SCOOP N°9

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CAHIER EUROPE

L’OPEN ISCPA TOURNOI DE TENNIS DES JOURNALISTES Organisé par les étudiants de l’ISCPA - Institut des Médias de Paris au TCBB - Tennis Club de Boulogne Billancourt

Depuis 12 ans, le seul tournoi de tennis réservé aux journalistes professionnels

Aurélien Canot et Vincent Beckaert après un match

A deux pas de Roland Garros, dans un cadre dépaysant et très fréquenté par les amateurs de tennis du monde des médias se déroulera en avril 2006 la douzième édition de l’OPEN ISCPA.

Comment La Croix a couvert la mort du Pape

SCOOP

LE MAGAZINE DES MÉTIERS DU JOURNALISME UNE PUBLICATION RÉALISÉE PAR LES ÉTUDIANTS DE L’ISCPA INSTITUT DES MÉDIAS PARIS

SAISON 2005 • N°9

Ont aussi déjà participé à l’OPEN ISCPA : Patrick Poivre d’Arvor, Antoine Cormery, Nelson Montfort, Frédéric Jaillant, Bruno Millienne, David Barouh…

Denis Brogniart

Livres : nous avons lu Lester Bangs et Alain Pacadis

4 pages sur la liberté de la presse en Italie, Belgique, Angleterre, Russie, Slovénie, Pologne…

Les compétitions sont de bon niveau et les joueurs enthousiastes. Certains réaffirment chaque année ne vouloir manquer un Open ISCPA pour rien au monde, dès lors que leur emploi du temps professionnel le permet (les aléas du métier !). Heureusement, les participants peuvent choisir leurs horaires et leurs adversaires. De nombreux cadeaux sont à gagner, la présence de sponsors permettant d’organiser une manifestation quasi-professionnelle.

TÉLÉVISION : LES RÉDACTEURS DE L’OMBRE

Ce tournoi de tennis d’une durée de deux semaines offre deux particularités : il est organisé par une école de journalisme pour des journalistes professionnels, classés ou non. Devenu une référence dans l'ouest parisien, plus précisément sur le site prestigieux du Tennis Club de Boulogne Billancourt, L’OPEN ISCPA attire une centaine de participants chaque année. Des compétitions intensives pour des journalistes qui apprécient l’ambiance et le contact avec les étudiants. Petit extrait du livre d’or : « C’était vraiment sympa, je reviendrai l’année prochaine avec plaisir » Denis Brogniart « C’est un très agréable tournoi qui doit beaucoup à la gentillesse et à la compétence des étudiants qui l’animent » Christian Quidet Nicolas Lambert

Yves Noël

« Je ne fais que deux tournois par an avec Roland Garros : celui-ci est le meilleur ! » Valentin Macovescu

Pour les étudiants de l’ISCPA-Institut des Médias de Paris, c’est aussi l’occasion d’apprendre à organiser un événement sportif, qui demande 6 mois de préparation. Constituée en association loi 1901 depuis 2004, l’équipe d’étudiants mandatée par l’école s’est structurée : chargés des partenariats, des relations presse, de l’édition, de la production, de l’organisation des matchs, de la trésorerie, et bien sûr, l’incontournable webmaster qui permet, au jour le jour, de suivre l’événement sur internet.

Contact pour participer aux matchs en 2006 : 01 40 03 79 63 e-mail : openiscpa@groupe-igs.asso.fr Retrouvez toutes les infos sur le site de l'OPEN ISCPA : www.openiscpa.com

Olivier Osten, ancien rédacteur de “blanches” et désormais rédacteur-prompteur pour “20h10 pétantes” sur Canal +


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PROGRAMMES ET DÉBOUCHÉS ECOLE PROFESSIONNALISANTE L’ISCPA - Institut des Médias de Paris f o rme 470 étudiants aux métiers de la communication, du journalisme, et de la production TV, cinéma, musique, jeux vidéo, spectacle vivant. Créé en 1991, l’ISCPA-Institut des Médias a pour spécificité de former : - En 3 ans après le baccalauréat : des journalistes - En 3 à 4 ans après le baccalauréat : des chefs de projets en communication - En 2 ans après un bac + 3 : des responsables de la communication et des relations extérieures - En 3 ans après un bac + 2 ou en 2 ans après un bac + 3 : des professionnels de la production dite " entertainment ". 3 FILIÈRES DISTINCTES Elles intègrent - des stages de longue durée chaque année (stages à l’étranger possibles, sous convention ) - une pédagogie axée sur des apprentissages professionnels ( t o u rnages, journaux, compétitions d’agences, pitchs…). Le mode d’évaluation des étudiants est tourné vers le Système Académique répondant aux normes des crédits ECTS, système initié par le Groupe IGS (Institut de Gestion Sociale) auquel l’école est rattachée. Ces méthodes d’organisation semestrielle et d’évaluation pédagogique permettent une plus grande ouvert u re sur la poursuite d’études en Europe.

(programmes détaillés sur simple demande)

Journalisme Les débouchés du métier de journaliste, re p o rt e r, secrétaire de rédaction ou rédacteur en chef se situent dans la presse écrite ou on-line, la télévision, la radio ou les agences de pre s s e . - 1ère année : Validation d’acquis de culture générale, de techniques d’enquêtes, des bases rédactionnelles et a p p rentissage des outils. - 2ème année : Mises en situation professionnelle dans les médias (presse écrite, Internet, radio, TV). - 3ème année : Spécialisation au travers de projets et partenariats (TV, radio, Presse écrite).

Communication Les débouchés sont variés : communication externe, interne, événementielle, relations presse ou publiques, sectorielle, d’influence, de crise, création publicitaire…, tant en secteur privé, associatif, public ou au sein des agences. - 1er cycle, 1ère année : Découverte (initiation) de l’univers de la communication (acteurs, méthodes, langage, actions de communicationpro f e s s i o n n e l l e s … ) . - 2ème année : Application pratique des outils de la communication, de la publicité, de l’audiovisuel, du multimédia ; cas d’entre p r i s e s … - 3ème année : Spécialisation métier (média / hors média) et ancrage professionnel via les compétitions d’agences. - Ancien 2nd cycle, 4ème année : Conduite de projets et/ou option " International " - Nouveau 2nd cycle en 2 ans, 4ème et 5ème années : Maîtrise des enjeux et outils de conduite du changement dans l’entreprise via des enseignements pratiques.

