AVRIL 2020 // L'INDICE BOHÉMIEN // VOL. 11 - NO.7

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JOURNAL CULTUREL DE L’ABITIBI-TÉMIS C AMINGUE - AVRIL 2020 VOL 11 - NO 7

GRATUIT

RODRIGUE TURGEON : En lutte pour le climat

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L’ART ÉPHÉMÈRE SELON JACQUES BARIL

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LES EXPOSITIONS DILUVIO ET PIPELINE

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PROJET D’IMPAC T POUR LE L AC OSISKO

+ spécial environnement

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PORTRAIT DE C ARMELLE ADAM

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UNE NOUVELLE PIÈCE DE LOUISE L AVIC TOIRE


150, avenue du Lac, Rouyn-Noranda (Québec) J9X 4N5 Téléphone : 819 763-2677 - Télécopieur : 819 764-6375 indicebohemien.org ISSN 1920-6488 L’Indice bohémien Publié 10 fois l’an et distribué gratui­ tement par la Coopérative de solidarité du journal culturel de l’Abitibi-­ Témiscamingue, fondée en

L’indice bohémien est un indice

novembre 2006, L’Indice bohémien est un journal socioculturel régional et

qui permet de mesurer la qualité de vie, la tolérance

indépendant qui a pour mission d’informer les gens sur la vie culturelle et

et la créativité culturelle d’une ville et d’une région.

les enjeux sociaux et politiques de l’Abitibi-Témiscamingue.

CHRONIQUES CONSEIL D’ADMINISTRATION

DISTRIBUTION

L’anachronique, p. 6

Marie-France Beaudry, présidente | Ville de Rouyn-Noranda

L’Indice bohémien poursuit sa distribution!

Tête chercheuse, p. 8

Anne-Laure Bourdaleix-Manin, vice-présidente | MRC de La Vallée-de-l’Or

Voici les lieux de distribution durant la période de la COVID-19 :

Histoire, p. 15

Marie-Déelle Séguin-Carrier, trésorière | Ville de Rouyn-Noranda

Environnement, p. 16

Pascal Lemercier, secrétaire | Ville de Rouyn-Noranda

MRC D’ABITIBI

De panache et de laine, p. 18

Manon Faber | Ville de Rouyn-Noranda

AMOS : COOP IGA AMOS-OUEST, IGA EXTRA COOP AMOS-EST, JEAN COUTU,

Médias et société, p. 22

Carole Marcoux | MRC de Témiscamingue

PHARMACIE PROXIM

Ma région, j’en mange, p. 27

DIRECTION GÉNÉRALE ET VENTES PUBLICITAIRES

MRC D’ABITIBI OUEST

Région intelligente, p. 28

Valérie Martinez

LA SARRE : LE CONSOMMAT +, IGA ALIMENTATION SYLVAIN BOYER INC.,

direction@indicebohemien.org

JEAN COUTU

Premières Nations, p. 24

819 763-2677

SOMMAIRE À la une, p. 5 Littérature et conte, p. 7 à 11 et 29 Arts visuels, p. 13 Événement, p. 14 Environnement, p. 17 à 21 Médiation culturelle, p. 23 Nomination, p. 24 Cinéma, p. 25 Théâtre, p. 27

VILLE ROUYN-NORANDA

RÉDACTION ET COMMUNICATIONS

ROUYN-NORANDA : IGA FAMILLE MELANGER, IGA FAMILLE ROY, IGA FA-

Gabrielle Izaguirré-Falardeau, coordonnatrice

MILLE JULIEN, LA SEMENCE, PHARMAPRIX (PROMENADES DU CUIVRE),

redaction@indicebohemien.org

PHARMACIE BRUNET

819 277-8738

ÉVAIN : DÉPANNEUR CHEZ GIBB

Ariane Ouellet, éditorialiste Lise Millette, collaboratrice à la une

MRC DE TÉMISCAMINGUE VILLE-MARIE : PROVIGO, BUREAU DE POSTE, UNIPRIX

RÉDACTION DES ARTICLES ET DES CHRONIQUES

NOTRE-DAME-DU-NORD : MARCHÉ BONICHOIX

Fednel Alexandre, Lydia Blouin, Amélie Brassard, Frédéric Charron, Gabriel David-Hurtubise, Michel Desfossés, Maurice Duclos, Chantale Girard,

MRC DE LA VALLÉE-DE-L’OR

Gabrielle Izaguirré-Falardeau, Hélène Jager, Alexis Lapierre, Philippe Marquis,

VAL-D’OR : SUPER C, LOBLAWS, IGA FAMILLE PELLETIER (CENTRE-VILLE)

Lise Millette, Yves Moreau, Ariane Ouellet, Michaël Pelletier-Lalonde,

MALARTIC : JEAN COUTU DE MALARTIC, IGA MARCHÉ DEMERS

Christiane Pichette, Kelly Poudrier, Dominique Roy, Dominic Ruel et

SENNETERRE : IGA BILODEAU

Louis-Paul Willis.

CONCEPTION GRAPHIQUE COORDINATION RÉGIONALE

Feufollet.ca

Louise Magny | MRC d’Abitibi Danaë Ouellet | MRC d’Abitibi

CORRECTION

Marianne Trudel | MRC d’Abitibi

Geneviève Blais

Sophie Ouellet | MRC d’Abitibi-Ouest Véronic Beaulé | MRC de Témiscamingue

IMPRESSION

Geneviève Béland | MRC de La Vallée-de-l’Or

Imprimeries Transcontinental

Nancy Ross | Ville de Rouyn-Noranda

EN COUVERTURE « Rodrigue Turgeon nigan Nanikana » qui veut dire : « Rodrigue Turgeon devant l’Harricana »

Certifié PEFC

Photo : Véronick Harvey

Ce produit est issu de forêts gérées durablement et de sources contrôlées

PEFC/01-31-106

2 AVRIL 2020 INDICEBOHEMIEN.ORG

www.pefc.org


- ÉDITORIAL -

LES ANGLES MORTS ARIANE OUELLET

En tant qu’Abitibienne, je fréquente souvent la route 117. Je l’aime et je la crains. Ma relation amour-haine avec elle vient du fait que je n’ai pas le choix de la parcourir chaque fois que la vie m’amène vers le sud de la province. Chaque fois, ça veut dire aussi l’hiver, quand les conditions météorologiques ne sont pas favorables et que le ministère des Transports et ses sous-traitants semblent partis en vacances en Floride. Trop souvent, j’ai vu la 117 entretenue comme si elle était une route de service non essentiel de dernière catégorie, avec son lot d’accidents tragiques qui fauchent les vies. Avec ses voies de dépassements souvent mal déneigées, des voitures fracassées enfoncées dans les bancs de neige et les ambulances qui croisent ma route à toute allure dans l’espoir d’arriver à temps. Chaque fois, je me demande combien ça coûte à la SAAQ et à la RAMQ, tous ces accidents, par opposition à ce que ça aurait coûté de mieux déneiger cette journée-là. On réfléchit beaucoup trop souvent en îlot, budget par budget, comme si la vie fonctionnait par petits tiroirs distincts. Sans compter les tragédies humaines qui ne se chiffrent pas en dollars. Un projet de gazoduc se dessine et s’apprête à traverser l’Abitibi-Témiscamingue. Non seulement ce projet de gazoduc risque de créer une cicatrice indélébile sur notre territoire, mais je crains qu’il ait le potentiel de diviser aussi les communautés qui sont concernées. Qu’est-ce que ce gazoduc peut avoir de positif pour notre collectivité et celle du Québec? Quelques contrats très lucratifs pour des entreprises de génie civil, probablement. Si quelqu’un peut m’éclairer sur les avantages réels du gazoduc et d’une éventuelle usine de liquéfaction au Saguenay, s’il vous plaît, éclairez-moi. Selon une annonce faite en septembre 2019 par le président de Gazoduq, l’Abitibi-Témiscamingue recevrait annuellement 14 M$ de l’entreprise via le Fonds pour les communautés, et ce, pour la durée de vie du projet estimée à 25 ans. J’ai soudainement beaucoup de questions sur la valeur relative des choses. En quoi cet argent garantirait-il un usage bénéfique pour le plus grand nombre? Il serait mis en garantie en cas d’urgence? Est-ce que ce montant tient compte de la perte de valeur immobilière à long terme des terrains traversés par un gazoduc? Et de la perte d’usage de superficies agricoles et forestières? Quels seront réellement les impacts des émissions fugitives éventuelles (et prévisibles)? Et les impacts environnementaux pour une énergie 84 fois plus polluante que le CO2? Est-ce que l’argent peut vraiment compenser de tels risques au détriment du climat et des populations locales et mondiales? Et dans un angle plus abstrait, peut-être, comment peut-on chiffrer la valeur du vivant dans le cas d’une catastrophe environnementale dans un lac ou une tourbière? Comment peut-on chiffrer la valeur de la vie animale, de la beauté d’un paysage? De l’état sauvage? Ou la perte de cette valeur lors de la dégradation des lieux? Il y a tellement d’angles morts lorsque vient le temps

Chaque espèce qui disparaît à cause de l’activité humaine appauvrit notre pharmacie, notre garde-manger, sans compter notre esprit et notre santé mentale.

de mettre des chiffres sur la valeur des choses. Pour tout le reste, il y a des investisseurs. Et des lobbys, qui fabriquent des discours cousus de mensonges et de demi-vérités mises à leur profit. Vous trouvez boiteuse ma comparaison avec l’entretien de la route 117? Je pense en fait que de choisir ce qui coûte le moins cher est souvent la pire des options à moyen et long terme. Parce que le coût des choses que l’on consomme ne tient pas encore compte du coût environnemental et humain du « après ». Le coût environnemental d’une bouteille d’eau à usage unique ne se reflète pas encore dans son prix d’achat. Il le faudra tôt ou tard, et lorsque la bouteille coûtera 3 $ au lieu de 0,25 $, on boira l’eau du robinet, comme avant. Idem pour les transports en commun, les vêtements, les jouets, les innombrables gugusses inutiles des magasins à une piastre. À l’heure d’écrire ces lignes, Québec vient de déclarer l’urgence sanitaire. Le coronavirus et la COVID-19 sont sur tous les écrans, dans tous les cauchemars. Les écoles ferment pour une durée indéterminée. Plus tôt cette semaine, Québec annonçait un fonds spécial de 1 G$ débloqué pour mettre en place des mesures d’urgence pour faire face à la crise sanitaire (et économique) qui s’annonce. C’est sans doute la meilleure chose à faire. Mais je ne peux m’empêcher de faire des parallèles avec la crise climatique et de constater que lorsqu’il y a une volonté politique de prendre des mesures drastiques pour la santé publique, c’est possible de le faire. Dommage que ça prenne un tel exemple pour que l’urgence se fasse comprendre, tant dans les maisons qu’au sein des gouvernements. Je suis convaincue que le fleuve Saint-Laurent a plus à apporter à la vie, humaine et animale en demeurant le plus sauvage possible. Sa valeur ne devrait pas se compter par la quantité de porte-conteneurs et de méthaniers qui y naviguent. Il faut totalement revoir notre notion de PIB pour mesurer la valeur de notre économie, et inclure dans la colonne des « moins » tout ce qui pèse sur le vivant et qui l’appauvrit de jour en jour à la vitesse d’une pandémie. Chaque espèce qui disparaît à cause de l’activité humaine appauvrit notre pharmacie, notre garde-manger, sans compter notre esprit et notre santé mentale. Il faudrait autant de courage politique pour agir à garder le vivant bien vivant.

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ISABELLE HAYER

4 AVRIL 2020 INDICEBOHEMIEN.ORG


- À LA UNE -

RODRIGUE TURGEON, LE JUSTICIER LISE MILLETTE

Personnalité médiatique bien connue, Rodrigue Turgeon, du haut de ses 26 ans, a déjà mis du sable dans l’engrenage du projet minier Authier de Sayona Québec en plus de s’impliquer auprès du groupe Gazoduq, parlons-en, qui s’oppose au projet de Gazoduc Inc et de GNL Québec.

« Ça ne m’a jamais empêché de dormir, commence-t-il. Bien sûr, on peut ressentir de l’anxiété pour les choses qu’on ne contrôle pas, mais on a un contrôle sur nos propres actions et c’est dans l’action qu’on combat ce sentiment », enchaîne-t-il.

