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hors-sérieccJuin 2011 - 11
hors-série
sur nOtre site: un dOssier teCHniQue sur les BOÎtes nOires
spécial bourget 2011
l’AViON rÉiNVeNtÉ
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edito
Transfert aérien
J.C. BERTINI POUR IT
Saviez-vous que le tambour des machines à laver, les turbines des centrales électriques à gaz, la carrosserie des voitures de sport ou encore le casque de cyclisme de compétition bénéficient de technologies développées dans l’aéronautique ? Le secteur offre aux autres un potentiel de transfert de technologies insoupçonné. Certains industriels savent déjà en profiter pour réaliser des innovations de rupture. L’exemple du ventilateur sans pales de Dyson est édifiant. Pour l’inventer, le constructeur britannique utilise un compresseur d’air dérivé d’un turboréacteur et un anneau multiplicateur d’air au profil d’aile d’avion. Le résultat est un produit inédit tant en design qu’en performances. ccriDhA lOUKil Matériaux composites, aérodynamisme, motorisation, rÉDacteur en cheF rloukil@industrie-technologies.com systèmes embarqués, outils de conception, usinage à grande vitesse… Autant de domaines où l’industrie aéronautique joue un rôle d’éclaireur. Les progrès technologiques ne sont pas près de s’arrêter, comme le laisse entrevoir ce hors-série publié à l’occasion du S’inspirer des développements salon du Bourget. Ils ne manqueront pas de toucher le ferroviaire, l’automobile et bien en aéronautique d’autres secteurs. pour mieux innover. Un exemple : la maquette numérique qui tend à supplanter les plans en papier des bureaux d’études. Sa généralisation pose un sérieux problème de conservation des données sur de longues durées. Dassault Aviation, en partenariat avec IBM, semble avoir trouvé la solution. De quoi inspirer d’autres industries confrontées à la même difficulté. À vous de vous intéresser aux développements venus du ciel. L’Europe, et plus particulièrement la France, jouent un rôle moteur. Cela vous permettra de détecter les technologies qui vous aideront à mieux innover. cm
JUIN 2011ccSPÉCIAL AÉRONAUTIQUE
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Immeuble Antony Parc II 10, place du général de Gaulle BP 20156 92186 Antony Cedex Tél. : 01-77-92-92-92 Fax Rédaction : 01-77-92-98-51 Fax Publicité : 01-77-92-98-50
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sommaire
Une publication de pour joindre vos correspondants, composez 01-77-92, suivi des quatre chiffres entre parenthèses indiqués après chaque nom.
président directeur général Christophe Czajka directeur général délégué Paul Boursier rÉDACtiON directeur des rédactions Laurent Guez (9423) rédacteur en chef Ridha Loukil (9480) rédactrice en chef editing Anne Debray (9251) Assistante de la rédaction Marielle Flèche (9425) rédacteurs en chef adjoints charles Foucault (9443) (Production, mécanique, organisation industrielle) jean-François prevéraud (9458) (Bureaux d’études, design, CAO, lettre Web) secrétaire générale de la rédaction christine bradu (9496)
matériaux
éQuipements
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ENQUÊTE
ENQUÊTE
Les composites chassent les métaux
Quand l’aviation passe au vert cc page 24
ccpage 16
INTERVIEW
INTERVIEW
« L’électronique de puissance, clé de l’électrification l’électrification »
« L’avenir est aux composites biosourcés »
GODART, DIDIER GODART directeur du développement électrique chez Safran
NICOLAS ORANCE, président du pôle EMC2
cc page 30
cc page 19
DÉTAIL
STRUCTURE
Un Airbus bien dans sa peau cc page 22
Un train électrique cc page 32
MArKetiNG responsable du service Jean-Baptiste Alline (9781) responsable marketing Damien Delhomme (9786) CONFÉreNCeS-eVÉNeMeNtS directrice Anne-Carole Barbarin (9290) ADMiNiStrAtiON-GeStiON directeur administratif et financier Stéphane Deplus (9402) responsable juridique Mireille Monnier (9744) directeur des affaires sociales Frédéric Sibille (9444) directeur fabrication et achats Fabienne Couderc (9314) DiFFUSiON-AbONNeMeNtS-eDitiONS directrice de la diffusion et de la promotion Bénédicte Hartog (9406) directrice des abonnements Patricia Rosso (9788) directrice des éditions Annie Zaratti (9774) responsable de la promotion Isabelle de Goüyon Matignon (9811) service Clients (9292) tAriFS AbONNeMeNtS France (tva 2,10 %) 1 an, 11 numéros + accès Web : 105 euros ttc etudiants/demandeurs d’emploi 55 euros TTC (sur justificatif) etranger nous consulter règlement à l’ordre d’industrie et technologies pour l’ue, préciser le numéro de tVA intracommunautaire librairie (vente des numéros déjà parus et des annuaires) 4288 Annuaires (tVA 5,5 % incluse) « l’Atlas des usines » : 95 euros ttC Numéro de commission paritaire : 0612T81775. Numéro ISSN : 1633-7107. Dépôt légal : à parution. Impression : Imprimerie de Compiègne, 60205 Compiègne. Industrie et Technologies est édité par Groupe Industrie Services Info (principal actionnaire : GISI Communications), SA au capital de 1 057 080 euros. RCS Nanterre 309.395.820. 10, place du général de Gaulle 92 160 Antony. Toute reproduction, représentation, traduction ou adaptation, qu’elle soit intégrale ou partielle, quels qu’en soient le procédé, le support ou le média, est strictement interdite sans l’autorisation de l’éditeur, sauf dans les cas prévus par l’article L.122-5 du code de la propriété intellectuelle. Seules sont autorisées les reproductions réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et les analyses et courtes citations justifiées par le caractère scientifique ou d’information de l’œuvre dans laquelle elles sont incorporées. (loi du 11 mars 1957, art. 40 et 41, et code pénal, art. 425). Copyright Groupe Industrie Services Info. Tous droits réservés directeur de la publication Christophe Czajka
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SPÉCIAL AÉRONAUTIQUEccJUIN 2011
INTERVIEW
L’avion s’automatise pour plus de sécurité THIERY MICHAL, directeur général technique de l’Onera cc page 12
la photo-tech Au cœur de l’Eurofighter Typhoon, cette pièce de 6 mètres de longs subit toutes les contraintes de cet avion de combat. cc page 8
sommaire
sYstÈmes embarQués
conception
index
Les entreprises et les établissements cités cca Académie américaine des arts et des sciences . . . 6 Aeroform/SFA . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16 Aeromobile . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40 Airbus . . . . . 16, 19, 22, 24, 30, . . . . . . 32, 34, 40, 44, 47 Apple . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34 Assystem . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 Avic . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44, 47 ccB BMW DesignworksUSA . . . . . . . 8 Boeing . . . . . . . . . . . . 16, 30, 32, 34, . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40, 44, 47 Bombardier . . . . . . . . . . . 24, 32, 47
ENQUÊTE
ENQUÊTE
Sous le commandement du PLM
Un cockpit tout numérique cc page 34
cc page 44
CAS D’ENTREPRISE
« Allô, devine d’où je t’appelle » Virgin Atlantic installe sur ses longs courriers un dispositif multimédia dernier cri.
cc page 40
PHILIPPE HERRERIAS, associé de Vinci Consulting cc page 47
COMMUNICATION
Un atterrissage au millimètre cc page 42
INTERVIEW
« Le lean engineering a besoin de temps »
REPRORTAGE
Attention, les données numériques sont périssables cc page 48
CE NUMÉRO COMPORTE : - UN ENCART ABONNEMENT BROCHÉ DE 4 PAGES ENTRE LES PAGES 2 ET 51
MISE À NU
BOÎTE NOIRE, OUVRE-TOI… cc page 50
ccc Caisse des dépôts et consignations . . . . . . . . . . . . . . . . 48 CDC Arkhinéo . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48 Cetim . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16 CFM International . . . . . 24, 30 Comac . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24, 44, 47 Conseil consultatif pour la recherche aéronautique en Europe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24 ccd Daher . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19 Dassault . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19, 34 Dassault Aviation. . . . . . . . . . . . . . . 8, 24, 44, 48 Dassault Systèmes. . . . . . . . . . . . 44 Direction générale de l’aviation civile. . . . . . . . . . . . . . 42 cce EADS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44, 47 Easa. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48 Embraer . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47 EMC2 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19 Esa . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42 ESSP. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42 ccF Faa . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48 ccg General Electric . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24 Gifas . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48 cch Honeywell . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34, 50
CRÉDITS PHOTOS COUVERTURE : DASSAULT AVIATION. SOMMAIRE : AIRBUS ; ERIC DROUIN / SNECMA ; DASSAULT FALCON ; PTC ; T. GOGNY ; PREMIUM AÉROTEC ; D.R..
ccl L-3 Communications . . . . . . . 50 Lascom . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44 Lufthansa . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44 ccm Messier-BugattiDowty . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32 Minix . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24 Mitsubishi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24 ccn Nasa . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24, 34 cco Onera. . . . . . . . . . . . . . . . . . 6, 12, 16, 24 Organisation internationale de l’aviation civile (OACI) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12 ccp Panasonic Avionics . . . . . . . . . . . 40 Pratt & Whitney. . . . . . . . . . . . . . . . . . 24 Premium Aerotec. . . . . . . . . . . . . . . . . . 8 PTC . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44 ccr Rolls-Royce . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24 ccs Safran . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24, 30, 44 Sagem . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34 Siemens PLM Software. . . . 44 Sikorsky . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44 Singapore Airlines . . . . . . . . . . . . . 44 Snecma . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24, 30 Spot Image . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47 Sukhoi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47 cct Tarmac Aerosave . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 Tencate . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19 Thales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34, 44 Thales Avionics . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24 Toyota . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47 ccu Université du Michigan . . . . . . 6 ccv Vinci Consulting. . . . . . . . . . 44, 47 Virgin Atlantic. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40
cci IBM . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44, 48 Iceland Express . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 Inmarsat. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40, 42
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www.industrie-technologies.com suivez l’envol du Jetman dans le Grand Canyon.
le blOC-NOteS De lA rÉDACtiON rOCK ’N’ VOl.
Le pilote fait plus de bruit que les moteurs ! Cet été, Bruce Dickinson,
MiMe OSÉ. Les ailes des aéronefs ne copieront
plus les animaux mais les végétaux. L’équipe de chercheurs
emmenée par Kon-Well Wang, responsable du département d’ingénierie mécanique de l’université du Michigan, travaille à la création des composites inspirés du Mimosa pudica. Les feuilles de cette plante, nommée aussi la sensitive, se replient lorsqu’on les touche grâce au déplacement de l’eau dans les cellules qui les composent. Au congrès annuel de l’Académie américaine des arts et des sciences (AAAS), fin février, le scientifique a présenté son concept de matrice composite fluide et flexible (F²MC). Chaque cellule artificielle mesure pour le moment la taille d’une feuille de palmier mais la miniaturisation Le Mimosa pudica se rétracte est en cours. Interconnectées en réseau, elles pourraient quand on le touche. équiper des ailes d’avion qui s’adapteraient selon les besoins du vol. La capacité des plantes à s’autoréparer est aussi à l’étude. Mais comment a-t-on fait jusqu’à présent pour voler sans elles? cm
X-FileS. Pas d’ovni
mais un avion ultra-secret.
Les théories et les rumeurs autour de la Zone 51 s’envolent depuis que le FBI a décidé de déclassifier certains de ses dossiers. Ainsi, le véhicule futuriste accidenté en 1963 dans le Nevada, environ à 120 km au nord de Las vegas, n’aurait rien d’extraterrestre. Les débris photographiés provenaient d’un prototype du SR-71 Blackbird, un des premiers avions espion de l’armée américaine. Le gouvernement avait tout de même pris la précaution de droguer le pilote rescapé pour s’assurer qu’il ne dise rien à ses sauveteurs. cm
FAMiliAl. Fini les longs
6 000
Depuis 2009, le projet européen PPlane Vers 2040 le déplacement (Personnal Plane) coordonné par l’Onera aérien se personnalisera… y réfléchit. En avril dernier, un petit appareil doté de six moteurs électriques a été retenu comme concept le plus prometteur. Pour deux ou six passagers, l’engin sera automatisé et géré à partir du sol. Rendez-vous en 2040 pour la première démo. cm
c Paradoxalement, ces appareils, construits dans les années 1980 sont recyclables jusqu’à 85%, selon Tarmac Aerosave. En sera-t-il de même pour la prochaine génération utilisant deux fois plus de matériaux composites? Rien n’est moins sûr.
trajets en automobile… le transport aérien personnel est pour (après) demain.
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1963, un ovni s’écrasait dans le Nevada, a-t-on dit…
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C’est le nombre d’avions de transport civil qui arriveront en fin de vie d’ici à 20 ans dans le monde.
D.R.
«Je suis Bruce Dickinson, le leader d’Iron Maiden, et je serai votre pilote pour ce vol.»
le chanteur du groupe de métal Iron Maiden, sera aux commandes de certains vols de la compagnie Iceland Express. À bord d’Ed Force One, avion aux couleurs d’Eddie, la mascotte du groupe, l’artiste montrera ce qu’un Boeing 757-200 a dans le ventre. Pas d’inquiétude. C’est aussi son métier. cm
lA PeNSÉe DU MOiS L’aéronautique n’a été ni une industrie ni une science. Ce fut un miracle. Igor Sikorsky (1889 – 1972), un des pionniers russe de l’aviation, concepteur du premier avion quadrimoteurs
tOUt-terrAiN. L’ULM
D.R.
devient amphibie. Pour illustrer
ses savoir-faire, le prestataire de services en ingénierie et conseil en innovation Assystem, présente l’Amphibian Aircraft. Il transportera deux passagers. Au décollage, avec le plein, il pèsera 495 kg, suffisamment peu pour respecter les réglementations ULM. Capable de franchir 1200 km à une vitesse de croisière de 220 km/h, il pourra se poser sur le sol, sur l’eau ou sur la neige. Son détecteur de distance pour les amerrissages, sa mesure de la masse et du centre de gravité et ses évaluations de la distance de décollage par calcul de données atmosphériques lui donneront cette assurance tout-terrain… dès 2013. cm
Jetman, plus fort que James Bond.
SUPer-hÉrOS ? Il est suisse, mais il tient plus
du condor que du coucou. Le pilote Yves Rossy, surnommé Jetman,
a ajouté le Grand Canyon à son palmarès. Muni de son aile à réaction, l’homme a volé huit minutes à 220 km/h entre les célèbres falaises de l’Arizona. Un pèlerinage sous haute surveillance, puisqu’Yves Rossy a dû demander une double autorisation de vol: aux autorités américaines et à la tribu autochtone des Hualapai. cm
POiDS MOUChe. 10 centimètres d’envergure et 2,7 grammes.
Le gabarit idéal pour un drone oiseau. Ce MAV (Micro Air Vehicle), développé par le chercheur japonais Hao Liu, imite le vol du colibri, y compris en stationnaire. Ses micromécanismes font battre 35 fois par seconde ses ailes flexibles et le maintiennent en l’air pendant six minutes. Un vol d’éphémère. cm
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photo-tech
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photo-tech
Cœur de battant
premium aérotec
Que sa destination finale soit l’Allemagne, la Grande-Bretagne, l’Espagne ou l’Italie, la section centrale du fuselage de l’Eurofighter Typhoon est réalisée à Augsbourg, en Bavière, à l’usine de Premium Aerotec. Au cœur de l’avion de combat, la pièce de 6 mètres de long subit toutes les contraintes. Pour y résister, l’intérieur est en aluminium à renforts de titane et l’enveloppe en matériau composite de fibres de carbone.
