GRATUITJOURNAL CULTUREL DE L’ABITIBI-TÉMISCAMINGUE - NOVEMBRE 2022 - VOL 14 - NO 03 POÉSIE LA TRAVERSÉE DU FUNAMBULE07 ARTS VISUELS REFUGE DE SOUVENIRS PRÉCIEUX10 SOCIÉTÉ LE PARC DES MADELINOTS27 MUSIQUE NOCES DE BOIS33ARTS VISUELS LOCATION D’ Œ UVRES D’ART09 ÉLODIE LIEBER DE LA RÉUNION AU ROC DE L’ABITIBI + SPÉCIAL NOUVEAUX ARRIVANTS
EN COUVERTURE
Elodie Liebert, originaire de l’Île-de-la-Réunion,
L’indice bohémien est un indice qui permet de mesurer la qualité de vie, la tolérance et la créativité culturelle d’une ville et d’une région.
150, avenue du Lac, Rouyn-Noranda (Québec) J9X 4N5 Téléphone : 819 763-2677 - Télécopieur : 819 764-6375 indicebohemien.org
ISSN 1920-6488 L’Indice bohémien
Publié 10 fois l’an et distribué gratuitement par la Coopérative de solidarité du journal culturel de l’Abitibi-Témiscamingue, fondée en novembre 2006, L’Indice bohémien est un journal socioculturel régional et indépendant qui a pour mission d’informer les gens sur la vie culturelle et les enjeux sociaux et politiques de l’Abitibi-Témiscamingue.
CONSEIL D’ADMINISTRATION
Marie-Déelle Séguin-Carrier, présidente et trésorière | Ville de Rouyn-Noranda
Pascal Lemercier, vice-président Ville de Rouyn-Noranda
Joanie Harnois, secrétaire Ville de Rouyn-Noranda Lorrie Gagnon | MRC d’Abitibi-Ouest
Lyne Garneau | Ville de Rouyn-Noranda
Chantale Girard Ville de Rouyn-Noranda
Michaël Pelletier-Lalonde | MRC de la Vallée-de-l’Or Stéphanie Poitras | MRC de la Vallée-de-l’Or
DIRECTION GÉNÉRALE ET VENTES PUBLICITAIRES
Valérie Martinez direction@indicebohemien.org 819 763-2677
RÉDACTION ET COMMUNICATIONS
Lise Millette, rédactrice en chef invitée Paul-Antoine Martel, éditorialiste invité Valérie Martinez, coordonnatrice redaction@indicebohemien.org 819 277-8738
RÉDACTION DES ARTICLES ET DES CHRONIQUES
Benoît Beaudry-Gourd, Daniel-André Bélanger, Guillaume Daraignez, Jean-Lou David, Gabrielle Demers, Claudine Gagné, Francine Gauthier, Chantale Girard, Gabrielle Izaguirré-Falardeau, Gaston A Lacroix, Phillippe Marquis, Paul-Antoine Martel, Valérie Martinez, Charlette Ménard, Lise Millette, Yves Moreau, Stéphanie Poitras, Jeannine Provost, Valérie Rancourt, Dominique Roy, Dominic Ruel, Valéry Sicard.
COORDINATION RÉGIONALE
Valérie Castonguay | Ville d’Amos
Sophie Ouellet | Ville de La Sarre Camille Dallaire | Conseil de la culture de l’A-T Véronic Beaulé | MRC de Témiscamingue
Stéphanie Poitras | Ville de Val-d’Or
auprès du
DISTRIBUTION
Pour devenir un lieu de distribution, contactez Valérie Martinez : direction@indicebohemien.org
Merci à l’ensemble de nos collaboratrices et collaborateurs bénévoles pour leur soutien et leur engagement.
Voici nos collaboratrices et collaborateurs bénévoles pour ce numéro
MRC D’ABITIBI
Jocelyne Bilodeau, Josée Bouchard, Valérie Castonguay, Jocelyne Cossette, France d’Aoust, Paul Gagné, Gaston Lacroix, Jocelyn Marcouiller, Monique Masse, Mathieu Proulx, Manon Viens et Sylvie Tremblay.
MRC D’ABITIBI-OUEST
Maude Bergeron, Annick Dolaster, Lorrie Gagnon, Julie Mainville, Raphaël Morand, Sophie Ouellet, Julien Sévigny, Éric St-Pierre et Mario Tremblay.
VILLE DE ROUYN-NORANDA
Gilles Beaulieu, Claire Boudreau, Anne-Marie Lemieux, Annette St-Onge et Denis Trudel.
MRC DE TÉMISCAMINGUE
Émilie B. Côté, Véronic Beaulé, Carole Marcoux et Sabrina Vadeboncoeur.
MRC DE LA VALLÉE-DE-L’OR
Julie Allard, Erwann Boulanger, Nicole Garceau, Rachelle Gilbert, Michaël Pelletier-Lalonde, Nancy Poliquin, Sophie Richard-Ferderber et Ginette Vézina.
CONCEPTION GRAPHIQUE
Feu follet
CORRECTION
Geneviève Blais et Nathalie Tremblay
IMPRESSION
Imprimeries Transcontinental
TYPOGRAPHIE
Carouge et Migration par André Simard
2 NOVEMBRE 2022 L’INDICE BOHÉMIEN SOMMAIRE À LA UNE 4 ET 5 ARTS DU CIRQUE 36 ET 37 ART PERFORMATIF 28 ET 29 ARTS VISUELS 9 À 11, 13 CALENDRIER CULTUREL 39 CHRONIQUE ENVIRONNEMENT 32 CHRONIQUE HISTOIRE 12 CHRONIQUE L’ANACHRONIQUE 8 CHRONIQUE MA RÉGION, J’EN MANGE 38 CHRONIQUE TÊTE CHERCHEUSE 6 ÉDITORIAL 3 ÉDUCATION SUPÉRIEURE 25 MUSIQUE 31, 33 ET 35 NOUVEAUX ARRIVANTS 16 À 23 POÉSIE 7 SOCIÉTÉ 27 THÉÂTRE 26
géologue
ministère des Ressources naturelles et artiste. Photo : Jarmila Guivarch PEFC/01-31-106 Certifié PEFC Ce produit est issu de forêts gérées durablement et de sources contrôlées www.pefc.org
NOS BRAISES
PAUL-ANTOINE MARTEL
Le lundi de l’Action de grâces m’est apparu comme le moment idéal pour brûler le tas de branchages qui s’était accumulé pendant l’été dans notre spot à feu familial. Un saule pourri qui tombe, l’émondage de quelques branches qui retroussent, l’arrachage des tiges mortes de framboisiers : en un rien de temps, ça a créé une bonne réserve de combustible. Mais comme le tout formait un amoncellement à ciel ouvert au fond du terrain, on ne peut pas parler de conditions optimales de conservation. Il allait falloir être stratégique pour que le brasier naisse jusqu’à devenir la fournaise qui avalerait même les bûches pourries.
Ça a mal commencé. En fait, je n’avais pas le goût de prendre le temps de construire mon feu comme du monde. Mes deux plus jeunes ont eu beau transformer en boules de papier tout le contenu d’un Publisac, rien n’y fit : à part de spectaculaires flammes temporaires, nous n’avions pas de quoi griller une guimauve comme il se doit. J’ai donc dû me résoudre à faire ce qui aurait dû être fait dès le début. J’ai déblayé le tout, j’ai cassé les petites branches, puis j’ai monté méthodiquement mon petit bûcher en suivant la séquence papier – petit bois – petits rondins – bûches – bois pourri avec de la mousse et des champignons dessus. C’était tout simple : fallait juste se doter de braises, puis nourrir le feu sans l’étouffer. Après 20 minutes, l’incandescence obtenue justifiait qu’on commence à jaser guimauves. Un beau feu, ce fut.
Je trouve parfois qu’il fait froid et sombre dans notre AbitibiTémiscamingue. Tiens, on aurait besoin d’un bon feu pour se réchauffer et y voir un peu plus clair.
Nous n’échappons pas aux problèmes du monde moderne –dérèglement climatique, atteintes à la biodiversité, système économique multipliant les exclusions et les déséquilibres, perte de confiance dans les institutions, etc. –, et nous devons subir nos fléaux locaux, petits et grands – rejets atmosphériques de métaux lourds, pénurie de logements, de main-d’œuvre et de places en garderie, manque de
reconnaissance envers le peuple Anishnabe, dévitalisation de certains milieux ruraux, etc.
Face à ces situations parfois critiques, on peut percevoir dans la population toute la palette de la fatalité. Ça passe de l’ignorance pure au désintéressement, ça offre des reflets de découragement et des teintes d’apathie et, bien souvent, on peut trouver des éclaboussures de cynisme et de colère intenses.
Le processus électoral de cet automne aurait été un bon moment pour faire un temps d’arrêt et réfléchir aux moyens dont nous disposons pour redresser la barre et reprendre un peu de contrôle sur les événements qui nous touchent. Malgré quelques idées intéressantes ou emballantes ici et là, foin de vision globale de la société, de projet, voire de volonté de mettre à contribution les efforts de la population. On propose trop souvent des solutions simples à des problèmes complexes, en fonction de préoccupations recensées par des sondeurs ou des firmes de relations publiques.
La racine du désintérêt et du cynisme se trouve en partie dans cette absence de direction générale, de sentiment de cohérence face à cette avalanche de promesses et de chiffres. Le message qu’on nous lance, à travers programmes et discours, c’est : « Nous avons les solutions – nous savons quoi faire – voilà ce qui est bon pour vous. » On trouve là-dedans les ingrédients d’une série d’échecs successifs, du « mur à mur » pour toutes les régions, peu d’adhésion populaire, un manque de ressources du gouvernement pour réaliser ses projets…
Surtout, il manque d’humanité et d’humains dans tout ça. Bien sûr, le gouvernement provincial est important, que ce soit pour établir des normes, pour redistribuer les ressources ou encore et surtout pour soutenir les communautés. Pourtant, c’est à l’échelle des communautés que se trouvent les solutions à bien des maux et l’amorce d’un rebond de notre grande marche vers un monde meilleur.
Il fut un temps où notre feu régional était le plus beau, le plus chaud, le plus ardent, le plus lumineux aussi. Depuis l’impardonnable saccage des institutions collectives régionales par le gouvernement libéral de Philippe Couillard, nous avons perdu notre erre d’aller. Nous avons pourtant inventé les conseils régionaux de développement, les forums jeunesse régionaux et l’Observatoire de l’Abitibi-Témiscamingue. Nous avons été parmi les premiers à embaucher des agents de développement rural. Nous avons inventé un modèle de concertation et de planification bien à nous qui faisait l’envie et l’admiration de bien des régions.
Cette culture, cette façon d’être au monde, semble s’être éteinte. Nous ne parlons plus d’une seule voix. Nous avons oublié comment régler des problèmes en groupe. Nous ne tenons plus nos petites messes et nos grands-messes qui nous permettaient de nous dire nos quatre vérités avant de retrousser nos manches et de terrasser l’adversité.
S’il existe pour nous un moyen de faire face aux problèmes et défis que la vie pose sur notre route, c’est en retrouvant cette capacité à travailler ensemble. Comment? En ravivant le feu de notre espoir et la flamme de notre volonté de faire, pas en voulant faire vite, en allumant n’importe quoi, n’importe où et n’importe comment. Il nous faut déblayer le spot, trouver notre petit bois et bien le disposer, grossir nos braises et alimenter le feu sans l’étouffer.
Dans cette allégorie, le combustible, ce sont les gens et leurs actions. Oui, c’est plus de travail que de juste vider un bidon d’essence ou d’utiliser un lance-flamme. Toutefois, une fois enflammé, un brasier minutieusement construit peut brûler très fort et très longtemps si on l’entretient.
L’avantage de ce chantier collectif sur mon feu de l’Action de grâces : il nous reste des braises chaudes qui couvent toujours. Ces charbons ardents, c’est notre culture, notre histoire, les liens qui unissent les communautés et le savoir-faire des gens d’ici. Il est temps de doucement souffler dessus et de chasser nos ténèbres.
L’INDICE BOHÉMIEN NOVEMBRE 2022 3 – ÉDITORIAL –
4 NOVEMBRE 2022 L’INDICE BOHÉMIEN
JARMILA
GUIVARCH
UNE
ÉLODIE LIEBER : DE LA RÉUNION AU ROC DE L’ABITIBI
LISE MILLETTE
Bouille sympathique, regard pétillant et œil vif et clair qui disparaît presque lorsqu’un sourire illumine son visage, Élodie Lieber, la scientifique et géologue, est aussi, à ses heures, une créatrice de talent qui dévore les défis avec plaisir et appétit.
Vous l’avez peut-être aperçue vêtue d’une robe bleue fleurie dans la pièce déambulatoire Val-d’Or vous raconte, dans une soirée de contes, son cahier à la main et criant « P’tit macro » en créole réunionnais, ou battant un gâteau au chocolat dans une publicité pour le 60e anniversaire de Béton Barrette à Val-d’Or. Élodie Lieber se décrit elle-même comme curieuse et ouverte aux découvertes.
« J’ai un parcours scientifique et j’aime découvrir de nouvelles choses et la scène culturelle », dit-elle.
Originaire de l’île de la Réunion, Élodie Lieber s’est posée à Vald’Or en 2008 à la mi-vingtaine, à la fin de ses études en génie de l’environnement. « Je devais ensuite faire un stage et le seul endroit où j’ai trouvé, c’était à Val-d’Or, pour l’entreprise Geologica Groupe Conseil », dit-elle.
Elle plonge dans cette aventure inconnue pour travailler dans le milieu de l’exploration minière, la cartographie, l’échantillonnage et l’hydrogéologie. Ce stage lui permet de découvrir le milieu et, par la suite, elle s’inscrit à l’Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue (UQAT) dans un
microprogramme en environnement minier, puis en génie minéral. Elle travaille aujourd’hui pour le ministère de l’Énergie et des Ressources naturelles en Abitibi-Témiscamingue.
« Je ne crois pas que j’ai le talent d’une artiste, mais je suis ouverte à sortir de ma zone de confort et je fais ça par plaisir », confie-t-elle.
Elle a pourtant été repérée par Nicole Garceau, du Festival de contes et légendes en Abitibi-Témiscamingue, qui cherchait à réunir des femmes immigrantes pour le spectacle intitulé Des récits et des femmes, contes pour un tour du monde, animé par Marta Saenz de la Calzada.
« Je ne savais pas trop comment aborder ça. Je suis allée chercher un personnage québécois (Ti-Jean) et un autre réunionnais (Ti-Zean), et j’ai fait une histoire où ils se rencontrent en montrant leurs univers parallèles. C’était aussi une manière de dire, “on vient d’ailleurs, mais on s’intègre aussi à une culture” », explique-t-elle.
Outre la performance sur scène, l’Abitibienne d’adoption précise qu’en acceptant ce défi elle a aussi pris plaisir au voyage en lui-même. « Depuis que je suis maman, je vais moins aux spectacles […] lorsque nous sommes allées à RouynNoranda pour présenter le spectacle, nous avons parlé de nos pays. C’était passionnant d’entendre ce que ces femmes racontent. Ça fait voyager. »
MAL DU PAYS?
