il est totalement sous autorité des Oustachis qui sans aucune intervention allemande organisent l'extermination des Juifs, des Tziganes, et des Serbes de leur territoire. Les déportés étaient amenés par trains spéciaux directement à l’intérieur ou à proximité du camp. À leur descente du train, les hommes étaient séparés des femmes et des enfants, les effets personnels devaient être abandonnés sur place. Dans les camps mixtes une partie des déportés est sélectionnée pour travailler dans le camp. Les autres étaient dirigés vers des chambres à gaz, vastes pièces closes dans lesquelles était introduit du monoxyde de carbone ou, comme à Auschwitz, un gaz mortel, le Zyklon B. Pour s'assurer jusqu'au dernier moment de leur docilité, on faisait croire aux victimes qu'elles allaient prendre une douche par mesure d'hygiène. Clé du système, l'espoir était ainsi subtilement distillé dans l'esprit des victimes par toutes sortes de moyens, et ce jusqu'à la fin. Cet espoir, allié aux violences les plus extrêmes, et à une organisation sans faille, suffisait la plupart du temps à annihiler toute réticence ou tentative de résistance et explique en partie la facilité avec laquelle les exécutants de la solution finale purent mener à la mort de telles multitudes en si peu de temps. Les corps étaient ensuite, selon les cas, incinérés ou enterrés dans d'immenses fosses communes, tandis que tous leurs effets personnels étaient récupérés, triés et ré-expédiés en Allemagne à bord des mêmes trains. L'organisation minutieuse et le rendement de ces usines faisaient la fierté de leurs créateurs. Par la même occasion, ils récupéraient tout ce qui pouvait servir au Reich : vêtements, cheveux, or, argent, bijoux, lunettes, etc.

Camps mixtes et camps de travail forcé Dans les camps mixtes, ceux qui n’étaient pas exterminés dès leur arrivée, les plus aptes à travailler, faisaient alors connaissance avec les conditions de vie de ces camps. Le travail épuisant, les coups, les privations, les maladies, la mort qui guettait le moindre de leurs faux pas, volontaire ou non, et des expériences scientifiques pour lesquelles ils servaient parfois de cobaye, avaient vite raison de la plupart d'entre eux. L'espérance de vie se comptait généralement en jours. Ils devenaient ainsi les esclaves de ce système dont le savant processus les conduisait à devenir les instruments même de l'anéantissement des leurs. Les camps de travail forcé de Pologne, qu'ils soient des camps d'extermination ou considérés, à l'exemple du Stutthof à proximité de Gdansk, comme des camps de concentration, doivent être distingués des camps de concentration installés avant la guerre sur le territoire du Reich. En effet, ils ont tous pour fonction ultime, non l'internement mais l'extermination, plus ou moins rapide, des populations qu'ils contiennent[réf. nécessaire]. L'existence de camps mixtes ne s'est pas limitée à la seule Pologne. Ainsi en témoigne l'existence du camp du Struthof en Alsace avec sa chambre à gaz et son four crématoire. Ce camp fut également un lieu d'expérimentations diverses sur des cobayes humains. Le camp de Dachau en Bavière fut mis en service dès 1933 et peut à ce titre être considéré comme un prototype des camps qui furent construits durant la guerre.

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Références [1] Léon Poliakov, Bréviaire de la haine, Calmann-Lévy (Poche), 1974, p. 279-280 [2] voir l'intervention de l'évêque de Munich Mgr von Galen

Cinéma • • • • • • • •

Nuit et brouillard, 1955, documentaire d'Alain Resnais. Shoah, 1985, documentaire de Claude Lanzmann. La Liste de Schindler, 1993, film de Steven Spielberg d'après le livre du même nom de Thomas Keneally. La vie est belle, 1998, film de fiction de Roberto Benigni. Un vivant qui passe, 1997, documentaire de Claude Lanzmann. Sobibor, 14 octobre 1943, 16 heures, 2001, documentaire de Claude Lanzmann. Amen., 2002, film de Costa-Gavras inspiré de la pièce Le Vicaire et du témoignage de Kurt Gerstein. Le Pianiste, 2002, film sur la vie du pianiste Władysław Szpilman pendant la Seconde Guerre mondiale par Roman Polanski.

Bibliographie • Saul Friedländer, Les Années de persécution. L’Allemagne nazie et les Juifs, 1933-1939, Seuil, 2008, 534 p. (ISBN 9782020970280)

• Saul Friedländer, Les Années d’extermination. L’Allemagne nazie et les Juifs, 1939-1945, Seuil, 2008, 1030 p. (ISBN 9782020202824)

• Raul Hilberg, La Destruction des Juifs d'Europe, Troisième édition Fayard, 2006 ; Éditions Gallimard, coll. « Folio Histoire. », septembre 2006, 2414 pages en trois volumes. • Annette Wieviorka, Auschwitz, 60 ans après, Robert Laffont , 2005, 289 p. • Cf la bibliographie de l'article Auschwitz-Birkenau

Musique • Nuit et brouillard, une chanson de Jean Ferrat de 1963

Voir aussi Liens internes • • • • •

Aktion Reinhardt Liste des camps de concentration nazis Négationnisme Programme Aktion T4 Shoah

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Camp d'extermination

Liens externes • Association Fond Mémoire d'Auschwitz (http://www.afma.fr/som001.html) • (en) United States Holocaust Memorial Museum (http://www.ushmm.org/) • Informations sur les membres des Sonderkommandos d'Auschwitz (http://www.sonderkommando.info/) sur le site Sonderkommando.info • Memorial de Caen (http://www.memorial-caen.fr/fr/histoire_en_ligne/accueil.php/) • Auschwitz, mal absolu (http://www.paris4philo.over-blog.org/article-11989006.html) par Hannah Arendt • Concours national de la Résistance et de la Déportation 2004-2005 (http://celine.raymond08.free.fr/)++

Camp d'internement français Les camps d'internement français sont des centres de rétention administrative ou des camps de réfugiés ou de prisonniers de guerre, créés en France pendant la période s'étalant de la Première Guerre mondiale à la Seconde Guerre mondiale. En 1914-1918, on parlait officiellement de camps de concentration[1] . Toutefois, le titre de l'ouvrage de l'historien Jean-Claude Farcy, Les camps de concentration français de la Première Guerre mondiale (1995), a pu être critiqué en raison du changement de sens de l'expression « camp de concentration » depuis la Seconde Guerre mondiale et l'expérience des camps nazis : bien que les conditions de vie aient été très dures dans les camps français, et la mortalité élevée[1] ,[2] , ils n'étaient pas secrets, n'entraient pas dans un projet d'extermination et duraient uniquement le temps d'un conflit[1] (Première et Seconde Guerres mondiales, guerre d'Espagne). On distingue ainsi en général d'une part entre camp de concentration et camp d'internement, et d'autre part ces deux formes de camp du camp d'extermination[1] . Le seul camp de concentration nazi, c'est-à-dire sous l'autorité directe de l'Allemagne nazie, ayant existé sur le territoire français actuel est le Struthof[3] ,[4] ,[5] ,[6] , en Alsace alors sous administration allemande. Ce camp était équipé d'une chambre à gaz. D'autres camps, d'internement, sur le territoire français, ont dépendu d'autorités étrangères: ainsi le camp de travailleurs chinois du Commonwealth établi à Noyelles-sur-Mer (Somme) entre 1916 et 1919[7] ou le camp d'internement de la police militaire américaine de Septèmes-les-Vallons (Bouches-du-Rhône) en 1944[7] . Environ 40000 étrangers, dont de nombreux réfugiés espagnols, sont soumis, à partir de septembre 1940 au travail obligatoire dans ce qu'on appelle les « Groupes de travailleurs étrangers ». En métropole, il peut s'agir en zone libre de travaux agricoles dans des fermes pour remplacer les prisonniers de guerre, en zone occupée de travaux de fortification du mur de l'Atlantique dans le cadre de l'Organisation Todt. En Afrique du Nord, dans des « camps de représailles » comme Hajerat M'Guill, ou dans des chantiers comme celui du transsaharien, « de nombreux travailleurs succombent à la faim, aux maladies et à la torture »[8] ,[9] .

Avant la Seconde Guerre mondiale Il faudrait distinguer ceux de la Première Guerre mondiale, et ceux qui furent ouverts par le gouvernement du Front populaire pour regrouper les réfugiés de la Guerre civile espagnole. • Des prisonniers civils de la Première Guerre mondiale (Allemands, Autrichiens, Ottomans) furent détenus à Pontmain en Mayenne. • Des réfugiés républicains et patriotes basques de la Guerre civile espagnole furent regroupés surtout dans le Roussillon, mais aussi jusqu'en Bretagne. On relève les sites de : • Agde, dans l'Hérault, • Argelès-sur-Mer, dans les Pyrénées-Orientales,

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Camp d'internement français • Angoulême: Le Camp des Alliers (orthographe validée). C'est là que seront raflées 927 personnes, pour former le premier convoi de la l'histoire de la seconde guerre mondiale à destination de Mauthausen. • Gurs dans les Basses-Pyrénées (aujourd'hui Pyrénées-Atlantiques)[10] . • Moisdon-la-Rivière, et Juigné-des-Moutiers, en Loire-Inférieure (aujourd'hui Loire-Atlantique)[11] . • Camp de Rivesaltes, dans les Pyrénées-Orientales, sera fermé en 1942. Les Juifs seront envoyés à Drancy, les Tziganes à Saliers, et les Espagnols à Gurs[12] . • Le Vernet dans l'Ariège. • Le camp de Judes à Septfonds dans le Tarn-et-Garonne. Soit au moins six camps dès avant 1939. Il faudrait y ajouter : • les camps de prisonniers de guerre pour les Allemands en 1939, tels que le camp des Milles ; parfois un secteur particulier des camps précédents ; compte tenu du déroulement des opérations, les soldats allemands prisonniers furent peu nombreux. • ceux de l'Empire colonial, mal connus en Europe.

Pendant la Seconde Guerre mondiale Dès 1939 les camps existants se rempliront d'Allemands et d'Autrichiens, c'est-à-dire indifféremment d'opposants au régime nazi (communistes, socialistes, opposants divers, Juifs allemands ou autrichiens) ou de personnes favorables au régime hitlérien, ou de combattants allemands. Ensuite, après la défaite de 1940 et la chute du régime républicain, viendront les Juifs, qui seront peu à peu livrés aux nazis. Le régime des multiple camps qui ont existé en France pendant la guerre a été extrêmement variable, selon qu'ils se trouvaient en zone libre, en zone occupée ou en zone annexée, selon l'époque en distinguant avant et après la dénonciation du traité d'armistice en 1942 et l'invasion de la zone libre par les Allemands, et aussi selon leurs statuts qui allait d'un régime quasi carcéral, à celui de centres de villégiature pour réfugiés dont la direction était déléguée à des associations confessionnelles, en général protestantes d'origine alsacienne. Sous la Troisième République et le régime de Vichy, seront créés des camps qui s'appelleront diversement : • • • • •

Camps d'accueil ; Camps d'internement ; Camps de séjour ; Centres de séjour surveillés ; Camps de prisonniers.

Une autre catégorie apparaît sous le régime pétainiste : • Camps de transit, signifiant généralement que les détenus devaient être déportés en Allemagne (cas de Drancy, Pithiviers, etc.). Des camps d'internement des Tsiganes firent aussi leur apparition sous le régime de Vichy : voir l'article Porajmos. Il n'a existé qu'un seul camp d'extermination en France, le camp du Struthof, ou Natzweiller-Struthof, créé par les nazis en Alsace, territoire alors annexé par l'Allemagne. Il possédait une chambre à gaz de fortune qui fut utilisée pour exterminer au moins 86 détenus (notamment Juifs) dans le but de constituer une collection de squelettes intacts (ce mode d'exécution ne les altérant pas) pour le professeur nazi August Hirt. À proximité, se trouvait le camp de rééducation de Vorbrück-Schirmeck, destiné aux Alsaciens Mosellans annexés au Reich et récalcitrants. À partir de 1942, plusieurs camps d'internement sous administration française sont devenus les antichambres des camps d'extermination allemands en Europe de l'Est. En zone occupée, le camp de Drancy fut jusqu'en 1942 sous administration française. La gendarmerie et la police française furent réquisitionnée par les SS afin de les assister

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Camp d'internement français pour convoyer plusieurs trains de déportés à destination des camps d'extermination situés en Allemagne.

Camps en métropole • Agde dans l'Hérault, camp créé début 1939 pour les réfugiés espagnols, puis Centre de rassemblement des étrangers. • Aincourt, dans le Val-d'Oise. Le Sanatorium d'Aincourt servit partiellement de camp d'internement pour les internés politiques et s'emplit de communistes de 1940 à 1942[13] . • Albi dans le Tarn, Centre de rassemblement des étrangers. • Altillac en Corrèze, Château du Doux [14],Centre d'internement pour étrangers • Ambleteuse dans le Pas-de-Calais, Centre de rassemblement des étrangers. • Le camp des Alliers près d'Angoulême, dans la Charente, pour les nomades. • Amnéville dans la Moselle, Centre de rassemblement des étrangers. • Le Fort-Carré d'Antibes dans les Alpes-Maritimes, Centre de rassemblement des étrangers. • Arandon dans l'Isère, internés juifs et Centre de rassemblement des étrangers. • La Saline royale d'Arc-et-Senans dans le Doubs, pour les Tziganes[15] ; • Argelès-sur-Mer dans les Pyrénées-Orientales, Camp créé début 1939 pour les réfugiés espagnols, puis Centre de rassemblement des étrangers. • • • • • • • • • • • • • • • • • • • •

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Argentan dans l’Orne, Centre de rassemblement des étrangers. Argenteuil dans le Val-d'Oise, Centre de rassemblement des étrangers. Avrillé-les-Ponceaux en Indre-et-Loire, au camp de la Morellerie pour les Tziganes. Camp du Pont de la Dame à Aspres-sur-Buëch dans les Hautes-Alpes Athis-de-l'Orne dans l’Orne, Centre de rassemblement des étrangers. Audierne dans le Finistère, Centre de rassemblement des étrangers. Camp du Ruchard à Avon-les-Roches dans l’Indre-et-Loire, Centre de rassemblement des étrangers. Avord dans le Cher, Centre de rassemblement des étrangers. Le Barcarès dans les Pyrénées-Orientales, camp créé début 1939 pour les réfugiés espagnols, puis Centre de rassemblement des étrangers. Barenton dans la Manche, Centre de rassemblement des étrangers, pour les nomades. Bar-le-Duc dans la Meuse, Centre de rassemblement des étrangers. Bassens dans la Gironde, Centre de rassemblement des étrangers. Bazoilles-sur-Meuse dans les Vosges, Centre de rassemblement des étrangers. Beaune-la-Rolande dans le Loiret, internés juifs à partir de mai 1941. Bengy-sur-Craon dans le Cher, Centre de rassemblement des étrangers. Besançon, dans le Doubs, dans la caserne Vauban. Béthune dans le Pas-de-Calais, Centre de rassemblement des étrangers. Blois dans le Loir-et-Cher, Silo, Centre de rassemblement des étrangers. Fort de La Bonnelle (appelé également fort Decrès) à Saints-Geosmes dans la Haute-Marne, Centre de rassemblement des étrangers. Bourg-Lastic, dans le Puy-de-Dôme, qui était un ancien camp militaire, Centre de rassemblement des étrangers, ou furent détenus des Juifs sous Vichy (témoignage d'André Glucksmann qui y entra à quatre ans) ; ce camp « accueillit » des harkis dans les années 1960 et des Kurdes réfugiés d'Irak dans les années 1980. Bourg-Saint-Julien dans le Loir-et-Cher, Centre de rassemblement des étrangers. Bourgoin dans l’Isère, Centre de rassemblement des étrangers. Camp militaire de La Braconne à Jauldes dans la Charente, Centre de rassemblement des étrangers. Bram dans l'Aude, Camp créé début 1939 pour les réfugiés espagnols, puis internement de Juifs.

• Brens dans le Tarn, aux portes de Gaillac, Camp mixte de femmes. • Briey dans la Meurthe-et-Moselle, Centre de rassemblement des étrangers.

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Carpiagne dans les Bouches-du-Rhône, pour les nomades. Carrouges dans l’Orne, Centre de rassemblement des étrangers. Cascaret dans le Gard, Centre de rassemblement des étrangers. Casseneuil dans le Lot-et-Garonne. Catus-Cavalier dans le Lot, Centre de rassemblement des étrangers. Catus-Villary dans le Lot, Centre de rassemblement des étrangers. Cepoy dans le Loiret, Centre de rassemblement des étrangers. Chabane dans l’Ardèche, Centre de rassemblement des étrangers. Le Chaffaut dans les Alpes-de-Haute-Provence, Centre de rassemblement des étrangers. Chambaran dans l'Isère, Centre de rassemblement des étrangers Allemands. Chantonnay en Vendée, Centre de rassemblement des étrangers. Chazelles-sur-Lyon dans la Loire, Centre de rassemblement des étrangers. Chelles dans la Seine-et-Marne, Centre de rassemblement des étrangers. Le Cheylard dans l’Ardèche, Centre de rassemblement des étrangers. Chibron à Signes dans le Var, Centre de rassemblement des étrangers. Choisel, à Châteaubriant,de 1941 à 1942, Centre de séjour surveillé, internés politiques et nomades.

• Compiègne dans l'Oise de juin 1941 à août 1944 au Royallieu. Fiche descriptive du camp [16] Robert Desnos (1900-1945) et Jean Moulin (1899-1943) ont transité par ce camp. • Coudrecieux, dans la Sarthe pour les Tziganes. • Damigny dans l’Orne, Centre de rassemblement des étrangers. • Dampierre dans le Calvados, Centre de rassemblement des étrangers. • Le fort du Paillet à Dardilly dans le Rhône, camp mixte. • Le camp du Fé de la Genebière à Domérat dans l'Allier, Centre de rassemblement des étrangers. • Domfront dans l’Orne, Centre de rassemblement des étrangers • Douadic, dans l'Indre.Fiche du camp de Douadic [17] • Doullens dans la Somme, internés politiques à partir de mai 1941. • Drancy, camp créé par le gouvernement français en 1939 pour y détenir des communistes, suspects en raison du Pacte germano-soviétique, et où l'État français de Pétain enverra la gendarmerie française convoyer des Juifs dès 1941; la gestion directe du camp était réglée par les Nazis, les gendarmes français faisaient office de gardes; il comprenait 3 annexes parisiennes: le camp Austerlitz, le camp Lévitan rue du Faubourg-Saint-Martin, le camp Bassano. • Camp Du Grand-Saunier, à Gétigné près de Clisson dans la Loire-Atlantique,Centre de rassemblement des étrangers. • Dreux dans l’Eure-et-Loir, Centre de rassemblement des étrangers replié sur Tence, dans la Haute-Loire. • Écrouves dans la Meurthe-et-Moselle pour les internés politiques. • L'Épinay-le-Comte dans l’Orne, Centre de rassemblement des étrangers. • Les Essarts-Varimpré dans la Seine-Maritime, Centre de rassemblement des étrangers. • Etaples dans le Pas-de-Calais, Centre de rassemblement des étrangers. • Falaise dans le Calvados, Centre de rassemblement des étrangers. • Le Fauga en Haute-Garonne, Centre de rassemblement des étrangers. • Forcalquier dans les Alpes-de-Haute-Provence, Centre de rassemblement des étrangers. • Fort-Barraux, dans l'Isère, Centre de rassemblement des étrangers puis Centre de séjour surveillé mixte[18] . • La Fouillouse dans la Loire, Centre de rassemblement des étrangers. • Fresnay-sur-Sarthe dans la Sarthe, Centre de rassemblement des étrangers. • Camp de La Verrerie, Les Aydes à Fleury-les-Aubrais dans le Loiret • Gaillon dans l’Eure, pour les internés politiques et de droit commun. • Camp du Grand-Saunier à Gétigné dans la Loire-Atlantique, Centre de rassemblement des étrangers.

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Gondreville dans le Loiret, Centre de rassemblement des étrangers. Gorges dans la Loire-Atlantique, Centre de rassemblement des étrangers. Grand Champ dans le Loir-et-Cher, Centre de rassemblement des étrangers. Grandville dans l’Oise, Centre de rassemblement des étrangers. Grez dans la Mayenne, pour les nomades. La Guiche Saône-et-Loire, Sanatorium surveillé ouvert en 1941. Camp de Gurs (Pyrénées-Atlantiques), créé en 1939 pour les réfugiés espagnols, utilisé ensuite comme centre de rassemblement des étrangers pour détenir des Allemands en 1939-1940, comme camp de réfugiés pendant l'occupation, puis comme camp de concentration après l'armistice. Harchéchamp annexe de Neufchâteau dans les Vosges. Hauteville, Centre de rassemblement des étrangers. Hesdin dans le Pas-de-Calais, Centre de rassemblement des étrangers. Huriel dans l’Allier, Centre de rassemblement des étrangers. Jargeau dans le Loiret près d'Orléans, destiné aux Tziganes[19] . Lambesc dans les Bouches-du-Rhône, Centre de rassemblement des étrangers. Lalande, dans l'Yonne Camp de la Lande[20] à Monts dans l’Indre-et-Loire, internement de Juifs.

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Lens dans le Pas-de-Calais, Centre de rassemblement des étrangers. Libourne dans la Gironde, Centre de rassemblement des étrangers. Limoges dans la Haute-Vienne, Centre de rassemblement des étrangers. Linas-Montlhéry dans l'Essonne, pour les Tziganes. Lisieux dans le Calvados, Centre de rassemblement des étrangers. Loriol-sur-Drôme dans la Drôme, Centre de rassemblement des étrangers et pour les internés âgés. Maizières-lès-Metz dans la Moselle, Centre de rassemblement des étrangers. Le Malzieu-Ville dans la Lozère, Centre de rassemblement des étrangers. Manosque dans les Alpes-de-Haute-Provence, Centre de rassemblement des étrangers. Marmagne dans la Côte-d'Or, Centre de rassemblement des étrangers transféré aux Garrigues et aux Les Milles. Marolles, dans le Loir-et-Cher, Centre de rassemblement des étrangers. Masseube, dans la Gers. Les Mazures dans les Ardennes où de juillet 1942 à janvier 1944, un Judenlager a été ouvert. Mérignac dans la Gironde, camp mixte ouvert en 1941. Hôtel Bompard à Marseille dans les Bouches-du-Rhône, pour les femmes et enfants juifs. Hôtel Terminus à Marseille dans les Bouches-du-Rhône, pour les femmes et enfants juifs. Hôtel du Port à Marseille dans les Bouches-du-Rhône, pour les femmes et enfants juifs. Hôtel du Levant à Marseille dans les Bouches-du-Rhône, pour les femmes et enfants juifs. Martinet, Centre de rassemblement des étrangers. Mattaincourt dans les Vosges, annexe de Mirecourt. Mazères dans l’Ariège, Centre de rassemblement des étrangers. Camp de Guelaintin à Mayenne dans la Mayenne, Centre de rassemblement des étrangers. Les Mées dans les Bouches-du-Rhône, Centre de rassemblement des étrangers. Camp de Rieucros à Mende en Lozère, camp ouvert le 31-1-1939 pour les réfugiés Espagnols puis les étrangers. Meslay-du-Maine, en Mayenne, Centre de rassemblement des étrangers. Metz dans la Moselle, Centre de rassemblement des étrangers. Camp de Bellevue à Meuvaines dans le Calvados, Centre de rassemblement des étrangers. Mignères-Gondreville dans le Loiret, Centre de rassemblement des étrangers.

• Miramas dans les Bouches-du-Rhône, Centre de rassemblement des étrangers.

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Camp d'internement français • Les Milles près d'Aix-en-Provence dans les Bouches-du-Rhône, qui fut le plus grand camp d'internement du Sud-Est de la France. De ce camp de transit furent déportés 2 500 juifs en août 1942[21] ; • Mirecourt dans les Vosges, Centre de rassemblement des étrangers. • Moisdon-la-Rivière dans la Loire-Atlantique, pour les nomades. • Moloy dans la Côte-d'Or, pour les nomades et étrangers. • Monsireigne dans la Vendée, pour les nomades. • Montargis dans le Loiret, Centre de rassemblement des étrangers. • Montauban dans la Tarn-et-Garonne, Centre de rassemblement des étrangers. • Montbard dans la Côte-d'Or, Centre de rassemblement des étrangers. • Montceau-les-Mines. • Le Mont-Dore dans le Puy-de-Dôme, Centre de rassemblement des étrangers mixte. • Montendre dans la Charente-Maritime, pour les nomades et les étrangers. • Montguyon dans la Charente-Maritime, Centre de rassemblement des étrangers. • Montreuil-Bellay, dans le Maine-et-Loire, l'un des camps créés pour les Tziganes ou Roms. • Montsûrs dans la Mayenne, pour les nomades. • Lamotte-Beuvron dans le Loir-et-Cher, pour les nomades et les étrangers. • Mourmelon dans la Marne, appelé également Bouzy. • Mulsanne dans la Sarthe, pour les soldats français puis les nomades et Juifs, ensuite pour les prisonniers allemands . • Neufchâteau dans les Vosges, Centre de rassemblement des étrangers. • Neufchâtel-en-Bray dans la Seine-Maritime, Centre de rassemblement des étrangers. • Neuvy-sur-Craon dans le Cher, Centre de rassemblement des étrangers. • Nevers dans la Nièvre, Centre de rassemblement des étrangers. • Nexon, dans la Haute-Vienne, Centre de séjour surveillé pour les internés politiques. • Noé - Mauzac Haute-Garonne, Centre de rassemblement des étrangers puis Centre de séjour surveillé créé en février 1941. • Olargues dans l’Hérault, Centre de rassemblement des étrangers. • Vélodrome d'Hiver (dit Vel d'Hiv) à Paris, Centre de rassemblement des étrangers. • Les Invalides à Paris, Centre de rassemblement des étrangers. • Stade Buffalo à Paris, Centre de rassemblement des étrangers. • Stade Roland-Garros à Paris, Centre de rassemblement des étrangers. • Les Tourelles à Paris, Centre de séjour surveillé mixte. • Peigney dans la Haute-Marne, Centre de rassemblement des étrangers et des nomades. • Pithiviers,pour l'internement des juifs début 1941. • Poitiers, dans la Vienne, mixte et pour les Tziganes. • Port-Louis, dans le Morbihan, dans la citadelle. • Prin-deyrançon(Deux Sèvres) le long de la voie de chemin de fer. • Quimper Camp N°135, camp de prisonniers. [22] • Camp de Clairfond à Portet-sur-Garonne dans la Haute-Garonne • Camp du Récébédou, à Portet-sur-Garonne dans la Haute-Garonne, pour l'internement de juifs en juillet 1940[23] ; • Remoulins dans le Gard, Centre de rassemblement des étrangers • Rennes dans l’Ille-et-Vilaine, mixte • Camp de Rivesaltes également appellé camp Joffre dans les Pyrénées-Orientales, pour l'internement de juifs . • La Roche-sur-Yon dans la Vendée, Centre de rassemblement des étrangers; • Fort de Romainville, dans la Seine-Saint-Denis : En 1940, le fort fut investi par l’armée allemande et transformé en prison. De là, des résistants et des otages furent dirigés vers les camps. 3900 femmes et 3100 hommes furent internés avant d’être déportés vers Auschwitz, Ravensbrück, Buchenwald et Dachau. 152 personnes furent

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fusillées dans l’enceinte du Fort. Certains s’en évadèrent comme Pierre Georges, dit « colonel Fabien ». De sa cellule, Danièle Casanova encouragea ses compagnes à tenir tête à leurs tortionnaires[24] . Rombas dans la Moselle, Centre de rassemblement des étrangers. Rosières-en-Santerre dans la Somme, Centre de rassemblement des étrangers. Rouillé dans la Vienne, camp mixte. Royallieu, à Compiègne dans l'Oise. Camp de la Chaume Les Sables-d'Olonne dans la Vendée : Centre de rassemblement des étrangers. Camp de la Viscose au Plateau Saint-Antoine dans la banlieue d'Albi dans le Tarn, Centre de rassemblement des étrangers. Saint-Cyprien, camp créé début 1939 pour les réfugiés espagnols, puis Centre de rassemblement des étrangers, qui hébergeait 90 000 réfugiés en mars 1939, fermé officiellement pour « raisons sanitaires » le 19 décembre 1940 et ses occupants transférés à Gurs[25] . Saint-Denis dans la Seine-Saint-Denis, Centre de rassemblement des étrangers. Saint-Germain-les-Belles dans la Haute-Vienne, Centre de rassemblement des étrangers. Saint-Jean-de-la-Ruelle dans le Loiret, Centre de rassemblement des étrangers. Saint-Jodard dans la Loire, Centre de rassemblement des étrangers. Camp de Plainval à Saint-Just-en-Chaussée dans l’Oise, Centre de rassemblement des étrangers.

• Saint-Martin-de-Ré dans la Charente-Maritime, Centre de séjour surveillé ouvert en mars 1940 pour les politiques. • Camp des Garrigues à Saint-Nicolas dans le Gard, Centre de rassemblement des étrangers. • Saint-Maurice-aux-Riches-Hommes, dans l'Yonne, pour les Tziganes. • Saint-Paul-d'Eyjeaux, dans la Haute-Vienne,camp ouvert en novembre 1940 pour les politiques. • Saint-Pons dans l’Hérault, Centre de rassemblement des étrangers • Saint-Savin dans l’Isère, Centre de rassemblement des étrangers ex-Autrichiens. • Saint-Sulpice-la-Pointe dans le Tarn,[26] ; Centre de rassemblement des étrangers, pour les politiques à partir de septembre 1939. • Sallaumines dans le Pas-de-Calais, Centre de rassemblement des étrangers. • Saliers, camp de concentration destiné aux tsiganes dans les Bouches-du-Rhône, près d'Arles, pour les nomades. • Camp de Judes à Septfonds dans le Tarn-et-Garonne, camp créé début 1939 pour les réfugiés espagnols, puis Centre de rassemblement des étrangers. • Sériège près de Cruzy dans l’Hérault, Centre de rassemblement des étrangers • Signes dans le Var, Centre de séjour surveillé pour les politiques. • Sionne dans les Vosges, annexe de Neufchâteau. • Sisteron dans les Alpes-de-Haute-Provence, Centre de rassemblement des étrangers, Centre de séjour surveillé et pour internés politiques et de droit commun. • Talence dans la Gironde, Centre de rassemblement des étrangers. • Tence dans la Haute-Loire, Centre de rassemblement des étrangers. • Thil en Meurthe-et-Moselle. • Camp de Toulboubou, à Pontivy, Morbihan. • Toulon dans le Var, Centre de rassemblement des étrangers. • Stade Du Toulouse olympique employés club(TOEC) à Toulouse dans la Haute-Garonne. • Trélissac dans la Dordogne, Centre de rassemblement des étrangers. • Camp Jules-Ferry à Troyes dans l’Aube, mixte. • Uzès dans le Gard, Centre de rassemblement des étrangers. • Château de Frémont à Vallon-en-Sully dans l’Allier, Centre de Rassemblement des étrangers, internement de familles (femmes et enfants mai-juin 1940). • Vals-les-Bains dans l’Ardèche, pour les politiques.

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Camp d'internement français • • • • • • • • • • • • • • • •

Les Vaudeurs dans l’Yonne, mixte. Vedène dans le Vaucluse, Centre de rassemblement des étrangers. Vénissieux dans le Rhône, Centre de rassemblement des étrangers. Le Vernet dans l'Ariège camp ouvert début 1939 pour regrouper 12.000 combattants et réfugiés espagnols, puis Centre de rassemblement des étrangers, « hébergera » des harkis. Véruches dans le Loiret, Centre de rassemblement des étrangers. Vienne dans l’Isère, Centre de rassemblement des étrangers. Camp de Sourioux à Vierzon-Les-Forges dans le Cher, Centre de rassemblement des étrangers. Vif dans l’Isère, Centre de rassemblement des étrangers sarrois. Camp de Francillon à Villebarou dans le Loir-et-Cher, Centre de rassemblement des étrangers. Le Vigan dans le Gard, Centre de rassemblement des étrangers. Hameau de Villemalard à Marolles dans le Loir-et-Cher, Centre de rassemblement des étrangers. Villerbon dans le Loir-et-Cher, Centre de rassemblement des étrangers. Villers dans les Vosges, annexe de Mirecourt. Vittel, dans les Vosges, qui « accueillait » des possesseurs de passeports américains ou britanniques. Vitré dans l’Ille-et-Vilaine, Centre de rassemblement des étrangers. Voves, en Eure-et-Loir ; camp ouvert début 1942 pour les politiques.

• Woippy en Moselle, créé en 1943. « L'ouverture rapide de nouveaux camps sera créatrice d'emplois et la gendarmerie ne cessera d'embaucher à cette époque », Maurice Rajsfus, Drancy, un camp de concentration très ordinaire, Cherche Midi éditeur. On ajoutera : • Struthof, ou Natzweiller-Struthof, en Alsace, seul camp de concentration créé par les nazis en territoire français annexé. • Schirmeck, en Alsace, camp de redressement nazi à l'attention des Alsaciens et Mosellans réfractaires au nazisme.

Camps en Algérie Dans les départements français d'Algérie et départements français du Sahara, des camps de travail ou d'internement pour les Juifs et travailleurs étrangers sont créés. • • • • • • • • • • • • • • • •

Abadla Ain el Ourak Bechar Berguent Bogari Camp Suzzoni à Boghar, pour les étrangers. Colomb Bechar Djelfa, camp mixte. Djenien Bou Rezg, camp mixte. El Aricha, pour les internés de droit commun. Kenadsa Ksar Etir, camp de concentration près de Setif [réf. nécessaire] Mecheria, camp mixte. Meridja près d'Oran, le camp de Bossuet, au Telagh, pour les politiques également Centre de séjour surveillé[27] . Sidi-Bel-Abbès

Note : 600 militants, communistes ou responsables syndicaux pour la plupart, anarchistes aussi, avaient été déportés sans jugement particulier [réf. nécessaire]. Parmi eux, figuraient les 27 députés communistes dont Florimond Bonte a

29


Camp d'internement français retracé « le Chemin de l’honneur », qui avaient été condamnés à cinq ans de prison en avril 1940 par un tribunal militaire. Les députés avaient été enfermés au bagne de Maison Carrée, les autres dans des camps du Sud algérois, notamment à Djelfa, ou du Sud oranais.[28] ;

Camps au Maroc • • • • • •

Bouarfa Centre de rassemblement pour étrangers, Groupement de travailleurs étrangers. Boudenib, pour les internés de droit commun également Centre de séjour surveillé. Missour, pour les étrangers. Oued Zem, pour les étrangers. Sidi el Ayachi, pour les étrangers. Tendrara

Camps en Tunisie • Gafsa, pour les internés de droit commun. • Le Kef, pour les étrangers.

Camps en Indochine Il y eut plusieurs camps d'internement et de concentration japonais pour les populations civiles françaises durant l'occupation japonaise.

À la Libération Camps pour les suspects de collaboration Pendant la période de la libération (juin 1944 - mai 1946) de nombreux camps servent à l'internement administratif des suspects de collaboration dans le cadre de l'épuration.

Camps pour les prisonniers de guerre allemands Environ 750000 prisonniers de guerre allemands sont internés en France en 1945, encore 301000 au début de 1948 et les derniers sont libérés fin 1948[29] . Exemples : camps de Voves [30] , de Gurs[31] , Joffre à Rivesaltes...

Après la Seconde Guerre mondiale Des camps ont existé, pendant les guerres d'Indochine et d'Algérie, généralement appelés camps de regroupement.