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photo-tech
Panneaux composites pour avion-cargo La porte arrière du futur avion-cargo d’Airbus a la particularité d’être réalisée entièrement en matériaux composites. À Augsbourg, en Allemagne, deux ouvriers disposent les différentes couches de fibres de carbone sur une préforme. La pièce de 7 mètres de long sur 4 de large obtient sa rigidité suite à une étape d’injection de résine sous vide. Elle est ensuite acheminée jusqu’à Brême (Allemagne), site d’assemblage final des A400M.
Avion d’affaires
DaSSauLt ; eaDS
Sur le site d’Argenteuil, un ouvrier finit d’assembler la partie avant du nouvel avion d’affaire moyen-long courrier de Dassault Aviation, le Falcon 2000S. Une fois aménagée par BMW DesignworksUSA, cette cabine présentera une hauteur de 1,88 mètre, laissant ainsi la possibilité aux passagers de se déplacer debout.
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concept plane L’avion-oiseau de Boeing c Comment
volera-t-on en 2025 ? Boeing a répondu à cette question de la Nasa par un concept d’avion de ligne novateur. plutôt que le traditionnel fuselage tout en longueur, le constructeur américain envisage des engins compacts, arborant un look semblable à celui des avions furtifs. La charge maximale étant réduite, suffiraient de simples hélices suffi raient à propulser les appareils, au lieu des imposantes nacelles.
L’avion supersonique de Lockheed Martin cLe
Supersonic Green Machine de Lockheed Martin pourrait relancer le concept des vols supersoniques commerciaux. Son aile en V inversée et son fuselage profilé à l’extrême atténueraient les nuisances sonores, tout en améliorant l’efficacité énergétique. Deux inconvénients majeurs qui avaient mis fin à l’aventure concorde.
L’avion à longues ailes d’Airbus
DaSSauLt ; NaSa
cUne
voilure extra fine et longue, des moteurs semi-intégrés, un empennage en forme de U, une cellule intelligente et légère… Le concept plane d’airbus illustre ce que pourrait être le transport aérien en 2050 : moins de consommation, d’émissions et de bruit mais plus de confort. il a été imaginé en extrapolant les progrès dans les matériaux, l’aérodynamique, la cabine et la motorisation.
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cc ses 4 dates clés
1984 X-Supaéro, il rejoint l’Onera en tant qu’ingénieur de recherche à la direction des études de synthèse, dont il prend la responsabilité trois ans plus tard. 1991 Il est nommé chef de la subdivision « Espace ». 2000 Il accède à la direction du département prospective et synthèse. 2010 Il devient directeur technique général de l’Onera.
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cc thierrY MiChAl direCteur GénérAl teCHniQue de l’OnerA*
L’avion s’automatise pour plus de sécurité Les avions de transport des années à venir ne feront pas l’objet d’une révolution radicale, mais bien d’une évolution. Le véritable changement concernera vraisemblablement la modification du transport aérien dans sa globalité, qui devrait tendre vers une automatisation des systèmes de navigation pour maintenir un niveau élevé de sécurité. Quels seront les grands axes qui dicteront la conception des avions de ligne au cours des décennies à venir ? Thierry Michal : Il y a un certain nombre
T. GOGNY POUR INDUSTRIE ET TECHNOLOGIES
d’éléments clairs et permanents qui guideront les avionneurs, parmi lesquels figure la diminution des nuisances, dans le domaine de l’acoustique ou des émissions polluantes. La sécurité des vols occupe également une bonne place, eu égard aux prévisions d’accroissement du trafic. Sous forme d’objectifs techniques, on assistera à une réduction des masses et de la traînée. Ces deux éléments ont un impact direct sur la consommation de carburant, avec l’amélioration du système propulsif pour réduire les émissions. L’amélioration de la sécurité des vols demeurera toujours une priorité. Quelles seront les évolutions dans ce domaine ?
En la matière, quatre sujets d’importance. Il y a une attente forte des industriels sur tout ce qui concerne la problématique du givrage des aéronefs. Il y a également les limites du domaine de vol et en particulier les phénomènes vibratoires et leur prévision, et le foudroiement en raison de l’arrivée d’un certain nombre de maté-
riaux composites. Figurent enfin les logiciels embarqués, si l’on vise une automatisation du transport aérien pour développer un niveau de sûreté et de validation par des méthodes formelles plus efficaces que les validations par essais. L’automatisation du transport aérien va donc s’accroître ?
Nous avons mené des études à très long terme avec une automatisation totale du transport aérien via plusieurs projets. L’évolution du transport aérien sous forme d’automatisation est requise pour garantir une augmentation du trafic tout en conservant des niveaux de sécurité acceptables. Nous pensons que l’automatisation va changer le rôle des pilotes et des contrôleurs aériens en leur donnant des fonctions plus stratégiques de supervision. Nous n’avons pas d’idées vraiment arrêtées sur l’évolution du trafic aérien, mais nous essayons d’identifier les domaines scientifiques et techniques sur lesquels, quel que soit le scénario, il faudra se pencher afin d’apporter des éléments de solution aux industriels. Cela nous pousse à regarder très loin dans l’avenir pour définir les thématiques sur lesquelles nous allons travailler. Parmi ces dernières figure l’utilisation des carburants alternatifs. Nous avons mis en
* Office national de recherches et d’études aérospatiales
évidence un certain nombre de filières qui nous paraissent intéressantes. Quels sont les carburants alternatifs qui pourraient être utilisés ?
Les biocarburants développés jusqu’à présent pour l’automobile, tels que l’éthanol ou les esters, ne répondent pas aux exigences de l’aviation, mais d’autres voies ont d’ores et déjà été identifiées pour l’aviation qui sont totalement compatibles avec les systèmes actuels. Ce sont les huiles hydrotraitées et les carburants de synthèse Fischer-Tropsch. Ces derniers lorsqu’ils sont fabriqués à partir de biomasse (on parle alors de BTL) ont un bilan d’émissions de gaz à effet de serre particulièrement attractif et donnent accès à un large éventail de biomasses. Peut-on considérer d’autres sources énergétiques ?
Tout ce qui relève des filières hydrogène et des piles à combustible est beaucoup plus lointain, cela rejoint la possibilité d’avoir une propulsion électrique répartie, qui conduirait à des conceptions fondamentalement différentes. Cela entraînerait une modification sensible du tissu industriel aéronautique, et remettrait totalement en cause le mode actuel de conception des avions, où motoristes et avionneurs sont à la fois relativement complémentaires et séparés. L’avion électrique nécessite une conception beaucoup plus intégrée de la partie cellule et moteur, à l’inverse de ce qui se fait aujourd’hui sur les avions de ligne. JUIN 2011ccSPÉCIAL AÉRONAUTIQUE
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Que sera l’avion en 2050 ? la réponse d’Airbus.
blèmes existants et que cette transition est possible. Si tel est le cas, elle prendrait de toute façon plusieurs années. Le système actuel est essentiellement humain et basé sur des échanges vocaux, nous passerions à des échanges d’informations numériques. Il faudra donc prévoir ce changement. Cependant, l’homme restera encore longtemps, voire toujours, dans la boucle mais avec des fonctions différentes. Concernant l’évolution des appareils, imagine-t-on déjà à quoi ressemblera un avion d’ici vingt à trente ans ?
Demain, des vols sans pilotes ? c Selon l’Organisation internationale de l’aviation civile (OACI), le trafic aérien va augmenter de 4,6 % par an en passagers et kilomètres, et ce, jusqu’en 2025, avec des risques croissants d’accidents. Pour gagner en sécurité, l’Onera table sur une automatisation élargie des systèmes, aussi bien à bord des appareils qu’au sol, ou dans les tours de contrôle. Un certain nombre
d’accidents est lié au facteur humain dans le transport aérien. Depuis plusieurs années, les avions sont de plus en plus automatisés, notamment au niveau des commandes de vol. Des aides au pilotage, l’Onera réfléchit à une possibilité d’automatisation complète pour en observer les gains obtenus. Il va jusqu’à imaginer des avions sans pilotes pour le transport.
L’avion de ligne conservera donc sa configuration ?
Nous sommes actuellement dans des logiques d’optimisation de la configuration existante, mais il devient difficile de gagner quelques points en matière de traînée et de consommation. Il faut jouer sur une procédure d’optimisation globale, laquelle ne passe pas seulement par l’aéronef, mais aussi par le système de transport aérien. Pour faire simple, cela ne sert à rien de faire des avions économiques s’ils doivent rester en circuit d’attente une heure au-dessus de l’aéroport, ou consommer des tonnes de kérosène au roulage pour rejoindre la piste. Il est donc de plus en plus nécessaire d’adopter une approche globale, qui ne doit pas seulement se focaliser sur l’avion.
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Aujourd’hui, on ne peut plus concevoir un avion sans s’intéresser à son intégration au sein du trafic aérien, tout comme on ne peut pas modifier le trafic sans avoir une bonne connaissance de ce dont ils sont capables. Est-ce pour cette raison que vous mettez l’accent sur l’automatisation du transport aérien ?
Tout à fait, parce que c’est un domaine dans lequel il existe vraiment une interaction entre la conception du système de transport et des aéronefs. C’est une difficulté que nous avons mise en évidence dans une de nos études. Cependant, penser ou concevoir un système automatique nécessite de prouver que son adoption pourrait être faisable et qu’il apportera des solutions à des pro-
Quelles sont les raisons qui expliquent cette évolution, plutôt qu’une révolution ?
Principalement des raisons de logique et d’organisation industrielles. La modification très sensible qui conduirait à des formes différentes d’appareils pourrait se faire sur des marchés de niche pour des fonctions très particulières. Le problème de l’intégration de l’avion dans son environnement est toujours le même. On l’a vu sur l’A380, avec la nécessité d’adapter les aéroports. En conséquence de quoi, les progrès scientifiques et les évolutions à réaliser ne peuvent pas être les seules lignes directrices, puisqu’il faudra tenir compte de l’existant pendant encore longtemps. En fonction des scénarios, des domaines d’emploi, il y aura certainement des formes de véhicules relativement variées, ce qui permettra peut-être in fine de démontrer l’intérêt de telle ou telle formule qui pourrait s’imposer. Mais je ne crois pas à une révolution fondamentale. cm ccpropos recueillis par antony angrand redaction@industrie-technologies.com
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L’Onera progresse dans les aides au pilotage et pourrait étudier les gains d’une complète automatisation. À terme, les pilotes satisferont-ils à l’exigence croissante de sécurité ?
Je suis assez circonspect dans ce domaine. On est capable de mettre en évidence certaines formules d’intérêt, en particulier l’aile volante pour le fret par exemple, mais à partir du moment où les conditions d’emploi et les scénarios sont éminemment variables, je pense que l’on va arriver à une certaine adaptation, une optimisation des avions de ligne. Pour encore un certain nombre d’années, je crois que les formules actuelles perdureront.
www.industrie-technologies.com 93 m2 pour un panneau de fuselage en matériaux composites.
MATÉRIAUX
Les composites chassent les métaux
inalement, il aura eu du bon ce premier choc p é t r o l i e r, e n 1973. À partir de cette époque, les compagnies aériennes demandèrent aux avionneurs de concentrer leurs efforts sur la réduction de la masse des appareils, de manière à pouvoir diminuer la consommation de carbu-
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rant. Ainsi sont apparus les matériaux composites sur les avions de ligne. « Dans les années 70, nous avons commencé à utiliser le carbone, le kevlar et l’aramide », explique Roland Thévenin, expert en structures composites chez Airbus, le pionnier en la matière, « Nous avons développé les composites, sur les structures secondaires pour
commencer, puis sur les surfaces de contrôle, et en enfin sur les structures primaires, telles que la voilure ou le fuselage, comme c’est le cas sur l’A350. » cc Le
carbone époxy supérieur au titane
Les matériaux composites présentent des avantages indéniables par rapport aux alliages et
les métaux battent de l’aile
Aujourd’hui, l’Airbus A350 emploie très largement les matériaux composites. Il y a trente ans, seuls les radômes des appareils n’étaient pas en alliage. 1987
A320
8%
2013
Matériaux composites
85 %
Métaux et alliages
53 %
A350 Matériaux composites
41%
Métaux et alliages
Le premier matériau composite introduit dans la gamme Airbus était le verre, en 1970 sur l’A300, pour le radôme de radar. En 1980, les matériaux composites ont commencé à apparaître sur les pièces secondaires, comme les volets, l’empennage et les aérofreins. En 1990, ils ont équipé les nacelles réacteur, puis au début des années 2000 les éléments primaires, tels que la cloison d’étanchéité sur l’A340. Ce n’est qu’avec l’A380 qu’ils commencent à constituer une grande part d’un avion de ligne, comme le caisson de voilure, les nervures d’ailes, le tronçon arrière de fuselage et le plancher cabine.
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métaux classiques employés en construction aéronautique. Ils sont notamment plus légers que l’aluminium. « Les gains de masse offrent aussi une plus grande souplesse en termes de conception. Sur le B787, ils ont permis la réalisation de hublots de plus grandes dimensions par exemple », souligne Mike Sinnett, chef de programme du Boeing B787. Plus denses, ils possèdent aussi une résistance mécanique élevée. « Le carbone époxy est la seule fibre qui a aujourd’hui des vertus mécaniques et de densité qui sont supérieures à celles du titane », analyse Christophe Champenois, responsable du pôle ingénierie des polymères et des composites au Cetim. Des qualités qui durent dans le temps, puisque les matériaux composites ne présentent pas de sensibilité à la corrosion. Cela les rend plus résistants à la fatigue comme aux chocs, un avantage majeur en termes de maintenance. Le choix en matériaux composites est restreint, car les acteurs industriels n’en changent vraiment que lorsqu’une rupture technolo-
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L’Airbus A350 et le Boeing 787 représentent une nouvelle génération d’avions : les matériaux composites constituent plus de 50 % de chaque appareil. Les avantages qu’ils apportent en termes de performances et de masse sont indéniables, mais les composites restent coûteux à produire. L’arrivée de résines de nouvelle génération pourrait cependant changer la donne.
Mise en forme du drappage de composites destinés à l’Airbus A350.
À Nordenham (Allemagne), cet autoclave de 320 tonnes polymérise des pièces de fuselage et des panneaux de voilure.