Établie en Abitibi-Témiscamingue où elle a eu ses deux enfants avec son conjoint rencontré dans la région, Élodie Lieber n’en reste pas moins attachée à son pays d’origine. « Je viens d’un pays tropical, alors quand l’automne commence, je me sens encore plus loin. Heureusement, on vit dans une époque qui permet plusieurs moyens de communication », assure-t-elle.
Elle ajoute que ses parents viennent la visiter chaque année en Abitibi et qu’elle fait le tour avec eux de nouveaux lieux de découvertes. Reste tout de même qu’avec l’arrivée des enfants un petit mal du pays se fait sentir.
« Je crois que pour tout nouvel arrivant, il faut aussi se laisser du temps. De ne pas dire qu’il n’y a pas ceci ici ou cela, ou on est loin. Simplement prendre le temps d’être curieux, de découvrir les gens et des expériences et au bout du compte, on ne va pas s’ennuyer. Il suffit de trouver ce qui nous allume », conclut-elle.
Élodie Lieber a pris racine et ses nouvelles aventures la portent. D’ailleurs, son conte de Ti-Jean et Ti-Zean a voyagé jusqu’à Sudbury où elle est allée le présenter.
L’INDICE BOHÉMIEN NOVEMBRE 2022 5 – À LA
JARMILA
GUIVARCH
JARMILA GUIVARCH
– TÊTE CHERCHEUSE –
LA REVANCHE DES GEEKS
DOMINIQUE RUEL
Quand j’écris ce texte, nous voilà les deux pieds dans l’automne. Il pleut aux deux jours. C’est morne. Au hockey, les Canadiens auront une saison difficile, la COVID montre de nouveau le bout de son nez et avec une CAQ réélue sans trop forcer, ça craint pour l’hiver, non? J’ai donc le goût de repenser à la saison chaude, à mes vacances, surtout à ce voyage avec famille et grands amis sur la Côte-Nord. On grinçait des dents quand l’essence a dépassé les deux dollars le litre. Mais nous avons eu de belles journées faites de promenades, de lecture, de jeux et de bonnes bouffes.
Ce que je retiens surtout de mon été, cependant, c’est cette expérience culturelle que j’ai vécue à Montréal en juillet. Peut-être même un choc. Sans traverser le système solaire, je me suis retrouvé dans un autre univers. Pour faire plaisir à ma fille, je l’ai amenée au Comiccon de Montréal 2022. C’est la grand-messe des geeks, les fanatiques d’imaginaire, de films, de BD de science-
fiction, de nouvelles technologies. Des gens de tous âges, des cultivés. Je l’avoue, j’y allais avec certaines idées préconçues. Je me disais : « Tiens, les introvertis sont en congrès! » Dès le hall, on se rend compte qu’on n’est pas dans un congrès de comptables agréés. Les déguisements abondent : Star Wars, Mario, Donjon Dragons, Harry Potter. Et dans la grande salle, le spectacle est encore plus impressionnant. Des centaines de kiosques de vente : dessins, figurines, livres, œuvres d’art, bandes dessinées, création en direct, etc. La caverne d’Alibaba, la Batcave des geeks, de moins en moins marginaux d’ailleurs. Les gens font la file pour un autographe et des photos.
Les geeks prennent leur revanche. Objets de dérision avant, ils étaient perçus comme des souffre-douleurs. Le cliché, c’était l’ado boutonneux. Mais avec Internet, les réseaux et les portables, l’image a changé. Christian Guy, père de la fameuse Toile du Québec, affirme : « Le geek d’aujourd’hui est fier, mais peut-être un peu acrimonieux (…) je préfère de loin vivre dans une société dirigée par des
poètes, des artistes des créateurs que des technocrates. » Dans son ouvrage The Geek Manifesto, Mark Henderson juge que les geeks doivent investir l’espace politique pour faire rayonner la culture, la science et les techniques. Les geeks ont gagné.
Surtout, les geeks ont raison au fond. Dans ces temps d’incertitude comme ceux que nous vivons, ils offrent des remèdes : l’imagination, l’évasion, la création, la passion, souvent dévorante, la fantaisie, le rêve en somme. Mais sans être déconnectés du réel, car ils aiment apprendre et découvrir. Des modèles à suivre en fait.
On a finalement passé une superbe journée (c’est le temps nécessaire pour tout voir!) et j’y ai fait des découvertes. Ça me donne le goût d’être un peu plus geek. La bizarrerie, la fantaisie et l’étrangeté ont leur place. Geek vient du vieil anglais gike, dans le sens de fou, de sot. C’est dire le chemin parcouru! De toute façon, on est tous le bizarre ou le fou de quelqu’un d’autre.
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6 NOVEMBRE 2022 L’INDICE BOHÉMIEN
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LA TRAVERSÉE DU FUNAMBULE
LA RÉDACTION
La traversée du funambule est un spectacle poétique de Marta Saenz de la Calzada réalisé à partir du recueil Des petites choses pour l’eau du peintre et poète espagnol Luis Saenz de la Calzada, son père. Les poèmes de ce recueil ont été écrits entre 1952 et 1953, à la suite du décès du père du poète qui en a été bouleversé. Ces textes offrent la possibilité d’une réflexion sur la fragilité de la vie, l’amour, le passage du temps, l’inéluctabilité de la mort, ce dernier thème traversant tout le recueil. L’écriture, très moderne, s’apparente à l’esthétique surréaliste récemment apparue et qui prend son essor à cette époque. Une tournée poétique dans les bibliothèques des quartiers ruraux de Rouyn-Noranda aura lieu en novembre et décembre.
Développé en France par André Breton, le surréalisme a été exploré en Espagne par des artistes universellement connus tels, entre autres, Salvador Dalí en peinture, Luis Buñuel au cinéma, ainsi que Federico García Lorca au théâtre et en poésie. Luis Saenz de la Calzada a fréquenté ces artistes et a contribué à ce mouvement artistique. Comme acteur, il a été membre de La Barraca, théâtre espagnol universitaire fondé par Lorca, qui parcourait les villages d’Espagne pour présenter ses spectacles.
Les thèmes du spectacle La traversée du funambule, toujours d’actualité, réveillent encore en nous l’émotion, puisqu’ils sont inévitables. Ils sont devenus encore plus sensibles et pertinents aujourd’hui, en raison particulièrement de la pandémie de coronavirus et des mesures d’isolement qui ont suivi. Présentement, l’humanité est confrontée d’une manière aiguë à la mort d’êtres chers dans des conditions traumatisantes, dans la solitude et dans la peine. La fragilité et le caractère éphémère de la vie nous apparaissent avec de plus en plus d’acuité dans ce contexte de pandémie qui vient s’ajouter à celui des guerres qui sévissent partout sur la planète, semant la mort et la destruction dans plusieurs régions du monde.
Marta Saenz de la Calzada a créé le spectacle La traversée du funambule pour partager sa culture d’origine, espagnole, avec nous, gens de son pays d’adoption. Pour entreprendre un dialogue, en quelque sorte, afin de nous faire réaliser que, malgré nos différences, nous prenons part à une même destinée, nous sommes soulevés par les mêmes émotions et, tels des funambules en équilibre sur le fil de la vie, nous portons « de l’eau dans l’âme comme un balancier de sécurité ».
Avec une mise en scène épurée, assurée par Jean-Guy Côté, l’accompagnement musical de Johanne Bérubé et des éclairages dépouillés conçus par Lyne Rioux, ce spectacle poétique promet une atmosphère intimiste et enveloppante.
Le calendrier de tournée est en cours d’élaboration. Quelques dates sont déjà confirmées : Bellecombe, 13 novembre à 13 h, Evain, 10 décembre à 19 h et Destor, 11 décembre à 13 h.
Pour ne rien manquer des dates de la tournée, suivez la page Facebook de Réseau BIBLIO ATNQ.
L’INDICE BOHÉMIEN
NOVEMBRE 2022 7 – POÉSIE –
LA SHOP
À
IMAGES
L’ANACHRONIQUE –
JE VEUX BIEN
PHILIPPE MARQUIS
Remontons à la fin du mois d’août dernier. La campagne électorale s’amorce sous un beau ciel bleu. Pour donner le ton, le candidat de la Coalition Avenir Québec (CAQ) dans l’Assomption, et premier ministre sortant, François Legault, annonce ses premiers engagements.
Il garantit que, en cas de réélection, son parti remettrait 600 $ à toute personne gagnant moins de 50 000 $ par année. Les personnes dont le revenu se situe entre 50 000 $ et 80 000 $ recevraient, pour leur part, un chèque de 400 $. Ces montants devraient être envoyés en décembre… et aideraient à traverser la pénible période d’inflation.
Six cents douilles « claires », c’est de l’argent en maudit! Ça aide à payer le chauffage, le loyer, l’hypothèque ou à acheter de bons vêtements d’hiver aux enfants. On pourra faire réparer une dent, mettre de la bonne nourriture sur la table ou rembourser les nouveaux pneus grâce à ce cadeau. Avec quatre cents douilles, on pourra faire de plus de beaux présents, passer des Fêtes un peu moins à crédit, changer d’ordinateur ou aller voir la parenté au Lac-Saint-Jean.
Les dernières élections ont donc commencé avec des promesses de ce genre. Elles font partie de ce que la CAQ appelle le « bouclier anti-inflation » . Celui-ci comporte aussi des baisses d’impôt et des montants pour les personnes aînées les moins fortunées. Ainsi, on fera passer à 2 000 $ maximum l’allocation destinée aux personnes âgées de 70 ans et plus qui ont un revenu annuel de moins de 24 195 $. Assurément, ces sommes-là
combleront un paquet de besoins en ces temps où les banques alimentaires croulent sous les demandes d’aide. C’est possible qu’elles expliquent en grande partie la vague bleue du 3 octobre dernier.
Moi, je veux bien qu’on aide les gens. En fait, je veux juste ça. Mais, si en plus les impôts baissent, on diminuera les revenus de l’État. Or, de l’argent, il va en falloir aussi pour rénover nos écoles. Ça va en prendre pour réduire le nombre d’élèves par classe, pour mieux payer les enseignantes et enseignants et pour engager plus de spécialistes afin de soutenir les jeunes. On va avoir besoin de montants très importants pour embaucher et former du personnel dans nos hôpitaux. Ça va en prendre des moyens si on veut garder nos personnes aînées à la maison aussi longtemps que possible, non? Il y a une crise du logement. On va les trouver où les millions nécessaires à la construction de logements sociaux? À part ça, il faut s’adapter aux changements climatiques tout en affrontant ces phénomènes météo de plus en plus nombreux, sévères et inquiétants. Ça en fait de l’ouvrage!
Évidemment, on peut croire que, chacun de son bord, on pourra s’en sortir. Le genre de pensée qui nous donnera de l’air pur sans imposer de normes…
Au Québec, l’avenir est maintenant vague et bleu pâle. Les cadeaux qui viennent parent au plus urgent, mais se font sans réflexion sur notre avenir, et celui de nos enfants. Alors, je veux bien, mais quel prix paierons-nous vraiment si nous continuons à surfer ainsi?
8 NOVEMBRE 2022 L’INDICE BOHÉMIEN –
LOCATION D’ŒUVRES D’ART : SUSPENSE ET BATTEMENTS DE CŒUR
GASTON A. LACROIX
Amos, le jeudi 15 septembre 2022. Les représentants de quinze entreprises arrivent au premier étage de la Maison de la culture, à 17 h, pour l’événement Location d’œuvres d’art
Ana Nunez Gonzalez présente l’organisation et les procédures du 5 à 7. Sylvie Gagnon, marraine de l’événement, accueille la quarantaine de personnes présentes en prononçant un mot de bienvenue. Boissons et petites bouchées sont aussi de la partie.
DÉFILÉ DE BEAUTÉS
Sur le pourtour des murs de la grande salle et ornant le centre de la longue tablée, les 48 œuvres d’art accueillent, chargées d’espérance, les amateurs.
Endimanchés, chacun dans son style, de l’abstrait au classique en passant par le contemporain, le paysagiste ou le figuratif, haut en couleur et emplissant de bonheur chaque spectateur, les tableaux sont aussi porteurs d’interrogations : de qui serai-je le coup de cœur?
Quarante minutes pour déambuler devant ces beautés ne sont pas de trop. Le coup de foudre ne survient pas à coup sûr. « Un moment donné, c’est sans crier gare que Beauté d’un soir a touché mon âme, dit un spectateur. Voilà mon premier choix, mais je dois trouver une deuxième toile, car Beauté d’un soir sera peut-être choisie par un autre amateur qui me précédera au tirage. »
COUPS DE CŒUR ET RAISONS
L’art dépasse l’objectivité… et il y a davantage que la renommée de l’artiste. En effet, « Renoir ne sait pas peindre », pouvait-on lire, le 5 octobre 2015, sur les pancartes de manifestants, devant le Museum of Fine Arts de Boston. Pourquoi admirons-nous un tableau?
Ce soir, à Amos, à qui ces œuvres sont-elles destinées? Selon l’organisme ou le professionnel qui désire louer une œuvre, ce peut être un coup de cœur qui l’accompagnera dans son bureau personnel. On loue aussi une œuvre pour créer une ambiance, pour le prestige, pour l’énergie, pour l’innovation. On peut aussi vouloir encourager un ou une artiste ou encore en faire profiter sa clientèle dans la salle d’attente.
Chacun a son propre dictionnaire, son vécu. Bien que les réponses à une trentaine de questions savantes que soulève un tableau (matériaux, techniques, formes, couleurs, compétences, etc.) permettent « d’interpréter » le travail d’un artiste et de le « comprendre » plus intimement, comment le néophyte qui n’a pas eu de formation en l’histoire de l’art peut-il être saisi de bonheur devant une œuvre?
Devant cette collection riche de cultures diverses, de genres et de générations, de façons, de dimensions et de couleurs, une petite voix me dit : « Essaie de trouver une authenticité qui rejoint la tienne, un ravissement ou quelque chose qui saisit ton attention, sans que tu saches pourquoi, dans le plaisir d’une apparition, qui, peut-être jamais ne te révélera son énigme. »
SUSPENSE
Devant un public silencieux et figé dans ses attentes, accompagnée d’Ana Nunez Gonzalez qui tient la boite de noms, Anne-Marie Jutras procède au tirage. Oui, une sélection est nécessaire pour que les œuvres soient attribuées. Le tirage au sort fait force de loi.
Si mon nom était sorti en premier, mon premier choix m’aurait été attribué, comme plusieurs d’entre nous ont déjà eu cette chance. Mais, quand mon nom sort au tirage, cela fait déjà dix longues minutes que j’attends sa sortie, je pourrai opter pour mon deuxième choix, s’il n’a pas été loué entretemps. Ouf… quel suspense!
BILAN
Une bonne demi-heure sera nécessaire pour procéder au tirage afin que chaque personne se prévale de l’un de ses choix : premier, deuxième ou même troisième, selon le hasard qui apporte son lot de surprises. Heureusement qu’un bel éventail de tableaux signifie une belle gamme de choix. Et pratiquement chacun y trouve son compte.