Production – TV, cinéma, musique, jeux vidéo, spectacle vivant Il s’agit d’appre n d re, en tant que futur pro d u c t e u r, à maîtriser un projet dans sa continuité, de l’évaluation de sa faisabilité à sa diffusion. Ce métier de coordination, de gestion et d’impulsion offre des débouchés variés dans les univers de la télévision, du cinéma, de la musique ou du multimédia. - Année Préparatoire " Prépa Prod " : Mise à niveau et contacts avec la profession - Nouveau 2nd cycle, 1ère année (BAC + 4) : Découverte économique, politique, culturelle, juridique du secteur et de ses techniques. - 2ème année (BAC + 5) : Gestion de la création à la diffusion – distribution d’une œuvre artistique. Pitch et showcase. MOYENS TECHNIQUES

VIE ASSOCIATIVE ET EVENEMENTS

ADMISSION

L’ISCPA - Institut des Médias de Paris met à disposition de ses étudiants de nombreuses caméras numériques, un studio radio/régie, un studio TV/régie, de nombreux bancs de montage Final Cut Pro, des amphit h é â t res, des salles informatiques équipées de Pentium orientés PAO et multimédia, un accès libre Internet sur le campus …

La participation des étudiants aux événements et associations de l’école crédite leur CV d’expériences vécues et concrètes, en autonomie et en équipe : - l’Open de Tennis des Journ a l i s t e s de l’ISCPA (tournoi entre 120 journalistes professionnels, organisé par les étudiants) - le BDE (Bureau des Elèves), - la Junior Création (missions e ffectuées auprès d’entre p r i s e s comme une vraie pre s t a t i o n d’agence de communication) - l’Association des Anciens Elèves, - et tous les événements de l’école (festivals, tournois sportifs, clubs culturels).

D i recte ou en admission parallèle selon les places disponibles : De Bac à Bac + 4 validé : nous consulter. Examens : - en 1er cycle : étude du dossier, culture générale, expression écrite, anglais, entretien de motivation. - En 2nd cycle : étude approfondie du dossier et entretien de motivation face à un jury. Dates des épreuves : certains m e rc redis de fin janvier à fin juillet sous réserve de places disponibles. Nous consulter. Frais de dossier et de tests d’aptitude : 50 _ en 1er cycle ; 70 _ en 2nd cycle.

Contact ISCPA - Institut des Médias - Paris Campus Parodi, 12 rue Alexandre Parodi, 75010 Paris Tél inscriptions & stages 01 40 03 15 56 Tél secrétariat pédagogique 01 44 84 30 64 Fax : 01 40 03 15 31 Email : iscpaparis@groupe-igs.asso.fr Site Internet : w w w.iscpa-paris.com Etablissement d’Enseignement Supérieur Privé

En 1918, le Syndicat des Journalistes rédige une charte des devoirs professionnels des journalistes français en réaction à la censure dont les journalistes ont été victimes pendant la guerre. L’adoption de ce texte marque une véritable rupture avec la fin du XIXème siècle, période pendant laquelle les plumes se vendaient au plus offrant. Depuis, l’ensemble des journalistes français se réclament de cette déclaration.

La Charte des Devoirs Professionnels des Journalistes Français

Un journaliste digne de ce nom : • prend la responsabilité de tous ses écrits, même anonymes • tient la calomnie, les accusations sans preuves, l’altération des documents, la déformation des faits, le mensonge pour les plus graves fautes professionnelles • ne reconnaît que la juridiction de ses pairs, souveraine en matière d’honneur professionnel • n’accepte que des missions compatibles avec la dignité professionnelle • s’interdit d’invoquer un titre ou une qualité imaginaire, d’user de moyens déloyaux pour obtenir une information ou surprendre la bonne foi de quiconque • ne touche pas d’argent dans un service public ou une entreprise privée où sa qualité de journaliste, ses influences, ses relations seraient susceptibles d’être exploitées • ne signe pas de son nom des articles de réclame commerciale ou financière • ne commet aucun plagiat, cite les confrères dont il reproduit un texte quelconque • ne sollicite pas la place d’un confrère, ni ne provoque son renvoi en offrant de travailler à des conditions inférieures • garde le secret professionnel • n’use pas de la liberté de la presse dans une intention intéressée • revendique la liberté de publier honnêtement ses informations • tient le scrupule et le souci de la justice pour des règles premières • ne confond pas son rôle avec celui du policier.

Paris, juillet 1918 - révisée en 1939


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Sommaire

E D I T O

Amuse-gueule

4 • Fêtes sanglantes et mauvais goût, le second recueil des chroniques du légendaire rock critic américain Lester Bangs ; Temps de cerveau humain disponible, un court récit autobiographique de Christophe Tison sur la télévision. 5 • Nightclubbing, le recueil des articles du chroniqueur mondain Alain Pacadis ; Journaliste, dans les pas d’Hubert Meuve-Méry, un témoignage de François Simon sur le Monde et son fondateur. 6 • Mémoires d’otages, le témoignage de Christian Chesnot et Georges Malbrunot sur leur captivité : le bimestriel satirique Tant pis pour vous fête son premier anniversaire. 7 • Le Guignol et le Magistrat, un échange de vues entre Bruno Gaccio et Philippe Bilger sur la liberté d’expression ; Paris Voice, le gratuit des anglophones de Paris.

En couverture 8-12 • TÉLÉVISION : LES HOMMES DE L’OMBRE. Qui parle à l’autre bout de l’oreillette de Jean-Luc Delarue ? Qui rédige les fiches de Michel Drucker ? Scoop est allé à la rencontre des professionnels qui travaillent dans l’ombre pour les stars de la télévision.

Actualité

13 • Remise en forme pour la maison ronde. Le grand chantier de rénovation de la Maison de la Radio a commencé.

Métier

14 • “Ma seule peur était que l’agonie du pape dure trop longtemps”. Entretien avec le père Michel Kubler, responsable des pages Religion au quotidien La Croix. 15 • Le correspondant local de presse, esclave moderne ? Le CLP exerce une activité de journaliste mais n’en a pas le statut. 16 • Cette femme ne paye jamais ses notes de restaurant. Colette Monsat est journaliste gastronomique au Figaroscope depuis 18 ans. 16 • Votre plus mauvais souvenir… Jean-Michel Maire, chef de rubrique TV au Figaroscope, évoque Sarajevo. 17 • Jean-Claude Allanic, “l’emmerdeur de service”. Le médiateur de la rédaction de France 2 fait tampon entre les téléspectateurs et ses confrères journalistes. 18 • Un Journaliste, un blog. Emmanuel Davidenkoff, journaliste spécialisé dans l’éducation, nous parle de son blog. 18 • Que deviennent les anciens ISCPA - Institut des Médias de Paris ? Thibaut de Jaegher, journaliste à l’Usine Nouvelle. 19 • Confessions d’un “intermittent de la presse”. Marc Fernandez, 34 ans, est pigiste depuis quatre ans.