Fuselage en fibre de carbone, le défi du gigantisme La construction des différents éléments de l’Airbus A350 nécessite un autoclave spécifique, aux dimensions inhabituelles : 27 mètres de long ! température maximale de 180°C. Le prix de ce four avoisine les 6 millions d’euros. Construit par la société sud-coréenne Aeroform/SFA, son transfert en Europe s’est fait lentement, par voie maritime. Cet autoclave servira principalement à la fabrication des grandes pièces des sections 13 et 14 de l’Airbus A350 (partie supérieure du fuselage
avant de l’appareil) à Nordenham, en Allemagne, où une usine de 250000 m² a été spécialement construite pour l’accueillir. Un panneau de 93 m² de cette partie de l’A350 a déjà été construit par Aerotec début mars 2011, grâce à cet autoclave. Il sera inspecté aux ultrasons avant d’être percé et découpé pour rejoindre les autres éléments de l’appareil. AIRBUS
c La fabrication des différents tronçons de fuselage et panneaux de voilure de l’A350 nécessite un autoclave hors normes, aux dimensions gigantesques. Mesurant 27 mètres de long pour 8 mètres de diamètre, il pèse 320 tonnes. Il polymérise des pièces allant jusqu’à 21 mètres de long sur 7 mètres de large, à une
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matériaux
Pour réparer, Boeing mise sur le collage
cPour
les deux principaux avionneurs, toute intervention débute par une évaluation des dommages via une détection à ultrasons. « Les composites peuvent être réparés en utilisant des techniques de collage, en enlevant le matériau endommagé et en appliquant une nouvelle nappe », commente Mike Sinnett, chef de programme du Boeing 787. Boeing emploie la réparation par patch de ses matériaux composites, qui reste aérodynamique et ne dégrade pas les performances des appareils. « Ces réparations ne nécessitent pas d’autoclave », ajoute Mike Sinnett. Mais la réparation par collage est coûteuse en temps et en matériel. Elle entraîne un travail important de préparation, réalisé par un technicien très qualifié. Airbus, qui n’est pas totalement sûr de la tenue du collage, se limite de son côté pour le moment au boulonnage. La solution idéale est peut-être celle de la réparation
gique intervient, apportant un réel intérêt. « De par la longue et coûteuse procédure d’essais et de qualification qu’ils doivent traverser, on ne cherche pas à étendre la gamme, confirme Christophe Champenois. Cependant, dans la gamme des carbones époxy, il existe une cinquantaine de références. » Les fibres de carbone ont différentes tailles, différents nombres de filaments par fibre, différentes origines. Légers, robustes, flexibles… Aurait-on alors affaire à des matériaux miracles? Pas tout à fait. Ces avantages sont contre-
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À la manière d’un pare-brise automobile, les éléments composites sont réparés par injection et collage chez Boeing.
par infiltration, une technique en cours d’essai à l’Onera. La tenue mécanique n’est pas encore validée, mais le développement de nouvelles résines plus fluides et tenaces devrait ouvrir la voie à cette nouvelle méthode de maintenance.
balancés par un procédé de des différents éléments de fabrication beaucoup plus l’A350 a des dimensions exceplourd et plus coûteux que celui tionnelles : 27 mètres de long des aciers et des alliages. Du pour 8 mètres de diamètre et une masse de point de vue de 320 tonnes. Il a l’outillage néces- tout ce Qui fait partie d’un saire en premier concerne le sYstÈme de investissement à lieu. La construc- production de hauteur de tion de l’A350 la structure 360 millions n é c e s s i t e d e s de l’appareil outils en invar, un reste coÛteux d’euros, réalisé pour les infrasalliage au nickel dont le coefficient de dilatation tructures de production. Une fois ce matériel acquis, est très faible mais qui est très cher. Les matériaux composi- la fabrication des pièces en tes imposent aussi l’emploi composites est également trid’autoclaves particuliers, pour butaire d’une procédure spéla polymérisation. Celui cifique, qui comporte une employé pour la fabrication montée en température et une
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mise sous pression contrôlées. « L’application de la pression nécessaire lors du processus de polymérisation nécessite de disposer de réservoirs de gaz inerte importants. D’une manière générale, tout ce qui concerne le système de production de la structure de l’appareil reste très coûteux », souligne Roland Thévenin. La fabrication des matériaux composites est également plus longue que celle des pièces en alliage. « Cela fait partie des domaines dans lesquels nous devons nous améliorer », ajoute l’expert. Le cycle de polymérisation, avec montée en température et contrôle précis de celle-ci, s’étend en moyenne sur deux heures. Il passe à deux heures et demie dès qu’il ne s’agit plus seulement de réaliser une pièce plate, comme un panneau de fuselage, et que la structure de la pièce est plus complexe. cc L’arrivée
de résines thermodurcissables
Une barrière technologique qui devrait bientôt tomber. Des procédés et des matériaux qui ne nécessitent pas d’autoclave se développent. Ils exigent des températures et des pressions moins importantes. « Cela entraînera une diminution des coûts de production dans le futur, de l’ordre de 20 % », s’enthousiasme Roland Thévenin. Une évolution permise par l’arrivée de nouvelles résines thermodurcissables spécifiques qui polymérisent à des températures inférieures à celles impliquées actuellement et qui ne nécessitent pas systématiquement la mise sous pression. Et sans mise sous pression plus besoin d’auto-
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Airbus et Boeing n’emploient pas la même procédure de réparation des pièces composites. Là où l’européen favorise largement le boulonnage classique, l’américain préfère le collage.
matériaux
ccNiCOlAS OrANCe président du pôle eMC2 (Ensembles métalliques et composites complexes)
L’avenir est aux composites biosourcés Les composites sont des matériaux devenus incontournables dans l’aéronautique, du fait de leur légèreté, synonyme d’économie de carburant. Il faut néanmoins accroître leurs performances et optimiser certains procédés, notamment au niveau du contrôle qualité, pour les mettre au niveau des alliages métalliques. Le point sur la recherche française avec Nicolas Orance, le président du pôle EMC2. Quel est, selon vous, l’avenir des matériaux composites dans l’aviation ? Nicolas Orance : Dans les com-
posites, on distingue les thermoplastiques des thermodurcissables. Je sens une tendance aussi forte que récente au développement des thermoplastiques. Ils offrent deux avantages que les thermodurcissables n’ont pas : le caractère recyclable et la possibilité de les réparer. Le thermoplastique n’a pas une forme définitive, et il est possible en chauffant la pièce endommagée d’intervenir dessus, par exemple par soudures.
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Ils ont aussi leurs défauts, comme un coût élevé, et une mauvaise résistance à la foudre. Quelles pistes suivent les chercheurs pour améliorer ces points faibles ?
Le manque de sources d’approvisionnement explique le coût élevé des composites : p a r e xe m pl e , i l n’ y a aujourd’hui qu’un seul fournisseur mondial de thermoplastiques, le hollandais Tencate. D’autre part, comme les matériaux composites sont presque toujours issus des
hydrocarbures, il y a un risque important de volatilité des prix. Des composites biosourcés sont donc souhaitables. Au sein du pôle EMC2, nous menons actuellement des projets de labellisation du lin pour l’industrie aéronautique. L’objectif est d’atteindre les mêmes performances (mécaniques, tenue au feu, toxicité des vapeurs…) que la fibre de carbone. Mais nous sommes encore loin d’un tel degré de maturité. Concernant la foudre, le problème est en passe d’être réglé. Il y a des recherches pour développer des composites rendus conducteurs grâce à des particules métalliques. La lourde grille de métal employée aujourd’hui comme cage de Faraday deviendra dispensable. Les composites s’entretiennent-ils aussi facilement que les métaux ?
Non, parce que les procédures de suivi de la qualité des composites sont encore jeunes. Il faut développer ce que l’on appelle les méthodes de contrôle non destructif pour qu’elles soient aussi rapides
et productives que celles employées pour les alliages métalliques. C’est une voie de recherche à part entière : pour l’instant, comme les composites ne sont pas conducteurs, il faut les immerger dans des piscines pour contrôler le matériau. Il serait théoriquement possible de faire la même chose à l’air libre et donc d’avoir à disposition des outils de contrôle portatifs. Les technologies seront plus précises que pour les métaux, avec l’emploi du laser notamment. Nous pourrons ainsi, comme sur les alliages métalliques, contrôler ponctuellement, et non systématiquement, comme c’est le cas aujourd’hui. Quelle est la position mondiale de la France en termes de R & D sur les composites appliqués à l’aéronautique ?
Je dirais que nous sommes parmi les sept pays les plus avancés dans le domaine des composites pour l’industrie aéronautique. En tête de liste, on trouve l’Angleterre, l’Allemagne, le Japon et les ÉtatsUnis. L’expertise française est
ccparcours
Nicolas Orance préside le pôle EMC2 depuis 2009. Ingénieur matériaux de formation, il rejoint le milieu de l’aviation en 2003 en intégrant la société Daher. Il y occupe plusieurs postes, de responsable de programme de R&D à directeur du développement du secteur aéronautique, fonction qu’il exerce encore aujourd’hui.
reconnue sur la réalisation de certaines pièces. Notamment via Dassault et Airbus, pour la fabrication des caissons centraux de voilure en carbone qui sont la clé de voûte des avions. Pourra-t-on aller au-delà des 53 % de matériaux composites présents dans la structure de l’A350-XWB ?
Je ne le pense pas, tout simplement parce que les composites finiront par atteindre leurs limites en termes d’allégement. Pour l’avion du futur, disons dans dix ou quinze ans, parions que la structure aura toujours la même composition : 50 % de métaux, et 50 % de matériaux composites. cm cc propos recueillis par ludovic Fery lferry@industrie-technologies.com
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matériaux
ccl’AViS De
cc Des
matrices thermoplastiques
Il s’agit de matrices, jusqu’alors employées en plasturgie, sans les renforts de fibres : les Peek (polyétheréthercéthone), les polyamides et les PET (polyéthylène téréphta-
late). La réaction qui les solidifie n’est pas la même qu’avec les thermodurcissables, elle ne nécessite pas de mise sous pression. « Il n’y a plus cette complexité au niveau du cycle de cuisson. On ne parle plus de précision des paramètres couplée à une durée de polymérisation longue. Il suffit de venir à la température de fusion, de mettre la pièce en forme et de la refroidir instantanément. Les cycles de production sont ainsi considérablement raccourcis », explique Laurent Juras, responsable de l’activité conception et industrialisation composites au pôle d’activité ingénierie des polymères et composites du Cetim. La
MiKe SiNNett boeinG
matrice thermoplastique présente aussi l’avantage d’avoir un comportement déformable à une certaine température, qui permet de lui redonner de la viscosité. Une pièce peut donc être formée une première fois, puis réchauffée à température plus élevée pour être redéformée. « Cela offre des
possibilités de réparation, d’assemblage par soudage. Là où l’assemblage mécanique coupe les fibres, avec les thermoplastiques on peut chauffer deux pièces, les mettre sous pression et générer un niveau d’accroche qui résiste aux efforts », constate Christophe Champenois.
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clave. Les cycles de fabrication des matériaux composites vont également se trouver bouleversés par l’arrivée dans l’aéronautique de résines d’un nouveau genre : les thermoplastiques. Ils constituent une évolution sensible dans le domaine des matériaux composites bien qu’invisible à l’œil nu.
sur une période de douZe ans, un aVion en alliage passera par deux longues séQuences de maintenance: un aVion en composite n’en connaÎtra Qu’une.
matériaux
Cependant, les matériaux composites thermoplastiques ne se substitueront pas totalement aux thermodurcissables, notamment sur les grandes pièces, telles que le fuselage ou la voilure. Elles ne peuvent pas être réalisées en thermoplastiques pour le moment, en raison de propriétés de résistance mécanique qui n’atteignent pas encore celles supportées par le thermodurcissable. « Le thermodurcissable a toujours de l’avenir dans l’aéronautique », affirme Roland Thévenin, chez Airbus. Y compris au niveau de la maintenance puisqu’au-delà de sa résistance, il évite la propagation de criques (fissurations). Aujourd’hui la maintenance se fait uniquement par inspection visuelle. Ce n’est que si un dommage est repéré par l’opérateur qu’une évaluation précise est effectuée par un inspecteur, qui utilise pour cela le balayage par ultrasons. La cartographie des dégâts obtenue indique s’il y a délamination et identifie la zone de décollage. Si une réparation est nécessaire, attention, les vitesses de rotation pour le perçage des matériaux composites sont différentes de celles appliquées aux alliages… mais les principes restent les mêmes. cc Le
boulonnage n’est pas obsolète
« Un technicien de 10 ou 15 ans d’expérience aura beaucoup de facilité à s’adapter. La réparation structurale est similaire à ce qui se fait sur les alliages avec des doubleurs en composite, sous forme boulonnée », ajoute Roland Thévenin. L’intervention par boulonnage sur les structures primaires reste ainsi encore largement employée avec les composites. D’autant que son
alternative, le collage, n’est pas encore totalement maîtrisée sur les pièces de grandes tailles. « La plupart du temps, des sous-traitants effectuent ces interventions, parfois au détriment de la qualité. Nousmêmes ne sommes pas sûrs de nos collages, et nous ne les imposons donc pas à des ateliers dont les mécaniciens n’ont pas une grande expérience des composites », reconnaît Roland Thévenin. cc Nervures
et attaches restent en métal
L’emploi croissant des matériaux composites sur les avions de ligne devrait toutefois permettre de remédier à cette situation. Cela s’accompagnera nécessairement d’une formation de mécaniciens spécialisés. L’appareil « 100 % composite » n’est pas pour autant d’actualité. Il n’est même pas à l’ordre du jour. Les composites ne sont pas la pierre philosophale. En termes de performances, de coûts de maintenance et de production, l’usage d’autres matériaux reste plus pertinent pour certaines pièces. Les structures d’attache sont encore fabriquées en métal, par exemple. Elles pourraient être réalisées en composites, mais le gain de masse serait négligeable pour un coût de production bien trop élevé. Les nervures de la voilure de l’A350 et de l’A400M restent aussi en métal, idem sur le Boeing 787. Pour répondre aux spécifications de ces éléments, l’alliage est bien plus approprié. Les métaux ont en conséquence encore de l’avenir dans le domaine de la construction aéronautique. cm ccantony angrand redaction@industrie-technologies.com
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matériaux
Un Airbus bien dans sa peau Un patchwork de matériaux compose la structure du futur A350 XWB d’Airbus. Chacun d’entre eux remplit une fonction bien précise, de l’allégement pour la fibre de carbone, constituant majeur de l’enveloppe, à la résistance aux chocs ou à la foudre pour les différents alliages métalliques. Industrie & Technologies a disséqué pour vous cet athlète des airs. ccludovic Féry lfery@industrie-technologies.com
des pores antioxYdants ccL’encadrement et les montants verticaux des portes sont constitués de titane, métal le moins sensible à l’humidité et à la corrosion.
une combinaison paratonnerre ccLes matériaux composites comme le CFRP (*) n’ont pas une aussi bonne conductivité électrique que les métaux, et l’avion risque d’être endommagé en cas de foudroiement. C’est pourquoi un grillage de cuivre, avec des mailles très fines, a été intégré au matériau, partout dans la structure, Grille pour faire office de paratonnerre. de cuivre On le trouve en quantité plus importante dans les zones les plus exposées à la foudre, comme les ailes et les caissons qui renferment le carburant. Plastique renforcé en fibres de carbone (CFRP)
53%
Aluminium-lithium
18%
de solides épaules ccLes mâts des nacelles sont en titane, ce métal étant le plus apte à supporter la charge des moteurs et leurs vibrations.
des Jambes de marathonien
Titane
14% Acier
6%
Aluminium
Cuivre et autres
1%
8%
(*) CFRP : plastique renforcé en fibres de carbone
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ccHormis les roues et les freins qui sont en carbone, le train d’atterrissage est métallique. Pour deux tiers (la jambe du train et les axes secondaires), il s’agit d’acier, choisi pour sa densité et sa robustesse supérieures aux autres métaux. Le reste du train (partie inférieure de la jambe et celle qui soutient les roues), soumis a des contraintes moins fortes, est réalisé en titane.
matériaux
une ossature mixte
un cŒur À l’épreuVe du temps ccÀ la jonction des deux ailes, le caisson central de voilure (en rouge ci-dessus) est l’organe vital de l’avion. Semblable à une grosse boîte d’allumettes vide, il est situé sous le compartiment passager et devient très difficile d’accès une fois mis en place. Comme sur l’A380, c’est le CFRP qui a été choisi en raison de son excellente durée de vie. S’il venait à être endommagé, il serait néanmoins plus difficile à réparer qu’un métal.
ccLa plus grande partie de la structure de l’A350 est réalisée en plastique renforcé en fibres de carbone (CFRP). Alors qu’on le trouve à la fois dans l’enveloppe et le squelette de l’avion, le matériau ne représente que 53 % du poids total de la structure. C’est sa légèreté alliée à sa grande rigidité qui l’avantage par rapport aux métaux utilisés jusque-là, et permet des économies de carburant… Jusqu’à un certain point : la partie Raidisseurs inférieure du cadre du fuselage est en titane, car le CFRP n’est pas assez robuste en situation de crash.