Le jeune Amossois, titulaire d’un baccalauréat en droit, d’un diplôme de deuxième cycle en common law et droit transnational et étudiant à la maîtrise en biologie à l’Université de Sherbrooke, a aussi participé à la Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques à Madrid en décembre 2019 (COP25) et a reçu le prix Porteur d’espoir 2019 remis par le Jour de la Terre.

Régulièrement, le jeune étudiant dit recevoir de la rétroaction, des commentaires des gens de la région qui se disent contents et satisfaits parce qu’ils ont un porteparole, une voix dans la région. Néanmoins, il ne fait pas du militantisme une manière de vivre.

« Je savais que j’étais différent », lance-t-il en entrevue. Une manière d’anticiper qu’il trouverait son propre chemin, dans une région où travail rime souvent avec tâches industrielles et manuelles.

« Je ne vois pas ça comme une carrière, mais plutôt comme un mode de vie. Pour le moment, je m’active à consolider un réseau de relations. Je crois que globalement, il faut se consolider comme société civile québécoise ». Il y voit une manière d’assurer une cohérence collective par rapport aux enjeux futurs.

UNE IMPLICATION ENRACINÉE

La force du nombre et des citoyens et citoyennes qui remettent les choses en question, il en fait aussi une question d’équilibre démocratique, qui doit néanmoins s’effectuer dans le respect.

« Je m’implique toujours dans des causes environnementales, mais c’est l’aspect social qui m’importe d’abord », tient à nuancer Rodrigue Turgeon. Son premier véritable combat, Rodrigue Turgeon l’a mené à la Polyvalente Laforest d’Amos. « Dès le secondaire, j’ai commencé à m’impliquer et un des premiers combats a été les ustensiles à la cafétéria de l’école. Ils étaient distribués en sachets. Ça n’a pas été facile, il y a eu un peu de résistance, mais à la fin de l’année, il n’y en avait plus », a-t-il résumé. Depuis, les luttes se sont ajoutées au fur et à mesure qu’ont émergé certains enjeux territoriaux. Près de la nature, près de la communauté de Pikogan également, Rodrigue Turgeon a développé une sorte de sentiment d’urgence pour la protection de l’environnement. « Mon implication se concentre à impliquer les gens de la région dans des luttes contre les changements climatiques et pour la justice tout court. De manière générale, les règles sont faites en fonction que le projet sera accepté un jour. Le processus de consultation, j’en ai fait une question d’équité », plaide-t-il. Le sens de la justice transcende l’implication et les efforts de transmission de l’information de Rodrigue Turgeon. Ses études en droit lui confèrent une longueur d’avance lorsque vient le moment d’analyser certains projets ou documents. « Comprendre l’environnement légal implique un certain degré d’implication, mais mes études font en sorte que je comprends ce langage », explique-t-il.

LE RÔLE DE LEADER : UN POIDS? La pression peut être forte lorsqu’on se frotte à des multinationales ou à des projets d’envergure. Rodrigue Turgeon assure qu’il sait se prémunir contre le caractère anxiogène d’être sur la ligne de front.

« Les prises de position peuvent susciter des discussions et je trouve que c’est sain, et je m’efforce d’amener les choses de manière respectueuse. J’avoue qu’étudier en droit m’a permis de comprendre la limite à ne pas franchir. Je connais la loi sur la diffamation », précise-t-il en souriant.

DES CHOIX POUR L’AVENIR « La mobilisation fluctue toujours, mais c’est une course à relais », souligne Rodrigue Turgeon qui constate qu’il y a toujours une forme de recommencement lorsque vient le moment de s’investir pour une cause. En marge des luttes, il caresse le rêve de descendre la rivière Harricana, d’Amos jusqu’à la BaieJames. Le projet est inscrit au menu de l’été, si possible. Ce besoin de déconnexion est essentiel. « On est des bénévoles qui se retrouvent avec la langue à terre par rapport à de grandes entreprises qui ont d’importants moyens. Mais derrière ces groupes, ce n’est pas l’identité de l’Abitibi-Témiscamingue, ce n’est pas non plus le mouvement étudiant ni les jeunes, c’est tout un mouvement social. En fait, nous sommes tous des Henri Jacob : on le fait pas pour gagner, on le fait parce qu’il faut le faire », résume-t-il. Au-delà des projets particuliers, Rodrigue Turgeon ajoute que des réflexions de fond devront être faites et peut-être aussi un examen de conscience. Selon lui, il est temps de revoir certaines activités de loisirs et pratiques individuelles. « La nécessité de croissance économique s’accompagne d’une augmentation de la pression sur le territoire. Il y a peut-être lieu de reconnaître que certaines choses sont révolues. Des machines à polluer pour le fun… je trouve ça aberrant, il y a peut-être lieu de revoir les loisirs », conclut-il.

INDICEBOHEMIEN.ORG AVRIL 2020 5


- L’ANACHRONIQUE -

À NOUS PHILIPPE MARQUIS

La neige poudroie fortement en ce 17 mars. Je l’admire tourbillonner, tomber des arbres et, par moments, cacher le paysage. Comme beaucoup d’entre nous, je suis reclus. J’observe donc les flocons de ma fenêtre. De la même manière, nous regardons le monde, l’humanité, au travers de nos écrans. Heureusement, d’ici, la vie est en trois dimensions comme elle mérite de l’être…

d’être humain et d’aider nos semblables réapparaît dans les pires moments. Ainsi, cet État que l’on s’est évertué à casser à coup de privatisations et de baisses d’impôts depuis trente ans joue son rôle : un outil collectif capable de prendre soin de nous. Les membres du personnel des services de santé, malmenés par les coupes budgétaires, la réforme Barrette, les shifts doubles et les petits salaires deviennent nos « anges gardiens ». Ils l’ont toujours été, mais là, c’est reconnu par les dirigeants. Il était temps…

Cette neige me fait penser à la tempête de mars 1947. Je n’y étais pas, mais je sais qu’elle a submergé la région. Des photos d’époque montrent des trains ensevelis entourés d’ouvriers déblayant la voie ferrée. Une autre histoire me vient à l’esprit, ma grand-mère me l’a racontée. En mai 1963, une tornade a sévi au nord de La Sarre. Elle a soulevé des granges et tué des animaux de ferme. Dès le lendemain, la communauté se serrait les coudes en se mettant à l’ouvrage pour secourir les familles affectées et remettre les bâtiments sur pied. Plus près de nous, ou si loin déjà, on se rappelle le déluge du Saguenay en 1996 et le verglas à l’hiver 1998, sans parler des crises économiques. Dans tous ces moments, les citoyennes et les citoyens se sont aidés comme il se doit. Comme maintenant!

Autre surprise, on fait confiance à la science alors que les États hésitent toujours à prendre les mesures nécessaires pour l’indispensable virage environnemental. Et nous pouvons, avec la crise virale, saisir comment les bouleversements climatiques annoncés menaceront nos existences. Il vaut mieux, faut-il le répéter, s’organiser pour éviter le pire. Il est grand temps.

Notre époque nous fait aller à toute vitesse. Or, nous voici brutalement ralentis, détournés des priorités habituelles, obligés de réfléchir, de prévoir le pire et surtout, de penser aux plus mal pris.

Parce qu’on peut, si on se regroupe, modifier nos habitudes, changer nos façons de faire et nous arrêter pour bien saisir à quel point notre monde de consommation et de plaisirs superficiels ne repose sur rien d’autre qu’une obéissance aveugle à la loi du marché. L’essentiel est ailleurs que dans le profit. Nous comprenons, maintenant, à quel point nous sommes fragiles, mais aussi qu’il est possible de vivre autrement.

Au milieu de cette tempête, je suis frappé par l’immense besoin que nous avons d’être ensemble, de nous toucher, de nous voir, de nous parler, qui que nous soyons. Le besoin

OCCASION SPÉCIALE

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6 AVRIL 2020 INDICEBOHEMIEN.ORG


- CONTE -

COR À CONTES : DU SPECTACLE AU RECUEIL DOMINIQUE ROY

Le début du mois de mars a été fort occupé pour les Éditions du Quartz et les auteurs Julie Renault et Frédérik Fournier, qui lançaient en grande pompe le recueil Cor à contes. En effet, la promotion s’est déroulée en trois temps, à trois endroits différents : le 5 mars à Rouyn-Noranda, le 6 mars à Ville-Marie et le 12 mars à Montréal. Le recueil regroupe huit contes à saveur régionale. Les activités et les lieux auxquels les auteurs font référence reflètent quelques réalités d’hier et d’aujourd’hui pour les cinq MRC de la région 08 : la chasse, la drave, la Fonderie Horne, la cathédrale, le parc Opémican et l’esker n’en sont que quelques exemples. Même s’ils évoluent dans des univers imaginaires, les personnages et leurs missions sont des plus crédibles, en grande partie grâce à la présence de ces référents culturels, qui permettent au lecteur de l’AbitibiTémiscamingue de se trouver en terrain connu. « Nous avons d’abord brainstormé sur ce qui nous inspirait le plus : le paysage, les gens, le sentiment d’appartenance. Puis, nous nous sommes beaucoup renseignés sur l’actualité régionale. Ce qui nous a sauté au visage, c’est la façon dont nous exploitons à une vitesse folle nos ressources, et pas toujours de la façon la plus durable possible, disons. Et c’est paradoxal, parce que ce qui nous détruit, c’est aussi le cœur même de la région, c’est-à-dire ce qui lui permet de vivre. La thématique de la nature qui reprend le dessus sur l’homme est apparue assez rapidement et habite chacune de nos histoires », explique Julie Renault. Mais avant d’être mis sur papier, les contes ont été présentés sous la forme théâtrale, puisque les coauteurs sont avant tout des comédiens spécialisés en interprétation théâtrale. Depuis l’été 2018, les contes ont été présentés oralement à plusieurs reprises, et c’est lors d’une représentation à la Maison Dumulon que les auteurs ont été approchés pour transformer le spectacle en recueil. « Les mots transmis à l’oral avec les intonations des acteurs et les appuis visuels de la mise en scène ne sont pas livrés de la même façon que dans un livre en tête-à-tête entre les pages et le lecteur. Comme c’était notre premier contact avec la littérature, c’était toute une épreuve! Heureusement, Marie-Noëlle Blais, qui a succédé à Jean-Guy [Côté] aux Éditions du Quartz, nous a bien accompagnés dans cette aventure. Le théâtre, c’est quelque chose d’éphémère. Ça passe, le temps d’une soirée. Après, c’est de l’ordre du souvenir. Un livre, c’est concret. Ça traverse le temps, on peut y retourner quand on veut », poursuit la co-auteure. La Rouynorandienne Julie Renault et le Témiscamien Frédérik Fournier planchent actuellement sur d’autres projets. Ils poursuivront la tournée de Cor à contes cet été et auront à nouveau le plaisir de communiquer ce qu’ils ressentent pour leur région, tant auprès de ceux qui en sont originaires qu’auprès des citoyens des grands centres. Cor à contes est en vente dans toutes les librairies du Québec. INDICEBOHEMIEN.ORG AVRIL 2020 7


- TÊTE CHERCHEUSE -

LE VIEUX MONDE QUI TOUSSE DOMINIC RUEL

C’EST LE TEMPS DES SEMIS.

Préparez-vous à embellir votre espace!