CAHIER EUROPE, sommaire détaillé p.20 24 • Les

Beau Linge

Mémoires du roi Sacco. Eugène Saccomano raconte dans un livre ses quarante années de journalisme, dont trente au service des sports. 25 • Dans l’enfer des clandestins. Grégoire Deniau a reçu en mai 2005 le prix Albert Londres pour son reportage TV “Traversée clandestine”. 26 • Benoît Duquesne à la barre du 13 heures. Le journaliste de France 2 a remplacé au pied levé Christophe Hondelatte pour présenter le journal de la mi-journée. Scoop n°9 • saison 2005

Quoi de neuf en Italie ? La grande nouveauté de ce neuvième numéro de Scoop, c’est bien sûr l’ouverture d’un Cahier Europe. Régulièrement, depuis la création du magazine en 1997, nous avons éprouvé le besoin de sortir des frontières de l’Hexagone. L’année dernière, par exemple, nous consacrions le dossier de couverture à la présence des médias français en Afrique. Le Cahier Europe est né de la réflexion sur le sujet de couverture de ce numéro 9. Une belle idée a jailli : dresser le bilan de la liberté de la presse dans les vingt-cinq pays de l’Union. Très vite, il est apparu que la tâche était herculéenne et que nous ne pourrions la mener correctement à bien compte tenu des forces et du temps dont nous disposions. Mais les premiers papiers sont quand même tombés, excitants, et nous avons décidé de les rassembler en une nouvelle section du magazine. Vous noterez, pour cette première édition, une série d’articles qui nous font découvrir les conditions de travail des journalistes dans certains pays de l’Est. Scoop s’étoffe, donc, mais reste fidèle à sa ligne éditoriale. Depuis plusieurs années déjà, le journal s’ouvre par des compte rendus de livres. Les ouvrages consacrés au journalisme sont toujours plus nombreux et c’est tout naturellement que l’espace que nous leur consacrons augmente. La section centrale de Scoop, dite Métier, s’attache à couvrir toutes les dimensions de la pratique du journalisme en France. Cette année, par exemple, nous donnons la parole à un journaliste gastronomique, en l’occurence Colette Monsat du Figaroscope. C’est également dans ces pages que nous nous interrogeons sur l’étrange statut – ou devrait-on plutôt parler d’absence de statut ? – des correspondants locaux de presse. Quant à la section Beau Linge, qui clôt le magazine, elle nous donne l’occasion de dresser le portrait des pointures de la profession. Un mot, pour finir, sur l’article de couverture. On pourra nous reprocher d’avoir consacré cinq pages à des professionnels qui rédigent des fiches ou des textes prompteur. Nous rétorquerons que ces métiers sont en plein développement et que le journalisme documentaire est aussi du journalisme, même s’il est people. A votre avis, quel est le plus journaliste des deux ? Stephane Bern ou l’homme de l’ombre qui rédige toutes les questions qu’il posera à ses invités ?

La Rédaction


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LE MAGAZINE DES MÉTIERS DU JOURNALISME

SCOOP n°9 – saison 2005, est un magazine réalisé dans le cadre des cours de pré-spécialisation Presse par les étudiants en j o u r n a l i s m e 2è m e a n n é d e l ’ I S C P A INSTITUT DES MÉDIAS PARIS

ISCPA INSTITUT DES MÉDIAS PARIS : 12, rue Alexandre Parodi 75010 Paris 01 40 03 15 56 iscpaparis@ groupe-igs.asso.fr

LE SITE DE L’ÉCOLE : www.iscpa-paris.com

> Rédacteur en chef Didier Mervelet (professeur) > Directeur artistique Jean-Jacques Morello (professeur)

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> Ont collaboré à ce numéro : Jean-Christophe Bacri, Jean-Marie Bagayoko, Guillaume Batailler, Marie Baudlot, Sarah Boccon-Gibod, Nicolas Briard, Yann Buxeda, Romain Capdepon, Fanny Chagniot, Thibaut Chervet, Thomas Chessebœuf, Béatrice Corceiro, Vincent Giraldo, Marie Kergoët, Cyrille Larrouy, Stéphanie Laurent, Charlotte Lavocat, Virginie Lebaler, Raphaël Letellier, Julie Levoyer, Jessica Lia, Edouard Loiseau, Claire Neilz, Anne Odru, Marc Ollivier, Jonathan Rapaport, Aude Rapin, Pierre Régniez, Xavier Ropartz, Lejla Sadovic, Johanna Simonin, Olivier Tasch Les portraits photographiques ont été réalisés par les membres de la rédaction sauf indication contraire. > Support logistique Gwenaëla Caprani Mehdi Zerhouni > Directeur de la publication Pierre-Emmanuel Richard (directeur de l’école)

Attention au Big Bangs ! Après Psychotic Reactions, Tristram publie enfin le second recueil des chroniques de Lester Bangs. La vie rock’n’roll, mode d’emploi…

T

rublion surdoué, poivrot mythique… Les clichés sur le rock critic Lester Bangs font souvent oublier sa finesse d’analyse, son éthique et son humour. Tombé dans le rock à 16 ans, en 1964, il est l’emblème de la contreculture. Lui qui a vécu le choc des Beatles, la révolution des Stones, reste de marbre face au star-system. Sa technique d’interview : « Commencer par la question la plus insultante qui soit. Ce sont des rocks stars, on ne leur doit aucune obéissance ! ». Le fréquenter pouvait s’avérer difficile. De peur qu’il ne vous gerbe sur les chaussures. Et surtout à cause de sa lucidité corrosive. Les Fêtes sanglantes de Lester Bangs sont des chroniques acides parues entre 1977 et 1982 dans différents magazines, de Rolling Stone à Creem en passant par le Village Voice. Toutes les figures du rock et de l’underground sont détruites ou adulées. Dans sa ligne de mire : le maquillage de