Enveloppe Cadres
des implants antichocs
FLIGHT SIMULATOR ; AIRBUS ; D. R.
une peau Qui ne craint ni le chaud… cc cLe Le CFRP sur l’enveloppe de la nacelle résiste mieux au feu que l’aluminium utilisé précédemment. Les flammes diffusent moins dans le composite que dans le métal, qui conserve mieux ses performances initiales.
… ni le froid ccDe l’aluminium recouvre le contour avant de la nacelle. Il est traité pour résister aux températures extrêmes, élevées comme basses.
ccEn vol, les oiseaux sont la bête noire des pilotes : la moindre collision peut déformer la voilure, voire détruire l’un des réacteurs. Les parties les plus exposées aux chocs, le nez et les bords d’attaque des ailes, sont fabriquées à partir d’aluminium combiné au lithium. Vu la taille des pièces, l’alliage offre la résistance nécessaire en restant plus économique et plus léger que l’acier ou le titane. Le lithium réduit encore la densité de l’aluminium.
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ÉQUIPEMENTS
Quand l’aviation passe au vert
oins de carburant, moins de CO2 et moins de nuisances sonores. Voilà la règle des « trois moins » que l’industrie aéronautique applique au développement de ses futurs avions. À travers plusieurs programmes européens de recherche, les compagnies aériennes et avionneurs du
m
Vieux Continent se sont engagés dans une course pour concevoir au plus vite des moteurs et des équipements plus respectueux de l’environnement. En point de mire, les objectifs ambitieux fixés par le Conseil consultatif pour la recherche aéronautique en Europe : réduction de 50 % des émissions de CO2, de 50 % du bruit perçu et de 80 % des
émissions d’oxydes d’azote à l’horizon 2020. cc la
prochaine génération de moteurs
Depuis plus de dix ans, les constructeurs travaillent sur le développement de la prochaine génération de turboréacteurs à double flux, qui équipera les avions de ligne à l’horizon 2015. Leur premier
Le moteur PW1000G, de Pratt & Whitney, devrait équiper en 2013 le CSeries de Bombardier, et en 2014 le MRJ de Mitsubishi.
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objectif est d’augmenter l’efficacité propulsive des appareils et donc de diminuer la consommation de carburant. Pour y parvenir, les services R & D concentrent une partie de leurs efforts sur l’amélioration du taux de dilution, considéré comme un indicateur de la performance du moteur. Ce taux définit le ratio entre le flux d’air froid brassé par la soufflante (air secondaire) et le flux d’air qui traverse les parties chaudes du moteur (air primaire). Plus ce ratio sera élevé, plus la réduction de consommation sera importante. « Il est essentiel d’accroître la taille de la soufflante pour renforcer le débit d’air secondaire qui participe activement au phénomène de poussée », explique Éric Bachelet, directeur général adjoint du groupe Safran. Actuellement, le turboréacteur CFM56, qui équipe une proportion importante d’avions civils dans le monde, possède un taux de dilution de cinq pour un. En cours de développement, les prochains moteurs, comme le Leap-X ou le PW1000G, présenteront, eux, des
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Turboréacteur non caréné, ailes intelligentes, système d’optimisation du pilotage… Ces procédés, encore en cours de développement, visent à limiter l’impact environnemental de nos futurs avions de ligne. Une évolution indispensable pour compenser la croissance du transport aérien et ses nuisances.
Prévu pour 2020, le concept Open Rotor, de moteur avec soufflante non carénée, réduirait de 25% la consommation de carburant, mais présenterait au mieux les mêmes nuisances sonores que la génération actuelle.
c Vieux de trente ans, le concept de la soufflante non carénée pourrait représenter la prochaine rupture technologique. Cette motorisation, également appelée Open Rotor, consiste à sortir la soufflante du réacteur et à la doter de deux rangs de pales tournant en sens inverse. En l’absence de carénage, la soufflante pourrait atteindre les 3,5 mètres de diamètre et brasser ainsi des quantités d’air
plus importantes. Pour améliorer davantage l’efficacité propulsive, l’Open Rotor est muni d’un système d’hélices à pas variable, qui oriente les pales en fonction de la phase du vol. Avec ces évolutions technologiques, le taux de dilution est estimé à 40 pour 1. Au sein du programme européen Clean Sky, deux projets d’Open Rotor sont menés parallèlement par Rolls-Royce et par Snecma.
Chacun développe sa propre conception d’hélices « contrarotatives » et réfléchit à la meilleure intégration à l’appareil – probablement à l’arrière du fuselage. D’après les premières simulations réalisées par le motoriste français, cette technologie réduirait la consommation de carburant de plus de 25 % par rapport à un réacteur traditionnel. En revanche, le bruit produit par la soufflante n’est plus étouffé.
ERIC DROUIN / SNECMA
L’économie de carburant rapporte… plus de bruit!
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éQuipements
taux deux fois supérieurs, avoisinant les onze pour un. Développé par CFM International, filiale commune de Snecma (groupe Safran) et de General Electric, le Leap-X devrait remplacer progressivement le précédent modèle, le CFM56. Outre la mise en place d’une soufflante d’un diamètre de 188 cm, au lieu des 150 cm pour les turboréacteurs traditionnels, l’amélioration des performances se fera aussi grâce à une optimisation thermodynamique, une meilleure maîtrise de la conception 3D et l’émergence de matériaux composites. Snecma a ainsi mis au point une aube en composite tissée en 3D et consolidée par le procédé RTM (moulage par injection de résine). D’autres pièces en composite seront également intégrées au carter, au mélangeur, aux turbines du compresseur ou encore à la nacelle du réacteur. «L’utilisation de matériaux composites réduit le poids du moteur de près de 400 kg. Cela facilite aussi la mise en place d’une soufflante plus
grande, forcément plus lourde. Par rapport au CFM56, le LeapX améliorera l’efficacité propulsive d’environ 16 % et diminuera d’autant la consommation de carburant », appuie Éric Bachelet. Certifié normalement pour 2016, ce turboréacteur est déjà sélectionné par Airbus, ainsi que par l’avionneur chinois Comac, pour les avions monocouloirs A320 Néo et C919. cc Des
ailes et un pilotage sur mesure
Pour son futur appareil, Airbus est également intéressé par un autre moteur conçu par le constructeur américain Pratt&Whitney. Baptisée Pure Power PW1000G, cette nouvelle gamme de turbosoufflante a nécessité plus de 20 ans de développement et plus de 1 milliard de dollars. Réacteur à deux arbres classiques, il se distingue par la présence d’un réducteur de vitesse entre la soufflante et le compresseur à basse pression. Grâce à ce dispositif, la soufflante opère de façon indépen-
dante du reste du moteur. En tournant moins vite que le compresseur, les aubes et turbines voient leur vitesse de rotation optimisée. Ce système aide à la réduction du nombre d’étages dans le réacteur, favorisant l’augmentation du diamètre de la soufflante. Ce système d’engrenages de pointe engendre
ainsi des économies de carburant comprises entre 12 et 15%. Grâce à ses performances, la gamme PW1000G a déjà séduit les avionneurs japonais Mitsubishi et canadien Bombardier qui testeront prochainement cette technologie sur leurs appareils. Outre la motorisation, d’autres
Une invention française en passe de réduire la traînée c Conséquence inévitable
Placé au bout des ailes, le Minix réduirait la traînée induite d’un avion de 8 % jusqu’à une vitesse de Mach 0,8 et augmenterait sa portance de 5,5 %.
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de la portance que l’air exerce sur les ailes d’un avion, l’aérodynamisme de l’appareil est pénalisé par les vortex et la traînée. Pour minimiser ces phénomènes, Christian Hugues, un passionné d’aviation, a conçu un dispositif appelé Minix. Adaptable à toutes sortes d’extrémités de profils d’ailes, cette innovation brevetée, en forme de cylindre à fente hélicoïdale, fluidifie le vortex et réduit la traînée induite. Selon les essais réalisés, le Minix augmenterait la portance de l’avion de 5,5 %, et donc diminuerait la consommation de carburant de près de 6 %. Plus efficace que les winglets traditionnels, cette solution intéresserait de nombreux constructeurs et même la Nasa, qui a invité l’inventeur français à présenter sa trouvaille à Washington.
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éQuipements
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Dassault Aviation vient de tester en vol un Falcon 7X équipé d’ailes à profil laminaire. Ce sera le tour de l’Airbus A340-300 en 2014.
également dans l’initiative SFWA, Dassault Aviation a, pour sa part, réalisé début 2011 un vol d’essai sur un Falcon 7X afin d’évaluer les gains potentiels d’une aile à profil laminaire. Selon les premières études, ce type de voilure réduirait la traînée de 5 à 10 % et un volume équivalent de carburant. En 2014, cette technologie sera testée à bord d’un A340300, spécialement modifié. La mise en œuvre de toutes ces solutions d’avenir ne doit pourtant pas faire oublier la nécessité d’optimiser les trajectoires et conditions de vol. Comme en voiture, pour économiser le maximum de carburant, il faut savoir piloter. Le démonstrateur technologique pistes sont actuellement recher- intégré (DTI) Green Operations chées pour obtenir une aéro- se focalise ainsi sur le dévelopnautique plus propre. Dans le pement du système d’aide au cadre du programme Clean Sky, pilotage. Thalès Avionics met Airbus pilote le projet SFWA au point des technologies de – Aéronef à voilure fixe intelli- navigation pour enrichir le Fligent – qui vise à concevoir d’ici ght management Systems des à 2014 un appareils. Ces démonstrateur « la réduction fonctions émissions technologique. des améliorent le impose le Des systèmes déVeloppement suivi des difféde mesure et des rentes phases des capteurs biocarburants » de vol. Par PhiliPPe Novelli, seront installés exemple, la chercheur à l’Onera sur les ailes trajectoire de pour suivre décollage peut leur comportement pendant les être optimisée en prenant en phases de vol. À terme, les don- compte cinq paramètres : l’altinées collectées seront analysées tude de réduction de la pousen quasi-instantané, afin de sée, un objectif de poussée modifier directement la forme réduite, l’altitude d’accélérade l’aile, notamment les volets tion, un objectif de vitesse de bord de fuite et les becs de réduite et l’altitude en fin de bord d’attaque. «Les ailes acti- procédure. « Ce travail sur la ves adapteront en temps réel phase de décollage pourrait leurs formes en fonction de la aboutir à une diminution de la mesure du flux d’air pour amé- consommation de fioul de 5 à liorer les performances de l’ap- 10% et/ou des nuisances sonopareil en vol», explique Marc res d’environ 5 décibels. Le Fabreguettes, responsable de choix du gain dépendra des projets chez Thales Avionics, priorités de la compagnie qui est un des contributeurs de aérienne, chacun ce sous-programme. Impliqué de ces compromis JUIN 2011ccSPÉCIAL AÉRONAUTIQUE
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éQuipements
retrouvez le premier bilan de l’Onera sur l’introduction des biocarburants dans l’aéronautique.
étant de toute façon meilleur que l’existant », détaille Marc Fabreguettes. cc lutte
contre la pollution sonore
L’optimisation de la trajectoire et l’introduction de nouvelle motorisation réduisent également les nuisances sonores. L’augmentation du taux de dilution, qui conduit à éjecter un débit d’air plus grand à plus faible vitesse, contribue à réduire fortement le bruit émis. Les gaz d’échappement étant davantage noyés dans le flux d’air secondaire. Par ailleurs, l’incorporation de matériaux absorbant les ondes acoustiques, notamment dans la nacelle, limite la propagation du bruit. Le moteur de
CFM offrirait ainsi une réduction des émissions sonores de l’ordre de 10 à 15 EPNDB, l’unité de base pour la certification des avions à réaction. En réduisant la vitesse de sa soufflante, le PW1000G diminue de près de 50% le bruit du moteur. Avec
cette génération de turboréacteur, le bruit de jet est la source de nuisance la plus prépondérante d’un avion au décollage (120 dB). «Plusieurs projets de recherche, tels que Rebecca ou Oscar, sont menés par un grand nombre d’acteurs de l’aéronau-
tique pour réduire cette nuisance sans modification des performances du système propulsif. Parmi les solutions évaluées, la technologie des microjets offrirait le plus grand potentiel de réduction », avance Olivier Saout, responsable de la propul-
EADS / MARQUARDT
EADS a réussi en 2010 un vol d’essai en utilisant un avion léger, le Diamond DA42NG, propulsé par des moteurs consommant 100% de biocarburant dérivé d’algues de culture.