De cette façon, pour la grande joie ou la surprise des artistes, ou à la déception de certains, ainsi va la vie, 30 œuvres sur 48 ont trouvé preneur. Elles iront agrémenter les locaux de 15 entreprises ou professionnels.
Félicitations aux principales organisatrices de cette 6e édition de Location d’œuvres d’art : Sylvie Gagnon, Sylvie Coulombe, Ana Nunez Gonzalez, Anne-Marie Jutras et Rollande Brochu Larouche et bravo aux entreprises, commerces ou professionnels qui ont à cœur de faire rayonner la culture locale.
L’INDICE BOHÉMIEN NOVEMBRE 2022 9 – ARTS VISUELS –
LES LIEUX, CES REFUGES DE NOS SOUVENIRS LES PLUS PRÉCIEUX
DOMINIQUE ROY
L’une travaille surtout en art imprimé, alors que l’autre s’intéresse davantage à la sculpture et à l’installation. Ensemble, elles ont eu le désir de faire cohabiter leurs démarches artistiques distinctes pour mettre en scène la mémoire de lieux significatifs, une œuvre qui s’inspire du patrimoine bâti de la région du Témiscamingue. L’exposition La mémoire des ruines, signée Édith Laperrière et Émilie B. Côté, est présentée au Rift jusqu’au 19 novembre.
PARTICIPATION DE LA POPULATION TÉMISCAMIENNE
C’est par un appel à tous que les artistes ont récolté des photographies, témoignages, matériaux et objets symboliques de lieux porteurs de souvenirs tels que des camps de chasse, des chalets, de vieilles maisons, des granges, des commerces, etc. « J’ai même reçu une photo du village de la mine de Mud Lake, près de Belleterre, qui n’existe plus aujourd’hui, mais qui nous rappelle que l’Est témiscamien a aussi vécu de l’exploitation minière à une certaine époque », raconte Édith Laperrière, encore impressionnée par la participation des gens et l’attachement qu’ils ont envers des lieux bien précis. « De mon côté, ma mère a envoyé une image de la petite cabane à abeilles où mon grand-père faisait son miel. C’est tout ce qui lui reste de l’endroit où elle a grandi. J’ai aussi récupéré la clé de la maison, même elle n’existe plus. Elle fait partie de mon installation », ajoute Émilie B. Côté.
PROCESSUS DE CRÉATION
Le projet a été porté à deux, mais l’aspect créatif s’est déployé de façon individuelle. Édith Laperrière s’est inspirée des photos reçues pour la conception de ses images en dessins en sélectionnant ce qui semblait le mieux illustrer les souvenirs des gens. « Comme à l’habitude, j’ai déconstruit et transformé les images, puisque l’objectif n’était pas de faire une œuvre à caractère historique représentative de la réalité, mais une œuvre davantage axée sur les émotions des gens envers ces
lieux. » L’impression en sérigraphie de ses grands papiers a été un défi technique puisque ses procédés d’impression habituels n’étaient pas adaptés à la création d’une œuvre de format géant. Heureusement, elle a pu utiliser l’équipement de L’Atelier les Mille Feuilles qui lui a facilité la tâche.
Une fois cette étape terminée, Émilie B. Côté est entrée en scène, créant son œuvre en s’inspirant de celle de sa partenaire. « Mon projet est en quelque sorte une réponse à son œuvre. » Son défi? Créer sa partie en une semaine. « J’ai récolté des objets et des matériaux cet été, mais tant que l’espace d’exposition n’était pas disponible, je ne pouvais pas vraiment commencer à monter mon œuvre, puisqu’elle est de très grande dimension. C’est la beauté de l’installation, il faut s’imbriquer dans un lieu et s’inspirer de l’espace disponible.
Il est difficile de prévoir la finalité de l’œuvre, même si on en a une vague idée. »
DEUX ARTISTES, UNE ŒUVRE UNIQUE
Les estampes sur une bande de papier couvrent la totalité de l’espace mural et l’installation sculpturale au centre rassemble différents éléments. Les impressions de l’une et les sculptures de l’autre forment donc un tout complémentaire dont le message rappelle que « par nos souvenirs et les traces du passé, nous détenons tous des parcelles d’histoire du Témiscamingue » et que « les lieux que nous avons habités se sont transposés dans nos souvenirs et nous habitent encore, presque comme un refuge intérieur ».
10 NOVEMBRE 2022 L’INDICE BOHÉMIEN – ARTS VISUELS –
CAROLINE PERRON
L’INDICE BOHÉMIEN NOVEMBRE 2022 11 CAROLINE PERRON
MICROBRASSERIE NOUVELLE BOUTIQUE
101,
HISTOIRE
DE 1947 À 1951, UNE VAGUE DE NOUVEAUX ARRIVANTS À ROUYN-NORANDA
BENOÎT BEAUDRY GOURD, PRÉSIDENT DE LA SOCIÉTÉ D’HISTOIRE DE ROUYN-NORANDA
Le 1er mai 1947, le gouvernement canadien annonce la création d’un programme spécial d’immigration pour accueillir des milliers de personnes se trouvant dans les camps de l’Organisation internationale pour les réfugiés (OIR) dispersés dans plusieurs pays d’Europe. À l’époque, cet organisme sollicite plusieurs pays, comme les États-Unis, l’Australie et le Canada, pour accueillir ces réfugiés. Les grandes entreprises sont alors autorisées à recruter des travailleurs directement dans ces camps, en dehors du processus régulier de sélection des immigrants. Ceux-ci arrivent au Canada avec en main un contrat de travail d’un an qu’ils doivent respecter sous peine d’expulsion. À la fin de leur contrat, ils ont le droit de demeurer au pays après avoir reçu un certificat de bonne conduite de leur employeur. Le Canada accueille 186 154 personnes dans le cadre de ce programme qui prend fin avec la fermeture, en 1951, des derniers camps de réfugiés en Europe. Les Polonais et les Ukrainiens sont les plus nombreux à s’en prévaloir, mais on retrouve aussi en grand nombre des Yougoslaves, des Tchécoslovaques, des Baltes et des Russes. Ces nouveaux arrivants seront rapidement connus au pays sous le nom de DP, l’acronyme anglais de personnes déplacées (displaced persons).
Rouyn-Noranda reçoit plusieurs centaines de ces immigrants qui viennent travailler dans les mines de la région qui manquent de main-d’œuvre alors que l’industrie minière connait une forte croissance dans l’après-guerre. La présence des immigrants dans les mines se fait dès lors davantage sentir. Ces nouveaux arrivants redonnent vie aux différentes communautés culturelles dont les activités étaient en veilleuse depuis la fin des années 1930. Ils sont jeunes, souvent plus instruits et surtout beaucoup plus attachés à leur langue et à leur culture que les immigrants de la génération pionnière fréquemment en voie d’assimilation.
Le recensement de 1961 permet de mieux apprécier l’impact de cette vague d’immigration sur le profil démographique de Rouyn-Noranda qui compte à cette date 30 212 habitants. On recense 3 167 immigrants qui forment 10,6 % de la population. Près de 50 % d’entre eux sont arrivés au Canada après 1945.
Différents groupes d’immigrants défilent sur l’avenue Principale lors des festivités du 25e anniversaire de fondation de Rouyn.
Bibliothèque et Archives nationales du Québec, RN.
Les communautés culturelles sont alors à leur apogée. Jamais elles ne seront aussi nombreuses et leur contribution à la vie collective ne sera aussi importante. On assiste par la suite à un déclin extrêmement rapide. Au cours des années 1960 et 1970, l’industrie minière connaît un net ralentissement de ses activités marqué par de nombreuses fermetures de mines, surtout parmi les plus anciennes, justement celles où les immigrants sont les plus nombreux. Un mouvement d’exode s’amorce alors chez les immigrants en direction du sud de l’Ontario, où le secteur manufacturier est en plein essor. La vie communautaire des différents groupes va peu à peu s’effriter.
La contribution des immigrants, tant ceux de la première génération que ceux arrivés dans l’après-guerre, au développement de Rouyn-Noranda est importante. Ils ont participé par leur travail à la croissance économique de la région. Et surtout, leur présence a largement contribué à faire de Rouyn-Noranda une société plus ouverte et plus perméable aux grands mouvements sociaux et culturels du 20e siècle.
12 NOVEMBRE 2022 L’INDICE BOHÉMIEN
217 Route
Nédélec –
–
NOS PLUS PETITS DÉNOMINATEURS COMMUNS
GUILLAUME DARAIGNEZ
« Et cependant je continue à chercher quelqu’un qui ne me comprendrait pas et que je ne comprendrais pas, car j’ai un besoin effrayant de fraternité. » – Emile Ajar, Pseudo
Deux postulats :
« Le plus court chemin vers l’universel passe par le singulier » ET « Pas besoin de grand-chose pour sonder les profondeurs ».
Regardez l’apnéiste. Il va seul et presque nu vers le sentiment océanique où bientôt il ne sera plus un, mais tout autre
Sur ce, plongeons dans le travail de Jolyane Plante.
D’abord, soyons secs, comme les matériaux qu’elle privilégie pour dessiner. Elle plonge en elle, fusain en main, et remonte avec des sensations, des images et des rêves. Elle dessine des émotions, densifie l’impalpable. Les processus inconscients l’attirent. Le caché, l’oublié, l’insu, l’indicible… La métaphore vient au secours du silence. Jolyane Plante plonge dans le noir pour rencontrer la clarté.
SOI ET LE MÊME
« Je veux que l’on réalise que l’on possède tous cette profondeur, ces inquiétudes et cette nostalgie », écrit-elle. Au fond, nous vivons tous la même chose. Par son art, Jolyane Plante souhaite révéler nos plus petits dénominateurs communs.
Elle cherche en elle ce que nous avons tous en nous. Elle sonde son soi pour rencontrer le même. Ce qui la mine, elle l’extrait et le projette dans ses œuvres. Le trait du dessin organise la densité des sentiments.
Elle veut pétrir nos joies, imager nos peines. Elle veut dessiner nos mélancolies communes. Elle veut qu’on se comprenne. Dans nos sociétés de particules élémentaires (l’individu anomique s’agitant sous un ciel vain), son art cherche à réunir les solitudes.
C’EST NORMAL D’ÊTRE EXCEPTIONNEL
« Je trouve si beau le fait que chaque être puisse avoir sa propre profondeur individuelle, presque impossible à discerner », s’émeut-elle. Voilà la tension, le paradoxe auquel Jolyane Plante carbure : tous semblables; tous différents.
Autrement dit : tout le monde est triste à sa façon (les optimistes peuvent mettre joyeux à la place, ça fonctionne).
L’art célèbre les singularités en éclairant l’universel. Jolyane Plante est une artiste. Sa mission, si elle l’accepte, est de saisir l’universel des univers particuliers. Au fond, c’est normal d’être exceptionnel.
L’HORIZON DE L’EFFACEMENT
Si vous découvrez cette artiste à travers cet article, c’est que vous avez raté son exposition récente au Cégep de l’Abitibi-Témiscamingue (CégepAT). Heureusement pour vous, il devrait y avoir une suite.
« Plus le temps avance, plus je crée des formes qui s’effacent, qui semblent se perdre à travers elles-mêmes », constate-t-elle. Voilà le défi, celui de plonger en soi pour s’estomper. (S’)effacer pour mieux voir.
Deux ans au CégepAT, une bourse d’excellence et une exposition plus tard, Jolyane Plante a rallié Sherbrooke où elle bachote l’histoire. Toutefois, l’art la titille. Ce sera probablement l’histoire de l’art. Et, bientôt, sûrement, on l’espère, un retour à l’atelier.
Un horizon se dessine : « J’aimerais pousser cette technique [de l’effacement], lorsque je me remettrai à créer. »
C’est souhaitable.
L’INDICE BOHÉMIEN NOVEMBRE 2022 13 – ARTS VISUELS –
VÉRONIQUE DOUCET
Félicitations aux lauréats
ORGANISME OU ÉVÈNEMENT DE LA RELÈVE
Cabaret de la dernière chance - Nouvelle administration
• Pour saluer un lieu culturel mythique à Rouyn-Noranda qui, grâce à sa nouvelle administration, peut fêter en continuité 40 ans d’existence;
• Pour leur capacité à survivre et à s’adapter durant les longs mois de pandémie, tout en apportant plusieurs améliorations à ce lieu;
• Pour leur proactivité en ajoutant des nouveautés comme une terrasse sur la rue, une cuisine, le renouvèlement des équipements nécessaires à la présentation de spectacles et l’aménagement, au sous-sol, d’un lieu de pratique pour les groupes de musique;
• Pour leur collaboration comme salle de diffusion pour plusieurs festivals et organismes;
• Pour favoriser l’expression artistique à plusieurs niveaux et sans jugement, tout en s’appuyant sur un comité de programmation regroupant plusieurs expertises;
• Pour programmer régulièrement des contenus culturels variés : musique, humour, improvisation, karaoké, poésie, spoken word et allant jusqu’à installer un skatepark dans la rue.
ORGANISME OU ÉVÈNEMENT DE LA PERSÉVÉRANCE
Bar-Librairie Livresse
• Pour avoir réussi à survivre durant les longs mois de la pandémie, et ce, sans le soutien d’organisme public et tout en s’adaptant, par exemple en faisant la livraison de livres;
• Pour offrir un espace stimulant au milieu littéraire régional;
• Pour leur capacité à incarner profondément l’amour de la lecture en offrant un service personnalisé dans leur recommandation de livres;
• Pour faire connaître les auteurs et autrices de la région, en organisant divers événements : soirée de lecture, lancement de livres ou séance de signatures;
• Pour collaborer avec des partenaires afin d’organiser des évènements culturels tel Objets éperdus – Histoires controuvées au profit de la Fondation pour l’Alphabétisation.
CULTURE ET RURALITÉ Au pays des pick-up
• Pour l’audace de ce projet et sa capacité à collaborer avec les milieux où les spectacles sont présentés;
• Pour l’originalité, l’esthétisme d’une scène roulante offrant des spectacles d’une grande qualité partout sur le territoire;
• Pour avoir été à la rencontre des communautés en milieu rural et pour s’adresser à un public diversifié, particulièrement les jeunes;
• Pour la qualité des artistes invités;
• Pour la compétence, la constance et le professionnalisme dont font preuve les techniciens de cette scène mobile;
• Pour la présentation de 7 spectacles diversifiés et de qualité dans des lieux improbables des quartiers ruraux de Rouyn-Noranda tout au long de l’été 2022.