Bowie, le son des Stones, la stupidité de Sid Vicious des Sex Pistols : « Sid était un connard, comme lui-même aurait été le premier à vous le dire. Disons, non une âme perdue et condamnée, non une victime sociale ou sous-culturelle, disons un simple débile médiocre ». Il adore Lou Reed et Patti Smith mais désavoue Mac

Cartney : « Il fait de charmants fonds sonores pour boutiques branchées ». Lester Bangs revendique le droit d’avoir tort, de se tromper et surtout de reconnaître ses erreurs. Bangs invente le punk avant le punk, descend le punk quand le punk est tout et donc rien : « Le punk c’est pas le punk parce qu’il est trop codifié. Le punk c’est l’inutilité. Le punk c’est dire au punk d’aller se faire foutre ». Ouvrons les yeux : nous vivons dans la société de la déception ! En plus d’incarner le refus du conformisme, Bangs est la contre-culture de la contreculture. Bangs est Anti ! Anti-mode. Anti-mythification. Anti-anti : « Mort à la mode sous toutes ses formes ! La mode, c’est

juste une bande de connards qui vous disent comment vous comporter ». Lester Bangs est unique. LA référence ultime ou bien l’arnaque du siècle. De toute façon, pour lui, c’est pareil ! Lester Bangs n’aime pas la nouveauté. Mais Lester Bangs n’est pas un nostalgique. Ce n’était pas mieux avant. Avant, c’était déjà naze : « La vérité est que les années 60, pour ne pas parler des années 50, étaient nulles ». Trop de picole. Trop de cachetons. Trop de Darvon. Bangs décède, en 1982, d’une overdose. L’année de sa mort, le critique désabusé écrira : « C’est dur aujourd’hui d’écrire sur la musique, puisqu’elle représente le vide ». A méditer par les fans de Keren Ann et de Norah Jones. Julie Levoyer Fêtes sanglantes & mauvais goût, Tristram, 494 pages de fureur, de violence et de désillusion, 20 €

Misère de la télévision Dans ce court récit autobiographique, Christophe Tison raconte ses années de « télé-paillettes ».

A

ujourd’hui rédacteur en chef au service Culture d’I-télé, la chaîne info de Canal +, Christophe Tison relate dans Temps de cerveau humain disponible ses années d’expérience de la « télévisionpaillettes », quand il voguait d’émissions people racoleuses en émissions culturelles vaseuses pour adolescents. L’auteur d’Il m’aimait récit autobiographique Scoop n°9 • saison 2005

tragique où il révélait avoir été violé dans son enfance – signe ici un ouvrage fort utile et ce, pour deux raisons. D’une part, son récit atteste de la futilité des présentateurs vedettes, de la médiocrité des reportages réalisés par des journalistes pressés par le temps et emportés par la pauvreté des émissions qui les emploient, des directs catastrophiques, de la drogue, des

coucheries, du vide, de l’insignifiance, de la vanité… D’autre part, n’en déplaise à son auteur, ce manuscrit rédigé à la manière de Frédéric Beigbeder est à l’image de la télévision qu’il décrit : il donne la sensation d’avoir été bâclé. Sarah Boccon-Gibod Temps de cerveau humain disponible, Grasset, 269 pages, 17,90 €


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Chroniques de la « slow death » Grand amateur d’alcool et de Tranxène, Alain Pacadis aura été le chroniqueur culte des années glam-punk, strass et poignets de force.

C

omment découvrir l’ambiance du Palace, la plus grande boîte disco de Paris à la fin des années 70 ? Comment retrouver l’épo-

que où Factory Records n’était qu’« une petite maison de disque de Manchester » ? En se plongeant dans Nightclubbing, compilation quasi-intégrale des chroniques et articles d’Alain Pacadis écrits entre 1973 et 1986 et parus principalement dans le quotidien Libération. Pacadis, qui a aussi écrit pour Actuel et Le Gai Pied, parle de lieux qui n’existent plus. Mais on ne retrouva pas non plus de si tôt, dans les colonnes d’un canard, le style halluciné de “Paca”, qui repose sur un régime draconien : courir les fêtes les plus hup-

pées, ingurgiter des doses industrielles d’alcool et de drogues, puis passer au journal pour écrire son papier. Si “Piquiradis”, comme on le surnommait, profitait largement du système, comme en témoigne la lettre en forme d’épilogue de la maison de disques Musidisc à Serge July, qui fustige les excès de l’envoyé de Libération, sa voix était libre. Ces chroniques relatent des épisodes quasi-historiques de la déjante des années 70 et 80. Par exemple, l’inoubliable passage de Charles Bukowski chez Bernard Pivot à “Apostrophes”, en novembre 78. La veille, en l’interviewant, Pacadis prévient Bukowski qu’il n’y aura pas d’alcool sur le plateau. L’écrivain amé-

ricain prévoit donc d’amener deux bouteilles de vin. La suite figure dans tous les zappings. Un représentant du “gonzo journalisme” Alain Pacadis a aussi rencontré celui que nombreux considèrent comme son alter ego, Serge Gainsbourg. Au cours d’une longue interview, une sorte de discussion libre entre amis totalement ivres, il lâche cette phrase qui résume bien son nihilisme : “La politique ne m’intéresse pas. Ca ne fait pas planer“. Pacadis fut l’un des représentants en France du « gonzo journalisme » à l’américaine, quand le journaliste devient le héros déchiré et délirant de ses propres articles.

Le chroniqueur mondain a utilisé sa tribune à Libé pour exprimer son malêtre : « Je me traîne dans tous les bars. Au petit matin, je m’écroule dans les chiottes pour dégueuler mon alcool et ma haine. » A travers ses récits nocturnes, Pacadis entraîne le lecteur dans ce qu’il appelle la « slow death » : la mort lente qu’entraîne la consommation massive de produits toxiques. Depuis, le journalisme mondain a pas mal changé. Raphaël Letellier Nightclubbing, chroniques et articles 1973-1986, Alain Pacadis, Denoël X-Trême, 840 pages, 28 euros.

Portait d’un journaliste indépendant François Simon nous livre son témoignage sur Hubert Beuve-Méry, le fondateur du Monde.

