Mohamed Tabal
Mohamed Tabal
Exposition du 22 mai au 7 juin 2014
Mohamed Tabal En peintre-jardinier
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Mohamed Tabal dont les œuvres étaient exposées le dimanche 4 décembre 2011 à Casablanca refusait de s’y rendre : en cette période de gaulage des olives il préfèrait rester dans son village de Hanchane pour s’occuper de la cueillette et de la trituration dans les antiques pressoirs du pays Chiadma. En participant ainsi à la vie rurale, il en devient un observateur privilégié pour s’en inspirer et la peindre. Son atelier d’artiste se situe en effet au cœur de son village natal entouré de son jardin, de sa basse coure, de son souk et des carrioles qui le sillonnent. Il y trouve surtout la paix, le silence et la lumière. Entouré de ses œuvres en cours d’élaboration, il me montre accrochée au mur une sérigraphie délavée d’une œuvre de Chaïbia que lui avait offert jadis un amateur d’art : “Depuis que cette artiste avait quitté son village natal au pays Doukkala pour s’établir dans la grande métropole de Casablanca, me fait-il observé, la vie s’est retirée de ses œuvres moins colorées..” Il ne fera jamais cette erreur: il ne quittera pour rien au monde, cette vie rurale si simple et si poétique qui est maintenant la sienne. De la sorte notre artiste peut se consacrer tranquillement à sa création sans être distrait par le flux continu des informations, le bruit et la fureur du monde.... TABAL refuse d’être cet homme unidimensionnel, cet artiste prisonnier de l’image qu’on lui accole d’être seulement le “peintre des Gnaoua”: certes ces derniers l’inspirent mais ils ne sont plus sa seule source d’inspiration. Il est maintenant un peintre multidimensionnel aux références culturelles multiples : africaines, berbères, arabes puisqu’il pratique la calligraphie à sa manière et s’inspire du zajal cette poésie populaire issue de la geste hilalienne, ces arabes nomades qui envahirent le Maghreb au Xème siècle telle une nuée de sauterelles... Il n’est pas non plus un peintre unidimensionnel au niveau de la technique puisqu’il pratique la peinture sur toile de jute, le collage sur bois, la sculpture sur différents matériaux qu’il découvre au gré de ses promenades solitaires dans la nature. Les œuvres qu’il commence à peindre à l’aube, il les a souvent esquissé la veille juste avant de dormir, car la nuit porte conseil et à l’esquisse d’hier s’ajoute souvent ce que le subconscient avait recueilli à l’insu du rêve... Des œuvres complexes et énigmatiques qui semble grouiller de djinns avec un thème central au milieu, tel un sanctuaire par exemple autour duquel s’organise des « histoires tournoyante », qui font que le tableau se lit dans tous les sens : à l’endroit il a un sens, à l’envers, il en a un autre… « Au début j‘ai voulu appelé ce tableau le zéro et il est devenu infini : c’est un tableau à quatre dimensions, on peut le lire des quatre points cardinaux. Ce qui reste comme espace vide dans la toile je le rempli de fleurs »
La tisseuse qu’il vient de finir, représente sa mère qu’il a perdu il y a quelques années : “Tu te rappelle, me dit-il, le jour où tu nous a rendu visite il y a longtemps de cela, plus exactement en 1989 et où ma mère t’avait offert à ton départ une poule avec ses oeufs? C’est elle que j’ai représenté dans ce tableau où domine le mauve, symbole d’amour, une couleur que j’aime beaucoup...” Il a mis sa mère pour ainsi dire sous la protection du marabout du lieu . Les œuvres de Tabal sont aussi celle d’un conteur qui raconte une histoire. Autour du thème central, ici la tisseuse, se développent pour ainsi dire les thèmes qui ont marqués sa vie: sa visite au marabout, ses animaux domestiques. Et quand on demande à Tabal pourquoi il place toutes les scènes de la vie rurale au même niveau sans perspective, il répond : “C’est pour les rapprocher tous du regard du spectateur...” L’autobiographie de la tisseuse se déploie autour d’elle, mais elle est aussi incorporée à son propre corps : sur son bras gauche on voit son mari allant au souk avec son couffin pour y faire son marché, à hauteur de sa quenouille se trouve sa vache laitière, l’âne