Brèves de ski
LES TÉLÉSIÈGES ONT DES OREILLES 160 pages 6045 mots
Nathalie Cuche
- Non mais là, je fais 81 kilos, mais je vais maigrir parce que je vais me mettre au sport dès que j’ai du temps. L’année prochaine, du coup, je skierai mieux. - T’es sûr ? - Hum, avec le sport, je vais maigrir, j’aurai la forme, tu vois. - Ah.
78
QUAND T E U REUVERRAIS-JEU P A Y S MERVEI 79
- Waouhhh, super c’te piste ! - Ouais, mais j’ai mal. - Où t’as mal ? Aux cuisses ? - Ouais. - Mais elle est quand même super, non ? - Ouais, mais j’ai mal.
Quand t’es grand et ben, les pistes, elles changent de couleur, mais quand t’es petit, les pistes, elles restent tout le temps vertes. C’est beau le vert.
Allez Coco, courage, c’est bientôt l’heure du chocolat chaud.
Vous m’attendez ? Vous ne m’attendez jamais de toute façon, alors. Bande de nazes, va !
- T’aimerais aller dans l’espace, toi ? - Non, parce que si tu joues au foot, personne n’arrive à marquer des buts.
Oh faudrait se prendre un peu des photos, non ? Sinon on va tout oublier, on va même oublier qu’on est venus.
80
81
- Putain, ce brouillard, on voit pas grand-chose quand même, hein ? - Quand même, quoi ? - Ben, quand même, on n’y voit pas. Oh putain, ils ne nous ont même pas attendus, les furoncles !
82
- Oh ils font péter les avalanches ! - Ils sont cons ou quoi ? 83
- ça va, Jérôme ? - Je suis cuit. - C’est les noires qui te tuent ? - Non, c’est tout, les noires et les pas noires, je suis cuit, c’est tout. Faut que j’arrête de bouffer de la merde, ça doit être ça, je récupère plus. Si ça ne sent pas, si ça ne fait pas de bruit, alors à quoi ça sert de péter !
84
- « Froid de décembre, cache ton membre », mais elle est pas de moi celle-là. - Ah je me disais aussi, elle est bien menée. Viens, on reste là, Virginie, y a de la belle piste.
Ma fleur préférée, c’est le chardon. 85
- T’as vu ? J’ai même réussi à faire un virage sur le tirefesses. - Ah non, j’ai pas vu, j’ai pas eu cette joie. Dans les petites stations, y a pas de neige, mais ici non plus, alors tant pis. - Tu veux t’arrêter ? - Oui, j’ai mal aux jambes. - Ouais, mais est-ce que tu as bien rangé tes chaussettes dans tes chaussures ?
86
- Faut pas déraper. - Quoi ? - Faut pas déraper. - Quoi ? - Non rien. Trop tard. Tout ça, c’est de la faute à l’attraction terrestre. Parce que, tu vois, si ta gamelle tu te l’étais prise sur la lune, ça aurait fait six fois moins mal qu’ici.
87
Y a des rouges, eh ben, elles sont bien plus dures que des noires. Ça veut rien dire leurs couleurs.
- Regarde, c’est Sylvie. - Mais non, c’est pas elle. - Si, regarde, elle est blonde. - Avec le casque, on peut pas voir si elle est blonde. - Oui, mais regarde, elle a des skis, des chaussures, des bâtons et une combinaison rose : c’est Sylvie. Hé, SANDRINNNEE, attends-nous. Là, on monte en haut, puis on descend en bas et on se retrouve.
88
89
Fais pas ta maligne, toi, d’abord, parce qu’on s’arrête pas derrière les bosses d’abord. Allô, tu m’entends ? Oui, je suis sur un tire-fesses. Tu m’entends ? Sur un tirefesses, je suis SUR UN TIREFESSES. Non, y a du vent, alors ça fait du bruit. SUR UN TIRE-FESSES, JE SUIS SUR UN TIRE-FESSES. Bon, je te laisse, ça passe pas.
- Mets-toi en arrière, mets-toi en avant. - Trop tard. ça va chérie, t’auras pas peur ? Parce qu’on va en haut, et puis tu t’arrêtes, et on descend en bas. Et si tout va bien, on recommence. Qu’est-ce qui monte plus haut que le mont Blanc ?