Guerre d'Algérie Durant la guerre d'Algérie, le Ministère de l'Intérieur français obtint en 1957 la possibilité de recourir à nouveau à l'internement administratif collectif. Plusieurs centres d'assignation à résidence surveillée furent créés en métropole sur des sites militaires : Larzac (Aveyron), Rivesaltes (Pyrénées-Orientales), Saint-Maurice-l'Ardoise (Gard), Thol (Ain), Vadenay (Marne). Près de 14 000 Algériens suspectés d'être membres du Front de libération nationale (FLN) y furent internés. Le plus important était le camp de Larzac, à la fois par sa taille — plus de 30 km², près de 4000 assignés et plusieurs centaines de membres du personnel — et par sa place dans l'organisation centrale de l'internement. En Algérie même, l'armée crée des camps de regroupement. Elle chasse la population de ses habitations et la concentre dans ces camps afin de créer des « zones interdites » et de priver le FLN de l'appui de la population.

30


Camp d'internement français Michel Rocard est l’auteur, sous un pseudonyme lorsqu’il était administrateur sortant de l'ENA dans les bureaux de l’Armée française pendant son service militaire en Algérie, du Rapport sur les camps de regroupement en Algérie. Il les qualifie de « camps de concentration ». L'historien Yves Courrière estime à deux millions le nombre d'Algériens ayant vécu dans ces camps durant la guerre d'Algérie[réf. nécessaire] .

Voir aussi Liens internes • • • • • • • •

Camp de concentration Collaboration policière sous le régime de Vichy Déportation Épuration à la Libération en France Liste des camps de concentration nazis Rafle du Vélodrome d'Hiver Régime de Vichy Shoah

• Solution finale • Sanatorium d'Aincourt

Liens externes • • • • • • •

Une carte des camps en France [32] dans le site Mémoire Juive et Education http://www.apra.asso.fr/Camps/Fr/Accueil-Camps.html Les camps du sud [33] Les camps du Loiret [34] Chronologie de l'internement [35] Le centre d'internement du Château du Doux à Altillac [14] Photographies du Camp de Rivesaltes [36] Partager la mémoire à travers l'art... travail de la photographe Flore sur le Camp de Rivesaltes.

Bibliographie • La SNCF sous l'Occupation allemande, Institut du temps présent, CNRS, 1996, • Laurette Alexis-Monet, Les miradors de Vichy, préface de Pierre Vidal-Naquet, Les Editions de Paris Max Chaleil, 1994, 2001, (ISBN 2842610144), • Anne Boitel, Le Camp de Rivesaltes (1941-1942), • Yves Courrière, La Guerre d'Algérie, 4 tomes (Les Gils de la Toussaint, Le Temps des léopards, Le Temps des colonels et Les Feux du désespoir), Fayard, 1969, • Thomas Fontaine, Les Oubliés de Romainville. Un camp allemand en France (1940-1944), Taillandier, 2005 • Anne Grynberg, Les Camps de la honte. Les internés juifs des camps français 1939-1944, La Découverte, 1991, réédit. 1999, (ISBN 270713046X) • Claude Laharie, Le Camp de Gurs. 1939-1945. Un aspect méconnu de l'histoire du Béarn, Pau : Infocompo, 1985, 397 p. • André Moine, Déportation et résistance en Afrique du Nord (1939-1944), Paris, Éditions sociales, 1972. • Denis Peschanski, La France des camps - L'internement (1938-1946), Gallimard - Mars 2002. "Entre le décret du 12 novembre 1938, qui permit d'interner les «indésirables étrangers» dans des centres spécialisés, et la libération du dernier interné en 1946, six cent mille hommes, femmes et enfants ont été enfermés dans les camps français. Denis Peschanski fait ici l'histoire d'un phénomène à la fois

31


Camp d'internement français durable et massif, que de rares ouvrages pionniers n'avaient abordé que partiellement. [...] La France des camps, à partir d'une cartographie précise, dessine la géographie inattendue d'un archipel. Deux cents camps, avec leurs bâtiments, leurs aménagements, une administration, des ministères de tutelle aux gardiens, des rapports socio-économiques avec leur région, une société internée, des solidarités, une entraide officielle et non officielle, dont la description concrète est permise par des archives abondantes, auxquelles s'ajoutent les témoignages poignants des internés eux-mêmes." Quatrième de couverture.

• Denis Peschanski, La France des camps (1938-1946) [37], thèse, janvier 2001. • Maurice Rajsfus, Drancy, un camp de concentration très ordinaire, 1941-1944, Le Cherche-Midi éditeur, 2005 (ISBN 2862744352). • Madeleine Steinberg, Les camps de Besançon et de Vittel, dans Le Monde juif, no 137, janvier-mars 1990. • Annette Wieviorka, "L'expression 'camp de concentration' au XXe siècle [38]", Vingtième siècle. Revue d'histoire, n° 54, 1997.

Références [1] Marc Bernardot (2008), Camps d'étrangers, Terra, p.33-36 [2] (http:/ / crdp. ac-reims. fr/ memoire/ bac/ 2gm/ connaissances/ 05deportation. htm) donne par exemple le chiffre de 3000 morts juifs au total dans les camps français, pour un nombre d'internés juifs de l'ordre d'une centaine de milliers [3] Reportage de RFI du 26 janvier 2005 (http:/ / www. rfi. fr/ actufr/ articles/ 061/ article_33543. asp) [4] Documentaire de Monique Seeman et Alain Jomy, France 3 (2004-2005) (http:/ / bourgogne-franche-comte. france3. fr/ mille-et-une-vies/ documentaires/ 20042005/ 7669925-fr. php) [5] Article sur Mémoire 78 (http:/ / perso. orange. fr/ memoire78/ pages/ str. html) [6] François Amoudruz, Le Struthof, le seul camp de concentration en France ", Historiens et géographes - Bulletin de l'Association des Professeurs d'histoire et de Géographie, n° 347, février 1995. (http:/ / crdp. ac-reims. fr/ memoire/ enseigner/ Natzweiler_Struthof/ ressources. htm) [7] Marc Bernardot (2008), op. cit., p. 53-54 [8] Peter Gaida, Camps de travail sous Vichy. Les « Groupes de travailleurs étrangers » (GTE) en France 1940-1944 (http:/ / www. gte-vichy. info/ francais. htm) [9] Assemblée nationale, Proposition de loi n° 171 du groupe communiste tendant à assurer le droit à réparation pour les résistants déportés, emprisonnés et internés en Afrique du Nord (1940-1944) (http:/ / www. groupe-communiste. assemblee-nationale. fr/ Propos_loi/ ppl171. htm), 20 août 1997. [10] voir (http:/ / gurs. free. fr/ ) [11] voir (http:/ / www. moisdon-la-riviere. org/ articles. php?lng=fr& pg=124) et (http:/ / www. chateaubriant. org/ histoire/ page219. html) [12] Voir (http:/ / www. . asso. fr/ Camps/ Camp-Rivesaltes. html) [13] (http:/ / www. aloufok. net/ article. php3?id_article=551). Il faut rappeler que les communistes ont été internés dès 1940, en période de guerre, à cause du Pacte germano-soviétique qui en faisait des « alliés » de l'ennemi. Les communistes furent à nouveau internés, cette fois-ci par le gouvernement du maréchal Pétain ou par les autorités occupantes après l'invasion de l'Union soviétique par l'Allemagne nazie [14] http:/ / www. jewishtraces. org/ rubriques/ ?keyRubrique=le_chateau_du_doux& preview=1& lg=fr [15] La drôle de guerre avec les chemins de mémoire, partez à la découverte des hauts lieux de mémoire (http:/ / www. cheminsdememoire. gouv. fr/ page/ affichelieu. php?idLang=fr& idLieu=1207) [16] http:/ / www. exilordinaire. org/ rubriques/ ?keyRubrique=le_camp_de_royallieu [17] http:/ / www. exilordinaire. org/ rubriques/ ?keyRubrique=le_camp_de_douadic [18] (http:/ / www. resistance-en-isere. com/ Commun/ docs/ 1/ Doc155. PDF) [pdf] [19] Le camp de Jargeau, juin 1940 - décembre 1945. Histoire d'un camp d'internement dans le loiret. Pascal Vion. Edition: Centre de recherche et de documentation sur les camps d'internement et la déportation juive dans le Loiret. ISBN 2-9507561-0-7 [20] Histoire du Camp de la Lande à Monts (http:/ / www. monts. org/ index. php?rub=25) [21] Listes des internés du camp des Milles 1941 (http:/ / www. jewishtraces. org/ recherche. php) [22] http:/ / www. frontstalag-135-quimper. com [23] Liste des internés transférés à Drancy (http:/ / www. jewishtraces. org/ recherche. php) [24] Source site de Mémoire et espoir de la Résistance (http:/ / www. memoresist. org/ lieux. php#) [25] http:/ / www. jewishtraces. org/ recherche. php Liste des internés transférés à Gurs] [26] Explore (http:/ / holocaust-education. net/ explore. asp?langid=1& submenu=201& id=17) [27] Camp de Bossuet (Oran) (http:/ / www. apra. asso. fr/ Camps/ Fr/ Camp-Bossuet. html), sur le site apra.asso.fr [28] L'Humanité, 24 août 1994, (http:/ / www. humanite. fr/ journal/ 1994-08-24/ 1994-08-24-706571) [29] Gaspard Delon, Les prisonniers de guerre allemands dans la France de l’immédiat après-guerre (http:/ / www. arte. tv/ fr/ histoire-societe/ histoire/ Tabous-de-l-histoire/ NAV-juillet/ 926408. html), arte-tv.net, juillet 2005 [30] d' août 1944 à 1947

32


Camp d'internement français [31] [32] [33] [34] [35] [36] [37] [38]

33

de façon brève http:/ / www. memoire-juive. org/ carte_des_camps_en_France. htm http:/ / www. exilordinaire. org/ camps_sud. htm http:/ / www. exilordinaire. org/ rubriques/ ?keyRubrique=les_camps_du_loiret http:/ / www. exilordinaire. org/ rubriques/ ?keyRubrique=chronologie_de_linternement http:/ / www. flore-photo. net/ rivesaltes/ rivesaltes. html http:/ / histoire-sociale. univ-paris1. fr/ Denis. htm http:/ / www. persee. fr/ showPage. do?urn=xxs_0294-1759_1997_num_54_1_3626

Liste des camps de concentration nazis Cette liste comprend les camps de concentration, les camps de concentration de jeunes, les camps d'extermination, camps de transit et divers autres camps similaires de la période du Troisième Reich.

Camps de concentration des années 1930 Les premiers camps de concentration (auparavant souvent dénommés camps de concentration « sauvages ») regroupent les camps créés après la prise de pouvoir par Adolf Hitler, de manière non systématique et dans des conditions différentes de rattachement, afin d'éliminer les opposants politiques au nazisme. Ils partagent pour caractéristique, une construction toujours antérieure à la création de « l'inspection des camps de concentration », pour la plupart une existence assez courte, et un rattachement diversifié : SA, SS, ministère de l'intérieur etc. Bien que quelques-uns de ces camps aient été plus tard intégrés dans le système des camps de concentration de la SS, on les considère comme des camps de concentration « précoces » lorsqu'ils ont été construits puis fermés avant le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale ou lorsque leur fonction a été par la suite modifiée. Le camp de Dachau fait exception puisqu'il sera le seul de ces camps à rester utilisé jusqu'à la fin de la guerre et servira de prototype à tous les camps de concentration ultérieurs. Nom

Pays

Type

Dates

Nombre de prisonniers (estimation)

Nombre de morts (estimation)

Bad Sulza

Allemagne

camp de concentration

juillet 1933 - juillet 1937

850

-

Benninghausen

Allemagne

camp de concentration de la SA

29 mars 1933 28 septembre 1933

344

indéterminé

Börgermoor

Allemagne

camp de concentration -

-

-

-

Brandebourg-sur-la-Havel

Allemagne

camp de août 1933 - février 1934 concentration plus tard institution de mise à mort du Programme Aktion T4

entre 1 000 et 1 200

au moins 3 jusqu'à 1934 (camp de concentration); 9 772 en 1940 (Programme Aktion T4)

Breitenau

Allemagne

camp de concentration plus tard "camp d'éducation par le travail"

respectivement 470 et 8 500

-

juin 1933 - mars 1934 respectivement 1940 1945


Liste des camps de concentration nazis

34

Columbia-Haus (Berlin-Tempelhof)

Allemagne

prison de la Gestapo et camp de concentration

27 décembre 1934 5 décembre 1936

environ 10 000

-

Camps du Pays de l'Ems (plusieurs petits camps)

Allemagne

jusqu'à 1936 camp de concentration ensuite camp pénitentiaire

1933 - 1945

environ 80 000 détenus et prisonniers de 100 à 180 000 prisonniers de guerre

environ 30 000 (principalement des prisonniers de guerre soviétiques)

Heuberg plus tard déplacé vers le camp de Oberer Kuhberg (Ulm)

Allemagne

camp de détention mars 1933 - novembre préventive 1933 respectivement novembre 1933 - juillet 1935

3000 respectivement 800

-

Kemna

Allemagne

camp de concentration

juin 1933 - janvier 1934

4 500

-

Kislau

Bade/Allemagne

camp de 21 avril 1933 - 1er avril concentration du 1939 ministère de l'intérieur de Bade

-

1

Leschwitz

Görlitz/Allemagne camp de concentration

1000-1500

inconnu

Lichtenburg à Prettin

Allemagne

camp de juin 1933 - 15 mai 1939 concentration pour hommes puis pour femmes

-

-

Oranienburg

Allemagne

Camp de regroupement

mars 1933 - juillet 1934

3 000

au moins 16

Osthofen

Allemagne

Camp de regroupement

mars 1933 - juillet 1934

-

-

Sachsenburg

Allemagne

camp de concentration

juin 1933 - juillet 1937

2 000

au moins 11

Wittmoor (Hambourg-Lemsahl-Mellingstedt)

Allemagne

camp de détention 31 mars 1933 - 18 préventive octobre 1933

-

-

mars 1933 - 30 août 1933

Camps de concentration de l’Inspection des camps de concentration puis Office central administratif et économique de la SS Les camps de concentrations fondés par l’Inspection des camps de concentration, qui pour la plupart sont restés en fonction jusqu'à la fin de la guerre, sont ceux qui sont généralement visés par le terme générique de « camp de concentration ». D'après un ordre de Himmler, seuls ces camps rattachés à l'Inspection pouvaient être ainsi officiellement considérés comme des camps de concentration (en allemand Konzentrationslager abrégé en KZ). Plus tard l’Inspection des camps de concentration est devenue l’Office central administratif et économique de la SS’ (en allemand SS-Wirtschafts- und Verwaltungshauptamt). Ces camps se caractérisaient, en dehors de leurs conditions de rattachement, par leur structure spécifique et commune calquée sur le « modèle de Dachau » : • séparation de la garde entre équipe de commandement d'un coté, toujours divisée en départements sensiblement identiques, et gardiens proprement dits de l'autre, • existence d'un système d'affectation de prisonniers à des fonctions identifiées,


Liste des camps de concentration nazis

35

• hiérarchie discriminante fondée sur l'appartenance sociale et raciale (voir aussi le Système de marquage nazi des prisonniers). Le réglement du camp élaboré en 1933 par Theodor Eicke à Dachau a été généralisé. Les camps érigés par la suite (Sachsenhausen ou Buchenwald) ont utilisé la structure des baraquements de Dachau avec des plans symétriques. En plus des camps principaux, sont listés également tous les camps annexes. Nom

Pays

type

usage

Nombre Nombre estimé estimé de morts de prisonniers

Arbeitsdorf (Fallersleben)

Allemagne camp de concentration

avril 1942 - octobre 1942

-

-

Auschwitz I

Pologne

camp de concentration

mai 1940 - janvier 1945

-

de 60 000 à 70 000

Auschwitz II -Birkenau

Pologne

camp d'extermination

octobre 1941 -janvier1945

400 000

1 100 000 - 1 500 000

Auschwitz III -Monowitz

Pologne

camp de concentration

fin 1942 - janvier 1945

environ 300 000

environ 25 000

Bergen-Belsen

Allemagne camp d'échange, camp de concentration

avril 1943 - avril 1945

-

150 000

Buchenwald

Allemagne camp de concentration

juillet 1937 - avril 1945

250 000

56 000

Kochem

Allemagne camp de concentration, annexe de Natzweiler/Struthof

mars 1944 - septembre 1944

-

-

Dachau

Allemagne camp de concentration

mars 1933 - avril 1945

200 000

au moins 30 000

Entrepôt G (Hambourg)

Allemagne camp de concentration, annexe d'Auschwitz

juillet 1944 - avril 1945

3 000

?

Dora-Mittelbau

Allemagne camp de concentration

septembre 1943 - avril 1945

60 000

au moins 20 000

Eberswalde

Allemagne camp de concentration, annexe de Sachsenhausen

-

-

Engerhafe

Allemagne camp de concentration, annexe de Neuengamme

octobre 1944 - décembre 1944

environ 2200

188

Flossenbürg

Allemagne camp de concentration

mai 1938 - avril 1945

au moins 100 000

30 000

Gross-Rosen

Pologne

août 1940 - février 1945

125 000

40 000

Hersbruck

Allemagne camp de concentration, annexe de Flossenbürg

-

-

Vught

Pays-Bas

12 janvier 1943 - début septembre 1944

-

749

Hinzert

Allemagne camp de travail, camp de transit, 'Eindeutschungslager'

1ze juillet 1940 - début mars 1945

14 000

au moins 302

Rawa Ruska

Ukraine

camp de concentration

juin 1941 - janvier 1943

-

- 18000

Riga-Kaiserwald

Lettonie

camp de concentration

mars 1943 - septembre 1944

-

-

Kaufering (près de Landsberg)

Allemagne camp de concentration, camp annexe de Dachau

juin 1944 - avril 1945

Kaltenkirchen

Allemagne camp de concentration

août 1944 - avril 1945

Kaunas

Lituanie

camp de concentration

camp de concentration

camp de concentration

30 000 au moins14 500

-

environ 700

-

-


Liste des camps de concentration nazis

36

Ladelund

Allemagne camp de concentration, camp annexe de Neuengamme

novembre 1944 - décembre 1944

environ 2000

301

Langenstein-Zwieberge

Allemagne camp annexe de Buchenwald

avril 1944 - 11 avril 1945

7 000

2 000

Majdanek (KZ Lublin)

Pologne

camp de concentration, camp d'extermination

juillet 1941 - juillet 1944

-

78 000

Mauthausen

Autriche

camp de concentration

août 1938 - mai 1945

195 000

au moins 95 000

Moringen

Allemagne camp de concentration

1933 - mars 1938

-

-

Natzweiler-Struthof

France

mai 1941 - septembre 1944

52 000

25 000

Neuengamme

Allemagne camp de concentration

13 décembre 1938 - 4 mai 1945

106 000

55 000

camp de concentration

Niederhagen (Wewelsburg) Allemagne camp de concentration

septembre 1941 - début 1943

3 900

1 285

Płaszów

Pologne

décembre 1942 -janvier 1945

au moins 150 000

au moins 9 000

Ravensbrück

Allemagne camp de concentration de femmes

mai 1939 - avril 1945

Sachsenhausen

Allemagne camp de concentration

juillet 1936 - avril 1945

Stutthof

Pologne

camp de concentration

septembre 1939 - mai 1945

Vaivara

Estonie

Varsovie

Pologne

Welzheim

Allemagne camp de concentration

1935 - avril 1945

Wöbbelin

Allemagne camp annexe von Neuengamme, Sterbelager

12 février 1945 - 2 mai 1945

camp de concentration

150 000 20 000 - 30 000 au moins 200 000

100 000

110 000

65 000

camp de concentration

-

-

camp de concentration

-

-

au moins 2 000

(7)

environ 5 000

> 1 000

Camps d'extermination de l'Aktion Reinhardt Les camps qui ont exclusivement servi à l'exécution organisée et massive d'êtres humains sont les camps d'extermination. Ceux qui sont listés ci-dessous ont été créés dans le cadre de l'Aktion Reinhardt, c’est-à-dire selon les décisions de la Conférence de Wannsee concernant la Solution finale. Ces camps étaient tous situés dans les territoires du Gouvernement Général (en allemand "Generalgouvernement") de Pologne et placés sous la responsabilité de hauts responsables de la SS. Les camps de concentration d'Auschwitz-Birkenau et de Majdanek peuvent être cependant considérés comme des camps d'extermination, bien qu'ils aient relevés de l'Inspection des camps de concentration (puis de l'Office central administratif et économique de la SS). Nom

Pays

Dates

Nombre de prisonniers (estimation)

Nombre de morts (estimation)

Belzec

Pologne

mars 1942 - décembre 1942

-

434 508 (probablement autour de 600 000)

Chelmno

Pologne

décembre 1941 - avril 1943; avril 1944 -janvier1945

-

340 000

Maly Trostenëts

Biélorussie mai 1942 - juillet 1944

-

40 000 - 60 000

Sobibor

Pologne

mai 1942 - octobre 1943

-

250 000

Treblinka

Pologne

juillet 1942 - novembre 1943

-

entre 900 000 et 1 000 000


Liste des camps de concentration nazis

37

Camps du Programme Aktion T4 Voir Programme Aktion T4 T4-Installation d'euthanasie

Lieu

Bundesland actuel

Période de fonctionnement

Grafeneck

Gomadingen

Bade-Wurtemberg

20 janvier 1940 - décembre 1940

Brandebourg-sur-la-Havel

Brandenbourg sur la Havel

Brandebourg

8 février 1940 - Octobre 1940

Hartheim

Alkoven près de Linz

Autriche

6 mai 1940 - décembre 1944

Sonnenstein

Pirna

Saxe

Juin 1940 - Septembre 1942

Bernburg

Bernbourg

Saxe-Anhalt

21 novembre 1940 - 30 juillet 1943

Hadamar

Hadamar

Hesse

Janvier 1941 - 31 juillet 1942

Camps de transit Les camps de transit étaient des camps de regroupement dans lesquels les prisonniers étaient enfermés avant d'être envoyés dans les camps d'extermination. Nom

Pays

Type

Dates

Mechelen

Belgique

camp de regroupement et de transit

juillet 1942 a septembre 1944

Drancy

France

camp de regroupement et de transit

20 août 1941-

Camp de Royallieu à Compiègne

France

camp de regroupement et de transit

juin 1941 à août 1944

Nováky

Slovaquie

camp de regroupement et de transit

Risiera di San Sabba

Italie

camp de regroupement et de transit

Sereď

Slovaquie

camp de regroupement et de transit

Theresienstadt

République tchèque

prison de la Gestapo camp de regroupement et de transit`. Ce camp servait de « vitrine » nazie montrée à la Croix rouge

Westerbork

Pays-Bas

Innsbruck-Reichenau

Autriche

Nombre de prisonniers (estimation)

Nombre de morts (estimation)

25 900

-

-

-

53 000

-

-

-

20 000-25 000

3 000-5 000

-

-

juin 1940 - mai 1945 novembre 1941 mai 1945

32 000 140 000

2 500 35 000

camp de regroupement et de transit

octobre 1939 avril 1945

102 000

-

Camp de transit

1941 - 1945

8 500

130

Camp de concentration pour jeunes Voir camp de concentration pour jeunes

20 octobre 1943 30 avril 1945


Liste des camps de concentration nazis

Lieu

Moringen

Pays

38

Type

Allemagne -

Dates

Nombre de prisonniers (estimation)

Nombre de morts (estimation)

1940 - avril 1945

1 400

au moins 89

Uckermark Allemagne Jeunes filles/jeunes femmes, plus tard camp d'extermination

juin 1942 - Avril 1945

?

environ 3 000

Łódź

décembre 1942

?

500

Pologne

enfants et jeunes polonais

Divers autres camps similaires Ce sont par exemple les camps d'éducation par le travail, les camps de prisonniers de guerre ou les camps de travail forcé. Ces camps sont difficiles à caractériser en raison de la hiérarchie raciste instaurée par les nazis. Ainsi les prisonniers de guerre alliés occidentaux, considérés comme faisant partie de la "race nordique", étaient généralement bien traités tandis qu'en particulier les soldats de l' Armée rouge étaient confrontés dans leurs camps de prisonniers à des situations similaires à celles des camps de concentration. Même les camps d'éducation par le travail se distinguaient souvent peu des camps de concentration. Nom

Pays

Type

Dates

Bolzano

Tyrol du Sud, Italie

"camp de transit de la police"

juillet 1944 - avril 1945

Breendonk

Belgique

Prison, camp de torture et camp de travail

septembre 1940 septembre 1944

Grini

Norvège

Prison

juin 1941 - mai 1945

Janowska (Lemberg)

Ukraine

camp de travail forcé; insllation de meurtre de masse

septembre 1941 novembre 1943

Jasenovac

Croatie

camp d'extermination (Oustachis-Croatie)

1941 - 1945

Schirmeck

France

camp de réeducation pour Alsaciens Mosellans.

juillet 1940 novembre 1944

Le Vernet d'Ariège

France

camp d'internement (Vichy-France)

1939 - 1944

Nombre de prisonniers (estimation)

Nombre de morts (estimation)

15 000 juifs "politiques" et autres

au moins 20 (?)

mininum 3 532

minimum 391

19'788

8

-

100 000 - 200 000, la plupart juifs

(1 000 000)

90 000 : Serbes, juifs, roms, croates

10 000 ?

78

-

-

Source • (de) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en allemand intitulé « der deutschen Konzentrationslager Liste der deutschen Konzentrationslager [1] » (voir der deutschen Konzentrationslager la liste des auteurs [1]

) (voir aussi [[|la page de discussion]]).

Voir aussi • Camp de concentration, • Camp d'extermination, • Camp de travail, • Ghetto • Camp de concentration français.


Liste des camps de concentration nazis • • • • •

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Système de marquage nazi des prisonniers Ghetto Camp d'éducation par le travail Aktion Reinhardt, Programme Aktion T4

Carte des camps de concentration nazis

Liens externes • • • • • •

(de) Shoa.de [49] site de la [[Fédération nationale des déportés et internés résistants et patriotes [50]]] Une liste très complète des camps et lieux d'internement [51] (de) (en)Mémorial de l'Holocauste [52] (de) Banque de données des lieux de détention et des camps sous le nazisme de 1933 à 1945 [53] (de) Ministère de la justice d'Allemagne fédérale : répertoire des camp de concentration et de leurs camps annexes [54]

Références [1] http:/ / de. wikipedia. org/ wiki/ Liste


Grandes Purges

Grandes Purges Les Grandes Purges désignent une période de répression politique massive en Union soviétique dans la seconde moitié des années 1930. Totalement dominé par la personnalité de Joseph Staline, le Parti communiste utilise alors à grande échelle l'emprisonnement, la déportation et l'exécution pour éliminer ses opposants politiques réels ou supposés.

Spécificité La plupart des historiens soulignent la spécificité de la Iejovschina[1] par rapport aux autres vagues répressives de la période stalinienne. L'historien britannique Orlando Figes résume le point de vue actuel : « Extraordinaire même à l'aune du régime stalinien, la Grande Terreur n'est pas une vague d'arrestations en masse relevant de la routine, comme celles qui balayèrent le pays tout au long du règne de Staline, mais une politique calculée de meurtre collectif. Ne se satisfaisant plus d'emprisonner ses « ennemis politiques » réels ou imaginaires, Staline ordonne à la police de faire sortir des hommes des prisons ou des camps de travail pour les exécuter. En l'espace de deux ans, en 1937-1938, suivant des statistiques incomplètes, un total stupéfiant d'au moins 681692 personnes[2] et probablement beaucoup plus, furent exécutées pour « crime contre l'État ». Dans les même années, la population des camps de travail et des colonies du Goulag s'accrut de 1196369 à 1881570 personnes, sans tenir compte des 140000 morts au moins dans les camps eux-mêmes et du nombre inconnu des morts au cours du transport vers les camps »[3] .

Déroulement Après le « Congrès des Vainqueurs[4] » de 1934, alors que Staline proclame que « L’homme est le capital le plus précieux », toute personne perçue comme menace potentielle pour le régime, est systématiquement poursuivie et aspirée dans un système répressif qui devient tentaculaire (Goulag)[5] . La plupart des dirigeants communistes historiques et de très nombreux officiers supérieurs de l'Armée rouge sont les premières victimes de la politique stalinienne. Cependant, la répression ne frappe pas seulement la vieille garde révolutionnaire, mais s'étend à toute la société[6] .

La purge du Parti Les purges commencent avant l'arrivée au pouvoir de Staline[7] . Elles visent d'abord l'élimination drastique des camarades qui ne « méritent » pas leur appartenance au Parti, les « carriéristes » et « égoïstes ». Pour les fonctionnaires par exemple, la purge signifie la disparition de tout espoir d'avancement. La perte de l'affiliation à « l'avant-garde du prolétariat » entraîne au minimum la perte des privilèges de la nomenklatura, mais peut avoir des conséquences plus dramatiques comme l'emprisonnement pour les motifs les plus futiles, voire l'exil intérieur, la déportation dans l'« archipel du Goulag », les travaux forcés, ou l'exécution sommaire. Entre 1929 et 1931, plus de 250000 communistes sont exclus du Parti, beaucoup pour « déviationnisme droitier »[8] . Le 28 avril 1933, le comité central du PCUS décrète à nouveau une vaste campagne d'épuration du Parti afin de contrôler le recrutement de ses membres. À la fin de 1936, avant même que les Grandes Purges ne commencent, le PCUS ne compte plus que 1450000 membres, soit une diminution de 750000 en quatre ans. En 1937, première année de purge généralisée, 500000 membres disparaissent des registres. 98 sur 139 titulaires et suppléants élus au comité central par le « Congrès des Vainqueurs » sont arrêtés et presque tous exécutés. Il en va de même pour 1108 sur 1196 délégués à ce même congrès. La purge est particulièrement importante dans la région de Moscou[9] .

40


Grandes Purges

L'assassinat de Serguei Kirov L'assassinat de Sergueï Kirov le 1er décembre 1934 marque la fin d'un timide dégel politique en 1934[10] et, selon certains historiens, le début de la Grande Terreur[11] . Cette lecture est cependant remise en cause par le délai relativement long entre la mort de Kirov et le début effectif des Grandes purges[12] . Quelques heures seulement après la mort de Kirov, Staline rédige de sa propre main un décret, dit « loi du 1er décembre » qui durcit considérablement la procédure d'enquête : clôture de l'instruction des affaires de terrorisme dans les dix jours, accusés laissés dans l'ignorance des charges pesant contre eux jusqu'à la veille du procès, etc. Le 16 décembre 1934, Kamenev et Zinoviev sont arrêtés. Le 29 décembre, à Leningrad, 14 personnes sont condamnées à mort pour la participation directe à l'assassinat de Kirov. Le 16 janvier 1935 a lieu le procès d'un centre de Moscou qui voit les accusés condamnés à cinq ou dix ans de camp. La chasse aux terroristes se diffuse dans toute l'URSS. Dans les trois mois qui suivirent, près d'un millier de « zinovievistes » furent ainsi arrêtés à Leningrad, certains pour « complicité morale » dans la mort de Kirov[13] . Oleg Khlevniouk reprend quant à lui les chiffres de 6501 victimes de la loi du 1er décembre au cours du seul mois de décembre 1934[14] .

Les procès de Moscou À Moscou, plusieurs procès spectaculaires sont organisés pour convaincre l'opinion publique intérieure et étrangère de l'existence d'une vaste conspiration antisoviétique et pour servir d'exemple pour les procès qui se déroulaient dans le reste du pays. Fondés sur les seuls aveux des accusés, généralement arrachés sous la torture, les procès sont des simulacres. Presque tous les Bolcheviks qui ont tenu un rôle de premier plan pendant la Révolution russe de 1917 ou dans le gouvernement de Lénine sont alors éliminés. Quant à Léon Trotski, en exil au Mexique, il est assassiné par un agent soviétique le 21 août 1940. Parmi les vieux bolcheviks, seuls Viatcheslav Molotov, Mikhaïl Kalinine et Staline survivent à ces purges. Du 19 août 1936 au 23 août 1936 se déroule le procès du « Centre terroriste trotskiste-zinoviéviste ». Lev Kamenev, Grigori Zinoviev et quatorze autres personnalités sont accusés d'être responsable de l'assassinat de Sergueï Kirov en décembre 1934[15] et d'avoir comploté l'assassinat de Staline et des membres du Politburo afin de restaurer le capitalisme avec l'aide de fascistes allemands et japonais. Les preuves sont visiblement truquées, en particulier celles attestant une rencontre entre les fils de Léon Trotski et les « comploteurs », mais tous les accusés reconnaissent leur culpabilité. Le 24 août 1936, le verdict est rendu : tous les accusés sont reconnus coupables et condamnés à mort. Ils sont exécutés dans les vingt-quatre heures[16] . Dans un télégramme du 25 septembre 1936 au Politburo, Staline déclare : « Nous estimons qu'il est absolument indispensable et urgent de nommer le camarade Iejov au poste de Commissaire du peuple de l'Intérieur. Iagoda s'est manifestement montré incapable de démasquer le bloc trotskiste-zinovievien. Dans cette affaire, l'Oguépéou est en retard de quatre ans. Tous les responsables du parti et la majorité des représentants du NKVD l'ont remarqué[17] »,[18] . Le 30 septembre 1936, Nikolaï Iejov remplace Guenrikh Iagoda (officiellement muté au PTT) à la tête du NKVD. En janvier 1937 se déroule un deuxième procès, celui du « Centre antisoviétique trotskiste de réserve »[19] . Le verdict est le même que lors du premier procès : les dix-sept accusés sont jugés coupables et, à une exception, tous condamnés à mort. Lors de la session du Comité central de février–mars 1937, après des débats houleux, Staline, Molotov et Iejov finissent par l'emporter sur les partisans d'une ligne modérée. Ils obtiennent la tête de Nikolaï Boukharine et d'Alexeï Rykov, aussitôt arrêtés (leur ancien collègue Mikhaïl Tomsky s'était suicidé). Par la suite, Mikhaïl Toukhatchevski et six autres maréchaux sont également jugés sommairement et exécutés. L'armée est décimée. Le XXIIe congrès du PCUS révèle en 1961 qu'il n'y a eu aucun procès contre les chefs de l'armée et que c'est le politburo qui a décidé de leur liquidation[20] . En mars 1938, Boukharine, Rykov et Iagoda passent à leur tour en jugement pour avoir formé un « bloc des droitiers et des trotskistes ». Tous les accusés sont reconnus coupables et à une exception tous exécutés. Selon la Pravda, le

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Grandes Purges verdict est accueilli par des manifestations de joie populaire[21] .

