La réforme de l'évaluation environnementale - Guide opérationnel

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Guide opérationnel

Cet ouvrage se veut un outil d'appréhension pratique et complet de la réforme de l'évaluation environnementale et des dernières évolutions apportées notamment par la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (Élan) et la loi n° 2018-202 du 26 mars 2018 relative à l'organisation des jeux olympiques et paralympiques de 2024. Dans cette approche pragmatique de la réforme de l'évaluation environnementale, il illustre son analyse des textes par des retours d'expérience de praticiens en ciblant les difficultés récurrentes rencontrées par ces derniers et les innovations mises en place. Il s'adresse à tout professionnel concerné par la rédaction ou l'application de l'évaluation environnementale en général : bureaux d'études, collectivités territoriales, promoteurs immobiliers...

Justine Bain-Thouverez, avocat associé au sein du cabinet LLC et Associés et docteur en droit, est spécialisée en droit de l'environnement. Claire Bour a intégré le groupe Artelia en tant qu'ingénieur en 2017, après avoir développé ses compétences dans des contextes variés (stages en cabinet d'avocats, missions d'assistance à projet en entreprise ou cabinet de consulting). Elle y contribue aujourd'hui à la veille réglementaire mensuelle, à l'assistance réglementaire des opérationnels et à la rédaction des études réglementaires (étude d'impact, mise en compatibilité des documents d'urbanisme dans le cadre d'une déclaration d'utilité publique). Catherine Dupuy a rejoint Ville & Transport en 2012, forte de son expérience de plus de 19 ans dans les dossiers réglementaires de projets d'infrastructures linéaires ou d'aménagement urbain. Elle y assure aujourd'hui le montage et la réalisation des dossiers réglementaires, l'intégration de la démarche de développement durable dans des projets d'infrastructures. En tant que référente HQE infrastructure, elle propose des indicateurs environnementaux avec restitution d'image radar et l'écoconception du projet.

LES ESSENTIELS

La réforme de l'évaluation environnementale - Guide opérationnel

La réforme de l'évaluation environnementale

La réforme de l'évaluation environnementale Guide opérationnel

LES ESSENTIELS

Justine Bain-Thouverez Claire Bour Catherine Dupuy www.territorial-editions.fr ISSN : 2553-5803 – ISBN : 978-2-8186-1610-9



La réforme de l'évaluation environnementale Guide opérationnel

LES ESSENTIELS Justine Bain-Thouverez

Avocat associé au sein du cabinet LLC et Associés

Claire Bour

Ingénieur conseil en droit de l’environnement au sein d’Artelia

Catherine Dupuy

Directrice du pôle environnement Stratégie & Management au sein d’Artelia

CS 70215 -  38501 Voiron Cedex Tél. : 04 76 65 87 17 Retrouvez tous nos ouvrages sur http://www.territorial-editions.fr

Référence BK 340 Août 2019


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Avertissement de l’éditeur : La lecture de cet ouvrage ne peut en aucun cas dispenser le lecteur de recourir à un professionnel du droit.

Il est interdit de reproduire intégralement ou partiellement la présente publication sans autorisation du Centre Français d’exploitation du droit de Copie. CFC 20, rue des Grands-Augustins 75006 Paris. Tél. : 01 44 07 47 70

© Territorial, Voiron ISBN : 978-2-8186-1610-9 ISBN version numérique : 978-2-8186-1611-6 Imprimé par Reprotechnic, à Bourgoin-Jallieu (38) - Septembre 2019 Dépôt légal à parution


Sommaire Introduction. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.7

Partie 1 Le champ d’application de l’évaluation environnementale Chapitre I La nouvelle approche par projet et ses conséquences pour les maîtres d’ouvrage. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.17 Chapitre II L’extension du champ de l’examen au cas par cas. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.23 Chapitre III Le maître d’ouvrage face aux différentes hypothèses : évaluation environnementale systématique, examen au cas par cas, absence d’évaluation environnementale requise. . . . . . . . . . p.25 A -  L’hypothèse de l’examen au cas par cas. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.25 1. Le rôle de l’autorité environnementale : l’examen au cas par cas, la décision et son explication. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.28 2. La contestation de la décision de l’autorité environnementale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.29