•
ARTISTE
Suzanne Blais
• Pour ses 50 années d’enseignement du piano, pour ses 40 années comme directrice artistique et ses 30 dernières années à la direction complète du Centre musical En sol mineur;
• Pour sa gouvernance lors de la pandémie ayant permis la poursuite des cours individuels grâce à l’adaptation des salles de cours et la prestation de cours à distance. Ce fut d’ailleurs la seule école de musique de la région qui a su poursuivre ses activités et ainsi permettre aux élèves qui le désiraient de passer les examens et poursuivre leur scolarité en musique;
• Pour souligner sa créativité, l’originalité des manifestations publiques qu’elle organise dont les mémorables soirées bénéfices afin de recueillir des fonds pour offrir des cours de musique aux moins bien nantis;
• Pour sa présence comme musicienne en animant, pendant quelques années, un groupe consacré à Piazzola et plus tard, un groupe de percussions brésiliennes, tout en collaborant comme pianiste à des activités théâtrales ou autres manifestations culturelles ou sociales;
Pour la mission qu’elle s’est donnée de partager la musique au plus grand nombre de personnes possibles et de mettre les artistes en valeur : les pianos publics, les bourses d’études pour les plus démunis, la réalisation d’un film avec les élèves et sa présentation au cinéma et même en mapping sur des édifices publics;
• Pour son leadership auprès de ses enseignants, de son conseil d’administration, de ses partenaires devenus complices au fil des années et de ses fidèles commanditaires et donateurs qui permettent au Centre musical d’être un phare dans l’univers culturel de Rouyn-Noranda depuis 40 ans;
• Enfin, pour ses milles audaces, sa folie contagieuse et pour l’ensemble de son œuvre.
14 NOVEMBRE 2022 L’INDICE BOHÉMIEN
!
Louis Jalbert
Louis Jalbert
Alex Dallaire et Magali Monderie-Larouche
Bérénice Vallée, Camille Barbotteau, Magali Monderie-Larouche, Rosalie Chartier-Lacombe, Alex Dallaire et Mavrick Floquet
Julie St-Amour et Antoine Bordeleau
Louis Jalbert
Louis Jalbert
C’est dans le cadre du 5 à 7 des Journées de la culture que la Ville de Rouyn-Noranda remettait ses Prix de la culture 2022. Le jury était composé de mesdames Louise Bédard et Geneviève Aubry et de monsieur Valentin Foch. Félicitations et merci aux lauréats pour leur contribution à la vitalité culturelle de notre communauté !
PRIX MORRISSETTE-PRONOVOST Industries Blais
CONTRIBUTION AU RAYONNEMENT CULTUREL
WikiClub Croissant boréal
• Pour sa mission de faire rayonner l’Abitibi-Témiscamingue, le Nord-du-Québec ainsi que le Nord-Est de l’Ontario francophone;
• Pour l’expertise développée par ces agents de découvrabilité territoriale et pour leur générosité à la partager auprès de collaborateurs bénévoles;
• Pour l’effet d’entrainement que ce projet participatif a eu sur des internautes qui se sont inscrits comme contributeur à cette encyclopédie virtuelle;
• Pour le dynamisme, l’entraide et le soutien que les membres de ce réseau partagent;
• Pour avoir réussi à inscrire plusieurs travailleurs ou organismes culturels sur des pages de Wikipédia et ainsi améliorer la découvrabilité du secteur culturel d’ici;
• Pour faire rayonner les talents locaux par cette encyclopédie virtuelle avec l’ajout de nouvelles pages sur des Jacques Marchand, Annie Boulanger, Luc Boyer, Ariane Ouellet, Diane Auger, Virginia Pésémapéo Bordeleau, André Blanchard, Lisette Marcotte, Lise Pichette et bien d’autres.
MENTION SPÉCIALE HORS CATÉGORIE
Pour, à chaque détour, donner vie aux sentiers par la présence des petits bonhommes ayant chacun leur personnalité et pour l’aspect ludique et totalement poétique de cette installation en forêt, le jury a décerné une mention spéciale à Jean Boivin, bénévole et artisan de l’ombre, pour la fabrication et l’installation de plus de 60 bonhommes de bois dans les sentiers du lac Rouyn.
Les contributions du milieu privé sont incontournables pour assurer la survie des organismes et projets culturels. Elles complètent les sources publiques de financement. Ce prix vise donc à reconnaître la contribution d’une entreprise ou d’un mécène. Suite à l’étude des candidatures déposées, le prix fut décerné cette année à Industries Blais. Un web-reportage peut être visionné sur le lien URL suivant : https://youtu.be/9zX3B5pQWQ0
PRIX CULTUREL CSSRN DÉCLENCHEUR DE PASSIONS
Le Centre de services scolaire de Rouyn-Noranda a profité du 5 à 7 des Journées de la culture pour remettre, pour la 7e édition, un prix culturel à un membre ou groupe de son personnel. C’est au comité culturel Hémisphère de l’école Notre-Dame-de-Grâce que fut remis ce prix.
• Pour la qualité, l’originalité et l’innovation des initiatives culturelles proposées en classe;
• Pour l’impact de ces initiatives sur le développement des élèves;
• Pour le niveau d’implication et la contribution générale au rayonnement de la culture.
L’INDICE BOHÉMIEN NOVEMBRE 2022 15
Sophie Bordeleau, Zoé Courteau-Boutin, Marie-Jo Gareau et Marie-Lou Rollin
Nathalie Toulouse
Louis Dallaire, Edma-Annie Wheelhouse et François Ruph
Louis Jalbert
Jean-François Blais
Productions 3tiers
SPÉCIAL NOUVEAUX ARRIVANTS
16 NOVEMBRE 2022 L’INDICE BOHÉMIEN
MARIE-RAPHAËLLE LEBLOND
À 21 ans, Moulay Hicham Mouatadid quittait la ville de Rabat, dans son Maroc natal, alors qu’il venait d’obtenir son baccalauréat en droit public de l’Université Mohammed V. C’était en 2006. Sa destination? C’était le Canada, qu’il connaissait pour sa richesse culturelle, ses beaux cadres naturels, ses hivers longs et rudes, sa réputation de terre d’accueil multiculturelle, sa faune exceptionnelle, ses lacs atypiques, son désert unique à Osoyoos et ses Rocheuses de l’Ouest canadien.
Nombreuses sont les raisons qui l’ont conduit vers son nouveau chez lui. Il parle de son intérêt pour la découverte culturelle de la société québécoise et canadienne, de sa curiosité envers les échanges intellectuels possibles, de sa soif d’en apprendre davantage sur les différences identitaires qui composent la nation québécoise et la société canadienne, de son désir de se construire intellectuellement dans les universités et les différents départements de recherche, de sa volonté à développer ses habiletés professionnelles en vivant une multitude d’expériences sur le marché du travail, de son intention de
MOULAY HICHAM MOUATADID
DOMINIQUE ROY
nourrir son esprit et de bâtir sa personnalité à travers la richesse du système de valeurs québécoises et canadiennes…
Soudainement, c’est comme si les mille et une raisons l’ayant conduit ici se transformaient en cases à cocher sur cette longue liste de choses à faire avant de mourir d’un expatrié. Il a habité Montréal, Longueuil, Laval, Sherbrooke, Chibougamau, Rivière-Rouge, Baie-Trinité, Ottawa, Toronto, North Vancouver, Vancouver, Chilliwack et Victoria. Il a obtenu une maîtrise de l’École nationale d’administration publique (ENAP) du réseau de l’Université du Québec, en plus d’un diplôme d’études supérieures en politiques publiques appliquées et d’une maîtrise en politiques internationales appliquées de l’École de politique appliquée à l’Université de Sherbrooke.
Son curriculum vitae est aussi garni d’expériences de travail enrichissantes auprès de nombreux employeurs : Ministry of Education and Child Care de la Colombie-Britannique, Sûreté du Québec (Montréal), Institut International des Sciences administratives (Bruxelles), Emploi et Développement social Canada (Chibougamau), Institut Royal des Études Stratégiques (Maroc), Bureau international des droits des
enfants (Montréal), ainsi que Grands Frères et Grandes Sœurs du Grand Montréal.
Finalement, il y a eu la découverte du Témiscamingue, dont il ne connaissait absolument rien. La première fois, c’était en mars 2020, dans le cadre d’une collaboration avec le journal Le Reflet, à titre de journaliste. La deuxième fois est plus récente… en août 2022… pour assumer la responsabilité d’agent de développement en accueil et rétention à la MRC de Témiscamingue. Il a habité à Ville-Marie et il est maintenant établi à Saint-Bruno-de-Guigues.
« Mon emploi, actuellement, me permet de rencontrer plusieurs personnes de différentes cultures, ce qui anime encore plus ma curiosité d’apprentissage tout en étant au service de l’autre, l’humain, et ce, quels que soient son origine, sa pensée et ses dogmes. Mon intégration se passe très bien!
Les gens, ici, sont très accueillants, surtout s’ils touchent chez la nouvelle personne qui arrive une certaine ouverture d’esprit et une patience d’apprentissage culturelle. »
L’INDICE BOHÉMIEN NOVEMBRE 2022 17
SPÉCIAL
NOUVEAUX ARRIVANTS
MRC DE TÉMISCAMINGUE
EN PARTENARIAT AVEC
OUMAÏMA : D’ERRACHIDIA À AMOS, POUR ÉTUDIER LES EAUX SOUTERRAINES
CLAUDINE GAGNÉ
Vincent Cloutier, avait un sujet de recherche financé. Alors, j’ai passé une entrevue et ça a bien été. Cela étant, j’ai appris que c’était à Amos. J’avais aucune idée c’était où. Pour me mettre dans le contexte, mon professeur m’a expliqué qu’il faisait, le froid et tout. Je me suis dit, « Pourquoi ne pas faire cette expérience? »
Outre la température glaciale et la pandémie, comment s’est passé ton accueil?
Avant de venir, j’ai cherché un appartement. J’ai finalement trouvé une chambre à louer grâce à l’aide de mon professeur et de la secrétaire. Je suis donc arrivée chez Mario Larochelle, qui m’a chaleureusement accueillie. Quand je suis arrivée, j’ai vu que tout était blanc. Chez nous, au Maroc, on n’a pas beaucoup de neige. Là, j’ai vu des dunes de neige et je me suis dit « C’est quoi ça? » À part le froid, il n’y a rien qui m’a surpris. Les gens ici me sourient et me disent bonjour. Il y a pas mal de fois où des gens m’ont arrêté dans la rue pour me demander d’où je viens. Les gens sont curieux, mais ils restent polis.
En ce qui concerne ton sujet de recherche, est-ce que tu peux me dire ce que ça mange en hiver? Explique-moi de quoi il s’agit.
Le sujet qui m’intéresse, c’est une étude de l’identification des fractures qui sont dans le roc pour voir s’il y a des écoulements ou des chemins préférentiels de l’eau contaminée vers un lac. En gros, on fait une étude sur un parc à résidus miniers afin de savoir si les écoulements prendront un chemin préférentiel vers un lac où l’on puise l’eau potable pour les citoyens. Je fais partie du Groupe de recherches sur l’eau souterraine, le GRES. Ce groupe est basé à Amos. Mon directeur et mon codirecteur de recherche sont installés à Amos aussi, mais pour faire ma recherche sur le terrain, je me déplace.
Essentiellement, Oumaïma est venue du Maroc pour étudier les rocs afin que, à l’avenir, on s’assure que les parcs de résidus miniers soient plus sécuritaires pour les gens qui vivent ici, ainsi que pour la nature. Voilà une contribution non négligeable de la part de notre nouvelle amie! Sa contribution ne s’arrête pas là.
Le 4 janvier 2021, après un long trajet tumultueux, Oumaïma arrive en plein cœur de l’AbitibiTémiscamingue, au milieu de l’hiver et de la pandémie. La Marocaine de 27 ans, quelques mois auparavant, ne connaissait rien d’Amos et de la région. Voilà qu’aujourd’hui elle y termine sa maîtrise, en plus de s’impliquer au sein du Mouvement de la relève d’Amos-région (MRAR). Oumaïma nous raconte son histoire et son arrivée dans la région.
Oumaïma Ejbarba vient du Maroc, plus précisément de la ville d’Errachidia, au sud-est du pays. Loin de sa sœur et de ses parents, elle fait sa maîtrise chez nous, au sein du Groupe de recherche sur l’eau souterraine (GRES) à l’Institut de recherche en mines et en environnement (IRME) de l’Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue (UQAT). La question qui nous brûle les lèvres est : Comment Oumaïma s’est-elle rendue jusqu’à nous?
J’ai commencé un doctorat pendant la première année de la COVID, mais je n’aimais pas trop [ça], alors j’ai cherché ailleurs. J’ai commencé par la France. Tout était fermé à cause de la pandémie et je n’avais pas beaucoup de temps. Alors, je me suis dit, « Pourquoi ne pas essayer le Canada, le Québec? » J’ai donc contacté deux professeurs à l’UQAT. L’un deux,
Je me suis impliquée avec le MRAR, j’ai fait beaucoup d’activités avec eux, des activités d’hiver comme de la raquette et de l’escalade à Saint-Félix-de-Dalquier. Cet hiver, je veux essayer le ski de fond. On a fait aussi des activités culturelles. Je fais aussi de la randonnée avec l’UQAT, on est allés au parc national d’Aiguebelle et au lac Opasatica. J’adore l’été ici, c’est vraiment super beau.
Même si sa petite sœur et ses parents lui manquent, elle aimerait rester ici, même après sa maîtrise. Pour clore cette entrevue, je lui ai demandé ce qu’on pouvait lui souhaiter pour l’année à venir.
Je souhaite d’abord terminer ma maîtrise, puis trouver un travail et me stabiliser. Depuis que je suis arrivée ici, j’étais dans la découverte et dans l’adaptation, mais maintenant, me stabiliser, c’est ce que je veux.
Oumaïma a noué des liens d’amitié avec des gens à Rouyn-Noranda et à Amos, sur le campus, mais aussi en dehors de celui-ci. Gageons que sa présence ici lui réserve encore de bien belles surprises. Dans tous les cas, on souhaite la garder près de nous aussi longtemps qu’elle le voudra!
18 NOVEMBRE 2022 L’INDICE BOHÉMIEN SPÉCIAL NOUVEAUX ARRIVANTS
TOURISME ABITIBI-TÉMISCAMINGUE
WIJDANDE
LIMOUNI
KEVIN, L’HOMME QUI TEND LA MAIN
VALÉRIE MARTINEZ
Il a le cœur sur la main et s’appelle Kevin Yapo. Il était informaticien et travaillait dans l’administration minière en Côte d’Ivoire. C’est en faisant des recherches pour travailler dans le traitement du minerai qu’il est tombé sur le Canada, voire le Québec et, plus précisément, sur la ville de Val-d’Or. Kevin étant homme organisé, il a effectué plusieurs recherches avant d’emménager à Val-d’Or. Il a d’abord approché Louise Ratté, la responsable des étudiants internationaux du Centre de formation professionnelle de Val-d’Or, qui a été son tout premier contact. Elle l’a tout de suite mis en relation avec le Carrefour jeunesse-emploi (CJE) d’Abitibi-Est, afin qu’il puisse trouver un logement avant d’arriver en sol abitibien.
