N° 165 • MAI 2016
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Définition préalable des besoins : mise en place de nouveaux outils Contenu des marchés : vers plus de souplesse ?
uuChoix de la procédure Procédures formalisées : quelles sont les modifications opérées ? Spécificités de la « nouvelle » procédure adaptée Partenariat d’innovation et gestion des risques
Modalités de publicité préalable Sélection des candidatures et choix des offres
CONTENTIEUX
Utiles précisions sur le recours Tarn-et-Garonne
N° 165 – Mensuel – 29 €
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et sur tablett
uuPréparation des marchés
uuPassation des marchés
Viedes contrats
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Le décret n° 2016-360 relatif aux marchés publics (1re partie)
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Dossier spécial
Actualités
Contrats Publics Actualités
Antony Parc 2 10, place du Général de Gaulle, BP 20156, 92186 Antony Cedex Tél. : 01 79 06 73 42 RÉDACTION Responsable éditorial : Richard Deau Courriel : richard.deau@infopro-digital.com Conception graphique : Catherine Lattuca Maquette : DESK Ont collaboré à ce numéro* : Didier Adda, Leslie Bonnieu, Sébastien Bracq, Nicolas Charrel, Carole Collinet, François Fourmeaux, Thomas Gaspar, Elisa Jeanneau, Jean-Pierre Jouguelet, Romain Lauret, Astrid Layrisse, Marie Lhéritier, Jean Maïa, Ludovic Midol-Monnet, Sophie Nicinski, Marie-Hélène Pachen-Lefèvre, Catherine Ribot, Nathalie Ricci, Thomas Rouveyran, Davy Sarre. * Les opinions ou interprétations exprimées par les auteurs de cette revue n’engagent qu’eux-mêmes et non les organismes auxquels ils appartiennent.
DIRECTION Éditeur : Claire de Gramont Directeur éditorial : Thierry Kremer Directeur commercial : Christophe Vitiello Service commercial : Céline Dufour (73 46) et Francis Lefevre (72 69) Gestion des abonnements : Nadia Clément (72 91) Abonnements : Antony Parc 2 10, place du Général de Gaulle, BP 20156, 92186 Antony Cedex Tél. : 01 79 06 70 70 Internet : www.editionsdumoniteur.com 1 numéro : 29 € (TTC) ; 11 nos (1 an) : 269 € (TTC) ; 22 nos (2 ans) : 445 € (TTC) Fabrication : Nathalie Randon Gestion : Sabine Lejeune Couverture : Pressmaster – Fotolia.com
Contrats Publics – Actualité MoniteurJuris est éditée par Groupe Moniteur Président, directeur de la publication : Christophe Czajka Société éditrice : GROUPE MONITEUR SAS au capital de 333 900 euros. Siège social : Antony Parc 2 10, place du Général de Gaulle - La Croix de Berny BP 20156, 92186 Antony Cedex RCS NANTERRE 403 080 823 N° SIRET : 403.080.823.00228 N° TVA intracommunautaire FR 32 403 080 823 Principal associé : Infos Services Holding. Imprimerie, brochage, routage Imprimerie de Champagne Z.I. Les Franchises 52200 Langres France. Commission paritaire : 0618T80648 ISSN 1760-2483 Mensuel. Dépôt légal à parution. IMPRIMÉ EN FRANCE
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Comité de rédaction Claudie Boiteau
est professeur de droit public à l’université Paris-Dauphine et coordinatrice de la revue. Elle est l’auteur de l’ouvrage Les conventions de délégation de service public*.
Mireille Berbari
est avocate à la Cour. Elle est l’auteur de nombreux ouvrages notamment Les CCAG des marchés publics annotés et commentés*.
Nicolas Charrel
est avocat à la Cour. Il est l’auteur des commentaires du Code des marchés publics *.
Guy Duguépéroux
est président de section à la Chambre régionale des comptes du Centre, professeur associé à la faculté de droit de Poitiers.
Michel Guibal
est professeur des facultés de droit. Il est l’auteur des commentaires et annotations du Code des marchés publics *.
Jean-Pierre Jouguelet est conseiller d’État.
Michaël Karpenschif
est professeur à l’université Lyon III (Jean-Moulin).
Gilles Le Chatelier est avocat associé.
Pierre Pintat
est avocat associé.
Catherine Ribot
est professeure de droit public à l’université Montpellier I.
Laurent Richer
est professeur de droit à l’université Paris I (Panthéon-Sorbonne) et avocat au barreau de Paris. Il est directeur scientifique de Délégation de service public *.
Patrick Sitbon
est conseiller référendaire à la Cour des comptes, secrétaire général de la Cour de discipline budgétaire et financière. * Édité(s) par Les Éditions du Moniteur
La mention abrégée de la revue est Contrats publics-Le Moniteur. La revue peut être citée comme suit : Auteur(s), « Titre de l’article », Contrats publics-Le Moniteur, n°, mois et année, page(s).
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Aux termes du Code de la propriété intellectuelle, toute reproduction ou représentation, intégrale ou partielle, de la présente publication, faite par quelque procédé que ce soit (reprographie, micro-filmage, scannérisation, numérisation…) sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle. Toutefois, l’autorisation d’effectuer des reproductions par reprographie peut être obtenue auprès du Centre français d’exploitation du droit de copie (CFC), 20, rue des Grands-Augustins, 75006 Paris, tél. : 01 44 07 47 70, fax : 01 46 34 67 19.
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Contrats Publics – n° 165 - mai 2016
Sommaire
Editorial........................................................................................................................................ L’actualité de Moniteur Juris . ....................................................................................................
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Dossier spécial
Veille Textes officiels Nationaux Richard Deau..............................................................................................................
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Jurisprudence Européenne Richard Deau........................................................................................................... Conseil d’État Jean-Pierre Jouguelet.......................................................................................... Cours administratives d’appel Catherine Ribot......................................................................... Cour de cassation Catherine Ribot.............................................................................................. Autorité de la concurrence Catherine Ribot............................................................................... Juridictions financières Carole Collinet......................................................................................
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Le décret n° 2016-360 relatif aux marchés publics (1re partie) La définition préalable des besoins : une étape clé conditionnant l’efficacité du processus d’achat Nathalie Ricci................................................................................................................................................................ Le contenu des marchés publics Ludovic Midol-Monnet...........................................................................................
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Dispositions relatives au déroulement des procédures formalisées Nicolas Charrel, Leslie Bonnieu, Thomas Gaspar.............................................................................................................................................................
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La procédure adaptée au regard des nouvelles dispositions applicables aux marchés publics Sébastien Bracq et Davy Sarre.....................................................................................................................................
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La publicité préalable dans le nouveau décret « marchés publics » Marie-Hélène Pachen-Lefèvre et Astrid Layrisse........................................................................................................................................................... La sélection des candidatures Thomas Rouveyran et Elisa Jeanneau......................................................................
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La gestion des risques dans les partenariats d’innovation Didier Adda.................................................................
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La coopération entre pouvoirs adjudicateurs : des précisions, des assouplissements et des interrogations ? Marie Lhéritier...............................................................................................................................................................
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Le choix de l’offre Sophie Nicinski..............................................................................................................................
Contentieux
Contrats Publics – n° 165 - mai 2016
Utiles précisions sur le recours Tarn-et-Garonne Romain Lauret et François Fourmeaux.......................................................................................