Chapitre IV Une conséquence inédite de l’évaluation environnementale pour certains projets : l’autorisation environnementale dite supplétive. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.32 Chapitre V L’évaluation environnementale sujette à de nouvelles expérimentations. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.34 A - Le régime particulier de l’autorisation environnementale concernant les travaux, installations et constructions liés à l’organisation des JO 2024. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.34 B -  Le droit de dérogation expérimenté au bénéfice du préfet. . . . . . . . p.34

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La réforme de l’évaluation environnementale

B - L’hypothèse de la soumission volontaire à évaluation environnementale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.30

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Partie 2 Le contenu de l’évaluation environnementale Chapitre I Un outil d’aide à la réalisation d’études d’impact de qualité : le cadrage préalable . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.39 A - Pour les projets soumis à évaluation environnementale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.40 B - Pour les plans et programmes soumis à évaluation environnementale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.41

Chapitre II Sur la rédaction de l’étude d’impact d’un point de vue général . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.43 Chapitre III Les modifications du contenu de l’étude d’impact. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.45 A -  Le « scénario de référence » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.45 B - La prise en compte de la vulnérabilité du projet au changement climatique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.46 C -  La séquence « éviter, réduire, compenser » reprécisée. . . . . . . . . . . . . . p.47 D - La prise en compte des incidences sur la consommation d’espaces agricoles, naturels et forestiers. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.48 E -  La prise en compte des travaux de démolition. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.49

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F - La prise en compte des consommations de la phase d’exploitation du projet. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.49

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G - L’estimation des pollutions, émissions et déchets issus des phases de construction et de fonctionnement. . . . . . . . . . . p.50 H - Analyse des avis de l’autorité environnementale depuis mars 2017 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.50

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Partie 3 L’examen de l’évaluation environnementale par l’autorité environnementale et ses suites Chapitre I La détermination de l’autorité environnementale compétente. . . . p.61 A - Le problème des avis irrégulièrement émis par les préfets de région, autorités décisionnaires. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.62 B -  Le problème des absences d’avis des MRAe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.64 C - L’obligation de réponse écrite du maître d’ouvrage à l’autorité environnementale. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.64 D -  Le devenir de l’enquête publique en question . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.65

Chapitre II La problématique de l’inflation de la législation environnementale. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.67 A -  Autorisation environnementale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.67 B -  Installations, ouvrages, travaux et activités (IOTA). . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.67

Chapitre III Des solutions pour une meilleure appréhension du processus de l’évaluation environnementale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.69

Annexe I Reproduction de l’annexe de l’article R.122-2 du Code de l’environnement. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.73 Annexe II Reproduction de l’arrêt du Conseil d’État sur le pouvoir de dérogation accordé au préfet . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.91

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La réforme de l’évaluation environnementale

Annexes

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Introduction L’évaluation environnementale est définie comme « un processus constitué de l’élaboration, par le maître d’ouvrage, d’un rapport des incidences sur l’environnement, dénommé ci-après “étude d’impact”, de la réalisation des consultations prévues à la présente section, ainsi que de l’examen, par l’autorité compétente pour autoriser le projet, de l’ensemble des informations présentées dans l’étude d’impact et reçues dans le cadre des consultations effectuées et du maître d’ouvrage » (article L.122-1, III du Code de l’environnement). Cette définition permet de rappeler que l’évaluation environnementale est à appréhender comme un processus, plus large que le seul document constituant l’étude d’impact. Pour reprendre une définition donnée par le Commissariat général au développement durable (CGDD), « l’évaluation environnementale est une démarche itérative d’intégration des enjeux environnementaux et de santé humaine dans les projets afin d’améliorer la qualité de ceux-ci »1. L’évaluation environnementale a fait l’objet d’une importante réforme – en plusieurs temps –, visant notamment à mettre en conformité le droit national au regard du droit de l’Union européenne, en particulier la directive du 16 avril 2014 modifiant la directive de 2011 sur l’évaluation des incidences de certains projets sur l’environnement2.