La Grande Terreur Les procès de Moscou sont le signal du début de purges massives. La phase la plus violente se déroule de fin 1936 à 1938, et coïncide avec la Iejovschina. Durant ces deux années, la répression fait plus de deux millions de victimes, dont 725000 exécutions[22] . La directive prikaz 00447 du 5 août 1937, qui ordonne de réprimer les « éléments antisoviétiques et socialement dangereux », et marque le début des purges à grande échelle. Iejov y ordonne à la police secrète de fusiller un quota minimal de 75950 personnes et d'en envoyer 193000 au Goulag[23] ,[22] . Près d'un million de personnes sont exécutées par des pelotons et bien plus sont envoyées dans des prisons ou des camps du Goulag : beaucoup n'y survivent pas. Les estimations du nombre de victimes varient beaucoup[24] ,[25] . Pour Robert Conquest, la Grande Terreur aurait entraîné au moins six millions d'arrestations, trois millions d'exécutions et deux millions de décès dans les camps du Goulag. Des chiffres que les historiens révisionnistes estiment grossièrement surévalués[26] . Beaucoup d'ennemis du peuple sont poursuivis sous l'inculpation de sabotage économique, d'affiliation avec le trotskisme ou de participation à la subversion étrangère. De nombreux chefs locaux du parti sont dénoncés et accusés d'abus de pouvoir. L'automne 1938 marque la fin de la « Grande terreur ». En novembre 1938, les exécutions en masse prennent brusquement fin[27] . Selon les mots de Nicolas Werth, « La Grande Terreur s'arrêta comme elle avait commencé : sur un ordre de Staline[28] ». Après une violente critique du fonctionnement du NKVD (non repect du code de procédure pénale) le 17 novembre 1938 et une confession de Iejov le 23 novembre dans laquelle il reconnaît sa totale responsabilité et demande à être décharge de sa mission. Au XVIIIe Congrès du parti, Iejov n'est même pas élu au comité central[29] . Iejov, d'abord rétrogradé au rang de commissaire du peuple au transport fluvial le 21 août 1939, et fusillé en 1940, est remplacé par son adjoint Lavrenti Beria. Cependant, la pratique des arrestations arbitraires continue jusqu'à la mort de Staline. Selon Anne Applebaum[30] , les années 1937-1938 ne furent pas les plus mortelles de l'histoire des camps[31] , ni celles de leur plus grande extension[32] ,[33] . L'année 1937 marque pourtant une « ligne de partage des eaux »[34] : jusqu'alors des lieux où l'on meurt par accident et dans l'indifférence, les prisons soviétiques se transforment en camps meurtriers où l'on tue délibérément et en masse[35] .

Conséquences des purges L'élimination d'un grand nombre d'officiers compétents de l'Armée rouge lors des purges est généralement considérée comme une des raisons principales des défaites soviétiques initiales face à l'attaque de l'Allemagne nazie lors de l'opération Barbarossa en été 1941[36] . « De mai 1937 à septembre 1938, furent soumis à la répression près de la moitié des commandants de régiments, presque tous les commandants des brigades, tous les commandants de corps d'armée et commandants de régions militaires, membre des Soviets militaires et chefs des directions politiques des régions militaires, la majorité des commissaires politiques des corps d'armées, des divisions et des brigades, près d'un tiers des commissaires de régiments, beaucoup d'enseignants des écoles militaires. » — Michel Heller et Aleksandr Nekrich, L'Utopie au pouvoir – Histoire de l'U.R.S.S. de 1919 à nos jours, p. 254. « En deux ans, la purge va faire disparaître les 11 vice-commissaires à la Défense, 75 des 809 membres du Conseil militaire suprême, les 8 amiraux, 2 des 4 maréchaux restants, 14 des 16 généraux d'armée, les 9/10e des généraux de corps d'armée, les 2/3e des généraux de division, plus de la moitié des généraux de brigade, 35000 officiers. » — Michel Laran et Jean-Louis Van Regemorter, La Russie et l'ex-URSS de 1914 à nos jours, p. 115-116. Toutefois, Goebbels rapporte que, si ce fut initialement aussi l'avis d'Hitler, il changea d'opinion par la suite :

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Grandes Purges « Le Führer explique encore une fois le cas Toukhatchevski et exprime l'opinion que nous étions absolument dans l'erreur à l'époque, lorsque nous croyions que Staline ruinerait ainsi l'Armée rouge. C'est le contraire qui est vrai : Staline s'est débarrassé de tous les cercles d'opposition de l'Armée rouge et a ainsi réussi à ce qu'il n'y ait plus de courant défaitiste dans cette armée. [...] Vis-à-vis de nous, Staline a en plus l'avantage de ne pas avoir d'opposition sociale, car le bolchévisme l'a supprimée elle aussi au cours des liquidations de ces vingt dernières années. [...] Le bolchévisme a éliminé ce danger à temps et peut ainsi tourner toute sa force contre son ennemi » — Joseph Goebbels, Journal, 8 mai 1943[réf. souhaitée]. Malgré ces purges, la plupart des sources militaires estimaient le potentiel de l'Armée rouge comme toujours exceptionnel, comme l'illustrait d'ailleurs sa victoire contre les intrusions des troupes japonaises sur la frontière mandchoue en 1938-1939[37] . Par ailleurs, outre l'aspect politique, les purges ont également contribué à rajeunir l'armée et à remplacer de nombreux cadres des échelons inférieurs et intermédiaires par de nouveaux cadres qui avaient généralement fait des études secondaires, voire supérieures. L'écrivain russe Alexandre Zinoviev, qui combattit au sein de l'Armée rouge, affirme ainsi que même si l'arrestation des chefs militaires de grades élevés a certainement eu des conséquences tragiques au début de la guerre, ce rajeunissement et l'élévation du niveau culturel et intellectuel associé a été un facteur décisif de la victoire : « [...] Il y a dans tout mal une part de bien. Grâce à ces répressions et à ces défaites du début de la guerre le niveau d'instruction des officiers a augmenté. Oui, oui ! Des quantités d'hommes ayant fait des études secondaires et supérieures ont pris le commandement de pelotons, de compagnies, de bataillons, de régiments. [...] Si vous voulez le savoir, ce sont les bacheliers de mon école qui ont gagné cette guerre[38] . » Quoiqu'il en soit de sa réalité, l'affaiblissement de l'Armée rouge par ces purges a été un des arguments des gouvernements français de Georges Bonnet et anglais de Neville Chamberlain pour repousser une alliance tripartite entre la France, l'URSS et le Royaume-Uni dirigée contre la menace nazie, l'Union soviétique étant décrite comme incapable d'être à la hauteur d'une telle alliance[39] .

Réhabilitations Une première réhabilitation a eu lieu dès la chute de Nicolaï Iejov à la fin 1938. Aussitôt nommé, Lavrenti Beria annonce une révision des arrestations effectuées sous l'autorité de son prédécesseur. En 1940, 1,5 millions d'affaires sont révisées : 450000 condamnations sont cassées, 128000 dossiers refermés, 30000 personnes libérées de prisons et 327000 des camps du Goulag[40] . Ce qui conduisit beaucoup à retrouver foi dans le système juridique soviétique, donnant ainsi le beau rôle à Staline et à Iejov celui du méchant enfin démasqué[41] . Le 24 février 1956, à la fin du XXe congrès du Parti communiste de l'Union soviétique, Nikita Khrouchtchev, alors à la tête de l'État, dénonce la répression stalinienne dans un discours tenu à huis clos devant les seuls délégués soviétiques ; les partis communistes frères sont alors priés de quitter la salle[42] . Le discours secret est néanmoins rendu public un mois plus tard. Khrouchtchev déclare que les purges étaient un « abus de pouvoir » de Staline et qu'elles eurent des conséquences désastreuses pour le pays. Dans le même discours, il reconnaît que plusieurs des victimes des purges étaient innocentes et que les confessions avaient été obtenues sous la torture. Dénoncer la répression stalinienne permet à Khrouchtchev, membre du Politburo depuis janvier 1938, d'évincer ses adversaires qui avaient participé aux purges et d'accéder ainsi au poste de président du Conseil des ministres. Les dernières réhabilitations, comme celle de Nikolaï Boukharine, ont eu lieu en 1988.

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Grandes Purges

Bibliographie • Anne Applebaum, Goulag – Une histoire, Grasset, 2005 (ISBN 978-2246661214). • Varlam Chalamov, Récits de la Kolyma, La Découverte/ Fayard. • Robert Conquest, La Grande Terreur – Les purges staliniennes des années trente, Cercle du Nouveau Livre d'Histoire, Paris, 1970, 579 p. • Orlando Figes, Les Chuchoteurs – Vivre et survivre sous Staline, Denoël, 2009 (ISBN 978-2-207-26085-2). • (en) John Arch Getty, Origins of the Great Purges: The Soviet Communist Party Reconsidered, 1933-1938, New York, 1985 ; The Road to Terror: Stalin and the Self-Destruction of the Bolsheviks, 1932-1939, Los Angeles, 1999. • Arthur Koestler, Le Zéro et l'Infini, 1941, traduit en français en 1945 (roman). • Andreï Makine, La Musique d'une vie, 2001. • Boris I. Nicolaevski, Les Dirigeants soviétiques et la lutte pour le pouvoir : essai, coll. « Dossiers des Lettres Nouvelles », Denoël, Paris, 1969. • Michel Laran, Jean-Louis Van Regemorter, La Russie et l'ex-URSS de 1914 à nos jours, Armand Colin, 1996 (ISBN 978-2-2000-21738-2). • Alexandre Soljenitsyne, L'Archipel du Goulag, publié en 1973 ; traduction en français publiée au Seuil. • Nicolas Werth, Les Procès de Moscou, Éditions Complexe, Bruxelles, 1987 ; nouvelle édition revue et augmentée, 2006 (ISBN 2-8048-0101-2).

Voir aussi Articles connexes • • • •

Stalinisme Andreï Vychinski (en) Vieille garde bolchevique héritée de la Révolution d'Octobre Constitution soviétique de 1936

Références [1] Iejovschina ou Iejovchtchina : période pendant laquelle Nikolaï Iejov est à la tête du Commissariat du peuple aux Affaires intérieures (NKVD). [2] Un chiffre identique est donné par Nicolas Werth, Le Livre noir du communisme, p. 224. [3] Les Chuchoteurs– Vivre et survivre sous Staline, p. 288. [4] Dénomination usuelle du XVIIe Congrès du Parti communiste de l'URSS, qui se déroule du 26 janvier 1934 au 10 février 1934. Le congrès voit le triomphe absolu de Staline. Kirov l'appelle « le plus grand chef de tous les temps et de tous les peuples ». (Michel Laran et Jean-Louis Van Regemorter, La Russie et l'ex-URSS de 1914 à nos jours, p. 111. [5] Nicolas Werth, « L'Empire des camps » in Le Livre noir du communisme, p. 237. [6] Oleg Khlevniouk, Le Cercle du Kremlin, p. 205. [7] Orlando Figes, Les Chuchoteurs, p. 82 et suivantes. [8] Oleg Khlevniouk, Le cercle du Kremlin, p. 30 [9] Michel Laran et Jean-Louis Van Regemorter, La Russie et l'ex-URSS, p. 116. [10] Oleg Khlevniouk, Le Cercle du Kremlin p. 105 et suivantes. [11] Certain y ajoutent le suicide le 9 novembre 1932 de la seconde épouse de Staline, Nadejda Allilouïeva-Staline, qui laissa ce dernier passablement déprimé. « Sans doute Staline n'a-t-il jamais eu grande confiance en qui que ce soit, mais après [ces] morts, il cessa de se fier à quiconque » (Svetlana Allilouïeva, citée par Orlando Figes, Les Chuchoteurs, p. 291. [12] Orlando Figes, Les Chuchoteurs, p. 289. [13] Orland Figes, Les Chuchoteurs, p. 291. [14] Oleg Khlevniouk, Le Cercle du Kremlin p. 154. Les chiffres sont donnés par V. Maslov et N. Tchistiakov. [15] Nicolas Werth, Les Procès de Moscou, p. 15. [16] Nicolas Werth, Les Procès de Moscou, p. 20. [17] Michel Heller, L'Utopie au pouvoir, p. 253.

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[18] Michel Laran et Jean-Louis Van Regemorter, La Russie et l'ex-URSS de 1914 à nos jours, p. 115. [19] Nicolas Werth, Les Procès de Moscou, p. 22. [20] Michel Heller, op. cit., p. 255. [21] Nicolas Werth, Les Procès de Moscou, p. 42. [22] « Un responsable russe des droits de l'homme qualifie les purges staliniennes de «terrorisme d'État » dans Le Monde du 14 août 2007, [23] Simon Sebag Montefiore,Staline. La cour du tsar rouge, Éditions des Syrtes, 2005, p. 246. [24] Nicolas Werth, « La Grande Terreur » in Le Livre noir du communisme, p. 218. [25] Pour une discussion récente du bilan humain, Anne Applebaum, Goulag – Une histoire, Appendice « Combien ? », p. 629. [26] Nicolas Werth, « La Grande Terreur » in Le Livre noir du communisme, p. 218. [27] Anne Applebaum, Goulag – Une histoire, p. 146. [28] Nicolas Werth, « La Grande Terreur » in Le Livre noir du communisme, p. 223. [29] Oleg Khlevniouk, Le Cercle du Kremlin, p. 228, Seuil, 1996. [30] Anne Applebaum, Goulag. Une histoire, p. 130 [31] Mortalité supérieure durant la grande famine des années 1932-1933 ou pendant les années 1942-1943, en pleine Seconde Guerre mondiale (A. Applebaum) [32] L'effectif maximum des zeks est atteint en 1952 [33] Nicolas Werth, « Un État contre son peuple » in Le Livre noir du communisme, p. 249. [34] A. Applebaum, p. 130. [35] A. Applebaum relève toutefois que cette transformation n'est pas systématique et qu'elle prend fin vers 1939 (p. 131). [36] Par exemple, Michel Heller, L'Utopie au pouvoir – Histoire de l'U.R.S.S. de 1917 à nos jours, Calmann-Lévy, 1982, p. 254. [37] (en) Michael Jabara Carley, 1939 - The Alliance that never was and the coming of world war II, Ivan R. Dee, Chicago, p. 181, 257. [38] Alexandre Zinoviev, Le Héros de notre jeunesse, Julliard/L'Âge d'Homme, p. 194. [39] [40] [41] [42]

Michael Jabara Carley 1939 : l’alliance de la dernière chance : une réinterprétation des origines de la Seconde Guerre mondiale. Orlando Figes, Les Chuchoteurs, p. 335. Orlando Figes, Les Chuchoteurs, p. 335 Hélène Carrère d'Encausse, La Déstalinisation commence, Éditions Complexe, Bruxelles, 1984, p. 44.

Goulag Le Goulag (acronyme venant du russe : Главное Управление Лагерей, Glavnoïe Oupravlenie Laguereï, « Direction principale des camps (de travail) ») était l’organisme gérant les camps de travail forcé en Union soviétique. Souvent, on peut entendre parler de goulag en tant que camp (plus spécifiquement Camp correctionnel de travail, en russe : Исправительно-трудовой лагерь). Il s'agit d'un abus de langage, l'appellation d'un tel camp étant « camp du Goulag ». Considérés comme caractéristiques de l’exercice du pouvoir par le régime soviétique, les camps de travail du Goulag ont reçu quantité de victimes du système totalitaire installé[1] , et de criminels, des dissidents ou des opposants de toutes sortes — jusqu’en 1953 (voir infra)[2] . Un grand nombre de camps se trouvaient dans les régions arctiques et subarctiques, comme les camps célèbres de l’Oural septentrional : Vorkouta et le réseau du bassin de la Petchora, les îles Solovetski en mer Blanche, et un grand nombre en Sibérie (notamment ceux de la Kolyma). Au total, probablement 10 à 18 millions de personnes passèrent par les camps du Goulag[3] millions furent exilées ou déportées dans d'autres régions de l'Union soviétique[5] ,[6] .

,[4]

et plusieurs autres


Goulag

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Histoire Sources et historiographie Accès à la documentation La recherche historique a été pendant longtemps entravée par le régime soviétique : effacement des preuves des crimes, propagande intérieure et à destination de l’Occident[7] , censure et terreur ont rendu problématique le traitement des documents historiques. Il fallut attendre la Glasnost pour que les informations sur les goulags se multiplient en Union soviétique. Avec l’ouverture de la Russie, les archives ne sont plus secrètes et les universitaires peuvent travailler plus librement sur les comptes et les rapports du Goulag.

Scène de travail d’un camp du goulag, en 1936-1937.

Devant le manque relatif de [réf. nécessaire] documents , les historiens font appel aux témoignages des survivants pour reconstituer la vie dans les Goulags. L’intérêt du sujet Même si le terme « goulag » est peu employé avant 1973 et la parution de L’Archipel du Goulag d'Alexandre Soljenitsyne, des témoignages et études sur Prisonniers d’un camp du goulag, en 1936-1937. les camps de travail forcé en URSS apparaissent dès la fin des années 1920[8] , puis au cours des années 1930 et 1940. Ce travail est souvent le fait de militants occidentaux peu nombreux, de gauche ou d’extrême gauche, résolument anti-staliniens, étant parfois en lien avec des dissidents russes. Mais jusque dans les années 1960, en Occident, les témoignages sur les exactions du régime soviétique ne sont souvent pas crus, alors qu'ils étaient fondés, et surtout ces témoignages ne touchent pas réellement le grand public.


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En 1967, paraît le témoignage d’Evguénia Guinzbourg. Mais, c’est dans les années 1970 avec Alexandre Soljenitsyne que le sujet atteint vraiment le grand public, et avec la glasnost dans les années 1980 que l’étude se systématise. Si la littérature soviétique n'a pu approcher que clandestinement le sujet jusqu'à la perestroïka, hors d'URSS la littérature a peu abordé le sujet (citons par exemple le roman de Martin Amis, Koba the Dread (2002). En URSS, circulant sous le manteau, sous la forme de samizdat par exemple, les textes les plus importants sont souvent à la frontière entre le témoignage et la reconstruction fictionnelle d'événements réels et de vies détruites. Ce sont ainsi le roman d’Alexandre Soljenitsyne Une journée d’Ivan Denissovitch, publié en 1962 par la revue Novy Mir ou les textes de Varlam Chalamov évoquant les camps de la Kolyma ou de l'Oural : Récits de la Kolyma[9] , Vichera[10] . Réunion dans une cellule, dessin d' Eufrosinia Kersnovskaya.

Les débats historiographiques La comparaison entre les camps nazis et les camps soviétiques a donné lieu à controverse[11] . Pour certains historiens (Stéphane Courtois[réf. nécessaire]), les points communs ne manquent pas : notamment, le goulag est contemporain des camps de concentration allemands. Hitler faisait enfermer et déporter des hommes pour ce qu’ils étaient (« asociaux », Juifs, homosexuels, opposants) et ce qu'ils faisaient (résistants, saboteurs pendant la Seconde Guerre mondiale) ; le régime soviétique a déporté des minorités ethniques, comme les nationalistes Ukrainiens, des Pays Baltes et de Biélorussie[12] dans les années 1930-40 (puisque susceptibles de s'allier à l'Allemagne contre la Russie), puis les Juifs du Comité juif antifasciste[13] en 1946 ; des « ennemis du peuple », catégorie vague qui englobait les anciens aristocrates, les bourgeois, les koulaks, dissidents, opposants et renégats[14] . D'après Alexandre Zinoviev, le phénomène communaliste pourrait également jouer, en dehors de la politique et des phénomènes extraordinaires, un grand rôle dans cette concentration importantes de prisonniers. En effet de nombreuses personnes ont été emprisonnées au camp de Goulag pour des faits que l'on pourrait qualifier d'anecdotiques, absurdes et sans intérêts. Cette concentration n'est pas issu d'un programme d'extermination comme ce fut le cas pour les camps nazis, mais de causes sociologiques du stalinisme avec des conséquences sociologiques dans ces cellules de population de ce type. Les deux systèmes ont cherché à déshumaniser les victimes dans le langage[15] utilisé aussi bien que dans les méthodes visant à l’humiliation. Cependant, le Goulag se démarquait des camps nazis sur plusieurs points : d’abord, le système concentrationnaire soviétique a duré beaucoup plus longtemps que le système nazi. Ensuite, tous les prisonniers soviétiques n’étaient pas maltraités et beaucoup ont même été libérés par les autorités. En 1976, dans un appendice à Si c’est un homme, l'écrivain rescapé des camps nazis Primo Levi apporte d'autres éléments : le fait d'être condamné à une peine prédéfinie pour le Goulag, ou encore le taux de mortalité largement supérieur dans les camps nazis que dans ceux d'Union soviétique. Levi indique à ce sujet : « En Union soviétique, il semble que dans les pires moments la mortalité ait atteint environ 30 % du total des entrants, et c'est déjà un chiffre intolérablement élevé ; mais dans les Lager allemands, la mortalité était de 90 à 98 % ». Pour Levi, « il n'était pas prévu d'autre issue que la mort » dans les camps nazis, alors qu'au Goulag la mort n'était pas « un but déclaré » : c'était « un accident assez fréquent, accepté avec une indifférence brutale, mais qui n'était pas une conséquence


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expressément voulue ». Par ailleurs, des témoignages de prisonniers de guerre allemands ou italiens en URSS (par exemple, Eugenio Corti dans Le Cheval Rouge), décrivent des conditions de vie n'ayant rien à envier à ceux des prisonniers russes en Allemagne. Ou, par exemple, l'écrivain russe Evguénia Guinzbourg raconte avoir rencontré en prison des communistes allemands ayant échappé aux nazis et espérant trouver refuge en URSS, qui constataient la similitude des méthodes entre celles de la Gestapo et celles du NKVD. L’autre débat historiographique concerne le nombre des victimes du Goulag. L’historien et dissident Roy Medvedev affirmait que, durant les Grandes Purges de 1937-1938, le nombre de détenus au Goulag avait augmenté de plusieurs millions, et que cinq à sept millions de personnes avaient été victimes de la répression. Grâce à l’ouverture des archives soviétiques, des données fiables existent pour la période du 1er janvier 1934 au 31 décembre 1947 : elles montrent que, dans l’ensemble des camps du Goulag, 963866 prisonniers[réf. nécessaire] sont morts. Soljenitsyne évaluait à 10 millions le nombre de personnes étant passées dans les camps soviétiques ; aujourd’hui, les historiens parlent de 15 à 18 millions de détenus au total[3] . Mais il faudrait aussi tenir compte des gens morts pendant le transport et des exilés spéciaux. De son côté, le chercheur Nicolas Werth indique que la grande majorité des personnes déportées dans les années 1930 étaient des condamnés de droit commun, c'est-à-dire des innocents pris pour compléter les quotas de déportation, qui purgeaient, sauf exception, des peines n’excédant pas cinq ans. Il s’agissait d’une abondante main-d’œuvre gratuite pour les gigantesques chantiers de l'URSS. Le renouvellement considérable de la population des camps a conduit à des confusions entre le nombre total de personnes déportées pendant la période stalinienne et le nombre de personnes détenues à un moment donné, ce qui a produit des estimations très exagérées du nombre de victimes, même chez des auteurs dont le sérieux est indiscutable, mais qui ont travaillé avant 1991, comme Rudolph Joseph Rummel[16] , professeur émérite à l’université d’Hawaï. Les camps soviétiques, vus de l’Occident En mai 1944, le vice-président américain Henry Wallace se rend dans la région de la Kolyma. Les autorités soviétiques lui font visiter la ville de Magadan en prenant soin de cacher les prisonniers. Des membres des jeunesses communistes se déguisent en mineurs et répondent à ses questions. Il repart admiratif, mais trompé, et les États-Unis continuent à envoyer de la nourriture et du matériel à son allié soviétique pour terminer la guerre. Avec la guerre froide, les choses changent : en 1949, la bibliothèque du Congrès et l’AFL présentent un rapport à l’ONU dénonçant les goulags[17] .

Andreï Sakharov en 1943

En France, une partie de la gauche a longtemps refusé de reconnaître les crimes soviétiques : en 1945, Staline apparaît comme le libérateur de l’Europe de l’Est. Par aveuglement idéologique, cette gauche refuse de voir la réalité des camps de travail forcé et refuse de croire les survivants des goulags. En 1946, Victor Kravtchenko, haut fonctionnaire soviétique, publie J’ai choisi la liberté aux États-Unis où il est réfugié. Il y décrit la terreur stalinienne et les goulags. En France, l’éditeur reçoit des menaces et les Lettres françaises traitent l’auteur de menteur et l’attaquent en justice[18] . David Rousset, ancien déporté,


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crée en octobre 1950 la Commission internationale contre le régime concentrationnaire (CICRC), qui entreprend des enquêtes sur les situations espagnole, grecque, yougoslave et soviétique. Pour la première fois en France, il utilise le terme de Goulag pour désigner le système concentrationnaire soviétique. Ceci lui vaudra d’être traité de « trotskyste falsificateur » par les Lettres françaises à qui, il intentera un procès qu’il gagnera en 1951. Lors des audiences, la députée communiste Marie-Claude Vaillant-Couturier déclare : « Je considère le système pénitentiaire soviétique comme indiscutablement le plus souhaitable dans le monde entier »[19] . À la lecture du rapport secret du XXe congrès du Parti communiste d’Union soviétique publié dans le journal Le Monde en juin 1956, Maurice Thorez et Jacques Duclos crient au faux grossier[20] . Il faut attendre les années 1960 pour voir se développer les critiques à l’encontre du Goulag. Les écrits d’Alexandre Soljenitsyne, les mémoires des détenus paraissent en Occident et décrivent les conditions de vie des zeks. Les procès de plusieurs écrivains russes soulèvent l’indignation : l’internement de Jaurès Medvedev en hôpital psychiatrique provoque de nombreuses protestations. La dissidence soviétique informe le public au moyen des samizdats qui sont des journaux clandestins. Dans les années 1970, les rapports d’Amnesty International révèlent la réalité du système concentrationnaire. Les États-Unis défendent les refuzniks et dénoncent les atteintes aux Accords d’Helsinki. Le 9 octobre 1975, le prix Nobel de la paix est attribué à Andreï Dmitrievitch Sakharov ; son exil à Gorki dans les années 1980 provoque des mouvements de soutiens internationaux.

Du Katorga tsariste au Goulag soviétique L’évolution du goulag a suivi l’histoire du pays. Les premiers « camp de concentration »[21] sont créés par les deux camps en lutte aux cours de la guerre civile russe, bolcheviques et Russes blancs[22] . Les camps mis en place par les bolcheviques étaient situés à l’extérieur des villes et destinés à accueillir les « éléments peu sûrs » (aristocrates, marchands, etc.) pour un régime menacé par la guerre civile. Les protagonistes du conflit reprenaient ainsi à leur compte le système carcéral des camps de travail, les katorgas, qui existaient déjà dans la Russie tsariste. L’Empire russe utilisait en effet depuis le XVIIe siècle des brigades de travail forcé en Sibérie[4] . Les objectifs assignés aux camps de travail n’avaient pas changé depuis l’époque impériale : éloigner les opposants politiques[23] , et sous Staline, les marginaux, peupler de façon autoritaire les régions vides, exploiter les ressources de l’immense Russie et terroriser la population. Staline ajouta aussi la fonction de rééducation : le travail forcé devait transformer le monde ancien et forger un « Homme nouveau ».

Félix Dzerjinski, chef de la Tcheka, instigateur des premiers camps

La Terreur rouge Pendant la guerre civile russe (1918-1921), la Terreur rouge, en réaction à la Terreur blanche, expédie dans les camps un total de 150000 à 400000 personnes qualifiées d’« ennemis du peuple » : mencheviks, contre-révolutionnaires, membres déviationnistes du parti communiste, victimes de l’épuration politique.


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Lénine engagea la répression pour sauver la Révolution russe et maintenir au pouvoir les bolchéviques. Il décide en janvier 1918, en accord avec le gouvernement révolutionnaire, « l’arrestation des saboteurs-millionnaires, qui voyageaient en train dans des compartiments de première ou deuxième classe : « Je suggère de les condamner à six mois de travaux forcés dans une mine »[24] . Les catégories arrêtées par la police politique (la Tchéka) sont dès le départ très floues et aléatoires : l’expression « ennemi de classe » est employée de manière arbitraire, comme sous la Terreur de la Révolution française. Les condamnations des tribunaux révolutionnaires se font dans la précipitation. Des banquiers, des marchands, des prêtres sont alors expédiés dans les prisons qui sont vite surpeuplées. Trotski puis Lénine décident d’utiliser des « camps de concentration » (kontslaguer) en reprenant l’infrastructure des camps de prisonniers de guerre qui viennent d’être vidés après le traité de Brest-Litovsk (3 mars 1918). Le 15 avril 1919, le décret n°45 paraît dans le n°81 des Izvestia, l'organe du gouvernement soviétique, sous le titre « Au sujet des camps de travaux forcés ». Il est signé par le chef de l'État, Mikhaïl Kalinine. Sa rédaction est du chef de la Tchéka, Félix Dzerjinski, appliquant la directive de Lénine et du gouvernement. L'article 5 stipule : « La gestion des camps de travaux forcés, sur l'ensemble du territoire de la République soviétique fédérale de Russie, sera assurée par une direction centrale des camps instituée par le commissariat du peuple à l'Intérieur (NKVD). Cette direction centrale prendra le nom de Goulag. »[25]

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Le monastère de l’île Solovetski, archipel des Solovetski

Affiche soviétique des années 1920: Le Guépéou frappe les saboteurs de la contre-révolution à la tête.

Entre 1920 et 1923, la Russie soviétique compte 84 camps[26] regroupant environ 25000 prisonniers, soit un peu plus du tiers de la population carcérale en Russie soviétique estimée à 70000 détenus[27] . Mais bientôt, la place venant à manquer, il fallut créer des camps spécifiquement soviétiques : en 1923, les camps des îles Solovetski deviennent un modèle pour le régime. Soljenitsyne utilisera par ailleurs le mot « archipel » pour désigner le goulag. Afin de stimuler la production, les rations alimentaires sont distribuées en fonction du travail effectué[28] . Le Goulag soviétique L’arrivée au pouvoir de Staline en 1927 aggrave encore la situation. La collectivisation et la planification de l’économie marquent un « grand tournant » dans l’histoire soviétique. Le régime passe à une répression systématique et organisée. En 1928, la commission Ianson est chargée par le politburo de réfléchir à l’organisation générale des camps de travail. Leurs travaux vont être largement infléchis par les nouvelles orientations du camp « laboratoire » des Solovki, sous l'influence d'un Chantier du canal de la mer Blanche à la mer ancien déporté, devenu en moins de trois ans chef de camp, Naftaly Baltique Frenkel. Selon Anne Applebaum, même si Frenkel n'a pas inventé chaque aspect du système, il a trouvé le moyen de faire d'un camp de prisonniers une institution économique rentable, et il le fit à un moment, en un lieu et d'une manière qui ne pouvaient qu'attirer l'attention de Staline[29] .


Goulag Selon ce système, le travail se payait en nourriture à partir d'une distribution très précise des vivres. Frenkel divisa les prisonniers du SLON en trois groupes : 1. ceux considérés comme capables d'un travail lourd (800 gr de pain et 80 gr de viande), 2. ceux capables seulement d'un travail léger (500 gr de pain et 40 gr de viande), 3. les invalides (400 gr de pain et 40 gr de viande). Chaque groupe recevait des tâches différentes, des normes à satisfaire — et une ration leur correspondant et établissant des différences drastiques entre les déportés[30] . En somme, les invalides recevaient une ration réduite de moitié par rapport aux déportés les plus forts[31] . En pratique, le système partageait les prisonniers très rapidement entre ceux qui survivraient et les autres. Sous les ordres de Frenkel, la nature même du travail réservé aux prisonniers changea, depuis l'élevage de bêtes à fourrures ou la culture de plantes tropicales vers la construction de routes ou l'abattage des arbres. Dès lors, le régime du camp changea également et évolua vers la rentabilité du travail et le SLON se développa au-delà de l'archipel des Solovki[32] jusque dans la région d'Arkhangelsk, sur le continent, et de là à des milliers de kilomètres des îles Solovetski, où Frenkel envoya des équipes de forçats[33] . En revanche, tout ce qui ne contribuait pas directement à l'économie du camp fut abandonné : ainsi, toute prétention de rééducation tomba — fait général aux camps du Goulag à partir des années 30. Par un décret officiel en date du 7 avril 1930, Staline et ses collaborateurs fondent l’institution que l’on connaît sous le nom de Goulag, confiant successivement sa gestion à la Guépéou, au NKVD, puis enfin au MVD. Des camps sont ouverts en Russie d’Europe et en Sibérie, en Biélorussie, Ukraine, Kazakhstan, Mongolie, et plus tard en Tchécoslovaquie, Hongrie et Pologne. Staline s’intéressa de près à l’administration et aux performances des camps, en particulier ceux des canaux et ceux de la Kolyma. Les prisonniers travaillant sur le canal de la mer Blanche sont vite appelés « zek » du sigle du chantier (« z/k » pour zaklioutchonny) qui sera par la suite attribué à tous les détenus du goulag. La période stalinienne se caractérise aussi par l'envoi dans les camps, de certains prisonniers selon une procédure extrajudiaire désignée par « Arrêté spécial de l'OGPU », décision ordonnée en l'absence même de l'inculpé par le Collège Spécial de l'OGPU, organe habilité à prononcer des condamnations à la relégation, à la déportation, à la privation de liberté et à la peine de mort[34] . L’industrialisation rapide voulue par Staline donne lieu à des erreurs qui sont imputées aux « saboteurs » de toutes sortes. Le stakhanovisme ne supporte aucun échec et les ouvriers qui ne travaillent pas assez sont envoyés au goulag. L’exploitation des mines d’or de la Kolyma par les prisonniers répond à la volonté de Staline de faire de l’URSS une puissance industrielle. Face aux menaces de boycott des produits soviétiques à l’étranger[35] , Staline décide de renommer les camps de concentration (kontslaguer) en « camps de redressement par le travail ». Dès la fin des années 1920, des milliers de communistes — notamment de la gauche liée à Léon Trotski sont déportés ; beaucoup sont exécutés durant les années 1930. La dékoulakisation L’instauration du Goulag rend la répression encore plus féroce. Ainsi, le premier Plan quinquennal donne le coup d’envoi de la collectivisation des terres. Les paysans russes résistent et Staline veut la liquidation des koulaks, les paysans aisés. La loi du 7 juillet 1932 prévoit la peine de mort ou le goulag pour « toute escroquerie au préjudice d'un kolkhoze ». En 1930-1932, 2 millions de paysans (soit 380000 foyers) sont déportés dans des villages d’exilés[36] , 100000 dans les camps du goulag[37] . On évalue à 10% par an la mortalité des "déplacés spéciaux"[38] . « L'opération koulak » définie par le décret n°00447 du 30 juillet 1937 fit le plus grand nombre de victimes. Elle visait les éléments socialement nuisibles et appartenant au passé : les ex-koulaks enfuis cherchant du travail (Les sources policières indiquent 600000 ex-koulaks assignés à résidence). Pour cette opération, des quotas par régions et des catégories (la première catégorie signifiant l'exécution, la seconde, une peine de dix ans de camp) furent établis par Staline auprès des dirigeants du Parti. Les quotas furent largement dépassés par les responsables locaux voulant

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afficher leur zèle. Les suppléments demandés furent souvent ratifiés par le Politburo. Devant l'engorgement des prisons, la catégorie n°1 fut augmentée. Au lieu des 4 mois prévus, l'opération en dura 15. Les quotas initiaux furent pulvérisés: 387000 personnes furent fusillées et non pas 75950, 380000 déportées et non pas 193500. Selon les chiffres du NKVD, des opérations similaires entre juillet 1937 et novembre 1938 comptabilisèrent l'arrestation de 335513 personnes, dont 75 % furent classées catégorie n°1[39] . La Grande Terreur et les purges (1936-1938) En 1936-1938, Staline décide d’éliminer ses ennemis réels et supposés par une vague de répression. Durant la Grande Terreur, c’est surtout l’élite soviétique qui fut visée ; les victimes du goulag ont aussi été des fonctionnaires, des membres du PCUS, des militants du KPD ayant fui le nazisme, des officiers, des journalistes, des scientifiques et des historiens, la plupart des militants communistes qui ont fait la révolution. La période est marquée par les procès de Moscou et animée par la volonté de tuer des prisonniers directement ou indirectement : « Dès 1937, il [Staline] signa des ordres adressés aux patrons régionaux du NKVD, indiquant des quotas de gens à arrêter (sans préciser la cause) dans telle ou telle région »[40] . Les purges staliniennes de ces années ont fait 35000 morts et ont envoyé 700000 personnes au goulag, dont 140000 Polonais[41] , 172000 personnes d'origine coréenne de la région de Vladivostok[42] , et 30000 citoyens soviétiques d'origine finlandaise de la province de Leningrad[43] . La Seconde Guerre mondiale Suite au Pacte germano-soviétique d'août 1939, l'URSS entre en guerre le 17 septembre 1939. Elle occupe la moitié-est de la Pologne, et, en 1940, les Pays baltes, la Bessarabie et la Bukovine du nord. En janvier 1941, 500000 habitants de ces régions sont déjà déportés. En juin 1941, l’Allemagne nazie envahit l’URSS : le 28 août 1941, les Allemands de la Volga sont internés. Une partie des Ukrainiens voyaient les Allemands comme des libérateurs. Face à la progression allemande, le chef du NKVD Lavrenti Beria ordonna le déplacement de centaines de milliers de prisonniers vers l’est du pays, loin du front. Plusieurs usines durent être déménagées et reconverties pour fabriquer du matériel militaire. La répression et la propagande de guerre s’accrurent et des milliers de citoyens soviétiques furent emmenés au goulag pour « propagande défaitiste » ou « sabotage de l’effort de guerre ».