éQuipements
ccun programme européen vert
sion à l’Onera. En sortie de tuyère, la mise en place de microjets diminue de façon significative l’intensité des turbulences en optimisant le mélange des jets entre eux et avec l’air ambiant. Pour l’instant, ces technologies conduisent à une baisse de 2 dB, extrapolée sur la base d’essais, mais la cible des 5 dB semble envisageable. Plus novatrice, une solution dite active est aussi développée. Elle consiste à l’injection d’un son identique en opposition de phase avec le bruit. cc Des
biocarburants adaptés aux avions
Au niveau de l’émission de gaz à effet de serre (GES), la conception de nouveaux moteurs avec une meilleure efficacité propulsive est également nécessaire pour se rapprocher au maximum des objectifs fixés. À partir de 2020, le secteur aérien veut continuer à croître sans augmenter ses rejets de CO2. Les économies de carburant d’environ 15% réalisées par le Leap-X ou le PW1000G diminuent ainsi d’autant les émissions de GES, mais ce résultat semble insuffisant. Avec 4% de croissance par an, le trafic aérien focalise ainsi son attention sur l’usage de biocarburants. Faute d’atteindre une neutralité parfaite sur l’ensemble du cycle de vie, ils assureraient un gain important en matière de rejets. Pour éviter le changement de motorisation sur l’ensemble des flottes des compagnies aériennes, difficilement réalisable, l’aviation travaille sur la production de biocarburants adaptés aux systèmes actuels, dits de drop-in. «Les différents biocarburants devront respecter deux exigences techniques pour être compatibles: avoir un contenu énergétique proche de celui du kérosène et rester sous forme
Lancé en 2008 et doté d’un budget de 1,6 milliard d’euros, le programme européen Clean Sky vise à se rapprocher des objectifs fixés par le Conseil consultatif pour la recherche aéronautique. Ce partenariat entre les secteurs public et privé favorise l’émergence et la validation des meilleurs procédés. Ce programme prévoit la mise en place de démonstrateurs de technologies intégrées d’ici à 2014 dans six domaines: c les aéronefs intelligents à voilure fixe c les avions de transport régional verts c les giravions verts (décollage vertical) c les systèmes pour des opérations respectueuses de l’environnement c les moteurs durables et verts c l’écoconception
liquide à –47°C», précise Philippe Novelli, chercheur à l’Onera. Deux voies de production sont actuellement des candidates sérieuses pour une utilisation à court terme. Déjà approuvée, la première, appelée BTL – pour Biomass To Liquid – transforme toute matière organique en un carburant liquide. La seconde est l’hydrotraitement des huiles végétales qui consiste à éliminer l’oxygène contenu dans ces huiles pour les transformer en hydrocarbures. Mais ces techniques et les nouveaux procédés de production doivent être développés pour améliorer la rentabilité économique et augmenter les rendements. La question des ressources de biomasse se pose également. Les algues pourraient donc constituer une filière intéressante, notamment en préservant les terres agraires et de qualité. cm ccclément cygler ccygler@industrie-technologies.com
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l’avion électrique vu par safran en vidéo.
ccDiDier GODArt direCteur du déVelOppeMent éleCtriQue CHeZ sAFrAn
L’électronique de puissance, clé de l’électrification Depuis le Boeing 787, les actionneurs hydrauliques laissent de plus en plus la place à des systèmes électriques. À la clé, des gains sensibles de performance, de poids et d’exploitation. Jusqu’où l’électrification des avions de ligne pourra-t-elle aller ? Quels défis technologiques devra-t-elle relever ? le point avec l’un des spécialistes de la question en France.
de l’énergie principale fournie par les moteurs pour assurer la propulsion, de nombreux circuits et systèmes dans les avions de ligne nécessitent une alimentation spécifique. Elle se présente sous forme de réseaux auxiliaires de quatre sortes : mécanique, pour la pompe à carburant ; hydraulique, pour le train d’atterrissage, les freins
et les inverseurs de poussée ; pneumatique, pour le démarrage moteur, le dégivrage des ailes et des nacelles, la pressurisation cabine. À cela s’ajoute l’électrique et l’informatique, pour l’avionique et les systèmes cabine. L’architecture de ces différents circuits a peu évolué pendant la seconde moitié du XXe siècle, jusqu’en 1984, lorsqu’Airbus a introduit les premières commandes de vol électriques. C’est au début
des années 2000 que les ingénieurs ont commencé à favoriser les systèmes électriques. Sur l’Airbus A380, trois circuits hydrauliques traditionnels ont été remplacés par des circuits totalement électriques dédiés à la redondance des commandes de vol. Quels avantages cette électrification apporte-t-elle ?
La suppression complète de l’hydraulique à bord d’un
Les systèmes électriques de l’avion à l’essai c Toutes
les technologies mises au point par Safran et ses sociétés sont validées sur un banc d’essai au sol, baptisé copper Bird (littéralement « oiseau de cuivre »). cette plate-forme de test du comportement des systèmes et sous-systèmes électriques a été développée en 2002 dans le cadre du programme européen « power optimised Aircraft ». À ce titre, la plate-forme joue un rôle central au sein du programme Amperes, dont l’objectif est d’élaborer les systèmes La plate-forme Copper Bird a été mise au point par Safran pour tester le comportement de nouveaux qui équiperont les prochaines systèmes électriques destinés aux avions. générations d’avions électriques.
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avion apporte des gains importants. Le système le plus demandeur de redondance est celui des commandes de vol. La suppression du circuit hydraulique entraîne celle des pompes hydrauliques et de toute la tuyauterie associée. Les allégements sont très importants et se chiffrent en centaines de kilogrammes. Sans mentionner les opérations de maintenance largement facilitées et une disponibilité de l’avion améliorée, puisqu’il n’est plus question d’interventions longues et lourdes sur l’hydraulique. Quels sont les dispositifs électriques qui équipent les avions de nouvelle génération, comme le Boeing 787?
Le 787 est le premier avion que l’on peut qualifier d’électrique au niveau des systèmes. En premier figure la pressurisation cabine. Pour le dégivrage de la voilure, l’air chaud n’est plus prélevé sur les moteurs mais il est remplacé par des tapis chauffants disposés sur les bords d’attaque. La troisième grosse charge importante se situe au niveau du démarrage moteur,
D.R. D.R.
Qu’entend-on par « électrification » des avions ? Didier Godart : En complément
éQuipements
ccson parcours
Ingénieur des Arts et Métiers et de Supélec, Didier Godard détient un Master of Sciences de Stanford University. Il a effectué toute sa carrière chez Safran. Après avoir dirigé le département drones de Sagem, il a pris en 2005 la direction des affaires internationales, puis de la recherche et de la technologie de Safran. En 2008, il devient vice-président du groupe, en charge du développement de l’avion électrique.
ques de puissance. En perspective, un allégement sensible à puissance donnée. Par rapport aux électroniques de puissance de première génération, on vise un gain de poids d’un facteur 4 à 8.
D.R. T. GoGny poUR InDUSTRIE ET TEchnoloGIES
Est-ce que cela signifie que l’on va abandonner définitivement l’hydraulique sur les avions de ligne ?
avec un démarreur électrique. S’ajoutent également les freins. La consommation de la pressurisation cabine est de l’ordre de 300 kW, les dégivreurs absorbent de 150 à 200 kW, tandis que le démarrage moteur, qui ne fonctionne qu’une minute, nécessite une centaine de kilowatts. Le Boeing 787 a également ouvert la voie pour le partage de l’électronique de puissance entre les fonctions démarrage moteur et pressurisation cabine. C’est donc la future évolution dans le domaine de l’électrification des avions?
C’est une clé des futures architectures, car l’électrique
a des tas d’avantages mais aussi de petits inconvénients. Pour transformer l’électricité en quelque chose d’utile, il faut une électronique de puissance pour la répartition des charges. Boeing a été le premier à faire de la sorte, en installant une électronique de puissance qui pilote le démarrage moteur, après quoi elle compresse l’air pour la pressurisation de la cabine. Actuellement, nous travaillons très activement dans ce domaine, car les applications sont nombreuses au niveau du train d’atterrissage, du green taxi (roulage au sol), des commandes de vol… Nous sommes en pleine course à la densification de ces électroni-
Aujourd’hui, paradoxalement, pour passer toutes les commandes de vol en électrique et supprimer l’hydraulique, la dernière étape à franchir est le train d’atterrissage. Car son activation est hydraulique et elle dimensionne les circuits de l’appareil. Si on veut passer toutes les commandes de vol en électrique, il faudra donc passer à l’énergie électrique sur le train d’atterrissage. Jusqu’alors, l’électrification des avions n’a concerné que les systèmes non propulsifs. Peut-on envisager une électrification des moteurs?
La motorisation électrique n’est pas pour maintenant, la
puissance d’un turboréacteur tel qu’un CFM-56 de CFM International, société commune à Snecma et General Electric, est de l’ordre de 25 MW. Il y a la solution de l’hydrogène, qui pourrait entraîner à moyen terme l’arrivée des piles à combustible dans les avions, non pas pour générer de la propulsion mais de l’électricité. Sur les avions de ligne, les piles à combustible arriveront peut-être à la fin de cette décennie pour remplacer le démarrage du moteur, avec des puissances encore assez modestes. L’alimentation de ces systèmes électriques se fait actuellement par les moteurs. Est-ce qu’il est probable que ces derniers soient un jour voués uniquement à un rôle propulsif?
Il n’est pas dit à terme qu’il y ait une séparation entre l’énergie propulsive et non propulsive. L’énergie non propulsive est tributaire du régime moteur. Des développements sont en cours pour cantonner les moteurs dans leur rôle uniquement propulsif, ce qui permettrait d’avoir une certaine souplesse dans la définition des architectures d’avion. Mais le kérosène restera encore pour longtemps la source de base pour alimenter les systèmes en électricité. Sur le Boeing 787, les générateurs développent environ 250 kW, ils sont au nombre de 4, ce qui fait 1 MW de puissance disponible, ce qui est déjà important. cm ccpropos recueillis par antony angrand redaction@industrie-technologies.com
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Vidéo : les systèmes de freinage et d’atterrissage signés safran.
Un train électrique Cachés lorsque l’appareil vole, les trains d’atterrissage n’en demeurent pas moins une préoccupation majeure des avionneurs. Les fabricants cherchent encore et toujours à en diminuer le poids et les frais de maintenance, sans faire la moindre concession sur la résistance. Pour Messier-Bugatti-Dowty, le leader mondial sur les fonctions d’atterrissage, trois avancées gagneront le tarmac dans les cinq ans. cccharles Foucault cfoucault@industrie-technologies.com
Câbles d’alimentation
roues motorisées cc Pour rouler au sol (manœuvre de « taxiage »), les avions utilisent les mêmes moteurs que pour voler. Sur la piste, ces turboréacteurs extrêmement puissants sont contrôlés au frein par les pilotes. Loin de leur point de fonctionnement idéal, ils consomment énormément. L’avenir est donc aux moteurs électriques et autonomes intégrés dans les roues des avions. Les défis à relever sont nombreux : espace restreint, vibrations et gradients de température très importants… Les ingénieurs R&D sont en quête du système à la plus haute densité de travail possible (ratio capacité énergétique/masse). Du moteur brushless au développement de dispositifs encore inexistants, aucune piste n’est écartée. L’intelligence embarquée nécessaire à la commande et au contrôle de tels actionneurs est aussi à l’étude.
Moteurs électriques
c LES VOLS COURTS COURRIERS SONT LES PLUS CONCERNÉS PAR LES MOTEURS ÉLECTRIQUES INTÉGRÉS AUX ROUES, CAR LE TEMPS PASSÉ AU SOL EST PLUS IMPORTANT. Prévision de premier vol commercial : 2015 ou 2016, sur l’A320 Neo Moteur électrique
freins plug and plaY
Vérin électromécanique
cc La mise en action des disques de freins sur un avion est assurée par des pistons hydrauliques. Avec les freins électriques, ces pistons sont remplacés par des actionneurs électromécaniques. Des câbles se substituent au circuit hydraulique. Ce système simplifie la maintenance : pas de purge du circuit. Le calculateur qui dirige les freins peut compenser automatiquement la défaillance d’un actionneur en jouant sur les autres. La seule difficulté concerne la masse. L’électronique et les câbles sont plus lourds que les équipements hydrauliques. Le passage de l’analogique au numérique, réduisant la quantité de signaux à envoyer, constitue une première réponse à ce problème.
Disques carbone rotor Disques carbone stator
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c CETTE AVANCÉE A VOCATION À INTÉGRER TOUT TYPE D’AÉRONEF. Prévision de premiers vols commerciaux: 2011 sur Boeing 787; 2013 sur Bombardier Cseries
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Contrefiches en composite
contrefiches allégées cc Lorsque le train d’atterrissage est sorti, une ou deux contrefiches positionnées en « V » et en appui sur la structure de l’appareil le maintiennent en position déployée. Ces deux bras luttent contre les efforts subis par le train dans les virages, au cours des manœuvres de « taxiage » et en cas d’atterrissage critique. Sur le Boeing 787, les contrefiches sont constituées de deux pièces en composite (matrice organique à renfort carbone) leur permettant de se plier. Un métier à tisser a été spécialement conçu afin d’entrelacer la fibre de carbone dans les trois dimensions et non plus seulement par couches superposées collées. Chaque fil est positionné au bon endroit avec la bonne orientation pour résister de manière optimale à la contrainte locale. Les contrefiches en composite pèsent 20 % moins lourd que les bras classiques sans souffrir la moindre perte de rigidité. c LES CONTREFICHES EN COMPOSITE ÉQUIPERONT SURTOUT LES APPAREILS LONGS COURRIERS. Prévision de premier vol commercial : 2011, sur Boeing 787
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SYSTÈMES EMBARQUÉS
Un cockpit tout numérique Partie visible de l’avionique informatisée, les écrans LCD qui ornent les cockpits affichent l’ensemble des données liées au vol et au fonctionnement de l’avion commercial moderne. Ces informations, relayées sous forme vidéographique, offrent une lisibilité parfaite. Pilote et copilote voient par ailleurs leur tâche allégée par de nombreux automatismes.
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communauté des pilotes et les compagnies clientes. De fait, les six écrans LCD rangés en « T » du cockpit de l’Airbus A350, rappellent la configuration des modèles antérieurs, depuis l’A320. Cette filiation facilite la formation des pilotes sur toute la gamme. Une idée reprise depuis par les ingénieurs de Boeing. cc Gérer
le vol
Devant chaque pilote, l’écran principal intègre dans une même image les principales informations, dont l’attitude, l’altitude et les vitesses relatives. Fournies par une série de capteurs extérieurs (anémoLa centrale inertielle à gyrolaser tri-axe (Adiru) de Thales permet de mettre en corrélation les paramètres de vol et les données GPS.
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mètre, altimètre, variomètre, etc.), ces mesures apparaissent sous forme graphique, soit seuls sur l’écran soit en surimpression sur une image. Les symboles peuvent ainsi figurer sur une carte en relief de la région survolée, générée par une base de données. Visuellement mieux informés, les pilotes ont par ailleurs l’assurance d’une supervision permanente par le système de gestion de vol. Ce dernier déclenchera des alertes clignotantes et vocales si l’aéronef transgresse les lois de pilotage préétablies. La météo peut malgré tout affecter la fiabilité de certains instruments, comme les sondes Pitot mises en cause dans l’accident de l’Airbus A330 Rio-Paris d’Air-France. Elles donnent la vitesse de l’air grâce à une mesure différentielle de pression entre un tube ouvert dans l’axe d’avancement de l’avion et un autre, perpendiculaire. Pour les remplacer, « les ingénieurs travaillent sur l’anémomètre laser à effet doppler. Il mesure la vitesse de déplacement des particules dans l’air, commente Jacques Rosay. Mais il y a encore du travail. Ce n’est
pour l’instant pas très efficace à l’altitude où volent les avions grandes lignes, du fait du manque de particules ». cc Garder
le cap
À côté de l’afficheur principal, les pilotes disposent d’un écran de navigation et du système de gestion de vol (dit FMS pour Flight Management System) qui les aident à tracer leur route. Le FMS est un calculateur couplé aux centrales inertielles et aux récepteurs GPS. Il reçoit, avant le départ, les instructions du plan de vol dont il va ensuite afficher graphiquement la progression. Il est aussi en relation avec le pilote automatique, utilisé durant la majeure partie du parcours. « Les systèmes les plus évolués prennent en charge l’avion, de la passerelle d’embarquement à celle du débarquement », résume Gil Michelin, directeur de l’avionique civile chez Thales. Comme pour les indicateurs de vol, les données de navigation (cap, vitesse au sol, identification des radiobalises, etc.) figurent seules à l’écran ou se superposent à une image météo ou
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ini les compteurs à aiguille, voyants et autres interrupteurs qui tapissaient la planche de bord des Caravelle et autres Boeing 707. Le cockpit ressemble aujourd’hui à une régie vidéo, avec « toutes les indications fusionnées et représentées sur seulement quelques écrans disposés devant les pilotes », énonce Jacques Rosay, chef pilote d’essai chez Airbus. Si le symbole utilisé est défini par les organismes réglementaires, la disposition des panneaux à cristaux liquides est décidée par l’avionneur, en accord avec la
Le collimateur tête haute (en haut à gauche) offre aux pilotes du Falcon 7X une vision synthétique 3D de l’environnement extérieur comme « en plein jour ».
c Fruit
de l’expérience militaire, sur Mirage et Rafale, le cockpit numérique Easy de Dassault s’est montré précurseur. Il équipe tous les jets d’affaires de la gamme Falcon depuis 2003. « L’ergonomie de l’interface homme-machine est recentrée autour des tâches essentielles de pilotage, du travail en équipe et de la sécurité », résume Vadim Feldzer, porte-parole
de la division Falcon. La planche de bord comprend quatre écrans multifonctions, disposés en « T ». Les informations de vol s’affichent sous les yeux de chaque pilote et les données stratégiques (plan de vol, suivi des systèmes) sont reportées sur la console centrale. Parmi les dernières fonctions ajoutées, toujours inspirées de l’expérience militaire,
figurent la vision synthétique 3D de l’environnement extérieur « comme en plein jour », et la projection d’images infrarouges frontales dans le collimateur tête haute. La modularité d’Easy autorise la mise à jour de tous les avions équipés – 450 à ce jour –, comme par exemple la réception des données GPS Egnos dans le système de navigation.