1. CGDD, L’évaluation environnementale, démarche d’amélioration des projets, Théma, mars 2019, p. 1. 2. Directive no 2014/52/UE du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 modifiant la directive no 2011/92/UE concernant l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement. 3. Ordonnance no 2016-1058 du 3 août 2016 relative à la modification des règles applicables à l’évaluation environnementale des projets, plans et programmes. 4. Décret no 2016-1110 du 11 août 2016 relatif à la modification des règles applicables à l’évaluation environnementale des projets, plans et programmes. 5. Loi no 2018-148 du 2 mars 2018 ratifiant les ordonnances no 2016-1058 du 3 août 2016 relative à la modification des règles applicables à l’évaluation environnementale des projets, plans et programmes et no 2016-1060 du 3 août 2016 portant réforme des procédures destinées à assurer l’information et la participation du public à l’élaboration de certaines décisions susceptibles d’avoir une incidence sur l’environnement. 6. Ordonnance no 2016-1060 du 3 août 2016 portant réforme des procédures destinées à assurer l’information et la participation du public à l’élaboration de certaines décisions susceptibles d’avoir une incidence sur l’environnement.

La réforme de l’évaluation environnementale

C’est ainsi que, depuis 2016, les textes réformant l’évaluation environnementale se succèdent. Cela a commencé par l’ordonnance du 3 août 20163, suivie de son décret d’application du 11 août 20164. Cette ordonnance a été ratifiée par la loi du 2 mars 20185, qui concerne également une autre ordonnance du 3 août 2016 relative, quant à elle, à la participation du public en matière environnementale6. La loi du 2 mars 2018 permet non seulement d’achever la transposition du droit de l’Union européenne en la matière, mais apporte également des éléments supplémentaires

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par rapport aux ordonnances. Elle introduit, par exemple, l’obligation pour le maître d’ouvrage de fournir une réponse écrite à l’avis formulé par l’autorité environnementale, et ce pour tous les projets. Par la suite, plusieurs décrets sont venus réformer le régime juridique de l’évaluation environnementale, avec notamment le décret du 25 avril 20177 et le décret du 4 juin 20188. Ce décret réduit les cas de soumission automatique des projets à évaluation environnementale, et développe le champ d’application de l’examen au cas par cas. Des textes plus sectoriels ont par ailleurs eu des impacts sur le régime de l’évaluation environnementale, comme l’adoption de l’ordonnance du 26 janvier 2017 relative à l’autorisation environnementale9. Ce guide est également agrémenté des évolutions de la législation résultant de la loi Élan no 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique et de la loi no 2018-202 du 26 mars 2018 relative à l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.

La réforme de l’évaluation environnementale

Les développements à venir permettront d’aborder les impacts de l’ensemble de ces textes en matière d’évaluation environnementale. Ce sont autant d’évolutions législatives et réglementaires que les professionnels (maîtres d’ouvrage, bureaux d’études, collectivités territoriales, entreprises, avocats…) doivent prendre en compte en anticipant les conséquences sur leurs activités. Si l’objectif affiché de l’ensemble de ces nouveaux textes est bel et bien la simplification du régime de l’évaluation environnementale, leur mise en application a démontré un besoin de clarification de certains concepts et notions.

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La prise en compte de plus en plus importante de l’environnement au sein des politiques publiques et la volonté de simplification de la législation afférente ne sont pas toujours d’une appréhension évidente pour les professionnels concernés. En effet, chaque dossier réglementaire présente ses spécificités et les textes récents ne font pas l’objet d’une interprétation simultanée par les services de l’autorité environnementale ou par les juridictions. Par conséquent, le professionnel (bureau d’études ou maître d’ouvrage) se trouve souvent désarmé face à des textes se voulant simplificateurs mais restant au final difficiles d’appréhension. Le professionnel est alors contraint d’adopter la position la plus sécurisante, souvent à ses frais car elle implique des délais supplémentaires. L’interprétation des nouveaux textes s’avère également être un facteur d’innovation.

7. Décret no 2017-626 du 25 avril 2017 relatif aux procédures destinées à assurer l’information et la participation du public à l’élaboration de certaines décisions susceptibles d’avoir une incidence sur l’environnement et modifiant diverses dispositions relatives à l’évaluation environnementale de certains projets, plans et programmes. 8. Décret no 2018-435 du 4 juin 2018 modifiant des catégories de projets, plans et programmes relevant de l’évaluation environnementale. 9. Ordonnance no 2017-80 du 26 janvier 2017 relative à l’autorisation environnementale.