Lavrenti Beria, chef du NKVD entre 1938 et 1953

Pendant la Seconde Guerre mondiale, la mortalité augmenta fortement dans les goulags soviétiques : pendant l’hiver 1941-1942, 25 % des décès dans les camps étaient dus à la famine[44] . Les historiens estiment qu’il y eut deux millions de morts dans les camps et les colonies du Goulag[44] . Comme dans le reste du pays, les pénuries de toutes sortes se firent sentir.

Lorsque Staline reprend l’avantage sur les nazis et reconquiert les régions perdues, il fait déporter les peuples accusés de trahison. Entre l'été 1941 et l'automne 1944, les troupes spéciales du NKVD avaient organisé la déportation par vagues successives de peuples entiers au nom de la lutte contre l'ennemi intérieur. Dès les premiers mois, 82 % de la population allemande d'URSS soit 1,2 million de personnes, principalement installés dans les alentours de la Volga, sont déportés. Entre novembre 1943 et juin 1944, 900000 Ukrainiens, Tchétchènes, Ingouches, Tatars de Crimée, Karatchaïs, Balkars, Kalmouks, arrivent dans les goulags. À l'automne 1944, 130000 Grecs, Bulgares, Arméniens, Turcs et Kurdes sont arrêtés et déportés[45] .


Goulag En 1944, le gouvernement crée un département spécial pour les prisonniers de guerre, distinct de la bureaucratie du Goulag. En 1945, on estime à quatre millions le nombre de prisonniers de guerre en Union soviétique[46] . Après la guerre, le nombre de zeks augmente encore. En 1946, le NKVD change de nom et le Goulag passe sous le contrôle du ministère des Affaires intérieures (MVD) qui dirigera le système carcéral jusqu’à la fin de l’URSS. Dans les pays contrôlés par l’Armée rouge, des camps de concentration[47] sont créés sur le modèle soviétique. En 1946, les 4,2 millions d'anciens prisonniers de guerre soviétiques dans le Troisième Reich sont suspectés d'avoir collaboré. Si la majorité de ces anciens détenus rentrèrent chez eux, 8,5 % furent envoyés au Goulag[48] pour trahison de la patrie. Parmi les déportés figure le général Andreï Vlassov, qui s'était engagé du côté allemand.

Apogée du Goulag (1945-1953) L’administration du Goulag est réorganisée : en 1946, le NKVD est scindé en deux et le Goulag dépend désormais du MVD, le Ministère des Affaires Intérieures. Les années qui suivent la Seconde Guerre mondiale marquent l’apogée du système concentrationnaire : le nombre de détenus augmente jusqu’en 1950 pour dépasser les deux millions. La course aux armements déclenchée par la Guerre froide nécessite une quantité de main d’œuvre servile toujours plus importante. La fermeture du pays aux influences occidentales, en particulier américaines, entraîne des mesures radicales à l’encontre des étrangers. Des camps spéciaux sont mis en place et accueillent les prisonniers politiques condamnés à de longues peines. Le régime crée des lagpounkts disciplinaires. Dans la compétition qui oppose Staline aux États-Unis, les grands travaux sont relancés pour le prestige de l’URSS (port de Donetsk, grands canaux, barrages, etc.) pour lesquels les zeks sont réquisitionnés. Les révoltes, les grèves du travail ou les grèves de la faim secouent les camps. Durant l’hiver 1949-1950, les prisonniers de la Kolyma se soulèvent. La fin de règne de Staline est marquée par le complot des blouses blanches qui provoque l’arrestation de centaines de médecins juifs.

Mort de Staline, fin du Goulag ? Khrouchtchev succède à Staline de 1953 à 1964. Il amorce la déstalinisation, condamnant surtout le caractère dictatorial et répressif du pouvoir stalinien. L’attaque la plus sérieuse a lieu lors d’une séance de nuit du XXe congrès du Parti communiste d’Union soviétique (24 au 25 février 1956), il lit un rapport dévastateur sur les crimes et les écarts de Staline par rapport à la légalité socialiste. Les grèves et les rébellions[49] dans les camps poussent également le Goulag à la réforme. Les grands équipements pharaoniques sont suspendus et la discipline dans les camps est assouplie. Le temps de travail est réduit et les camps spéciaux supprimés. Plusieurs complexes de travail sont démantelés. Surtout, des amnisties de masse sont prononcées : ainsi, le 27 mars 1953, 1,2 million de détenus sont libérés[50] . On réhabilite des centaines de milliers de personnes. Mais ceux qui sortent des camps ont du mal à retrouver une vie normale par manque d’argent et subissent la méfiance des autres citoyens. En 1958, le Goulag est rebaptisé « colonie de redressement par le travail », et placé cette fois-ci sous la tutelle du ministère de la justice de l’URSS. La direction centrale des camps est dissoute. Bien que la proportion de prisonniers politiques ait très largement diminuée, elle n'est pas nulle. Ainsi Leonid Brejnev (1964-1982) utilisait régulièrement le système concentrationnaire pour faire taire les opposants. Les dissidents (militants des droits de l’Homme, religieux) tels que Joseph Brodsky, Andreï Sinyavsky, Alexander Ginzburg ou Iouli Daniel sont condamnés aux travaux forcés. Mais le goulag stalinien n’existe plus : les dissidents sont condamnés au cours de procès publics, savent pourquoi ils sont incarcérés, et peuvent faire valoir des droits (par exemple, entretien privé sans limite de temps avec un avocat, visites de la famille, et même sortie des colonies dans certains cas). Leur sort intéresse davantage l’Occident grâce aux témoignages d’anciens prisonniers (Soljenitsyne, Chalamov) et aux samizdats. Le travail est moins pénible en général que dans les années 1930-1950 : les prisonniers travaillent dans des ateliers ou des usines, et perçoivent une rémunération. Pourtant, les grèves de prisonniers existent toujours dans les années 1960 et 70. Enfin, plusieurs centaines de dissidents sont enfermés en hôpital psychiatrique (psikhushka) relevant du MVD : l’écrivain Jaurès Medvedev ou le général Pyotr Grigorenko sont internés pour « schizophrénie larvée »[51] (ou «

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Goulag torpide »[52] ). Les hôpitaux psychiatriques spéciaux comme celui d’Orel sont gardés comme des camps et protégés par des barbelés. On cherche à obtenir la rétractation des prisonniers au moyen de drogues et d’électrochocs[53] . Pendant la première moitié des années 1980, l’URSS vit l’une des périodes les plus répressives de l’ère post-stalinienne : la dissidence est peu nombreuse, surveillée et réduite au silence[54] . Il faut attendre l’arrivée au pouvoir de Mikhaïl Gorbatchev et la glasnost pour que tous les camps de prisonniers politiques soient supprimés. Des milliers d’opposants sont libérés des hôpitaux psychiatriques. La censure des écrits dissidents est levée et les réhabilitations se multiplient. Andreï Sakharov, jusque là tenu en résidence surveillée à Gorki, est libéré en décembre 1986. La Déclaration des droits et libertés de l’individu est adoptée en 1991. Aujourd’hui, de nombreuses prisons russes offrent toujours des conditions de vie déplorables, mais le travail forcé est Mémorial en l’honneur des victimes du Goulag, Moscou officiellement aboli. Les débats publics sur le Goulag restent rares et les mémoriaux sont encore peu nombreux : celui de la place Dzerjinski à Moscou est constitué d’une pierre provenant des îles Solovetski, berceau des camps de concentration soviétiques. Il n’existe aucun musée national dédié aux camps de concentration. La commission nationale de réhabilitation continue son travail. Le Goulag a entraîné des avatars dans d'autre pays. Au Viêt Nam, après 1975 et pendant de nombreuses années ont existé des camps dits de « rééducation par le travail ».

Les camps Géographie

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Goulag

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Il existait plusieurs types de camps, spécialisés dans un secteur de l’économie : Quelques exemples de complexes du goulag en URSS sous Staline[55]

Partie du "Projet 503", destiné à la construction d'une voie de chemin de fer reliant Salekhard à Igarka près de Touroukhansk sur le Ienisseï

Camp

Région

Activités

Effectifs (max.)

Bamlag

Sibérie

Chemin de fer

180000

Vorkoutlag

République des Komis

Charbon

70000

Dmitlag

nord de Moscou

Canal

200000

Belomorkanal

République de Carélie, Oblast de Leningrad

Canal

170000

Siblag

Sibérie

Chemin de fer

63000

Oukhtpetchlag

République des Komis

Charbon et pétrole

17852

Sevvostlag

Kolyma

Mines

200000

Norilsk

Nord de la Sibérie centrale

Mines

69000

• Le BAMlag : aménagement de la voie ferrée du lac Baïkal au fleuve Amour : le Baïkal Amour Magistral fut construit en plusieurs fois. Un tronçon de Taïchet à Bratsk fut construit dans les années 1930 ; il mobilisa 180000 détenus et fit 10000 morts[56] . Mais la plus grande partie du tracé oriental fut l’œuvre des prisonniers du goulag pendant les années 1944-1946. • le Vorkoutlag produisait en 1938 plus de 188000 tonnes de charbon et utilisait 15000 détenus[57] . Les détenus ont également construit de nombreuses villes (Komsomolsk-sur-l’Amour, Petchora, Inta, Magadan, Vorkouta, Norilsk, etc.).


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Administration et fonctionnement du goulag Le goulag constituait une direction administrative du NKVD ; il était subdivisé en directions principales par branches économiques qui étaient sous les ordres de l’administration centrale située à Moscou. En 1953, le goulag gérait 146 camps de travail correctif (Ispravitelno Troudovoï Lagpunty, abrévié « ITL ») ainsi que leurs filiales et annexes. Les complexes regroupant plusieurs camps étaient désignés par un nom d’activités ou de lieu auquel on ajoutait le suffixe « lag » ( Dmitlag, Dallag, Steplag, Minlag, Intlag, Birlag, Karlag, etc.). Le goulag administrait également quelque 687 colonies de travail correctif (Ispravitelno Troudovaïa Kolonia – abrévié « ITK ») pour des condamnés à des peines inférieures à cinq ans. Il avait enfin la garde des zones spéciales et des villages de travail destinés à accueillir les déportés. Nikolaï Iejov, chef du NKVD de 1936 à 1938

Les camps dépendaient de directions régionales (par exemple la Direction sibérienne des camps ou Siblag OGPU). Des formations paramilitaires (« commandements » ou komendatury en russe) administraient les colonies spéciales et jouissaient d’un statut d’exterritorialité[58] . Nicolas Werth estime que 200000 personnes étaient employées par le goulag vers 1953[59] . Le contrôle de Moscou sur les camps se renforça avec Staline, en particulier pendant la Seconde Guerre mondiale : cela entraîna un renforcement de la bureaucratie et des visites des inspecteurs venus de la capitale. En principe, les zeks avaient le droit de se plaindre des mauvais traitements aux commissions des camps. Mais en réalité, un petit nombre de ces plaintes aboutissaient finalement à des sanctions à l’encontre du personnel encadrant. Les procureurs du goulag étaient chargés de faire connaître les rapports d’inspection des camps.


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Description des camps Diversité Il existait une grande variété de camps de travail en URSS : il est donc difficile de dresser une typologie complète de plusieurs centaines de goulags. Les plus grands camps pouvaient concentrer plusieurs milliers de détenus. D’autres étaient plus petits et isolés dans la taïga (les « lagpoukts »). La nature des camps dépend également de leur activité : certains étaient liés à une usine, au travail agricole, d’autres étaient temporaires (pour la construction d’une route ou d’une voie ferrée). Plan général La plupart des camps des années 30 avaient un plan carré ou rectangulaire. À l’entrée se trouvaient le poste de contrôle et un panneau annonçant un slogan : déjà aux Solovki, on pouvait lire « D’une poigne de fer, nous conduirons l’humanité vers le bonheur ! »[60] ou encore « Par le travail, la liberté ! »[61] , à rapprocher de la devise « Arbeit macht frei » à l’entrée des camps nazis. La zone carcérale (« Ruines du camp 503 près de l’Iénisseï, de nos zona ») est entourée d’une clôture, de barbelés ou de murs, et surveillée jours par des miradors. Toutefois, aux Solovki, par exemple, cette forme n'a pas grand sens : tout l'archipel constitue le camp, les baraquements construits peu à peu pour accueillir une population toujours croissante viennent s'ajouter aux nombreux bâtiments monastiques et ermitages dispersés sur les îles et utilisés soit comme logement soit comme bases par les différentes équipes de travail, quand ce n'est pas comme isolateur[62] . Les gardes ont l’ordre de tirer sur les fugitifs. Les tentatives d’évasion ont existé[63] , mais, dans les camps sibériens, les zeks étaient découragés de s’enfuir par l’isolement des camps et les contraintes naturelles. Les baraquements Il subsiste bien peu de baraquements de l’époque stalinienne et il faut recourir aux témoignages de détenus pour s’en faire une idée. Les prisonniers vivaient dans des baraques en bois ou en pierre (dans la toundra). Certains abris n’avaient que des sols en terre battue, d’autres disposaient de plancher en bois. Les bains, les latrines, l’infirmerie, les entrepôts et les ateliers Ils étaient séparés des baraquements. Le cachot Les cachots ou « isolateurs disciplinaires » (abréviation : CHIZO) étaient construits en pierre ou en brique. Il isolait totalement les prisonniers réfractaires au travail ou les auteurs de délits et de crimes dans le camp. Au siège du complexe concentrationnaire se trouvait un bloc central, c’est-à-dire une grande prison. Enfin, il existait des camps disciplinaires, parmi lesquels celui du Dalstroï (Kolyma) était l’un des plus redoutés[64] .

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Efficacité économique des camps Après l'invasion allemande du 22 juin 1941, Béria décrète la loi martiale au Goulag. Les conditions de détention se dégradent : la journée de travail s'allonge jusqu'à 10 heures, les jours fériés sont supprimés. Les éléments suspects sont systématiquement « épurés ». Le travail s'intensifie : les camps fournissent le front en charbon, munitions, uniformes, céréales… En 1943, le bagne est créé pour des coupables de haute trahison (12h/jour, rations réduites). Dans certains camps la journée de travail est estimée à 16h/jour (par exemple au Viatlag). Pour équilibrer les pertes au front, des détenus et des gardes y sont envoyés (975000 détenus et 93000 gardes). Jean-Jacques Marie Chantier du canal de la mer Blanche estime à 40 % le poids du Goulag dans l'économie de l'URSS. Mais le Goulag n'atteint que 1,2 % de la production industrielle nationale et 12 % de la production du bois. Les détenus n'ont qu'une faible productivité, inférieure à celle des travailleurs libres ; cette productivité ne compense même pas le peu que coûte la main-d'œuvre. Les camps coûtent davantage à l'État qu'ils n'apportent de bénéfices. Le sabotage, l'encadrement coûteux et la négligence en sont partiellement les causes. Seulement 70 % de détenus travaillent : certains d'entre eux sont enfermés en isolateurs, d'autres sont handicapés, la pègre tout comme l'administration ne travaillent pas. Les mauvaises conditions de vie ne font qu'affaiblir les détenus. Certains chantiers se révèlent impraticables et vains. Staline fait exécuter plusieurs hauts dirigeants du Goulag pour sabotage. La mort de Staline et la prise de consciences des défauts dans le fonctionnement et la contestation croissante dans les camps accélèrent son démantèlement. En 1953, Béria décrète une amnistie partielle et les détenus sont relâchés dans un grand chaos et sans mesures d'accompagnement. Elle est suivie en 1955 d'une amnistie quasi générale, ne concernant pas les collaborateurs condamnés à plus de dix ans de prison. Le Goulag perd ainsi sa fonction économique et ne se cantonne plus qu'à sa fonction répressive. Les camps du Goulag sont renommés « camps de redressement par le travail », où on continue d'interner des opposants politiques sous Brejnev. L'autre moyen de neutraliser les dissidents est de les enfermer dans des hôpitaux psychiatriques. Le système concentrationnaire soviétique n’a jamais été assez efficace pour les dirigeants. Les causes de cet échec sont diverses : corruption des gardiens, vols, règles non appliquées, conditions extrêmes, manque d’équipement moderne, mauvaise gestion, pénuries, etc. Au total, le travail est rarement productif malgré les efforts des autorités. Avec le « Grand Tournant » de 1929, Staline cherche à accroître les rendements et impose des cadences infernales aux prisonniers[65] . Au cours de la « Grande Terreur » (1937-1938), il fait exécuter plusieurs hauts responsables du goulag[66] pour « sabotage ». Le manque de préparation, d’ingénieurs, de techniciens et de spécialistes dans les camps explique un gaspillage important du travail : de grands projets comme le canal de la mer Blanche ou le port du cap Kammeni à l’embouchure de l’Ob se sont finalement révélés inadaptés. Quant à la voie ferrée Salekhard-Igarka entre l'Ob et l'Ienisseï, appelée « route de la mort », on se rendit compte après plusieurs mois de travaux qu’elle était irréalisable du fait des contraintes naturelles de la toundra. Le projet fut abandonné en 1953 après avoir fait des dizaines de milliers de morts et coûté 40 milliards de roubles[67] .

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La vie dans les goulags sous Staline Les prisonniers Statistiques D'après l'historienne Anne Applebaum, 18 millions[4] de personnes sont passées par les goulags sous la dictature de Staline. Les effectifs des prisonniers n’ont jamais dépassé les deux millions sur une année, prisonniers de droit commun et politiques confondus. Cela s’explique par un renouvellement constant des détenus alimenté par des libérations[69] compensées par de nouvelles arrestations. Les zeks pouvaient quitter Évolution du nombre de prisonniers du goulag (1930-1953)Source : Anne Applebaum, les camps pour intégrer l’armée, parce Goulag : Une histoire, 2005, p. 630. qu’ils étaient invalides ou incapables de travailler (femmes enceintes). Mais un à deux millions de personnes n’ont pas survécu. L’analyse du graphique ci-contre montre la fluctuation des effectifs détenus dans les goulags sous Staline : en 1941, on assiste à une augmentation qui est la conséquence de l’invasion du territoire soviétique par les nazis. La fin du règne de Staline marque l’apogée du système avec plus de 2,5 millions de détenus et 2,75 millions de « déplacés spéciaux »[70] . Sociologie Dans l’URSS de Staline, la grande majorité des zeks[71] était des gens ordinaires, paysans ou ouvriers condamnés pour sabotage, espionnage ou crimes contre-révolutionnaires. • • • • •

Prisonniers politiques et élites : officiers, membres du PC, etc. Criminels et délinquants Saboteurs : ouvriers, paysans, mais aussi cadres d’entreprises, responsables économiques Deux millions de koulaks déportés en 1930-1932[36] Déportations ethniques pendant la Seconde Guerre mondiale : Polonais, Ukrainiens, Baltes, Moldaves, Bessarabiens en 1939-1941 ; Allemands de la Volga en 1941 ; Tatars de Crimée en 1943 ; Tchétchènes en 1944. Mais ces populations avaient plutôt le statut d’exilés ou déportés spéciaux. La plupart étaient assignés à résidence dans des villages surveillés[4] . • Pendant la Grande Terreur, les femmes des ennemis du peuple sont déportées, par exemple, dans le camp de Temnikovski en Mordovie. • étrangers : communistes polonais et occidentaux, Chinois ayant franchi illégalement la frontière, ressortissants de l’Axe (Japonais, Allemands) ; les étrangers se trouvaient isolés par la barrière de la langue (Japonais, Chinois) ; les Polonais, les Ukrainiens et les Baltes se regroupent entre eux et constituent des réseaux de solidarité à l’intérieur des camps. Cependant, la grande majorité des détenus étaient des Russes. • religion : orthodoxes, protestants, Témoins de Jéhovah et sectaires • juifs au moment du complot des blouses blanches Varlam Chalamov, dans ces Récits de la Kolyma, témoigne de la diversité sociologique des détenus :

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60 « Il ne faut pas avoir honte de se souvenir qu’on a été un « crevard », un squelette, qu’on a couru dans tous les sens et qu’on a fouillé dans les fosses à ordures [...]. Les prisonniers étaient des ennemis imaginaires et inventés avec lesquels le gouvernement réglait ses comptes comme avec de véritables ennemis qu’il fusillait, tuait et faisait mourir de faim. La faux mortelle de Staline fauchait tout le monde sans distinction, en nivelant selon des répartitions, des listes et un plan à réaliser. Il y avait le même pourcentage de vauriens et de lâches parmi les hommes qui ont péri au camp qu’au sein des gens en liberté. Tous étaient des gens pris au hasard parmi les indifférents, les lâches, les bourgeois et même les bourreaux. Et ils sont devenus des victimes par hasard[72] . »

Arrestation et transport des prisonniers La plupart des prisonniers arrivaient dans les camps après un passage en prison. Ils étaient interrogés et avouaient leur « crime » sous la pression, le harcèlement ou la torture. Les procédures judiciaires étaient rapides ou truquées. Les chefs d’accusation étaient souvent absurdes ou vagues : sous Staline, la liste des « suspects » comportait les étrangers[73] (espionnage) ou les personnes en relation avec des étrangers (collectionneurs de timbres, espérantistes[74] ). Les Russes pouvaient être condamnés à une peine de camp pour avoir raconté une blague sur Staline[75] ou pour « crime contre-révolutionnaire »[76] . La Ossip Mandelstam photographié lors de son délation ou le simple soupçon envoyaient des innocents au Goulag. Les arrestation par le NKVD arrestations et les perquisitions avaient lieu souvent la nuit. Pendant la Seconde Guerre mondiale, un retard à l’usine pouvait envoyer l’ouvrier dans un camp pour plusieurs années. Beaucoup d’étrangers, et surtout les ressortissants des pays de l’Axe, ont été emprisonnés. Après 1942, lorsque les Soviétiques repoussent les Allemands, les rafles dans les territoires occupés par l’Armée rouge ont particulièrement touché les Polonais, les Ukrainiens et les ressortissants des pays baltes. La mortalité était très forte pendant le transfert des détenus vers leur camp de travail : ainsi, dans les années 1930, sur les 16000 prisonniers envoyés dans la région de la Kolyma, seuls 9928 étaient arrivés vivants[77] . Dans les trains de prisonniers, le manque d’eau, de nourriture et d’hygiène affaiblissait les passagers[78] . Le voyage pouvait durer plusieurs semaines. Pour rejoindre leur camp, les convois utilisaient le bateau sur les fleuves sibériens ou en Extrême-Orient. Les témoignages décrivent des conditions effrayantes : promiscuité, viol des femmes, indifférence des gardiens, froid, etc. Le transport des prisonniers se faisait par train

À leur arrivée au camp, les prisonniers étaient dans un état physique et psychologique déplorable : certains devaient d’abord passer par la quarantaine pour récupérer. Les autres étaient entièrement rasés et lavés. Ils recevaient un uniforme déchiré ou trop court, afin de les humilier, comme en témoigne Anna Andreïevna, épouse de l’écrivain Daniel Andreïev et condamnée au camp de travail : « Ils [les gardes] nous avaient dépouillé de tout ; ils nous privèrent de nos noms, tout ce qui fait la personnalité de quelqu’un et nous habillèrent, je n’arrive même pas à le décrire, d’un truc informe[79] . » Les prisonniers étaient ensuite classés en catégories de travail, en fonction de leurs capacités physiques et de leur crime.


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Le travail au quotidien Diversité du travail La condition d'un prisonnier du goulag dépend de la région où il se trouve enfermé, du contexte national, de son crime, mais aussi de son travail : les hommes utilisés pour construire le canal de la mer Blanche n’ont pas les mêmes chances de survie que les ingénieurs ou les techniciens employés dans l’aéronautique ou l’armement. Certains scientifiques emprisonnés vivaient dans un certain confort[80] au sein des charachkas (Lev Kopelev, Andreï Tupolev, Vladimir Petliakov). Certains détenus travaillaient pour le camp : ils effectuaient diverses tâches (organisation du travail et des chantiers, préparation des repas, nettoyage, soin, etc.) au service du goulag et les autres zeks les appelaient les « planqués ». Leur travail était en effet considéré comme moins pénible et on estimait qu’ils étaient au service du système concentrationnaire. Ils étaient choisis et destitués par l’administration et travaillaient dans l’enceinte du camp. Pendant les périodes de guerre (1918-1921 et 1939-1945), les détenus soviétiques doivent participer à l’effort de défense nationale en creusant des tranchées et en fabriquant des armes. Durée du travail La durée et les horaires de travail varient en fonction des périodes, de la saison et du commandement des camps. Pour répondre aux besoins économiques engendrés par la Seconde Guerre mondiale, le temps de travail est allongé, pour les zeks comme pour les travailleurs libres. Dans le Grand Nord sibérien, les journées de travail sont réduites en hiver, à cause du froid et de la nuit. La direction centrale du Goulag tente de limiter le temps de travail. Mais ces directives ne sont pas souvent respectées et les prisonniers doivent terminer leur tâche avant de pouvoir se reposer : dans les années 1930, les zeks travaillent douze heures par jour[81] . Au Viatlag, la durée quotidienne du travail pendant la guerre est de 16 heures de travail[82] . Certains zeks se mutilent, feignent d’être malade ou fou pour passer quelque temps de repos à l’infirmerie[83] . Enfin, le mécontentement des détenus pouvait tourner à la grève de la faim ou à l’émeute. Sécurité Le travail forcé dans les usines, les pêcheries, les mines, les chantiers ou dans la taïga est pénible, surtout en hiver. Les conditions de sécurité ne sont pas toujours assurées si bien que des milliers de prisonniers trouvent la mort dans des accidents. En 1939, les premiers zeks qui extraient l’uranium des mines de la Kolyma n’ont pas de combinaison de protection[84] . Le manque de nourriture et de soins rendent les journées difficiles. Certains prisonniers se mutilent, d’autres se suicident pour échapper à leur sort[85] . Encadrement du travail et propagande

Travail forcé sur une route de la Kolyma

Les chefs de brigades ou « directeurs de travaux » étaient choisis parmi les zeks pour diriger les équipes et veiller à atteindre les objectifs de production. Il existait deux catégories de travailleurs : ceux des « travaux généraux » et les « planqués ». Les performances au travail étaient affichées et les meilleurs ouvriers récompensés. Les affiches et les slogans répétés à longueur de journée incitaient à travailler toujours plus. La section culturelle et éducative (KVTCH)[86] assurait cette propagande dans le camp. Les règlements édictés à Moscou prévoyaient la présence d’une bibliothèque, d’un club de théâtre et des concerts pour chaque camp. En réalité, ces infrastructures étaient plutôt rares, et, lorsqu’elles existent, elles sont un instrument d’embrigadement ou d’émulation. En raison de la pénurie de papier, les journaux sont rares ou réservés au personnel libre. Enfin, la section culturelle et éducative organise des parties d’échecs, des matchs de foot et des concours de travail. Elle recueille aussi les doléances des zeks. Le courrier était censuré et beaucoup de colis envoyés par les familles étaient volés par les gardes.


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La vie des zeks en Sibérie Des conditions de vie plus ou moins bonnes Les conditions de vie variaient en fonction des époques et surtout des catégories de prisonniers : si le taux de mortalité est en moyenne de 4 % par an sous Staline, il atteint 20 % à 25 % pendant la Seconde Guerre mondiale[87] . Sous Lénine, les prisonniers politiques socialistes étaient relativement bien traités : dans les camps des îles Solovetski, ils profitaient de la bibliothèque, des pièces de théâtre jouées par les autres détenus, des colis envoyés par les familles[88] . Au Vichlag, les détenus pouvaient profiter du cinéma[89] . Les plus fortunés réussissaient à améliorer leur sort en soudoyant les gardes. Les meilleurs travailleurs, les invalides et le médecin du camp étaient mieux logés que les autres. Les conditions d’existence dépendaient également de la cruauté des gardes et des dirigeants du camp : certains utilisaient la torture[90] . En outre, la plupart du temps, le travail permettait aux prisonniers les plus zélés d’obtenir des privilèges (nourriture meilleure, vêtements, colis, visites). Activités dans le camp Les prisonniers devaient entretenir le camp (préparer les repas, nettoyer les toilettes, faire la vaisselle, enlever la neige, etc.). Les rixes et les violences étaient nombreuses, étant donné que les prisonniers politiques étaient mélangés avec les criminels et les délinquants. Les zeks occupaient leur temps libre à jouer aux cartes, écrire des poèmes, nettoyer leur baraquement, fabriquer ou sculpter des objets ou encore dessiner[91] . Enfin, les détenus assistaient à des messes organisées dans les baraquements par les prêtres déportés. Mortalité Le taux de mortalité annuel est estimé à 40 pour mille et jusqu'à 200 pour mille en 1941-1942[92] . En 1941, l'Allemagne fait la guerre à l'URSS. Ainsi, les décès dans les camps augmentaient avec la famine, le froid, les épidémies (typhus) ou encore les vagues d’exécutions. Les cadavres étaient enterrés dans des fosses communes ou dans les cimetières du camp. Edward Buca témoigne de ces inhumations collectives : « On les chargea [les cadavres des prisonniers] nus, sur des traîneaux, tête à l’extérieur et pieds dedans. Chaque corps portait une plaquette de bois, une birka, attachée au gros orteil du pied droit, et indiquant son nom et son matricule. Avant que le traîneau ne franchisse le portail du camp, le nadziratel, un officier du NKVD, prenait un pic qu’il enfonçait dans chaque crâne. Il s’agissait de vérifier que nul ne sortît vivant. Une fois hors du camp, les corps étaient jetés dans une transeïa, une des grandes fosses creusées au cours de l’été à cette fin[93] . »


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Dormir, se laver, manger Lorsque les constructions manquaient, les détenus dormaient sous des tentes ou construisaient leurs propres abris pour la nuit : dans le complexe du Siblag, certains détenus dormaient dans des gourbis sans aucun confort, creusés dans la terre[94] . Les plus chanceux dormaient dans une couchette individuelle, mais le plus souvent, les zeks partageaient un même matelas ou dorment à même le sol. Malgré la présence de poêles métalliques et de quelques lampes, l’intérieur des baraquements était froid, humide et mal éclairé. Les détenus font leurs besoins dans des tinettes pour éviter de sortir dans le froid. Normalement, les vêtements des L’intérieur d’un baraquement confortable (1936-1937) zeks devaient être bouillis régulièrement par mesure d’hygiène. Les détenus disposent d’un petit savon pour se laver et faire leur lessive. Thomas Sgovio décrit les bains dans son camp de la Kolyma : « Le froid de canard à l’extérieur, en attendant que les autres sortent, puis le vestiaire, où on se gelait, les désinfections obligatoires et la fumigation, où l’on jetait nos guenilles en tas […], les bagarres et les insultes […], le choix de sous-vêtements communs et humides, pleins d’œufs de poux dans les coutures, le rasage de tout le corps par le barbier du camp … puis, quand arrivait enfin notre tour d’entrer dans les bains, nous prenions un baquet de bois et recevions un bock d’eau chaude, un bock d’eau froide et un petit bout de savon noir qui empestait[95] . » Les repas sont pris dans un réfectoire : une bouillie à base de céréales est servie le matin, une soupe le midi et le soir. L’approvisionnement et la gestion des denrées alimentaires restent souvent problématiques. En Sibérie, les provisions gèlent en hiver et pourrissent en été. Pendant la Seconde Guerre mondiale, certains camps ne reçoivent aucune marchandise pendant plusieurs jours, ce qui aggrave les pénuries. Si bien que de nombreux camps créent leur propre kolkhoze pour assurer leur ravitaillement[96] . Les zeks souffrent de malnutrition voire de faim et développent des maladies liées aux carences (pellagre, scorbut). Les rations sont proportionnelles aux efforts fournis dans le travail forcé. Séparation entre hommes et femmes En principe, les hommes et les femmes sont séparés dans des zones ou des camps différents[97] . Les femmes étaient minoritaires et très peu nombreuses dans les goulags du Grand Nord. Cependant, il arrivait que certaines femmes tombent enceinte dans les camps : elles accouchaient dans les hôpitaux des complexes concentrationnaires. Il existait des crèches dans certains camps puis les enfants étaient envoyés dans des orphelinats. Les foyers accueillaient les enfants des camps ou les enfants des zeks. Les enfants délinquants et criminels étaient enfermés dans des colonies spéciales[98] .

Le personnel du camp La VOKHR (garde armée des camps) était composée d’hommes libérés du Goulag ou d’anciens membres de la police secrète tombés en disgrâce. Pendant l’ère stalinienne, on envoie les incompétents, les suspects ou les ivrognes encadrer les camps[99] . L’encadrement des camps a toujours souffert du manque de volontaires ; cette situation s’explique par les conditions de vie difficile et le manque de prestige de la fonction. La ration reçue par chaque garde était proportionnelle à son grade[100] . Les journées de travail étaient interminables et les maladies touchaient tout le personnel du camp. Cependant, certains commandants de complexes concentrationnaires pouvaient vivre dans le luxe. Les comptables, les techniciens, les normeurs, les médecins ou les instructeurs du camp de la KVTCH vivaient


Goulag sans doute un peu mieux que les gardes. La direction du Goulag chercha constamment à limiter les mauvais traitements sur les prisonniers. La propagande poussait les gardiens à détester les « ennemis du peuple ». Les objectifs de production devaient être réalisés par tous les moyens. Enfin, les gardes les plus méritants pouvaient monter en grade.

Prisonniers célèbres et témoignages sur les camps soviétiques Prisonniers célèbres • • • • • •

Alexandre Chliapnikov, fondateur de l’Opposition ouvrière Hugo Eberlein, co-fondateur du Parti communiste d’Allemagne Sergueï Korolev passa quelque temps dans un camp de la Kolyma Alexandre Soljenitsyne, écrivain et dissident soviétique Maria Spiridonova, ancienne dirigeante du Parti socialiste-révolutionnaire de gauche Casimir Swiatek, prêtre catholique biélorusse (puis évêque et cardinal après la chute du mur de Berlin) de 1944 à 1954 ; • Nikolai Dmitrijewitsch Kondratieff, économiste qui créa la théorie du Cycle Kondratieff

Témoignages • Alexandre Soljenitsyne dans l’Archipel du Goulag (1973) a porté son témoignage à la connaissance d’un très large public en Occident, ce qui lui a valu l’exil. Il y décrit les conditions de vie dégradantes dans les camps (travail forcé, froid, faim, gardiens inhumains), mais aussi la volonté de rééduquer le détenu par le biais de « sections politiques et éducatives » (des brigades politiques et éducatives) destinées à « remplacer aumôniers et services religieux des prisons d’antan ». • Varlam Chalamov, Récits de la Kolyma, Éditions François Maspero, 1980 (réédition Fayard 1986, puis Éditions Verdier, 2003) • Jacques Rossi, dans son Manuel du Goulag, publié en 1987 (en anglais) et et 1997 (en français, Le Cherche midi éditeur, (ISBN 2862745324)), écrit : « Le goulag servait de laboratoire au régime soviétique, dans le but de créer une société idéale : garde-à-vous et pensée unique. » • Raymond Duguet, Un Bagne en Russie rouge, 1927. • Margarete Buber-Neumann, Déportée en Sibérie, Paris, Seuil, 1949. • Jules Margoline, La Condition inhumaine, Paris, Calmann-Lévy, 1949. • Joseph Czapski, Terre inhumaine, éditions Îles d’Or, 1949. • Evguénia Guinzbourg, Le Vertige (2 tomes) et la suite Le Ciel de la Kolyma, Seuil, 1967 • Elinor Lipper, Onze ans dans les bagnes soviétiques, Nagel, 1950. • Alexander Dolgun avec la collab. de Patrick Watson, Alexander Dolgun's Story : An American in the Gulag, New York, Alfred A. Knopf, 1975; trad. franç. de Gilles Garnet, Histoire d'Alexandre Dolgun, un Américain dans le Goulag, Paris, Albin Michel, 1976.