J’ai attendu le plus tard possible avant d’envoyer ma chronique. J’attendais les derniers détails de cette crise de la COVID-19 qui met littéralement la planète à genoux. L’Asie, l’Europe, l’Amérique et l’Afrique s’isolent. Les frontières et les écoles ferment, on nous demande de rester à la maison et de limiter nos déplacements. Des mots reviennent dans notre vocabulaire : pénurie, confinement, rationnement. Ici, au Québec, il faut reconnaître le travail remarquable du premier ministre Legault. Il fait preuve de leadership et de calme. Il incarne l’État. Il parle clairement et sincèrement, il montre le chemin et les Québécois, en général, le suivent. Je ne parle pas de Trudeau, errant et décevant. Quelques lumières apparaissent dans ce ciel gris foncé : la Russie et la Chine semblent avoir éradiqué l’épidémie, on travaille sur des traitements et des vaccins qui semblent efficaces. Il y aura un après COVID-19. Il sera difficile de revenir comme avant, comme si de rien n’était. Nos modes de vie et nos rapports au monde seront changés. Permettez-moi de penser à l’après-virus, même si, en ce matin du 18 mars, des gens sont encore malades et d’autres mourront partout. C’est le retour de l’État vers qui se tournent tous les regards en cas de crise. Les libertariens devront rester cachés un bon bout de temps. C’est l’État qui protège, qui soigne, qui paie. Même les entreprises, bien contentes de crier à la liberté d’entreprendre et contre les impôts trop élevés – même elles! – demandent au gouvernement de les aider. L’idée de frontière revient aussi. J’aime les mots de Jean-François Kahn, vieux journaliste au regard lucide : « Il était ringard de ne pas célébrer l’ouverture à tout vent. Il est devenu irresponsable de ne pas exiger la fermeture à double tour. » Quand on revient aux fondamentaux comme la vie, la mort ou la guerre et la paix, les grandes organisations (ONU, G7, Union européenne) sont aux abonnés absents. C’est l’État-nation qui fait le travail. C’est notre rapport à la Chine et à la mondialisation qui sera remis en question aussi. Cette crise met en lumière notre dépendance à la Chine, devenue l’atelier du monde, d’où nous proviennent la grande partie de nos médicaments, nos produits technos, les pièces de rechange de nos machines. La Chine, c’est 35 % de la production mondiale. C’est trop! Ah! Mais la modernité, c’était le partage des fonctions, c’était partager la production partout. Erreur. Il faudra revenir aux productions locales et nationales, aux circuits courts et à une consommation moins effrénée. À des voyages en Gaspésie et au Lac-Saint-Jean aussi. Puis, finalement, on aura à inventer des solidarités nouvelles. Retrouver la valeur et l’importance de l’ami et du voisin de palier. Aider son prochain. Il est bien d’aller creuser des puits au Togo, mais la vieille dame au coin de notre rue a peut-être besoin d’aide pour faire ses courses. On reviendra peut-être à plus de simplicité et d’authenticité. À un peu plus de chacun chez soi?

8 AVRIL 2020 INDICEBOHEMIEN.ORG


- CONTE -

COMME UNE BOUTEILLE À LA MER : UN NOUVEAU SPECTACLE POUR GUILLAUME BEAULIEU HÉLÈNE JAGER

Après avoir bouclé le projet Aînés d’exception, démarré il y a plus de deux ans, M. Beaulieu a joué un rôle de passeur depuis septembre auprès de plus de 110 classes de la région, à qui il a transmis ses contes en donnant des ateliers. Il met maintenant l’accent sur le prochain spectacle, Comme une bouteille à la mer, dont la diffusion est prévue le 24 avril à Ville-Marie. Cette date pourrait toutefois être appelée à changer, vu les circonstances. Pour ce projet, le processus de création a été instinctif et collaboratif. M. Beaulieu s’est d’abord imprégné de plusieurs lectures du recueil de contes du même nom, publié par Gilles Vigneault. Il a ensuite sélectionné ses textes préférés, ceux qui ressortaient par leur manière de faire réfléchir. Avec Étienne Jacques à la mise en scène, il a affiné le choix des textes afin d’obtenir un ensemble cohérent regroupé par thématiques :

l’enfance, l’amour, la liberté et la Côte-Nord. Les touches finales ont été discutées avec la pianiste Suzanne Blais qui a harmonisé la musique et les mots. Au cœur de ce processus, M. Beaulieu a réalisé son attachement aux histoires de Vigneault. Son admiration pour l’artiste date de son adolescence, pendant laquelle il se délectait de ses albums. « Ses contes représentent un enrichissement de notre être profond lorsqu’on prend soin de les savourer. Ils sont un appel au ralentissement, à s’asseoir au bord de la mer pour réfléchir avec une bouteille à message à la main », dit-il. M. Beaulieu souhaite ardemment transmettre sa passion pour permettre à la jeune génération de prendre contact avec l’œuvre de cet immortel national. Ce n’est pas pour rien que les artistes de la relève se bousculent pour suivre ses classes de maître : son rapport à la langue est franc, à la vieillesse est sage, à l’enfance est contemporain, estime M. Beaulieu. Guillaume Beaulieu se sent investi d’une mission de transmission. Il souhaite à tous les jeunes qu’il a rencontrés d’avoir la curiosité de ceux qui les ont précédés, la capacité de comprendre qu’avant eux, les anciens ont aimé, travaillé, donné tout ce qu’ils étaient capables de donner pour transmettre ce qu’ils croyaient bon et passer le relais de la vie à la génération suivante. Car plus on se donne avec cœur, plus on assume nos choix, mieux on peut prendre sa place en tenant compte de son environnement, malgré les erreurs dont on apprend toujours.

PHOTOS : COURTOISIE

La passion de Guillaume Beaulieu pour les histoires remonte à loin. Enfant et jusqu’après l’âge auquel les enfants cessent de se passionner pour les contes chuchotés au coucher, il écoutait son père animer les histoires dont il changeait parfois la fin pour créer une intrigue différente. Cet amour pour les contes le pousse, devenu adulte, à intégrer des histoires dans les visites touristiques qu’il anime en tant que guide dans son Abitibi natale. Ces premières expériences à s’approprier les histoires et à les faire vivre au public sont suivies de rencontres, formations et participation au cercle des conteurs du Québec. À force de pratiquer cette passion, et poussé par la demande du public, Guillaume Beaulieu devient finalement conteur à temps plein.

Illustration : Manon Gervais Dessureault

INDICEBOHEMIEN.ORG AVRIL 2020 9


PAP-GouvQc-Covid19-INDICE-BOHEMIEN-10x10,375-1877-FR-COUL-HR.pdf

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2020-03-24

17:41

La maladie à coronavirus (COVID-19) cause une infection respiratoire pouvant comporter les symptômes suivants :

Fièvre

Toux

Difficultés respiratoires

On se protège! Lavez-vous les mains souvent à l’eau tiède courante et au savon pendant au moins 20 secondes. Utilisez un désinfectant à base d’alcool si vous n’avez pas accès à de l’eau et à du savon. Restez à la maison : n’allez pas à l’école, au CPE ou à la garderie. Évitez si possible les endroits publics et privilégiez le télétravail.

Protégez vos proches, particulièrement les aînés et les personnes vulnérables, en évitant de leur rendre visite si vous êtes malade. Il est recommandé à toute personne qui revient d’un pays étranger de s’isoler à la maison pour une période de 14 jours et de surveiller ses symptômes.

Québec.ca/coronavirus 1 877 644-4545

10 AVRIL 2020 INDICEBOHEMIEN.ORG


- LITTÉRATURE -

UN PREMIER ROMAN POUR PHILIPPE MASCHINOT DOMINIQUE ROY

C’est en décembre 2019 que Philippe Maschinot, un Français originaire d’Alsace établi à RouynNoranda depuis 20 ans, publiait son premier écrit, Le poids du sac, aux Éditions En Marge. Dans ce roman de développement personnel, le personnage de Pierre lui permet de raconter son histoire, une tranche de vie où la marche longue distance s’est avérée rédemptrice après des épreuves importantes. Quelque 4500 km lui ont permis de prendre le temps de vivre autrement. Les remises en question qui font partie intégrante du roman sont le fruit des réflexions qui ont traversé l’esprit de Philippe Maschinot. L’histoire de Pierre est le reflet de celle de l’auteur. « Un premier roman possède souvent la force de l’autobiographie en évidence. Pierre est une partie de moi, probablement, mais aussi de tous ces moments de partage avec d’autres souffrances et de libération lors de mes longues marches. Peu de chapitres sont fictifs. Ils sont communs à mon histoire non embellie. Ils sont aussi le réel de certains passages de mes notes et des histoires de rencontres », précise-t-il.

COURTOISIE

Volontairement, les lieux parcourus par l’auteur pendant ses 172 jours de marche ne sont pas mentionnés dans le roman. Dans l’optique de développement personnel, il voulait d’abord et avant tout que le lecteur puisse trouver sa voie à travers cette histoire. Bien sûr, les rencontres sont au cœur de ce voyage intérieur qui se dessine à même la route arpentée. Les échanges, les accolades, les sentiments de fraternité ont tous un impact psychologique sur la transformation qui s’opère. Dans ces relations éphémères, le marcheur trouve de nombreuses réponses à ses interrogations. « As-tu pensé que la recherche de soi passe peut-être par la recherche des autres? » peut-on lire. L’analogie entre le titre et le contenu du roman est frappante. La lourdeur du sac est le poids psychologique que l’homme transporte sur ses épaules : la déception d’un échec professionnel, la détresse d’une rupture amoureuse, la culpabilité d’être un père absent le temps de ce ressourcement… Au fil des distances, le poids s’allège et le poids plume de la libération prend tout son sens.

mon ego, seulement pour me dire merci d’avoir osé et d’avoir su mettre des mots aussi sur la souffrance masculine. »

Tel le marcheur, Le poids du sac chemine. D’abord édité en Europe, il en est à sa deuxième vie aux Éditions En Marge. La réaction est positive. « Je n’ai rien dit à mon entourage. Seul mon fils savait. Quand le livre est arrivé dans mes mains, j’ai ressenti de la peur. Puis, les messages de ma famille, de mes amis et des premiers lecteurs ont été salvateurs. Non pour flatter

Déjà, Philippe Maschinot connaît le lieu de sa prochaine destination, mais pas la date. Quand le jour viendra, il prendra son sac, sa tente et ses gamelles. En attendant, l’écriture du prochain roman est en cours. « Le fil conducteur existe. Les mots viennent. Ils s’écrivent et racontent une histoire du temps… Celui que l’on prend. Ou pas… »

INDICEBOHEMIEN.ORG AVRIL 2020 11


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12 AVRIL 2020 INDICEBOHEMIEN.ORG


- ARTS VISUELS -

L’ART ÉPHÉMÈRE DANS UN PAYS D’HIVER LISE MILLETTE

Pour Jacques Baril, une sculpture de neige qui s’évanouit sous un soleil trop fort, ce n’est ni un risque ni une tragédie. Ce qui importe n’est pas tant le résultat, comme le voyage qui a été nécessaire pour y arriver. « On met la même énergie et le même espoir sur une œuvre éphémère pour arriver au bout de notre projet et le réaliser. On travaille fort, mais à l’instant même où on dit que l’œuvre est finie, on l’abandonne d’une certaine manière », commence M. Baril. L’artiste ajoute que souvent, la réalisation d’œuvres éphémères dans l’espace public est aussi un exercice de groupe. « Il en reste presque toujours un souvenir assez impérissable du travail et de l’énergie investis pour faire ça, et des souvenirs de ceux avec qui on était. C’est sûr qu’il y a un résultat à la fin qui est émouvant… et on sait que le regard qu’on va jeter à la fin, c’est un regard qui ne va plus exister après », illustre-t-il.

Cette forme de renoncement, Jacques Baril ne la voit pas comme un deuil, mais comme une libération. « Certains artistes développent un attachement à leurs œuvres, comme si on traînait quelque chose à l’arrière de soi. Pour moi, c’est une libération parce que je reprends mes ailes pour aller vers un autre projet. Au fond, l’œuvre je ne l’abandonne pas, je la donne au temps et à l’environnement ». Son plus récent projet a été réalisé dans le cadre des Nuits (bi) polaires. Il a réalisé un ensemble qui prenait la forme de grandes lanternes dans un concept collectif qui intégrait aussi le travail de Christian Ponton et de Valentin Foch, dans un projet de sculpture sur neige et d’art numérique. « Je voulais travailler sur l’idée de la lumière, en partant du point de vue qu’en hiver, la lumière on en a moins. J’ai proposé d’y insérer des lanternes et je me suis inspiré de la forme des lampes des années 1950 pour créer ma sculpture », explique-t-il.

L’ART À L’ÈRE DU CONFINEMENT

JACQUES BARIL

Il ajoute que, même si au terme de l’exercice, l’œuvre se détériorait dans l’instant suivant, il accepterait cette finalité. « Ça ne me dérangerait pas parce que c’est tout le contexte de réalisation de l’œuvre qui est intéressant. C’est vivre le moment présent », résume-t-il.

Sébastien Lemire - Député d’Abitibi-Témiscamingue

Avec la communauté artistique et culturelle d’ici! Contactez-nous pour connaître les mesures de soutien qui sont offertes pour vous.