Ce guide cherche à retracer l’appréhension faite de la réforme et ses limites ainsi que l’esquisse de solutions pratiques pour l’ensemble des acteurs concernés. Il s’efforcera, par conséquent, de confronter le point de vue strictement réglementaire à la pratique, afin de cerner les incertitudes engendrées par les évolutions réglementaires et de proposer des solutions pratiques. Dans une visée pratique, il sera question, dans un premier temps, du champ d’application de l’évaluation environnementale, puis de son contenu, avant d’aborder la question de son examen par l’autorité environnementale.

> L’éventuelle phase de concertation

Plusieurs types de concertation existent et s’appliquent notamment aux projets, plans et programmes soumis à évaluation environnementale : -  la concertation obligatoire au titre de l’article L.103-2 du Code de l’urbanisme, lors de l’élaboration ou la révision de documents d’urbanisme (SCOT et PLU), de la création de zones d’aménagement concerté, de projets de renouvellement urbain et de projets et opérations d’aménagement ou de construction ayant pour effet de modifier de façon substantielle le cadre de vie ou l’activité économique (la liste de ces derniers projets a été fixée par décret : cf. article R.103-1 du Code de l’urbanisme) ; -  la concertation facultative au titre de l’article L.300-2 du Code de l’urbanisme, pour les projets non concernés par la concertation obligatoire et se situant dans une commune couverte par un document d’urbanisme ; -  la concertation préalable au titre de l’article L.121-8 du Code de l’environnement, prescrite par la Commission nationale du débat public pour certains projets, plans et programmes d’importance (cf. articles R.121-1-1 et R.121-2 pour la liste de ceux-ci) ; -  la concertation au titre de l’article L.121-15-1 du Code de l’environnement, pour les projets, plans et programmes soumis à évaluation environnementale et ne relevant d’aucune des concertations précitées. Au regard de ce dernier type de concertation, la soumission d’un projet, plan ou programme à la procédure d’évaluation environnementale peut entraîner une phase de concertation préalable. L’organisation de cette concertation peut résulter soit de : -  la décision volontaire du maître d’ouvrage du projet ou de la personne publique chargée de l’élaboration du plan ou programme ;

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Il est utile de rappeler que des procédures de concertation peuvent avoir lieu avant l’évaluation environnementale. La concertation préalable se distingue des procédures d’enquête publique ou de participation du public par voie électronique par son intervention en amont, lorsque les principales caractéristiques du projet ne sont pas encore figées. Le débat se déroulant lors des phases de concertation peut alors être plus large et peut notamment porter sur l’opportunité même du projet – qui est un sujet dont il sera plus difficile de débattre lors de l’enquête publique, lorsque le projet en est déjà à un stade avancé.

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-  la décision motivée de l’autorité compétente pour autoriser le projet ; -  un droit d’initiative ouvert au public pour demander à l’autorité compétente l’organisation d’une concertation. Afin que le public puisse s’approprier ce droit d’initiative, encore faut-il qu’il ait connaissance de l’existence du projet. Pour cela, le maître d’ouvrage doit publier une déclaration d’intention de projet sur son site Internet et sur celui de la préfecture du département concerné (article R.121-25 du Code de l’environnement). Tous les projets ne sont pas concernés par cette obligation, mais de plus en plus sont amenés à l’être à la suite de la loi du 2 mars 2018, qui a abaissé les seuils financiers s’appliquant à la matière (cf. article L.121-17-1, 1o du Code de l’environnement). Ainsi, tout projet répondant aux trois conditions cumulatives suivantes doit faire l’objet d’une déclaration d’intention préalable : 1/ Le projet est soumis à évaluation environnementale ; 2/ Le projet n’est pas soumis à une procédure de concertation au titre d’autres dispositions et n’a pas fait l’objet d’une concertation préalable organisée par le maître d’ouvrage dans le respect des dispositions du Code de l’environnement ; 10 3/ Le projet entraînera plus de 5 millions d’euros de dépenses publiques (soit en dépenses directes si le projet est sous maîtrise d’ouvrage publique, soit en subventions publiques à l’investissement sous forme d’aide financière nette s’il s’agit d’un projet privé).