F

rançois Simon a été journaliste au Monde pendant plus de vingt ans. Il est aussi l’auteur des Petites coupures de presse,

un essai fondé sur son expérience de grand reporter à Ouest-France. Pour son nouvel ouvrage, il s’est lancé dans un ambitieux projet : mêler un portrait du fondateur du Monde, Hubert BeuveMéry, à une analyse sur la place du journaliste dans la société contemporaine. Lorsqu’en 1944, Hubert Beuve-Méry est contacté pour reprendre le journal Le Temps de Paris, il s’engage dans l’aventure avec réticence. Mais des cendres du Temps naquit Le Monde, le 11 décembre de la même année. Son fondateur le dirigea jusqu’à sa

mort, en 1989. François Simon, qui fut président du Conseil de surveillance et président de la Société des rédacteurs, a travaillé aux côtés d’Hubert BeuveMéry durant des années. Il répond à toutes les lettres de lecteurs On apprend par exemple que le fondateur et directeur du journal passait des heures à s’occuper du courrier des lecteurs. Pour « répondre aux amis, bien sûr, mais aussi et surtout à ceux qui n’aimaient pas Le Monde », parce qu’« il ne supportait pas

qu’un correspondant ait pu déplorer que le journal ne lui eût pas répondu ». François Simon fait aussi parler de nombreux journalistes dont ses collègues du Monde Jacques Lesourne et Edouard Sablier. Ils racontent comment il était difficile à cette époque de diriger un journal indépendant de tous les pouvoirs, comme l’entendait Hubert Beuve-Méry. En parallèle, nombre de thèmes généraux sont abordés : le fonctionnement et la gestion d’une entreprise de presse, le droit de la presse et des journalistes, ou encore le

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problème récurrent de l’éthique et de l’honnêteté intellectuelle dont les journalistes doivent faire preuve. Mais les sujets sont si nombreux qu’aucun n’est véritablement approfondi. Si ce livre ne comble pas toutes les attentes, il a tout de même le mérite de donner envie d’en savoir plus sur Hubert BeuveMéry et son incroyable parcours. Marie Baudlot Journaliste, Dans les pas d’Hubert Beuve-Méry, Edition Arléa, 15 €

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Amuse-gueule Un canard déchaîné ! Réalisé par deux amis, le bimestriel satirique Tant pis pour vous ne fléchit pas et fête son premier anniversaire.

J

«

e voudrais que Tant pis pour Vous ressemble à la France d’aujourd’hui. Pas à l’image que les médias en donnent. Un journal qui s’intéresse plus à l’humanité qu’à l’actualité ». Le ton est donné dès le premier éditorial, en mars 2004. Grégory Protche, pigiste, et Karim Boukercha, pigiste illustrateur et auteur de livres sur les graffiti, lancent Tant Pis Pour Vous et décident d’être « enfin » libres. Ras le bol de la presse formatée et conventionnelle ! Un autre constat : les 25 ans et plus n’ont pas de journal. Les deux acolytes expliquent : « Il existe un public qui s’intéresse au foot et à la littérature, aux personnages controversés et aux artistes, aux faits divers et à la politique ». Il sera pour eux. Tant Pis Pour Vous n’a peur de rien et surtout pas d’assommer les plus connus. Dès le numéro un, Renaud, le deuxième rockeur préféré des Français après Johnny, en prend sérieusement pour son grade : un grand “Ta gueule !” accompagne son portrait en couverture et, à l’intérieur, il est sévèrement chahuté pour son embourgeoisement. Tant Pis Pour Vous ne s’en sortira pas comme ça : 15 000 euros sont réclamés par le chanteur, mais le magazine a gagné son premier galon. Récemment honoré d’un article dans Technikart, TPPV a fait travailler quelques pointures, par exemple Virginie Despentes et Jacques Vergès. Mais derrière ses « personnalités » se cache une rédaction « qui ne ressemble à rien mais est capable de tout », dixit Karim Boukercha. On attend la suite. Charlotte Lavocat et Jessica Lia

Le témoignage de Chesnot et Malbrunot Le livre des deux otages n’apporte aucune révélation majeure mais personne mieux qu’eux ne pouvait raconter leur histoire.

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«

ye bye Paris », c’est par cette phrase d’un de leurs geôliers que Christian Chesnot et Georges Malbrunot comprennent que la liberté est proche. Le 22 décembre 2004, ils retrouvent le sol français et leur famille grâce à l’action combinée du Quai d’Orsay et de la Direction Générale de la Sécurité Extérieure. C’est la fin de 124 jours de détention pour les deux journalistes français. Le récit de leur capture et de leur libération ainsi que de leurs conditions de détention constituent les trois quarts du livre. On apprend ainsi qu’ils ont déménagé cinq fois. Les deux hommes occupent leur quotidien comme ils peuvent. Christian Chesnot dort tellement que Georges Malbrunot le qualifie ironiquement d‘« otage à tiers temps ». Plus sportif de nature, Malbrunot s’entretient presque tous les jours et passe le reste de son temps à lire et relire Les Années Saddam. En possession de leur dernier livre au moment de leur capture, les deux journalistes craindront qu’il ne leur crée des ennuis. Les dattes, qui constituent l’essentiel des repas, sont une des seules sources de désaccord entre les deux hommes. Un partage inéquitable par Georges Malbrunot provoque la colère de son compagnon

de mésaventure. Autre divergence, faut-il prévenir les geôliers qu’un tuyau fuit alors qu’ils ont ordre de ne jamais appeler ? Mais sur le fond, les deux journalistes ne se divisent jamais, soutien mutuel et conversation les aident à garder l’esprit clair. Bien nourris, jamais violentés Chaque signe, phrase ou geste des geôliers est décortiqué, analysé. Tout au long ou presque de cette épreuve, les otages se voient répondre que leur libération est proche, que c’est une question de jours. Pourtant, elle mettra quatre mois à arriver. Chesnot et Malbrunot ont d’ailleurs bien cru ne jamais revoir leurs proches. La semaine du 8 novembre restera sans doute la plus pénible de leur vie : pour la première fois, les ravisseurs menacent directement de les

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exécuter. Ils passeront cette période horrible réfugiés dans la prière. Détenus par l ’ A r m é e Islamique en Irak (A.I.I.), une organisation coutumière des prises d’otages, Chesnot et Malbrunot n’ont heureusement pas connu le même sort qu’Enzo Baldoni, journaliste italien excuté le 27 août. Leur connaissance du terrain, l’opposition de la France à la guerre, la maîtrise de l’arabe par Christian Chesnot, un optimisme débordant ont facilité leur détention. Bien nourris, ils ne seront jamais violentés ou humiliés, comme avait pu l’être Alexandre Jordanov, détenu quelques jours en avril 2004. A peine libéré, un papier pour le Figaro La loi sur la laïcité à l’école, objet du premier ultimatum de l’A.I.I. fin août, fut abordée à de nombreuses reprises par les ravisseurs, qui voulaient connaître le point de vue de leurs prisonniers. A ce sujet, on apprend également que la mobilisation des musulmanes de France, bien qu’elle ait étonné les ravisseurs, a joué en faveur des deux compères. De retour à Paris, l’instinct professionnel reprend le dessus : Georges