DASSAULT FALCON
Dans ses Falcon, pilotage très assisté
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sYstÈmes embarQués
Sesar (Single European Sky Air traffic management Research) est le volet technologique du programme Ciel unique européen. Il s’agit d’uniformiser la gestion du trafic aérien au niveau communautaire, dans l’air comme au sol. L’augmentation de la capacité de transit, l’amélioration de l’efficacité globale, et l’accroissement du niveau de sécurité d’un facteur dix sont en jeu. Le tout alors que le trafic devrait doubler dans les vingt ans à venir. La diminution de l’impact de l’activité aérienne sur l’environnement est également au menu. NextGen (Next Generation Air Transportation System) est l’équivalent américain de Sesar.
ccPhiliPPe PriOUZeAU responsable De projet sesar pour thales avionics
« l’interaction s’accroît entre cockpit et tour de contrôle » «Le cockpit numérique donne aux pilotes les informations pour contrôler l’avion, et les moyens de communiquer avec le contrôle aérien. L’interaction entre cockpit et tour de contrôle concerne notamment le système de gestion du vol. Il optimise la trajectoire en fonction des contraintes de route, de maîtrise énergétique et des horaires de décollage et d’atterrissage souhaités. Dans le cadre du programme Sesar, Thales développe de nouvelles fonctionnalités, tant côté sol que côté bord : la transmission des données de trajectoire 4D (positions dans l’espace et dans le temps) des avions au contrôle aérien pour mutualiser les situations et optimiser les flux de trafic. Une vision globale qui permettra des trajectoires plus directes, entraînant gains de temps, économies de carburant et améliorations du niveau de sécurité. »
une carte numérique. L’enrichissement de la situation de l’avion par image de synthèse et la vision dite augmentée (par caméra infrarouge, par projection tête haute), inspirés des dispositifs militaires, trouvent de plus en plus leur place dans les cockpits civils. Les pilotes ont une certaine latitude dans leur choix et disposent de claviers et de boules de commande (trackball) pour modifier l’affichage, notam-
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ment sur l’écran multifonction situé sur la console centrale, entre leurs sièges. Les redondances de ces outils informatiques apportent au cockpit un haut niveau d’autocontrôle de l’enveloppe de vol qui définit les limites que l’avion ne peut pas dépasser. D’autres dispositifs veillent sur la zone dans laquelle il évolue. Le système anticollision détecte la balise d’un avion arrivant en face et sug-
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missions Astrium Services (EADS) et le canadien Star Navigation Systems travaillent sur un nouveau système satellitaire qui contribuera à la mutualisation des données dans une même zone aérienne, comme le prévoit le programme européen Sesar (Single European Sky ATM Research). « Les antennes satellite servent à la fois aux communications de l’équipage et cc Maintenir un contact aux services destinés aux paspermanent sagers, explique Gil Michelin, Autonomes pour gérer leur chez Thales. Ces deux types de voyage, les pilotes doivent besoin vont croissant et de cependant être en contact nouvelles bandes de fréquenpermanent avec le contrôle ces devront bientôt être utiliaérien et les avisées. Cela implions volant dans le que de multiplier «les antennes même secteur. Ils satellite les moyens utilisent pour serVent À la d’émission/récepcela plusieurs communication tion ou de dispol’éQuipage m o d e s r a d i o : de ser d’équipecomme VHF, UHF (terres- aux passagers» ments à large tre) et bande L GIL MICHELIN, bande de fréquenThales ces. » À ce propos, (satellite). Dernièrement, la messale remplacement gerie écrite a fait des antennes son apparition, via l’écran et mobiles sous radome par des le clavier intégré au milieu de réseaux de dipôles noyés dans la planche de bord. « La radio la « peau » en composite des est gérée par les pilotes depuis avions est à l’étude. longtemps, indique Jacques Rosay. Elle se cale automati- cc Surveiller l’avion via quement sur le mode le plus un écran spécifique approprié, en fonction de la Le cockpit numérique a égaleposition géographique de ment facilité le contact entre l’avion. La messagerie écrite les pilotes et les actionneurs est devenue primordiale car de l’appareil. Les moteurs, les elle évite les incompréhen- équipements de production sions. » Les transmissions de d’énergie ainsi que tous les données jouent aussi un rôle systèmes et servitudes de important. Elles envoient l’avion sont surveillés via un automatiquement à la main- écran spécifique sur lequel tenance au sol des rapports s’affichent des diagrammes sur le comportement de dynamiques et des indicateurs l’avion et de ses composants chiffrés. « Les circuits informaactifs. Demain, ce seront des tiques de commandes sont informations sur son parcours physiquement dissociés de et sa position à destination du ceux utilisés pour le contrôle », contrôle aérien qu’elles relaie- précise Olivier Charrier, ingéront en temps réel. Pour assu- nieur chez Wind rer simultanément ces deux River Systems, édigère vocalement une manœuvre d’évitement contraire à celle de l’autre aéronef. Un autre avertit du risque de collision avec le relief en comparant relevés d’altitude GPS et base de données géographique. Le FMS d’un A350 pourra même calculer immédiatement une route alternative et une vitesse de descente en cas d’arrêt d’un des moteurs.
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ccrenForcer la sécurité d’un Facteur 10
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cc Adapter
l’architecture du réseau
L’automatisation de l’avion dont le cockpit numérique est le visage n’a pu se faire sans la mise en place d’un réseau informatique tentaculaire. Quand les pilotes commandent une action sur les parties mobiles de la voilure ou tout autre composant actif, ce sont désormais des actionneurs intelligents à commandes électriques qui l’exécutent. Des commandes qui restent
La boussole indique le Nord magnétique par rapport à l’avion. Les symboles qui l’entourent correspondent à l’orientation par rapport à la piste (CRS), au sélecteur de route (HDG), à la distance aux radiobalises qui jalonnent les voies aériennes les plus proches (VOR)…
sous la supervision de calculateurs vérifiant que les ordres ne contreviennent pas aux limitations imposées par le constructeur, ainsi qu’au plan et conditions de vol du moment. Le tout dépend d’un
Asservissement numérique L’actionneur électromécanique développé par Sagem et Airbus a joué le rôle de commande principal d’aileron pour un vol d’essai sur l’A320, en janvier dernier. Ce type de moteur, asservi numériquement, animera demain les ailes des avions. Il remplacera les actuels actionneurs, dont la motorisation électrique entraîne des vérins hydrauliques.
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Capture d’un écran intégrant dans une même image le profil 3D du terrain survolé et les paramètres nécessaires pour contrôler vol et navigation, notamment par temps bouché.
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puissant maillage informatique et d’une avionique modulaire intégrée (IMA) : des ordinateurs temps réel (20 sur l’A350, 46 sur l’A380) gèrent simultanément plusieurs applications grâce à une archi-
tecture comprenant différents niveaux de sécurité indépendants (architecture dite MILS pour Multiple Independant Levels of Security). « Les écrans du cockpit affichent graphiquement des données provenant de calculateurs organisés en réseau, installés dans le cockpit ou intégrés aux organes de commandes », résume Olivier Charrier. cc Alléger
la documentation
Ainsi débarrassés des tâches fastidieuses pour se concentrer sur l’essentiel, les pilotes ne s’encombrent plus non plus de lourdes sacoches pleines de documentation sur l’engin qu’ils ont à diriger. Place à l’Electronic Flight Bag (EFB), équipement standard chez Boeing comme chez Airbus. Il
HONEYWELL ; D.R.
teur américain de logiciels embarqués et mobiles. Au-delà du monitoring depuis le poste de pilotage, beaucoup d’équipements s’autorégulent. Les moteurs sont scrutés en permanence par leurs propres calculateurs Fadec (Full Authority Digital Engine Control) qui supervisent en temps réel les paramètres techniques (température, pression d’huile et de kérosène, alternateur, etc.) et adaptent la propulsion aux conditions du vol. Ce fonctionnement, largement automatisé, relaye et encadre, les ordres des pilotes envoyés par les manettes situées entre les sièges.
L’indicateur de vitesse de l’avion par rapport à l’air est une information essentielle pour le pilotage : elle détermine la portance des ailes et donc la capacité à voler (ici 184 nœuds, soit 340,7 km/h).
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L’indicateur d’attitude donne les informations de roulis, de tangage et d’orientation de l’avion (symbolisé au centre par la cible verte) par rapport à l’horizon. L’indicateur d’altitude de l’avion au-dessus du niveau de la mer est associé, à l’indicateur de vitesse verticale, à sa droite. L’engin vole ici à 4 740 feet (pieds), soit 1 445 mètres d’altitude.
Position de l’avion à la verticale du terrain qu’il survole. L’image de synthèse du terrain survolé est générée par la base de données embarquée et périodiquement enrichie d’informations fournies par la communauté des utilisateurs.
dispose toujours d’écrans propres mais est aussi compatible avec des ordinateurs standards. L’EFB regroupe les informations techniques de l’avion, des instructions de la compagnie exploitante et des documents sur les chartes de navigation produits par des éditeurs spécialisés, comme Jeppesen. « Cette littérature, souvent mise à jour, est créée sur des logiciels grand public, commente Jacques Rosay. Elle est isolée de l’informatique embarquée dont elle reçoit tout de même des informations. » L’Airbus A350 reprend le système d’information à bord de l’A380, intégré au cockpit. Il dispose en plus de stations d’accueil pour les ordinateurs portables. Aux États-Unis, la Federal Aviation Administration a même auto-
risé l’iPad d’Apple comme support d’EFB dans l’aviation d’affaires et de tourisme. Le cockpit numérique va de plus en plus loin. Les industriels du secteur l’imaginent déjà demain, présentant des interactions plus poussées entre pilotes et écrans. Des interfaces tactiles ou gestuelles, de l’affichage 3D, de la reconnaissance vocale et biométrique devraient y faire leur entrée. Dans le cadre du programme européen Odicis (One Display for a Cockpit Interactive solution), Thales imagine une surface unique sur laquelle seront projetées de multiples fenêtres vidéo, en plus de l’affichage tête haute. Son ergonomie s’inspirera de l’électronique grand public, des biosenseurs et de l’intelligence artificielle. Des systèmes décisionnels prédictifs, qui analysent les situations et proposent des scénarios d’action, ou de concertation en réseau, avec le contrôle aérien, sont également dans les tuyaux. À la Nasa, le programme Integrated Intelligent Flight Deck mobilise industriels et universitaires sur différentes thématiques : des systèmes infographiques enrichis, au process d’automation, de la hiérarchisation des flux de données à l’avionique intelligente capables d’analyser les risques. Potentiellement, le cockpit à pilote unique est déjà réalisable. L’avion-drone n’est plus une utopie affirmait le futurologue Robin Mannings, dans une étude prospective d’Airbus. Il précisait toutefois que cela concernait plutôt le fret aérien « si l’on veut garder la confiance des passagers ». cm ccphilippe pélaprat redaction@industrie-technologies.com
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CAS D’ENTREPRISE MUltiMÉDiA
« Allô, devine d’où je t’appelle » On ne s’ennuiera plus pendant des heures dans les avions. Virgin Atlantic équipe sa flotte de longs courriers d’un système de divertissement et de communication de dernière génération. Pas uniquement par philanthropie. La compagnie répond ainsi à une demande de sa clientèle d’affaires, source importante de revenus. ccLE PROBLÈME
FIDÉLISER LA CLIENTÈLE
Pour contrer la concurrence, les compagnies aériennes améliorent le service à bord dans des contraintes de coûts toujours plus serrées. Au-delà du confort et de la restauration, c’est l’offre audiovisuelle et de communication qui fait la différence. Il faut proposer le plus large éventail de programmes – gage de tranquillité dans la cabine – ainsi que des services de communication avec le sol, pour fidéliser la clientèle et induire de nouvelles opportunités commerciales.
les Airbus et des terminaisons en paires de cuivre) reliant les serveurs vidéo aux écrans des sièges. Ce réseau, de type ADSL, délivre des contenus audiovi-
ccLA SOLUTION
VIRGIN ATLANTIC
UN SYSTÈME MULTIMÉDIA
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Virgin Atlantic a profité d’une commande d’Airbus A330 300, passée en janvier 2010, pour renouveler radicalement son offre de divertissement à bord. Le premier des dix nouveaux avions, livré en avril dernier, est équipé du système eX2 de Panasonic Avionics qui combine la vidéo à la demande avec la messagerie, l’accès à Internet et la téléphonie sur le mobile des passagers. Bientôt installé sur les Boeing 747 en service et les prochains Boeing 787 Dreamliner de Virgin, le dispositif s’appuie sur un câblage mixte (la dorsale optique équipant tous
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ccvirgin atlantic
Créée en 1994 par Richard Branson. 9 000 employés dont 750 pilotes Plus de 5,5 millions de passagers transportés par an Chiffre d’affaires environs 2,5 milliards de livres Flotte 39 avions 13 Boeing B747-400 6 Airbus A340-300 19 Airbus A340-600 1 Airbus A330-300 À venir 9 Airbus A330-300 6 Airbus A380 15 Boeing B787-9
suels. Il s’utilise aussi pour jouer ou « chater » entre passagers. À l’infrastructure filaire s’ajoute une cellule GSM/GPRS. Connectée à l’antenne satellitaire de l’avion, elle relaie les communications vers et depuis le sol via le réseau Inmarsat. Une plateforme dédiée modère a minima la puissance d’émission des téléphones portables et compresse les débits (4Kbits/s par liaison téléphonique) afin d’économiser la bande passante du satellite. Cette technologie signée Aeromobile permet de réelles économies d’équipements, de poids et de consommation énergétique, selon Panasonic. ccLE RÉSULTAT
DES SERVICES CONNECTÉS ATTRACTIFS
«Virgin Atlantic fut la première compagnie à installer des écrans individuels sur chaque siège il Le système eX2 de Panasonic Avionics combine la vidéo à la demande, l’accès Internet et la téléphonie mobile.
y a 20 ans. Cet investissement conforte et augmente notre avance en la matière », se réjouissait en juin dernier, Steve Ridgway, directeur général de la compagnie. Avec cet attirail multimédia, les passagers peuvent annoter et commenter les contenus vidéo, accéder à des fiches de présentation, visionner des interviews d’acteurs ou de réalisateurs, et créer une liste de diffusion pour la durée du vol. Ils peuvent aussi brancher en USB leurs appareils personnels pour jouer avec leurs propres contenus. Dès que l’avion atteint les 3 000 mètres d’altitude, la passerelle téléphonique envoie des messages de bienvenue aux portables allumés d’une part, et les identifiants des passagers aux opérateurs d’autre part. Ceux-ci transfèrent ainsi les appels entrants de leurs clients à bord de l’avion. Le service de téléphonie embarqué supporte les communications voix et messagerie instantanée ainsi que la transmission de données utilisée par les smartphones pour le push mail ou l’accès Internet mobile. D’autres services sont déjà dans les cartons. Panasonic et Aeromobile ont annoncé l’arrivée de l’authentification en ligne des cartes bancaires, la réception d’un bouquet de télévision dédié (infos et sport) ainsi que la mise en œuvre d’un portail Web embarqué, configurable par la compagnie aérienne. cm ccphilippe pélaprat redaction@industrie-technologies.com
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Accédez aux vidéos sur l’utilisation d’egnos dans la navigation aérienne.