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Les éléments d’information à fournir par le maître d’ouvrage dans la déclaration d’intention de projet (article L.121-18, I du Code de l’environnement) sont les suivants : -  les motivations et raisons d’être du projet ; -  la liste des communes dont le territoire est susceptible d’être affecté par le projet ; -  un aperçu des incidences potentielles sur l’environnement ; -  les éventuelles solutions alternatives envisagées ; -  le cas échéant, les modalités déjà envisagées de concertation préalable.

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Outre la publication de cette déclaration d’intention sur son site Internet, le maître d’ouvrage doit transmettre ce document à l’autorité compétente pour autoriser le projet. Celle-ci pourra, si nécessaire, demander au maître d’ouvrage de compléter sa déclaration. La publication de la déclaration ouvre alors un droit d’initiative : pendant un délai de quatre mois, différentes personnes (personnes résidant dans le périmètre11, collectivités territoriales et EPCI, associations agréées de protection de l’environnement) peuvent demander au préfet l’organisation d’une concertation au titre du Code de

10. Montant maximal qui sera fixé par décret, et donc potentiellement susceptible d’être revu à la baisse à cette occasion. Avant la loi du 2 mars 2018, ce seuil était fixé à 10 millions d’euros hors taxes. 11. Sous conditions de seuils : 20 % de la population des communes du périmètre ou 10 % de la population du ou des départements ou du ou des régions du périmètre.


l’environnement. En cas de demande d’organisation d’une concertation, le préfet a alors un mois pour se prononcer. Dès lors, pendant cette période, seule une concertation avec garant désigné par la Commission nationale du débat public peut être organisée et aucune demande d’autorisation ne peut être déposée, ce qui peut se révéler très impactant pour les projets n’ayant pas anticipé cette obligation.

Approche pratique La réalisation d’une concertation peut résulter de plusieurs textes, ce qui doit amener le maître d’ouvrage à : -  vérifier si son projet entre ou non dans le champ d’application d’une des procédures de concertation ; -  le cas échéant, se soumettre à la procédure de concertation qui s’impose, en respectant les modalités fixées ; -  le cas échéant, procéder à la déclaration d’intention de projet lorsqu’elle est nécessaire, la publier (et ne pas déposer de demande tant que le délai du droit d’initiative n’est pas écoulé) ; -  en l’absence de concertation obligatoire, envisager l’intérêt et les modalités qu’aurait l’organisation d’une concertation volontaire.

> Le régime transitoire Se pose également la question de la temporalité des dossiers au regard de l’évolution de l’autorisation unique en autorisation environnementale.

L’article précité procède à l’assimilation de certaines autorisations (au titre des ICPE, de la loi sur l’eau, de l’expérimentation des autorisations uniques) obtenues avant cette date du 1er mars 2017 à des autorisations environnementales. Cela signifie que pour l’ensemble de ces autorisations obtenues avant le 1er mars 2017, la législation qui leur est dorénavant applicable (en matière de modification, abrogation, retrait, renouvellement, transfert, contrôle, contestation, mise à l’arrêt) est celle applicable aux autorisations environnementales. Le 5o de l’article 15 de l’ordonnance précitée prévoit par ailleurs un mécanisme de choix pour les demandes d’autorisation environnementale déposées entre le 1er mars 2017 et le 30 juin 2017.

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L’article 15 de l’ordonnance no 2017-80 du 26 janvier 2017 relative à l’autorisation environnementale prévoit un régime transitoire, amené à s’appliquer à nombre de projets en cours à la date d’entrée en vigueur de cette ordonnance (1er mars 2017).

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Les pétitionnaires pouvaient alors choisir entre : -  l’application du droit antérieur à l’ordonnance du 26 janvier 2017 pour toute la phase de dépôt, d’instruction et de délivrance de son autorisation. Malgré l’application du droit antérieur lors du dépôt, de l’instruction et de la délivrance de l’autorisation demandée, c’est ensuite le régime de l’autorisation environnementale qui s’applique aux phases ultérieures (modifications du projet, transfert, contrôle, mise à l’arrêt) ; -  l’application du droit issu de l’ordonnance du 26 janvier 2017 dès le dépôt de la demande d’autorisation, qui sera alors instruite et délivrée en application du régime de l’autorisation environnementale. Ce choix est ouvert plus largement, sans limite de date, « aux pétitionnaires dont les projets ont fait l’objet d’une enquête publique préalable à déclaration d’utilité publique ouverte avant le 1er mars 2017, y compris en cas d’intervention d’une déclaration d’utilité publique modificative postérieure » (art. 15-6o de la directive du 26 janvier 2017). Dans l’hypothèse d’une déclaration d’utilité publique ayant fait l’objet d’une enquête publique avant le 1er mars 2017 faisant l’objet aujourd’hui d’une déclaration d’utilité publique modificative, quel régime appliquer à la rédaction de l’évaluation environnementale afférente ? L’alinéa 6 de l’article 15 de l’ordonnance n’est pas très clair et nous ne disposons pas actuellement de jurisprudence. Ainsi, le bureau d’études engagé par le maître d’ouvrage pour établir la déclaration d’utilité publique modificative se trouve contraint d’actualiser son étude d’impact dans le respect de la législation actuelle. Ceci implique notamment de nouvelles contraintes en termes de programmation du projet, mais également d’un point de vue budgétaire.