La pause imposée par la gestion du coronavirus a forcé Jacques Baril à suspendre plusieurs projets. « Avec le confinement, j’ai dû abandonner deux semaines d’activités dans les écoles. Chaque hiver, je fais une tournée pour faire des centaines de sculptures sur neige avec les jeunes. Cette année, ça s’est arrêté brusquement », confie-t-il. Cet isolement ne sera pas oisif pour lui qui en profite pour poursuivre deux projets d’envergure : une œuvre qui sera placée à l’entrée sud de Malartic, avec le concours de la minière Canadian Malartic; et une autre pour l’île Nepawa. « Cet autre projet est une sculpture qui raconte un peu le périple des Madelinots qui sont venus s’y installer. Cette œuvre sera visible du lac Abitibi », affirme-t-il. Le temps est peut-être lui aussi éphémère, mais Jacques Baril sait que le temps a simplement besoin d’être habité.

www.lemire.info INDICEBOHEMIEN.ORG AVRIL 2020 13


AU CENTRE D’EXPOSITION D’AMOS...

- ÉVÉNEMENT -

Ce que vous pourriez voir dès que l’accès du public à notre bâtiment municipal sera de nouveau possible…

PAS D’ARTICLE SUR LE FESTIVAL DES LANGUES SALES 2020

Jusqu’au 3 mai

L’ARCHE DE NOÉ selon Claude Lafortune

FEDNEL ALEXANDRE

MUSÉE DES CULTURES DU MONDE Je devais écrire un texte sur le Festival des langues sales (FLS) 2020. Si je l’avais fait, je vous aurais parlé de la programmation dont le dévoilement était prévu le 12 mars. Du travail colossal des salariés, des bénévoles. Je vous aurais informé de l’ajout d’une journée à la programmation habituelle. De la création de nouveaux concepts de spectacles. De la réservation de nouvelles salles. De la mise à jour du système de billetterie. J’aurais glissé un mot aussi sur le rôle du Festival dans le développement culturel et socioéconomique régional. D’ailleurs, le Festival a été créé par le Carrefour Jeunesse Emploi d’Abitibi-Ouest pour dynamiser la région et y favoriser le retour des jeunes.

Exposition itinérante

Musée des cultures du monde

DU CONDITIONNEL CONTREFACTUEL

Jusqu’au 10 mai

DILUVIO MYRIAM LAMBERT

Si le festival avait eu lieu, ce sont 1700 festivaliers qui seraient attendus à La Sarre du 22 au 25 avril, soit le double des éditions précédentes. Ce sont des artistes renommés qui seraient venus se produire. C’est une quinzaine de commerces locaux qui auraient bénéficié des retombées économiques du festival. C’est une vingtaine d’artistes locaux qui seraient impliqués dans l’événement. Ils auraient été tout aussi nombreux en provenance de l’extérieur de la région. Bref, je n’aurais pas omis de mentionner les efforts déployés pour faire de cette 13e édition un événement mémorable. J’aurais fait tout cela pour vous donner une idée de l’énergie et de l’argent investis. Mais vous n’en saurez rien. Je ne ferai pas cet article sur le FLS. Le 19 mars, la responsable des communications a publié un communiqué pour annoncer le report du festival à avril 2021. Pourquoi faire un article sur un événement mort dans l’œuf? À la place de cet article, je vous parlerai du conditionnel contrefactuel. Oui, vous le connaissez. Vous en faites même usage. Le conditionnel contrefactuel désigne ces situations que nous envisageons possibles, mais qui restent non avérées. Il n’est pas nécessaire de rappeler que notre vie tient à un souffle. En revanche, s’il était nécessaire d’illustrer la précarité dans laquelle cette crise plonge le milieu culturel, je pourrais prendre en exemple le FLS. Pour juguler la fragilisation des infrastructures culturelles, il nous faudra être solidaires. En soutenant les artistes, les artisans, les travailleurs autonomes. Il faudra faire vivre les petits commerces au lieu d’enrichir les multinationales. Je vous dis cela pour vous empêcher de recourir à ce conditionnel contrefactuel : « Si j’avais su, j’aurais fait quelque chose! » Dans ce cas-là, ce sera un regret inutile. Mais rassurez-vous, le conditionnel contrefactuel peut être aussi drôle. Exemple: « Si j’étais mort depuis plusieurs années (conditionnel contrefactuel qui a de bonnes chances de ne plus l’être avant la fin de ce siècle), mon traducteur […] aurait pu aboutir tout seul à l’une des conclusions suivantes […] ». Umberto Eco a écrit cette phrase dans son livre Confessions d’un jeune romancier (2013). Il avait 81 ans. Il est mort en 2016. Il en avait 84.

Installation numérique

JEAN CARON

Alexandre Barrios

Suivez-nous sur Facebook, nous tenterons une diffusion différente de l’exposition Diluvio !

14 AVRIL 2020 INDICEBOHEMIEN.ORG


- HISTOIRE -

LE RECYCLAGE DE NOS ANCÊTRES CHRISTIANE PICHETTE ET KELLY POUDRIER, SOCIÉTÉ D’HISTOIRE ET DE GÉNÉALOGIE DE LA SARRE

Aux débuts de la colonisation, rien ne se perdait. Au printemps, dès que la neige commençait à fondre, tous se mettaient au travail. Les hommes disaient : « Ah! C’est l’ouvrage qui se découvre. » Le réveil printanier réclamait une participation non moins intensive de la part des femmes qui, quant à elles, rangeaient la production artisanale réalisée au cours de l’hiver pour se livrer au grand ménage. Par la suite, elles procédaient au consommage. Cela consistait à rapporter tous les résidus des animaux abattus au début de l’hiver et impropres à la consommation, qui étaient entreposés au froid et hors de la portée d’autres bêtes sauvages. On préparait une solution alcaline avec les cendres et de l’eau que l’on mettait dans un chaudron de fer, puis on la faisait bouillir un certain temps. Après quelques heures d’ébullition, on ajoutait les déchets de cuisine – os, couenne, graisse – qui avaient été mis en réserve dans un bâtiment durant l’hiver. Ainsi, on séparait le gras des déchets. On mettait ensuite le suif dans des contenants. Plus tard, ce gras servirait à fabriquer du savon du pays.

É L U chain o r N p AN à l’an orté

rep t n e m

DESIGN GRAPHIQUE � CC CONSULTANTS

événe

À l’été ainsi qu’à l’automne, les femmes procédaient à la mise en conserve des fruits et des légumes. Le travail terminé, elles décousaient de vieux vêtements pour en faire des nouveaux. Avec de vieux paletots, elles confectionnaient de jolis manteaux pour leurs enfants. Avec les morceaux restants, elles fabriquaient des courtepointes chaudes. On se souviendra également que, dans le temps, il n’y avait pas de ramasseur de vidanges, on entassait ce qui ne servait plus dans des granges ou des remises et ce qui était endommagé était réparé ou bien, quelques fois, monté au haut de la terre à un endroit qui servait de dépotoir. Il n’était pas rare d’y retrouver de vieilles bouteilles, des morceaux de fer rouillés, et parfois de vieux chars dans lesquels poussaient des arbustes qui avaient défoncé le plancher. Les moins gênés jetaient tout simplement leurs « cochonneries » dans la rivière. Les temps ont cependant bien changé. Nous avons aujourd’hui des éboueurs qui, chaque semaine, font le ramassage des vidanges. Le recyclage permet à beaucoup de produits d’être récupérés et envoyés à un centre de tri pour une réutilisation future. Sources : Témoin de notre passé : Thérèse Sauvageau, p. 31, 33, Archives de la SHPRLS. Photo : Œuvres de femmes, coll. « Aux limites de la mémoire », Publications du Québec

INDICEBOHEMIEN.ORG AVRIL 2020 15


- ENVIRONNEMENT -

COURANT ALTERNATIF DÉPENDANT DU TEMPS FRÉDÉRIC CHARRON, CHARGÉ DE PROJET AU CONSEIL RÉGIONAL DE L’ENVIRONNEMENT DE L’ABITIBI-TÉMISCAMINGUE

Depuis des milliers d’années, l’humain fait appel à son imaginaire pour tenter de transcender les époques et d’imaginer un avenir où l’impossible devient possible, et où le rêve devient réalité. Avec l’industrialisation, le développement technologique s’est accéléré et a contribué à alimenter les esprits créatifs. Les moyens de transport se sont multipliés, le train, la voiture et l’autobus contribuant toujours un peu plus à l’expansion des villes. Voilà qu’en 2020, ce qui aurait pu paraître de la pure science-fiction dans les années 1950 nous apparaît comme une réalité. Prenons par exemple la fameuse voiture volante retrouvée dans plusieurs films populaires. La société slovaque AeroMobil concrétise le rêve de la voiture volante en mettant, d’ici peu sur le marché, un véhicule électrique hybride performant. Cette récente invention nous montre que, pour des raisons d’efficacité énergétique, les transports qui usent d’électricité sont plus intéressants. En effet, l’électricité stockée dans une batterie semble être la nouvelle pierre angulaire de la technologie des transports. Difficile de nier le fait qu’une transition énergétique vers l’électrification des transports est en cours au Québec et que cette évolution nécessitera une quantité faramineuse de lithium.

Par exemple, le calcul des émissions de gaz à effet de serre contribue à augmenter la résilience de notre société et à améliorer les conditions environnementales.

COMMENT LE TRANSPORT A-t-il PRIS UNE SI GRANDE PLACE DANS NOS VIES? Avec l’arrivée des nouvelles technologies, tout est plus rapide. Notre train de vie est effréné. Selon Einstein, le temps s’écoule à différents rythmes. Cela signifie que le temps pour une personne n’est peut-être pas le même que pour une autre. Selon Sean Carrol de l’Institut de technologie de la Californie, le temps n’est pas une simple donnée universelle, c’est aussi une expérience individuelle.

LA TRANSITION ÉNERGÉTIQUE À QUEL PRIX? Dans cette quête de changement, deux parties s’affrontent : d’un côté, l’industrie minière du lithium, qui vante la création d’emplois et ses salaires compétitifs. De l’autre, les personnes faisant partie de la vague du mouvement vert, inquiètes de la pérennité des services gratuits rendus par la nature, sont pointées du doigt et accusées de freiner le développement. On essaie tant bien que mal de trouver un équilibre, un compromis entre l’économie et l’environnement. Par exemple, par destruction, on a trouvé la restauration; par perte d’habitat, on a trouvé la compensation de perte d’habitat. Mais sommes-nous conscients que tenter d’imiter un service écologique est coûteux en temps et en énergie? Actuellement, changer un système qui marche « bien » semble inconcevable pour plusieurs. Pour être plus résilients face aux changements climatiques, il faudra se doter d’indicateurs pour instaurer les changements de comportement.

Envie de contribuer à la protec�on de l’environnement? Devenez membre !

16 AVRIL 2020 INDICEBOHEMIEN.ORG

Ce passage nous rappelle qu’on ne prend pas le temps, on choisit plutôt la facilité, le bien-être immédiat. Au lieu de prendre notre vélo ou de marcher, nous prenons la voiture. Nous devons repenser notre système en voyant plus loin, en pensant à plus tard et en appliquant des gestes concrets afin d’espérer un avenir prospère pour nous et les générations futures. La solution optimale n’est peut-être pas de s’acheter un véhicule électrique, mais plutôt de le remplacer, dans la mesure du possible, par le vélo ou la marche. Pour finir, il n’y a peut-être pas une seule solution pour faire face aux changements climatiques. On peut par exemple améliorer ce que l’on a déjà ou encore s’inspirer de ce qui se fait de bien à l’échelle de la planète. Toutefois, pour être efficace à long terme, on doit se doter d’outils de suivi pour noter nos bons coups et nos moins bons coups. Quant aux indicateurs témoins du changement climatique, plus on en aura, plus on aura l’heure juste. Ainsi, nous pourrons prendre de bonnes décisions, et ce, pour longtemps.


- ENVIRONNEMENT -

LIEUX DE MÉMOIRES IDENTITAIRES DE MYRIAM LAMBERT

MYRIAM LAMBERT

CHANTALE GIRARD

J’ai rencontré Myriam Lambert durant le montage de son exposition à la Maison de la culture d’Amos. L’équipe de montage était à pied d’œuvre : l’installation Diluvio prenait forme dans toute sa splendeur. La barque de fibre de verre flottait dans l’espace à un peu plus d’un mètre du sol et de petits poids en forme de goutte d’eau se balançaient au bout de fils à pêche pendus au plafond. Pourtant, peu de gens la verront. Les centres d’exposition sont fermés et les rassemblements, à éviter. Il n’y aura ni vernissage ni visite du grand public. L’équipe d’Amos et Myriam Lambert travaillent avec un pincement au cœur; ils espèrent que d’ici la fin de l’exposition, les portes rouvriront, l’exposition prendra vie et les gens pourront apprécier la démarche de l’artiste.