Un atterrissage au millimètre Oubliés les systèmes d’atterrissage au sol et leur maintenance coûteuse. Place au système satellitaire Egnos pour une navigation aérienne plus sûre et plus fluide. En mars 2011, la Direction générale de l’aviation civile a donné son feu vert à son utilisation dans les phases d’approche et d’atterrissage. L’aéroport de Pau est le premier à s’en équiper, suivi bientôt par ceux de Marseille, de Clermont-Ferrand et du Bourget. En sept étapes, le fonctionnement du système Egnos. ccridha louKil rloukil@industrie-technologies.com
2. le gps fournit les informations de naVigation
1. l’aVion aJuste sa traJectoire d’approche ccDans la phase d’approche, l’avion doit ajuster sa trajectoire de façon à pouvoir atterrir dans l’axe de la piste avec la bonne vitesse, le bon angle d’inclinaison et la bonne direction. Pour cela, il a besoin d’informations de navigation à la fois fiables et précises. Il en va de la sécurité de l’appareil.
ccLe GPS transmet à l’avion les informations de longitude, latitude, altitude et heure nécessaires à sa navigation. Ces informations sont calculées à partir de signaux reçus au minimum de quatre satellites.
GPS
egnos en chiffres c Egnos (European Geostationary Navigation
Overlay System, ou Système européen de navigation par recouvrement géostationnaire)
34 stations terrestres de référence (Rims) réparties en Europe
ccLes stations terrestres de référence reçoivent leur positionnement GPS à partir d’au moins quatre satellites et transmettent les informations aux centres de calcul et de contrôle.
4 centres de calcul et de contrôle (MCC) 6 stations montantes 3 satellites géostationnaires, dont un de secours
La société ESSP, basée à Toulouse, est en charge du bon fonctionnement du système
Rims
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3. les stations terrestres repérées
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Inmarsat
Artemis (Esa)
6. diffusion des correctifs aux mobiles ccLes deux satellites opérationnels d’Egnos (le troisième sert de secours) diffusent les pannes et les correctifs du GPS aux avions et autres mobiles.
7. l’aVion corrige les informations du gps ccLe système Egnos permet de détecter une panne de satellite en six secondes. L’avion écarte ainsi du calcul les satellites en panne et applique les correctifs aux signaux de navigation GPS. Il dispose d’informations fiables et précises au mètre près.
GPS
5. la remontée des correctifs aux satellites egnos ccDes stations au sol remontent aux satellites géostationnaires d’Egnos les pannes et les correctifs à appliquer aux informations fournies par le GPS.
4. le calcul des correctifs de naVigation ccLes centres de calcul comparent les positions connues des stations terrestres de référence à celles fournies par le GPS. Avec un algorithme spécifique, ils détectent les satellites en panne et calculent les correctifs à appliquer aux informations du GPS. Station d’émission
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Centre de calcul
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la maquette numérique remplacera les plans papier. démonstration vidéo.
CONCEPTION
Sous le commandement uniforme du PLM Issus de la gestion des données techniques générées dans les bureaux d’études, les outils de PLM (Product Lifecycle Management) se retrouvent au cœur des processus de décisions chez les constructeurs aéronautiques, les équipementiers et leurs partenaires. Le PLM entre même chez les exploitants des appareils par les services de maintenance avant d’y devenir, là aussi, un outil d’aide à la décision.
ous les acteurs de la filière aéronautique sont d’accord : sans PLM, pas de nouveaux projets possibles. Il est symptomatique de voir qu’Avic et Comac, nouveaux entrants chinois sur le marché de l’aviation commerciale, ont adopté dès 2003 une approche PLM pour développer leurs avions régionaux, avant même d’annoncer leur intention de concurrencer Airbus et Boeing. Le développement d’un avion devient de plus en plus complexe, avec toujours plus de fonctionnalités. Il bénéficie constamment de nouveaux matériaux tels les composites. Tandis que les délais ne font que raccourcir. Le mode de fonctionnement même entre les avionneurs et l’ensemble de la filière évolue fortement, passant d’une sous-traitance en râteau, bien souvent de proximité, à une approche plus pyramidale, avec un nombre limité de partenaires internationaux partageant les risques sur le développement et la fabrication de parties complètes de l’avion. « D’un rôle de sous-traitants capacitaires, certains sont devenus des
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forces de proposition et ont grossi au point d’être capables de travailler simultanément pour plusieurs donneurs d’ordres, qui ne peuvent du coup plus leur imposer leur approche», constate Paul Grenet, viceprésident aéronautique et défense chez PTC. « Une telle évolution, que l’on peut assimiler à un passage de l’artisanat à l’industrie, ne peut se faire qu’en mettant l’accent sur les process et les outils », renchérit de son côté Philippe Herrerias, partenaire du cabinet Vinci Consulting, très présent dans le monde de l’aéronautique. Les avionneurs l’ont bien compris. Ainsi le groupe EADS a mis en place en 2007 le programme Phenix (PLM harmonization for enhanced innovation and
50%
c’est la part de la charge industrielle qu’Airbus va confier
à ses partenaires sur un programme comme l’A350XWB, contre 30% sur les programmes précédents.
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excellence) en vue d’harmoniser les méthodes, les processus et les outils de PLM utilisés par toutes ses divisions. L’objectif étant d’optimiser l’intégration entre les divisions du groupe, mais également de réduire les délais de mise sur le marché de nouveaux produits et d’en améliorer la qualité globale. cc Le
PLM, partie intégrante des projets
Cela s’est traduit en 2008 par des choix d’outils internes – Catia V6 pour la CAO, Windchill pour le PLM –, et de méthodes collaboratives de travail et d’interfaces permettant aux acteurs d’un projet, en interne ou en externe, de collaborer à celui-ci, tout en gardant la maîtrise de leurs propres outils et méthodes de travail. Depuis, Airbus met en place autour de ses projets d’avions une Product Development Team dédiée au PLM, tout comme il en existait jusqu’à présent pour le fuselage, les ailes ou les moteurs. «Cela veut dire que le PLM est devenu un élément incontournable dans le développement d’un nouvel avion et fait partie intégrante du projet. Il doit par
exemple offrir, de manière synchrone avec les jalons du projet avion, un certain nombre de fonctionnalités préétablies », explique Philippe Herrerias. Dassault Aviation fait de même. « Le Falcon 7X, notre premier jet intégralement conçu en numérique, mixait la maquette numérique et certaines applications métier pour gérer les fixations, l’électricité ou la documentation 3D. Notre projet SMS (Super Mid-Size), fera vraiment appel au PLM avec une définition numérique unique utilisable tout au long de la vie de l’appareil par les différents métiers suivant différents points de vue», explique Daniel Beurrier, directeur du PLM Système chez Dassault Aviation. Cette approche PLM n’est pas propre à l’aéronautique mais s’y développe rapidement. « Elle nous permet de modéliser, de fiabiliser, de rendre plus robuste et de reproduire nos processus de développement, avec une qualité constante dans toute la chaîne de valeurs, du donneur d’ordres au plus petit sous-traitant», expose Yannick Fourastier, responsable R & D chez EADS
Pour l’entretien voire pour le maintien en condition opérationnelle, la maquette numérique trouve son plein rendement.
La maquette numérique, de la conception à l’exploitation des applications actuelles de la maquette numérique – Ici celle de l’A380 d’Airbus –, telles que la conception dans le contexte ou les revues de projet, les constructeurs aéronautiques voudraient disposer de nouveaux services. «En interne, ils aimeraient que l’approche PLM, en liaison avec l’ERP, diffuse dans l’ensemble de leurs divisions et devienne, à travers la maquette numérique dont la 3D est facilement intelligible par tous, un outil-support universel d’aide à la décision», explique ainsi Tim Nichols, responsable
de la filière aéronautique et défense chez Siemens PLM Software. Un usage qui devrait aussi s’étendre aux exploitants des appareils. Certains services de maintenance tels ceux de Lufthansa ou Singapore Airlines utilisent la maquette numérique en configuration pour l’entretien de leurs appareils. Mais elle pourrait aussi être au centre du maintien en condition opérationnelle. Certains outils de PLM proposent des fonctionnalités métier comme des processus de traitement des non-conformités de configuration pour la remontée
rapide des anomalies rencontrées, mais aussi des processus de retrofits pour la mise à jour des configurations installées en tenant compte des problèmes d’effectivités et d’interchangeabilités. Grâce aux analyses de faits techniques, le systémier réceptionne les problèmes terrain et peut donner une réponse immédiate aux clients pour assurer un suivi des actions à réaliser et ainsi optimiser les temps de corrections et la visibilité sur les informations vitales de maintenance et de réparation. PTC
cAu-delà
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conception
Catia Systems va au-delà de la maquette de poids chez les avionneurs, elle reste très axée sur la modélisation géométrique des composants. Or, de multiples technologies sont embarquées dans les Catia Systems permet d’étudier avions (électricité, hydraulique, électronique, logiciel…) le comportement en vol d’un avion qui influent voire pilotent le comportement de l’appareil. qui n’existe pas encore. On parle alors de systèmes complexes. Catia Systems permet d’avoir une approche globale de type RFLP (Requirements, Functional, Logical & Physical Design). Il est possible de piloter le comportement de la maquette numérique en intégrant, par exemple entre les organes de commande et les actionneurs virtuels, des systèmes informatiques, virtuels ou réels, disposant du code qui sera embarqué dans l’avion. On étudie ainsi le comportement en vol d’un avion qui n’existe pas encore.
Innovation Works. C’est bien nance des principaux acteurs de l’ensemble de la filière qui est la filière aéronautique, capables concerné, mais les besoins et les d’interagir avec les outils de moyens ne sont pas les mêmes leurs donneurs d’ordres, ainsi pour tous les acteurs. Certains, que des composants méthodoimportants (Airbus, Dassault logiques issus de l’expérience Aviation, EADS, Safran et Tha- acquise par les grands acteurs les), se sont réunis au sein de – sécurité, modélisation des proBoostAeroSpace dont l’objectif cess, formats d’échange –, déjà est de créer une plate-forme de présents dans Phenix et Booscollaboration permettant aux tAeroSpace». L’objectif étant, à partenaires de rangs 2 et 3 de travers ces trois étages du PLM, participer facilement aux pro- de permettre à toute la filière de jets. Les échanges y sont gérés collaborer plus efficacement et sécurisés, tandis que des ser- autour des projets, et notamvices complémentaires sont ment aux PME d’adopter plus proposés – e-meeting, web- rapidement cette approche. conferences, « Cette unifisupply-chain… « il faut fédérer cation de la nos métiers Enfin, troisième autour d’une démarche de étage de la fusée base de données développement PLM, le projet uniQue offrant qu’impose le Symphony serait de multiples PLM est très points de Vue. » a n n o n c é au importante. En DANIEL BEURRIER, salon du Bourget travaillant Dassault Aviation ce mois-ci. autour des «Il s’agit de difmêmes règles du fuser vers les PME sous-traitan- jeu, elle va limiter les “pertes tes l’expérience acquise par les par effet Joule ’’ que nous avionneurs, leurs partenaires et connaissions jusqu’à mainteles principaux équipemen- nant», estime Yannick Fourastiers », explique François Tri- tier. Et d’insister: «Il ne s’agit en bouillois, président de la plate- aucun cas de “raboter’’ les sousforme collaborative Pi3C, traitants, ou de les spolier de porteuse de ce projet en cours leurs savoir-faire. Au contraire, de finalisation. Et de dévoiler cela devrait les aider à particique Pi3C va leur proposer «une per aux projets basés sur ces plate-forme collaborative dispo- approches PLM et à mieux maîsant d’outils PLM en prove- triser leurs chaînes de coûts.»
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Les constructeurs aéronautiques voudraient offrir de nouveaux services à leurs clients dans l’exploitation quotidienne des appareils, grâce à cette approche numérique. « Une envie qui leur est venue en constatant que les motoristes réalisent 70 % de leur chiffre d’affaires en service autour des moteurs qu’ils ont vendus. Ce qui est loin d’être le cas chez eux », constate Max Fouache, responsable aéronautique et défense chez IBM France. cc Vers
de nouveaux services
Les données existent dans le PLM. Il suffit de savoir les extraire et les réutiliser. C’est ce que fait Sikorsky, grâce au logiciel d’exploration de données SPSS Analysis d’IBM. « C’est aussi ce que nous proposons à nos clients depuis l’acquisition d’Exalead à la mi-2010», explique Pierre Marchadier, vice-président aéronautique et défense chez Dassault Systèmes. Une acquisition que son PDG, Bernard Charlès, avait qualifiée de troisième révolution de l’entreprise. «La recherche sémantique et l’agrégation d’informations en entreprise (Search Based Applications) sont à notre sens aussi importantes que la 3D. Nous entrons dans une ère
où nous voulons offrir à nos clients une vision globale de l’espace de la connaissance pour les aider à innover. Ils pourront à travers des services en ligne aux contenus validés, avoir une vue holistique de l’espace 3D, du temps et de la connaissance.» Les idées de services ne manquent pas, telle la documentation technique de chaque avion en configuration. « Ainsi, les compagnies ne recevraient plus que les “ service bulletins ’’, concernant leurs appareils. Un service qu’elles sont prêtes à payer pour accélérer les opérations de maintenance», explique Richard Murawka, directeur technique aéronautique et défense chez PTC Europe. Encore faudrait-il que les échanges entre les acteurs soient normalisés. La norme PLCS (Product Life cycle Support), poussée par des organismes étatiques, semble émerger. «Elle est issue de la norme Iso Step (Iso 10303-239), qui doit faciliter et standardiser la communication entre les systèmes d’information dédiés au support et à la maintenance de systèmes complexes. La norme PLC conserve la cohérence, la maintenance, l’échange et la pérennité des données tout au long de leur cycle d’exploitation quels que soient les systèmes d’information», précise Damien Andrieux chez Lascom. Bref, les constructeurs veulent exploiter le capital que représentent leurs données à la fois en termes de propriété intellectuelle et de savoir-faire, bien au-delà de ce qu’ils font actuellement. Le PLM va enfin tenir ses promesses.cm ccJean-François prevéraud jfpreveraud@industrie-technologies.com
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c Si la maquette numérique prend de plus en plus
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découvrez comment thales Avionics applique le lean.
conception
ccPhiliPPe herreriAS AssOCié de VinCi COnsultinG
Le lean engineering a besoin de temps La filière aéronautique est en pleine reconfiguration. Les deux géants, Boeing et Airbus, font appel à des partenaires partageant les risques pour le développement et la fabrication de parties complètes de l’avion. D’autres acteurs, tels que Bombardier, Embraer ou Soukhoï, s’intéressent à leur marché. Enfin, les Chinois arrivent avec Avic et Comac. Il faut trouver les moyens d’innover plus efficacement. PLM et lean engineering sont au cœur du débat.