de la maison est incorporé à son bras droit, des poissons colorés entourent sa poitrine généreuse et partout des fleurs des champs constellent la toile pour ne laisser aucun espace vide...Les notions de proportions et de perspective sont battus en brèche. Chaque détail est une oeuvre en soi, de sorte que chaque tableau en comporte plusieurs : le thème principal est certes “la tisseuse”, mais pour relater “sa vie”, il fallait peindre plusieurs scènes de sa vie quotidienne. On voit ainsi la tisseuse en train de traire sa vache laitière et juste à côté la même tisseuse en train de prendre son repas en compagnie de son mari qui vient de rentrer du souk comme on le voit en haut à gauche du tableau juste à côté du marabout : les différente scènes de la vie quotidienne que l’artiste dépeint ici et là sont interdépendantes les unes par rapport aux autres comme dans une bande dessinée qui raconte une histoire....... En peintre - jardinier, il fleurit son tableau comme il fleurit son jardin. Il le traite aussi comme une tapisserie : la tisseuse en médaillon central et les scènes de la vie rurale en éléments décoratifs. Les poissons et autres reptiles qui composent la poitrine de la tisseuse sont décorés par les motifs en zigzag de la tapisserie qui symbolisent l’eau dans l’imaginaire rural. Mais aucun objet n’est coloré tel qu’il existe dans la nature mais tel que l’aurait peint un enfant de l’école primaire qui imagine des oranges bleues ou des serpents verts….. Ce qui est décrit est plutôt un univers mental, relevant de ce qu’on peut appeler un état modifié de conscience semblable à celui obtenu après la con-
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sommation d’adjuvants rituel ou de drogues hallucinogènes comme chez les indiens Yaki : du pachyderme surgit un corps humain et un signe de victoire... Cette prolifération de sens, Tabal nous l’illustre magistralement avec son porteur d’eau. En haut à gauche du chapeau de paille, on voit la femme berbère du porteur d’eau en train de moudre les pépites pour préparer l’huile d’argan...De l’autre côté de l’oiseau et du chapeau, on voit maintenant que la femme du porteur d’eau a réussi après trituration à produire trois litres d’huile d’argan que son mari peut vendre au souk pour compléter son maigre gain: “J’espère, me dit Tabal, que ce porteur d’eau réussira à étancher la soif d’art chez tous les visiteurs de l’exposition de Casablanca!”.Alors que la femme du porteur est occupée au moulin, ses poules picorent tout autour d’elle créant une animation qui la distrait et lui permet ainsi de voire passer le temps plus rapidement et sans trop d’ennui... L’outre du porteur d’eau est richement décorée de vieilles pièces de monnaie, de main protectrice contre le mauvais œil, de cœurs de différentes couleurs etc. Comme chez les Regraga où existe un saint patron de “la rivière verte”, l’eau que verse le porteur d’eau est de couleur verte parce qu’il contient de la baraka, c’est à dire plus que sa réalité déjà connue. Il est à remarquer que là aussi la notion de “proportion” est battue en brèche puisque la tasse est plus grande que la femme du porteur d’eau avec son brasero et son pot de fleurs réunis...Juste en dessous de l’outre et de la besace du porteur d’eau, on voit sa femme en train de préparer le pain entourée de ses ustensiles :elle est peinte sur le pied gauche de son mari, laquelle est posée juste à côté d’un énorme poivron...Dans “le porteur d’eau” où les tonalités écarlates dominent, Tabal a choisi d’agrémenter de coquelicot son tableau, en fin observateur du printemps : lorsqu’il se repose au milieu des champs il ne voit pas le champs clairsemé de coquelicots d’une manière général, mais son cerveau “photographie” en quelque sorte, chaque coquelicot en particulier et en fait un motif quasi mystique de la renaissance du printemps... Comme les paysans au milieu desquels il vit, l’artiste associe l’abeille au nectar, aux fleurs et aux fruits de la terre : sans abeilles il n’y aura pas de fruits et sans nectar, le miel n’aura pas sa vertu curative. Pour l’artiste l’abeille est d’abord une réalité symbolique, comme métaphore de la vie et du printemps. C’est aussi une réalité coranique : il calligraphie en même temps le mot “AL-Nahla” qui la désigne dans la sourate du même nom. L’une des toutes dernières œuvres de Tabal est celle consacrée au point d’eau