DILUVIO Il est question ici d’un déluge récurrent et problématique qui oblige les habitants de San Rafael, au Mexique, à vivre dans une barque plusieurs jours, deux ou trois fois par année. Un petit village que les gens ne veulent et ne peuvent pas quitter : leur vie est liée à des plantations de banane qui prospèrent grâce à ces inondations. L’installation propose la recréation d’une barque. Illuminée, celle-ci domine la salle. La fibre de verre dont elle est faite crée un amalgame entre cette matière première et la peau humaine. La barque est faite, symboliquement, des habitants du petit village. Derrière la barque suspendue, on peut apercevoir des images de celui-ci.

PIPELINE LES DEUX INSTALLATIONS Myriam Lambert travaille d’abord avec les communautés. Elle les rencontre et leur pose chaque fois la même question : quel est, selon vous, votre lieu de mémoire? Elle traque les artéfacts du passé dans la mémoire collective. C’est un travail à la limite archéologique, mais qui présente l’intérêt d’aller non pas du côté scientifique de la relation à l’environnement, mais du côté de la transformation de cette relation dans la psyché collective et, surtout, émotionnelle. « Explorer des archives, ça finit par être émouvant, » dit l’artiste.

L’exposition Pipeline propose essentiellement de la vidéo; une projection double sur cimaise. Portant sur la fonte des glaces, la première vidéo crée un discours poétique et dramatique avec une trame sonore sans fin, à l’image de l’univers liquide proposé : le cycle de l’eau est infini, la fonte des glaces ne signifiant pas la perte de ce qui fond, mais sa transformation en quelque chose d’autre, menaçant dans le cas des changements climatiques. L’inspiration de Myriam Lambert vient d’une résidence à Genève durant laquelle elle s’est entretenue avec les habitants et a constaté que l’eau du lac Léman était fortement associée pour eux à l’idée qu’elle provenait de la fonte d’un glacier.

La seconde projection présente l’emblématique jet d’eau de Genève. La parenté formelle entre celui-ci et un puits de pétrole a frappé l’artiste : après tout, le pétrole est la trace de temps immémoriaux comme les lacs provenant de la fonte de glacier. Le symbolisme de cette parenté évidente a généré le titre de l’exposition (le pipeline permet la circulation des fluides), en lien avec le cycle de la fonte des glaces.

CIEL D’ABITIBI ET PATTES DE MOUCHE Outre le montage de cette exposition, Myriam Lambert participe à un projet de création en collaboration avec le Centre d’exposition d’Amos et celui de Val-d’Or, ainsi qu’avec d’autres partenaires, dont la Société d’histoire. Le projet a comme matière première l’histoire, et l’artiste devait explorer les archives valdoriennes pour poursuivre son processus de création autour de la question « Quel est votre lieu de mémoire? » dans la région. Même si le projet est repoussé, Myriam Lambert va effectuer ses recherches et entamer son processus créatif. La Maison de la culture d’Amos a décidé d’annuler l’exposition estivale prévue et de garder les deux installations de Myriam Lambert tout l’été dans l’espoir que, peut-être, elle pourra ouvrir ses portes au public.

INDICEBOHEMIEN.ORG AVRIL 2020 17


- DE PANACHE ET DE LAINE -

ROMAN POUR UN HYPOTHÉTIQUE FUTUR ENFANT (PEUT-ÊTRE) GABRIEL DAVID-HURTUBISE

Ce sont mes rêves qui sont là-dedans. Je les partage seulement avec ceux qui veulent les poursuivre avec moi. Si je les montrais à tout le monde, ils cesseraient d’être des projets mystérieux, des secrets spéciaux, et rendu là, il n’y aurait plus de rêve. Ça ne servirait à rien. Je t’envoie ces lettres. Juste à toi et pour tout le monde qui voudra les lire ensuite. Ensemble, elles forment un cahier. Un gros cahier devient facilement un livre… Si tu montres mes rêves à tout le monde alors qu’ils forment un livre, ce n’est pas pareil : je te pardonnerai. On croira que tu révèles les plus grands secrets d’un héros de l’ombre. Non, ce seront juste ceux de ton papa! Je vais me forcer pour bien écrire. Je pense que j’ai des chances d’être publié de façon posthume. Ça m’éviterait de me foutre la honte à la radio si je deviens connu. Tu sais que si je me moque parfois des gens dans mes lettres, c’est seulement pour m’endurcir. Je n’y arrive pas, c’est trop con. Il le faudra bien, pourtant, parce que sinon, on dira que je n’ai rien écrit de bon. Je supporte mal la critique. Les écrivains d’aujourd’hui doivent arroser la foule, puis se flageller en public. On prend plaisir à s’insulter. S’excuser… revenir à la charge envers et contre tous… Faut faire tourner le théâtre, n’est-ce pas? Sache que j’avais pour plan de nous installer un paradis sur Terre. Notre « petit coin de paradigme », comme je l’appelle. Pas économique, juste concret. Dans la forêt, nous aurions une petite maison, assez grande pour toi, moi et une belle qui serait ta mère. Puis,

18 AVRIL 2020 INDICEBOHEMIEN.ORG

un poulailler, une cabane à pêche et des amis à distance de raquette. L’été, ça sentirait les fleurs sauvages. La vie même serait un miel! Pas plus tard qu’hier, je portais la force de mes idéaux et quelques espoirs mourants : trouver un travail, tomber en amour, gravir les échelons, rire souvent, démarrer des projets, changer le monde! En somme, rien de trop ambitieux. Statistiquement, les gens éduqués s’en sortent mieux. Il faut se méfier des mathématiques. Ça exclut des variables. J’espère avoir fait de mon mieux, mais il n’est pas toujours constant, mon mieux. J’aurai sûrement dit des choses que je n’aurai pas faites. Mes excuses. J’ai pardonné aux gens, aussi. Il ne faut pas croire qu’ils sont cons. La vie est difficile. Bientôt, tu n’auras plus le temps de me voir. Ce sera difficile pour moi. Et pis à part ça? C’est quoi ton affaire? As-tu des secrets, un cahier spécial, des espoirs vivants? Des idées pas d’allures, une passion inédite, un endroit préféré qui ne se trouve pas ailleurs que dans ta tête? Ils disent qu’il faut les réaliser, nos projets les plus fous. Ça, je ne sais pas. Ça dépend. Il faut imaginer vivre ses rêves, en tout cas, et les défendre. Ne pas trop les étendre sous les pieds des autres. Tu me diras si ça sonne un peu comme un début de quelque chose, hein? Attends que je sois mort pour publier. L’introduction peut-être? Mieux que le reste! Tout le monde a le droit de rêver d’un roman.


- ENVIRONNEMENT -

LE BAC BRUN 101 MAURICE DUCLOS, ÉCO-CONSEILLER DIPLÔMÉ©, DIRECTEUR GÉNÉRAL DU GÉCO

Environ 40 à 45 % des matières résiduelles générées dans nos foyers sont des matières organiques. Lorsqu’elles sont enfouies, celles-ci se décomposent en absence d’oxygène, ce qui génère du CO2 et surtout du méthane, qui sont des gaz impliqués dans le réchauffement climatique. La hausse des émissions de gaz à effet de serre (GES) est la principale cause des changements climatiques. Certains GES sont naturellement présents dans l’atmosphère, alors que d’autres sont d’origine anthropique, c’est-à-dire générés par les activités humaines.

de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MELCC) pour le type de plateforme de compostage. Cette exigence peut varier d’une ville à l’autre, mais il demeure important de toujours vérifier avant de conclure que vous pouvez utiliser ce type de sac. De toute façon, les matières organiques doivent être déposées en vrac dans le bac, donc pas dans un sac, parce que ça se décompose plus rapidement.

Q- LE COMPOST, ÇA PUE? R- NON, PAS VRAIMENT Voici quelques conseils pour ne pas que ça pue.

COMPOSTER, QU’EST-CE QUE ÇA CHANGE? Le compost permet de détourner les matières organiques du site d’enfouissement et de prolonger la durée de vie de celuici, en plus de lutter contre les changements climatiques. En effet, chaque tonne de matière organique compostée émet seulement 30 kg de CO2, comparativement à 1 670 kg si elle est enfouie, donc 55 fois moins de GES dans l’atmosphère.

Emballer les résidus alimentaires dans des papillotes de papier journal pour limiter les odeurs ainsi que le nettoyage du bac de cuisine et du bac brun. Congeler les restes de poisson, de fruits de mer et de viande en attendant la prochaine collecte.

À voir en ligne jusqu’en 2022!

Installer le bac à l’ombre en été. Plus il y a de GES dans l’atmosphère, plus le réchauffement planétaire se fera rapidement. Plus les changements climatiques causés par le réchauffement global de la planète seront rapides et importants, plus les événements météorologiques extrêmes se succéderont.

MOÉ J’VEUX RIEN SAVOIR DU BAC BRUN Mauvaise ou bonne nouvelle selon le point de vue, la participation à la collecte des matières organiques est obligatoire par règlement municipal et par loi ministérielle. Tu ne peux pas faire semblant de remplir ton bac brun… on te watch!

Placer le bac en bordure de rue à chaque collecte, même s’il contient peu de matières. Pour éviter l’apparition de vers blancs, emballer les résidus alimentaires dans des papillotes de papier journal pour absorber l’humidité. Si jamais les asticots apparaissent quand même, verser du sel, du bicarbonate de soude ou du vinaigre dans le bac brun pour les éliminer. Autrement, ils demeureront dans le bac… et personne ne le souhaite, toi le premier.

MA QUARANTAINE - SUIVEZ NOTRE ADAPTATION EN LIGNE

SAVAIS-TU ÇA?

Finalement, le nettoyage régulier permet d’éviter les asticots. Rincer régulièrement, par exemple une fois par mois l’été, le bac brun avec de l’eau et du détergent doux et biodégradable.

TA MÈRE VEUT PAS QUE TU METTES ÇA AU BAC BRUN.

ÇA VA DANS LE BAC BRUN?

Y’a plein de choses que tu peux mettre au bac brun… mais surtout pas les sacs de plastique. Les sacs dits compostables et biodégradables se décomposent trop lentement par rapport au reste des matières organiques. Donc c’est N-O-N, NON, ZÉRO sac de plastique. Cette interdiction ne dépend pas d’une décision de la Ville, mais d’une exigence du ministère

Ça se mange. C’est du papier/carton souillé par des aliments. Ça vient des plantes de la cour/jardin (gazon, feuilles).

BOUTIQUE Sky Polson, Winneway

Si tu as répondu oui à une ou à plusieurs de ces affirmations, garroche ça dans le bac brun!