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Quels sont les défis que doit relever l’aéronautique en termes de développement de nouveaux projets ? Philippe Herrerias : Ils sont de
trois ordres. Déjà le fonctionnement en râteau selon lequel l’avionneur travaillait avec une multitude de sous-traitants et assurait l’intégration de chacun des éléments, est remplacé par un fonctionnement plus pyramidal. Il fait appel à un nombre limité de partenaires partageant les risques sur le développement et la fabrication de parties complètes de l’avion. Des partenaires travaillant eux-mêmes de la même façon avec des soustraitants de rangs 2 et 3. Une telle évolution, que l’on peut assimiler à un passage de l’artisanat à l’industrie, ne peut se faire qu’en mettant l’accent sur les process et les outils. C’est pourquoi la mise en place d’une démarche PLM (Product, Life Cycle, Management) forte est le deuxième grand défi que doit relever la filière. En France, le groupe EADS l’a fait avec son programme Phenix et la filière entreprend la même démarche avec Boostaerospace. Il
s’agit de définir des processus, des plates-formes de travail collaboratif et des interfaces permettant à chacun des acteurs d’un projet de collaborer aussi efficacement que possible à celui-ci. Le tout en gardant la maîtrise de ses outils et méthodes de travail. Enfin, le déploiement d’une démarche de lean engineering dans l’ensemble de la filière est le troisième défi. Que peut apporter le lean engineering dans le développement de nouveaux avions ?
Le lean a une image de réducteur d’effectifs, ce qui a été en partie vrai pour le lean manufacturing et pourrait le devenir avec le lean engineering s’il est mal compris et employé. Il ne s’agit pas uniquement d’optimiser les processus de développement existants dans l’entreprise, mais surtout de lui donner les moyens de développer de nouveaux produits faciles à fabriquer, atteignant les performances souhaitées aux coûts et aux délais visés, avec un niveau de fiabilité excellent dès les premiers exemplaires.
Bref, faire comme Toyota, non pas du lean engineering mais du lean product development. Le lean doit être un vecteur d’innovation globale. Donnons un exemple : est-il nécessaire de définir une à une les 100 000 pièces de fixation des câblage et tuyauterie d’un avion pour optimiser son poids ? Ou vaut-il mieux créer un choix de quelques dizaines de modèles pour optimiser les approvisionnements sur chaîne et ceux de l’aprèsvente ? Comment la filière aéronautique passe-t-elle au lean engineering ?
À la fois bien et mal ! Le lean engineering est toujours beaucoup plus difficile à mettre en place que prévu. Comme, il n’y a pas si longtemps, pour le BPR (Business Process Reengineering). Il y a eu beaucoup d’actions de sensibilisation et de formation chez les avionneurs, qui disposent de l’ensemble du trousseau de clés, sans toujours savoir très bien par quel bout prendre le problème. De plus, ils ont basculé le problème en partie vers leurs partenaires, qui étaient moins bien prépa-
ccson parcours
Son diplôme d’ingénieur Supaéro en poche, Philippe Herrerias part en 1996 pour le compte de Spot Image en Arabie saoudite comme technicocommercial. De retour en France, il devient en 1998 consultant chez Vinci Consulting, à Paris, puis partenaire. En 2002 il prend la responsabilité du secteur aéronautique à Toulouse.
rés à cette évolution majeure, qui change fondamentalement leur façon de travailler. Vu l’envergure des projets aéronautiques concernés et la multitude des partenaires, il est devenu très difficile de définir le périmètre sous contrôle. Enfin, le lean engineering demande une vision d’avenir de son emploi, au moins à moyen terme, pour en tirer tout le bénéfice. C’est une technique d’amélioration continue qui s’enrichit au fur et à mesure que l’on avance dans son utilisation. Elle ne peut donc prouver son efficacité qu’avec le temps, ce dont manquent cruellement les avionneurs. cm ccpropos recueillis par J.-F. prevéraud jfpreveraud@industrie-technologies.com
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Le Falcon 7X est le premier avion de Dassault Aviation à avoir été développé entièrement sur support numérique. Il représente 250 Go de données à conserver pendant plus de 70 ans.
Le développement d’un avion en « tout numérique » pose des problèmes de conservation, d’intégrité et de sécurité des données. Dassault Aviation relève le défi en s’associant à IBM. Coup de projecteur sur sa démarche appliquée au Falcon 7X, son premier avion développé à 100 % en numérique. utilisation d’outils numériques pour la conception des avions en 3D pose un réel problème de pérennité des informations sur le long terme, constate Jean Sass, directeur des systèmes d’information de Dassault Aviation. Si l’on sait toujours relire les plans des débuts de l’aviation, sera-t-on capable de réutiliser dans plusieurs décennies les données des appareils actuelle-
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ment en cours d’étude avec des outils numériques ? Les données ne vont-elles pas s’altérer et sera-t-on à même de les relire ? Rien n’est moins sûr ! Pourtant, le besoin de pérennité est bien réel. Les certifications des administrations européenne (Easa) et américaine (FAA), qui réglementent l’organisation de la conception et de la production des aéronefs, font référence depuis 1965 aux dessins et spé-
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cifications. Des documents qui montrent la configuration de chaque appareil et prouvent que chacune des pièces répond bien au cahier des charges. cc Conserver
la maquette numérique
En 2001, le Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales (Gifas) avait demandé de «préciser les conditions d’acceptation d’un système de conception 3D en rem-
placement des dessins». C’est pourquoi, à l’occasion du programme Falcon 7X, intégralement développé en numérique, Dassault Aviation a fait valider par l’Easa et la FAA ses méthodes de développement numérique et son système de conception 3D. Des validations qui doivent beaucoup au système d’archivage à long terme mis en place par l’avionneur avec l’aide d’IBM. En effet, si la base de données 3D est la référence unique, tant pour les études que la fabrication, mais aussi l’exploitation et l’évolution du Falcon 7X tout au long de sa carrière, comment
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Attention les données numériques sont périssables
conception
garantir que la maquette numérique pourra être conservée et utilisée jusqu’à la fin de l’exploitation de ces appareils, qui pourrait intervenir dans 70 ans? cc Les
défis de l’archivage
Il faut se prémunir de l’obsolescence des matériels, de la dégradation des supports physiques des données, et de l’évolution des logiciels auteurs. En ajoutant à cela la possible disparition des constructeurs informatiques et des éditeurs de logiciels, voire du format natif des données. De plus, il faut aussi garantir que les données n’auront pas été modifiées, qu’elles seront lisibles durant toute la durée de vie des appareils, et que les autorités pourront y avoir accès directement en cas de besoin. Pour réussir cette gageure, Dassault Aviation et IBM ont développé Dias PLM (Digital Archiving System For Product Life Cycle Management), une application à trois niveaux : un système de fabrication d’archives (SFA); un système d’archivage long terme (Salt); un système d’audit (SA). Grâce au système de fabrica-
Comment les données sont sécurisées
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c À tout ensemble de données numériques destiné à être archivé, la fonction de hachage de Salt associe, lors du stockage, une empreinte significative sur 512 bits. Lors de la restitution, en recalculant son empreinte et en la comparant à sa valeur originale, on vérifie que la donnée n’a pas été altérée pendant sa conservation. Afin de minimiser le risque de «piratage», deux empreintes seront en fait calculées, selon des algorithmes différents. Il est prévu d’effectuer deux vérifications systématiques annuelles de l’ensemble des archives à long terme. Ces archives seront stockées sur trois sites physiques, pour éviter les destructions par catastrophes naturelles, accidents ou actes de malveillance.
tion d’archives (SFA), les données géométriques de définition et la nomenclature sont converties de leur format natif d’origine dans un format Iso standard neutre (STEP AP214, XML, TIFF). Cela garantit l’existence sur le long terme d’au moins un outil capable de lire, d’exploiter et de mettre à disposition ces données de définition. Pour contrôler la qualité de la conversion, Step inclut dans le modèle transformé des caractéristiques qui lui sont propres, les GVP (Geometrical Value Properties) qui sont le centre de gravité, le volume, et la surface du modèle. À la relecture, le système recalcule et vérifie ces GPV. cc Stocker
ccPhiliPPe ebert responsable projet Dias plM chez Dassault aviation
«les standards garantissent la pérennité des informations» « L’utilisation des standards est la clé de la pérennisation des données. Les standards actuels ne couvrent que partiellement les fonctionnalités des logiciels qui génèrent des données à archiver. Il faudrait donc les faire évoluer de façon à limiter nos développements spécifiques. C’est une des raisons pour laquelle Dassault Aviation fait partie du projet Lotar (Long Term Archiving), qui a pour objet l’utilisation, la promotion et l’évolution des standards pour l’archivage des données 3D. »
à long terme
Les données en format neutre sont stockées par une infrastructure appelée système d’archivage long terme (Salt) garantissant la conservation et la non-altération des données sur une période supérieure à la durée d’exploitation du Falcon 7X (plus de 70 ans). Aucun système matériel ne peut offrir cette certitude, tant pour la pérennité des supports matériels de stockage de l’information, que pour la disponibilité des lecteurs. Une solution logicielle basée sur un modèle normalisé Iso 14721 (Open Archiving Information System – OAIS) a donc été développée. Elle repose sur trois dispositifs clés : le calcul d’empreintes numériques ; le journal des archives et le recours à un tiers archiviste. Le Salt affecte une empreinte numérique à chaque ensemble de données élémentaires numériques à archiver, qu’il recalcule lors de la restitution pour vérifier qu’il n’a pas été altéré pendant sa conservation (voir encadré). Le Salt
entretient aussi un journal des stockage à long terme de la éléments archivés. Chacune maquette numérique en confides lignes de ce journal guration du Falcon 7X génère contient en particulier le nom environ 250 Go de données, de l’archive, sa date de dépôt et soit un volume annuel de 15 To les empreintes numériques correspondant aux différents associées. Une copie en est sys- stades de maquettes numéritématiquement déposée chez ques des avions fabriqués. La un tiers archiviste. En cas de conservation de ces données litige, il attesreprésente un tera que l’ar- « une solution coût moyen de chive restituée logicielle pour 4 euros par s’affranchir de est bien l’ar- l’obsolescence giga-octet et chive initiale- des matériels » par site physiment déposée que de stocet qu’il ne kage. Ce qui Philippe ebert, Dassault Aviation s’agit pas est sans comd’une archive mune mesure fabriquée au gré des circons- avec les investissements immotances. Dassault Aviation a biliers et de sécurité qui choisi pour ce rôle CDC Arkhi- seraient nécessaires pour stocnéo, une filiale de la Caisse des ker des plans, même si l’on dépôts et consignations. ajoute les 300 000 à Enfin, un système d’audit (SA) 400000 euros qui ont été nécespermet de sélectionner les don- saires pour développer le sysnées que l’on veut récupérer, de tème ! cm les contrôler à travers leurs empreintes numériques et d’en ccJean-François prevéraud autoriser la consultation. jfpreveraud@industrie-technologies.com En termes de volume, le JUIN 2011ccSPÉCIAL AÉRONAUTIQUE
AA
www.industrie-technologies.com
mise À nu
dossier technique sur les enregistreurs de vol.
Les deux boîtes noires du vol Rio-Paris ont fait la une de tous les journaux. Comme sur chaque avion de ligne, l’une a enregistré les communications dans le cockpit, l’autre a mémorisé jusqu’à 1300 paramètres de vol. Des données précieuses pour déterminer les causes de l’accident. Mais qu’y a-t-il à l’intérieur de ces boîtiers?
BOÎTE NOIRE OUVRE-TOI… ccFiche techniQue
Dimensions : 32 x 12 x 16 cm pour l’enregistreur audio 50 x 12 x 16 cm pour l’enregistreur des données de vol Poids : environ 7 kg par boîte Résistance à l’impact : 3 500 g pendant 6,5 ms
LES SPÉCIFICATIONS STANDARD Résistance au feu : 1 100 °C pendant 1 heure 260 °C pendant 10 heures Résistance à la pression : à 6 000 m de fond pendant 30 jours Durée d’enregistrement : 2 heures pour l’audio
25 heures pour les données de vol Prix : 15 000 à 20 000 euros par enregistreur Deux principaux fabricants dans le monde les américains Honeywell et L-3 Communications
L’ENREGISTREUR NUMÉRIQUE Historiquement, l’enregistreur utilisait une bande magnétique. Depuis 1995, il s’appuie sur une carte électronique à mémoire Flash. À la clé, la suppression des opérations d’entretien. Seules les vérifications périodiques du fonctionnement sont maintenues. La capacité de stockage est d’environ 80 Mo. Un volume suffisant pour enregistrer en boucle les 2 heures d’audio ou 25 heures de données de vol exigées.
Le bouclier thermique offre une résistance à la chaleur de 1 100 °C pendant une heure.
Châssis
Enregistreur
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LE SYSTÈME DE PROTECTION BLINDAGE PERMÉABLE L’enregistreur bénéficie d’une double protection, mécanique et thermique. Chaque constructeur a sa propre solution qu’il garde jalousement secrète. Cette protection garantit l’intégrité de l’enregistreur dans des conditions extrêmes de choc, de pression ou de température. Curieusement, le boîtier n’est pas étanche. Cela évite de trop grandes différences de pression entre l’intérieur et l’extérieur.
SPÉCIAL AÉRONAUTIQUEccJUIN 2011
SIPA ; D.R.
LE CHÂSSIS MESSAGER DES DERNIERS INSTANTS Le châssis latéral renferme l’électronique nécessaire à l’acquisition des données par l’enregistreur. Interface entre les phénomènes physiques et la mémoire numérique, il convertit les signaux aux formats adéquats. Il n’est pas étanche et ne bénéficie pas du niveau de protection de l’enregistreur, la lecture des données pouvant être réalisée sans son intermédiaire.
Le boîtier en acier ou titane assure la protection contre les chocs et la pression sous-marine jusqu’à 6 000 mètres de profondeur.
LA BALISE ACOUSTIQUE CRI DE DÉTRESSE Une balise acoustique sert à localiser la boîte noire en mer. Dès qu’elle est immergée, elle déclenche automatiquement un signal à ultrasons d’une fréquence de 37,35 kHz. Le signal porte à deux ou trois kilomètres, sa puissance est de 160 décibels à deux mètres de distance. Depuis les années 1980, le système a évolué : l’autonomie de sa batterie atteint 90 jours aujourd’hui, contre 30 jours au début.