La réforme de l’évaluation environnementale

D’après nos retours d’expérience, ce type d’interrogations surgit majoritairement dans le cas de projets ayant fait l’objet d’une déclaration d’utilité publique avec étude d’impact avant le 1er mars 2017.

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Si, à titre d’exemple, un dossier loi sur l’eau est aujourd’hui nécessaire à la mise en place du projet et qu’il nécessite la réalisation d’une étude d’impact, à quel régime doit-on la soumettre, étant donné que la déclaration d’utilité publique est intervenue avant le 1er mars 2017 ? Telle a été la question qui s’est posée pour un projet d’aménagement dont le dossier DUP (déclaration d’utilité publique) a été déposé avant le 16 mai 2017. La nouvelle réglementation n’était alors pas opposable. Ce dossier a fait l’objet d’un avis délibéré de l’autorité environnementale et a été le support à l’enquête préalable à la DUP. Néanmoins, le projet nécessitait plusieurs autorisations échelonnées dans le temps. S’est alors posée la question de quelle réglementation appliquer : celle de préréforme ou de postréforme ? Au regard de l’article précité, le pétitionnaire semblerait avoir


le choix entre l’application soit du régime antérieur à l’ordonnance du 26 janvier 2017, soit du droit en vigueur.

> Complément d’actualité : le droit de dérogation au bénéfice du préfet actuellement expérimenté Le Conseil d’État a validé par un arrêt du 17 juin 201912 le décret relatif à l’expérimentation territoriale d’un droit de dérogation reconnu au préfet, en jugeant que celui-ci ne méconnaissait pas le principe de non-régression figurant à l’article L.110-1 du Code de l’environnement. En effet, le pouvoir réglementaire a adopté le 29 décembre 2017 le décret no 20171845 relatif à l’expérimentation territoriale de ce droit de dérogation. Ce texte offrait la faculté, à titre expérimental, jusqu’au 31 décembre 2019, aux préfets de certaines régions et certains départements de déroger, sous certaines conditions, à des normes administratives étatiques, par un arrêté motivé uniquement dans certaines matières telles que l’environnement. Ce droit était accordé sous réserve du respect de certaines conditions figurant à l’article 3 de ce même décret : -  être justifiées par un motif d’intérêt général et l’existence de circonstances locales ; -  avoir pour effet d’alléger les démarches administratives, de réduire les délais de procédure ou de favoriser l’accès aux aides publiques ; -  être compatibles avec les engagements européens et internationaux de la France ; -  ne pas porter atteinte aux intérêts de la défense ou à la sécurité des personnes et des biens, ni une atteinte disproportionnée aux objectifs poursuivis par les dispositions auxquelles il est dérogé.

Une fois ces questions préliminaires abordées, il convient d’étudier l’évaluation environnementale dans une logique chronologique : d’abord, en s’interrogeant sur son champ d’application (partie 1), puis sur son contenu (partie 2), avant d’examiner les questions relatives à son examen et à ses suites (partie 3).

12. Conseil d’État, 17 juin 2019, no 421871, annexe 2.

La réforme de l’évaluation environnementale

Dans une note du 9 avril 2018, le Premier ministre avait d’ailleurs pris soin d’indiquer que ce texte avait pour objectif de renforcer, « à titre expérimental à ce stade, les marges de manœuvre des préfets dans la mise en œuvre des réglementations nationales ». Il en rappelait également le cadre à respecter.

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