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Veille
Textes officiels nationaux
Textes officiels nationaux Ordonnances Appel d’offres – Biométhane ¢¢ Ordonnance n° 2016-411 du 7 avril 2016 portant diverses mesures d’adaptation dans le secteur gazier (JO du 8 avril 2016) L’article 119 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 a habilité le Gouvernement à prendre toute mesure relevant du domaine de la loi afin de permettre à l’autorité administrative de recourir à une procédure d’appel d’offres lorsque les objectifs d’injection du biométhane dans le réseau de gaz s’écartent de la trajectoire prévue dans la programmation pluriannuelle de l’énergie. Dans le cadre de cette habilitation, l’article 1er de cette ordonnance créé un nouvel article L. 446-5 dans le Code de l’énergie donnant, aux pouvoirs publics, la possibilité de recourir à la procédure d’appel d’offres en cas d’écart avec la trajectoire prévue dans la nouvelle programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) pour les objectifs de développement du biométhane injecté dans le réseau de gaz. Ce même article énumère différents critères sur lesquels l’autorité administrative se fondera pour examiner la recevabilité des offres soumises. Les dispositions de cet article 1 entreront en vigueur à compter du 1er juillet 2016. er
Décrets Marchés publics – Performance énergétique ¢¢ Décret n° 2016-412 du 7 avril 2016 relatif à la prise en compte de la performance énergétique dans certains contrats et marchés publics (JO du 8 avril 2016) Le décret du 7 avril dernier, qui modifie les articles R. 234-1 et suivants du Code de l’énergie, transpose l’article 6 de la directive 2012/27/UE du 25 octobre 2012 relative à l’efficacité énergétique. Il rend obligatoire – pour les services de l’État ainsi que ses établissements publics n’ayant pas un caractère industriel et commercial et dont les compétences ou la vocation ont un caractère national – l’acquisition des seuls produits et services attestant d’une haute performance énergétique. Les caractéristiques de ces produits sont mentionnées à l’article R. 234-4 du Code de l’énergie issu de ce décret. La même obligation s’impose pour l’acquisition ou la prise à bail de bâtiments (Code de l’énergie, art. R. 234-1 3°). L’article R. 234-3 précise que cette obligation d’achats de produits à haute performance énergétique s’applique aux marchés publics et contrats dont le montant estimé est égal ou supérieur aux seuils européens publiés au JO (cf. Décret n° 2015-1904 du 30 décembre 2015). En revanche, concernant spécifiquement l’achat ou la prise à bail de bâtiments, l’obligation s’applique quel que soit le montant. Néanmoins en sont exclus les bâtiments et parties de bâtiments ayant fait l’objet d’une demande de
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permis de construire déposée à compter du 1er janvier 2013 soit au moment de l’entrée en vigueur de la RT 2012. Les dispositions de ce décret sont applicables à compter du 15 avril 2016 et ne s’appliqueront qu’aux marchés publics pour lesquels une consultation est engagée ou un avis d’appel à la concurrence est envoyé à la publication, postérieurement à cette date. Électricité – Bilan prévisionnel et bilan électrique national ¢¢ Décret n° 2016-350 du 24 mars 2016 portant diverses modifications du titre IV du livre Ier du code de l’énergie (JO du 26 mars 2016) Ce texte modifie les dispositions des articles D. 141-3 à D. 141-8 du Code de l’énergie concernant le bilan prévisionnel pluriannuel de l’offre et de la demande. Ainsi, l’article D. 141-4 détaille le contenu du bilan prévisionnel précité. Il doit notamment contenir une étude approfondie de l’équilibre entre l’offre et la demande d’électricité durant les cinq années suivant la date à laquelle il est rendu public. Les caractéristiques de cette étude sont précisées par l’article D. 141-5. Les articles D. 141-9 et suivants déterminent le contenu du bilan électrique national portant sur la consommation et la production d’électricité, l’effacement de la consommation… Enfin, les articles D. 142-9-1 et suivants précisent les informations devant figurer dans le registre national des installations de production et de stockage d’électricité. Passation et exécution des marchés publics ¢¢ Décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics (JO du 27 mars 2016) Le décret transposant les dispositions des directives marchés (directive 2014/24/UE du 26 février 2014 ; directive 2014/25/UE du 26 février 2014) et prévoyant les mesures d’application de l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 s’applique aux marchés publics pour lesquels une consultation est engagée ou un avis d’appel à la concurrence est envoyé à la publication à compter du 1er avril 2016. Retrouvez dans ce numéro de Contrats publics la première partie du dossier consacré à l’analyse des dispositions de ce décret. Passation et exécution des marchés publics de défense ¢¢ Décret n° 2016-361 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics de défense ou de sécurité (JO du 27 mars 2016) Ce décret prévoit des conditions de publicité et de mise en concurrence adaptées à la spécificité de ces marchés publics et reprend les dispositions du décret n° 2011-1104 du 14 septembre 2011 relatif à la passation et à l’exécution des marchés publics de défense ou de sécurité qui a transposé la directive 2009/81/CE, harmonisé les règles de passation des marchés publics de défense ou de sécurité et précisé les modalités d’application de la loi n° 2011-702 du 22 juin 2002. Ce décret avait inséré une troisième partie relative aux marchés publics de défense ou de sécurité dans le Code des marchés publics, abrogée par le 4° de
Contrats Publics – n° 165 - mai 2016
Jurisprudence européenne
l’article 102 de l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015. À l’instar du décret 2016-360, ce texte est entré en vigueur le 1er avril 2016 et s’applique aux marchés publics pour lesquels une consultation est engagée ou un avis d’appel public à la concurrence est envoyé à la publication à compter de sa date d’entrée en vigueur. VEFA – Garantie financière ¢¢ Décret n° 2016-359 du 25 mars 2016 relatif à la garantie financière en cas de vente en l’état futur d’achèvement (JO du 27 mars 2016) Ce décret, modifiant certains articles du CCH, porte application de l’ordonnance n° 2013-890 du 3 octobre 2013 relative à la garantie financière en cas de vente en l’état futur d’achèvement (VEFA) qui rend obligatoire la souscription d’une garantie financière d’achèvement lorsque le vendeur d’un immeuble d’habitation ou mixte en état futur d’achèvement n’opte pas pour une garantie de remboursement. Il impose également à la personne qui constate l’achèvement de remettre au vendeur une attestation d’achèvement conforme à un modèle établi par arrêté (art. 7). Les modifications opérées par ce décret sont applicables depuis le 28 mars dernier à l’exception de l’article 7 relatif à l’attestation d’achèvement qui n’entrera en vigueur que le 1er juillet 2016.
Arrêtés Marchés publics – Candidatures – Renseignements ¢¢ Arrêté du 29 mars 2016 (NOR : EINM1600215A) fixant la liste des renseignements et des documents pouvant être demandés aux candidats aux marchés publics (JO du 31 mars 2016) Cet arrêté fixe la liste des renseignements et des documents pouvant être demandés aux candidats aux marchés publics et abroge l’arrêté du 28 août 2006 (NOR : ECOM0620008A). L’article 2 détaille les documents pouvant être nécessaires à l’appréciation de la capacité économique et financière des candidats. Quant à l’article 3, il établit une liste limitative des éléments permettant d’apprécier les capacités techniques et professionnelles des candidats. Concernant l’article 4, il précise les caractéristiques des certificats de qualité pouvant être produits par les candidats et attestant que l’opérateur économique se conforme à certaines normes d’assurance de qualité. Cet arrêté est entré en vigueur le 1er avril 2016. Il s’applique aux marchés publics pour lesquels une consultation est engagée ou un avis d’appel public à la concurrence est envoyé à la publication à compter de sa date d’entrée en vigueur.
Avis Services sociaux – Droit environnemental – Travaux – Seuils ¢¢ Avis relatifs aux marchés publics (JO du 27 mars 2016)
Contrats Publics – n° 165 - mai 2016
Veille
Cinq avis ont été publiés au JO du 27 mars intéressant directement le droit de la commande publique : – un avis (NOR : EINM1608208V) listant les services sociaux et autres services spécifiques mentionnés au I de l’article 28 du décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 ; – un avis (NOR : EINM1608199V) explicitant certaines notions figurant dans le décret précité telles qu’une « spécification technique », une « norme », une « évaluation technique européenne », un « référentiel technique »… ; – un avis (NOR : EINM1608173V) listant les dispositions internationales en matière de droit environnemental, social et du travail, évoquées à l’article 60 du décret précité, permettant de rejeter une offre comme anormalement basse en matière de marchés publics ; – un avis (NOR : EINM1608130V) listant les activités qui sont des travaux en droit de la commande publique. Cette liste est évoquée à l’article 5 de l’ordonnance n° 2015899 du 23 juillet 2015 ainsi qu’à l’article 6 de l’ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession ; – un avis (NOR : EINM1608119V) rappelant les seuils de procédure formalisée pour les marchés publics et listant les autorités publiques centrales mentionnées aux articles 31, 70, 72 et 83 du décret n° 2016-360 du 25 mars 2016.
Jurisprudence européenne Cour de justice de l’Union européenne Lien existant entre le soumissionnaire et les autres entités – Annulation et répétition d’une enchère électronique ¢¢ CJUE 7 avril 2016, aff. C-324/14
uuDans le cadre de la procédure de passation d’un marché public relatif au nettoyage mécanique polyvalent des rues de la ville de Varsovie, l’offre de la société Partner a été rejetée. Celle-ci saisit les juridictions nationales. À l’occasion de ce litige, la Chambre nationale de recours pose à la CJUE des questions préjudicielles portant sur l’interprétation de différents articles de la directive 2004/18/CE du 31 mars 2004.