Kevin, sa femme et leur fille sont arrivés à Val-d’Or en plein milieu du mois de septembre, il y a trois ans. Quand ils ont quitté la Côte d’Ivoire, leur pays d’origine situé en Afrique de l’Ouest, premier pays producteur de cacao, il faisait 27 degrés; en arrivant en Abitibi, il faisait 5 degrés. La différence de température et le froid glacial n’ont pas été chose facile pour eux au cours des premiers mois. Lorsque la petite famille est arrivée en autobus, elle a été accueillie par le personnel du CJE. Par la suite, Louise Ratté a présenté Kevin à Paul-Antoine Martel, de la mairie de Val-d’Or, qui s’occupe des nouveaux arrivants. C’est ainsi que Kevin a fait la connaissance des membres de l’Association des Ivoiriens de l’Abitibi-Témiscamingue (ASIVAT). Il a été très bien accueilli par toutes les personnes qu’il a rencontrées. Ces premiers liens sont essentiels pour les nouveaux arrivants afin de trouver un logement et un travail, ou d’entreprendre des études, mais surtout pour trouver un équilibre de vie et se sentir un peu chez soi avec des gens accueillants.
Très vite, Kevin a commencé ses études en traitement du minerai pendant que sa femme travaillait. Leur petite fille n’avait alors que 7 ans. Kevin peut être fier de lui car, à la fin du programme, il a reçu le prix de la persévérance. Il vient d’une famille nombreuse et modeste. Aujourd’hui, il est fier de son parcours, car il sait les efforts qui ont été nécessaires pour en arriver là. Après sa formation, son rêve était d’acheter une maison. Deux ans plus tard, il a pu réaliser son rêve grâce à ses efforts et son travail. Il remercie aussi sa femme Marina pour tout son soutien.
Kevin et sa famille restent actifs à Val-d’Or en participant à plusieurs activités proposées par le CJE et la mairie de Val-d’Or. Kevin s’est également investi dans l’ASIVAT, dont il est éventuellement devenu le président. La communauté ivoirienne de Val-d’Or compte environ 75 personnes, mais
beaucoup d’Ivoiriens de la région ne sont pas encore membres de l’Association.
La famille se sent bien à Val-d’Or et lorsqu’on demande à Kevin quels sont ses trois coups de cœur de l’Abitibi-Témiscamingue, il répond qu’il aime la proximité avec sa communauté, les activités organisées par les structures d’accueil et la tranquillité de la ville de Val-d’Or avec sa belle nature.
Aujourd’hui, Kevin a accompli beaucoup de choses. C’est un homme, un mari et un papa heureux. Il aime son travail et c’est un passionné. Il est présentement opérateur de production dans les mines, un métier qui consiste à traiter le minerai afin d’y extraire de l’or. Il est très actif. En plus d’être le président de l’ASIVAT, il est également le trésorier général adjoint de la Fédération des Associations Ivoiriennes du Canada (FAIC) et
membre du bureau exécutif des Chevaliers de Colomb 11078 de Val-d’Or. Il aime aider les nouveaux arrivants dans leurs démarches pour venir en Abitibi-Témiscamingue et les aide à préparer leur arrivée. Cette implication lui tient vraiment à cœur.
Quels sont ses conseils aux nouveaux arrivants? Il leur recommande de rester concentrés sur leurs études, car en étant immigré, on doit toujours fournir plus d’effort pour réussir.
Que fait-il de ses journées de congé? Il aime passer du temps en famille, voir des amis, participer à des activités, aider les nouveaux arrivants et leur prêter mainforte. Il sait que lorsqu’on arrive d’ailleurs, on a toujours besoin de quelqu’un qui nous tend la main.
L’INDICE BOHÉMIEN NOVEMBRE 2022 19 SPÉCIAL NOUVEAUX ARRIVANTS
BOLI BI CHRISTIAN
GUILLAUME DARAIGNEZ TISSE SA TOILE DE BORDEAUX À ROUYN-NORANDA
VALÉRIE RANCOURT
En 2020, Guillaume Daraignez devait partir à vélo vivre son rêve américain. Il avait prévu sillonner les États-Unis d’est en ouest, sur les traces de certains de ses auteurs favoris tels que Richard Brautigan, John Fante, Jim Harrison, Charles Bukowski, Émily Dickinson et Raymond Carver. La pandémie a toutefois fait dérailler ses plans, surtout qu’il venait de démissionner de son poste d’éducateur spécialisé à la Protection de l’enfance en décembre 2019.
Il a alors décidé de se mettre à la charpenterie, un rêve resté en veille dans ses souvenirs. En effet, à l’âge de six ans, il avait offert une carte à son père avec les mots suivants : « Bonne fête papa. Je t’ai construit une maison et un divan pour te reposer. » Selon Guillaume, cette carte est le reflet de son intérêt et de son ambivalence entre le métier de l’intervention et celui de la construction. Pendant un peu plus de deux ans, il a perfectionné l’art de la charpenterie. Il a donné des coups de main à des amis et a pris de petits contrats ici et là, ce qui lui a permis de passer du temps dans la nature, dans sa caravane qu’il avait aménagée. Il a également pu en profiter pour écrire, car comme vous l’avez deviné plus haut, Guillaume aime la littérature, autant la lecture que l’écriture. Outre les auteurs américains, il aime Jean-Paul Dubois, écrivain français qui décrit, entre autres, dans ses romans, les grands espaces québécois. Ces vastes territoires ont nourri l’imaginaire de Guillaume. Se pourrait-il que cela l’ait guidé inconsciemment vers l’Abitibi-Témiscamingue?
La pandémie s’essoufflant, Guillaume a ressassé l’idée de son rêve américain. Cependant, il a dû modifier légèrement son projet initial, car ses économies ont fondu durant les deux années de pandémie. Pendant ce temps, à Rouyn-Noranda, le conseil d’administration de la Maison du Soleil Levant, organisme communautaire ayant comme mission d’accueillir des personnes vivant en situation d’itinérance, réfléchissait à des stratégies pour faire face à la pénurie de main-d’œuvre. Ainsi, l’idée de recruter du personnel en France afin de pourvoir les postes vacants au sein de l’organisme a émergé. Très rapidement, une offre d’emploi a été affichée via le programme Expérience internationale Canada. Parmi les personnes ayant répondu à l’offre se trouvait Guillaume, qui passe une entrevue d’embauche en juin 2022. Moins de trois mois plus tard, il arrivait à Rouyn-Noranda pour travailler au sein de l’organisme.
Vous avez sans doute déjà rencontré Guillaume, arpentant les rues de Rouyn sa tuque sur la tête, l’air un peu bohème. Vous le retrouverez notamment à Livresse pour assister à des événements, à l’Abstracto où il joue aux échecs ou au Saint-Honoré pour écrire. Il se livre aussi à la cueillette de champignons dans les environs de la ville, court autour du lac Osisko et fait de la randonnée avec des amis. Comme vous l’aurez constaté, il est un homme aux intérêts multiples qui voulait se contenter de traverser les États-Unis. Daraignez a plutôt tissé sa toile de Bordeaux à Rouyn-Noranda.
20 NOVEMBRE 2022 L’INDICE BOHÉMIEN SPÉCIAL NOUVEAUX ARRIVANTS
VALÉRIE RANCOURT
YAMILÉ, UNE FEMME FORMIDABLE
FRANCINE GAUTHIER
Il y a sept ans, Yamilé est arrivée en Abitibi-Ouest. Elle venait de loin…
De son plein gré, elle a pris la décision de venir découvrir et habiter ce vaste territoire qu’est la MRC d’Abitibi-Ouest. Elle considère avoir été bien accueillie et réitère son intention de rester.
Yamilé est née en 1987 d’un père professeur, aujourd’hui à la retraite, et d’une mère maître de poste dans un petit village du sud de la grande île de Cuba nommé Camarones, qui signifie « crevettes » en français Sans doute ce nom espagnol est-il dû au fait que pendant le siècle de la découverte de cette partie de l’Amérique, ce village situé non loin de la mer offrait l’accès à une profusion de ce crustacé, avantage du passé peut-être… Un lieu où la pauvreté était chose commune, mais comme il est situé près du sud de La Havane, porte d’entrée de l’Amérique, ses habitants ont toujours vu venir les touristes des quatre horizons, mais plus particulièrement ceux des pays socialistes d’Europe. Nombreux, les échanges avec la Russie, entre autres, ont marqué le pays.
Après des études en tourisme à Cayo Santa Maria, une île au nord de Cuba, elle est embauchée par dans une agence de tourisme avec Transat, où elle organise des excursions dans tout Cuba et offre un encadrement aux personnes qui préfèrent ne pas être laissées à elles-mêmes.
Le mot d’ordre : Vous n’êtes pas seul. Yamilé accompagne tous ces gens enthousiastes qui souhaitent découvrir le milieu de vie des Cubains, les lieux les plus intéressants à visiter, les bons restos et les plus beaux panoramas. En d’autres mots, elle les prend par la main pour les guider en des lieux à ses yeux tout désignés pour leur faire aimer ce pays magnifique. Avec un esprit critique, elle évalue la qualité des services offerts, de l’animation et de la courtoisie indispensable à l’accueil. Le tourisme à Cuba n’a désormais plus de secrets pour elle.
Au fil du temps, le fait de multiplier les rencontres lui donne accès à cette riche occasion d’apprendre d’autres langues, ce qui devient un avantage certain dans le cadre de son travail. Elle apprend d’abord le français à l’oreille et de cette version orale de base et approximative, elle se familiarise avec le français écrit, plus exigeant, mais qui lui permet d’entrer dans cette équation d’ouverture à l’autre par l’écriture. L’ouverture à l’autre devient un autre mot d’ordre qui la caractérise.
À l’origine de sa décision d’immigrer se dessine l’amour à travers une riche correspondance, avec toute la réflexion requise pour confirmer l’authenticité du sentiment partagé. Une belle rencontre que le hasard a permise et qui se poursuit ici depuis quelques années. Les premiers temps, Yamilé trouvait long et difficile de tenter de trouver sa place dans le Nouveau Monde. Puis, grâce à une formation en comptabilité acquise de 2016 à 2018, un passage formateur à la Société d’aide au développement des collectivités (SADC), un emploi permanent au sein de la firme comptable de Raymond Chabot, l’ardent désir de briser l’isolement, la vie dans sa nouvelle famille, l’accès à des activités sociales comme Les Beaux Mardis, où une pratique artistique régulière du portrait lui fait développer des liens tangibles avec des artistes qui cherchent avant tout le plaisir que procure l’art libre, Yamilé s’épanouit à son rythme et partage volontiers avec camarades et connaissances son savoir et ses découvertes. Sa cuisine ravit tous les curieux avec, entre autres, l’onctueux yuca (équivalent du manioc), les frigoles (soupes aux fèves rouges et maïs) et la banane plantain.
Tout compte fait, elle affirme avoir reçu un accueil chaleureux de la part de gens respectueux : « Ça va apporter de la couleur en Abitibi », lui ont-ils chanté sur un ton sans équivoque. Les échanges de bons procédés, surtout la cuisine comme trait d’union autour d’une table bien garnie, font en sorte de consolider les liens d’ouverture souhaitables entre la région et les
nouveaux arrivants. Il serait trop facile d’imputer à des pandémies, à des sinistres ou à des catastrophes les raisons de garder nos distances avec autrui, quel qu’il soit. Ce serait là une grave erreur, car il y a toujours moyen d’allier la prudence à l’entraide. À preuve, l’ouragan qui a sévi à Cuba dernièrement et qui a soulevé, sans jeu de mots, un vent de solidarité chez les Cubains, mettant de côté toute réserve, et ceci dans un réflexe de survie et d’élan vers l’autre. Pourquoi certains arrivants partent-ils après un certain temps? À cause d’une carence en chaleur humaine… Yamilé est convaincue que pour développer de profondes racines loin de son lieu d’origine, il faut vivre l’amour du vaste territoire choisi, une intégration en douceur grâce à des liens d’amitié sincères, des lieux d’échange, du temps pour être ensemble en nature, de la tranquillité, du partage, un grand humanisme, une preuve d’un réel élargissement de cette société d’ouverture et, en plus de tout cela, le sentiment d’avoir enfin trouvé sa vraie place.
L’INDICE BOHÉMIEN NOVEMBRE 2022 21 SPÉCIAL NOUVEAUX ARRIVANTS
Œ UVRE DE FRANCINE GAUTHIER
Portrait de Yamilé Penalver Medina.
SLÁVA ABITIBI : UNE BRÈVE HISTOIRE DE LA COMMUNAUTÉ UKRAINIENNE EN ABITIBI
JEAN-LOU DAVID
On sous-estime souvent à quel point l’apport des populations immigrantes a été déterminant dans l’avènement du Québec moderne. La présence méconnue d’une population ukrainienne en Abitibi, où se trouvent encore des gens et des bâtiments qui en témoignent, remonte à plus de cent ans. L’arrivée des Ukrainiens dans notre région est même antérieure à la colonisation canadienne-française.
Toutefois, ce ne sont pas dans les meilleurs termes que se sont nouées les premières relations entre l’Abitibi et la population du pays au drapeau bleu et jaune. Internés en grand nombre dans un camp de travail forcé près d’Amos en 1915, les Ukrainiens seront, par la suite, les fers de lance d’une colonisation agricole nordique, puis les ouvriers infatigables d’un monde industriel en pleine effervescence. Cette communauté culturelle, parmi les plus dynamiques du melting pot abitibien d’alors, est sans contredit une dont la marque demeure la plus visible aujourd’hui.
D’HIER…
Au déclenchement de la Première Guerre mondiale, le Canada décide d’interner les ressortissants de l’empire austro-hongrois présents sur son territoire. Spirit Lake, situé à La Ferme près d’Amos, sert alors de camp de travail forcé pour des milliers d’entre eux. Près de la moitié de
ces personnes sont d’origine ukrainienne. Durant l’hiver, les prisonniers s’affairent à la coupe du bois et, l’été, ils défrichent et drainent des terrains afin de tester le potentiel agricole de cette nouvelle région nordique. C’est près de 500 acres de terres cultivables qui sont ainsi mis en valeur. À la fin de 1915, le camp compte plus de 1 300 détenus. Il s’agit d’un chiffre supérieur à celui de l’ensemble de population de l’Abitibi, qui accueille alors un peu moins de 1 250 colons. La fin de la guerre entraine la libération des prisonniers. Il faut attendre près d’une dizaine d’années avant qu’une initiative religieuse mène à l’établissement permanent d’une communauté ukrainienne en Abitibi.
En 1925, le père Josaphat Jean fonde, avec quelques Ukrainiens, la colonie agricole de Shepteski, à une cinquantaine de kilomètres au nord d’Amos. Ce prêtre, pourtant canadien-français originaire de Rimouski, est une personnalité insolite dans le Québec catholique du début du vingtième siècle. Très tôt converti au rite byzantin, il apprend la langue de l’Ukraine où il fait de nombreux séjours avant de sentir l’appel du retour l’Abitibi. Il obtient du gouvernement provincial 15 lots, soit plus de 500 kilomètres carrés de forêt, à 29 kilomètres au nord-ouest de la gare de Landrienne. Au printemps 1925, il monte en plein bois, accompagné de quelques valeureux Ukrainiens, qui doivent d’abord défricher le chemin pour s’y rendre… Le village, doté d’une chapelle richement ornée d’art religieux du 13e siècle, reste à majorité ukrainienne pendant une dizaine d’années, avant que les Canadiens français ne viennent s’y installer en plus grand nombre.