dénommé “laghdir”, au centre de la vie sociale du monde rural aussi bien chez les nomades que chez les sédentaires que ce soit en Afrique du Nord ou en Afrique Noire. C’est à la fois un abreuvoir pour les animaux et un lieu de rencontre pour les humains, y compris les rencontres amoureuses : c’est là souvent que le jeune soupirant qui vient puiser de l’eau pour son hameau, découvre pour la première fois sa future égérie en train de laver le linge sur des dalles en granite, chantonnant sous la lumière matinale, d’une voix à la fois douce et voilée , un de ces airs nostalgique du terroir: aux cliquetis de ses bracelets s’entrechoquant à chaque mouvement son cœur novice s’ouvre brusquement comme une fleur du printemps aux toutes premières confidences d’amour. Une douce musique s’élève alors comme un coup de tonnerre dans un ciel serein où voltige désormais le bonheur des jeunes tourtereaux... Abdelkader Mana
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La fĂŞte Huile sur toile 132 x 132 cm
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Sans titre Huile sur toile 70 x 60 cm
Sans titre Huile et Collage sur panneau 122 x 92 cm
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La tisseuse Huile sur toile 100 x 100 cm
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Sans titre Huile sur toile 100 x 90 cm
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Le poète Huile sur panneau 56 x 42 cm
Argan Huile et Collage sur panneau 54 x 43 cm
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Transe Huile sur toile 70 x 60 cm
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Sans titre Huile sur panneau 90 x 46 cm
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autoportrait Huile et Collage sur panneau 200 x 120 cm
Gnaoua Huile sur toile 35 x 40 cm
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L’homme au chapeau Huile et collage sur toile de jute 120 x 123 cm
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Sans titre Huile sur toile 106 x 106 cm
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Sans titre Huile et Collage sur toile 100 x 100 cm
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Sans titre Collage sur panneau 63 x 53 cm
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Gnaoua Huile sur panneau 40 x 35 cm
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Gnaoua Collage sur panneau 55 x 42 cm
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L’homme au cheval Huile sur toile 70 x 60 cm
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Sidi Abdelkader Majdoub Huile et Collage sur panneau 180 x 122 cm
Sans titre Sculpture sur bois 74 x 33 cm
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Le chat Sculpture sur bois 56 x 70 cm
Maallam gnaoui Sculpture sur bois 120 x 76 cm
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Le tambour des Gnaouas Sculpture sur bois et peau 166 x 48 cm
Instrument de musique Huile sur peau 108 x 20 cm
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BIOGRAPHIE : Celle qui lui fit parcourir les chemins, comme seul compagnon son instrument de musique. Initié aux rites de possession, il fut par la suite introduit au culte des gnaoua citadins. Mais un jour il reçut le « don » de la peinture ; alors une nouvelle vie commença pour lui. « Je tiens le pinceau d’une main ferme, tandis que ma tête s’envole », c’est ainsi que Tabal définit son état quand il travaille sous l’effet de la transe. S’effaçant devant la musique qui le transcende et le pénètre, il en devient l’instrument. La peinture s’échappe de lui au rythme du tambour, qui mélange les couleurs avec force et rudesse. Les sujets s’entrechoquent, se composent dans tous les sens. Chaque parcelle est recouverte de symboles, de petits personnages vivant une histoire parallèle. Ici, tout se mêle dans une mysticité étrange et inconnue, Où rites, tradition et mémoires collectives ressurgissent et s’emmêlent à la surface de la toile.