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Bibliographie Articles et ouvrages en français • Les Amis de la vérité sur l’URSS (Boris Souvarine et al.), Bilan de la terreur en URSS : faits et chiffres, Librairie du travail, 1936. • Anne Applebaum, Pierre-Emmanuel Dauzat (trad.), Goulag : Une histoire, Paris, éditions Bernard Grasset, 2003, 2005. (ISBN 2246661218) • Paul Barton, L'Institution concentrationnaire en Russie (1930-1957), Plon, 1959, 516 pages. • Stéphane Courtois (dir.), Le Livre noir du communisme. Crimes, terreur, répression, Paris, éditions Robert Laffont, 1997, 1998. (ISBN 2221088611) • Raymond Duguet, Un Bagne en Russie Rouge. Solovki : l’île de la faim, des supplices, de la mort, Paris, Balland, 2004. (ISBN 2715814895) • Tomasz Kizny, Goulag, Paris, éditions Solar, 2003, (ISBN 2735702413), recueil de photos d’archives et actuelles sur les camps du Goulag. • Joël Kotek, Pierre Rigoulot, Le Siècle des camps : emprisonnement, détention, extermination, cent ans de mal absolu, Paris, éditions J.-C. Lattès, 2000. (ISBN 2709618842) • David Rousset, Le Procès des camps de concentration soviétiques, D. Wapler, 1951. • Olga Adamova-Sliozberg et alii, L’Aujourd’hui blessé, Lagrasse, Éditions Verdier, collection « Slovo », 1997 : recueil de témoignages de femmes emprisonnées dans les camps soviétiques. • Jacques Rossi, Le Manuel du goulag, Paris, Le cherche midi 1997. (ISBN 2-86274-532-4) • Sergueï Sigatchev, Le Système des camps de redressement par le travail en URSS, réalisé et édité par le « Centre d’information scientifique et de vulgarisation Memorial », Moscou, 1998. • Michel Heller, Le Monde concentrationnaire et la littérature soviétique, Paris, L’Âge d’Homme, 1974. • Jean-Jacques Marie, Le Goulag, Paris, PUF, 1999. • Guy Vinatrel, L’URSS concentrationnaire, éditions Spartacus, 1949. • Marie Jégo, « 7 avril 1930, le bureau politique instaure le Goulag », dans Le Monde du 03/03/2003,

Articles et ouvrages en anglais • Gustaw Herling, A World Apart: Imprisonment in a Soviet Labor Camp During World War II, Penguin, 1996, 284 pp. (ISBN 0-14-025184-7) • Paul Gregory, Valery Lazarev, The Economics of Forced Labour: The Soviet Gulag, Stanford, Hoover Institution Press, 2003 (voir aussi [101]). • Zemskov, article Gulag - istoriko-sociologiceskij.

Voir aussi Articles connexes • • • • • • •

Origines du Goulag Katorga Kolyma Perm-36 Alexandre Soljenitsyne Varlam Chalamov Jacques Rossi

• Staline • Histoire de l'URSS sous Staline


Goulag • • • •

66 Laogai, le Goulag chinois Camp de travail Camp de concentration L'Archipel du Goulag

Liens externes • • • • • • • •

Textes sur le goulag après 1945 [102] Les militants Trotskistes à Vorkouta [103] Goulag Présentation du film de Iossif Pasternak et Hélène Châtelain (2000) [104] Sur les conséquences géographiques des camps de travail soviétiques, lire « La Russie : des territoires en recomposition », sur le site de Géoconfluences [105] Pierre Lepape, « Le goulag selon Chalamov », dans Le Monde diplomatique [106], décembre 2003 Madeleine Vatel, « A Moscou, les rescapés du goulag se rassemblent contre l’oubli », dans Le Monde du 01/11/2006, (en) de l’association russe Mémorial [107], fondée par Andreï Sakharov en 1988. Voir en particulier les productions du Memorial Museum [108] (lt) Album du Goulag (prisonniers de Kolyma et de Tchoukotka, 1951-1955) [109]

• (en) Musée virtuel du Goulag [25] • (ru) Carte détaillée interactive du goulag [110] La version du 7 mars 2007 de cet article a été reconnue comme « article de qualité », c'est-à-dire qu'elle répond à des critères de qualité concernant le style, la clarté, la pertinence, la citation des sources et l'illustration.

Références [1] cf les livres d'étude sociologique d'Alexandre Zinoviev sur la société soviétique et du système du communisme réel [2] C’est-à-dire la mort de Staline ; il y avait alors 476 complexes composés de milliers de camps : voir N.G. Okhotine, A.B. Roginski, Sistema ispravitelno-troudovykh laguerei v SSR, 1923-1960 : spravotchnik, Moscou, 1995. [3] Marie Jégo, « 7 avril 1930, le bureau politique instaure le Goulag », dans Le Monde du 3 mars 2003, [4] Anne Applebaum, Goulag : Une histoire, 2005, p. 9.

(en) The Other Killing Machine (http://query.nytimes.com/gst/fullpage.html?res=9D00EED61F3DF932A25756C0A9659C8B63& sec=& spon=& pagewanted=print) [6] (en) Les victimes oubliées de Staline prisonnières du Goulag. (http:/ / www. telegraph. co. uk/ news/ main. jhtml?xml=/ news/ 2003/ 03/ 02/ wgulag02. xml) [7] Propagande par des mises en scènes sur les photographies ou sur les films ; dénigrement de Soljenitsyne, traité de fou et d’ivrogne : lire à ce sujet D.M. Thomas, Alexander Solzhenitsyn : A Century in His Life, Londres, 1998, p. 489-495. [8] Dans La Révolution prolétarienne « dès 1928, une rubrique est ouverte : "Emprisonnés, déportés". Cette constance de l'antistalinisme est longtemps considérée par les militants de La Révolution prolétarienne comme une fidélité à l'idéal communiste trahi. » (Dictionnaire des intellectuels français, Seuil, 1996, p. 965). De même, en janvier 1928, Le Bulletin communiste de Boris Souvarine (communiste anti-stalinien) publie un article : « Au secours des déportés de Sibérie ». [9] Varlam Chalmaov, Récits de la Kolyma, traduit du russe par Sophie Benech, Catherine Fournier et Luba Jurgenson, Lagrasse, Verdier, 2003 [10] Varlam Chalamov,Vichera, traduit du russe par Sophie Benech, Lagrasse, Verdier, 2000 [11] Collectif, Le Livre noir du communisme, 1998, p. 21-22. [12] Deux pour cent de la population de chaque pays d'après David, E. Murphy, Ce que savait Staline, l'énigme de l'opération Barberousse, éd. Stock, 2006. [13] Le Monde diplomatique Pourquoi Staline liquida le Comité antifasciste juif (http:/ / www. monde-diplomatique. fr/ 1995/ 12/ RUCKER/ 2052. html), décembre 1995. [14] Alexandre Zinoviev, Les confessions d'un homme en trop, éd. Folio, 1991. [15] Staline utilisa les mots « purification » ou « vermine » : lire Anne Applebaum, Goulag : Une histoire, trad. P.-E. Dauzat, éd. Grasset & Fasquelle, 2005, p. 32. [16] Présentation de l’auteur en anglais (http:/ / www. hawaii. edu/ powerkills/ PERSONAL. HTM) [17] Anne Applebaum, Goulag : Une histoire, 2005, p. 500. [18] Jean Sévilla, Le Terrorisme intellectuel, Paris, Perrin, 2004, (ISBN 2262017727) , p. 25-26. [5]


Goulag [19] Ibid., p. 29. [20] Ibid., p. 32. [21] Selon Jean-Jacques Marie, « À l'époque il est banal, voir courant, de nommer camp de concentration un camp d'internement ou de prisonniers. C'est le terme qu'utilisaient les représentants de l'amiral monarchiste Koltchak pour désigner les camps de Sibérie où croupissaient encore en 1919 166000 prisonniers allemands et autrichiens de la guerre terminée, otages d'une guerre civile à laquelle ils n'avaient aucune part, ravagés par le typhus et la famine. », Le Goulag, PUF, p. 25. [22] Les Blancs finlandais ouvrent les premiers camps de la guerre civile en mai 1918 après leur victoire contre les socio-démocrates russes, voir Jean-Jacques Marie, « Trotsky et les camps de concentration » (http:/ / pagesperso-orange. fr/ cermtri. 3/ cariboost1/ crbst_84. html). Le premier « camp de concentration » bolchevique est créé en septembre 1918 à l’instigation du chef de la Tcheka, Félix Dzerjinski, voir George Leggett, The Cheka : Lenin’s Political Police, Oxford, 1981, p. 102-120. [23] Le pouvoir tsariste utilisa d’ailleurs l’internement contre les bolcheviks avant la Révolution de 1917. [24] Mikhaïl Geller, Kontsentratsionny mir i sovetskaïa literatoura, Londres, 1974, p. 23-24. [25] Texte du décret 45 au 15 avril 1919 [26] Anne Applebaum, Goulag : Une histoire, 2005, p. 10. [27] Jean-Jacques Marie Le Goulag, PUF, collection Que sais-je ?, p. 31-33. [28] Juri Brodsky, Solovki : Le Isole del Martitio, Rome, 1998, p. 75. [29] Anne Applebaum, Goulag, une histoire, Paris, Grasset, 2005, p. 71 et sq. [30] Ibid., p. 73 [31] Brodsky, Juri, Solovki: Le Isole del Martirio, Rome, 1998, p. 75 [32] Anne Applebaum, Goulag, une histoire, Paris, Grasset, 2005, p. 74 [33] Archives nationales de la République de Carélie, 690/6/(1/3) [34] Jacques Rossi, « Le Manuel du Goulag », p. 25 & 65] [35] En 1930, le gouvernement américain interdit l’importation de produits fabriqués par les prisonniers du goulag (Tariff Act). [36] Collectif, Le Livre noir du communisme, 1998, p. 14. [37] Anne Applebaum, Goulag : Une histoire, 2005, p. 84. [38] Nicolas Werth, « Goulag : les vrais chiffres », L'Histoire, n° 169. [39] Nicolas Werth, « Repenser la Grande Terreur », Le Débat, n° 122, nov-déc. 2002, extraits ici (http:/ / www. sciences-sociales. ens. fr/ forma/ agreg/ hss2002/ coursCorriges/ conflits-travail. html#Heading53). [40] Anne Applebaum, Goulag : Une histoire, 2005, p. 132. [41] Anne Applebaum, Goulag : Une histoire, 2005, p. 178. [42] Terry Martin, The Affirmative Action Empire. Nations and Nationalism in the Soviet Union, 1923-1939. [43] Catherine Gousseff, Les déplacements forcés des populations aux frontières russes occidentales (1914-1950). [44] Anne Applebaum, Goulag : Une histoire, 2005, p. 22 et 460. [45] Jean-Jacques Marie, Les Peuples déportés en Union soviétique, 1955. [46] Anne Applebaum, Goulag : Une histoire, 2005, p. 478. [47] Les spetslagueria est-allemands, Reczk en Hongrie, Lovech en Bulgarie, etc. [48] Sabine Dullin, Histoire de l'URSS, La Découverte, 2003. [49] À Norilsk, à Vorkouta et dans les camps spéciaux. [50] Nicolas Werth, « La Russie soviétique : révolution, socialisme et dictature », dans L’Histoire n° 223, juillet-août 1998, p. 21. [51] Lire à ce sujet Vladimir Boukovski, Un nouvelle maladie mentale en URSS : l’opposition, Paris, Seuil, 1971 ; Anne Applebaum, p. 595. [52] L'éthique : de la recherche à la pratique - Docteur Jean Garrade - 24 avril 1997 (http:/ / psydoc-fr. broca. inserm. fr/ colloques/ CR/ geneve/ garrabegen. html) [53] Prisoners of Conscience in the USSR. Their Treatment and Conditions, Amnesty International, 1975, p. 197-198. [54] Martin Walker, The Waking Giant : The Soviet Union under Gorbatchev, Londres, 1986, p. 12. [55] D’après les données d’Anne Applebaum, Goulag : Une histoire, 2005, p. 110-127 et p. 152. [56] Anne Applebaum, Goulag : Une histoire, 2005, p. 113-114. [57] N.G. Okhotine, A.B. Roginski, Sistema ispravitelno-troudovykh laguerei v SSR, 1923-1960 : spravotchnik, Moscou, 1995, p. 192. [58] Jean-Paul Depretto, « Un grand chantier du premier plan quinquennal soviétique : Kuznetskstroï », dans CAIRN, n° 39, 200/2, [59] Nicolas Werth, article « goulag » dans Dictionnaire historique et géopolitique du XXe siècle, La Découverte, 2002. [60] K. P. Gourski, Mémoire inédit, Archives du Mémorial, 2 / 1 / 14-17. [61] Anne Applebaum, Goulag : Une histoire, 2005, p. 216. [62] L'isolateur principal se situait dans la tour-phare de l'église qui couronne le mont de la Hache. [63] Le Goulag en a recensé 10440 en 1947, Archives nationales de la Fédération russe, 9414/1/2632. [64] Surnommé « la Serpentine », ce camp se trouvait près de la ville de Magadan et servit de lieu d’exécution en 1937-1938 ; lire Anne Applebaum, Goulag : Une histoire, 2005, p. 288. [65] Par exemple pour la construction du canal de la mer Blanche. [66] Guenrikh Iagoda, Edouard Berzine, Matvei Berman, Izraïl Pliner, etc. [67] N.G. Okhotine, A.B. Roginski, Sistema ispravitelno-troudovykh laguerei v SSR, 1923-1960 : spravotchnik, Moscou, 1995, p. 220-221 et 341-343.

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Goulag [68] Source : Anne Applebaum, Goulag : Une histoire, 2005, p. 630. [69] En 1927, une grande amnistie libère 50000 prisonniers de droit commun. En 1941, Staline décide de libérer les Polonais qu’il avait fait arrêter au début de la guerre. Une autre amnistie eut lieu pour les prisonniers de droit commun en 1946. [70] Nicolas Werth, « La Russie soviétique : révolution, socialisme et dictature », dans L’Histoire, n°223, juillet-août 1998, p. 20. [71] Anne Applebaum, Goulag : Une histoire, 2005, p. 335 et 337. [72] Extrait des Récits de la Kolyma de Varlam Chalamov, 1978. (ISBN 2864323524) [73] Les communistes étrangers subirent les purges staliniennes : en 1937, 5000 communistes polonais ont été exécutés ou déportés dans les camps soviétiques : lire Jeremy Agnew, Kevin McDermott, The Comintern, New York, 1997, p. 143-149. [74] Keith Sword, Deportation and Exile: Poles in the Soviet Union, 1939-1948, New York, 1994 ; Anne Applebaum, Goulag : Une histoire, 2005, p. 164. [75] Considéré comme « agitation antisoviétique » : Anne Applebaum, Goulag : Une histoire, 2005, p. 165 et 338. [76] Article 58 du Code pénal. [77] John Stephan, The Russian Far East : A History, Stanford, 1994, p. 227. [78] Anne Applebaum, Goulag : Une histoire, 2005, p. 204-206. [79] Entretien d’Anne Applebaum avec Anna Andreïevna, Moscou, 28 mai 1999 ; cf Anne Applebaum, Goulag : Une histoire, 2005, p. 217 et 690. [80] Anne Applebaum, Goulag : Une histoire, 2005, p. 33. [81] David Nordlander, Capital of the Gulag. Magadan in the Early Staline Era, 1929-1941, thèse, UNC Chapel Hill, 1997, p. 159. [82] Viktor Berdinskikh, Viatlag, Kirov, 1998, p. 24-43. [83] Les stratégies de survie et de fraude des zeks s’appellent la « toufta ». [84] David Nordlander, Capital of the Gulag. Magadan in the Early Staline Era, 1929-1941, thèse, UNC Chapel Hill, 1997. [85] Anne Applebaum, Goulag : Une histoire, 2005, p. 73. [86] Anne Applebaum, Goulag : Une histoire, 2005, p. 272-283. [87] Nicolas Werth, Article « goulag » dans Dictionnaire historique et géopolitique du XXe siècle, La Découverte, 2002 ; voir aussi Anne Applebaum, Goulag : Une histoire, 2005, p. 224. [88] Anatoli Tsigankov, Ikh nazali KR, Petrozavodsk, 1992, p. 196-197 ; voir aussi Anne Applebaum, Goulag : Une histoire, 2005, p. 58-59. [89] Anne Applebaum, Goulag : Une histoire, 2005, p. 123. [90] Les gardes de Solovetski attachaient les prisonniers dans la forêt nus : ils mouraient de froid en hiver ou étaient piqués par des myriades de moustiques en été : lire Anne Applebaum, Goulag : Une histoire, 2005, p. 61. [91] Pour voir ces réalisations, consulter le site du Memorial museum (http:/ / www. memo. ru/ museum/ endex. htm) [92] Jean Radvanyi, La nouvelle Russie, Collection U, Armand Colin, 2004, 3e édition mise à jour, (ISBN 2200266871), p.58 [93] Edward Buca, Vorkuta, Londres, 1976, p. 152. [94] Une zemlianka, des zemlianki, lire Anne Applebaum, Goulag : Une histoire, 2005, p. 143 et 236. [95] Thomas Sgovio, Dear America, Kenmore, New York, 1979, p. 175. [96] Anne Applebaum, Goulag : Une histoire, 2005, p. 250. [97] Olga Adamova-Sliozberg et al., L’Aujourd’hui blessé, 1997. [98] Anne Applebaum, Goulag : Une histoire, 2005, p. 372-373. [99] Ibid., p. 303. [100] Ibid., p. 305. [101] http:/ / www-hoover. stanford. edu/ publications/ books/ gulag. html [102] http:/ / hypo. ge-dip. etat-ge. ch/ www/ cliotexte/ html/ urss. goulag. html [103] http:/ / www. marxists. org/ francais/ 4int/ urss/ vorkouta. htm [104] http:/ / www. artepro. com/ fr_fichiers/ fichiers/ 01678680. pdf [105] http:/ / geoconfluences. ens-lsh. fr/ doc/ etpays/ Russie/ RussieFaire. htm [106] http:/ / www. monde-diplomatique. fr/ 2003/ 12/ LEPAPE/ 10757 [107] http:/ / www. memo. ru/ eng/ Site [108] http:/ / www. memo. ru/ museum/ endex. htm [109] http:/ / www. angelfire. com/ de/ Cerskus/ english/ Gulag1. html [110] http:/ / www. memo. ru/ history/ NKVD/ GULAG/ maps/ ussri. htm

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Kolyma La Kolyma est une région de l'extrême est de la Russie. Lors de la période stalinienne, de nombreux prisonniers étaient envoyés dans les camps du Goulag de la région. Cette période est connue en particulier par les récits de Varlam Chalamov. La région tire son nom du fleuve Kolyma, long de 2129 km et qui draine un bassin de 680000 kilomètres carrés. Ce bassin est constitué de montagnes au sud et à l'est, atteignant 3000 mètres au mont Chen, dans la chaîne Cherskii, et de la vaste plaine de la Kolyma dans le nord, où le fleuve s'écoule vers l'océan Arctique. Son débit de 4060 mètres cubes par seconde est le sixième plus important de Russie après l'Ienisseï, l'Ob, l'Amour et la Volga. Le fleuve Kolyma est gelé sur une profondeur de plusieurs mètres pendant environ 250 jours par an, redevenant libre de glace seulement début juin, et gelant à nouveau début octobre. La Kolyma est un centre majeur d'extraction minière.

Introduction Ce vaste territoire arctique et sub-arctique, avec ses frontières politiques et géographiques mal définies, se trouve dans les plus lointains confins nord-est de la Sibérie. L'éloignement et l'isolement, la sévérité du climat et les conditions de vie très dures ont fait de cet enfer gelé un endroit à part du reste de la Sibérie. La Kolyma en Russie

Les citoyens de l'Union soviétique redoutaient la Kolyma plus qu'aucune autre région de l'Archipel du Goulag : « Kolyma znatchit smert » (« Kolyma veut dire mort ») disait-on à l'époque. La Kolyma présentait une spécificité remarquable parmi les nombreuses régions de la Sibérie du Nord : sa richesse en gisements d'or. Après la découverte de son potentiel minier, la région devint l'objet d'une exploitation intensive. Les prisonniers, ou « lagerniks » comme on les appelait communément, furent les outils principaux dans cette opération menée par l'État. Des millions d' « ennemis du peuple », utilisés comme main d'œuvre servile sont morts dans les mines d'or du Nord sibérien. Le système poursuivait un double but : l'exploitation des ressources minières et simultanément la liquidation des opposants. Bien avant que ce territoire longtemps ignoré ne soit connu comme le « four crématoire blanc » ou « le pays de la mort blanche », des explorateurs russes, chasseurs et aventuriers, avaient déjà parlé de son existence. Deux éléments avaient maintenu les pionniers russes hors de cette région : son climat sévère et son isolement géographique. Ces éléments combinés ont créé une solide barrière qui a retardé la redécouverte de la Kolyma jusqu'au début du XXe siècle. Les premiers explorateurs de cette région trouvèrent les conditions climatiques de la Kolyma trop dures. Les prisonniers soviétiques n'eurent pas ce choix. Ils devaient supporter ces conditions aussi longtemps qu'ils le pouvaient. Une maxime, connue dans toute la Russie, disait : « Kolyma, Kolyma, ô planète enchantée / l'hiver a douze mois, tout le reste c'est l'été. » L'inaccessibilité de la région entraîna l'abandon d'un projet de route entre Vladivostok et Magadan, la capitale de la Kolyma. La seule liaison possible se faisait par voie maritime, de Vladivostok au petit port de Magadan, Kamtchatka et le port de la mer arctique d'Ambartchik. On créa une flotte de cargos transportant les prisonniers à l'aller et l'or au retour.


Kolyma En 1932, arriva le premier directeur des camps de travail de la Kolyma, Edouard Petrovitch Berzine. Sous sa direction, Kolyma devint la nouvelle frontière de l'Union soviétique. Toute l'économie y était basée sur le travail forcé des prisonniers. Peu après, la première route transversale vers le Nord passa de 13 à 1034 km, allant de Magadan au port arctique d'Ambartchik. Des camps de travail furent construits le long de cette route et des mines, principalement des mines d'or, entrèrent en exploitation.

La capitale Magadan La clé de ce développement rapide était la capitale de la Kolyma, Magadan. Ce petit village de pêcheurs se développa rapidement en une active colonie pénitentiaire. Des centaines de milliers de prisonniers arrivaient chaque année, destinés aux camps de travail. Ils constituaient la population de Magadan et de son arrière-pays, et étaient supposés travailler jusqu'à leur mort, car aucun retour n'était prévu. En conséquence, Magadan, qui comptait seulement 165 maisons en 1935, devint en un demi-siècle une métropole de 165000 habitants. Des publications soviétiques, comme le livre Magadan, décrivent la ville comme un endroit agréable et moderne : vivante, en progrès et, plus que tout, libre. Il n'y a aucune indication du fait que c'est le travail forcé qui a donné naissance à cette ville, au prix de morts et de souffrances innombrables. La capitale du Nord semble n'avoir ni souvenir, ni honte, ni désir de connaître les crimes de son passé. Pas une phrase ou un paragraphe n'est dédié à toutes les nationalités soviétiques et aux nombreux prisonniers de pays comme la Pologne, l'Allemagne, la Roumanie, la Lituanie, la Lettonie, la Mongolie, la Chine, la Corée, l'Afghanistan, l'Arménie, ou les prisonniers de guerre japonais de la Seconde Guerre mondiale, qui ont vécu, ont travaillé et sont morts ici. Avec le démantèlement des camps de travail dans les années 1950 et 1960, la mémoire de ces esclaves liquidés et de ces victimes de guerre a disparu des livres d'histoire et des archives des bureaux du gouvernement. Bien que quelques rapports soient venus à la lumière à partir des vieilles archives soviétiques, le déni de ce qui s'est passé à la Kolyma continue aujourd'hui encore.

L'origine des prisonniers Les prisonniers, produits des répressions staliniennes, commencèrent à arriver à la Kolyma au début des années 1930 pour commencer l'exploitation des ressources minérales. La flotte de cargos ad hoc, transportait sa cargaison humaine pour un aller simple dans le pays glacé du Nord. Très peu d'entre eux purent revenir dans leur pays d'origine et ceux qui revinrent étaient pour la plupart invalides, victimes de gelures sévères. La majorité d'entre eux reposent dans des fosses communes, creusées dans le pergélisol, sont enterrés sous des tas de pierres ou ont été emportés par les fontes de printemps dans l'océan Arctique. Avec l'éclatement de la Seconde Guerre mondiale, en 1939, et l'invasion de la Pologne orientale par l'Union soviétique, de nouvelles ressources de main-d'œuvre forcée furent trouvées pour les besoins économiques de l'empire stalinien. Environ deux millions de Polonais furent violemment arrachés de leurs maisons par la police soviétique et déportés dans les vastes territoires de la Sibérie et du Kazakhstan. Ils furent placés dans les installations collectives de la taïga ou bien expédiés comme main d'œuvre forcée dans les camps des régions nordiques éloignées. Rapidement, trois autres pays, violemment annexés à l'URSS, contribuèrent à fournir de la main-d'œuvre au système concentrationnaire du Goulag. Les patriotes de Lituanie, Lettonie et Estonie suivirent le chemin tragique de la Pologne.

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Le transport des prisonniers vers la Kolyma Le travail forcé aurait eu un faible impact sur l'économie soviétique sans l'infrastructure qui rendait possible le déplacement des prisonniers de leur point d'extraction à leur point d'utilisation et de destruction. Le chemin de fer Transsibérien devint le principal moyen de transport pour amener les prisonniers aux étapes le long de la ligne qui les conduisait ensuite dans des endroits variés du Nord sibérien. Son extrémité orientale, Vladivostok, était une étape pour les prisonniers à destination de la Kolyma. Cependant, la route terrestre (Moscou - Vladivostok : 9300 km) s'arrêtait là pour ceux qui devaient aller dans l'extrême Est sibérien. Le seul moyen pour atteindre les côtes de la Kolyma était les mers du nord comme la mer du Japon et la mer d'Okhotsk. Dans ce but fut créée une flotte basée à Vladivostok.

Les bateaux d'esclaves Des bateaux, comme le Djourma, le Sovlatvia, le Dalstroï, le Décabriste et bien d'autres, transportaient dans leurs soutes plusieurs milliers de prisonniers. Tous ces bateaux, à l'origine des cargos, furent réaménagés pour pouvoir transporter une cargaison humaine maximale. Un bateau typique était le Djourma. Ses aménagements intérieurs illustrent comment la cargaison humaine était transportée dans ses soutes. Une structure en bois avait été érigée le long des murs des soutes, et comprenait quatre niveaux de couchettes en bois, le plancher servant de cinquième niveau. Chaque niveau était divisé en sections pour accueillir cinq hommes en position couchée. Pour prendre place, les prisonniers devaient se glisser les jambes en premier avec leur tête tournée vers les passages, pour éviter l'asphyxie. S'il n'y avait pas assez de place, les prisonniers devaient utiliser les passages pour un voyage maritime de six à onze jours. Les toilettes consistaient en barils, appelés « parachas », qui étaient périodiquement vidés dans la mer. Ces barils se renversaient fréquemment, répandant les déjections dans les soutes. Sur ces bateaux surchargés, la nourriture était toujours en quantité réduite. En ces temps, tout le pays avait faim et les esclaves étaient les derniers sur la liste quand il s'agissait de distribuer la nourriture. Sur le bateau, les rations étaient inférieures à celles fournies dans les prisons. Le repas quotidien du prisonnier pendant la traversée consistait en une maigre portion de pain, une portion de choucroute et un baquet d'eau pour chaque groupe de quinze hommes. Ce choix suivait la maxime pratiquée dans le système concentrationnaire selon lequel « les hommes qui ne travaillent pas n'ont pas besoin de nourriture ». La ventilation de l'intérieur des soutes était un autre problème. L'air frais entrait par les trappes supérieures des soutes. Cependant, même quand elles étaient complètement ouvertes, la quantité d'air qui entrait était à peine suffisante pour éviter l'asphyxie. De plus, les trappes et la porte principale étaient toujours fermées quand le bateau passait dans les eaux territoriales japonaises.

Les catastrophes Le Djourma eut une large part dans ces tragédies. Leur mémoire a été préservée pour la postérité dans des livres comme celui de Robert Conquest, Kolyma. Ces incidents donnent un bon témoignage du peu de valeur que les maîtres de l'Union soviétique donnaient à la vie humaine. Voici quelques histoires présentées dans ce livre. Pendant un de ses voyages vers le port arctique d'Ambartchik, le Djourma fut pris par la glace, à cause de l'arrivée du froid. Dans l'impossibilité de briser la glace, le bateau demeura dans les eaux glacées durant l'hiver entier, avec une cargaison de 12000 hommes. Les Soviétiques n'avaient aucun moyen de les secourir et ils n'acceptèrent pas l'aide étrangère proposée par une station météorologique américaine de l'Arctique. Cette décision fut certainement guidée par la peur de révéler leur système d'esclavage au reste du monde. La cargaison humaine entière mourut de froid et de faim dans les cales. Finalement, le Djourma fut délivré des glaces au printemps et put continuer la mission qu'il avait reçue.

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En une autre occasion, en pleine mer, des criminels de droit commun allumèrent un feu dans une soute. Le commandant du bateau prit la décision la plus simple. L'équipage ferma les portes et trappes, et la cargaison humaine entière mourut par asphyxie. Le feu fut éteint et le bateau remis en état pour accueillir une nouvelle cargaison. Robert Conquest mentionne un autre désastre, l'explosion du Sovlatvia, qui convoyait des prisonniers lituaniens et une cargaison de dynamite, en arrivant à destination. L'explosion fut probablement causée par un sabotage des prisonniers. Une source polonaise rapporte un autre désastre impliquant le Djourma. Au printemps 1941, le bateau, transportant 8000 hommes – y compris un contingent de 3000 Polonais –, subit une autre catastrophe au cours d'une violente tempête en mer. Dans la cale, les banquettes centrales s'effondrèrent, recouvrant des centaines d'hommes de débris de bois et de corps humains. Il y eu plusieurs morts et de nombreux blessés, le nombre exact ne fut jamais divulgué. Le reste de la flotte de la route du Nord a pu avoir des mésaventures similaires, mais beaucoup de récits n'ont jamais quitté le pays de la mort blanche. Le système policier n'aurait pas laissé passer un seul de ces récits hors de la glaciale Kolyma.

Le camp de travail L'unité de base était le camp de travail. Bâti en un endroit isolé de la taïga, où des filons d'or avaient été découverts, le camp n'était ni coûteux ni compliqué. Il était censé être auto-suffisant, tout reposant sur le travail du prisonnier. C'étaient bien sûr les prisonniers qui construisaient intégralement les camps, coupant et taillant le bois, et bâtissant les baraques. Cela commençait par un lâcher de prisonniers dans la taïga au début de la courte saison d'été. La première tâche des hommes était de construire des clôtures de barbelés, des baraques en bois avec les logements des prisonniers et les services, ainsi que les baraques extérieures pour la garde et le commandant. Un autre groupe de prisonniers était immédiatement affecté à la construction d'un équipement primitif d'exploitation de l'or, ouvrant le sol et commençant le travail minier. L'extraction de l'or commençait presque aussitôt après l'arrivée des hommes. Les besoins des prisonniers était le cadet des soucis des responsables. Le slogan au-dessus de l'entrée du camp portait : « Le pays a besoin de métal ». Il fallait lire « a besoin d'or ». Ainsi pour la mine d'or dite « Pionnier », (ou « Pryisk pionnier » en russe), située à 400-500 km au nord de Magadan dans une vallée au milieu de montagnes enneigées : « Durant l'été 1941, le premier groupe de prisonniers polonais arriva au camp. Là, ils trouvèrent que parmi les premiers arrivés qui avaient bâti le camp deux ans auparavant, peu restaient en vie. C'étaient principalement les fonctionnaires du camp qui, assurant les services essentiels, recevaient de meilleurs rations de nourritures, de meilleurs vêtements et conditions de vie. À cette époque, deux baraques pour les hommes travaillant à la mine avaient toujours des toits provisoires en écorce d'arbre, la baraque pour la cuisine était à moitié finie et la salle médicale était une simple cabane à côté de l'entrée du camp. La clôture de barbelés et la tour de garde étaient solidement en place, et la baraque des gardes, surélevée, avait tous les aménagements permis par les circonstances. »


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L'organisation de la production Tous les efforts du système portèrent sur une production d'or plus efficace. Le manque de méthodes et d'équipements modernes conduisit les dirigeants à résoudre la mauvaise productivité en augmentant la main-d'œuvre forcée. Ils comptaient que ces moyens primitifs assureraient une production maximum pour un coût minimum pour l'État. L'idée initiale était que l'entreprise devait se suffire à elle-même et produire un retour lucratif pour l'État. Plusieurs organisations existèrent pour superviser la production d'or. Une des mines d'or de la Kolyma L'une d'elle, l'USWITL (pour « Administration de la force de travail corrective du Nord-Est ») eut pour directeur Garanine. La période de son règne sévère fut connue dans la tradition pénale de la Kolyma comme la « Garaninchtchina ». Aucun de ses successeurs n'essaya d'introduire des nouveautés qui amélioreraient les conditions de vie des prisonniers. Des noms comme Vichnioviecki, Gakaïev et Drabkine s'établirent dans l'histoire de la Kolyma comme ceux d'administrateurs brutaux, exigeant toujours et ne transigeant jamais. Les témoignages des Polonais Cette période de l'histoire de la Kolyma fut connue du monde par les Polonais qui quittèrent les côtes du pays de l'or, grâce à un arrangement politique inhabituel entre l'Union soviétique et le gouvernement polonais en exil à Londres. En effet, en 1941, après l'invasion de l'Union soviétique par l'Allemagne nazie, les Polonais et les Soviétiques se trouvèrent du même côté, et devinrent malgré eux alliés. Un traité fut signé à Londres, qui assurait la libération de tous les Polonais des prisons et camps de travail. Ses clauses, qui exigeaient la libération immédiate des prisonniers polonais, ne furent pas toujours appliquées rapidement par les administrateurs du système pénal soviétique. Cependant, une large proportion des survivants intégra l'armée polonaise et quitta l'Union soviétique pour le Moyen-Orient. À cette époque, les Britanniques et les Américains n'acceptèrent pas les témoignages de ceux qui venaient des camps de concentration soviétiques. Les rapports faits par les Polonais furent ignorés par l'Ouest et souvent réfutés comme de la fausse propagande contre l'Union soviétique, diffusée intentionnellement par les Polonais anticommunistes. Quelque dix ans plus tard, les services secrets britanniques interrogèrent des Polonais en Angleterre à propos de leur expérience en Union soviétique, pour des raisons inconnues[réf. nécessaire].