En 1933 et 1934, des famines ravagent l’Ukraine soviétique. Forcées à l’exil, de nombreuses familles viennent rejoindre des parents installés en Abitibi, où des ouvriers d’Europe de l’Est travaillent déjà en grand nombre comme mineurs de fond. En 1951, on compte plus de 800 Ukrainiens en Abitibi, qui forment alors la deuxième communauté culturelle immigrante en importance, après les Polonais de Rouyn-Noranda. Très dynamiques, les communautés de Rouyn et Val-d’Or se feront construire des églises à l’arrivée de Lev Chayka, le charismatique leader religieux de la communauté. Loin de s’éteindre culturellement, les nouveaux arrivants ukrainiens se rassemblent fréquemment pour des pique-niques autour du lac Osisko à Rouyn, et participent à toutes sortes d’activités sociales. Les enfants apprennent le chant, la danse traditionnelle ou leur langue maternelle à la salle communautaire ou à l’école du dimanche, qui se tient à l’église. Au tournant des années 1970, la communauté commencera à décliner, alors que les minières auront de moins en moins de besoins en main-d’œuvre.
… À AUJOURD’HUI
Avec l’invasion actuelle de leur pays par la Russie, de nouveaux arrivants ukrainiens viennent renflouer la démographie des principales villes abitibiennes. Plusieurs s’étonnent de voir ici des églises qui leur rappellent la mère patrie. Lors d’une activité organisée par la Corporation de la Maison Dumulon en septembre dernier, quelques familles de réfugiés ont d’ailleurs pu visiter l’Église Christ-Roi de Rouyn-Noranda, où des chants traditionnels ont aussi été présentés au public, qui était alors très nombreux pour l’occasion! Suivant le bref tableau que nous venons de tracer de l’histoire de cette communauté en Abitibi, il n’est pas exagéré de dire que nous leur souhaitons la bienvenue chez eux, dans cette région qui a toujours été aussi la leur!
22 NOVEMBRE 2022 L’INDICE BOHÉMIEN SPÉCIAL NOUVEAUX ARRIVANTS
SPÉCIAL
L’INDICE BOHÉMIEN NOVEMBRE 2022 23
NOUVEAUX ARRIVANTS
MARIE-RAPHAËLLE
LEBLOND
Tous engagés pour mettre en lumière la culture d’ici
Desjardins est fier d’encourager les événements culturels de la région.
24 NOVEMBRE 2022 L’INDICE BOHÉMIEN
SUPÉRIEURE
ANXIÉTÉ À L’UNIVERSITÉ, REGARDS ACTUELS ET PROPOSITIONS BIENVEILLANTES
CHARLETTE MÉNARD, PH. D.
Tel un cocktail explosif, le stress et l’anxiété sont de véritables bombes à retardement, particulièrement en contexte d’apprentissage. Il devient de plus en plus courant de les retrouver dans le paysage universitaire, s’immisçant auprès d’étudiants qui, jusque-là, avaient démontré leur capacité à se rendre à ce niveau. En tant que pédagogue, on peut observer une recrudescence de l’anxiété (de performance?), possiblement exacerbée par la pandémie de COVID-19 et ses conséquences telles que les fréquents changements de mode d’enseignement (en présentiel, à distance ou hybride). La situation ne laisse personne indifférent et on se demande comment faire une différence dans un contexte d’enseignement-apprentissage, ne serait-ce que par une intervention de base.
STRESS ET ANXIÉTÉ
Le stress donne l’impression de la pression du temps. Il comprend plutôt cinq dimensions, à savoir le contrôle faible, l’imprévisibilité, la nouveauté et l’égo menacé (Lupien, 2020). Il est clair que ces dimensions ont été mises à rude épreuve au sein de la communauté universitaire durant la pandémie et ont alimenté les caractéristiques d’une anxiété démesurée.
Devant un élément de stress, nous réagissons pour nous adapter en anticipant les conséquences. Cette réaction –l’anxiété – peut contribuer à augmenter le rendement et la mémoire d’un individu, mais si elle est excessive, elle devient inadaptée. À la base d’une telle anxiété, on retrouve une intolérance à l’incertitude et une difficulté accrue dans la régulation des émotions (émotions fortes, négatives) et des stratégies inadaptées pour les gérer.
ANXIÉTÉ DE PERFORMANCE
L’apprenant anxieux souffre. Cette anxiété s’exprime dans des situations d’évaluation qui clignotent comme des menaces entretenues par des pensées intrusives, dites parasites, créant ainsi un inconfort émotionnel sans répit. Cette anxiété de performance révèle une personne qui est aux prises avec une peur démesurée de commettre des erreurs – ce qui génère forcément des situations de redoublement d’efforts et une personne motivée par le rendement. L’anxiété va souvent au-delà de l’assurance que voudrait donner un professeur à un étudiant qui, voulant se surpasser, répondrait fièrement : « On veut remettre un travail à la hauteur de nos attentes envers nous-mêmes ». Cette phrase pleine de vœux pieux
peut facilement emprisonner les deux protagonistes dans une spirale de performance incroyable, même pour les personnes les plus avisées.
QUELQUES PROPOSITIONS BIENVEILLANTES
Plusieurs voies sont certes envisageables. L’une peut viser la gestion de l’anxiété, tandis qu’une autre peut passer par le lien d’enseignement-apprentissage. Toutefois, une double prémisse demeure : pour les étudiants, celle de ne pas se complaire dans cette anxiété; pour le corps enseignant, celle de ne pas se contenter d’observer. L’idée est d’agir ensemble.
La première avenue nous mène à accueillir nos émotions et pensées de manière proactive et sans jugement. De même, user d’autocompassion en ayant un discours intérieur positif et patient est un autre atout à la portée de tout un chacun permettant de gérer sainement l’anxiété.
Une autre proposition a trait à l’état d’esprit. Selon Dweck (2017), l’état d’esprit adopté influence profondément la manière dont nous nous comportons. Certains croient en des qualités et des capacités définies (état d’esprit fixe); d’autres, en des capacités cultivables par nos efforts et l’expérience (état d’esprit de développement). Les premiers s’enliseront à vouloir encore et toujours faire leurs preuves (de leur intelligence, personnalité et caractère). Ils sont en mode d’évaluation du rendement et visent la performance (catalyseurs de stress et d’anxiété) (Seidah et Geninet, 2020). Les seconds s’occuperont plutôt à développer leur intelligence et à accepter de grandir par l’épreuve avec la conviction que le véritable potentiel peut toujours augmenter. Ils ont des buts de maîtrise qui impliquent avant tout le développement d’une habileté et d’une compétence.
Ainsi, l’étudiant avec l’état d’esprit fixe a des idéaux inatteignables, alors que celui avec l’état d’esprit de développement se laisse stimuler par ses idéaux en se concentrant davantage sur l’expérience à long terme qui permet de les atteindre. Dans ce contexte, les notes deviennent des moyens d’apprentissage et la connaissance elle-même est valorisée.
De même, le maître avec l’état d’esprit de développement a aussi une passion pour le processus d’apprentissage et aide ses étudiants à développer leur intellect et leur talent. Une telle personne nourrit des attentes élevées pour tous
ses étudiants, qu’ils soient déjà en situation de réussite ou non. Pour maintenir de hautes exigences, il s’assure de créer une atmosphère de sollicitude (et non de jugement), bien que rigoureuse. Elle adhère plutôt à la dynamique « je vais t’apprendre » plutôt que « je vais évaluer ton talent »
Devant cette anxiété guettant les étudiants universitaires, il devient incontournable que ceux-ci se donnent le droit d’apprendre dans une optique de développement et abordent l’échec comme une occasion d’apprentissage.
Il importe donc d’approcher chaque situation du parcours universitaire comme étant absolument parfaite pour la croissance et l’apprentissage (Peacock, 2007).
Il devient tout aussi primordial que le maître, même avec des contenus-matières exigeants, favorise un climat d’apprentissage sain, empreint de confiance et de bienveillance pour ses étudiants; une indulgence bien délimitée et qui aurait tout avantage à être bidirectionnelle pour le bien-être de tout un chacun.
L’INDICE BOHÉMIEN NOVEMBRE 2022 25 – ÉDUCATION
–
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– THÉÂTRE –
FONDANT DU THÉÂTRE BISTOURI : FAIRE GRINCER LE SABLE ENTRE LES DENTS
GABRIELLE DEMERS
Le 20 septembre dernier, au Petit théâtre du Vieux-Noranda, a eu lieu la représentation de la pièce Fondant, du Théâtre Bistouri, à l’invitation de l’Agora des Arts. Ambiance feutrée, petites bouchées et consommations offertes, et, devant nous, sur la scène, un décor de pâtisserie aux couleurs vives et pastelles. Tout pour promettre une soirée pétillante!
Cependant, avec le Théâtre Bistouri, il n’en est jamais totalement ainsi.
LA PIÈCE, OU COMMENT SE TORDRE… DE MALAISE
Imaginez le décor : la pâtisserie du coin, notre préférée, celle où on arrête chaque jour de fête, petite ou grande. La pâtissière, qui décore nos gâteaux tout en poursuivant ses études universitaires, son énergie, sa joie de vivre, on la connaît bien.
Puis, il y a une tempête de neige. Les clients désertent. Les heures s’allongent. Et alors, il y a son entrée à lui. Les deux jasent tranquillement, de lieux communs en lieux communs, puis… tout va basculer.
Le début de la pièce est classique : ces deux individus, rien ne semble les éloigner ni les unir particulièrement. En voyant la situation évoluer entre eux, on en vient à se dire : quand tout cela basculera-t-il dans l’amourette? Après tout, il se présente comme l’ami de son frère, il la connaît depuis longtemps, on croit voir une histoire de quart-arrière et de pompom girl! Alors, l’amour et les paillettes, c’est pour quand?
Pour jamais.
On ne peut pas vraiment mettre le doigt sur la seconde exacte, mais cette manœuvre de séduction tourne au cauchemar sous nos yeux. Et le trouble que l’on ressentait devant l’insécurité du jeune homme se transforme carrément en gros malaise. Il hallucine des baisers volés, il réinterprète les signes non verbaux à son avantage, il s’impatiente. Il impose, il s’impose, il n’accepte pas de se faire dire « non ». On assiste à sa décente aux enfers à elle, car elle n’arrive jamais mettre assez de distance entre eux. Il menace son intégrité physique et psychologique; on se crispe à mesure que tout cela se déroule sous nos yeux, impuissant.
Si le résumé n’est pas invitant, c’est malgré tout une pièce à voir. Pour comprendre comme la violence conjugale peut démarrer en un quart de tour. Pour apprendre aux ados que ces comportements ne sont pas acceptables. Que ces jeux de pouvoir ne doivent plus exister dans notre société.
LE THÉÂTRE, OU COMMENT PASSER DES MESSAGES
Théâtre : Art vivant.
Bistouri : Instrument à lame tranchante permettant d’inciser les chairs.
Voilà ce que l’on peut lire sur le site Web du Théâtre Bistouri. Leurs pièces sont toutes incisives. Dérangeantes. Elles nous font rire, sourire en coin, puis jaune, puis plus du tout. C’est en abordant des sujets qui nous bousculent que la troupe arrive à communiquer sa vision du monde, et pour ce faire, elle utilise l’humour. L’humour noir, soit, mais cela fait tout à fait la job. On ressort des pièces tout à fait renversés.
26 NOVEMBRE 2022 L’INDICE BOHÉMIEN
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SOCIÉTÉ
LE PARC DES MADELINOTS
JEANNINE PROVOST
Situé dans un décor déjà enchanteur, le parc des Madelinots ajoute un attrait nouveau pour une visite à la fois touristique, culturelle et historique à l’île Nepawa. Le Comité des sports de l’île Nepawa l’a inauguré en grande pompe le 3 septembre dernier avec la musique bien acadienne du groupe Les Palourdes salées.
UNE PAGE D’HISTOIRE
En 1941 et 1942, en pleine Deuxième Guerre mondiale, 27 familles comptant plus de 200 personnes provenant de toutes les paroisses des Îles-de-la-Madeleine, particulièrement choisies selon un nouveau plan de colonisation, débarquent sur les berges de l’île Nepawa, dans le lac Abitibi, avec la volonté de survivre en ces temps d’austérité et l’espoir au cœur de fournir à leurs enfants un avenir meilleur. Parties des Îles, en passant par Pictou, Québec, Senneterre, Amos, La Sarre et Clerval pour arriver à l’île Nepawa, elles ont parcouru plus de 2 000 kilomètres.
L’ORIGINE DU PROJET
Un fier descendant, Martin Deschamps, de retour d’un voyage aux Îles, aspire à faire de ces épisodes héroïques un lieu de souvenir. Il présente son idée au Comité des sports de l’île Nepawa qui accepte immédiatement le projet. La chasse aux sources de financement s’amorce. Un programme de subventions pour des projets culturels de
la MRC d’Abitibi-Ouest, une réponse enthousiaste pour une quote-part des descendants de chacune des familles des Madelinots, maintenant éparpillés partout en Abitibi, voire au Québec, puis, dans ce même esprit, la vente de pierres gravées au nom du souscripteur et enfin de généreux commanditaires assurent le financement de cet ambitieux projet.
LE MONUMENT
L’approche artistique du projet par l’Abitibien Jacques Baril, sculpteur, séduit les membres du Comité qui lui confie la réalisation du monument. Une imposante sculpture représentant un phare sur cinq faces, d’une hauteur de plus de quatre mètres, s’élève sur le site même du débarquement des premiers arrivants un jour de septembre. Sur l’une des faces sont inscrits les noms des 27 familles d’origine, ainsi que ceux de 6 autres familles qui se sont ajoutées par la suite. Les autres faces schématisent les péripéties vécues lors de la grande « déportation » volontaire et une gravure à l’intérieur du monument de la carte des Îles-de-la-Madeleine situe la provenance des familles.
LA RÉALISATION
L’enthousiasme et la générosité aidant, on peaufine l’aménagement autour de la sculpture : allée, plate-forme de pierres gravées, pelouse, bancs, clôtures, lutrins d’information, débroussaillage des rives du lac Abitibi… Le tout permet
de former un magnifique parc qui invite à la détente. Une grande enseigne en aluminium perforée du nom du parc des Madelinots surplombe l’entrée principale. Enfin, une superbe passerelle en forme de casier à homards relie le site à celui du centre communautaire où l’artiste Roger Pèlerin avait déjà installé une série de gravures sur aluminium relatant l’histoire de la colonisation de l’île Nepawa.
La page Facebook « Le parc des Madelinots de l’île Nepawa » illustre en détail le cheminement du projet.