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Tabal ne compose pas, il se laisse porter au fil de son pinceau sans souci d’esthétisme ou de recherche picturale. L’Art s’exprime sous une forme brute de toute influence ou éducation. Sans a priori, ni complexe, il se montre sous un aspect parfois dur et choquant. Il crie sa vérité, son histoire et celle de ses ancêtres esclaves venus d’Afrique. Le travail de Tabal ne se limite pas à la transe. Il possède aussi une œuvre plus narrative moins spontanée, où à la manière d’un conteur il fait revivre des scènes de fêtes traditionnelles. Ces peintures de format généralement carrés se construisent autour d’un thème central d’ où échappent des motifs à lecture circulaire. Dans ces œuvres, il utilise souvent du carton qu’il colle sur plusieurs épaisseurs pour former le relief.
Ses dernières créations ont des couleurs de plus en plus vives. Il créé aussi des sculptures peintres sur une armature en bois avec des collages de contreplaqué, isorel et carton, des représentations humaines ou zoomorphes originales d’une très grande diversité.
1992
1993
Essaouira – Galerie d’art Frédéric Damgaard
Cet ensemble de travaux fait de Tabal un artiste qui frappe fort. L’invisible du réel, les tornades de l’âme et les passions élémentaires sont ici rythmées par les tambours de ses ancêtres gnawi. Ces vibrations qui en sont la vie même et la conscience hallucinée qui crie. C’est le cœur de l’art nouveau par Tabal.
1993
Danemark – Copenhague, Festival Images of Africa
Son pouvoir de création est d’une vigueur irrésistible. La violence de ses œuvres incarne la force de l’art africain et fait de cet artiste une figure de proue de l’univers artistique d’Essaouira. EXPOSITIONS : 1989
Essaouira – Galerie d’art Frédéric Damgaard
1990 Marrakech – Galerie Nationale Bab Douk kala 1990
Agadir – Hotel Europa Safir
1990
Essaouira – Galerie d’art Frédéric Damgaard
1991
Casablanca – Complexe culturel d’Anfa
1992 Allemagne – Château Babstadt, Galerie Steiner
France – Nice, Galerie Renoir
1993 France – Nice, Musée International d’art Naif
1993 Allemagne – Wuppertal, Musée de Wup pertal 1993
Allemagne – Landau, Villa Streccius.
1994
Essaouira – Galerie d’art Frédéric Damgaard
1994
Suisse – Morges, gagnant de la coupe d’Or, prix d’Europe au 23 ème concours in ternational de la peinture primitive moderne.
1995
Rabat – Galerie Nationale Bab Rouah
1995 Rabat – Galerie Nationale Bab El Kebir les Oudayas 1996
Casablanca – Centre Culturel de Sidi Belyout
1996
Casablanca – Galerie Bassamat
1996
Suisse – Morges, Sélectionné au 25 ème concours international Pro Arte Kasper
1996
Suisse – Zürich, Musée des Arts et de la culture de l’Amérique
1997
Essaouira – Galerie d’art Frédéric Damgaard
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1997
Asilah – Galerie Aplanos
1997 Belgique – Anvers, Musée Royal des Beaux Arts 1998 Essaouira – Premier Festival de la Culture Gnaoua 1998
Portugal – Lisbonne, Exposition Universelle, Pavillon du Maroc
2012
France – galerie Linz Paris
2012 Essaouira, Alliance Franco Marocaine – il a remporté le 1 er prix – Festival Gnaoua d’Essaouira) 2012
Casablanca - Exposition collective au Loft Art Gallery
2012
Tanger – Galerie Conil
2012-2013
Salon National d’Art Contemporain. « Fadae Ennass » - Marrakech.
2013 La villa Val d’Anfa du crédit du Maroc - Casablanca
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2013
Galerie Fan Dok Rabat
2014
Italie – Galerie Sardaigne
2014
Tanger – Galerie De La Croix.
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Casablanca, mai 2014
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