La vie des prisonniers Il y a fort longtemps, quelqu'un exprima avec un certain talent poétique la tragédie des prisonniers par de chansons composées sur des accords doux, tristes et mélancoliques. Les prisonniers, à travers toute la région de la Kolyma, chantaient ces chansons avec de nombreuses variantes. Anatol Krakowiecki, auteur polonais, retint la première strophe, avec la musique et transcrivit le tout dans un livre. Voici la traduction : « Je vis sur la côte de la mer d'Okhotsk Où se termine l'Est lointain Je vis dans les privations et la misère construisant ici une nouvelle installation. » Privations et misère, froid, maladie et faim ne quittaient jamais les travailleurs forcés de la Kolyma. Et l'installation dont il est question n'est rien d'autre que le camp lui-même avec tous les équipements miniers. D'autres strophes décrivent la misère dans laquelle vivaient les prisonniers, et la dernière parle des pics glacés et enneigés des montagnes, où les âmes des morts demeuraient pour leur repos éternel.


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Le salaire pour le travail et l'existence misérable était donné sous forme de rations de nourriture, variant selon la productivité de chaque homme. En été, quand la production atteignait son maximum, la ration la plus importante atteignait 600 grammes de pain, un bol de soupe claire trois fois par jour et un quart de hareng salé. Pour les hommes les moins productifs, la ration de pain descendait à 400 ou 200 grammes par jour. En hiver, toutes les rations étaient réduites au minimum, et la soupe n'était servie que deux fois par jour. Les travaux principaux de l'hiver étaient d'enlever la neige des chemins et allées, et de creuser le sol pour atteindre le niveau de l'or. Parmi les différents témoignages apportés par les anciens internés des camp du Goulag (notamment Soljenitsine ou Chalamov), Gueorgui Demidov a décrit assez clairement la vie de ces camps de la Kolyma, par différents récits apportant des angles d'observations variés. A ce titre, son livre "Doubar et autres récits" est exemplaire, car il fournit une sorte de "chronique de l'intérieur" qui fait vivre au lecteur les turpitudes que les prisonniers de diverses origines (prisonniers de droit commun ou supposés "contre-révolutionnaires") ont du affronter, souvent jusqu'à leur mort.

Les responsabilités dans le camp La supervision du camp était de la responsabilité du détachement de gardes et du commandant. Les prisonniers-fonctionnaires, choisis parmi les criminels de droit commun, contrôlaient les affaires internes. Les prisonniers politiques étaient exclus des fonctions intéressantes. La subordination des prisonniers aux éléments criminels avait une justification aux yeux des autorités pénales. Les criminels étaient l'extension de la terreur policière. Ces hommes choisis étaient assignés à des postes comme la supervision interne, la cuisine, l'approvisionnement ou l'entretien des baraques. Ils étaient craints des autres prisonniers du fait du gourdin qu'ils portaient et utilisaient pour punir les plus faibles de leur groupe.

Les ruines d'un quartier de commandement d'un goulag.

C'était la responsabilité de ces fonctionnaires du camp de sortir les hommes des baraques le matin, et d'utiliser les moyens pour maintenir le taux de productivité le plus élevé possible. L'utilisation des gourdins, et les bastonnades à coups de pelles et de pioches, étaient choses courantes. Parmi les mesures punitives applicables aux prisonniers, il y avait la réduction des rations de nourriture ou les travaux supplémentaires après les 12 heures de travail habituelles. Parfois, la punition était la mort, dont les fonctionnaires ne portaient jamais la responsabilité.

L'état des hommes dans les camps Krakowiecki, décrivant un groupe d'hommes envoyés depuis la mine vers un travail plus facile de réfection de route, donne une bonne image du travail dans les mines d'or. Voici comment il décrit ce groupe d'hommes : « […] d'ici, de la mine d'or, vient une procession de fantômes humains. Ces hommes durent assumer un travail pénible, comme des animaux, pendant toute la saison d'été. Des animaux se seraient révoltés ou seraient morts. L'homme endure plus qu'eux. Les hommes, exploités toute la saison, sont devenus des squelettes. Il est difficile de comprendre comment ces hommes sont encore en vie. Seulement la peau et les os, sans exagération. Ces êtres, autrefois des hommes, complètement détruits physiquement, ne sont plus nécessaires à la mine d'or, parce que leur productivité est nulle. Ainsi, ces hommes à moitié morts sont affectés à la maintenance des routes. »


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La mortalité à la Kolyma Selon l'historien britannique Robert Conquest, le taux de mortalité parmi les prisonniers atteignait 30 % la première année et à peu près 100 % dans la deuxième. Les causes de pertes aussi élevées étaient, en premier lieu, les conditions climatiques extrêmes, entraînant la mort ou les amputations du fait des gelures. Ensuite, les rations alimentaires très insuffisantes, qui détruisaient les hommes physiquement et mentalement. Et enfin, les maladies dans des proportions, comme le scorbut et la dysenterie. Ces maladies n'entraînaient ni hospitalisation, ni traitement. Au total, entre 1937 et 1953, selon les estimations de Robert Conquest (estimations revues à la baisse dans des travaux plus récents), la Kolyma a consumé presque trois millions de vies humaines, surtout originaires d'URSS. Numériquement, les pertes polonaises représentent une très faible proportion du total, mais seulement 5 % d'entre eux survécurent. Des 12000 Polonais déportés dans cette région entre 1940 et 1941, seuls 583 hommes revinrent vivants. Les extraits suivants, issus des écrits des survivants, donnent une idée des conditions de vie des prisonniers à la Kolyma. « …il était rare qu'une force de travail de 2000 ou 3000 hommes soit capable d'envoyer ne serait-ce que 100 hommes à la mine… …parmi 3000 prisonniers envoyés à la mine Maxime Gorki en 1944, seuls 500 étaient en suffisamment bonne santé pour être transférés à Laso la saison suivante… …aucun prisonnier polonais ne revint des 3000 hommes envoyés aux camps de Chukhots… …à Maldyak, 16 des 20 Polonais de mon groupe sont morts… …à Komsomolets, il y avait seulement 46 survivants sur 436 hommes… …au 10e camp de travail spécial à Magadan, sur un total de 500 Polonais, seuls 130 ont survécu… » Kolyma fut aussi le tombeau de nombreux hauts responsables communistes tombés en disgrâce. Beaucoup d'entre eux expérimentèrent les privations du travail dans les mines d'or, avant que le froid, la faim, la maladie et la misère ne consument leur vie. Le héros du très médiatisé procès Kirov, Ivan Zaporozec, devint un prisonnier de la Kolyma avant qu'il ne soit finalement exécuté en 1937. Le premier directeur du « pays gelé », Edouard Berzine, fut fusillé. Plus tard, l'homme qui avait institué son propre genre de terreur dans les camps sous son autorité, Garagine, disparut quelque part dans le Nord, dans une des mines d'or. Son successeur Vichnioviecki connut le même destin, ironiquement mis en procès pour la mort de prisonniers qu'il avait emmenés pour une expédition en vue de trouver de nouveaux champs d'exploitation de l'or.

La quantité d'or produite Dans cette énorme entreprise d'État, impliquant des millions de personnes, dans des conditions de privations jamais vues, il y a un autre côté qui doit être pris en compte. Cet élément est le précieux or lui-même. Selon les estimations de Robert Conquest, la production aurifère commença avec quelques tonnes la première année, et atteignit 400 à 500 tonnes chaque année au sommet des pertes humaines. Ce sont des estimations très excessives presque divisées par 10 aujourd'hui. Confronter le tonnage total approximatif aux pertes humaines montre qu'il n'y a pas eu plus d'un kilogramme d'or produit pour chaque vie humaine perdue dans le processus de production.


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La Seconde Guerre mondiale Le déclenchement de la guerre avec l'Allemagne nazie en 1941, et les lourdes pertes initiales sur le front, forcèrent les dirigeants soviétiques à adoucir leur politique envers la main-d'œuvre forcée. Voyant que leurs sources de travail étaient limitées, ils firent des changements drastiques au bénéfice des prisonniers. La main-d'œuvre se raréfiant du fait de la guerre, elle prit de la valeur. Les traitements très durs des années 1937-1942 furent abandonnés, ce qui permit une amélioration des conditions de vie dans les camps de travail. Le taux de mortalité baissa significativement. Pendant plusieurs années, l'Union soviétique, tout en demeurant un empire esclavagiste, fut un peu plus tolérante envers ses prisonniers. Avec la victoire sur l'Allemagne en 1945, les pertes sur le front cessèrent. Cette situation ouvrit de nouvelles sources de main-d'œuvre dans les pays nouvellement soumis. Les nouveaux arrivants furent les prisonniers de guerre allemands et japonais, les nationalistes ukrainiens, roumains, et même des membres de la Tajna Armia Polska, l'armée polonaise de résistance, qui avaient aidé l'Union soviétique. Tous ces hommes remplirent les vides laissés par leurs prédécesseurs décédés. Cependant, ils trouvèrent à la Kolyma des conditions plus tolérables que celles endurées auparavant. Beaucoup purgèrent une peine de dix ans, et du fait des changements politiques en Union soviétique, purent rentrer dans leur pays.

La fin des camps de la Kolyma Avec la dissolution de l'organisation des camps du « Dalstroï » en 1957, les Soviétiques adoptèrent une nouvelle politique de travail à la Kolyma. Bien que la population des prisons soit toujours soumise au travail forcé, il s'agissait surtout de détenus de droit commun. La partie politique disparut. La main d'œuvre libre existait déjà dans la région, mais une nouvelle main-d'œuvre fut recrutée de toutes les parties de l'Union soviétique sur une base volontaire. Beaucoup des nouveaux pionniers s'installèrent ici, fondant des familles et bâtissant des maisons. De jeunes hommes et femmes furent attirés dans ce pays-frontière avec la promesse de hauts revenus et d'un meilleur niveau de vie. L'entrée de la technique moderne rendit le pays de l'or vivable et en a fait une région prospère de l'actuelle Russie.

Les mensonges sur la Kolyma Avec le temps, le passé de ce territoire du Nord-Est de la Sibérie tombe peu à peu dans l'oubli. L'histoire de ce pays durant la période communiste n'a jamais fait l'actualité dans le monde. Pour beaucoup de Russes, Polonais, Lituaniens et Lettons, le mot « Kolyma » serait synonyme des horreurs d'Auschwitz, Buchenwald, Dachau, Treblinka et d'autres, bien qu'il soit presque inconnu à l'Ouest. Aujourd'hui, peu de gens connaissent ce nom et le relient à son effroyable passé. Son infamie reste cachée pour le reste du monde, parce que le système de secret soviétique ne laissait pas sortir d'information hors des frontières du pays. Les victimes enterrées dans la terre gelée ne peuvent pas parler, et les pays occidentaux préféraient accepter les mensonges de Staline plutôt que la vérité qui parfois venait des rares survivants. Le vice-président américain, Henry Wallace, visita la Kolyma en 1944. Après sa visite, il quitta le pays avec la conviction absolue que « ces camps n'ont jamais existé ». Il fut impressionné par la vie culturelle de Magadan et par les magasins bien approvisionnés. Or, pendant les trois jours de sa visite, les chefs de la Kolyma firent tout pour lui cacher la réalité. Les miradors en bois furent abattus, les prisonniers ne furent pas autorisés à quitter leurs baraques et le visiteur américain n'eut pas idée du plus petit aspect de la vie en prison. Il fut emmené dans la seule ferme de la région, à 23 km de Magadan, et des jeunes filles bien habillées et bien nourries (des femmes policiers, déguisées en fermières) lui donnèrent une fausse impression sur l'effort agricole dans cette partie du pays. Il fut aussi emmené en avion vers le Nord, à la mine Berelakh, où il trouva que les mines d'État étaient une entreprise impressionnante. Les mineurs, selon lui, étaient en bonne santé et bien bâtis, et plus productifs que leurs collègues de Fairbanks, en Alaska. Dégustant un délicieux poisson frais de la rivière Kolyma, il complimenta le « chef du camp des mines ». La

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Kolyma tromperie fut un succès total. Le monde extérieur reçut ainsi un témoignage crédible et de première main à propos de la Kolyma.

Chronologie • 1928 - 1929 : des terrains aurifères ont été délimités aux bords de la Kolyma et mis en exploitation par l'État. • 13 novembre 1931 : création de la Société de Construction des Routes et de l'Industrie dans la région de la Haute Kolyma (Dalstroï) avec siège à Magadan pour exploiter les richesses minérales, construire des routes et industrialiser une partie du pays, dénommée Pays d'Extrême-Orient. • 4 février 1932 : arrivée d'un bateau avec, à son bord, le premier commandant du Dalstroï, haut fonctionnaire éminent du NKVD (police politique soviétique), P.E. Berzine avec les dix premiers prisonniers. • 1er avril 1932 : ordre de créer pour les besoins du Dalstroï le complexe de camps Sevostlag (Camps de travail correctionnels du Nord-Est). • 1932-1933 : sur 11100 prisonniers des camps de Kolyma (chiffres de décembre 1932), 10 % travaillent à l'extraction de l'or et 25 % seulement ont survécu à l'hiver. Extraction de 500 kg d'or. • 1933 : décision de Berzine instituant pour les prisonniers des normes de travail, rationalisant l'exploitation et adoucissant le régime carcéral afin, entre autres, de diminuer la mortalité. • 1er janvier 1934 : suite à l'arrivée de nouveaux convois des prisonniers politiques et de droit commun, le nombre des détenus de Sevostlag atteint 30000. Berzine stigmatise les mauvais traitements infligés aux prisonniers, leurs mauvaises conditions de vie, les prolongations de peines sans motif et d'autres abus qui compromettaient l'exécution des plans politico-productifs de Dalstroï. • 1936 : extension du terrain des activités du Dalstroï à 700000 km2. • 1937 : le nombre des prisonniers est passé de 36000 en 1935 à plus de 70000 ; l'extraction de l'or est passé de 14500 en 1935 à 51500 kg. • mars 1937 : Berzine rapporte la grève de la faim et le complot de 200 prisonniers trotskistes, condamnés plus tard à mort et fusillés. • juin 1937 : Staline critique la politique des commandants des camps de Kolyma comme ramollissante et trop douce pour les prisonniers. • décembre 1937 : Berzine et ses assistants sont renvoyés à Moscou, arrêtés, inculpés d'espionnage et fusillés le 1er août 1938. • 17 janvier 1938 : dénonciations par les rédacteurs du journal du parti Sovietskaïa Kolyma du régime totalitaire imposé dans le camp par le nouveau commandant, K.A. Pavlov. Staline qualifie de démagogiques et de non fondées les exécutions massives de prisonniers décidées par S.N. Garanine, chef du NKVD à Sevostlag. • 4 mars 1938 : par décision du Conseil des commissaires du peuple de l'URSS, Dalstroï, qui depuis sa création dépendait du Conseil du Travail et de la Défense auprès du Conseil des commissaires, est subordonné au NKVD. • décembre 1938 : Ossip Mandelstam, grand poète russe, condamné à 5 ans de camp, meurt près de Vladivostok, en route pour Kolyma. • 1938-1939 : au cours de l'hiver, d'après les évaluations non vérifiées des anciens prisonniers, plus de 40000 personnes sont mortes ; les pertes étaient remplacées par de nouveaux convois ; le nombre de prisonniers est ainsi passé de 90700 en janvier 1938 à 138200 en janvier 1939. • 11 octobre 1939 : suite au dépassement de la limite de mortalité chez les prisonniers et de la non-exécution des programmes d'extraction d'or et d'autres minerais, Pavlov et Garanine ont été écartés ; Garanine a été condamné à mort pour espionnage et fusillé. Arrivée à Magadan de l'écrivaine Evguénia Guinzbourg qui passera 18 ans dans les camps. • 1939-1940 : Entre 7600 à 10000 (appréciations) citoyens polonais se retrouvent dans la Kolyma. Ils ont été séparés de vieux prisonniers soviétiques et envoyés dans les mines lointaines dans l'Est de Dalstroï où les conditions de travail étaient particulièrement dures et dangereuses. Extraction de 62 tonnes d'or en 1939 ; on estime à 45 tonnes l'extraction d'or en moyenne dans les années suivantes.

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Kolyma • 10 mars 1941 : le territoire de Dalstroï a été agrandi jusqu'à 2266000 km2 (10 % de la surface de l'URSS à l'époque), le nombre de prisonniers a atteint 190000 dont 3700 d'anciens membres des professions libérales, principalement ingénieurs, géologues et techniciens. • 1942-1944 : suite à des difficultés de transport, à l'insuffisance des réserves humaines et à l'envoi au front d'une partie de prisonniers, leur nombre était tombé à 84700 en janvier 1944 ; le temps de travail a été prolongé au-delà de 12 heures par jour, ce qui sous un régime brutal, inchangé malgré le départ de Pavlov, a conduit à augmenter le taux de mortalité des détenus. • octobre 1945 : un camp de prisonniers de guerre japonais a été ouvert à Magadan et rattaché à Dalstroï ; au moment de la libération en septembre 1949, il y avait encore 3479 prisonniers. • 28 février 1948 : un camp spécial no 5 soumis à un régime aggravé a été créé ; subordonné à Dalstroï et installé dans sa partie centrale indépendamment du secteur productif de Dalstroï. • 20 septembre 1949 : pour une meilleure organisation et pour renforcer l'exploitation du travail des prisonniers, le ministère des Affaires intérieures de l'URSS crée l'Administration des Camps de Travail de Dalstroï, dont les directions de 26 unités carcérales qui avaient été créées avant la guerre dans 11 branches administratives de l'industrie minière et dont les commandants devaient également diriger les camps de travail qui dépendaient d'eux. La réorganisation se mettait en place lentement en raison de la résistance des anciens du NKVD. • 1949-1952 : l'augmentation du nombre de prisonniers de 108700 en janvier 1949 à presque 200000 (199726 disent les rapports) au 1er janvier 1952 a accompagné cette réorganisation. C'était, dans toute l'histoire de Dalstroï et de Kolyma, le nombre de prisonniers le plus élevé. Les conditions de leur vie et de leur travail, par rapport à la période de guerre, n'ont subi qu'une amélioration insignifiante. • mai 1952 : fin de la réorganisation des camps de Kolyma, entreprise en 1949 ; « Le Sievvostlag a été liquidé et le Dalstroï constitue l'Administration Centrale des Camps - (Goulag) » déclarait I.V. Mitrakov, qui en était commandant à l'époque. • 18 mars 1953 : après la mort de Staline, mise en place d'une nouvelle direction du parti et de l'État. Par un décret du Conseil des Ministres de l'URSS, le Dalstroï est rattaché au Ministère de la Métallurgie, et ses camps au Goulag, qui dépend alors du Ministère de la Justice de l'URSS. • septembre 1953 : début de la libération massive des prisonniers et de la liquidation progressive des camps de la Kolyma.

Sources Source principale : • (en) Kolyma, the land of gold and death [1] par Stanislaw J. Kowalski (cette traduction est faite avec l'accord de l'auteur, dont cet article contient d'importants extraits) Autres sources : • Varlam Chalamov, Récits de la Kolyma, 1966 (édité en France par les Éditions François Maspero en 1980, réédité par les éditions Verdier en 2003) • Evguénia Guinzbourg, La Ciel de la Kolyma, Points, Le Seuil • Alexandre Soljenitsyne, L'Archipel du Goulag, 1973 • Robert Conquest, La grande Terreur, précédé de Sanglantes moissons : Les purges staliniennes des années 1930, Bouquins, Laffont, 1995 • Ouvrage collectif, Le Livre noir du communisme : Crimes, terreur, répression, Bouquins, Robert Laffont, 2000 • Tomasz Kizny (photographe polonais), Goulag : recueil de photos d'archives et actuelles sur les camps du Goulag et la Kolyma en particulier, 2003 (ISBN 2735702413) • Anne Appelbaum, Goulag : Une histoire, Grasset, 2005 (ISBN 2246661218) • Jacques Rossi, Le manuel du goulag, Le cherche midi, 1997

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Références [1] http:/ / www. aerobiologicalengineering. com/ wxk116/ sjk/ kolyma. html

Evguénia Guinzbourg Evguénia Sémionovna Guinzbourg Activité(s)

écrivaine russe soviétique

Naissance

20 novembre 1904 Moscou

Décès

25 mai 1977 Moscou

Langue d'écriture russe

Evguénia Sémionovna Guinzbourg, (Евгения Семёновна Гинзбург) (Moscou, 20 novembre 1904 - Moscou, 25 mai 1977) est une écrivaine russe soviétique, principalement connue pour avoir raconté son expérience des prisons du NKVD et du goulag.

Biographie Née à Moscou en 1906 dans une famille juive, elle quitte très jeune cette grande ville (qui n'est pas encore la capitale politique du pays) pour s'installer à Kazan, capitale de la province du Tatarstan (appelée aussi Tatarie). Elle obtient un diplôme de l'université de Kazan, avant de soutenir une thèse de doctorat en histoire à Léningrad. Elle a donné des cours magistraux à l'université de Kazan où elle rencontre en 1932 son futur mari Pavel Axionov. Elle a aussi dirigé de le département culturel du journal « Tatarie Rouge » et a participé à la rédaction de l'ouvrage historique L'Histoire de la Tatarie. Son mari, Pavel Axionov, était membre du bureau politique du Parti Communiste et elle-même fut membre du secrétariat régional du parti communiste de Tatarie et du comité exécutif central des Soviets. Ensemble, ils eurent 2 enfants, Aliocha et l'écrivain Vassili Axionov. Les Grandes Purges staliniennes destinées à éliminer tous ceux qui auraient pu menacer ou seulement faire de l'ombre à Staline, les rattrapent au milieu des années 1930. Inquiétée dès 1935, chassée de son poste à l'université puis exclue du Parti, elle sera arrêtée le 15 février 1937. Après de longs mois d'instruction dans les prisons de Kazan et de Moscou, elle est condamnée en août 1937 à 10 ans de réclusion en cellule d'isolement pour « activité trotskiste contre-révolutionnaire ». Elle effectue les deux premières années de sa peine dans la prison politique de Iaroslavl ; en 1939, sa condamnation sera commuée en dix ans de travaux forcés à la Kolyma, au camp d'Elguen. Envoyée au goulag, elle sera libérée en 1947. Elle devra cependant attendre jusqu'en 1955 pour être réhabilitée, à la faveur du relatif « dégel » suivant la mort de Staline. Elle écrit ses mémoires à partir de 1959. Le premier livre, intitulé Le Vertige et sous-titré Chroniques des temps du culte de la personnalité, relate le début de son calvaire jusqu'à son arrivée à la Kolyma. La suite est racontée dans le second livre, Le Ciel de la Kolyma. C'est grâce au samizdat que ses écrits ont été diffusés clandestinement en URSS, avant d'être publiés en Occident à la fin des années 1960.


Evguénia Guinzbourg

Le Vertige Le premier tome de son autobiographie retrace sa vie depuis 1935 à 1940, à travers les différentes étapes de son arrestation. Diplômée d'histoire à l'université de Kazan, elle participe à la création du journal Tatarie Rouge et à l'écriture de L'Histoire de la Tatarie. En 1935, après l'arrestation d'un de ses collègues, le professeur Elvov, elle est accusée de ne pas avoir signalé une de ses erreurs dans ces textes. Cet homme étant rapidement considéré comme un « contrebandier trotskyste », Evguénia est bientôt vue comme sa complice au sein de l'université et se voit alors gratifiée d'un blâme. De Charybde en Scylla, elle est démise de ses fonctions, avec interdiction d'enseigner, même après être allée plaider sa cause à Moscou, sûre de sa fidélité au parti. Emelian Iaroslavski l'accuse de connivence avec les ennemis du peuple et « activité contre-révolutionnaire » et l'exclut du parti communiste. Arrêtée le 15 février 1937, elle est enfermée au sous-sol de la Direction régionale du NKVD, rue du Lac Noir, où elle restera durant 3 mois. Sa compagne de cellule, Lydia Chepel dite « Liama », est une kavejedinka de la Chine orientale. En avril 1937, elle est transportée à la Boutyrka de Moscou, puis la prison Lefortovo en attente de son procès. Celui-ci a lieu en août 1937, et la condamne à 10 ans de détention en cellule d'isolement, avec retrait des droits civiques pendant cinq ans. Son isolement durera en fait deux ans à Iaroslav, où l'y rejoindra quelques mois plus tard son amie Ioulia Karepova (l'efficacité des Grandes Purges staliniennes instaurées par Nicolaï Iejov oblige les prisons à admettre deux prisonniers dans chaque cellule d'isolement). En mai 1939, sa peine est convertie en dix ans de travaux forcés. Elle voyagera pendant un mois dans un wagon à bestiaux avec 77 autres détenues pour arriver le 7 juillet 1939 au camp de transit de Souzdal à Vladivostok, en attente du goulag de la Kolyma. Evguénia embarque dans le « Djourma » pour la Sibérie en 1939. L'hiver 1939-40 étant particulièrement rude, elle effectue des travaux de bonification à une température de - 40°C. En 1940, la « réparatrice » Véra, pour la récompenser d'un don, lui donne un peu de répit : on lui confie un travail à l'hôtel Magadan pendant un mois. Ensuite, elle est envoyée comme plongeuse au réfectoire masculin, au service du chef Achmet. Evguénia fait la rencontre d'un sourd allemand, Helmut. En compagnie des autres personnes de la même accusation, elle est envoyée dans le sovkhoze d'Elguen, dans la taïga, dont le nom signifie « mort » en iakoute. Les prisonnières arrivent le 4 avril 1940. Avec une certaine Galia, elle abat des arbres à longueur de journée. À la fin du livre, le médecin chirurgien Vassili Ionovich Pétouchov de Léningrad lui apprend qu'il a vu son fils Aliocha deux années auparavant. Elle est ensuite assignée comme infirmière à la maison d'enfance, donc sauvée dans un premier temps.

Œuvres • 1967 : Le Vertige, édition du Seuil, (ISBN 2020316366) • 1990 : Le Ciel de la Kolyma, édition du Seuil, (ouvrage posthume)

Bibliographie Préface à l'édition Seuil du Vertige, par Jean-Jacques Marie

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Ossip Mandelstam

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Ossip Mandelstam Ossip Mandelstam О́сип Мандельшта́м

Ossip Mandelstam en 1934, fichier du NKVD après sa première arrestation Nom de naissance Ossip Emilievitch Mandelchtam Activité(s)

Poète et essayiste

Naissance

15 janvier 1891 Varsovie, Empire russe

Décès

27 décembre 1938 Camp de transit près de Vladivostok,

Union soviétique

Langue d'écriture russe

Ossip Mandelstam (russe : О́сип Эми́льевич Мандельшта́м Ossip Emilievitch Mandelchtam) est un poète et essayiste russe du XXe siècle (Varsovie, 15 janvier 1891 – Vladivostok, 27 décembre 1938). Il est l'un des principaux représentants de l'acméisme, dans le cadre de « l'âge d'argent » que la poésie russe connaît peu avant la révolution d'Octobre.

Éléments biographiques Jeunesse Ossip Mandelstam naît dans une famille juive peu pratiquante. Son père est un commerçant en maroquinerie et sa mère enseigne le piano. Il est éduqué par des tuteurs et des gouvernantes. À Saint-Pétersbourg, il suit les cours de la prestigieuse école Tenishev (1900-1907), puis à la Sorbonne à Paris (1907-1908) et en Allemagne (1908-1910), où il étudie la littérature française ancienne à l’Université de Heidelberg (1909-1910). De 1911 à 1917, il étudie la philosophie à l’Université de Saint-Pétersbourg. Mandelstam est membre de la Guilde des poètes à partir de 1911. Ses premiers poèmes paraissent en 1910 dans la revue Apollon. Il se lie avec Boris Pasternak (lors des funérailles de Lénine).


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L'acméisme Avec Anna Akhmatova et Mikhaïl Kouzmine, il est l'une des principales figures de l'école acméiste fondée par Nikolaï Goumilev et Sergueï Gorodetsky. En définissant l'acméisme comme « la nostalgie de la culture universelle », il donne la clef de sa propre poésie, qui actualise par la musique du mot l'univers intemporel de la culture pérenne où celui-ci plonge ses racines. Gueorgui Tchoulkov, Maria Petrovikh, Anna Akhmatova, Ossip Mandelstam, dans les années 1930.

Il rejette le symbolisme russe. C'est pourquoi dans son œuvre une place centrale est accordée au mot considéré comme phénomène acoustique et aussi comme réalité architecturale : « les mots sont des pierres, "voix de la matière" autant que matière de la voix ».

Ses nombreux textes en prose gravitent autour des trois recueils qu’il a écrits : Pierre (en russe Камень, Kamen'), avec lequel il obtient la reconnaissance, paru en 1912 ; Tristia en 1922, qui confirmera son statut de poète, dont les poèmes annoncent avec une ironie tragique, par la référence à Ovide, l’exil au cours duquel il écrira en 1935 et 1937 les Cahiers de Voronèj, son œuvre ultime. Dans La Quatrième prose, il réplique de façon virulente à une accusation de plagiat dont il est victime. À travers son accusateur Arkadi Gornfeld, c'est l'établissement littéraire stalinien qui est visé. Mandelstam exprime ses convictions les plus profondes sur la nature du travail littéraire avec un style tournoyant où le sens poétique décomplexé scrute à la surface une prose surprise. L'œuvre de Mandelstam a influencé de nombreux poètes, parmi lesquels Paul Celan qui lui dédie son recueil La Rose de personne, André du Bouchet ou Philippe Jaccottet, et parmi les plus jeunes, Serge Venturini qui lui dédia son premier livre.

Contre-révolutionnaire ? Ossip Emilievitch Mandelstam, malgré toutes les circonstances malheureuses, ne cessa jamais d’être poète. Dans les années 1920, Mandelstam pourvoit à ses besoins en écrivant des livres pour enfants et en traduisant des œuvres d'Upton Sinclair, de Jules Romains, de Charles De Coster, entre autres. Il ne compose plus de poèmes de 1920 à 1925, et se tourne vers la prose. Mandelstam se voit comme un outsider et établit un parallèle entre son sort et celui de Pouchkine. La préservation de la culture traditionnelle prend pour lui un rôle central, et les autorités soviétiques mettent en doute – à raison – sa loyauté vis-à-vis du régime bolchevique. Quelques années plus tard, alors qu'il est de plus en plus suspecté d'« activité contre révolutionnaire », il part en Arménie (Voyage en Arménie) et revient à la poésie après un silence de cinq ans. Il poursuit une œuvre douloureusement solitaire et courageusement novatrice dans un climat très hostile et de plus en plus dangereux, comme pour Meyerhold . À l'automne 1933, il compose un bref poème (une épigramme) contre Staline, Le Montagnard du Kremlin : Et chaque massacre réjouit / L’Ogre Ossète ou bien Nous vivons, sourds au pays en dessous de nous, Dix marches plus bas personne n’entend nos paroles, Mais si nous tentons la moindre conversation Le montagnard du Kremlin y prend part. Mandelstam fut arrêté pour la première fois en 1934 pour l'épigramme écrite à propos de Staline. Il fut exilé à Tcherdyne. Après une tentative de suicide, la sentence fut commuée en exil à Voronej, jusqu’en 1937. Dans son Carnet de Voronej (1935-1937), Mandelstam écrit : Il pense en os et ressent avec ses sourcils / Et tente de reprendre forme humaine.


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Après trois ans d'exil, Mandelstam est arrêté pour activités contre-révolutionnaires en mai 1938, et condamné à cinq ans de travaux forcés. Après avoir subi les pires humiliations, il meurt de faim et de froid, du côté de Vladivostok, pendant le voyage qui le conduit dans un camp de transit aux portes de la Kolyma, après avoir subi de multiples privations. Son corps est jeté dans une fosse commune. Cet immense poète ne sera pleinement connu et enfin reconnu internationalement que dans les années 1970, plus de trente ans après sa mort, quand ses œuvres sont publiées en Occident et en Union soviétique. Sa veuve Nadejda Mandelstam publie ses propres mémoires, Espoir contre espoir (1970) et Fin de l’espoir (1974), qui décrivent leur vie et l’ère stalinienne. Cela Contre tout espoir comme l’écrira Nadejda, il aura opposé sa voix, car selon Varlam Chalamov : « il ne vivait pas pour la poésie, il vivait par elle. Et maintenant il était évident, il était clair de façon perceptible que l'inspiration, c'était la vie : il lui était donné de savoir avant de mourir que la vie, c’était l’inspiration, oui, l'inspiration[1] . »

Œuvres • • • • • • • • •

Tristia Pierre De la poésie Tristia et autres poèmes Le Timbre égyptien Poésie Vol. 5, Les cahiers de Voronej Poèmes Lettres Les cahiers de Voronej Vol. 2 1991

• • • • •

Le bruit du temps Les cahiers de Voronej Vol. 3 Voyage en Arménie Le Bruit du temps La quatrième prose

Citations • C’est qu’un poème s’adresse toujours à quelqu’un, à un «destinataire inconnu». (Voir Ievgueni Baratynski) • En me privant des mers, de l’élan, de l’envol, Pour donner à mon pied l’appui forcé du sol, Quel brillant résultat avez-vous obtenu, Vous ne m’avez pas pris ces lèvres qui remuent. • L'amour et la peur ne connaissent pas d'issue. • Il n'est pas rare d'entendre dire : Bon, mais tout cela c'est d'hier. Or je dis que cet hier n'est pas encore venu, qu'il n'a pas réellement existé.


Ossip Mandelstam

Œuvres disponibles en langue française • • • • • • • • • • •

Tristia et autres poèmes, traduit et présenté par François Kérel, Poésie/Gallimard, 1982 Physiologie de la lecture, traduit par André Du Bouchet, Fourbis, 1989 De la poésie, traduit, présenté et annoté par Mayelasveta, "Arcades", Gallimard, 1990 Tristia, présenté et traduit par Michel Aucouturier, "La Salamandre", Imprimerie nationale, Paris, 1994 Simple promesse (choix de poèmes 1908-1937), traduit par Philippe Jaccottet, Louis Martinez et Jean-Claude Schneider, La Dogana, 1994 Entretien sur Dante, précédé de la Pelisse, traduit par Jean-Claude Schneider ; préface de Florian Rodari, La Dogana, 2002 Eté froid & autres textes, traduit par Ghislaine Capogna-Bardet, "Lettres russes", Actes Sud, 2004 Les cahiers de Voronej, édition bilingue, traduit par Chritian Mouze, Harpo &, Marseille, 2005 Voyage en Arménie, traduit, revu, et corrigé, par André du Bouchet, Mercure de France, 2005 La 4e prose et autres textes, textes rassemblés et traduits par André Markowicz, "Titres 13", Christian Bourgois éditeur, 2006 Le bruit du temps, traduit par Edith Scherrer, préface de Nikita Struve, "Titres 14", Christian Bourgois éditeur, 2006

• Le Timbre égyptien, traduit par Georges Limbour et D.S. Mirsky; préface de Ralph Dutli; posface de Clarence Brown, Le Bruit du temps éditions, Paris, 2009 • Poésie complète de Mandelstam en 4 volumes bilingues (traduction et commentaires de Henri Abril) : • • • •

Cahiers de Voronej, éd. Circé, 1998 Poèmes de Moscou 1930-1934, éd. Circé, 2001 Le Deuxième livre, éd. Circé, 2002 La Pierre, éd. Circé, 2003

Notes et références [1] Varlam Chalamov, Récits de la Kolyma, Cherry-Brandy, Éditions Verdier 2003 (ISBN 2864323524) p. 104

Liens externes • Données biographiques (http://www.kirjasto.sci.fi/mandelst.htm) • Un article du traducteur de Mandelstam, signé [[André Markowicz (http://remue.net/cont/barnaud05.html)] ] • Un article sur Esprits nomades, signé [[Gil Pressnitzer (http://www.espritsnomades.com/sitelitterature/ mandelstam/mandelstam.html)]]

Bibliographie Robert Littell, L'hirondelle avant l'orage, éd. BakerStreet, 2009 (fiction évoquant le parcours de Mandelstam).