INDICEBOHEMIEN.ORG AVRIL 2020 19


- ENVIRONNEMENT -

LAC OSISKO, UN PROJET D’IMPACT TERRITORIAL LYDIA BLOUIN

Sous le patronage de la Commission canadienne pour l’UNESCO, le collectif Territoire relève un grand défi : revitaliser l’écosystème du lac Osisko d’ici le centième de la ville de Rouyn-Noranda, en 2026. Rassemblant des acteurs du milieu des arts, des sciences et de l’ingénierie, l’organisme souhaitait créer un projet rassembleur. Dépolluer le lac et le rendre accueillant a semblé une évidence. En effet, joyau culturel et identitaire, la source d’eau est connue pour les défis environnementaux qu’elle représente. Pour cela, différentes stratégies et prototypages ont été envisagés. Malgré tout, le projet s’inscrit dans une démarche citoyenne. « Il y a moyen de mettre le lac plus en valeur avec la créativité des gens d’ici. On veut aller vers la communauté pour savoir comment elle voit le lac en 2027 », nous informe Geneviève Aubry, consultante du projet. Le collectif espère aussi créer un parcours expérientiel : « Il sera conçu par des talents d’ici pour mettre en valeur les richesses naturelles, historiques et culturelles du site, et pour promouvoir des valeurs d’écologie et de vie active. »

20 AVRIL 2020 INDICEBOHEMIEN.ORG

En plus de cette idée innovante, le collectif Territoire a pour but de créer une œuvre magistrale en lien avec la restauration du lac. Différentes idées ont été soulevées lors de rencontres citoyennes qui se sont tenues les 20 et 22 février, mais aucune décision définitive n’a encore été prise. « Ce qu’on sait, c’est qu’on veut que l’œuvre ait des fonctions écologiques et interactives, » ajoute Mme Aubry. D’autres séances avec la population sont prévues sous différentes formes. Il est aussi possible de soumettre ses propositions ou de proposer son soutien à l’adresse courriel projet@lacosisko. ca. « Il y a un grand enthousiasme autour du projet. On reçoit beaucoup d’appels et de courriels de citoyens, d’artistes ou de gens de l’industrie qui veulent s’impliquer d’une manière ou d’une autre, » affirme Geneviève Aubry. Il est clair que cet événement rassembleur aura un impact sur l’attrait du lac, mais également sur la collectivité. « Tout ça mis ensemble, ça donne vraiment un potentiel extraordinaire au projet, » conclut la consultante. On ne peut qu’être d’accord avec elle! Les sources consultées pour la rédaction de cet article sont disponibles dans sa version web au indicebohemien.org.


- ENVIRONNEMENT -

L’ABITIBI-TÉMISCAMINGUE : RÉGION MILITANTE ALEXIS LAPIERRE ET GABRIELLE IZAGUIRRÉ-FALARDEAU

Partout en Abitibi-Témiscamingue naissent et grandissent des mouvements pour la cause environnementale. Certains ont des revendications précises, comme la Coalition Anti-Pipeline, qui s’oppose au passage de GNL Québec dans la région. D’autres, comme les EnVERTdeurs de Ville-Marie, ont des objectifs plus généraux d’action communautaire et de promotion d’un environnement sain. Malgré ces divergences dans leurs motivations, tous ont le sentiment qu’il est urgent de se mobiliser. L’Indice bohémien a rencontré cinq militants pour comprendre l’émergence des groupes environnementaux dans la région : Adèle Beauregard, conseillère municipale à Ville-Marie, est instigatrice du mouvement Les EnVERTdeurs, qui vise à créer un meilleur environnement et à sensibiliser les citoyens sur la décroissance, les bonnes habitudes de consommation, l’épuisement des ressources naturelles, etc. Adeline Laquerre, impliquée notamment dans La planète s’invite au parlement (LPSP), mouvement à l’origine des manifestations du 27 septembre 2019 au Québec.

Mais qu’est-ce qui pousse ces militants à s’organiser pour faire entendre leur voix? Pour Olivier, il s’agit de la seule chose logique dans la situation actuelle. Il pense d’ailleurs que certains moyens comme les pétitions ont atteint leur limite. Si des gens estiment que la désobéissance civile est radicale, il soutient qu’elle est nécessaire puisque la situation environnementale, elle, est catastrophique. Adèle de son côté, tente de créer un mouvement qui réunit la communauté autour d’un objectif commun. François, lui, souligne que « ce que les groupes environnementaux réussissent à faire, c’est de montrer que, quand on se met ensemble, on peut changer les choses ». S’ils font tous don de leur temps et de leur énergie pour une cause qui dépasse leur intérêt personnel, ils semblent également retirer une certaine satisfaction de leur implication. « Il y a un principe qui est fondamental : si tu veux garder ton bassin de militants, il faut que tu aies du fun », dit Adeline. Chose certaine, si les groupes citoyens témiscabitibiens font preuve d’une grande capacité d’organisation, d’originalité et de combativité, ils demeurent à la recherche de nouveaux membres pour garnir leurs rangs. Nul besoin d’être un expert pour se joindre à leur cause. Il suffit d’avoir à cœur l’environnement et de vouloir changer les choses.

François Gagné, porte-parole de la Coalition anti-pipeline (CAP-RN), qui s’oppose au passage du pipeline de GNL Québec en Abitibi-Témiscamingue et dans la province. Johanne Alarie, également membre d’une multitude de comités, entre autres du comité ARET pour amener le gouvernement à prendre des mesures contre les émissions toxiques de la fonderie Horne.

PASSER À L’ACTION POUR L’ENVIRONNEMENT

COURTOISIE

Olivier Gauthier, militant pour Extinction Rébellion (XR) Abitibi-Témiscamingue, un groupe qui prône la désobéissance civile comme moyen d’action auprès des gouvernements.

Le premier constat possible sur le militantisme environnemental abitibien repose sur l’originalité et la variété des actions. Cette diversité permet de rejoindre un grand pan de la population et d’atteindre des objectifs sur plusieurs niveaux. Adèle explique par exemple que les EnVERTdeurs ont mené certaines actions auprès du conseil de Ville-Marie pour faire adopter une politique verte, en plus d’organiser la projection d’un documentaire abordant les enjeux environnementaux. Du côté de CAP–RN, on s’assure également d’avoir une présence soutenue dans les conseils de ville de la région. On a aussi monté une chorale ludique pour accroître sa visibilité et transmettre son message. Comme quoi l’humour peut être un outil politique! Dans la même veine, XR a organisé une remise de « Prix Patate » au Festival du cinéma international en Abitibi-Témiscamingue pour souligner l’inaction des dirigeants devant certains enjeux. Comme le souligne Johanne, il y a un équilibre à aller chercher entre les types d’actions. Les groupes sont en communication constante pour s’assurer qu’il y ait une gradation et une diversité de tactiques. Il s’est par ailleurs installé un respect mutuel entre eux. Souvent, les militants s’entraident à travers les différents comités.

INDICEBOHEMIEN.ORG AVRIL 2020 21


- MÉDIAS ET SOCIÉTÉ -

ÉLUCUBRATIONS CORONAVIRALES LOUIS-PAUL WILLIS

Lorsqu’il est question de l’étude de « l’imaginaire de la fin » au sein des productions culturelles, par exemple dans les films catastrophes, il existe une phrase fort connue des cercles universitaires et sur laquelle je souhaite m’attarder. Attribuée au théoricien Frederic Jameson initialement, puis au philosophe Slavoj Žižek, qui y ajoute ses réflexions, la phrase est la suivante : « Il est plus facile d’imaginer la fin du monde que la fin du capitalisme. » Dans le contexte où s’écrit cette chronique, il semble pertinent de développer cette idée pour mieux comprendre ce qui se passe autour de nous, dans les supermarchés par exemple, mais aussi au sein de notre société. L’idée selon laquelle il nous est plus facile d’imaginer la fin du monde que celle du capitalisme permet de comprendre la portée idéologique du cinéma et des médias populaires. Dans les films catastrophes, par exemple, un phénomène naturel (raz-de-marée, pandémie, etc.) apporte des bouleversements profonds à la société – souvent occidentale – qui, une fois les dommages contrôlés, arrive généralement à rétablir une forme d’ordre social permettant la poursuite de la logique politique et économique du capitalisme. Ce type de production culturelle promeut une forme de réconfort idéologique. Quoi qu’il arrive, nous pourrons continuer à cumuler le capital et poursuivre une existence ancrée dans une logique de libre marché.

devenus soudainement les objets les plus convoités. À l’instar du capital sous ses formes plus traditionnelles, ces articles sont devenus les porte-étendards d’une plus-value inestimable. Au moment où les indices boursiers chutaient à vue d’œil, la logique de l’accumulation incessante de capital s’est repliée sur ces objets, et ce, contre toute logique, puisque rien n’indique dans l’immédiat une potentielle pénurie dans les épiceries et chez les autres détaillants. Rappelons-le, le papier hygiénique n’est pas un produit exotique; il est fabriqué ici même, au Québec. En somme, si pénurie il y a, il manquera de camembert français bien avant qu’il ne manque de PQ… Le réalisme capitaliste s’est donc manifesté de façon frappante dans les premières journées de la crise. Mais plus les jours passent, plus il se produit des choses qui n’ont jamais pu être prédites par les productions culturelles issues du réalisme capitaliste : comme Žižek le note dans un éditorial publié le 19 mars : « En temps de crise, nous sommes tous socialistes – même l’administration Trump considère une forme de revenu de base universel – un chèque de 1 000 $ pour chaque citoyen adulte. » Le réalisme capitaliste semble s’être tu, alors que les différents paliers de gouvernement annoncent des mesures aussi exceptionnelles qu’interventionnistes.

En 2009, le théoricien Mark Fisher part de cette idée selon laquelle la fin du monde est plus facile à concevoir que celle du capitalisme pour décrire ce qu’il nomme le réalisme capitaliste. Pour lui, le réalisme capitaliste consiste à concevoir le capitalisme comme l’unique système économique viable, sans autre possibilité envisageable. Accepté comme un état de fait inéluctable, le réalisme capitaliste va au-delà des simples productions culturelles ou publicitaires; il se manifeste dans toutes les sphères de la vie, de l’éducation au marché du travail, et à la pensée générale qui circule dans nos sociétés.

En somme, des solutions de rechange semblent émerger de la crise, qui se distancent des scénarios plus communs, notamment ceux des films-catastrophes. La priorité accordée au gain et à l’accumulation laisse place à des priorités collectives axées sur le bien commun. À ce sujet, Žižek pose des questions fascinantes : « Ce socialisme imposé sera-t-il un socialisme pour les riches (rappelons-nous le soutien accordé aux banques en 2008 alors que les gens ordinaires ont perdu leurs épargnes)? L’épidémie sera-t-elle réduite à un autre chapitre dans la longue histoire de ce que Naomi Klein nomme le “capitalisme du désastre”, ou verrons-nous plutôt émerger un nouvel ordre mondial (plus modeste, peut-être, mais surtout plus équilibré)? »

Mais avec la pandémie actuelle et ses répercussions impensables il y a quelques semaines à peine, le réalisme capitaliste est en crise…

Mais surtout, comment les productions culturelles vont-elles refléter le potentiel de dépassement du réalisme capitaliste?

Certes, on a pu constater la logique du chacun pour soi et de l’accumulation du capital dans les instants qui ont suivi les premières restrictions imposées au Canada : le papier hygiénique, comme le désinfectant à main et certaines denrées non périssables, sont

Les références consultées pour la rédaction de cette chronique sont disponibles dans sa version Web.

SUBVENTION

composteure domestiqu

POUR L’ACHAT D’UN

22 AVRIL 2020 INDICEBOHEMIEN.ORG

La MRC de La Vallée-de-l’Or offre un programme de subvention sur l’achat d’un composteur domestique. Sous présentation d’une preuve d’achat et d’une preuve de résidence de la Vallée-de-l’Or, la MRCVO remboursera 20 $ du coût d’achat.

FORMULAIRE DISPONIBLE AU MRCVO.QC.CA


- MÉDIATION CULTURELLE -

CARMELLE ADAM ET LE RAYONNEMENT DE L’ART GABRIELLE IZAGUIRRÉ-FALARDEAU

Carmelle Adam, directrice du Centre d’exposition de Val-d’Or, s’est vue décerner le 29 mars le Prix Hommage des Prix culturels de la Ville de Val-d’Or. Retour sur la carrière d’une femme dont la vision unique des arts façonne l’univers culturel régional.

part. « Pour moi, si on est capables d’utiliser l’art comme un vecteur de changement, de transformer une façon de voir, une perception, juste de faire que l’art crée un espace de rencontre, juste ça, c’est déjà très bien », ajoute-t-elle.

L’ART QUI RAYONNE DES AFFAIRES AUX ARTS, ET DE VILLE-MARIE À VAL-D’OR

Arrivée là-bas, Mme Adam dit avoir été marquée, entre autres, par la cohabitation avec les nations autochtones. « Pour moi, c’était intéressant de découvrir et aussi de constater la cohabitation. Rapidement, j’ai pu constater que chaque nation avait ses particularités, qu’il n’y avait pas un élément homogène ». Dès lors, elle se fait un devoir de poursuivre le travail entamé par sa prédécesseure en donnant une place de choix aux Premières Nations dans la programmation du Centre d’exposition, à travers un programme pédagogique et dans divers projets incitant une participation accrue de leur

Carmelle Adam organise son travail autour de deux aspects fondamentaux : favoriser les liens entre les milieux des arts et des affaires, et assurer le rayonnement des créateurs. Sur le premier aspect, elle explique : « Il faut assurer ces maillageslà pour permettre une meilleure part de revenus autonomes au niveau des artistes et des organismes. Ce n’est pas un lien qui se fait naturellement comme dans d’autres endroits au Canada où la philanthropie est beaucoup plus développée. »

COURTOISIE DE VAL-D’OR EN ART

Ses parents sont originaires du Témiscamingue, mais ce n’est qu’en 2002 que Mme Adam s’établit dans la région. Détentrice d’une formation en histoire de l’art et d’une maîtrise en administration des affaires, celle qui avait concentré le début de sa vie professionnelle dans ce dernier domaine fait alors le saut à temps plein dans le milieu des arts, en tant que directrice de la Galerie du Rift, à Ville-Marie. Après avoir gravité au sein de diverses organisations culturelles, elle s’établit finalement à Val-d’Or en 2008.