Malbrunot rédige un papier pour le Figaro du 24 décembre. Les deux hommes prennent connaissance auprès des autorités des conditions de négociation ainsi que des interférences qui ont pu retarder leur libération. L’affaire Julia provoque évidemment la colère des auteurs et de leur famille, même s’ils admettent que l’homme s’est sans doute fait manipuler. La contre-enquête d’une cinquantaine de pages qui conclut le livre apporte des éclairages sur les moyens mis en place par les autorités françaises tant pour les négociations que pour la libération des otages. On en apprend également plus sur les intermédiaires influents dans la région. Mais de nombreuses questions restent en suspens. Qu’en est-il d’une éventuelle rançon, du coût politique ou encore des concessions faites à l’A.I.I. ? Autant de points qui resteront sûrement sans réponse longtemps pour des raisons d’intérêt national. Mais le témoignage de Chesnot et Malbrunot reste inestimable, car il nous rappelle les risques qu’encourent les journalistes en faisant leur métier. Pierre Régniez Mémoires d’otages, Editions Calmann-Lévy, 27 pages, 19€.


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Peut-on se moquer des nains ? Bruno Gaccio, des Guignols de l’Info sur Canal+, et Philippe Bilger, avocat général près la Cour d’assises de Paris, débattent des avancées et des limites de la liberté d’expression en France et dans le monde.

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st-ce-qu’on a le droit de tout dire, de tout montrer et de tout écrire ? Peut-on, comme Bruno Gaccio au cours d’une émission télévisée, faire de l’humour noir sur le dos des nains et prendre le risque “d’ajouter de la souffrance à la souffrance” ? Pas évident…C’est en tout cas la question centrale à laquelle Gaccio et Philippe Bilger tentent d’apporter des éléments de réponse tout au long des 360 pages de ce livre, qui est la retranscription par le journaliste Gilles Verlant de leurs entretiens animés. Et d’abord, la liberté d’expression a-t-elle gagné du terrain ces dernières années ? Sur le plan juridique, M. Bilger est formel : contrairement à ce qui se passait pendant les années 80, les journalistes

peuvent aujourd’hui se défendre des accusations de diffamation, car les tribunaux acceptent désormais des preuves normalement couvertes par le secret d’instruction. « La liberté d’expression a progressé mais en quantité seulement ! », lâche pour sa part Bruno Gaccio, après s’être emporté contre la manipulation de l’information, citant le parti pris de Fox News pour la guerre en Irak. Les journalistes ne sortent pas toujours grandis de l’ouvrage. Bilger dénonce la connivence, citant par exemple le cas de la « promotion scandaleuse » par le journaliste du Point JeanPaul Enthoven du film de Bernard-Henri Lévy, chroniqueur dans le même magazine. Gaccio, pour sa part, ironise sur les journalistes de presse people :

« Journalistes, le mot est fort. Il faudrait inventer un mot : magazinistes ? » Et de conclure : « on devrait non pas interdire la presse people, mais se l’interdire. » Sur la religion, le débat s’emballe avec un Gaccio qui n’a rien perdu de son goût de la provocation : « Je ne crois pas en Dieu et suis persuadé de sa non-existence, c’est lui qui me l’a dit ! » Catholique pratiquant, mais sincère jusqu’à reconnaître ses propres contradictions, Philippe Bilger tolère le dénigrement du catholicisme mais s’offusque de la manière dont les Guignols s’attaquent

au pape Jean-Paul II : « Je trouve ça pitoyable et vulgaire… son rôle politique capital a dû vous échapper. » Pour les deux débatteurs, la liberté d’expres-

sion ne prend pleinement son sens que si elle a une finalité démocratique : « Si elle a un contenu porteur et progressiste » pour Bilger, « si elle fait bouger les choses et rend le monde meilleur » pour Gaccio. Au final, ce livre très stimulant nous offre deux conceptions différentes de cette liberté fondamentale qu’est la liberté de la presse. Une arme politique, un stimulant de l’action et du combat pour le pourfendeur du politiquement correct qu’est Bruno Gaccio. Essentiellement un exercice de rhétorique pour Philippe Bilger, conservateur assumé. Xavier Ropartz Le Guignol et le Magistrat, Flammarion, 357 pages, 19,90 €

An American in Paris Le 9e arrondissement abrite Paris Voice, un magazine gratuit destiné aux anglophones et anglophiles de Paris.

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ob Bishop, le fondateur et directeur de la publication de Paris Voice, a une vingtaine d’années quand il débarque - de Chicago - à Paris, où il a été envoyé comme photographe. Il tombe amoureux de la ville – comme tant d’autres - , décide de s’y installer... et d’y fonder un magazine. Bien avant 20 Minutes, Métro ou autres A Nous Paris, le Voice était gratuit. « Un concept peu évident à

saisir » pour les Français, affirme Bob Bishop, qui, s’il est fier de son journal, admet qu’il lui a « fallu du temps pour l’installer » et faire admettre son apolitisme, « un autre principe que les Français ont du mal à comprendre ». Paris Voice, uniquement consacré à l’art et « l’entertainment », couvre l’actualité culturelle de la capitale : spectacles, concerts, peinture, danse, restau-

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rants... Il est également connu pour ses nombreuses petites annonces et reportages sur des lieux anglophones souvent méconnus du public français. Les petits locaux de la rue Papillon n’abritent généralement pas plus de 4 à 5 personnes, mais ils sont environ 25 (Anglais, Américains, Australiens, Français…) à écrire pour le bimestriel, « chacun apportant sa touche locale ». La concurrence de Time Out Paris, décli-

naison parisienne du géant londonien, fait « frissonner » l’équipe, tout comme Raymond Lakah, cet investisseur franco-égyptien qui, après avoir racheté France Soir, souhaite lancer The France Soir, une version anglaise très complète du quotidien. Paris Voice devra alors compter sur ses 150 000 fidèles lecteurs pour continuer à faire entendre sa voix. Virginie Lebaler