La Cour souligne que les articles 47 § 2, et 48 § 3, de la directive 2004/18/CE, lus en combinaison avec l’article 44 § 2, de cette directive, doivent être interprétés en ce sens que : – ils reconnaissent le droit de tout opérateur économique de faire valoir, pour un marché déterminé, les capacités d’autres entités, quelle que soit la nature des liens existant entre lui-même et ces entités, pour autant qu’il est prouvé au pouvoir adjudicateur que le candidat ou le soumissionnaire disposera effectivement des moyens desdites entités qui sont nécessaires à l’exécution de ce marché (cf. CJCE 2 décembre 1999, aff. C-176/98), et – il n’est pas exclu que l’exercice dudit droit puisse être limité (cf. CJUE 10 octobre 2013, aff. C-94/12), dans des circonstances particulières, eu égard à l’objet du marché concerné ainsi que des finalités de celui-ci. Tel est notamment le cas lorsque les capacités dont dispose une entité tierce, et qui sont nécessaires à l’exécution de ce marché,
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Veille
Jurisprudence nationale
ne peuvent être transmises au candidat ou au soumissionnaire, de sorte que ce dernier ne saurait se prévaloir desdites capacités que si cette entité tierce participe directement et personnellement à l’exécution dudit marché. S’agissant de l’article 48 § 2 et 3 de la directive 2004/18, il doit être interprété en ce sens que, eu égard à l’objet d’un marché déterminé ainsi que des finalités de celui-ci, le pouvoir adjudicateur peut, dans des circonstances particulières, aux fins de la correcte exécution de ce marché, indiquer expressément, dans l’avis de marché ou dans le cahier des charges, des règles précises selon lesquelles un opérateur économique peut faire valoir les capacités d’autres entités, pour autant que ces règles sont liées et proportionnées à l’objet et aux finalités dudit marché. En outre, les principes d’égalité de traitement et de nondiscrimination des opérateurs économiques, énoncés à l’article 2 de la directive 2004/18, doivent être interprétés en ce sens que, dans des circonstances telles que celles du litige au principal, ils s’opposent à ce qu’un pouvoir adjudicateur, après l’ouverture des offres présentées dans le cadre d’une procédure de passation de marché public, accepte la demande d’un opérateur économique, ayant présenté une offre pour l’entièreté du marché en question, de prendre en considération son offre aux fins de l’attribution de certaines parties seulement de ce marché (cf. CJUE 6 novembre 2014, aff. C-42/13). Enfin, les principes d’égalité de traitement et de nondiscrimination des opérateurs économiques, énoncés à l’article 2 de la directive 2004/18, doivent être interprétés en ce sens qu’ils exigent d’annuler et de réitérer une enchère électronique à la participation de laquelle un opérateur économique ayant présenté une offre recevable n’a pas été invité, et cela même s’il ne peut pas être constaté que la participation de l’opérateur exclu aurait modifié le résultat de l’enchère. Contentieux des marchés publics – Examen prioritaire d’un recours incident ¢¢ CJUE 5 avril 2016, aff. C-689/13
uuDans le cadre d’une procédure d’adjudication ouverte ayant pour objet l’attribution d’un service de nettoyage, l’un des candidats dont l’offre a été rejetée a saisi un tribunal administratif italien en vue de l’annulation de la décision d’attribution du marché. À l’occasion de ce recours, le chef de file de l’association temporaire d’entreprises à laquelle a été attribué le marché a introduit une action incidente. En appel, ce chef de file estime que le tribunal a violé une jurisprudence nationale imposant que le recours incident soit examiné en priorité, avant le recours au principal.
La juridiction d’appel saisit la CJUE d’une demande de décision préjudicielle : l’article 1er § 3 de la directive 89/665 du 21 décembre 1989 doit-il être interprété en ce sens qu’il s’oppose à ce qu’un recours principal introduit par un soumissionnaire, ayant un intérêt à obtenir un marché déterminé et ayant été ou risquant d’être lésé par une violation alléguée du droit de l’Union en matière de marchés publics ou des règles transposant ce droit, et visant à l’exclusion d’un autre soumissionnaire soit déclaré irrecevable en application des règles procédu-
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rales nationales qui prévoient l’examen prioritaire du recours incident formé par cet autre soumissionnaire. La Cour rappelle le principe posé par l’arrêt Fastweb (CJUE 4 juillet 2013, aff. C-100/12) selon lequel l’action incidente de l’adjudicataire ne peut pas conduire à écarter le recours d’un soumissionnaire évincé dans l’hypothèse où la régularité de l’offre de chacun des opérateurs est mise en cause dans le cadre de la même procédure, étant donné que, dans une telle hypothèse, chacun des concurrents peut avoir un intérêt légitime équivalent à l’exclusion de l’offre des autres, pouvant aboutir au constat de l’impossibilité, pour le pouvoir adjudicateur, de procéder à la sélection d’une offre régulière. La Cour estime que cette règle posée par l’arrêt Fastweb est applicable dans cette affaire et répond donc négativement à la question posée.
Jurisprudence nationale Conseil d'État Concession de service public – Notion de biens de retour – Compte de provision pour travaux ¢¢ CE 26 février 2016, Syndicat mixte de chauffage urbain de la Défense, req. n° 384424
uuLe syndicat mixte de chauffage urbain de la Défense (SICUDEF) a confié à la société de climatisation interurbaine de la Défense (CLIMADEF) la production et la distribution de chaud et de froid dans le quartier de la Défense. Cette concession venait d’être prorogée pour une durée de vingt ans à compter du 1er septembre 1982, par un avenant du 10 mars 1994, lorsqu’est survenue, le 30 mars 1994, l’explosion accidentelle d’une chaudière, sur le site de la centrale. À la suite de cet accident, les parties ont prévu les conditions du rétablissement des moyens de production et de distribution par une convention signée le 11 décembre 1995. Un avenant n° 1, s’y substituant, a été adopté le 7 juin 1996. Cet avenant prévoyait notamment la répartition à l’avenir des moyens de production sur deux sites, le financement du projet par le concessionnaire sans aucune modification tarifaire, un allongement de la durée de la convention pour assurer l’amortissement des investissements supplémentaires, dans le respect des dispositions de l’article 40 de la loi Sapin, et, enfin, des conditions suspensives à la prorogation, à lever par le SICUDEF. Toutefois, par une délibération du 30 juin 1998, le SICUDEF a estimé que si la société CLIMADEF avait bien contracté une promesse de vente portant sur le terrain destiné à devenir le second site, son projet ne pouvait être agréé et les conditions suspensives prévues par l’avenant n° 1 ne pouvaient être levées, notamment en ce qui concerne le respect des conditions posées par l’article 40 de la loi Sapin. En vue du règlement de la concession, le SICUDEF a saisi le TA de Paris d’une demande tendant à être indemnisé de la valeur des biens de retour dont il estime avoir été privé à l’issue de la concession ainsi que du solde du compte de provision pour travaux figurant au bilan de son concessionnaire. Le TA a fait partiellement droit à la demande du SICUDEF, mais la CAA de Paris a sensiblement réduit le montant de l’indemnité. Le SICUDEF s’est pourvu en cassation contre son arrêt.