En ce qui concerne le rayonnement, elle affirme : « C’est essentiel. Quand on veut professionnaliser des artistes dans leur démarche, il faut que des diffusions soient faites, oui, dans la région, mais il faut aussi qu’ils soient connus à l’extérieur pour qu’on puisse avoir la possibilité de maintenir des créateurs en région et qu’ils puissent vivre de leur art. »

UNE RECONNAISSANCE TOUCHANTE

Cette volonté de faire rayonner le travail d’ici a pris forme dans divers projets. Alors qu’elle travaillait à Ville-Marie, Mme Adam a exporté la Biennale internationale d’art miniature en France et en Italie. Plus récemment, la Ville de Montréal a accueilli les manifestations artistiques de trente artistes de la région.

Quand je lui demande ce que le Prix Hommage représente pour elle, Carmelle Adam me confie être extrêmement touchée par cet honneur. Pour elle, la communauté valdorienne en est une de bâtisseurs, et elle ne cesse d’être impressionnée par la générosité et l’ouverture de la population.

Dans le comté d’Abitibi-Ouest, on se protège et on protège les autres. Nous sommes disponibles pour vous, contacter nous au 819 444-5007 ou au 819 339-7707.

Un message de votre députée Suzanne Blais Ligne d’information : 1 877 644-4545 quebec.ca/coronavirus INDICEBOHEMIEN.ORG AVRIL 2020 23


- PREMIÈRES NATIONS -

KA MINOPIGOK E SIGOK, CE QUI EST BON AU PRINTEMPS AMÉLIE BRASSARD, AGENTE DE DÉVELOPPEMENT CULTUREL – MINWASHIN

Le sirop d’érable est un délice printanier connu des allochtones depuis l’époque de Jacques Cartier, qui entend alors parler d’un suc délicat et de bon goût. Ce n’est que 100 ans plus tard qu’on le compare au sucre de la canne à sucre des Caraïbes.

À l’époque, les Anicinabek récoltaient l’eau dans des paniers d’écorce de bouleau. Pour augmenter la concentration de sucre dans l’eau d’érable, on laissait geler un peu l’eau pour enlever par la suite la glace formée par les cristaux d’eau. Les gens ayant déjà visité une érablière moderne connaissent le processus d’osmose inversée qui permet le même processus. Après l’étape de la concentration du sucre vient celle de l’évaporation. Au tout début, on déposait des pierres chaudes dans les paniers d’écorce afin de faire bouillir l’eau jusqu’à ce qu’elle devienne du sirop. Avec le temps, le troc a permis d’acquérir des chaudrons chauffés au feu de bois. Puis, avec l’arrivée des nouvelles technologies, la fabrication du sirop d’érable a pris un nouveau tournant. Le sirop d’érable contient 66 % de sucre, mais si l’ébullition continue, on obtient de la tire (83 à 86 % de sucre), puis du beurre (87 %) et enfin, du sucre d’érable (88 % et plus). De nos jours, plusieurs recettes utilisent ces ingrédients. Le sirop d’érable est un pur délice, qui fait le bonheur des enfants et des plus vieux. Aujourd’hui, on l’exporte, on l’utilise en cuisine et l’industrie acéricole ne cesse de développer le produit. Depuis longtemps, les Anicinabek connaissent les propriétés de l’érable à sucre. En fait, on recommandait de mettre du sirop d’érable sur les lèvres des enfants pour les aider à se calmer s’ils étaient en colère avant un boire. Aussi, pendant que les enfants faisaient leurs dents, on recommandait de frotter le sirop directement sur les gencives. Aujourd’hui, les communautés anicinabek de Kitcisakik et de Kitigan Zibi produisent encore du sirop d’érable. D’autres communautés songent également à se doter d’une érablière. Les propriétés du sirop d’érable sont encore à l’étude. En 2011, une équipe de chercheurs a fait la découverte d’une nouvelle molécule appelée québécol. En 2015, des chercheurs québécois ont démontré les propriétés anti-inflammatoires du produit et de quelques-uns de ses dérivés. Concrètement, des applications dans les domaines de la médecine dentaire et des douleurs chroniques sont à l’étude. Les Anicinabek, par leur lien étroit avec l’environnement, connaissaient déjà les propriétés extraordinaires des arbres qui les entouraient! Et vous, ce printemps, allez-vous vous sucrer le bec?

Vous avez un projet Culturat? Contactez-nous à info@culturat.org

24 AVRIL 2020 INDICEBOHEMIEN.ORG

COURTOISIE

Chez les Anicinabek, il y a fort longtemps, le sucre était disponible directement dans les érables. Cependant, le Créateur trouvait la récolte trop facile, alors il a versé de l’eau à la cime des branches pour diluer le tout. Les Anicinabek ont donc trouvé des solutions pour continuer de le récolter chaque printemps à partir de la lune du sucre.

BIENVENUE GABRIELLE! MARIANE MÉNARD

Un nouveau chapitre s’amorce à la rédaction du journal socioculturel de l’Abitibi-Témiscamingue avec l’arrivée de Gabrielle Izaguirré-Falardeau à titre de coordonnatrice à la rédaction et aux communications de L’Indice bohémien. L’équipe et le conseil d’administration de L’Indice bohémien sont heureux d’annoncer cette nomination et de souhaiter la bienvenue à cette nouvelle membre de l’équipe. Gabrielle aura comme tâches principales de superviser le choix du contenu du journal et de guider les collaborateurs et collaboratrices dans la rédaction des articles. Lise Millet et Ariane Ouellet conservent leurs rôles respectifs de responsable de la une et d’éditorialiste. Artiste aux multiples talents originaire de Rouyn-Noranda, Gabrielle s’est notamment fait connaître sur la scène culturelle de l’Abitibi-Témiscamingue en tant qu’autrice-compositriceinterprète, autrice et actrice. On a pu apprécier ses prestations à diverses occasions, notamment dans la production théâtrale Ma Noranda, en première partie du spectacle de Coco Méliès à Rouyn-Noranda et, plus récemment, dans le cadre du Cabaret des mots de l’Abitibi-Témiscamingue. « J’entame ce mandat avec beaucoup d’enthousiasme et je compte bien travailler à maintenir la qualité et la diversité du contenu du journal », affirme Gabrielle Izaguirré-Falardeau. Tout au long de sa formation scolaire, Gabrielle a collaboré à différentes publications à titre de collaboratrice ou de réviseure. Dotée d’un fort esprit critique, d’une grande sensibilité artistique ainsi que de créativité et de détermination, Gabrielle se joint à Valérie Martinez, directrice générale de L’Indice bohémien, pour poursuivre le développement du seul journal culturel régional imprimé.


- CINÉMA -

DERRIÈRE LES FRONTIÈRES : LE PARCOURS VICTORIEUX DE SOLÈNE ANSON ET VINCENT BÉLANGER

COURTOISIE

ALEXIS LAPIERRE

Vincent Bélanger, étudiant au baccalauréat en création et nouveaux médias à l’Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue (UQAT) et Solène Anson, étudiante française en échange au sein même programme ont récemment reçu le prix PoliDoc 2020 pour leur documentaire Derrière les frontières. Le film d’une vingtaine de minutes brosse le portrait de cinq personnes ayant décidé d’immigrer au Québec. Ils sont Camerounais, Algérien, Colombien, Français ou Haïtien, et occupent la fonction de professeur, médecin, étudiant, mineur ou programmeur. Ils sont venus chercher dans la « belle province » quelque chose qu’ils ne pouvaient trouver chez eux. Le documentaire porte également une saveur régionale puisque quatre de ses protagonistes sont établis en Abitibi-Témiscamingue.

DE PROJET ÉTUDIANT À FILM PROFESSIONNEL

UNE RÉFLEXION NÉCESSAIRE

Pour la suite des choses, Vincent s’apprête à entrer dans le monde du travail à la fin de son parcours scolaire. Solène, elle, compte poursuivre ses études afin de devenir journaliste. Les deux veulent néanmoins continuer à explorer le champ du documentaire. Cette récente distinction est à leur avis un pas dans la bonne direction.

Plus qu’un assemblage de témoignages, le documentaire est aussi un prétexte pour réfléchir à la relation paradoxale qu’entretient le Québec avec ses immigrants. Dans une province aux prises avec un vieillissement de la population et une pénurie de main-d’œuvre, quels sont les impacts de la Loi sur la laïcité de l’État (Loi 21), de la montée de la droite identitaire, des changements récents dans les politiques d’immigration ou de la difficulté de reconnaissance des acquis sur ces nouveaux arrivants? Derrière les frontières, c’est également le regard nouveau d’étrangers qui ont appris à connaître notre culture et nos structures sociales. Les réalisateurs soulignent que si le film porte ce titre, c’est parce que les interlocuteurs avouent généralement n’avoir réellement compris la réalité de notre province qu’une fois leurs valises posées en sol québécois.

Le prix PoliDoc 2020 est remis par le Centre pour l’étude de la citoyenneté démocratique (CÉCD) et le Consortium de la démocratie électoral (C-DEM). Le projet de Vincent Bélanger et de Solène Anson s’est réellement démarqué puisqu’il a été sélectionné parmi des synopsis provenant des cégeps et des programmes universitaires de premier cycle de l’ensemble du Québec. Il a permis non seulement aux jeunes documentaristes de toucher une bourse pour réaliser leur film, mais également de profiter du mentorat d’une équipe de professionnels dans le domaine qui les ont guidés tout au long de leur processus. Ainsi, le film qui devait au départ être un travail extrascolaire s’est transformé en un documentaire professionnel.

Le documentaire Derrière les frontières sera présenté en septembre prochain au Cinéma du Parc à Montréal dans le cadre de la Semaine de la Démocratie. Les réalisateurs souhaitent également faire profiter les Abitibiens de leur réalisation à l’automne prochain. Surveillez le calendrier culturel de L’Indice bohémien.

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COURTOISIE

26 AVRIL 2020 INDICEBOHEMIEN.ORG


- THÉÂTRE -

- MA RÉGION, J’EN MANGE! -

UNE PIÈCE DE THÉÂTRE SIGNÉE LOUISE LAVICTOIRE

TREMPETTE AU

DOMINIQUE ROY

Pour Louise Lavictoire, l’arrivée d’avril représente l’aboutissement d’un projet théâtral sur lequel elle travaille depuis plusieurs mois. Le soutien financier obtenu grâce à l’entente territoriale régionale entre le Conseil des arts et des lettres du Québec (CALQ) et sa MRC aura permis à la Témiscamienne d’écrire un scénario qu’elle mijotait depuis longtemps. À présent, les actrices de la pièce À quoi rêvent les jeunes filles? sont prêtes à fouler les planches.

YOGOURT À L’ÉRABLE

entend aux bulletins de nouvelles et lit sur les réseaux sociaux. « Avec le mouvement #MeToo, les revendications de la jeune écologiste Greta Thunberg, les inégalités sociales vécues par les jeunes filles dans plusieurs pays du monde et aussi en constatant la situation de milliers de réfugiés, il m’est apparu essentiel d’aborder ces sujets dans un même spectacle et de l’adresser aux jeunes. » Ainsi, l’actualité se transforme en vagues d’inspiration sur lesquelles elle surfe pour sensibiliser et provoquer des remises en question.