L’INDICE BOHÉMIEN NOVEMBRE 2022 27 –
–
COLORIER, COLORER, COULEURER EXPOSITION JEUNESSE PRODUITE PAR LE CENTRE D’EXPOSITION RAYMOND-LASNIER Dédiée spécialement aux enfants de 3 à 10 ans ILS-ELLES SE SONT RETROUVÉ-ES AU BOUT DE TA RUE HÉLÈNE ET SON MARI SCULPTURE/INSTALLATION LA TERRE EN SUSPENS FRANÇOIS QUÉVILLON ART NUMÉRIQUE/INSTALLATION Commissariat : Éric Mattson MÉTAMORPHOSE LORRAINE DAGENAIS TECHNIQUES MIXTES JUSQU’AU 6 NOVEMBRE JUSQU’AU 6 NOVEMBRE DÈS LE 18 NOVEMBRE À 17 H DÈS LE 18 NOVEMBRE À 17 H © UNE SILHOUETTE EMBALLÉE ET CONTAMINÉE (SON MARI), TILLEUL, CATALOGNE ET PORCELAINE, 2012-2020) © FRANÇOIS QUÉVILLON © GUY L’HEUREUX © CULTURE TROIS-RIVIÈRES, 2019. ŒUVRE D’EVE TELLIER-BÉDARD Au Centre d’exposition d’Amos…
JEANINNE PROVOST
Novembre, c’est le
BIENNALE D’ART PERFORMATIF DE L’ÉCART
PRÉSENCE REQUISE
CHANTALE GIRARD
Choisir d’entreprendre en économie sociale, c’est choisir un modèle qui met l’humain au cœur des affaires pour répondre à des besoins du milieu. Entreprendre en économie sociale, c’est créer une entreprise qui appartient à la collectivité avec des retombées économiques et sociales positives dans notre communauté.
C’est dans la perspective d’un retour à une certaine normalité que s’est tenue, du 12 au 15 octobre, la 10e Biennale d’art performatif de l’Écart. Annulée en 2020 (on se demande bien pourquoi!), cette 10e édition s’est déroulée dans la fébrilité et l’excitation qu’entraîne l’idée de se retrouver tous ensemble autour des propositions performatives.
La Biennale s’est articulée sur quatre jours. La soirée d’ouverture du mercredi soir marquait le retour de Geneviève et Matthieu à L’Écart. Exposés depuis près d’un mois, les éléments matériels de la performance M. Gros ont pris vie devant une assistance considérable. Mentionnons que cette performance s’est promenée à Toronto, Ottawa et Montréal.
UN EXEMPLE BIEN DE CHEZ NOUS La Troupe à cœur ouvert
Depuis 40 ans, la Troupe à cœur ouvert s’investit pour divertir, représenter et faire rayonner l’Abitibi-Témiscamingue. Avec sa gouvernance démocratique, elle aspire à une viabilité économique tout en remplissant sa mission. La Troupe, c’est une histoire de cœur, c’est un lieu de créativité et de développement pour de nombreux artistes de chez nous, pour les gens de chez nous !
Le samedi après-midi, la performance du Edmund Porn Project (Marie-Hélène Massy Emond et Danny West), sur l’arrivée d’une nouvelle mine à ciel ouvert dans le village, a permis de voir les résultats des travaux préparatoires du duo effectués en collaboration avec les habitants de Cléricy. Un transport avait été prévu entre la galerie et le lieu de la performance. Alliant l’occupation du territoire et la participation citoyenne sonore, Prélude 101.1.1 se veut une « œuvre sonore anticipatrice et ramanchée ».
Outre les performeurs de la région, des artistes de tous horizons nationaux et de toutes disciplines ont participé à cette mouture : Américains, Polonais, Français, Torontois et Québécois issus des domaines des arts visuels, de la danse contemporaine, du théâtre et de la musique expérimentale. Il convient de mentionner que cette programmation était la première qu’Audrée Juteau avait concoctée pour nous. Directrice artistique depuis près de deux ans, elle a dû composer avec les problèmes liés à la pandémie : activités reportées ou annulées, déplacements limités… Elle a pu enfin donner son plein potentiel et présenter le fruit de son travail de direction artistique.
L’Écart a poursuivi cette année des collaborations de longue date, en particulier le Musée d’art de Rouyn-Noranda (MA) et L’Usine C de Montréal, en plus d’ajouter d’autres partenaires : le FADO Performance Art Centre de Toronto, le Studio 303 de Montréal, le Théâtre du Trillium d’Ottawa et le festival Actoral de Marseille, qui se consacre aux nouvelles écritures contemporaines.
Il faut admettre qu’une performance incarne, intrinsèquement, le contraire absolu de l’idée de confinement et d’isolement. Une
performance s’apprécie dans le moment présent et communautairement. Filmée, elle n’est plus performance. C’est un moyen d’expression particulier dans la mesure où il s’inscrit dans un temps distinctif et délimité. Une peinture peut être appréciée après le vernissage de l’exposition, mais pas une performance. Il faut y être au moment où l’artiste la crée. Cette forme d’art demande de la disponibilité à un moment donné et dans un lieu précis. Non seulement la présence est requise, mais elle peut, à tout moment, selon les intentions de l’artiste, influer sur l’œuvre. La performance, encore plus que le théâtre ou la danse, exige une communion entre le public et l’artiste, chacun nourrissant l’autre. De tous les arts vivants, cette dernière est la plus fragile, la plus personnelle et la plus ancrée dans la réalité. L’ici et le maintenant se déploient dans toute leur splendeur.
28 NOVEMBRE 2022 L’INDICE BOHÉMIEN – ART PERFORMATIF –
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Bleu Néon, Kim-Sanh Châu.
CHRISTIAN LEDUC
L’INDICE BOHÉMIEN NOVEMBRE 2022 29
Continental breakfast for diner, Louise Liliefeldt.Black Moon, Kezia Waters et Jordan Brown.
CHRISTIAN LEDUC
CHRISTIAN LEDUC
30 NOVEMBRE 2022 L’INDICE BOHÉMIEN DES CENTAINES DE SENTIERS ET PARCOURS À EXPLORER! PLANIFIEZ VOS SORTIES AVEC ACCÈS PLEIN AIR! accespleinair.org
ANACHNID, LA DÉESSE
GABRIELLE DEMERS
Artiste installée à Montréal, Anachnid est une Oji-Cree qui manie la musique comme la plus grande des magiciennes, comme si toute la force des forêts se logeait dans sa musique électronique. Il n’est pas facile de définir sa musique, car on pourrait lui accoler tant d’étiquettes. Électro-pop parfois langoureux, parfois énergisant, trap et indie, hip-hop ou soul, Anachnid propose des airs aux sonorités envoutantes. On peut lire sur sa page Web qu’elle crée des « textures sonores délicates et complexes, évocatrices de ses cultures ancestrales ». En effet, en écoutant Anachnid, on se sent investi d’une force plus grande que soi, même si sa musique n’a pas que des élans traditionnels. Ou à cause de ces élans? Bref, c’est une envolée qui se propage en nous.
également remporté le Félix Artiste autochtone en 2021. L’année 2022 devrait aussi la couvrir d’honneurs, et, nous, nous aurons le plaisir de la recevoir au Petit Théâtre du Vieux Noranda le 18 novembre prochain.
ANACHNID, TOTEM ET MAGIE
« J’ai beaucoup d’émotions qui peuvent se refléter dans la terre, dans le feu, dans le vent », expliquait Anachnid en 2018, lors d’une entrevue avec Stéphan Bureau. Cette force plurielle de la nature, Anachnid la puise dans son animal totem, l’araignée, autant que chez ses ancêtres. La jeune artiste aux origines algonquines, anichinabées, iroquoises, ojibwées et cries porte en elle une diversité de voix et sa musique en est terriblement forte et rassembleuse.
NIKAMOWIN
Anachnid participe au collectif Nikamowin, un organisme qui contribue à la reconnaissance du patrimoine matériel et immatériel musical traditionnel et contemporain autochtone. Il s’agit, entre autres, d’une plateforme permettant de découvrir la musique autochtone actuelle dont le site Web est phénoménal.
Anachnid connaît un succès d’estime et populaire depuis ses premiers microalbums (EP). Gagnante du prix de l’auteur-compositeur autochtone de l’année de la Fondation SOCAN en 2019, son album Dreamweaver (2020) a été nommé sur la longue liste du prix de musique Polaris et dans la catégorie Album anglophone de l’année de l’ADISQ. La chanteuse a
– MUSIQUE –
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ARBRES DE VILLE : UN ÉCOSYSTÈME BIEN DIFFÉRENT!
VALÉRY SICARD, ING.F., AGENTE DE DÉVELOPPEMENT, ASSOCIATION FORESTIÈRE DE L’ABITIBI-TÉMISCAMINGUE (AFAT)
Ayant travaillé uniquement en forêt publique, étant amatrice d’activités de plein air en forêt et étant devenue propriétaire assez tardivement dans ma vie, ce n’est que dans les dernières années que j’ai pu me préoccuper du sort de la végétation dont j’étais devenue responsable.
Considérant que les propriétaires résident en moyenne dix ans au même endroit, on ne peut qu’hériter de l’arbre planté auparavant et s’en accommoder ou encore en planter un nouveau et ne jamais le connaître à maturité, un stade qui sera légué au propriétaire suivant et qui sera parfois atteint longtemps après notre déménagement. Les arbres font en quelque sorte partie d’une propriété. Ils participent au décor et au charme de nos milieux de vie. Ils influencent la valeur de nos propriétés, et leurs avantages supplantent souvent leurs inconvénients.
Les bénéfices des arbres en ville sont nombreux et ont été amplement dépeints dans les médias. Néanmoins, il faut assumer certains désavantages et les gérer à long terme pour s’assurer d’en tirer le maximum, et de justifier leur présence auprès du voisinage, ce qui n’est pas toujours une mince affaire!
Il existe actuellement peu de données décrivant la durée de vie des arbres en milieu urbain ou les causes de leur mort. De nombreux facteurs entrent en jeu. En fait, on sait souvent pourquoi on les abat, mais on en sait encore peu sur les causes de leur dépérissement, parfois subit.
En milieu urbain, les arbres sont souvent isolés et ne profitent pas de la protection de leurs congénères, comme c’est le cas en forêt. La surface du sol est souvent imperméable (trottoir, asphalte, matériaux minéraux compactés). Les conditions climatiques peuvent varier grandement d’un emplacement à l’autre (niveau d’ensoleillement, ombre des bâtiments, chaleur reflétée par les immeubles, vent). Les hivers peuvent s’avérer plus rigoureux. Alors que le sol est déneigé, le gel peut pénétrer en profondeur. Sans compter les accidents qui surviennent avec les équipements de déneigement, la neige soufflée dans les branches et sur le tronc, ainsi que les amoncellements de neige compactée contre ces derniers. Il faut aussi tenir compte des épandages de produits de déglaçage qui, en grande quantité, deviennent toxiques pour les végétaux. Ce stress peut rendre les arbres plus vulnérables aux insectes et aux maladies.
L’emplacement est le plus grand point à considérer. Ce dernier doit pouvoir accueillir un arbre à maturité, présenter un espace suffisant en sous-sol pour le
développement racinaire et comprendre des matériaux meubles et perméables à l’eau. Ces sites doivent offrir une distance optimale pour assurer une couverture de cime la plus continue possible afin de maximiser l’effet rafraîchissant. Créer de nouveaux espaces pour les arbres est également dispendieux.
Dans le cas de nouvelles constructions, les réglementations municipales décrivent les distances de marge de recul permettant de conserver de l’espace pour l’installation d’arbres. Dans le même ordre d’idées, les règlements concernant les bâtiments en porte-à-faux permettent de gérer l’espace disponible pour une cime d’arbre.
Pour les municipalités, la gestion des arbres nécessite une planification budgétaire à plus long terme. Si les villes tiennent désormais des inventaires des arbres municipaux, les données demeurent incomplètes en ce qui concerne les arbres sur les terrains privés. Il demeure difficile de déterminer la proportion d’arbres dans une localité.
Avec tous ces enjeux, on comprend bien que le choix de l’emplacement d’un arbre présente un joli défi. Au mieux, il est possible d’optimiser des bienfaits de la végétation par l’implantation dans un endroit adapté d’une espèce convenable, ce qui permettra d’assurer le développement de son plein potentiel. N’hésitez pas à vous informer auprès de l’association forestière et des spécialistes de votre MRC qui peuvent vous conseiller en matière de choix d’essence et d’emplacement tout en considérant les infrastructures souterraines en place.
32 NOVEMBRE 2022 L’INDICE BOHÉMIEN – ENVIRONNEMENT –
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NOCES DE BOIS POUR LE FESTIVAL DE MUSIQUE TRAD VAL-D’OR
Le Festival de musique trad Val-d’Or propose sa 5e édition du 2 au 6 novembre prochain, avec une quinzaine de spectacles, dont ceux de la Bottine souriante, de Mélisande Electrotrad et de Genticorum, en plus d’une dizaine d’ateliers ouverts aux festivalières et festivaliers. Une édition anniversaire qui confirme l’importance de ce festival dans le paysage culturel régional.
LES GRANDES NOUVEAUTÉS DU 5E ANNIVERSAIRE
Pour multiplier les occasions de rencontres autour de la musique trad, deux propositions hors festival ont été créées pour ce 5e anniversaire. La fête a commencé en juin par la présentation de cinq soirées-spectacles, une par territoire de MRC, composées des groupes Les Fous et Samedi. Comme lorsque nous souhaitons que la fête s’éternise jusqu’au petit matin, la traditionnelle veillée dansante du samedi du Festival a été déplacée au 30 décembre et portera le nom de la « Veillée de l’avant-veille »!
Parmi les autres nouveautés, mentionnons les shows cachés. Il s’agit de courtes prestations acoustiques présentées dans des lieux inusités de Val-d’Or qui seront dévoilées une heure avant chaque événement, directement sur la page Facebook du Festival. Les adeptes de musique trad des villes avoisinantes seront aussi choyés. Les groupes Genticorum et Les Fous seront de passage à Malartic le jeudi 3 novembre, alors que la formation Samedi sera à Senneterre le vendredi 4 novembre.
DÉCOUVRIR PAR LE PARTAGE DE CONNAISSANCES
Comme le rappelle avec enthousiasme Karine Roberge, présidente du Festival de musique trad Val-d’Or, le milieu de la musique trad est basé sur le principe d’inclusion : « C’est inclusif,
il n’y a pas de hiérarchie entre les musiciens et les festivaliers, c’est rassembleur comme nous savons l’être ici à Val-d’Or! »
La journée du samedi est consacrée à une colossale proposition d’ateliers afin de découvrir les différentes disciplines de la musique trad. Harmonica, guitare, violon, podorythmie, gigue et percussions : petits et grands, néophytes ou chevronnés auront la chance de découvrir ou de perfectionner leurs connaissances. Cette portion demeure un incontournable pour le comité organisateur, car elle est au cœur même de la mission du Festival, soit de faire tomber les préjugés parfois tenaces autour de la musique trad et de faire découvrir cet univers rassembleur en partageant les connaissances et la passion de la musique trad.