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Primo Levi

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Primo Levi Primo Levi Activité(s)

écrivain

Naissance

31 juillet 1919 Turin Italie

Décès

11 avril 1987 Turin Italie

Langue d'écriture italien Genre(s) Distinctions

roman, essai, autobiographie prix Strega (1978) pour La clé à molette

Œuvres principales • • •

Si c'est un homme (1947) La Trêve (1963) La clé à molette (1978)

Primo Levi, né le 31 juillet 1919 à Turin et mort le 11 avril 1987 à Turin, est un écrivain italien ainsi que l'un des plus célèbres survivants de la Shoah. Juif italien de naissance, chimiste de formation (il est docteur en chimie), de profession et de vocation, il devint écrivain afin de témoigner, transmettre et expliciter son expérience concentrationnaire dans le camp d'Auschwitz, où il fut emprisonné à la Buna au cours de l'année 1944. Son livre le plus célèbre, Si c'est un homme (Se Questo è un Uomo, publié aux États-Unis sous le titre de Survival in Auschwitz) a été décrit comme « l'une des œuvres les plus importantes du vingtième siècle[1] . » Auteur désormais reconnu, il diversifia sa production littéraire, écrivant des histoires courtes, poèmes et romans.

Biographie Les jeunes années de Primo Levi Primo Michele Levi naît dans le quartier de la Crocetta à Turin le 31 juillet 1919, 78 Corso Re Umberto, dans une famille juive de la moyenne bourgeoisie. De ses origines juives sépharades, il retient surtout les figures de ses ancêtres dont les attitudes et paroles sont devenues proverbiales, et leur dialecte judéo-piémontais, qu'il qualifie de langue hybride, fortement comparable au yiddishdés par son évolution. Conservant les traditions, comme les fêtes juives, il leur arrive, assez fréquemment, d'enfreindre avec plus ou moins de remords les lois de la cacheroute. Son père Cesare, ingénieur et lecteur avide, travaille pour la firme Ganz, et passe beaucoup de temps en Hongrie où la firme était basée. Sa mère, Ester "Rina" Luzzati a fait ses études à l'Istituto Maria Letizia, est elle aussi friande de livres, parle couramment le français et joue du piano[2] . Leur mariage avait été arrangé par le père de Rina[2] , qui leur offrit la « maison familiale », l'appartement de la distinguée Via Re Umberto maintes fois évoquée dans l'œuvre de Primo Levi, où il naquit, vécut la plus grande partie de sa vie, et mourut. Sa sœur, Anna Maria, naît en 1921. Ils furent proches toute leur vie. En 1925, il entre à l'école primaire Felice Rignon à Turin. De constitution délicate, il est mal dans sa peau, mais excellent sur le plan scolaire. Son état de santé lui impose de longues périodes d'absence, durant lesquelles son instruction se fait à domicile par les bons soins d'Emilia Glauda puis Marisa Zini, la fille du philosophe Zino Zini[3] . Il passe ses étés avec sa mère dans les vallées au sud-ouest de Turin, où Rina louait une ferme. Son père, éprouvant peu de goût pour la vie campagnarde, demeure à Turin, où il peut s'adonner librement à ses infidélités[4] .


Primo Levi En septembre 1930, il entre au Gymnase Royal Massimo d'Azeglio, avec un an d'avance sur l'âge requis[5] . Étant le plus jeune, le plus petit et le plus intelligent de sa classe, en plus d'être le seul Juif, il est fréquemment brimé par ses camarades[6] . Il suit également, moins par conviction que par respect des traditions, une formation de deux ans au Talmud Torah de Turin pour chanter à la synagogue lors de sa Bar Mitzva, qui a lieu en août 1932. En 1933, il est inscrit, comme beaucoup de jeunes Italiens, dans le mouvement des Avanguardisti des jeunesses fascistes. Il parvient à éviter les exercices de maniement du fusil en rejoignant la division de ski, ce qui lui permet de passer chaque samedi de la saison d'hiver sur les pentes au-dessus de Turin[7] . Adolescent, Primo Levi souffre d'infections pulmonaires à répétition, qui ne l'empêchent pas de manifester du goût pour les activités physiques, et de participer à des compétitions d'athlétisme clandestinement menées avec des amis, dans un stade de sport abandonné. En juillet 1934, à l'âge de 14 ans, il présente l'examen d'admission au liceo classico Massimo d'Azeglio et y est reçu en candidat libre. Ce lycée fut connu pour avoir des professeurs anti-fascistes affirmés, parmi lesquels Norberto Bobbio et, pendant quelques mois, Cesare Pavese, qui deviendra plus tard l'un des romanciers les plus connus d'Italie[8] . Bien que n'étant plus le seul Juif de sa promotion, Primo Levi demeure la bête noire de ses condisciples[9] . En lisant Concerning the Nature of Things de William Henry Bragg, il se découvre une vocation de chimiste[10] , souhaitant par le biais de cette science découvrir les secrets du monde. Levi est diplômé de l'école en 1937, mais mis en cause pour avoir ignoré une convocation de la Marine Royale Italienne la semaine précédant ses examens, et peut-être pour des raisons d'ordre antisémite, il devra repasser son diplôme, à la fin de l'été 1938. En octobre de la même année, il s'inscrit à l'Université de Turin, pour étudier la chimie. Les quatre-vingts candidats durent passer un examen oral, ce qui réduisit leur nombre à vingt. Primo Levi est admis en février après avoir suivi le cursus de chimie à plein temps. Bien que l'Italie soit un pays fasciste et que ce régime promulgue des lois antisémites, il n'y a pas de véritables discriminations envers les Juifs dans les années 1930. La communauté juive italienne est historiquement l'une des plus assimilées par son pays d'accueil, et les Italiens non-Juifs, sans particulièrement les apprécier ni farouchement les détester, ignorent ou contournent toute loi raciale, par esprit d'opposition aux Allemands qu'ils rendent, à tort, responsables de ces lois. Cependant, en 1938, le gouvernement fasciste déclare que les Juifs sont une impureté au sein du peuple italien, et promulgue en juillet de cette année des lois raciales, dont l'une a pour effet de restreindre, avant d'interdire totalement aux citoyens juifs, de s'inscrire dans les écoles publiques. Toutefois, les Juifs ayant déjà entamé leurs études sont autorisés à les poursuivre, ce qui est le cas de Primo Levi. En 1939, Primo Levi commence à pratiquer activement la randonnée en montagne[11] , que lui apprend son ami Sandro Delmastro, futur héros de la lutte partisane. Tous deux passent de nombreux weekends sur les montagnes au-dessus de Turin. L'exercice physique, le risque, la lutte contre les éléments lui fournissent une soupape de décompression par rapport à toutes les frustrations qu'il rencontre dans la vie. S'ajoutent bientôt à celles-ci les bombardements de Turin, qui commencent quelques jours après que l'Italie a déclaré la guerre à la Grande-Bretagne et la France, et le cancer du côlon qui se déclare chez son père et le cloue au lit. Du fait de la montée croissante du fascisme, et des lois antisémites, Primo Levi éprouve de fortes difficultés à trouver un superviseur pour sa thèse de fin d'études, qui porte sur l'inversion de Walden, une étude sur l'asymétrie de l'atome de carbone. Finalement chaperonné par le Docteur Nicolo Dallaporta, il obtient son diplôme en été 1941 avec la plus haute mention, ayant en outre soumis des études sur le rayonnement X et l'énergie électrostatique. Cependant, son diplôme mentionne que le docteur Primo Levi est « de race juive, » et les lois raciales ne lui permettent pas de trouver un emploi approprié. En décembre 1941 son ancien appariteur, Caselli, lui obtient un poste dans une mine d'amiante de San Vittore. Le projet dont il a la charge est d'analyser la teneur en nickel des résidus de la mine et d'en optimiser l'extraction, un défi qu'il accepte avec plaisir, bien qu'il se doute qu'en cas de succès, il contribuera à l'effort de guerre allemand, qui a besoin de nickel pour l'industrie de l'armement[12] . Pour cause de secret militaire, Primo Levi doit travailler sous un faux nom, avec de faux papiers. C'est au cours de son séjour à la mine qu'il rédige ses deux premières histoires courtes, qui seront réintégrées bien des années plus tard dans Le Système périodique.

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Primo Levi En mars 1942, tandis qu'il travaille à la mine, son père Cesare Levi meurt. En juin 1942, la situation ne pouvant évoluer davantage à Turin, Primo Levi quitte la mine et tente sa chance à Milan. Il est recruté par la firme suisse de A. Wander sur un projet d'extraction d'un composé anti-diabétique d'extraits végétaux, sur la recommandation d'une ancienne camarade de l'université de Turin, les lois raciales ne s'appliquant pas aux compagnies suisses. Il devient cependant rapidement évident que le projet, s'appuyant sur les élucubrations dépourvues de fondement d'un scientifique proche du IIIeReich, n'a aucune chance de réussir, mais qu'il n'est dans l'intérêt d'aucun employé que cela se sache[13] . Un an plus tard, à Turin, Primo Levi se réunit fréquemment avec un cercle d'amis juifs turinois, écrivant poème sur poème dans son désœuvrement. La situation évolue brutalement en septembre 1943 lorsque Mussolini est démis de ses fonctions et que son remplaçant, le maréchal Pietro Badoglio, signe l'armistice avec les Alliés. Le dirigeant déchu, Benito Mussolini, est rapidement libéré par les Allemands et installé à la tête de la République de Salò, un état fantoche mais d'une extrême violence établi dans l'Italie du Nord occupée par l'Allemagne. Les opposants au fascisme exhortent les Italiens à la révolte active. Primo Levi rentre à Turin pour découvrir que sa mère et sa sœur se sont réfugiées dans leur maison de campagne La Saccarello dans les collines hors de Turin. Ils embarquent tous pour Saint-Vincent dans la vallée d'Aoste où ils peuvent se cacher mais, poursuivis par les autorités, ils se réfugient à Amay dans les Colle di Joux. Amay se trouve sur la route de la Suisse, et est empruntée par les Alliés et les réfugiés qui fuient les Allemands. Les mouvements de la Résistance italienne deviennent de plus en plus actifs dans la zone occupée. Primo Levi et quelques camarades prennent le chemin des Alpes et rejoignent en octobre le mouvement partisan Giustizia e Libertà, d'orientation libérale. Inexpérimenté, bénéficiant d'une publicité qu'il ne mérite pas, son petit détachement est infiltré par un agent des forces fascistes. Celui-ci prend la tête d'une rafle de la milice fasciste le 13 décembre 1943 à Brusson, dans le Val d’Aoste. Cet agent parvient également au cours d'interrogatoires éprouvants à faire avouer à Primo Levi qu'il est juif. Celui-ci est donc transféré dans le camp d'internement des Juifs de Fossoli, près de Modène, où il demeure deux mois, puis il est déporté en février 1944 à Auschwitz.

Auschwitz La déportation de Primo Levi dans le camp d'extermination d'Auschwitz est l'événement déterminant de sa vie, devenant le principal thème de son œuvre, mais aussi l'aune à laquelle il mesure les événements ultérieurs de son existence. Le 11 février 1944, les 650 « pièces » du camp de Fossoli sont transportées à Auschwitz dans douze wagons à bestiaux surchargés. L'espérance de vie d'un prisonnier ayant échappé à la Selektion, qui désigne d'emblée les personnes destinées à la chambre à gaz, est de trois mois. De ces 650 Juifs italiens, seuls vingt reverront l'Italie. Levi est assigné au camp de Monowitz, un des camps auxiliaires d'Auschwitz dont la principale mission est de fournir la main d'œuvre au chantier de construction d'une usine de caoutchouc appartenant à IG Farben, la Buna. Soumise à de nombreux bombardements, l'usine de la Buna n'entrera jamais en activité. Levi attribue sa survie à une « concaténation de circonstances », dont la moindre n'est pas d'avoir été déporté à une période où il avait été décidé de rallonger quelque peu la vie des prisonniers et d'arrêter les exécutions arbitraires. Possédant quelques notions d'allemand de par sa formation scientifique, il parvient - à l'aide d'un prisonnier italien plus expérimenté (qu'il paye en rations de pain) - à les développer et à s'orienter dans la vie du camp sans trop attirer l'attention des Prominente, les prisonniers privilégiés du système. A partir de novembre 1944, sa formation professionnelle lui permet d'obtenir un poste relativement privilégié d'assistant dans le laboratoire de l'usine de production de caoutchouc de la Buna. Surtout, il reçoit de Lorenzo Perrone, un civil italien, maçon de son état, une ration de soupe lui permettant de survivre jusqu'à l'évacuation du camp devant l'avancée du front soviétique. Lors de celle-ci, Primo Levi, atteint de scarlatine, est abandonné à son sort dans l'infirmerie du camp au lieu de partir pour la marche de la mort, où meurent la plupart de ses compagnons. Il parvient à survivre en créant avec deux camarades de

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Primo Levi chambrée une organisation permettant de subvenir un minimum à leurs besoins. Le 27 janvier 1945, alors qu'ils partent enterrer le premier mort de leur chambre, ils sont libérés par l'Armée rouge. Primo Levi ne regagnera cependant pas Turin avant le 19 octobre de cette année, après avoir passé un certain temps dans un camp soviétique pour anciens prisonniers des camps, et au terme d'un long périple en compagnie d'anciens prisonniers de guerre italiens capturés sur le front russe. Il traverse en train la Pologne, la Russie, la Roumanie, la Hongrie, l'Autriche et l'Allemagne.

Après Auschwitz 1946-1960 Revenu à Corso Re Umberto, où personne ne l'attendait, Levi est méconnaissable. Vêtu d'un vieil uniforme de l'Armée rouge, la malnutrition a bouffi son visage, mangé par une barbe hirsute. Si les mois suivants lui permettent de se reconstituer physiquement, de prendre contact avec des survivants et de chercher du travail à Milan, il est traumatisé par son expérience concentrationnaire, au cours de laquelle ont péri nombre de ses amis et une personne chère à son cœur. Il raconte des histoires d'Auschwitz aux passagers qu'il rencontre dans le train et écrit des poèmes, dont celui qui donnera son titre à son premier livre. Lors de la fête du Nouvel An juif en 1946, il rencontre Lucia Morpurgo qui lui propose de lui apprendre à danser. Primo Levi en tombe amoureux. Le 21 janvier 1946, il commence à travailler à la DUCO, une compagnie de peintures et vernis, située en dehors de Turin. Les communications ferroviaires sont si rudimentaires qu'il passe la semaine dans le dortoir de l'usine, écrivant ses souvenirs sans relâche. C'est là qu'il écrit le premier jet de Si c'est un homme, sans avoir encore l'intention d'en faire un livre[14] . D'abord tragique, son écriture sur le Lager devient, sous l'influence de ses sentiments pour Lucia, celle d'un scientifique, délaissant le témoignage à la première personne pour l'analyse et la tentative de description avec lucidité et détachement. Il écrit sur tous les bouts de papier qui lui tombent sous la main, y compris les tickets de train. À la fin de février, il possède dix pages sur les dix jours séparant le départ allemand de la libération du camp par l'Armée rouge. Il écrit ce qui sera son livre pendant les dix mois qui suivent. Le 22 décembre 1946, le manuscrit est complété. Entre-temps, Lucia lui a retourné ses sentiments. ELle l'aide à l'éditer sous une forme plus fluide[15] . En janvier 1947, Primo Levi propose le manuscrit aux éditeurs, mais les blessures ne sont pas encore cicatrisées, et il n'a pas de passé littéraire lui garantissant une réputation d'auteur. Un ami de sa sœur lui permet d'être édité chez Franco Antonicelli[16] , éditeur amateur et anti-fasciste ardent. En juin 1947, Primo Levi démissionne brutalement de DUCO et s'associe à un vieil ami, Alberto Salmoni, pour diriger un bureau de consultation en chimie, dont les locaux sont situés au dernier étage de la maison des parents de Salmoni. Ses expériences professionnelles de cette époque donneront matière à des ouvrages ultérieurs. Il gagne sa vie en fabriquant et fournissant du chlorure d'étain pour des ateliers de miroiterie[17] , livrant le composé instable en triporteur jusqu'au bout de la ville. De même, les tentatives de fabriquer des rouges à lèvre à partir d'excreta reptiliens et de l'émail coloré pour enduire les dents seront racontés dans des histoires courtes. Les manipulations de chimie dans le "laboratoire" emplissent l'appartement exigüe d'odeurs désagréables et d'émanations corrosives. En septembre 1947, Primo Levi épouse Lucia Morpurgo. Un mois plus tard, le 11 octobre, Si c'est un homme est tiré à 2500 exemplaires. En avril 1948, alors qu'il attend son premier enfant, Primo Levi décide d'interrompre sa carrière de chimiste indépendant et postule dans l'entreprise familiale de peintures et vernis de Federico Accatti, dont les produits sont commercialisés sous le nom de SIVA. En octobre 1948 naît Lisa Levi. Bien que sa vie se soit indéniablement améliorée, le passé subsiste et revient souvent à lui, particulièrement lorsque l'un de ses amis d'Auschwitz a des ennuis ou meurt. Parmi ceux-ci, Lorenzo Perrone, le bienfaiteur de Primo Levi au Lager ; incapable de surmonter le passé, il sombre dans la misère et l'alcoolisme. Il meurt suite à la négligence de lui-même en 1952, malgré les nombreux efforts de Levi pour le tirer de sa déchéance[18] . Autre sujet de détresse, Auschwitz, au lieu d'entrer dans l'histoire, semble s'enfoncer dans un oubli voulu par ceux qui l'ont perpétré comme ceux qui l'ont subi, et sa dimension échappe au monde.

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Primo Levi En 1950, ayant fait la preuve de son talent chez Accatti, il est promu directeur technique de SIVA[19] . En sa qualité de chimiste principal de SIVA, et de sa fonction de résoudre les difficultés techniques, il réalise de nombreux voyages en Allemagne ou il rencontre des homologues allemands du monde professionnel et scientifique. Il prend soin de porter des chemises à manches courtes, laissant paraître son matricule d'Auschwitz tatoué sur son avant-bras. Il les amène souvent sur le terrain de la dépravation des nazis, et du manque de repentir et de recherche de rédemption manifesté par la plupart des Allemands, y compris de nombreux agents de l'exploitation de la main-d'œuvre esclave des camps. Il milite également activement pour ne pas laisser le souvenir des camps s'éteindre, visite Buchenwald en 1954 lors du neuvième anniversaire de la libération des camps nazis, ainsi que les années suivantes, répétant inlassablement le récit de son vécu. En juillet 1957 naît son fils Renzo, probablement nommé d'après son sauveur, Lorenzo Perrone. En dépit de critiques positives, dont celle d'Italo Calvino dans L'Unità, seules 1500 copies de Si c'est un homme s'écoulent et Primo Levi est déjà catalogué comme auteur unius libris. Il devra attendre 1958 pour qu'Einaudi l'édite dans une édition revue. En 1958 également, John Stuart Woolf traduit, en collaboration étroite avec Levi, Si c'est un homme en anglais. En 1959, Heinz Riedt en fait de même en allemand, sous la surveillance serrée de l'auteur[20] . Cette traduction s'accompagne d'une préface ; l'un des buts de Levi en écrivant son livre ayant été de faire prendre conscience à la nation allemande de l'ampleur des actes commis en son nom, et d'en accepter la responsabilité au moins à titre partiel, elle revêt pour lui une importance particulière. Quarante lecteurs allemands lui écriront et seront accueillis avec sympathie, à l'exception de Herr T.H. qui tente une justification teintée de révisionnisme. C'est également cette version que lira le docteur Müller, l'un des civils que Levi avait le plus souvent rencontrés à la Buna. 1961-1974 Levi commença à écrire La Trève, l'histoire de son retour mouvementé en Italie, en 1961 et le publia en 1963, presque seize ans après son premier livre. Le succès fut au rendez-vous, l'auteur se voyant décerner la même année le premier Prix Campiello. La réputation de Levi, auteur de Si c'est un homme mais aussi de nombreux articles à La Stampa, le journal de Turin, allait grandissant. C'est aussi à cette époque qu'il commença à varier ses sujets littéraires, évoquant notamment l'Italie d'avant-guerre, la résistance au fascisme et son métier de chimiste. Il connut en 1963 son premier épisode dépressif majeur. Père de deux enfants, responsable d'un travail important, figure publique effectuant de nombreux voyages, il demeurait tourmenté par son passé. De plus, l'on ignorait à l'époque le lien entre stress, anxiété et dépression. Les traitements prescrits au cours des années furent d'efficacité variable, et non dépourvus d'effets secondaires. En 1964, il collabore à une émission radiophonique de la RAI basée sur Si c'est un homme. En 1966, le livre est adapté au théâtre. Il publie deux volumes de courts récits de science-fiction, Storie naturali (Histoires naturelles, 1966) et Vizio di forma (Vice de forme, 1971), sous le nom de plume de Damiano Malabaila, où il explore des questions éthiques et philosophiques, imaginant l'impact sur la société d'inventions que beaucoup auraient jugées bénéfiques, mais en lesquelles il voit des implications sérieuses. Certaines de ces histoires inspireront par la suite plusieurs scénarios de films de science-fiction, dont "Total Recall". En 1974, il prend une semi-retraite de la SIVA afin de se consacrer à l'écriture et de se libérer de la responsabilité de l'usine[21] .

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Primo Levi 1975-1987 En 1975 paraît une collection des poèmes de Levi sous le titre de L'osteria di Brema. Il écrit également deux autres mémoires fort bien accueillis, le Système périodique, faisant référence avec une ironie propre à l'auteur au tableau périodique de Mendeleev, où chaque élément recèle un moment de la vie du chimiste juif turinois, et, en 1978, Lilith, où il revient sur des personnages et moments d'Auschwitz qu'il n'a pas évoqués dans ses livres précédents. Le Système périodique a été salué par le Royal Institute de Londres, le 19 octobre 2006, comme « le meilleur livre de science jamais écrit[22] . » En 1978, il écrit le roman La chiave a stella (La Clé à molette). Le livre prend la forme d'un dialogue entre un technicien turinois, qui est envoyé en déplacement dans le monde entier pour l'installation de machineries industrielles, dans le cadre des grands projets d'ingénierie, qui dans les années 1960 et 1970 voyaient les entreprises italiennes souvent protagonistes, et l'auteur, lors d'un séjour dans la ville Russe où les deux se trouvaient pour des raisons professionnelles. Leurs souvenirs de travail y sont racontés. La philosophie de ce livre est que la fierté du travail bien fait est nécessaire à une vie épanouie. Primo Levi dut faire face aux critiques proches de la gauche, car dans son approche élégiaque du travail comme moyen d'épanouissement personnel, il avait négligé d'évoquer les aspect plus sordides de l'exploitation de la classe ouvrière, ainsi que tout élément de critique sociale. [23] . Néanmoins, le livre lui valut le prix Strega en 1979, et un succès auprès des lecteurs à l'avenant. En 1984, il écrit son autre roman, Se non ora, quando? (Maintenant ou jamais), s'inspirant d'une rencontre, brièvement mentionnée dans La Trève avec un groupe de sionistes qui avaient accroché leur wagon au train des rapatriés italiens. Maintenant ou jamais relate les tribulations d'un groupe de partisans juifs évoluant derrière les lignes allemandes durant la Seconde Guerre Mondiale, cherchant à lutter contre l'occupant et survivre. Lorsque l'idée de gagner la Palestine et de participer à la construction du foyer national juif devient clairement leur objectif, l'équipée gagne la Pologne puis l'Allemagne, avant que les survivants du groupe ne soient officiellement reçus dans un territoire aux mains des Alliés en tant que personnes déplacées. Ils parviennent à rejoindre l'Italie, pénultième étape sur le chemin vers la Palestine. Le roman est récompensé par les prix Campiello et Viareggio. Primo Levi est alors au faîte de sa célébrité en Italie. La Trève est incluse dans le programme scolaire italien. Si c'est un homme est également suivi d'un carnet résultant des discussions avec les étudiants. Il se lit également à l'étranger. En 1985, il se rend en Amérique pour un cycle de conférences de 20 jours, qui l'éprouve fortement. En revanche, l'Union des républiques socialistes soviétiques boude ses livres, où les soldats russes sont présentés trop humains par rapport au canon héroïque des Soviets. En Israël, où la société israélienne ne prend pleinement conscience de l'ampleur de la Shoah qu'avec le procès d'Eichmann à Jérusalem et est longtemps ambivalente face à ces Juifs dont on dit qu'ils se sont laissés mener à l'abattoir sans résistance, ses livres ne seront traduits qu'après sa mort. En 1985 paraît un recueil d'articles précédemment publiés dans La Stampa, sous le titre L’altrui mestiere (inclus en français dans L'asymétrie et la vie). S'y trouvent des fictions courtes, des réflexions sur des curieux phénomènes naturels, ou des revues de livre. Parmi ces dernières, figure son analyse de l'autobiographie de Rudolf Höß[24] , insérée en introduction à la publication de l'édition italienne. Il y dénonce la tentative faite par Höß pour se reconstruire un passé d'exécutant servile, entré au NSDAP par enthousiasme, arrivé à Auschwitz par ignorance et tentant d'obéir aux ordres avec « conscience ». En 1986, il publie I sommersi e i salvati (Les naufragés et les rescapés). Écrit « quarante ans après Auschwitz, » le livre revient sur son expérience concentrationnaire, d'un point de vue analytique plutôt que biographique, s'interrogeant sur la fidélité de la mémoire, tentant de comprendre la « zone grise » dans laquelle se trouvait les prisonniers des camps collaborant au régime, de la place de l'intellectuel à Auschwitz. Comme dans ses autres livres, il n'émet pas de jugement, présente les faits et pose les questions. Également en 1986, il publie un autre recueil, Racconti e saggi (également inclus dans L'asymétrie et la vie). En avril 1987, il travaille sur une autre sélection d'essais appelés Le Double Lien, qui prennent la forme d'une correspondance épistolaire avec « La Signorina[25] ». Ces essais portent sur des thèmes très personnels. Cinq ou six

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Primo Levi chapitres du manuscrit existent. Carole Angier, qui a consacré une biographie à Primo Levi, écrit en avoir lu quelques-uns, mais la majorité, distribuée par Levi à des amis proches, n'a pas été divulguée au public, et certains pourraient même avoir été détruits.

Décès Primo Levi meurt le 11 avril 1987 du fait d'une chute qu'il fit dans l'escalier intérieur de son immeuble. Pour certains, la chute aurait pu être volontaire. La plupart de ses biographes (Angier, Thomson) abondent dans le sens du légiste, qui conclut que Levi a commis un suicide. Lui-même avait déclaré souffrir de dépression. Des facteurs de risque auraient pu être sa responsabilité envers sa mère et sa belle-mère, le fait de partager le même logement et son passé. Cependant, un sociologue d'Oxford, Diego Gambetta, a établi douze ans plus tard un dossier détaillé[26] remettant en cause ce qu'il considère comme un lieu-commun n'étant étayé ni par des faits ni par des preuves indirectes. Levi n'a pas laissé de lettre de suicide, et n'a jamais fait part d'idées noires. En revanche, des documents et témoignages semblent indiquer qu'il avait des projets au temps de sa mort. Gambetta penche donc pour une mort accidentelle. La question de la mort de Primo Levi est importante, son œuvre étant communément interprétée comme une puissante affirmation de la vie face à des puissances violentes et guerrières organisées : le fait qu'il soit mort volontairement ou par accident constitue donc un commentaire final sur la validité de son propre message, lucide, positif et humaniste. L'interprétation d'Elie Wiesel, qui défend la thèse du suicide, a été acceptée jusqu'à ce jour, sans que l'on sache encore si elle est fondée sur des faits ou sur une intuition personnelle.

Thèmes de son œuvre Le caractère d'Auschwitz Primo Levi a écrit Si c'est un homme car survivre et témoigner sont pour lui inextricablement liés. Lisant de nombreux témoignages, assistant à de nombreuses réunions d'anciens déportés, se rendant dans plus de 130 écoles, il devient une figure symbolique, non seulement de la victime juive du fascisme italien, mais aussi et surtout de la lutte contre le fascisme. Selon Levi, les agents de la Shoah ont, outre leur tentative d'annihilation totale d'un peuple indépendant par une race dite "supérieure", sciemment calculé que cette tentative tomberait dans le déni ou l'oubli une fois la guerre terminée, alors qu'il s'agissait, et Primo Levi le répète à plusieurs reprises, d'un terrain expérimental pour une entreprise hautement organisée et mécanisée, qui a poussé la récupération des sous-produits jusqu'à l'utilisation des cendres produites par la crémation des corps pour construire des routes[27] . Le camp d'Auschwitz n'était pas un acte isolé mais un prototype qui aurait été appliqué à l'Europe entière si Hitler avait gagné la guerre. Il demeurerait de toute façon une caricature paroxystique mais fidèle des règles féroces du capitalisme moderne. Il lutte donc farouchement auprès du public, et de la jeunesse surtout, contre toute tentative de banalisation ou de révisionnisme des camps, décriant le négationnisme de Robert Faurisson, et rejetant toute proposition d'équivalence entre Goulag soviétique et Lager nazi après la publication de l'Archipel du Goulag et autres œuvres d'Alexandre Soljenitsyne à la fin des années 1960. Bien qu'il s'agisse effectivement de « deux types d'enfer[28] , » qu'on y soit soumis à des conditions de travail inhumaines, en inadéquation totale avec une pitance dérisoire, Levi estime que leur nature est différente, personne n'étant censé sortir du Lager, alors que ce n'était pas le cas du Goulag, et que la mortalité dans le goulag s'élevait à 30% au pire contre 90-98% dans les camps nazis[29] . De plus, le « crime » d'être Juif ne pouvait être effacé, étant considéré comme affaire de « race, » c'est-à-dire de naissance, plutôt que de religion et, « cas unique parmi toutes les atrocités de l'histoire de l'humanité, » touchait même les enfants qui furent massacrés par milliers[28] .

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Primo Levi

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La judéité Primo Levi, ainsi que la plupart des intellectuels juifs de Turin, connaissait la Bible, mais n'était ni religieux ni croyant. Ce sont les lois raciales du fascisme qui lui font prendre conscience de l'importance que revêt sa judéité. C'est par l'évocation de celle-ci qu'il débute le Système périodique, retraçant un bref historique de ses folkloriques ancêtres juifs piémontais, ainsi que l'anthologie personnelle La Recherche des racines contenant l'extrait du livre de Job, celui qui remet en question les actions d'un Dieu qu'il s'est peut-être inventé, un thème qui revient également dans sa préface au Chant du peuple juif assassiné d'Ytshak Katznelson. Le Juif agnostique qu'il est ne sera tenté de faire appel à Dieu qu'une seule fois, lors d'une selektion. Puis, « réalisant la monstruosité de la chose, » il y renonce tout aussi vite, et fustige un de ses codétenus qui remercie Dieu de ne pas avoir été « choisi. »

Œuvres Titre

Année

Type

Traduction française

Prix

Se questo è un uomo

1947 et 1958

Mémoires

Si c'est un homme (US: Survival in Auschwitz)

La tregua

1963

Mémoires

la Trêve (US: The Reawakening)

Prix Campiello

Storie naturali (sous le pseudonyme de Damiano Malabaila)

1966

Histoires courtes

Histoires naturelles

Prix Bagutta

Vizio di forma (sous le pseudonyme de Damiano Malabaila)

1971

Histoires courtes

Vice de forme

Il sistema periodico

1975

Histoires courtes

Le Système périodique

L'osteria di Brema

1975

Poésie

Lilìt e altri racconti

1978

Histoires

Lilith

La chiave a stella

1978

Roman

La clé à molette (US: The Monkey's Wrench)

La ricerca delle radici

1981

Anthologie personnelle

La recherche des racines

Se non ora, quando?

1984

Roman

Maintenant ou jamais

Dialogo

1984

Entretiens

Dialogue (avec le physicien Tullio Regge)

L'altrui mestiere

1985

Essais

Compilé dans L'asymétrie et la vie

I sommersi e i salvati

1986

Essais

Les naufragés et les rescapés

Racconti e Saggi

1986

Essais

Il fabbricante di specchio (a confirmer ?)

1990

Contes Et Réflexions Le fabricant de miroir (publié à titre posthume)

L'Asimmetria e la vita

2002

Articles

L'Asymétrie et la Vie

Prix Strega


Primo Levi

Voir aussi Bibliographie • Primo Lévi ou la tragédie d'un optimiste : biographie / Myriam Anissimov. - Paris : Lattès, 1996. - 698 p. : ill. ; 24 cm. (ISBN 2-7096-1296-8) • Primo Levi, Le devoir de mémoire (entretien avec Anna Bravo et Fedérico Cereja), introduction et postface de F. Cereja, traduit de l'italien par Joël Gayraud, Editions Mille et une nuits, Paris, 1995.

Liens internes • Littérature de la Shoah • Liste de romans sur la Shoah

Ressources externes • (it) Al visitatore [30] Texte de Primo Levi pour l'inauguration du Memorial des Italiens en Auschwitz, 1980 • International Primo Levi Studies Center [31]

Références [1] Socialist Review, January 1997. (http:/ / pubs. socialistreviewindex. org. uk/ sr204/ writers. htm) [2] Angier, p. 50. [3] Angier, p. 44. [4] Angier, p. 62. [5] Thomson, p. 40. [6] Thomson, p. 42. [7] Thomson, p. 48. [8] . Pavese aurait été le professeur d'italien de Primo Levi. Ces allégations sont fortement récusées par Thomson (2002). [9] Thomson, p. 55. [10] The Search for Roots, p. 31. [11] Thomson, p. 93. [12] Angier, p. 174. [13] Thomson, p. 119. [14] Thomson, p. 229. [15] Thomson, p. 241. [16] Thomson, p. 246. [17] Thomson, p. 249. [18] Thomson, p. 246. [19] Angier, p. 487 [20] Thomson, p. 287. [21] Thomson, p. 366. [22] The Guardian, 21 October 2006 (http:/ / books. guardian. co. uk/ news/ articles/ 0,,1927916,00. html) [23] Thomson, p. 400. [24] Rudolf Höss, Le commandant d'Auschwitz parle [25] Angier, p. 80. [26] Primo Levi's Last Moments (http:/ / www. bostonreview. net/ BR24. 3/ gambetta. html) [27] Les Naufragés et les Rescapés, p. xxx. [28] Primo Levi, appendice à Si c'est un homme, p. 202. [29] Primo Levi ne donne pas de sources à ces estimations, voir appendice à Si c'est un homme, pp. 201-202, Juillard, 1987, ISBN 2-266-02250-4. [30] http:/ / www. nuovorinascimento. org/ n-rinasc/ testi/ pdf/ levi/ levi. pdf [31] http:/ / www. primolevi. it/ Web/ English

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Alexandre Soljenitsyne

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Alexandre Soljenitsyne Alexandre Issaïevitch Soljenitsyne

Alexandre Soljenitsyne en 1994 Activité(s)

Romancier

Naissance

11 décembre 1918 Kislovodsk, RSFS de Russie

Décès

Langue d'écriture Distinctions

3 août 2008 (89 ans) Moscou, Russie russe Prix Nobel de littérature (1970)

Alexandre Issaïevitch Soljenitsyne[1] , en russe : Александр Исаевич Солженицын, transcription internationale : Aleksandr Isajevič Solženicyn, (11 décembre 1918, Kislovodsk – 3 août 2008, Moscou) est un romancier et dissident russe, auteur notamment de Une journée d'Ivan Denissovitch et de L'Archipel du Goulag.