BORÉALAIT À LA MOUTARDE FORTE, ANETH ET POMME VERTE YVES MOREAU, HÔTEL LE FORESTEL (VAL-D’OR)

LA PIÈCE Lys et Andréa vivent leur dernière année d’études secondaires. Leur implication en tant que chroniqueuses pour le téléjournal de l’école, leur participation à un voyage humanitaire et leur intérêt marqué pour la jeunesse féminine et l’ONU les conscientisent aux enjeux sociaux, écologiques, éthiques et politiques qui les entourent. Certaines problématiques suscitent en elles des questionnements. L’identité sexuelle de l’une sera aussi la source d’interrogations. « Je qualifierais ce spectacle de docufiction puisqu’il y a à la fois des projections vidéo et des scènes jouées par deux interprètes. On y intègre aussi l’utilisation d’applications très prisées par les jeunes. Il y a également des moments interactifs où les spectateurs sont appelés à utiliser leurs téléphones cellulaires pendant la représentation. Pour susciter l’intérêt des jeunes, il faut tendre vers ce qui les intéresse, tout en essayant de faire œuvre utile », précise Mme Lavictoire.

L’ÉCRITURE

INGRÉDIENTS

Sa stratégie : tenir compte de son public cible. Quelques adolescentes ont accepté de répondre à des questions et de participer à des entrevues filmées, un contenu qui lui a permis de donner un angle à son scénario et d’étoffer la matière. Un adolescent a aussi répondu à l’appel, parsemant le tout d’une vision masculine. « Pendant les deux semaines qui ont précédé les ateliers d’exploration avec les deux comédiennes pressenties, nous avons noté nos rêves, ceux faits durant notre sommeil. Ces rêves ont donc servi d’appui à nos séances de recherche et de création », ajoute Mme Lavictoire.

250 gr 100 gr 30 ml 1 1 5 ml 5 ml 15 ml

La diffusion de la pièce jouée par Myriam DeBonville et Mylène Baril-Mantha, dont les éléments scénographiques sont réalisés par Josée Falardeau, était prévue le 17 et le 18 avril 2020 à L’Agora des Arts. Celle-ci a toutefois interrompue précocement sa programmation pour cette saison. Nous vous invitons donc à rester à l’affût d’un possible report des représentations.

MÉTHODE

yogourt à l’érable Boréalait crème sure ciboulette fraiche ciselée gousse d’ail hachée finement pomme verte coupée en brunoise aneth frais haché finement ou en purée moutarde forte jus de citron sel et poivre

Déposer tous les ingrédients dans un cul de poule et bien mélanger. Laisser reposer une heure au frigo avant de servir.

L’INSPIRATION IDÉE GOURMANDE

COURTOISIE

Servir avec crudités. Accompagne très bien un pavé saumon ou une poitrine de volaille grillée.

ANDRÉANNE GAUTHIER

CAMILLE TELLIER

La préoccupation féministe est omniprésente dans les créations de l’artiste, qui se dit très sensible à ce qu’elle

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- RÉGION INTELLIGENTE -

UN CONSENTEMENT LIBRE ET ÉCLAIRÉ MICHEL DESFOSSÉS

Il me semble que cela fait une éternité. Que c’était avant le temps du choléra!

l’éclatement et la perte de cohésion des élus et la perte de confiance des citoyens. Il avait compris le risque éminent de déficit démocratique.

Vous souvenez-vous des événements qui ont marqué l’actualité dans ce pays avant le virus? Le blocus des voies ferroviaires par les Wet’suwet’en engendrait une certaine prise de conscience. Une interrogation s’était installée dans la population quant à la gouvernance des Premières Nations. C’est quoi ça, des chefs héréditaires? Ainsi s’interrogeait le citoyen ordinaire.

On voit trop fréquemment, au stade de l’avant-projet, des élus se prononcer prématurément sans connaître les conclusions des études d’impacts et sans se faire consentir une légitimité par leurs commettants pour le faire. Devant un tel risque de polarisation entre les tenants du développement à tout crin et les autres, l’inefficacité s’installera au sein du conseil. Au diable, alors, les priorités en matière de services de proximité et de qualité de vie.

Nous avons pris conscience que le modèle de gouvernance, imposé depuis une centaine d’années par les instances fédérales aux communautés autochtones, fait peut-être notre affaire, mais qu’il n’a rien à voir avec leur conception du rapport au territoire. Dommage que ce débat n’ait pas eu lieu à cause du virus. Nous ne tirerons pas de leçons de cet épisode difficile de notre histoire collective, tout occupés que nous sommes à surveiller notre température corporelle et économique. Cette conversation sociétale aurait peut-être réussi à aller plus loin encore que la question de la gouvernance autochtone entre chefs de bande élus et héréditaires. Nous aurions pu en profiter pour définir ce qu’est le consentement libre et éclairé d’une population. Parce qu’en matière de participation publique aux projets d’exploitation des ressources naturelles, nos communautés non autochtones n’ont pas de leçons de participation démocratique à donner. Si on projette d’extraire des matières premières, nous nous engageons tête baissée dans une mécanique dite d’acceptabilité sociale sans savoir comment la mesurer. Pire, en laissant à la fin un ministre décider à la fin. Pathétique. Pathétique aussi parce que nos conseils municipaux (vous pouvez faire le parallèle avec les conseils de bande) se font imposer un programme par les promoteurs qui monopolisent l’espace de débats publics en demandant à nos élus de se prononcer en faveur de leur projet. Un jour, un préfet de la Côte-Nord, homme sage, me racontait avoir demandé à un promoteur de reporter la présentation de son projet afin de concerter son conseil déjà déchiré sur le pactole à venir. C’était-là une solution de dernière minute pour éviter

! 28 AVRIL 2020 INDICEBOHEMIEN.ORG

Notez que j’ai bien dit légitimité, et non légalité. Nos élus municipaux ont bel et bien reçu les compétences pour gouverner le développement de leur territoire. Et ils ont en main les outils de planification et d’aménagement. Voilà le maître-mot : planification. Tout comme l’acceptabilité environnementale, l’acceptabilité sociale se planifie et se mesure, en une dizaine de points, bien précis en plus. C’est en l’absence de tout projet précis, à l’abri des influences extérieures, avec le temps nécessaire, en se dotant d’expertise neutre externe que la société civile d’un territoire devrait définir sa grille de performance sociale en matière de projets d’extraction ou d’exploitation des ressources naturelles. Il appartient aux élus de conduire l’exercice et de formaliser l’outil d’aide à la décision forgé avec la collectivité. La grille ainsi conçue permettra aux promoteurs de savoir d’avance si leur idée a une quelconque chance de recevoir un consentement libre et éclairé qui ne sème pas la division, et le milieu pourra déterminer s’il s’agit d’un projet d’intérêt. L’exemple des Wet’suwet’en nous enseigne qu’une des premières conditions d’acceptabilité sociale à mesurer est l’impact des projets sur la gouvernance du territoire. Les sources consultées pour la rédaction de cette chronique sont disponibles dans la version web de l’article sur indicebohemien.org

Merci à nos généreux annonceurs d’avoir honoré leurs placements publicitaires du mois afin de nous soutenir dans notre mission d’offrir une visibilité à la culture d’ici!


- LITTÉRATURE -

CHRONIQUES DE CAPITACHOUANE, OU LA VIE DES LIEUX DISPARUS MICHAËL PELLETIER-LALONDE

En septembre 2019, Jean Bacon faisait paraître son premier roman, Chroniques de Capitachouane. Retournant la terre d’un passé encore tout près, l’auteur originaire de Val-d’Or plante son livre le long du rail, entre Senneterre et La Tuque, au mitan du siècle dernier.

l’homme qui ramasse des souris à Jean-Paul et ses huit frères un peu tapageurs… il y a de tout et tout le monde. Surtout la mort, jamais trop loin dans ces circonstances. Et de cette petite société éclatée, Ariel puise les matériaux primitifs d’une passion naissante pour l’écriture.

Au printemps 1958, Rachel se rend dans le camp forestier de Capitachouane avec son fils, Ariel, dans le but d’y séjourner jusqu’à l’automne. Le père, une ombre dans la vie de sa famille, s’y trouve, lui qui travaille comme surintendant au camp. S’y trouve également toute une petite société qui se déploie en reliefs, en marge du travail forestier qui, s’il en est le prétexte, n’est pas le point focal du livre. En effet, bien que le Capitachouane de Jean Bacon vibre au son de la scierie qui tourne sans arrêt, c’est surtout le quotidien de personnages tous plus excentriques les uns que les autres qui donne son souffle au livre. Du vaillant chef de gare aux frasques de Tit’Ours, « la reine de Capitachouane », en passant par

Les Chroniques de Capitachouane renferment un évident plaisir d’écrire. Pour bien camper l’atmosphère des lieux auxquels il (re)donne vie, de même que les caractères de ses personnages, l’auteur, sur un ton résolument poétique, n’hésite pas à offrir au lectorat de généreuses descriptions. Par exemple, celle de la gare de train de Capitachouane, à laquelle il accorde de nombreuses pages, comme pour marquer l’importance de ce lieu qui suscite tant d’intérêt dans le campement forestier : « Malgré les larmoiements, les disputes, les faces de mort et les odeurs des soutes à charbon noircissant le paysage, le train suscite tant de joie, chaque jour, sur la place de la gare. Au monde, il n’y a pas plus attendu que

cet événement-là » (p. 41). Or, c’est peut-être là également la faiblesse du livre. En effet, à la suite de ce qui apparaît comme un empressement à tout écrire s’installe un bruit de fond, alors que s’entremêlent de façon parfois inorganique éléments de contextes, personnages et sorties impromptues du récit, dans un tout à travers lequel on se prend à chercher son nord. Le récit cède également le pas à quelques longueurs, qui cassent son rythme. Néanmoins, on trouve dans les Chroniques de Capitachouane un vaste travail de portraitiste à la plume trempée d’imagination qui nous appelle à revisiter ces lieux nés pour disparaître et dont il reste aujourd’hui parfois peu de chose, sinon un nom, des souvenirs, quelques photos ou des livres, quand on est chanceux : « Capitachouane ne fait plus partie de la mémoire collective. Au fond, ce camp n’en a jamais fait partie » (p. 156).

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30 AVRIL 2020 INDICEBOHEMIEN.ORG


À TOUS LES ARTISTES! L’Indice diffuse vos œuvres! En ces temps de confinement, L’Indice bohémien souhaite offrir son espace de diffusion aux créateurs d’ici afin de maintenir la vitalité artistique régionale. Nous croyons que les artistes ont plus que jamais besoin de visibilité et de reconnaissance, alors on prend tout! Transmettez-nous vos chansons, dessins, poèmes, photos, histoires, tableaux, tout ce qui peut faire du bien! Envoyez vos créations à redaction@indicebohemien.org et nous les relaierons sur notre plateforme Création virale au indicebohemien.org/blogue/creation-virale Toutes les institutions culturelles – centres d’exposition, salles de spectacles, maisons de la culture, etc. – sont aussi invitées à participer.

Restons solidaires

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CONCOURS

Jusqu’au 30 avril 2020 Dans toutes les bibliothèques de la région

Visuels de L’Agent Jean utilisés par Réseau BIBLIO Abitibi-Témiscamingue-Nord-du-Québec avec l’autorisation de Presses Aventure inc. © Alex A. et Presses Aventure inc.

Angliers • Arntfield • Aupaluk • Barraute • Béarn • Beaucanton • Beaudry • Belcourt • Bellecombe • Belleterre • Berry • Cadillac • Cléricy • Clerval • Cloutier • Colombourg • Destor • Duparquet Dupuy • Fabre • Fugèreville • Guérin • Guyenne • Kitcisakik • Kuujjuaq • La Corne • La Morandière • La Motte • La Reine • Laforce • Landrienne • Latulipe • Laverlochère • Lebel-sur-Quévillon Lorrainville • Macamic • Malartic • Manneville • Matagami • Moffet • Montbeillard • Mont-Brun • Nédélec • Normétal • Notre-Dame-du-Nord • Oujé-Bougoumou • Palmarolle •Poularies Puvirnituq • Preissac • Rémigny • Rivière-Héva • Rochebeaucourt • Rollet • Salluit • St-Bruno-de-Guigues • St-Dominique-du-Rosaire • St-Eugène-de-Guigues • Ste-Germaine-Boulé Ste-Gertrude • Ste-Hélène-de-Mancebourg • Senneterre • Taschereau • Timiskaming • Val-Paradis • Val-St-Gilles • Villebois • Ville-Marie • Winneway

32 AVRIL 2020 INDICEBOHEMIEN.ORG


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