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Certains sont très jeunes, au début de leur carrière. D’autres ont presque trente ans de métier. On ne les voit jamais et pourtant, ils sont les chevilles ouvrières de tous les grands talk-shows de la télévision. Sans eux, les Fogiel, Bern, Ardisson, Delarue et autres Drucker seraient muets. Que font-ils ? En anglais, on appelle ça du “desk”. Traduit en français, cela peut donner quelque chose comme de la “recherche documentaire”. Cela consiste à collecter l’information qui va permettre aux animateurs d’interviewer correctement leurs invités. La base de ce travail, c’est bien sûr la rédaction de fiches, de “blanches” comme on dit à “20h10 pétantes”. Mais les ION : hommes de l’ombre peuvent S S E F PRO aussi être amenés à rédiger les questions des animateurs et à les guider par la voie d’une oreillette. Nous avons interviewé quatre d’entre eux.

n e t s O r e i v i l O

r u e t p rom p r u rn e cte B a d e é R an h p e t S pour al+ n a C sur

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Lect Ma


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En couverture

te t e b r a B Eric

Julien Hinte rman : ION S es S h E F c i O PR e f r

d e r k u c e u r ct D a l d e Ré ich 2 M e c r n pou ur Fra s PROF ESSIO N : teur

de liv res p arc-O our livier Fogie sur Fr l ance 3

Un dossier supervisé par Stéphanie Laurent et réalisé par Edouard Loiseau, Cyrille Larrouy, et Stéphanie Laurent

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QUI SE CACHE DERRIÈRE MICHEL DRUCKER ? Nous avons rencontré Eric Barbette, 48 ans, assistant de Michel Drucker depuis vingt-cinq ans, qui rédige ses fiches pour « Vivement Dimanche », diffusée tous les dimanches midi sur France 2.

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éjà 25 ans aux côtés de Michel Drucker sur 30 ans de carrière ! Cela peut paraître fou mais que de choses accomplies ! Un diplôme de journalisme en main, j’ai été embauché pour travailler aux côtés de Philippe Bouvard. Puis je rencontre Michel, mais pas de dépaysement, il avait les mêmes méthodes de travail que le journaliste de RTL. » La vieille école, il n’y a que ça de vrai

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« Quand Michel a débuté comme journaliste sportif, il n’avait pas d’oreillette, pas de prompteur, simplement son texte tapé à la machine. Il a voulu continuer dans cette forme d’artisanat. Mais aujourd’hui, à part lui, plus personne ne travaille sans ce petit objet greffé à l’oreille. Il y a pour moi deux cas où l’oreillette se justifie. D’abord pour « Ca se discute » de Jean-Luc Delarue, parce que celui-ci a devant lui une dizaine de personnes et il ne peut apprendre toutes leurs biographies. Si quelqu’un peut lui rappeler, grâce au système de l’oreillette, que le témoin n°1 a des points communs avec le témoin n°9, j’appelle ça de l’efficacité journalistique. C’est pareil pour les journaux télévisés où désormais cet outil technologique est devenue une nécessité, un accessoire capital. En revanche, pour la nouvelle génération d’animateurs, je considère que cet appareil n’est plus un instrument mais une prothèse et l’on peut dire que la technique s’est pervertie. Aujourd’hui, on utilise des présentateurs, qui à mon avis, n’ont aucune capacité à l’être. Cette oreillette permet surtout de pallier leur absence de travail. Pas de secret ! Dès qu’il y a un minimum de préparation, on peut éviter cette nouvelle partie du corps humain ! Cela étant dit, le développement de l’oreillette a permis celui d’un nouveau métier qui consiste à téléguider les animateurs.»

tion sur un bristol, c’est une des conditions de ce phénomène de légèreté ! En revanche, je lui fournis tous les éléments factuels à intégrer dans ses questions de manière à obtenir de l’invité une réponse plus intéressante, plus riche, qui aille précisément au-delà du factuel. Cela permet également de gagner du temps. Et oui, il ne faut pas oublier que l’on est toujours dans une logique de timing ! » Du journalisme pur et dur

Des milliers de fiches à mon actif « Nous sommes deux assistants à rédiger 150 à 200 fiches par émission. Ce sont des bristols dactylographiés avec des codes couleurs et de mise en page spécifiques. Michel Drucker les utilise de deux façons : avant l’émission et pendant. Il s’en sert 2, 3 jours avant, afin de préparer « Vivement Dimanche », puisque ces fiches sont censées tout contenir sur l’actualité de l’invité. Et pendant l’enregistrement, elles lui servent de pense-bête. Et oui, Michel a déjà l’essentiel dans la tête ! Au Studio Gabriel, le principe majeur est de

préparer au maximum les émissions afin de leur donner une impression de fluidité. Contrairement à ce que font les assistants actuels, nous ne préparons que les réponses. Cela permet à Michel de moduler, selon ses envies, les questions. Résultat, une aisance et une certaine liberté à l’antenne. Jamais en 25 ans, je ne lui ai écrit une ques-

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« Je suis un technicien du journalisme et certainement pas un artiste. C’est Michel le meneur de jeu. Le talent, c’est lui ! Nous, derrière, on n’existe pas. Mais l’idée à retenir, c’est que nous faisons du journalisme pur et dur, avec rigueur, et avec cette particularité que notre travail s’applique au domaine du divertissement. Au final, je définirais mon métier par le terme d’assistant. Je suis là pour permettre à quelqu’un d’être brillant à l’antenne. Cela peut paraître bizarre, mais c’est un choix et ça ne me gêne pas. Pas de frustration, c’est un vrai métier ! J’ai toujours pensé que l’ombre était plus confortable que la lumière. » propos recueillis par Stéphanie Laurent


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IL LIT POUR MARC OLIVIER FOGIEL

Il est l’oreillette de Jean-Luc Delarue

Julien Hinterman partage son temps entre la rédaction des fiches livres pour ONPP sur France 3 et l’actualité des invités de Plus Clair sur Canal+.

Agé d’une quarantaine d’années, Gilles Bornstein est directeur de la rédaction de l’émission Ça se discute.