L’indemnité due au SICUDEF au titre des biens de retour : Dans le cadre d’une délégation de service public ou d’une concession de travaux mettant à la charge du cocontrac-
Contrats Publics – n° 165 - mai 2016
Jurisprudence nationale
tant les investissements correspondant à la création ou à l’acquisition des biens nécessaires au fonctionnement du service public, l’ensemble de ces biens, meubles ou immeubles, appartient, dans le silence de la convention, dès leur réalisation ou leur acquisition à la personne publique. À l’expiration de la convention, les biens qui sont entrés, en application des principes énoncés ci-dessus, dans la propriété de la personne publique et ont été amortis au cours de l’exécution du contrat font nécessairement retour à celle-ci gratuitement, sous réserve des clauses contractuelles permettant à la personne publique, dans les conditions qu’elle détermine, de faire reprendre par son cocontractant les biens qui ne seraient plus nécessaires au fonctionnement du service public. Par suite, en l’absence de telles clauses, ces biens, qui ont été nécessaires au fonctionnement du service concédé à un moment quelconque de l’exécution de la convention, font retour à la personne publique à l’expiration de celle-ci, quand bien même ils ne sont plus alors nécessaires au fonctionnement du service public concédé. En premier lieu, aux termes de l’article 1er du cahier des charges annexé à la convention, dans sa version en date du 10 mars 1994 : « La concession a pour objet : / – la réalisation (...) des installations de production et de distribution de chaleur et de froid destinées à assurer le chauffage, la préparation de l’eau chaude sanitaire et les climatisations dans les bâtiments à édifier sur les parties de la zone EPAD définie à l’article 1er de la convention de concession et, accessoirement, la réalisation des installations de production d’électricité. / – l’exploitation et l’entretien de ces installations pendant la durée de la concession ». L’article 4 de ce même cahier stipule : « Les ouvrages concédés sont les suivants : / – la centrale de production de chaleur et de froid édifiée, sur le terrain pour lequel la SNCF a donné une autorisation à CDF et GDF à cet usage, avec tout l’appareillage destiné à la production et au transport de la chaleur, du froid et de l’électricité ; / – les ouvrages et les équipements nécessaires au stockage et à la manutention du combustible ; / – les ouvrages et équipements nécessaires au stockage et à la manutention du combustible ; / – les branchements et postes de livraison tels que définis à l’article 26 ; / – l’ensemble des biens (meubles et immeubles) et installations indispensables à l’exploitation et au fonctionnement de la concession qui existaient à la date de mise en vigueur de la convention ou seraient acquis ou établis ultérieurement, notamment les extensions et renforcements réalisés en cours de concession à l’intérieur ou au-delà du périmètre concédé ». Enfin, aux termes de l’article 50 du même cahier des charges : « À l’expiration de la concession ou en cas de rachat, le concessionnaire sera tenu de remettre au concédant, en état normal d’entretien, tous les biens et équipements qui font partie intégrante de la concession, tels qu’ils figurent à l’inventaire défini à l’article ci-dessus et quelle que soit leur affectation. Cette remise est faite sans indemnité à l’exclusion des dispositions prévues à l’alinéa ci-dessous ». La cour administrative d’appel a relevé, dans l’arrêt attaqué, qu’il résultait des stipulations précitées de l’article 1er du cahier des charges de la concession que l’installation de production d’électricité par cogénération relevait, à titre accessoire, du périmètre de la concession et formait un complément normal de l’activité concédée de
Contrats Publics – n° 165 - mai 2016
Veille
production et de distribution de chaleur et de froid et que, si elle présentait une utilité pour le service, en tant qu’elle contribuait à l’alimentation en électricité de la centrale et générait des ressources complémentaires tirées de la vente à un tiers de l’électricité produite, elle ne pouvait, pour autant, être regardée comme un bien nécessaire au fonctionnement du service public. Ce faisant, et alors, au surplus, que ni la convention, ni son cahier des charges n’imposait au concessionnaire d’obligation relative à la production d’électricité, notamment en termes de quantité et de mode de production, et ne prévoyait de contrôle du concessionnaire sur l’activité du concédant dans ce domaine, la cour, qui a souverainement apprécié les faits qui lui étaient soumis sans les dénaturer, n’a commis ni erreur de droit, ni erreur de qualification juridique des faits et n’a pas entaché son arrêt de contradiction de motifs. C’est à titre surabondant que la cour a relevé qu’il pouvait être recouru, en l’absence d’installation de cogénération, à un approvisionnement extérieur en électricité, comme cela avait été le cas entre 1994 et 2002, et que la part d’électricité par cogénération n’avait représenté, au cours de l’exploitation, qu’une part limitée dans les divers services offerts par le concessionnaire. Par suite, les moyens dirigés contre ces motifs sont inopérants. En deuxième lieu, en application de l’article 8 du cahier des charges de la concession, l’installation de production de chaleur devait justifier d’une puissance de 279 MW. Il n’est pas contesté que l’explosion accidentelle du 30 mars 1994 a détruit une partie des installations utilisées pour la production de chaleur, qui n’ont été que partiellement reconstruites. En application des principes énoncés ci-dessus, la circonstance que des progrès en économie d’énergie ne rendaient plus nécessaires au fonctionnement du service concédé les chaufferies permettant la production de chaleur d’une puissance totale de 279 MW est sans incidence sur la qualification des biens qui ont, à un moment donné de l’exécution de la concession, été nécessaires à la production d’une telle puissance. Par suite, en se fondant sur une telle circonstance pour en déduire que seule une chaudière supplémentaire, dont la puissance demeurait nécessaire à la poursuite du service concédé, devait faire retour au concédant, la CAA a entaché son arrêt d’erreur de droit. Saisie d’une demande tendant à l’indemnisation de la valeur de biens de retour, il lui appartenait de rechercher si, alors que des installations revêtant le caractère de biens de retour avaient été détruites, la collectivité concédante avait entendu, au titre de ses prérogatives et pouvoirs dans l’exécution de la concession, renoncer à la reconstitution de ces biens et accepter une diminution de la puissance thermique prévue à l’origine. En troisième et dernier lieu, qu’il ressort des pièces du dossier que la société CLIMADEF a acquis, au cours de la concession, le terrain situé rue d’Alençon à Nanterre. Le terrain en cause, qui a été acquis aux fins d’exécution de la concession, constitue le terrain d’assiette de la centrale de production de chaleur et de froid, ouvrage de la concession. Dans ces conditions, la CAA en jugeant que le terrain en cause ne constituait pas un bien nécessaire au fonctionnement du service public en cause et en rejetant, pour ce motif, la demande indemnitaire du SICUDEF présentée au titre de la moins-value sur ce terrain, a commis une erreur de qualification juridique.
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Veille
Jurisprudence nationale
Sur le paiement du solde du compte de provision pour travaux : Aux termes de l’article 45 du cahier des charges de la concession : « Outre la tenue du compte de résultat, du bilan et de ses annexes, le concessionnaire établit extracomptablement un compte conventionnel appelé « fonds de travaux d’extension, de renouvellement, et de gros entretien » (...). En fin d’exercice, le compte est crédité : 1) d’un montant égal aux droits de raccordements encaissés par le concessionnaire au cours de l’exercice / 2) d’un montant annuel égal au onzième de 45 790 609,10 francs représentant le solde au 1er octobre 1991 du montant des droits de raccordement affectés antérieurement au 1er septembre 1982 à l’apurement des déficits des comptes d’exploitation de la concession (...) / 3) à compter du 1er octobre 1992, du produit du solde des engagements figurant à l’alinéa 2) ci-dessus (...) par un taux égal au taux accordé par la Caisse des dépôts aux collectivités territoriales pour les emprunts d’une durée de dix ans / En fin d’exercice, le compte est débité d’un montant égal aux travaux d’extension et de renouvellement portés en immobilisation au cours de l’exercice et aux travaux de gros entretien réalisés dans l’exercice. / Si, en début d’exercice le solde prévisionnel du compte conventionnel, après déduction éventuelle d’imputations antérieures, s’avérait insuffisant pour absorber l’imputation prévue au titre de l’exercice considéré, le concessionnaire devrait obtenir du concédant un accord sur les dispositions envisagées pour faire face aux travaux dont le montant sera imputé au compte conventionnel ; Au terme de la concession, si le compte conventionnel fait apparaître un solde créditeur, le concessionnaire verse au concédant une somme égale au montant ainsi déterminé ». Après avoir relevé, au terme d’une appréciation souveraine, que le solde de ce compte était déficitaire en fin d’exercice, la CAA de Paris a pu juger, sans dénaturer les stipulations précitées, que le SICUDEF ne pouvait, par suite, prétendre au versement d’une somme représentant le solde de ce compte et rejeter, par voie de conséquence, l’appel incident du SICUDEF.Il résulte de tout ce qui précède que l’arrêt de la CAA doit être annulé seulement en tant qu’il statue sur l’indemnité à verser au SICUDEF au titre de l’installation d’une chaufferie complémentaire et sur la moins-value du terrain situé rue d’Alençon à Nanterre. Contentieux – Référé-provision – Action en réparation du préjudice subi par le pouvoir adjudicateur en raison d’une entente illicite entre les candidats lors de la passation d’un marché ¢¢ CE 24 février 2016, Département de l’Eure, req. n° 395194
uuUn département a conclu les 14 février 2001 et 24 août 2004 deux marchés à bons de commande en vue de la fourniture de matériels de signalisation verticale avec la société Signature SA et un groupement composé des sociétés Signature SA et La Signalisation Routière. Pour demander la condamnation des sociétés Signalisation France et Signature Industrie, venues aux droits des sociétés cocontractantes, au paiement d’une provision, le département a fait valoir que l’Autorité de la concurrence a, par une décision n° 10 D-39 du 22 décembre 2010, établi que la société Signature SA avait enfreint, entre 1997 et 2006, les dispositions
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de l’article L. 420-1 du Code de commerce prohibant les actions concertées entre entreprises tendant à limiter l’accès au marché ou le libre exercice de la concurrence par d’autres entreprises ou tendant à faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu du marché en favorisant artificiellement leur hausse ou leur baisse, et l’a condamnée à une sanction de 18,48 millions d’euros ramenée à 10 millions d’euros par la cour d’appel de Paris. L’expert désigné par le juge des référés du TA de Rouen a évalué à 900 453,68 euros le surcoût entre les prix payés par le département dans le cadre de l’exécution des deux marchés et les prix qui auraient dû être payés s’ils avaient été déterminés par le libre jeu de la concurrence. Le juge du référé provision de la cour administrative d’appel a rejeté comme irrecevable cette demande.
