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N°7
•• Quelques bains et cures de jouvence pour marques vieillissantes ••
Comment quatre marques considérées comme : • • • •
en difficultés, dépassées, poussiéreuses, ringardes…
…se sont retrouvées poussées par l’air du temps et ont connu une deuxième jeunesse ?
Aujourd’hui, nous parlerons de la première d’entre elles, Petit Bateau. Dans prochain billet, nous aborderons Monoprix, Puma et Scholl.
I – Le processus et les conséquences traditionnels de la banalisation
La marque, il faut le rappeler, est avant tout une preuve de différence. Le facteur le plus structurant pour un marché est le degré d’implication des consommateurs. Plus ils s’investissent affectivement, plus ils sont prêts à investir financièrement et donc à payer le prix pour la marque. A l’inverse, si leurs revenus n’augmentent pas, ils désinvestiront en achetant le moins cher dans certaines catégories de produits. Cette implication n’est pas fixe : plus un marché devient mature, plus la désimplication croît. La maturité d’un marché tend à supprimer le risque perçu par le consommateur. Les marques doivent alors rehausser ce niveau de risque en débanalisant la catégorie de produits matures. La règle d’or de la débanalisation est d’installer et de communiquer de la différence là où il y avait uniformité. Chaque fois que l’on oublie que le marketing doit toujours être le marketing de la différence, on contribue à sa propre banalisation. On fustige toujours le manque de créativité des pubs de lessives. C’est peut-être oublier un peu trop vite que la fonction première de la pub n’est pas de plaire mais, avant tout, de communiquer une différence. De ce fait, le marché de la lessive est un des rares, parmi ceux des produits de commodité, à ne pas avoir perdu face aux MDD grâce à un maintien de la sensibilité aux marques.
II – Petit Bateau : un bel exemple de régression rajeunissante
L’archétype de la situation de détresse
La marque vit sur ses acquis Petit Bateau subit de multiples attaques venant à la fois de la grande distribution et d’enseignes spécialisées Les sous-vêtements étaient devenus un marché de prix bas Mise à mal, la marque prend l’eau, accusant des pertes pour un CA de 400 MF. Elle est criblée de dettes. L’entreprise est rachetée par Yves Rocher en 1988 La reprise par Yves Rocher Yves Rocher procède à des restructurations. Objectif : dépoussiérer la marque tout en se recentrant sur son coeur de métier, le sousvêtement pour enfant Délocalisation et réorganisation de la production : les prix baissent de 30% Une nouvelle communication est mise en œuvre obtenant de bons résultats
Du coup, les ventes repartent à la hausse et la marque va connaître une deuxième jeunesse de façon inattendue L’air du temps va donner un coup de pouce à la chance
L’air du temps L’époque est aux mannequins anorexiques, aux femmes-enfants Les magazines féminins font le relais entre l’entreprise et le monde de la haute-couture Surfant sur cette mode, les "jeunes adultes" s’emparent des produits de la marque. Le produit basique, le tee-shirt, correspond à l’image en vogue de la femme-enfant, devenant le standard de beauté Une idée : pour redynamiser l’entreprise, pourquoi ne pas miser non plus seulement sur les bambins, mais sur les adultes et essentiellement les jeunes femmes ? La puissance du hasard En 1994, Karl Lagerfeld fait défiler Claudia Schiffer avec un tee-shirt Petit-Bateau ultra-moulant sous un tailleur Chanel : le mouvement se renforce Le tee-shirt devient un "must have" auprès des ados et des mamans branchées, qui ont l’impression de chiper un produit à leur fille Les clientes sont charmées de constater qu’à 35-40 ans, elles peuvent porter un tee shirt - en taille 14 ans Profiter de cette vague Petit Bateau change de marché Dès 1994, la nouvelle direction de Petit-Bateau croit à ce phénomène et fait le pari d’y prendre appui pour poursuivre le relancement de la marque Dans l’entreprise, tout le marketing est mis à contribution Les produits : o des déclinaisons des tee-shirts dans différents coloris voient le jour o les références en taille 14, 16 et 18 ans sont de plus en plus nombreuses (et correspondent aux 36, 38 et 40 des tailles adultes) La distribution : les boutiques voient leur look remodelé La communication prend appui sur le phénomène en gardant le positionnement primordial sur l’enfant
Une communication à double détente •
La communication aussi évolue, mais Petit-Bateau veille à maîtriser ce mouvement en le raccrochant à l’esprit de la marque : l'enfant
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Le logo est rafraîchi :
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En publicité, Petit-Bateau a appris qu’il ne faut pas être trop explicite Vendre aux mamans, OK, mais en ne communiquant que sur le thème des enfants En 1998, la marque s’adresse directement aux jeunes mères avec comme signature "Les enfants en Petit Bateau ne sont plus tous des enfants".
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2004 : la marque cherche à accélérer le potentiel de développement en activant la cible des jeunes femmes qui achètent pour elles-mêmes, tout en rappelant ses origines dédiées à la naissance et la petite enfance Le concept : les produits pour adultes de Petit Bateau servent de doudous aux enfants
Pour adultes aussi
La distribution • • •
Les boutiques voient leur look remodelé. Jusqu'ici plutôt classiques, elles adoptent un ton plus jeune Petit-Bateau a réussi à se constituer un réseau de boutiques à sa marque avec plus de 130 implantations La marque y fait cohabiter 3 univers alors qu’il y a quelques années, les magasins femmes et enfants étaient radicalement différents.