LA PASSION D’UNE ÉQUIPE DÉVOUÉE
Malgré la jeunesse du Festival, les deux dernières éditions marquées par la pandémie et les mesures sanitaires, ainsi que le contexte actuel de pénurie de main-d’œuvre, l’équipe réussit le pari de conserver une implication sans bornes de ses bénévoles dévoués, une situation enviable pour n’importe quel événement ou festival. Le secret de ce succès? Karine Roberge l’attribue entre autres au noyau serré d’adeptes du comité organisateur, mais aussi, au plaisir contagieux émanant de l’événement. Elle y va d’une image forte pour expliquer le travail d’équipe qui règne parmi les bénévoles : « C’est comme une gang de chiens de traîneau qui travaillent ensemble. Quand tu vois l’autre courir à côté de toi, tu cours toi aussi, tu veux l’aider. J’pense que c’est ça le secret! »
L’INDICE BOHÉMIEN NOVEMBRE 2022 33 – MUSIQUE –
STÉPHANIE POITRAS
KARINE ROBERGE
34 NOVEMBRE 2022 L’INDICE BOHÉMIEN
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CRITIQUE – NOUS RESTERONS VIVANTS
DANIEL-ANDRÉ BÉLANGER
« Mon cœur usé Par la distance
Battra plus fort Près du point d’origine
Mes joues se mouilleront Dans le silence
Du territoire immense
Qui se dessine »
Se produisant dorénavant à Montréal, Jean-Christophe Lessard est un artiste émergent originaire de Rouyn-Noranda. En plein cœur de la pandémie (2020), il lance Les Voix levées, un premier court album lui valant alors une certaine attention. Le filon créatif ne fait que s’amorcer. Les deux années suivantes permettent à Jean-Christophe de structurer sa démarche artistique, de s’entourer d’une équipe de musiciens et musiciennes de choix, ainsi que d’enjoliver ses textes et compositions pour ultimement nous présenter, en avril dernier, un album complet intitulé Nous resterons vivants
En comparaison avec Les Voix levées, dans ce nouvel album, un détachement se crée par rapport aux éléments rock, mélancoliques ou tendus et un ralentissement se ressent dans le tempo en général. Pas de basse intense, pas de distorsion et moins d’attaque dans le jeu de guitare et le mix. Nous resterons vivants joue beaucoup plus en douceur, dans la subtilité des dynamiques et dans l’homogénéité des voix, ainsi que des instruments. Côté thématique, l’album se veut le prolongement logique de son prédécesseur. Jean-Christophe parle de la suite du monde, d’inquiétudes climatiques, d’injustices et d’amour, le tout dans une prose qui lui est propre; l’enivrement pour la nature, entre la douceur et le tragique.
Nous resterons vivants ouvre en force avec « Confettis », qui marque ce léger changement de ton en incluant, dès les premières secondes de la piste, une section de cordes favorisant le versant introspectif plutôt que rock de l’album.
La deuxième piste, « Les cigales », magnifique pièce en collaboration avec Louis-Jean Cormier, rappelle à la fois le son de celui-ci et fait écho au dernier opus de Jean-Christophe. Surprise au sein de l’album, on y retrouve sur trois pistes la voix de l’artiste innue multidisciplinaire Soleil Launière, en plus de celle de Roger Wylde, artiste anicinabe, qui prête sa voix à la chanson « Deux branches ». Les deux artistes ont également participé à la co-écriture des chansons en question.
On ne peut s’empêcher de noter un fort attrait pour l’acoustique et l’organique. Le piano feutré et intimiste de « Colline (côte Joanne) », l’ajout de la contrebasse de Karl Surprenant, l’arrangement de cordes supervisé par Amélie Mandeville, ainsi que la guitare entièrement acoustique offrent un sentiment de proximité avec la musique, comme si elle adressait directement à nous. Les cordes grésillantes durant « Les cigales (mettant en vedette Louis-Jean Cormier) » ajoutent à cet aspect vivant en proposant des mélodies incarnées, imparfaites et vibrantes.
La pochette de l’album, réalisée par Mathilde Corbeil, exprime avec délicatesse les propos et la musique de JeanChristophe Lessard : la complexité et les couleurs de notre environnement, la bienveillance et l’empathie; une fresque abstraite des relations et des émotions humaines.
Une écriture et une composition matures; une vision affirmée et claire. Courte et efficace, chaque nouvelle écoute de Nous resterons vivants révèle un détail attrayant dans la musique ou dans les textes. Un album accrocheur dont on se souviendra comme d’une apaisante balade en nature.
L’INDICE BOHÉMIEN NOVEMBRE 2022 35 – MUSIQUE –
MATHILDE CORBEIL ET JEAN-CHRISTOPHE LESSARD
ARTS DU CIRQUE –
À L’ABORDAGE AVEC LE CIRQUE COLLINI!
GABRIELLE IZAGUIRRÉ-FALARDEAU
Une bande de pirates se lance à la recherche d’une recrue pour compléter son équipage et partir en quête d’un butin. Pour être élus, les candidats devront prouver leurs habiletés en relevant trois défis. Qui sera choisi? Telle est la prémisse d’Équipage recherché, le plus récent spectacle en salle du Cirque Collini, élaboré dans le cadre d’un partenariat avec le Théâtre des Eskers d’Amos. Cerceau, tissu aérien et combat scénique font partie des disciplines mises de l’avant dans cette création éclatée alliant cirque, musique et théâtre.
La résidence de septembre, quant à elle, a été l’occasion de réintégrer Guillaume Laroche à la troupe et d’améliorer la mise en scène. C’est donc une œuvre beaucoup plus fluide et bonifiée sur le plan musical qui a été présentée, le 9 septembre, devant un public comblé. « C’était malade. La salle était presque pleine. Il y a eu une super réaction du public. Je pense que c’était notre plus grosse salle intérieure! », explique François Bédard avec enthousiasme.
UN PRÉCIEUX SOUTIEN
François Bédard ne tarit pas d’éloges envers Mathieu Larochelle : « Il a été extrêmement compréhensif et transparent avec ce projet-là. Son but était vraiment de nous offrir un espace pour amener notre vision à terme. Il a été d’un grand soutien. » François Bédard mentionne que peu de lieux de création et de répétition adaptés aux arts du cirque sont disponibles en Abitibi-Témiscamingue, et que les résidences en salle sont indispensables à la création professionnelle. « C’est le fun d’être soutenus, dans un contexte structuré et structurant, où tous les éléments sont là et facilement accessibles. Ça aide à la professionnalisation et ça permet d’ouvrir des portes. »
LA GENÈSE
Tout a commencé grâce à Mathieu Larochelle, chef de division au Théâtre des Eskers, qui a eu accès à une subvention pour offrir une résidence de création à des artistes de cirque. Pour lui, il tombait sous le sens d’offrir cette occasion à une troupe de cirque régionale, lui donnant ainsi la possibilité de pratiquer son art en Abitibi-Témiscamingue. Tout a donc été mis en place pour que le Théâtre des Eskers accueille le Cirque Collini pendant deux semaines en juin, puis une autre en septembre. Pour Mathieu Larochelle, c’était une première, lui qui n’avait pas encore reçu d’artistes en résidence depuis son entrée en poste. « Ça change du day to day. L’espace est occupé, la salle devient dynamique, on augmente l’équipe. C’est aussi une belle expérience de création pour les techniciens », souligne-t-il.
LA CRÉATION
Pour la création du spectacle, l’objectif de François Bédard était d’intégrer les disciplines du cirque à une trame narrative finement élaborée et basée sur des faits historiques. La première résidence, en juin, a permis à la troupe de faire progresser la création et d’apprendre à travailler avec un nouveau membre, le comédien Jérémie Poirier, en remplacement de Guillaume Laroche. Alors que les imprévus se sont accumulés et que la COVID a frappé quelques-uns des artistes, ceux-ci ont dû composer à plus d’une reprise avec des changements et des solutions de dernière minute. Deux représentations devant des groupes scolaires ont heureusement permis de roder le tout et de prendre confiance en la qualité du travail accompli. Grâce à quelques représentations supplémentaires entre juin et septembre, le Cirque a aussi pu constater la mobilité du spectacle, facilement adaptable et de plus en plus maîtrisé.
Mathieu Larochelle, quant à lui, souligne l’ambiance dans laquelle s’est déroulée la résidence, ainsi que l’apport de la présence quotidienne d’artistes sur scène : « Ce sont tous des gens très sympathiques. C’était très bon enfant. Et c’est le fun, on avait trois artistes de Montréal. Ça inverse le fait que des artistes de cirque de l’Abitibi partent pratiquer à la TOHU », conclut-il, un sourire dans la voix.
36 NOVEMBRE 2022 L’INDICE BOHÉMIEN –
CHRISTIAN LEDUC
CHRISTIAN LEDUC
EN PARTENARIAT AVEC TOURISME ABITIBI-TÉMISCAMINGUE
L’INDICE BOHÉMIEN NOVEMBRE 2022 37 CHRISTIAN
LEDUC
- MA RÉGION, J’EN MANGECHAUDRÉE DE POMMES DE TERRE GRELOTS AU BACON
YVES MOREAU, CHEF CUISINIER, LES BECS SUCRÉS-SALÉS (VAL-D’OR)
INGRÉDIENTS (6 à 8 personnes)
1 kg (2,2 lb)
Pommes de terre grelots régionales, coupées en dés moyens
250 g (8 oz) Bacon cru, ciselé
180 g (6 oz) Carotte, coupée en dés
180 g (6 oz) Branche de céleri, coupée en dés
180 g (6 oz) Poireau ou oignon, coupé en dés
180 g (6 oz) Maïs en grain
1 litre (32 oz) Bouillon de bœuf
500 ml (16 oz) Bouillon de poulet
30 gr (1 oz) Ail, haché fin
10 gr (2 c. à thé) Mélange d’épices sèches ou fraîches (1/3 basilic, 1/3 sarriette et 1/4 estragon)
1 pincée Muscade
1 Feuille de laurier
180 ml (6 oz) Crème 35 %
Sel et poivre, au goût
MÉTHODE
1. Dans un chaudron à fond épais, bien dorer le bacon à feu moyen. Retirer le bacon et réserver. Laisser le gras du bacon dans le chaudron.
2. Ajouter les pommes de terre, la carotte, le céleri, le poireau, le maïs et l’ail . Laisser suer environ 5 min à feu moyen. Saler et poivrer.
3. Mouiller avec le bouillon de poulet et le bouillon de bœuf, ajouter la feuille de laurier, le mélange d’épices et la muscade.
4. Laisser mijoter doucement 15 à 20 min jusqu’à ce que les pommes de terre soient tendres.
5. Ajouter la crème 35 % juste avant de servir. Saler et poivrer, au besoin.
Servir la chaudrée bien chaude.
IDÉE GOURMANDE
1. Déglacer avec un peu de vin blanc après avoir bien doré le bacon, cela rehausse la chaudrée d’un petit goût acide.
2. Servir la chaudrée avec un bon pain au fromage.
3. Utiliser des produits frais des marchés locaux de votre région ou provenant d’un agriculteur.
4. La chaudrée est une excellente soupe-repas à laquelle vous pouvez ajouter une garniture au choix (jambon cuit, en dés; crevettes; saumon, cuit; poulet, cuit en cubes ou échalotes vertes, ciselées).
38 NOVEMBRE 2022 L’INDICE BOHÉMIEN
6.
GOUTEZAT.COM
YVES MOREAU
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CINÉMA
Soirée de l’horreur 28 octobre, Cinéma La Sarre
Festival du cinéma international en Abitibi-Témiscamingue 29 octobre au 3 novembre
Les passagers de la nuit 13 et 14 novembre, Théâtre du cuivre (RN)
EXPOSITIONS
L’Égomation – Christine Leblanc
Jusqu’au 19 novembre Centre d’exposition de Val-d’Or
La mémoire des ruines – Édith Laperrière et Émilie B. Côté Jusqu’au 19 novembre Centre d’exposition du Rift (VM)
Suivre le paysage à la trace – Violaine Lafortune Jusqu’au 19 novembre Centre d’exposition du Rift (VM)
Histoires abymées – Wartin Pantois
Jusqu’au 20 novembre VOART – Centre d’exposition de Val-d’Or
HUMOUR
Su’l gros vin – Les grandes crues 9 novembre, Théâtre du cuivre (RN)
10 novembre, Théâtre du rift (VM)
11 novembre, Salle de spectacles Desjardins (LS)
12 novembre, Théâtre Télébec (VO)
Seul… en scène – Marc Messier
14 novembre, Théâtre Télébec (VO)
15 novembre, Théâtre du cuivre (RN)
CALENDRIER CULTUREL CONSEIL DE LA CULTURE DE L’ABITIBI-TÉMISCAMINGUE
JEUNESSE
Nicolas Noël, le cristal du temps
12 novembre, Théâtre du cuivre
13 novembre, Salle de spectacles Desjardins (LS)
Le doudou tombé du ciel
17 novembre, Bibliothèque La Bouquine (VM)
Éveil musical et café
18 novembre, Centre d’exposition du Rift (VM)
Petit et Bébé Barbouille
20 novembre, Centre d’exposition du Rift (VM)
Alice au pays des merveilles – Théâtre Tout à trac
19 novembre, Salle de spectacles Desjardins (LS)
20 novembre, Théâtre du cuivre (RN)
24 novembre, Théâtre Télébec (VO)
Lulu et le cheval de bois
20 novembre, Bibliothèque de Val-d’Or
20 novembre, Théâtre Lilianne-Perreault (LS)
MUSIQUE
Petite nature – Émile Bilodeau
2 novembre, Théâtre Télébec (VO)
3 novembre, Salle de spectacles Desjardins (LS)
5 novembre, Théâtre du Rift (VM)
Genticorum et les Fous
3 novembre, Théâtre Meglab (Malartic)
Les antipodes – Cowboys fringants
9 novembre, Théâtre Télébec (VO)
11 novembre, Théâtre du cuivre (RN)
The Lux
10 novembre, Théâtre Meglab (Malartic)
Trio Les Eskers
11 novembre, Conservatoire de musique de Val-d’Or
Elle et moi simplement – Marie-Mai
11 novembre, Théâtre Télébec (VO)
Dreamweaver – Anachnid
17 novembre, Théâtre du Rift (VM)
18 novembre, Petit théâtre du Vieux Noranda (RN)
Abri de fortune (pour fin du monde) – Koriass
19 novembre, Salle Félix-Leclerc (VO)
EVA_D – C4
23 novembre, Théâtre Télébec (VO)
25 novembre, Théâtre du cuivre (RN)
Élliot Maginot
25 novembre, Théâtre Meglab (Malartic)
QWARTZ
29 novembre, Théâtre du Rift (VM)
Acrophobie – Roxane Bruneau
30 novembre, Théâtre Télébec (VO)
THÉÂTRE
Zoé – Olivier Choinière
1er novembre, Théâtre Télébec (VO)
Clémence – Théâtre de l’œil ouvert (théâtre musical)
15 novembre, Théâtre Télébec (VO)
16 novembre, Théâtre du cuivre (RN)
Alter indiens
25 novembre, Salle de spectacles Desjardins (LS)
26 novembre, Théâtre du Rift (VM)
Pour qu’il soit fait mention de votre événement dans le prochain numéro de L’Indice bohémien, vous devez l’inscrire vous-même, avant le 20 du mois, à partir du site Web du CCAT au ccat.qc.ca/promotion/calendrier-culturel. L’Indice bohémien n’est pas responsable des erreurs ou des omissions d’inscription.
L’INDICE BOHÉMIEN NOVEMBRE 2022 39
L’INDICE BOHÉMIEN DIFFUSE VOS ŒUVRES AVIS AUX ARTISTES! redaction@indicebohemien.org