Une collectivité publique est irrecevable à demander au juge administratif de prononcer une mesure qu’elle a le pouvoir de prendre. En particulier, les collectivités territoriales, qui peuvent émettre des titres exécutoires à l’encontre de leurs débiteurs, ne peuvent saisir directement le juge administratif d’une demande tendant au recouvrement de leur créance. Mais, lorsque la créance trouve son origine dans un contrat, la faculté d’émettre un titre exécutoire dont dispose une personne publique ne fait pas obstacle à ce que celle-ci saisisse le juge d’administratif d’une demande tendant à son recouvrement, notamment dans le cadre d’un référé-provision engagé sur le fondement de l’article R. 541-1 du Code de justice administrative. Pour juger irrecevable la demande de provision présentée par le département, le juge des référés de la CAA a estimé que l’action introduite par celui-ci n’était pas fondée sur la responsabilité contractuelle des sociétés mais sur leur responsabilité quasi-délictuelle tenant aux manœuvres dolosives relevées à leur encontre et sanctionnées par l’Autorité de la concurrence. Toutefois, l’action tendant à l’engagement de la responsabilité quasi-délictuelle de sociétés en raison d’agissements dolosifs susceptibles d’avoir conduit une personne publique à contracter avec elles à des conditions de prix désavantageuses, qui tend à la réparation d’un préjudice né des stipulations du contrat lui-même et résultant de la différence éventuelle entre les termes du marché effectivement conclu et ceux auxquels il aurait dû l’être dans des conditions normales, doit être regardée, pour l’application des principes énoncés ci-dessus, comme trouvant son origine dans le contrat. Par suite, le juge des référés a commis une erreur de droit en jugeant irrecevable la demande de provision du département au motif que la créance en cause était fondée sur la responsabilité quasi-délictuelle des sociétés. Marché – Passation – Référé contractuel – Manquement susceptible de léser un candidat – Absence en cas d’irrégularité de l’offre – Défaut de signature de l’acte d’engagement ¢¢ CE 24 février 2016, Syndicat mixte pour l’étude et le traitement des ordures ménagères de l’Eure, req. n° 394945
uuUn syndicat mixte pour l’étude et le traitement des ordures ménagères a lancé une procédure d’appel d’offres ouvert en vue de la passation d’un marché ayant pour objet le transport, le traitement, la valorisation et la commercialisation de mâchefers produits par une unité de valorisation énergétique. Après décision
Contrats Publics – n° 165 - mai 2016
Dossier
Le décret n° 2016-360 relatif aux marchés publics (1re partie)
La définition préalable des besoins : une étape clé conditionnant l’efficacité du processus d’achat L’un des titres du décret du 25 mars 2016 est consacré à la préparation du marché. Ces dispositions mettent en place de nouveaux outils d’analyse des besoins au service des acheteurs. Ces derniers se voient en outre conférer de véritables instruments leur permettant de mieux prendre en compte des objectifs de développement durable dans les marchés publics.
B
ien que cela soit désormais acquis pour de nombreux acheteurs, il est toujours nécessaire de le rappeler : la définition des besoins, étape essentielle lors de la phase de préparation des marchés publics, est « la clef d’un achat réussi »(1). En effet, outre qu’elle garantit la bonne réussite de la procédure de passation d’un marché public, elle conditionne également l’exécution des marchés publics dont les clauses ne peuvent être modifiées que dans des conditions strictement encadrées par la règlementation. Transposant les directives européennes dont l’esprit était notamment de renforcer l’efficience de l’achat public(2), les textes portant réforme du droit interne des marchés publics, confirment et renforcent ainsi la nécessité, pour les acheteurs, de bien définir leurs besoins lors de la préparation de leurs marchés publics.
Nathalie Ricci Avocat à la Cour
Références
L’article 30 de l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics réaffirme, en ce sens, l’obligation, pour l’ensemble des acheteurs, de déterminer avec précision et avant le lancement de toute consultation « la nature et l’étendue des besoins à satisfaire (…) en prenant en compte des objectifs de développement durable dans leurs dimensions économique, sociale et environnementale ». La prise en compte d’exigences en matière de développement durable, non seulement dans les procédures de passation des marchés publics (dans les critères de sélection des candidatures et d’examen des offres) mais également dans les clauses des marchés publics (dans les spécifications techniques et les conditions d’exécution des marchés) est donc désormais la règle pour tous. Par ailleurs, l’article 31 de l’ordonnance du 23 juillet 2015 confirme la nécessité, pour les acheteurs, de définir les
Décret n° 2016-360 du 25 mars 2016, art. 4 et s.
Mots clés Concurrence • Échanges préalables • Label • Spécifications techniques
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(1) Circulaire du 14 février 2012 (NOR : EFIM1201512C), relative au Guide de bonnes pratiques en matière de marchés publics. (2) Directives 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 et directive 2014/25/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014.
Contrats Publics – n° 165 - mai 2016
Le décret n° 2016-360 relatif aux marchés publics (1re partie)
caractéristiques des prestations qu’ils souhaitent « par référence à des spécifications techniques ». Faisant application de ces dispositions, le décret n° 2016360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics consacre un titre spécifique à la « préparation du marché public », lequel, d’une part, institue de nouveaux outils d’analyse des besoins au service des acheteurs et, d’autre part, confère à ces derniers de véritables outils leur permettant de mieux prendre en compte des objectifs de développement durable dans leurs marchés.
De nouveaux outils d’analyse des besoins au service des acheteurs Reprenant un dispositif novateur des directives européennes(3), le décret du 25 mars 2016 offre désormais aux acheteurs la possibilité de réaliser des études et échanges préalables avec les opérateurs économiques. Symétriquement, le décret du 25 mars 2016 responsabilise toutefois grandement les acheteurs dans la préparation de leurs marchés.
Les études et échanges préalables avec les opérateurs économiques Auparavant admis dans la pratique par de nombreux acheteurs et récemment confortés par la jurisprudence administrative(4), les études et échanges préalables avec les opérateurs économiques – plus connus sous l’appellation « sourçage », qui avait été retenue dans le projet de décret mis à la concertation publique par la Direction des affaires juridiques du ministère de l’Économie, de l’Industrie et du Numérique, au mois de novembre 2015 – sont désormais consacrés à l’article 4 du décret du 25 mars 2016. Il résulte, en effet, des dispositions de cet article qu’afin de préparer la passation de leurs marchés publics, les acheteurs peuvent, depuis le 1er avril dernier, « effectuer des consultations ou réaliser des études de marché, solliciter des avis ou informer les opérateurs économiques de (leurs) projet(s) et de (leurs) exigences ». De telles pratiques, empruntées au secteur des achats privés, doit ainsi permettre aux acheteurs d’acquérir une bonne connaissance de l’état du marché, en amont du lancement de leurs consultations, afin d’adapter le contenu de leurs cahiers des charges à l’offre présente sur le marché. Déjà préconisés, en 2014, en matière d’achat innovant par le Guide pratique de l’achat public innovant(5), ces dispositifs doivent également permettre,
(3) Article 40 relatif aux « Consultations préalables du marché » de la directive 2014/24/UE précitée et article 58 relatif aux « Consultations préalables du marché » de la directive 2014/25/UE précitée.
Dossier
selon le directeur des affaires juridiques du ministère de l’Économie « de mieux mettre en relation les besoins des acheteurs en matière d’innovation et les solutions proposées par les “start-ups” et les entreprises innovantes »(6). Pour que les résultats des études et échanges préalables réalisés avec les opérateurs économiques puissent être exploités par les acheteurs, il convient toutefois de s’assurer que ces résultats « n’aient pas pour effet de fausser la concurrence » et, d’autre part, qu’ils « n’entraînent pas une violation des principes de liberté d’accès à la commande publique, d’égalité de traitement entre les candidats et de transparence des procédures ». Ainsi, plusieurs précautions s’imposent dans le cadre de la mise en œuvre des études et échanges préalables avec les opérateurs économiques. D’une part, ces échanges doivent intervenir en amont de la passation des marchés publics, dans le cadre de leur préparation, et doivent faire l’objet de documents écrits. D’autre part, ils doivent être menés avec plusieurs opérateurs économiques, sans discrimination géographique ou commerciale, afin de ne pas aboutir à la rédaction de cahier des charges orientés techniquement ou financièrement, voire à la présélection d’opérateurs déterminés. Enfin, l’ensemble des informations transmises aux opérateurs contactés doit être communiqué aux autres opérateurs susceptibles de candidater. De ce point de vue, bien que le décret du 25 mars 2016 ait offert aux acheteurs la possibilité d’optimiser la définition de leurs besoins à travers la réalisation d’études et d’échanges préalables avec les opérateurs économiques, il les a symétriquement responsabilisés dans la préparation de leurs marchés.
Des acheteurs responsabilisés dans la préparation de leurs marchés Comme pour compenser la souplesse offerte aux acheteurs par l’article 4 du décret du 25 mars 2016 précité, les dispositions de l’article 5 de ce même décret instituent une nouvelle obligation à la charge des acheteurs pour éviter que la concurrence ne soit faussée du fait de la participation d’opérateurs économiques dans la préparation de leurs marchés. L’article 5 du décret du 25 mars 2016 prévoit en ce sens que « l’acheteur prend les mesures appropriées pour que la concurrence ne soit pas faussée par la participation à la procédure de passation du marché public d’un opérateur économique qui aurait eu accès, du fait de sa participation préalable directe ou indirecte à la préparation de cette procédure, à des informations ignorées des autres candidats ou soumissionnaires ». Et, l’alinéa suivant de ce même article ajoute que ce n’est que s’il ne peut être remédié à une situation de distorsion de concurrence entre plusieurs opérateurs économiques
(4) CE 14 novembre 2014, SMARG, req. n° 373156. (5) Guide pratique de l’achat public innovant, Conjuguer au présent l’innovation avec les politiques d’achat public, janvier 2014, ministère de l’Économie et des Finances.