90
91
- T’as pas trop chaud ? - Hein ? - T’as pas trop chaud ? - Comment ? - Oh, tu dois avoir de la transpiration dans les tympans, c’est pas possible ! Si tu fais des grandes pistes, il faut que tu fasses des grands virages, sinon ça va trop vite. Oh, ça caille, j’ai les orteils… je ne sais même pas si j’en ai encore. 92
Hum, do you speak English ? 93
Les prix en station, c’est un truc de dingue. Moi, je vais pas faire mes courses quand j’ai faim, sinon, ça me coûte trop cher.
Cochon heureux, jambon goûteux.
94
- Tu crois vraiment que les moniteurs, ils attrapent plein de nanas ? - Ben, j’sais pas parce qu’avec leurs traces de lunettes, ça fait con quand même, on dirait des ratonslaveurs. 95
- Oh, t’as pris une taie d’oreiller, toi pour l’appart’ ? - Non, je m’en fous, j’ai mon anorak.
- Oh, mais moi, je l’ai déjà le flocon. - Ah bon ? - Ouais, c’est celui de mon frère. Remonte ta tirette de ton anorak, la neige va rentrer.
- Bon, on y va, on va prendre les œufs pour faire la piste bleue. - Et elle est où la poule ?
96
97
- Vous êtes du Nord, vous aussi ? Vous connaissez la station ? Non, parce que moi, j’ai habité pas loin, dans la vallée pendant cinq ans et puis j’ai eu une mutation, vous voyez, hum. Bon, vous connaissez pas, alors. Ici, c’est merveilleux, il faudrait garder le cadre, mais avec la mentalité des gens du Nord, mais le cadre, c’est beau : vous montez le matin à 3 000 mètres et il y a un panorama à vous couper le souffle.
98
- Oui, mais ici, on est à 1 800 mètres. - Oui et alors ?- Eh ben, ça fait une trotte et en plus, j’ai un ongle incarné. - Non, mais y a le téléphérique. - Ah bon, vous y allez pas à pied voir le panorama ? C’est de la triche. - Il est où le beurre ? - … - Il est où le beurre ? - Ben, dans le frigo, mais quel rapport ? - Alors, il est pas parti en vacances, lui.
99
- J’ai froid aux doigts. - Attends, je vais souffler dessus. - Non, tu vas me les mordre. - Mais non, ça va chauffer : pffft pchtttt pffffcht. - ça chauffe rien du tout.
C’est quand qu’on arrive ? On a le temps de dormir sur ce siège, sauf que je préfère mon lit. 100
- J’ai vu une vidéo sur Internet, un surfer sur une pente à 80 degrés, non, je te jure, tu te demandes comment la neige elle tient. Il était sur une crête, je sais même pas comment il a fait pour chausser. - Et il est monté comment ? - Pas à pied, il pouvait pas, c’était trop raide. - Si il tombe, il se croûte. - Ouais. Ils sont tarés. - C’est comme les surfers dans les grosses vagues, si ils tombent, ils se croûtent. - Ouais ils sont tarés. - Ouais. 101
Pour aller de l’autre côté de la station, c’est tellement loin qu’il faut le casse-croûte et le temps clair. - Eh ! vous m’écrasez ! La benne, elle penche, qui c’est qui est gros ? - Non, moi, je suis enrobé.
- Qu’est ce qu’on mange à midi ? - Des raviolis et des yaourts. - … - Et on rentre à l’appart’ vers 13 heures. - Et si on mangeait sur les pistes ?
Pouh, qui pue du gant ? 102
103
9 782916 416120
9,90 euros Imprimé en France www.inverse.fr isbn 978-2-916416-12-0
éditions inverse/// collection1015/n°05
- Nan, nan ! On bouffe sur le télésiège et on skie pendant que les cons sont au resto.
- Aujourd’hui, la neige, elle est pas bonne, elle est pleine de bosses.
- T’as vu ils sont trop bien mes skis panoramiques.
Les remontées mécaniques ont des oreilles. Sur les télésièges, téléskis et télécabines, dans les files d’attente, on taille la bavette, on refait le monde. Bons mots et traits d’esprit prolifèrent et ont été récoltés dans ces pages : plus de 200 brèves hilarantes chassées en milieu naturel et certifiées authentiques. - Tu crois vraiment que les moniteurs, ils attrapent plein de nanas ? - Ben, j’sais pas parce qu’avec leurs traces de lunettes, ça fait con quand même, on dirait des ratons-laveurs. - Oh faudrait se prendre un peu des photos, non ? Sinon on va tout oublier, on va même oublier qu’on est venus. - Je vais retourner au magasin, il faut me régler la vitesse de mes skis : ils vont trop vite.
photographie : s.bouvier