Biographie La mère d'Alexandre, Taïssia Chtcherbak (Щербак), d'origine ukrainienne, partit étudier à Moscou où elle épousa un jeune officier de l'armée, Isaakiy Soljenitsyne. En 1918, Taïssia est enceinte d'Alexandre. Peu après l'annonce de la grossesse de sa compagne, Isaakiy meurt dans un accident de chasse. Alexandre naît à Kislovodsk, une station thermale russe du kraï de Stavropol dans le nord du Caucase. Le 7 avril 1940, il épouse Natalia Alexeïevna Rechetovskaïa, une étudiante en chimie[2] dont il divorce en 1952, puis se remarie en 1957, divorce à nouveau en 1972, et, l'année suivante, il épouse Natalia Dmitrievna Svetlova, une mathématicienne. Sa mère avait encouragé son penchant pour la littérature et les études scientifiques, mais mourut le 17 janvier 1944. Élève à l'école et à l'université des sciences de Rostov-sur-le-Don, il étudie les mathématiques et la doctrine communiste et reçoit par correspondance des cours de philosophie et de littérature. Il adhère à l’idéologie officielle de l'époque[3] . Lors de l'invasion allemande en 1941, il se bat comme artilleur dans l'Armée rouge[3] . Il est condamné en 1945 à 8 ans de prison dans les camps de travail pour « activité contre-révolutionnaire », après avoir entretenu une correspondance critique à l'égard de la politique de Staline et de ses compétences guerrières, lui reprochant, dans une lettre interceptée par la censure militaire, de n'avoir pas cherché à négocier avec Hitler pour


Alexandre Soljenitsyne atténuer les souffrances de la Russie [4] . Il fut condamné à l'époque comme traître. À sa sortie du camp en 1953, quelques semaines avant la mort de Staline[3] , il est envoyé en exil perpétuel au Kazakhstan. Il est réhabilité en 1956 et s'installe à Riazan, à 200 km au sud de Moscou, où il enseigne les sciences physiques.

Auteur en URSS C'est son ouvrage Une journée d'Ivan Denissovitch, publié en 1962 dans la revue soviétique Novy Mir, grâce à l'autorisation de Nikita Khrouchtchev en personne, qui lui acquiert une renommée tant dans son pays qu’internationalement. Le roman décrit les conditions de vie dans un camp de travail forcé soviétique du début des années 1950 à travers les yeux d'Ivan Denissovitch Choukhov, archétype du paysan russe moyen que l'on suit au cours d'une journée. Il est reçu au Kremlin par Khrouchtchev. Cependant, deux ans après, sous Brejnev, il lui est de plus en plus difficile de publier ses textes en Union des républiques socialistes soviétiques. En 1967, dans une lettre au Congrès des écrivains soviétiques, il exige la « suppression de toute censure – ouverte ou cachée – sur la production artistique ». Ses romans Le Premier Cercle et Le Pavillon des Cancéreux, ainsi que le premier tome de son épopée historique La Roue rouge, paraissent en Occident où il reçoit le Prix Nobel de littérature en 1970, récompense qu'il ne pourra percevoir que quatre ans plus tard après avoir été expulsé d'URSS. Il n'a en effet pas pu se rendre à Stockholm de peur d'être déchu de sa nationalité soviétique et de ne pouvoir rentrer en URSS, le gouvernement suédois ayant refusé de lui transmettre le prix à son ambassade de Moscou. Sa vie devient une conspiration permanente pour voler le droit d’écrire en dépit de la surveillance de plus en plus assidue du KGB. Une partie de ses archives est saisie chez un de ses amis en septembre 1965. En 1969, alors qu'il est persécuté par les autorités et ne sait plus où vivre, il est hébergé par Mstislav Rostropovitch[5] . Il manque d'être assassiné en août 1971 (par un « parapluie bulgare »). Une de ses plus proches collaboratrices a échappé de justesse à un étranglement et un accident de voiture. En décembre 1973 paraît à Paris (en version russe) L'Archipel du Goulag, où il expose le système concentrationnaire soviétique du Goulag, qu'il a vécu de l'intérieur, et la nature totalitaire du régime. Écrit entre 1958 et 1967 sur de minuscules feuilles de papier enterrées une à une dans des jardins amis, une copie avait été envoyée en Occident pour échapper à la censure. Il décida sa publication après qu'une de ses aides, Élisabeth Voronianskaïa, fut retrouvée pendue : elle avait avoué au KGB la cachette où se trouvait un exemplaire de l’œuvre. Cette publication lui vaut d'être déchu de sa citoyenneté et d'être arrêté puis expulsé d’Union Soviétique en février 1974. Ses textes continuent d’être diffusés clandestinement, sous forme de samizdats.

Auteur en exil Grâce à l'aide de l'écrivain Heinrich Böll, il s'installe d'abord à Zurich en Suisse, puis émigre aux États-Unis. L'émission télévisée Apostrophes de Bernard Pivot, où il est invité, marque les esprits en France. Après une période agitée d'interviews et de discours (comme le fameux discours de Harvard prononcé en 1978) aux États-Unis, Soljenitsyne fut souvent invité à d’importantes conférences. Le 15 juillet 1975, il fut même invité à donner une conférence sur la situation mondiale au Sénat américain. L'occident découvre alors un homme orthodoxe conservateur et profondément slavophile très critique sur la société occidentale de consommation[3] . L'écrivain doit affronter une campagne supplémentaire de diffamation à son égard. Il se retire avec sa famille à Cavendish dans le Vermont pour écrire l'œuvre dont il rêvait depuis sa jeunesse : La Roue rouge. Épopée historique qui retrace l'embourbement de la Russie dans la folie révolutionnaire, elle compte plusieurs milliers de pages. En 1983, il reçoit le Prix Templeton.

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Retour en Russie Dans le cadre de la Glasnost menée par Mikhaïl Gorbatchev, sa citoyenneté soviétique lui est restituée et l'Archipel du Goulag est publié en URSS à partir de 1989. Après la fin de l’URSS, via la France (inauguration du Mémorial de la Vendée des Lucs-sur-Boulogne, en Vendée, le 25 septembre 1993), il rentre en Russie le 27 mai 1994, en arrivant par l'est, à Magadan. Il met un mois à traverser son pays en train. Il résidera en Russie jusqu'à sa mort. Jusqu'en 1998, il conserve une activité sociale intense, a sa propre émission de télévision, voyage à travers la Russie, rencontre une multitude de personnes et d'anciens déportés. La maladie interrompt cette activité.

Soljenitsyne prenant le train à Vladivostok, été 1994.

Soljenitsyne vit ensuite retiré près de Moscou, au milieu de sa famille. Le Fond Soljenitsyne aide les anciens zeks et leurs familles démunies en leur versant des pensions, en payant des médicaments. Après avoir cru qu'il jouerait un rôle décisif dans la Russie post-communiste, puis, déçus, après l'avoir déjà plus ou moins « enterré », les Russes semblent ces derniers temps s'intéresser de nouveau à sa figure et redécouvrir la valeur de ses écrits politico-sociaux. Un colloque international sur son œuvre lui a été consacré en décembre 2003 à Moscou. Le 12 juin 2007, le président Vladimir Poutine rend hommage à Soljenitsyne en lui décernant le prestigieux Prix d'État[6] . L’ancien dissident Viktor Erofeev a estimé que « c’était vraiment un paradoxe douloureux de voir comment l’ancien prisonnier pouvait sympathiser avec l’ancien officier du KGB »[7] . Malgré plusieurs rencontres privées avec Poutine et des marques de sympathie, Soljenitsyne a accusé la politique impérialiste d'épuiser à l'extérieur les forces vives de la Nation. Ces positions sur la politique extérieure de la Russie sont expliquées dès 1990 dans son essai Comment réaménager notre Russie[8] . Il meurt à son domicile moscovite à 89 ans dans la nuit du 3 au 4 août 2008 d'une insuffisance cardiaque aiguë[3] . Il est enterré au cimetière du monastère de Donskoï. Ses funérailles sont retransmises en direct à la télévision russe.

Un engagement controversé Longtemps un des symboles de la résistance intellectuelle à l'oppression soviétique, Alexandre Soljenitsyne a été régulièrement attaqué. Les opérations de déstabilisation à son encontre n'ont pratiquement jamais cessé des années 1960 jusqu’aux années 1980. Un zek (détenu), manipulé par le KGB, l'a accusé d'être un informateur des autorités communistes, et a pour cela écrit une fausse dénonciation. Le KGB a fait écrire quelques livres contre lui par d'anciens amis, comme son ancien éditeur, Alec Flagon[9] , et même par sa première femme. Durant sa carrière littéraire, il aurait été successivement ou simultanément accusé d'être nationaliste, tsariste, ultra-orthodoxe, antisémite ou favorable à Israël, traître, complice objectif de la Gestapo, de la CIA, des francs-maçons, des services secrets français et même du KGB. Soljenitsyne a répondu à ces accusations en les juxtaposant pour qu'elles s'annulent entre elles, dans son autobiographie littéraire, Le grain tombé entre les meules, et encore récemment dans un article de la Litératournaïa Gazeta, « Les barbouilleurs ne cherchent pas la lumière ». Selon Soljenitsyne, la guerre avec l'Allemagne nazie aurait pu être évitée si le gouvernement soviétique avait trouvé un compromis avec Hitler. Soljenitsyne accusa le gouvernement soviétique et Joseph Staline d'avoir été plus responsable qu'Hitler des terribles conséquences de la guerre sur le peuple soviétique. Ses ouvrages et interprétations historiques ont été souvent dénoncés, « plus d’un historien relèvera des erreurs, des déformations »[10] . L’historien


Alexandre Soljenitsyne Boris Souvarine, précurseur de la dénonciation du stalinisme, lui reproche ses multiples erreurs historiques dans Lénine à Zurich[11] . Ses prises de position pour « une période autoritaire de transition » lui valurent de sévères critiques de la part de dissidents comme Andreï Siniavski et Andreï Sakharov[10] . Il s'exprima également en faveur des dictatures militaires menées par Franco (Espagne) et Pinochet (Chili) : il déclara en 1976 que "si le Chili n'existait pas, il faudrait l'inventer"[12] , ajoutant après la mort de Franco que les espagnols vivaient "dans la liberté la plus absolue" de son vivant, soulignant la victoire du "concept de vie chrétienne" durant la guerre d'Espagne.[13] Alexandre Soljenitstyne a renouvelé plusieurs fois son soutien aux États-Unis, les qualifiant de "pays le plus magnanime et le plus généreux de la Terre".[14] En revanche, il a parfois critiqué la politique menée par le gouvernement américain, par exemple sur la paix négociée au Vietnam, qu'il qualifie d'"armistice stupide, incompréhensible, sans garantie aucune".[15] Il ne croit pas que le pays puisse passer, du jour au lendemain, d'un régime totalitaire à une régime de type démocratie occidentale. S'il est favorable à un pouvoir présidentiel fort, il est surtout partisan de la démocratie locale : pour Soljenitsyne, la vraie démocratie n'est pas constituée par le système électoral mais par un tissu d'associations locales gérant les affaires indépendamment du pouvoir central qui, lui, ne devrait s'occuper que des affaires nationales (armée, politique étrangère, etc.). S’affirmant comme un fervent patriote, voire comme un nationaliste, il s'est opposé à la Première guerre de Tchétchénie, mais a approuvé la seconde. Il a eu un commentaire favorable au président Poutine lors de son arrivée au pouvoir, espérant de lui des changements significatifs. Alexandre Soljenitsyne n'a jamais démenti les accusations de royalisme portées contre lui par le pouvoir soviétique. Ses convictions religieuses orthodoxes suscitent également de la méfiance dans les milieux progressistes. Selon Moshe Lewin, qui relaie ces critiques, « aussi longtemps qu'[Alexandre Soljenitsyne] a mené sa bataille de l'intérieur, les observateurs étrangers ont supposé qu'il luttait pour une démocratisation du système [...]. Mais, une fois Soljenitsyne exilé en Occident, ils ont vite compris que l'anticommunisme n'était pas automatiquement porteur de démocratie. Le combat de Soljenitsyne était en fait au service d'une idéologie profondément antidémocratique, qui mêlait des éléments de « national-étatisme » à des traits archaïques de la religion orthodoxe, opposés au concept même de démocratie. Bref, il y avait chez Soljenitsyne un attachement profond à un autoritarisme de son cru, qui, s'il n'était pas formulé lors de ses premières apparitions sur la scène publique, s'est développé au cours de son combat[16] ». L'historien américain Richard Pipes, dont les travaux sur l'histoire de la Russie soviétique avaient été qualifiés par Soljenitsyne de « version polonaise de l'histoire russe » (Pipes est d'origine polonaise), a répondu à celui-ci en le taxant d'antisémitisme et d'ultra-nationalisme. En 1985, Pipes a ainsi développé son propos dans sa critique d'une nouvelle de Soljenitsyne, Août 1914 : « Chaque culture a une forme propre d'antisémitisme. Dans le cas de Soljenitsyne, celui-ci n'est pas racial. Cela n'a rien à voir avec le sang. Il [Soljenitsyne] n'est pas raciste, la question est fondamentalement religieuse et culturelle. Il présente de nombreuses ressemblances avec Dostoïevski, qui était un chrétien fervent, un patriote et un antisémite farouche. Soljenitsyne se place incontestablement dans la vision de la Révolution défendue par l'extrême droite russe, comme une création des Juifs[17] . » Il a ainsi fait régulièrement l'objet d'accusations d'antisémitisme, entre autres en raison de l’orientation de ses travaux historiques sur la révolution bolchevique et, plus récemment, en raison de son opposition aux oligarques russes et de la publication de son ouvrage historique Deux siècles ensemble sur les relations entre Juifs et Russes de 1795 à 1995 : l'écrivain et ancien dissident soviétique Vladimir Voinovich a ainsi voulu démontrer le caractère antisémite de ce livre dans une étude polémique[18] . En France, l'historien trotskiste Jean-Jacques Marie a consacré un article à chaque tome de Deux siècles ensemble, qu'il qualifie de « Bible antisémite ». Selon Jean-Jacques Marie, « Soljenitsyne expose, dans Deux siècles ensemble, une conception de l'histoire des Juifs en Russie digne de figurer dans un manuel de falsification historique » en rétablissant une histoire des pogroms « telle qu'elle a été vue par la police tsariste[19] ». L'historien britannique Robert Service a cependant défendu le livre de Soljenitsyne, arguant qu'une étude de la place des juifs dans le parti bolchevique était pleinement justifiée[20] .

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Alexandre Soljenitsyne

Œuvres La datation des œuvres d'Alexandre Soljenitsyne est difficile à établir avec précision, car la plupart d'entre elles ont connu une gestation très longue et plusieurs versions (y compris parfois une réécriture quasi complète). En ce sens, l'exergue placé au début du Premier Cercle est significatif : « Écrit de 1955 à 1958. Défiguré en 1964. Réécrit en 1968 ». • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • •

Une journée d'Ivan Denissovitch (1962) Le Pavillon des cancéreux (1968) Les Droits de l'écrivain (1969) Le Premier cercle (commencé en 1955, version finale en 1968) (ISBN 2-213-01157-5) Août 14, premier nœud (série de livres (nœuds) en plusieurs volumes (tomes) réédités en 1983 sous le titre commun La Roue rouge) (1972) (ISBN 221301339X) L'Archipel du Goulag (tomes I et II) (1974) Le chêne et le veau (1975) Discours américains (1975) Des voix sous les décombres (1975) Lénine à Zurich (1975) L'Archipel du Goulag (tome III) (1976) Flamme au vent (1977) Le Déclin du courage (1978) Message d'exil (1979) L'erreur de l'Occident (1980) Les tanks connaissent la vérité (1982) Nos Pluralistes (1983) La Roue rouge, tome 2 : Deuxième nœud - Novembre 16 (1985) Comment réaménager notre Russie ? (1990) Les Invisibles (1992) La Roue rouge, tome 3 : Troisième nœud - Mars 17 (4 tomes) (1993-1998) Le « Problème russe » à la fin du XXe siècle (1994) Ego (1995) Nos jeunes (1997) Le Grain tombé entre les meules (1998), éd. Fayard, 500 pages. La Russie sous l'avalanche (1998) Deux récits de guerre (2000) Deux siècles ensemble, 1795-1995, tome 1 : Juifs et Russes avant la révolution (2002) Deux siècles ensemble, 1917-1972, tome 2 : Juifs et Russes pendant la période soviétique (2003) Esquisses d'exil – Le grain tombé entre les meules, tome 2, 1979-1994, traduit du russe par Françoise Lesourd, (2005) Aime la révolution ; Les yeux dessillés, (2007) Réflexions sur la révolution de février, (2007) Une minute par jour, (2007) La Roue rouge : Quatrième nœud : Avril 17 (2009)

Alexandre Soljenitsyne a également écrit au cours des années 1960 des nouvelles publiées dans la revue Novy Mir. Certaines ont été publiées en France dans les recueils : • La Maison de Matriona (1963) qui contient aussi L'Inconnu de Krétchétovka et Pour le bien et la cause • Zacharie l'escarcelle (1971)

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Alexandre Soljenitsyne

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Voir aussi Bibliographie • Georges Nivat, Soljenitsyne, collection "Écrivains de toujours" aux éditions du Seuil, 1983. • Georges Nivat, Le phénomène Soljenitsyne, Fayard, 2009.

Filmographie • Alexandre Sokourov, Dialogues avec Soljenitsyne (1999).

Articles connexes • • • • • •

Vladimir Boukovsky Varlam Chalamov Alexander Dolgun Anatoli Martchenko Andreï Sakharov Alexandre Zinoviev

• Alexandre Schmemann

Liens externes • • • • • • • •

(en) A world split apart [21], discours à Harvard, juin 1978 Article de Libération du 3 août 2008 : nécrologie d'Alexandre Soljenitsyne [22] Le portrait de Soljenitsyne en images sur Ina.fr [23] Alexandre Soljenitsyne [24], un dossier des archives de la Télévision suisse romande Discours d'Alexandre Soljenitsyne [25], discours des Lucs-sur-Boulogne, Vendée, le 25 septembre 1993 Site de Georges Nivat [26] Livre Soljenitsyne Edition electronique. Film EHESS [27] Collège Alexandre Soljenitsyne à AIZENAY (85) [28] Précédé de : Samuel Beckett

Prix Nobel de littérature 1970

Suivi de : Pablo Neruda

Références [1] Le spécialiste de Soljenitsyne Georges Nivat et son éditeur Claude Durand écrivent son nom avec l'accent aigu. [2] Terras, Victor. Handbook of Russian Literature, p. 436. Yale University Press, 1985, ISBN 0-300-04868-8. [3] « La mort d'Alexandre Soljenitsyne » (http:/ / www. liberation. fr/ actualite/ monde/ 342832. FR. php?rss=true& xtor=RSS-450), Libération.fr, 3 août 2008. [4] « Nous étions deux qui échangions nos pensées en secret : c'est-à-dire un embryon d'organisation, c'est-à-dire une organisation ! » (Alexandre Soljenitsyne, L'Archipel du Goulag, Paris, Éd. du Seuil, 1974, p. 56.) [5] The Economist, 12 mai 2007, nécrologie de Mstislav Rostropovitch [6] Le Figaro, 13 juin 2007 (http:/ / www. lefigaro. fr/ international/ 20070613. FIG000000051_vladimir_poutine_rend_hommage_a_soljenitsyne. html) [7] Alexandre Soljenitsyne, sur Bibliomonde (http:/ / www. bibliomonde. com/ auteur/ alexandre-soljenitsyne-2486. html) [8] « Décès d'Alexandre Soljenitsyne, conscience d’un siècle » (http:/ / www. la-croix. com/ article/ index. jsp?docId=2345606& rubId=1094), La Croix, 4 août 2008. [9] Vladimir Volkoff, Petite histoire de la désinformation, Rocher, 1999, p. 122-123. [10] Soljenitsyne, l’archipel d’une vie (http:/ / www. liberation. fr/ actualite/ monde/ 343108. FR. php), Libération, 5 août 2008. [11] Boris Souvarine, « Controverse avec Soljenitsyne », Paris, 1990. [12] Les dossiers de l'écran, Antenne 2, émission du 9 mars 1976. Cité dans Rideau de fer sur le Boul'Mich, Jean Salem, Editions Delga, 2009


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[13] Le Monde, 23 mars 1976. Cité dans Rideau de fer sur le Boul'mich, loc.cit. [14] "Discours de Washington (30 juin 1975), prononcé à l'invitation de l'AFL-CIO", Discours américains, Paris, Seuil, 1975, p.28 [15] "Discours de Washington", loc.cit., p.31 [16] Moshe Lewin, Le siècle soviétique, p. 249-250, ed. Fayard [17] Richard Pipes, New York Times, 13 novembre 1985. [18] Vladimir Voinovich, A Portrait Against the Background of a Myth, 2002 [19] Jean-Jacques Marie, « L'antisémitisme complaisant de Soljenitsyne » (http:/ / perso. orange. fr/ cermtri. 3/ cariboost1/ crbst_58. html), dans les Cahier du mouvement ouvrier (publication du CERMTRI) n°17, p.146-147. Voir aussi l'article consacré au tome II de Deux siècles ensemble, dans le Cahier n°22, p.81-85 [20] Cf. « Solzhenitsyn breaks last taboo of the revolution » (http:/ / www. guardian. co. uk/ russia/ article/ 0,2763,881984,00. html), The Guardian, 25 juin 2003. [21] http:/ / www. uncg. edu/ ~danford/ solz. html [22] http:/ / www. liberation. fr/ actualite/ monde/ 342832. FR. php?rss=true& xtor=RSS-450 [23] http:/ / www. ina. fr/ archivespourtous/ index. php?vue=selarch_select& id=1070 [24] http:/ / archives. tsr. ch/ dossier-soljenitsyne [25] http:/ / www. sedcontra. fr/ Politique/ Discours-integral-d-Alexandre-Soljenitsyne-en-Vendee. html [26] http:/ / nivat. free. fr/ livres/ solj_fr/ index. htm [27] http:/ / iconotheque-russe. ehess. fr/ film/ 236/ [28] http:/ / clg-soljenitsyne-85. ac-nantes. fr/

Varlam Chalamov Varlam Chalamov Варлам Шаламов

Plaque sur la maison natale de Chalamov à Vologda Nom de naissance

Varlam Tikhonovitch Chalamov

Activité(s)

Écrivain, poète, essayiste

Naissance

18 juin 1907 Vologda, Empire russe

Décès

17 janvier 1982 Moscou, Union soviétique

Langue d'écriture

russe

Œuvres principales •

Récits de la Kolyma, 1966


Varlam Chalamov

Varlam Tikhonovitch Chalamov (en russe : Варлам Тихонович Шаламов) est un écrivain russe, né le 18 juin 1907 à Vologda, mort le 17 janvier 1982 à Moscou.

Parcours Le père de Chalamov est un prêtre orthodoxe, ce qui va lui occasionner des difficultés après la Révolution de 1917 : Varlam Chalamov ne peut poursuivre ses études universitaires à Vologda, il doit partir pour Moscou, où il réussit en 1923 le concours d'entrée à la faculté de droit de l'Université d'État de Moscou (MГУ). Pour payer ses études à l'université, Chalamov travaille dans une tannerie. Chalamov entre dans un mouvement trotskiste et conteste le pouvoir de Joseph Staline, en particulier en diffusant de manière clandestine les Lettres au Congrès du Parti, appelées ultérieurement le Testament de Lénine. Ces lettres de Lénine au Congrès mettent, entre autres, clairement en garde contre une éventuelle succession de Staline à la tête du Parti communiste. Il se fait arrêter le 19 février 1929 et est envoyé pour trois ans dans un camp de travail à Vichéra, dans l'Oural central. Chalamov revient à Moscou en 1932 et y travaille comme journaliste et essayiste. La grande purge de 1937 va le renvoyer dans les camps : le 1er janvier 1937, Chalamov est arrêté pour « activité trotskiste contre-révolutionnaire », condamné à 5 ans et envoyé dans la Kolyma, région à l'extrême-est de l'URSS, au-dessus du cercle polaire arctique, connue sous le nom de « pays de la mort blanche ». Maintes fois Chalamov souhaite la mort mais, mal-nourri, abruti de travail dans les mines d'or, congelé par le climat polaire, battu par les détenus de droit commun, il survit. En 1943, toujours prisonnier, il écope d'une nouvelle condamnation, de 10 ans cette fois, mais toujours dans la Kolyma, pour « agitation anti-soviétique » pour avoir considéré Ivan Bounine comme un classique de la littérature russe. « Il ne faut pas avoir honte de se souvenir qu'on a été un “crevard”, un squelette, qu'on a couru dans tous les sens et qu'on a fouillé dans les fosses à ordures [...]. Les prisonniers étaient des ennemis imaginaires et inventés avec lesquels le gouvernement réglait ses comptes comme avec de véritables ennemis qu'il fusillait, tuait et faisait mourir de faim. La faux mortelle de Staline fauchait tout le monde sans distinction, en nivelant selon des répartitions, des listes et un plan à réaliser. Il y avait le même pourcentage de vauriens et de lâches parmi les hommes qui ont péri au camp qu'au sein des gens en liberté. Tous étaient des gens pris au hasard parmi les indifférents, les lâches, les bourgeois et même les bourreaux. Et ils sont devenus des victimes par hasard. » — Varlam Chalamov, Récits de la Kolyma, 1978 En 1946, la chance va sourire deux fois à Chalamov : au seuil de la mort, il ne peut plus travailler et est envoyé à l'hôpital au lieu d'être exécuté. De plus, le détenu-médecin Pantiouhov prend d'énormes risques pour le faire nommer aide-médecin. Chalamov reçoit un salaire (très faible, mais qui va lui permettre d'acheter des livres) et surtout améliore ses conditions d'existence : une plus grande autonomie, une vraie ration de nourriture et surtout il ne travaille plus dans une mine, mais dans un hôpital chauffé. Après une formation rapide, il gère l'accueil des malades de l'hôpital. Varlam Chalamov est libéré en 1951, mais il doit rester à Magadan, la grande ville de la région jusqu'à novembre 1953. La mort de Staline en mars 1953 change la donne pour les prisonniers des camps (zek ou ZK qui est l'abréviation pour zaklioutchon) : les morts sont réhabilités, beaucoup de vivants sont remis en liberté. Chalamov ne peut revenir à Moscou avant sa réhabilitation en 1956, il travaille dans une exploitation de tourbe à Kalinine à 100 kilomètres au nord-ouest de la capitale. À Moscou, Chalamov publie des essais et de la poésie dans des revues littéraires tout en s'attelant à son œuvre majeure : les Récits de la Kolyma où il raconte son expérience des camps. Les épreuves sont envoyées dans les pays occidentaux en contrebande, ils sont aussi publiés en URSS par samizdat. Les Récits paraissent pour la première fois en 1966 et la première édition en langue russe (mais à l'étranger) en 1978. En 1972, Chalamov doit renier ses Récits, très probablement forcé par les pressions de l'État. Le livre parait en URSS en 1987. La mort de Chalamov est une métaphore de sa vie : pauvre, affaibli, malade, il s'éteint dans un hôpital psychiatrique moscovite en 1982 et est enterré au cimetière de Kountsevo

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Varlam Chalamov de Moscou. L'œuvre de Varlam Chalamov a été adaptée au théâtre Confluences à Paris pour la première fois en 2005 par Ariel Cypel sous le titre "C'est ainsi que nous vivions, quelques récits de la Kolyma", avec Charlie Bauer et Marie Alexandre Ferrier.

Œuvres de Chalamov • La Quatrième Vologda : récit autobiographique, traduit du russe par Catherine Fournier, Fayard/La Découverte, 1986. • Les Récits de Kolyma : quai de l’enfer, traduit du russe par Catherine Fournier, LGF, « Le Livre de Poche », 1990. • Correspondance avec Boris Pasternak, traduit du russe par Sophie Benech et Lily Denis, Gallimard, « Arcades », 1991. • Cahiers de la Kolyma et autres poèmes, traduit du russe par Christian Mouze, Maurice Nadeau, 1991. • Mes bibliothèques, traduit du russe par Sophie Benech, Interférences, 1992. • Essais sur le monde du crime, traduit du russe par Sophie Benech, Gallimard, « Arcades », 1993. • Tout ou rien : cahier 1 : l'écriture, traduit du russe par Christiane Loré, Verdier, 1993. • Correspondance avec Alexandre Soljenitsyne et Nadejda Mandelstam, Verdier, 1995. • Les années vingt : réflexions d'un étudiant, traduit du russe et présenté par Christiane Loré avec la collaboration de Nathalie Pighetti-Harrison, Verdier, 1997. Rééd. poche 2008. • Vichéra : antiroman, traduit du russe par Sophie Benech, Verdier, 2000. • Récits de la Kolyma, nouvelle édition, traduit du russe par Catherine Fournier , Sophie Benech et Luba Jurgenson, préf. de Luba Jurgenson, postf. de Michel Heller, Verdier, 2003. • La quatrième Vologda : souvenirs, traduit du russe par Sophie Benech, Verdier, 2008.

Bibliographie • Claude Esteban, Ce qui retourne au silence, Farrago/Leo Scheer, 2004. • Hanne Aga, L'écriture du trauma dans les "Récits de la Kolyma" de Varlam Chalamov, L'Harmattan, 1999. • Georges Nivat, notice sur sa vie dans "Universalia" 1983; pp.548-549.

Lien externe • • • • •

(en) Varlam Chalamov Le site officiel [1] (ru) Varlam Chalamov Le site officiel [2] Biographie et bibliographie [3] aux Editions Verdier (fr) http://ipr.univ-paris1.fr/spip.php?article84 Dossier assez complet sur Contre-feux, la revue littéraire de Lekti-ecriture.com [4]

Références [1] [2] [3] [4]

http:/ / shalamov. ru/ en/ http:/ / shalamov. ru/ http:/ / www. editions-verdier. fr/ russie/ auteurs/ chalamov. htm http:/ / www. lekti-ecriture. com/ contrefeux/ -Varlam-Chalamov-. html

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Sources et contributeurs de l'article Camp de concentration Source: http://fr.wikipedia.org/w/index.php?oldid=54750094 Contributeurs: (:Julien:), Abdoucondorcet, Ahbon?, Alchemica, Alno, Alvaro, Anatole Coralien, Apollon, Archeos, Arnaud.Serander, Artophil, Attis, Aurevilly, Aymeric78, Badmood, Bancniracun, Bel Adone, Ben73, Brskalnik, Brunodesacacias, Calvus mons, Caton, Cdang, Charles de Jessé Levas, Chichery, Christophe Dioux, Chrono1084, Clem23, Cnb, Coue, Couthon, Cyberugo, Céréales Killer, D4m1en, DITWIN GRIM, Daniel*D, Darth Gaut, Deux esprits, Dhatier, DocteurCosmos, Dominique natanson, Dumbbell, Démocrite, Elfix, Elg, Erasmus, Ericdec, Fandepanda, Fashion-la-roule, Fluti, François-Dominique, Fred.th, Galoric, Gbog, Gem, Georgio, Gronico, Grumpfou, Guillom, Harmonia Amanda, Hellkeeper, Heme, Hercule, Herr Satz, Heureux qui comme ulysse, Hommeidf, Horowitz, Howard Drake, IAlex, Ico, Inisheer, Irdnael, Iznogood, JOPE MARESSOT, Jaczewski, Jastrow, Jean-Jacques Georges, Kelson, Kimdime, Koyuki, Kropotkine 113, Kyro, Lamiot, Lanredec, Laurent Nguyen, Le Dernier des Trémolins, LeMorvandiau, Leparc, Like tears in rain, Lilyu, Linan, Lolo96, Looxix, Loveless, Lucignolobrescia, Lucrèce, Luzmael, Maloq, Malost, Marc Mongenet, Markadet, Mathusalem75, Med, Moala, Moez, Moumousse13, Mro, Necrid Master, Nicolas Ray, Nono64, Oblic, Pacman1897, Padawane, Paris75000, Paul éthiquement correcte, Pautard, Perky, PetetheJock, Phe, Phido, Pierre-Yves Schanen, Ploum's, Polypheme63, Pontauxchats, Poux, Pseudomoi, Pymouss, Quentinv57, RM77, Rhizome, Rinjin, Rsmaika, Ryo, Rémih, Sam Hocevar, Sammyday, Shakki, Shelley Konk, Soig, Solveig, Springbokwiki, Svevo, Takima, Theon, Tontonflingueur, Toutoune25, Treanna, Trimégiste, Turb, Turlin, TwoWings, Uneautrepoire, Urban, Wanderer999, Webmestre mms, Weft, Wegesrand, Wlm, Yugiz, ~Pyb, 200 modifications anonymes Camps de concentration nazis Source: http://fr.wikipedia.org/w/index.php?oldid=53839843 Contributeurs: Addacat, Antoineessonne, Asavaa, Aspirant Grange, Badmood, Baruch, Ceedjee, Charles de Jessé Levas, Christophe Dioux, Cobra bubbles, Couthon, Coyau, Céréales Killer, Dhatier, DocteurCosmos, Dsant, Efbé, Elapied, Fm790, GWE FFO, Gz260, Horowitz, Irdnael, JLM, Jef-Infojef, Kadoccure, LairepoNite, Laurent Nguyen, Lebob, Leparc, Like tears in rain, Lilyu, Loveless, Ludovic89, Malta, Matta Ali, Morosphinx, Necrid Master, Omaemona1982, Padawane, Paris75000, RS1981, Soak, Sémhur, Tinodela, Treehill, Vinz1789, Zetud, Zil, Ælfgar, 66 modifications anonymes Camp d'extermination Source: http://fr.wikipedia.org/w/index.php?oldid=54367812 Contributeurs: (:Julien:), Alain Caraco, Alcor33, Alvaro, Antivolt, Aurevilly, Badmood, Bombastus99, Bradipus, Celyndel, Centuri, Chaps the idol, Chouchoupette, Chrono1084, Couthon, Céréales Killer, Daniel*D, Dfeldmann, DocteurCosmos, Dominique natanson, Domsau2, Eden2004, Enzino, Fandepanda, Fouziks, Franck Gombaud, François-Dominique, Goliadkine, GrAiNDeFoLiE, Hercule, Heureux qui comme ulysse, IAlex, Inisheer, J-L Cavey, Jef-Infojef, Jkelly, Josephplichart, Keats, Lanredec, Le serbe, Licorne37, Lucrèce, Maloq, Mogador, Moolligan, Moumine, Mythe, Nanoxyde, Nataraja, Necrid Master, Nemesis 12, Neptune, Nguyenld, NicoRay, Overkilled, Pautard, Phido, Pontauxchats, Rune Obash, Rémih, Seb35, Seb662, Shelley Konk, Soig, Szdavid, Sémhur, The faker, Tibo217, Tibor, Vargenau, Voxhominis, Yann, Yf, Yuzuru, Zivax, Zoupidon, 88 modifications anonymes Camp d'internement français Source: http://fr.wikipedia.org/w/index.php?oldid=54961050 Contributeurs: 16@r, Abracadabra, Ahbon?, Alexandrin, Alkashi, Alvaro, Anaemaeth, Apfelstrudel, Arnaud.Serander, Asdfj, Bianchi-Bihan, Bob08, Claude villetaneuse, ClaudeLeDuigou, Cloclob, Coyau, Crouchineki, Daniel*D, Dominique natanson, Ducloy, Elg, Encolpe, Erasmus, Etienne EYROLLE, Fabrice Dury, Fantassin 72, Fluti, Fouziks, Frania Wisniewska, Fred.th, FredoB, GillesC, Harrieta171, Hbbk, Hemmer, Hercule, Herr Satz, Herve1729, Heurtelions, Hhenri58, JB, Jean-Jacques Georges, Kergidu, Kertraon, Kilom691, L'amateur d'aéroplanes, L'œuf, Lamaingauche, Lechat, Litlok, M.A.A, Madame Grinderche, Markadet, Michel D. 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