Contrats Publics – n° 165 - mai 2016
(6) La commande publique : une réforme au service de l’économie, dossier de présentation, avril 2016, site du ministère de l’Économie, de l’Industrie et du Numérique.
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Le décret n° 2016-360 relatif aux marchés publics (1re partie)
Dossier
La publicité préalable dans le nouveau décret « marchés publics » Les articles 31 à 37 du décret du 25 mars 2016 organisent les nouvelles modalités de la publicité préalable à la passation des marchés publics. Quels sont les changements intervenus par rapport au Code des marchés publics et à l’ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 ?
L’
Marie-Hélène Pachen-Lefèvre Avocat associé Astrid Layrisse Avocat à la Cour – SCP Seban et Associés
Références
article 41 de l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics dispose que les acheteurs procèdent à une publicité « selon l’objet du marché public, la valeur estimée hors taxe du besoin ou l’acheteur concerné », et « dans les conditions et sous réserve des exceptions définies par voie réglementaire ». C’est l’objet des articles 31 à 37 du décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics (ci-après le « Décret »), qui forment, au sein des dispositions prises en application de cette ordonnance, un chapitre réservé à la publicité préalable à la passation des marchés publics. Désormais, l’ensemble des dispositions relatives à la publicité, qui concernent tant les pouvoirs adjudicateurs que les entités adjudicatrices, est rassemblé dans ce même chapitre, lequel est composé de trois sections, relatives respectivement aux avis d’appel à concurrence – avis de préinformation, avis périodique indicatif et avis de marché –, aux modalités de publication de ceux-ci, et à l’invitation adressée aux opérateurs économiques à confirmer leur intérêt pour une procédure en cours. Si le remaniement des dispositions relatives à la publicité préalable est formellement visible, le décret n° 2016-360 ne modifie pas en profondeur les obligations de publicité qui s’imposent aux acheteurs. On notera, toutefois, quelques points de simplification et d’assouplissement par rapport aux dispositions du Code des marchés publics, de l’ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005, et des décrets d’application de celle-ci, désormais abrogés(1). Ainsi, les cas d’ouverture des avis simplement informatifs, que sont l’avis de préinformation et l’avis périodique indicatif sont désormais plus nombreux. En outre, certaines modalités de publicité des avis de marché – passés tant en procédure adaptée qu’en procédure formalisée – ont été retouchées.
Décret n° 2016-360 du 25 mars 2016, art. 31 et s.
Mots clés Avis de marché • Avis de préinformation • Avis périodique indicatif • Publicité • Seuils
Contrats Publics – n° 165 - mai 2016
(1) Les obligations de publicité préalables figuraient aux articles 39 à 40-1 du Code des marchés publics et aux articles 15 à 16-1 du décret n° 2005-1742 du 30 décembre 2005 s’agissant des pouvoirs adjudicateurs, ainsi qu’aux articles 149 à 151-1 de ce même Code et aux articles 15 à 17 du décret n° 2005-1308 du 20 octobre 2005 s’agissant des entités adjudicatrices.
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Dossier
Le décret n° 2016-360 relatif aux marchés publics (1re partie)
Un élargissement des cas d’ouverture de l’avis de préinformation et de l’avis périodique indicatif Les articles 31 et 32 du Décret confirment la possibilité, pour les acheteurs, de faire connaître leur intention de passer un marché public en publiant, pour les pouvoirs adjudicateurs, un avis de préinformation et, pour les entités adjudicatrices, un avis périodique indicatif, permettant aux opérateurs économiques d’anticiper les besoins à venir de ces acheteurs. Les règles de publicité des avis de préinformation et des avis périodiques indicatifs sont, davantage encore qu’auparavant, soumises quasiment au même régime. Si les modalités de recours à ces avis sont globalement inchangées, les quelques modifications qui sont intervenues pourraient accroître l’intérêt des acheteurs pour cette procédure d’information préalable de leurs futurs achats.
Les modalités du recours à un avis de préinformation ou à un avis périodique indicatif Tout d’abord, le Décret a supprimé la précision selon laquelle les avis de préinformation et périodiques indicatifs pouvaient être publiés, pour des marchés publics de fournitures et de services, à partir du seuil de 750 000 euros HT, et pour des marchés publics de travaux, à partir du seuil de 5 225 000 euros HT(2). Désormais, un acheteur peut publier l’un de ces avis pour la passation de tout marché public sans condition de montant minimum, de sorte que le Décret a élargi de manière importante les possibilités de recourir à ces avis. Comme auparavant, le contenu des avis doit être conforme aux modèles fixés par un règlement de la Commission européenne, à savoir, le récent règlement d’exécution du 11 novembre 2015 auquel sont annexés les formulaires standard de l’avis de préinformation (Annexe I), et de l’avis périodique informatif (Annexe IV)(3). S’agissant encore du contenu de ces avis, les nouvelles dispositions ne prévoient plus que les avis relatifs aux marchés de fournitures ou de services indiquent le montant total estimé des marchés ou des accords-cadres pour chacune des catégories de produits ou de services homogènes que l’acheteur envisage de passer au cours des douze mois suivant la publication de ces avis. Elles n’imposent plus, également, que ces avis préalables, lorsqu’ils ont trait à des marchés de travaux, mentionnent les caractéristiques essentielles des marchés ou des accords-cadres(4).
(2) Articles 39 et 149 du Code des marchés publics abrogé ; décret n° 2005-1742, art. 15 ; décret n° 2005-1308, art. 15. (3) Règlement d’exécution (UE) 2015/1986 de la Commission du 11 novembre 2015 établissant les formulaires standard pour la publication d’avis dans le cadre de la passation de marchés publics, et abrogeant le règlement d’exécution (UE) n° 842/2011. (4) Articles 39 III et IV, et 149 III et IV du Code des marchés publics abrogé.
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Cette relative souplesse devrait faciliter le recours à de tels avis en amont de la publication d’un avis de marché. Les supports de publicité offerts aux acheteurs n’évoluent pas. L’avis est, soit adressé à l’Office des publications officielles de l’Union européenne pour publication, soit publié sur le profil d’acheteur du pouvoir adjudicateur ou de l’entité adjudicatrice, l’acheteur devant, dans ce cas, envoyer à l’office précité un avis annonçant cette publication. À cet égard, le profil d’acheteur est défini par l’article 31 du Décret comme la plateforme de dématérialisation permettant notamment aux acheteurs de mettre les documents de la consultation à disposition des opérateurs par voie électronique, et de réceptionner de la même manière les documents émanant de ces derniers.
L’intérêt renforcé de publier un avis de préinformation ou un avis périodique informatif À titre liminaire, il faut rappeler que la publication d’un avis de préinformation ou d’un avis périodique informatif est toujours facultative pour l’acheteur, quels que soient les montants des besoins à satisfaire ou la procédure choisie. Cette affirmation a été clarifiée par la suppression du terme « obligatoire » dans le Décret(5). L’intérêt de publier un avis de préinformation ou un avis périodique indicatif, outre la volonté d’informer les opérateurs intéressés en amont du lancement du processus d’achat, est soit de réduire les délais de la procédure de passation du marché ultérieur, soit d’être exonéré de l’obligation de publier un second avis. D’une part, si l’avis de préinformation ou l’avis périodique informatif n’est pas utilisé comme avis d’appel à la concurrence, il peut permettre de réduire le délai minimal de remise des candidatures et/ou des offres, qui s’applique en principe. Le Décret ayant réduit ce délai, le mécanisme de réduction des délais par la publication d’un de ces avis a également été modifié. Ainsi, dans un appel d’offres ouvert, la publication d’un de ces avis ramène le délai de réception des candidatures et des offres de trente-cinq à quinze jours, à condition que l’avis de préinformation ou l’avis périodique indicatif ait été envoyé pour publication entre trente-cinq jours et douze mois avant la date d’envoi de l’avis de marché, et qu’il contienne les mêmes renseignements que ceux de l’avis de marché(6). Les pouvoirs adjudicateurs peuvent, de plus, dans un appel d’offres restreint comme dans une procédure concurrentielle avec négociation, ramener le délai minimal de réception des offres de trente jours à dix jours en publiant
(5) L’avis était obligatoire uniquement lorsque le pouvoir adjudicateur souhaitait réduire certains délais (articles 39 II et 149 II du Code des marchés publics abrogé), et non dès que le montant du marché dépassait les seuils précités (voir, au contraire, une jurisprudence antérieure au Code des marchés publics de 2006 : CE 19 novembre 2003, Ville de Nîmes, req. n° 257100). (6) Décret n° 2016-360 du 25 mars 2016, art. 67 ; articles 57 II et 160 II du Code des marchés publics abrogé ; article 29 du décret n° 2005-1742 précité et article 37 du décret n° 2005-1308 précité, lesquels permettaient de ramener ce délai de 52 à 22 jours.
Contrats Publics – n° 165 - mai 2016
Le décret n° 2016-360 relatif aux marchés publics (1re partie)
Dossier
Le choix de l’offre Le régime du choix des offres a été partiellement modifié par l’ordonnance du 23 juillet 2015 et le décret du 25 mars 2016. Les principales nouveautés concernent les critères d’attribution, les offres anormalement basses ainsi que celles qualifiées d’irrégulières, d’inacceptables ou d’inappropriées.
L
e régime propre au choix de l’offre fait l’objet d’enrichissements substantiels de la part des textes français de transposition des nouvelles directives marchés. Les articles 52 à 54 de l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics fixent les grands principes, tandis que les articles 57 à 64 du décret n° 2016360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics aborde successivement la présentation des offres, les variantes, l’examen des offres, les offres anormalement basses, les offres contenant des produits originaires des pays tiers pour les marchés publics de fournitures des entités adjudicatrices et l’attribution du marché public. Cette transposition en deux textes autorise le décret d’application à apporter des précisions souhaitables, qui n’auraient peut-être pas eu toute leur place dans un texte unique. Au-delà d’apporter des précisions, la transposition est aussi l’occasion de procéder à certaines réformes (offres anormalement basses) ou au contraire de ne pas accéder à certaines attentes des opérateurs (régularisation des offres).
Sophie Nicinski Professeur à l’École de droit de la Sorbonne, Université Paris I
Références Décret n° 2016-360 du 25 mars 2016, art. 57 et s.
Le régime des variantes est précisé(1). Celles-ci sont interdites sauf mention contraire pour les marchés passés par un pouvoir adjudicateur selon une procédure formalisée. Pour les marchés publics passés selon une procédure adaptée ou ceux passés par une entité adjudicatrice, les variantes sont autorisées sauf mention contraire dans les documents de la consultation. Le procédé de la mise au point fait l’objet d’un article unique commun aux différentes procédures(2). Il est possible, en accord avec le soumissionnaire retenu, de procéder à une mise au point des composantes du marché public avant sa signature. Cependant, cette mise au point ne peut avoir pour effet de modifier des caractéristiques substantielles de l’offre ou du marché public dont la variation est susceptible de fausser la concurrence ou d’avoir un effet discriminatoire.
Mots clés Critères d’attribution • Offre anormalement basse • offre irrégulière • Pondération • Régularisation
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(1) Décret n° 2016-360, 25 mars 2016, art. 58. (2) Décret n° 2016-360, 25 mars 2016, art. 64.
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Dossier
Le décret n° 2016-360 relatif aux marchés publics (1re partie)
Les principales nouveautés à retenir relèvent des critères d’attribution, du régime des offres anormalement basses et des offres irrégulières, inacceptables ou inappropriées.
Les critères d’attribution Les nouveaux textes précisent les caractéristiques des critères et leur nature.
Les caractéristiques des critères d’attribution Le régime des critères d’attribution est désormais scindé entre l’article 52 de l’ordonnance et les articles 62 et 63 du décret. Les dispositions de l’ordonnance fixent les grands principes applicables au choix de l’offre. On retrouve l’exigence antérieure que le marché est attribué au soumissionnaire qui a présenté l’offre économiquement la plus avantageuse. Le choix de l’offre la mieux-disante est désormais bien ancré dans le paysage de la commande publique. Ce sont surtout les caractéristiques générales des critères d’attribution qui sont largement précisées. En effet, l’article 53 du Code des marchés publics se contentait de prévoir que les critères (autres que le prix) devaient être non discriminatoires et liés à l’objet du marché. Désormais, l’article 52-I de l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 précise que les critères doivent être « objectifs, précis et liés à l’objet du marché public ou à ses conditions d’exécution », ce lien s’appréciant conformément à l’article 38 de l’ordonnance. Aux termes de l’article 52-II, les critères ne doivent pas avoir pour effet de conférer une liberté de choix illimitée à l’acheteur et garantissent la possibilité d’une véritable concurrence. Cet enrichissement manifeste la prise en compte de l’évolution de la jurisprudence et des textes européens. La jurisprudence avait largement enrichi ces caractéristiques. Ainsi que le résume la Cour de justice de l’Union européenne, « les critères d’attribution définis par un pouvoir adjudicateur doivent être liés à l’objet du marché, ne doivent pas conférer une liberté de choix illimitée au pouvoir adjudicateur, doivent être expressément mentionnés dans le cahier des charges ou dans l’avis de marché et doivent respecter, notamment, les principes fondamentaux d’égalité de traitement, de non- discrimination et de transparence »(3). Le lien avec les conditions d’exécution, aujourd’hui pleinement affirmé, tient sans doute aux évolutions dans la prise en compte des critères sociaux et environnementaux. En effet, l’admission de ces critères posait une difficulté de taille lorsqu’il fallait apprécier leur lien avec l’objet même du marché. Cette difficulté a été contournée en passant par les conditions d’exécution du marché. La Cour de justice avait jugé que des éco-label et des labels de commerce équitable peuvent constituer des conditions d’exécution du marché et sont utilisables
(3) CJCE 17 septembre 2002, Concordia Bus Finland, aff. C-513/99 ; CJCE 24 novembre 2005, ATI EAC Sarl, aff. C-331/04.
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comme critères d’attribution d’un marché(4). Le Conseil d’État s’était engagé plus loin en admettant, pour un marché susceptible d’être exécuté par des personnels engagés dans une démarche d’insertion, que le critère de l’insertion professionnelle des publics en difficulté comporte un lien avec l’objet du marché s’il porte sur ses modalités d’exécution et peut donc être utilisé parmi les critères de choix des offres(5). La directive 2014/24/UE(6) a tenu compte de la jurisprudence de la Cour sur le lien avec l’objet du marché lorsqu’il est précisé que les critères d’attribution sont réputés être liés à l’objet du marché public lorsqu’ils se rapportent aux travaux, fournitures ou services à fournir en vertu du marché à quelque égard que ce soit et à n’importe quel stade de leur cycle de vie. Ainsi, les termes de l’article 52 de l’ordonnance reprennent les textes antérieurs et la jurisprudence.
La nature des critères d’attribution L’article 62-II du décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 conserve les choix entre le critère unique du prix ou du coût et l’attribution du marché sur une pluralité de critères. Si l’acheteur se fonde sur le critère unique du prix, l’article 53 de l’ancien Code des marchés public exigeait que ce choix soit fondé sur l’objet du marché. Le choix du prix comme critère unique ne devait pouvoir être privilégié principalement que pour les prestations courantes, pour des produits simples et standardisés pour lesquels les offres peuvent être appréciées de manière objective sur la base du seul prix proposé(7). Le droit communautaire interdisait par ailleurs les législations nationales imposant de manière générale le choix de l’unique critère du prix(8) et il était en tout état de cause illégal pour les prestations complexes ou techniques(9). Le décret vient renforcer ces restrictions, puisque l’acheteur ne peut retenir l’unique critère du prix que si le marché a pour seul objet l’achat de services ou de fournitures standardisés dont la qualité est insusceptible de variation d’un opérateur économique à l’autre(10). Désormais, le coût peut aussi être utilisé comme unique critère. L’article 67 de la directive 2014/24/UE semble en effet autoriser une telle approche, bien que le choix des critères apparaisse de manière beaucoup moins tranchée (l’acheteur peut retenir le prix ou le coût « et peut tenir compte » d’autres critères). Le coût est déterminé selon
(4) CJUE 10 mai 2012, Commission c/Pays-Bas, aff. C-368/10. (5) CE 25 mars 2013, Département de l’Isère, req. n° 364950, BJCP n° 89, juillet-août 2013, p. 269, concl. Pellissier, obs. S.N. (6) Directive 2014/24/UE du 26 février 2014, art. 67. (7) Rép. min. n° 14228, JO Sénat Q, 13 janv. 2005, p. 103. (8) CJCE 7 octobre 2004, Sintesi SpA, aff. C-247/02. (9) CE 6 avril 2007, Département de l’Isère, req. n° 298584, BJDCP 2007, n° 53, p. 293, concl. Boulouis, CMP 2007, n° 171, note J.-P. Piétri, CP-ACCP n° 66, mai 2007, p. 65, note M. Heintz. (10) Décret n° 2016-360, 25 mars 2016, art. 62-II-1°-a.
Contrats Publics – n° 165 - mai 2016
Viedes contrats
Contentieux
Utiles précisions sur le recours Tarn-et-Garonne Les modalités du recours en contestation de validité du contrat, telles que définies par la jurisprudence Tropic, survivent pour les actions intentées par les concurrents évincés contre les contrats conclus avant le 4 avril 2014. Quant aux moyens invocables par les concurrents évincés dans le cadre d’un recours Tarn-et-Garonne, ils sont réduits à ceux relatifs aux manquements aux règles applicables à la passation du contrat et qui sont « en rapport direct » avec l’éviction.
P
Romain Lauret Avocat associé François Fourmeaux Avocat – SELARL Symchowicz-Weissberg et Associés
Références CE 5 février 2016, req. n° 383149
ar une décision du 5 février 2016, rendue en Section, le Conseil d’État apporte d’utiles précisions sur la mise en œuvre du recours Tarn-et-Garonne (1) par les concurrents évincés. Dans cette affaire, portant sur un contrat signé avant le 4 avril 2014, un concurrent évincé sollicitait, notamment, l’annulation d’un marché à bons de commande, portant sur des services de transports scolaires et réguliers de voyageurs, conclu par le Syndicat mixte des transports en commun Hérault Transport (SMTC Hérault Transport). Saisi d’un recours en cassation dirigé contre la décision de la cour administrative d’appel de Marseille ayant prononcé la résiliation du marché, le Conseil d’État en profite pour trancher, en formation solennelle, deux questions intéressant spécifiquement le recours en contestation de validité « nouvelle génération » introduit par les concurrents évincés et laisser ouvertes par la décision Département de Tarn-et-Garonne. Les conditions d’application dans le temps de cette décision, d’une part, point sur lequel le Conseil d’État juge que, même pour les concurrents évincés, seuls les contrats signés après le 4 avril 2014 doivent être traités dans les conditions renouvelées par la jurisprudence Département de Tarn-et-Garonne. Les moyens opérants, d’autre part, que le Conseil d’État définit comme ceux portant sur des manquements aux règles applicables à la passation du contrat et « qui sont en rapport direct avec [l’]éviction ».
Un champ d’application limité aux contrats signés après le 4 avril 2014 En premier lieu, le Conseil d’État résout, par la négative, le point de savoir si les modalités d’exercice et d’examen du recours en contestation de validité du contrat, telles que définies par la décision Tarn-et-Garonne, doivent
Mots clés Moyens invocables • Recours • Signature du contrat • Tiers • Validité du contrat
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(1) CE Ass. 4 avril 2014, Département de Tarn-et-Garonne, req. n° 358994, Rec. CE p. 70.
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Contentieux
s’appliquer aux recours Tropic(2) introduits à l’encontre de contrats signés avant le 4 avril 2014.
Une solution faussement évidente La formulation retenue dans la décision commentée pour trancher la question peut surprendre. Alors que le Conseil d’État juge, dans la décision Tarn-et-Garonne, que le recours qu’elle institue « ne pourra être exercé par les tiers qui n’en bénéficiaient pas et selon les modalités précitées qu’à l’encontre des contrats signés à compter de la lecture de la présente décision », il estime, cette fois, que « la décision [Tarn-et-Garonne] a jugé que le recours défini ci-dessus ne trouve à s’appliquer, selon les modalités précitées et quelle que soit la qualité dont se prévaut le tiers, qu’à l’encontre des contrats signés à compter de la lecture de cette même décision ». Cette seconde rédaction présente donc, comme une sorte d’évidence, une solution qui procède, sinon d’une réécriture, à tout le moins d’une interprétation de la décision du 4 avril 2014 qui ne s’imposait pas d’elle-même (du reste, la diversité des solutions jusqu’alors retenues par les juges du fond sur cette question ne faisait que l’attester(3)). De fait, le rapporteur public Olivier Henrard(4) concède que, en raison notamment d’une incise assez ambigüe (« les tiers qui n’en bénéficiaient pas »), « la seule exégèse » de la décision Tarn-et-Garonne ne permettait pas de résoudre la difficulté ; et que ce sont « d’impérieux motifs de fond » qui justifieront finalement la solution apportée dans la décision SMTC Hérault Transport. En réalité, les motifs de l’application différée du recours Tarn-et-Garonne aux concurrents évincés sont les exacts opposés de ceux pour lesquels le Conseil d’État avait (pour le coup de manière certaine), s’agissant des recours introduits par les autres catégories de tiers, précisé que « les règles [du recours Tarn-et-Garonne] prises dans leur ensemble, n’apportent pas de limitation au droit fondamental qu’est le droit au recours », mais que « l’impératif de sécurité juridique tenant à ce qu’il ne soit pas porté une atteinte excessive aux relations contractuelles en cours » justifiait que le recours ne puisse être introduit que pour les contrats conclus postérieurement au 4 avril 2014. À l’inverse, dans ses conclusions sous la décision commentée, le rapporteur public relève d’une part, et logiquement, que l’impératif de sécurité juridique n’a pas lieu d’être s’agissant de recours en contestation de validité déjà introduits par des concurrents évincés, qui étaient habilités à les exercer grâce à la jurisprudence Tropic ; d’autre part, et en revanche, que c’est bien « sur le terrain du droit au recours » que s’est décidée la solution.
(2) CE 16 juillet 2007, Tropic Travaux Signalisation, req. n° 291545, Rec. CE p. 361, CP-ACCP, n° 70, octobre 2007, p. 40 et s. (3) Voir, pour des références jurisprudentielles : R. Lauret et F. Fourmeaux, « Recours Tropic en cours : prudence, prudence... » MTP, 6 mars 2015, p. 42 ; O. Guézou, Traité de contentieux de la commande publique, Le Moniteur, 2015, p. 118 et s. (4) Que nous remercions pour la communication de ses conclusions.
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Difficile, dans ces conditions, de considérer que la décision SMTC Hérault Transports ne ferait que rappeler une solution qui aurait été déjà contenue, de manière plus ou moins explicite, dans la décision Tarn-et-Garonne.
Une solution motivée par la protection des intérêts des concurrents évincés Quoiqu’il en soit, une fois mise à part l’ambigüité rédactionnelle de la décision Tarn-et-Garonne, plusieurs éléments ont été mis en balance pour justifier la solution retenue. Car sur un strict plan juridique, tout d’abord, l’application de la jurisprudence Tarn-et-Garonne aux recours introduits sous l’empire de la décision Tropic était parfaitement admissible. Le principe, que le Conseil d’État rappelle dans sa décision du 4 avril 2014 : « il appartient en principe au juge d’appliquer les règles définies ci-dessus », reste en effet bien celui de l’application immédiate d’une nouvelle règle jurisprudentielle ; principe qui s’étend naturellement bien au-delà du contentieux de la commande publique(5). Du reste, l’on ne peut manquer d’en relever une illustration intéressante dans la décision Tropic, puisque le Conseil d’État avait précisé que si, pour des raisons tenant à l’impératif de sécurité juridique, le recours institué par cette décision ne pouvait être exercé « qu’à l’encontre des contrats dont la procédure de passation a été engagée » après le 16 juillet 2017, c’était « sous réserve des actions en justice ayant le même objet et déjà engagées avant la date de lecture de la présente décision »(6). Cette précision, qui visait une hypothèse un peu particulière (celle dans laquelle un concurrent évincé avait introduit un recours Tropic… avant la décision Tropic), n’en demeure pas moins révélatrice de la vocation « d’immédiateté » de toute solution jurisprudentielle nouvelle. Sur un plan pratique, ensuite, il n’est pas très satisfaisant, pour la lisibilité d’un contentieux contractuel, que la décision Tarn-et-Garonne cherchait justement à rationnaliser, que coexistent – pour une période certes provisoire, qui sera limitée au temps nécessaire à l’épuisement des recours Tropic, mais qui pourrait être assez étendu si l’on considère que, faute de mesure de publicité appropriée, les délais de recours à l’encontre de très nombreux contrats n’ont jamais été déclenchés – deux grilles de lecture tenant, d’une part, à l’appréciation de l’intérêt à agir des concurrents évincés, d’autre part, à l’opérance des moyens que ces derniers peuvent soulever.
(5) Voir notamment, dans des matières bien différentes de celles qui nous occupent ici : CE 22 octobre 2014, Centre Hospitalier de Dinan, req. n° 368904 ; CE 2 septembre 2009, Assistance publique de Marseille, req. n° 297013. (6) P. Delvolvé, « De Martin à Bonhomme », RFDA 2014, p. 438 : « Dans l’affaire Tropic, le requérant avait, sans doute par inadvertance, attaqué le contrat : c’est pourquoi le Conseil d’État, réservant le cas des actions en justice déjà engagées avant le nouvel arrêt et ayant le même objet que le recours que celui-ci établissait, a pu examiner selon les nouvelles règles celui dont il était saisi ».
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