« J’ai commencé par une école de cinéma, où j’ai suivi des cours de journalisme. Ma mère est dans le métier, j’ai toujours baigné dans ce monde. Mais ce qui m’intéressait vraiment, c’était l’image. Je me suis orienté vers la réalisation de vidéos. J’ai réalisé une émission de télé, j’ai tourné des reportages et j’ai eu la possibilité de travailler à Paf Production ! » Un travail polyvalent… « Sur « Plus Clair », c’est de la recherche de biographie et beaucoup d’actualité. Le rédacteur en chef me dit qui est l’invité et de quoi il doit parler. Je fais mes recherches et mes fiches en fonction. Je travaille sur deux, trois invités, en début de semaine, car « Plus Clair » est tournée le jeudi. Concrètement, mon travail consiste à donner des billes aux animateurs. Ils peuvent utiliser mes questions telles quelles, en prendre deux pour en faire une seule ou juste se servir de l’angle d’une question. En même temps, je réalise des fiches livres “On ne peut pas plaire à tout le monde”. Mercredi, dernière limite, les derniers livres de la semaine doivent être bouclés car l’émission est diffusée en direct tous les dimanches soirs. Je ne suis pas seul pour travailler : des stagiaires m’aident. Mais leurs fiches n’ont pas besoin d’être aussi fouillées que les miennes. Moi, je ne peux pas me permettre de zapper des chapitres. Avant moi, une seule personne gérait les invités et les livres. Cela posait quelques problèmes en plateau : les livres étaient mal lus, les animateurs passaient à côté d’une interview. La fiche doit rendre le livre vivant, même une œuvre très dure à lire. Il ne faut pas pour autant avoir une plume particulière. Une fiche, c’est de l’écriture bateau, on n’écrit pas pour Libération ! C’est un outil de travail, dont la lecture doit être la plus facile possible. Bien sûr, cela n’empêche pas de demander à mes stagiaires qu’il n’y ait aucune faute d’orthographe. C’est très scolaire quelque part, cette façon de travailler. » En coulisses… « Avant, j’allais régulièrement sur les plateaux de tournage. Pendant la période d’Ariane Massenet, avec Marc-Olivier Fogiel, je lui apportais les promos. C’était une sorte d’assistanat plateau. Maintenant, je ne le fais plus. Une autre chose intéressante : pendant les émissions, je tourne de petites interviews dans les coulisses… » Un bon tremplin ! « Aujourd’hui, j’ai envie de m’orienter vers le journalisme. Je sais tourner, je sais à peu près écrire (rire), je pourrais facilement me

mettre à faire des sujets. Ce métier est une bonne entrée dans le milieu de l’audiovisuel. J’ai pu voir vraiment comment se prépare une émission de télé. Je suis dans le système. Travailler pour des émissions connues comme celles-là, c’est bien sur un CV. A la télévision aujourd’hui, on veut que ça coûte de moins en moins cher tout en faisant avec le moins de moyens possible. J’ai un bon profil : je sais tourner, un peu monter... Je n’ai pas la sensation d’avoir perdu mon temps. Je me suis enrichi par l’intermédiaire des livres, des gens que j’ai rencontrés. » Des horaires libres mais… fous ! « C’est le problème du métier ! Je peux avoir une semaine cool et la suivante, quatre, cinq livres d’un seul coup. Plus les invités à gérer, notamment sur « Plus Clair », s’ils se décommandent, etc. Au final, il m’arrive de faire des nuits blanches sur des bouquins. Ça prend du temps de faire une fiche ! Aujourd’hui, j’évite de trop travailler le week-end. Pendant une certaine période, je lisais en fin de semaine. Je n’en sortais plus ! Maintenant, je préfère travailler sur l’instant. Sur « Plus Clair », il m’arrive de n’avoir rien fait et je dois rendre mon travail pour 10h00. Alors, j’arrive à 6h00 du matin et pendant trois, quatre heures, je bosse. Je n’ai pas l’impression de traîner, je me dis « t’as trois heures, fonce ». Je gère mon temps. Personne ne surveille mes horaires, c’est confortable.» Un salaire honorable « En général, toute les sociétés de production pratiquent la même grille salariale : entre 1 500 et 2 000 € par mois. C’est honnête, quand on sort d’une école, avec un minimum de sécurité de l’emploi. Ce sont des contrats de grille, nous faisons la saison. Ensuite, nous avons les vacances d’été. C’est sympa… » Une anecdote… «J’avais lu un livre de Dave. Il a eu la franchise de me dire que son bouquin, ce n’était pas lui qui l’avait écrit. Il l’avait fait juste pour l’argent ! Il m’a fait cette confidence après l’émission, en buvant un verre. » Propos recueillis par Cyrille Larrouy

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Son nom ne vous dit rien et pourtant Gilles Bornstein, tout autant que J e a n - L u c Delarue, est un pilier du magazine sociétal hebdomadaire qui fait fureur sur France 2. Gilles, c’est l’homme à l’autre bout de la fameuse oreillette de JeanLuc Delarue. Un « homme de l’ombre » qui s’assume : « C’est agréable de penser que les gens nous imaginent au travers de cette oreillette ». Après une maîtrise d’économie et un diplôme de Sciences Po, spécialité journalisme, le jeune homme fait ses premiers pas sur la 5 pendant 5 ans. Il intègre ensuite l’équipe de Capital sur M6, puis LCI, pour enfin poser ses cartons, il y a maintenant 10 ans, au 101 boulevard Murat, où se trouvent les locaux de Réservoir Prod. Autant dire que Ça se discute et lui ont fait leur entrée au sein de l’équipe presque simultanément. Le boulot de Gilles avant l’émission, c’est de recevoir les témoins afin de connaître parfaitement leur histoire. Il rédige ensuite des fiches qui vont lui permettre de guider Delarue. En parallèle, il pose sa voix sur les reportages qui suivent les témoins dans leur quotidien. Deuxième étape : l’enregistrement de l’émission. Gilles s’installe en régie, un casque sur la tête relié à l’oreille gauche de Jean-Luc Delarue. Ca peut démarrer ! Il est le seul à communiquer avec l’animateur, à qui il transmet en permanence des directives. Il lui suggère des questions et l’aide à mettre en rapport les témoins. Bien entendu, le présentateur a toujours la possibilité d’improviser ses propres questions. Mais c’est rare ! Alors, fainéant, Jean-Luc Delarue ? Négatif répond Gilles : « Jean-Luc n’est pas le seul animateur à utiliser une oreillette. La seule différence, c’est que lui ne s’en cache pas. C’est une manière de montrer qu’il a une équipe derrière lui ». A la question « Vous aimeriez un jour sortir de l’ombre ? », Gilles répond sans hésitation ; « Je ne prendrai pas la place de Jean-Luc. Vivre au grand jour, c’est trop contraignant ». Propos recueillis par Stéphanie Laurent

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SANS LUI, STÉPHANE BERN SERAIT SANS VOIX Olivier Osten, 24 ans, travaille pour la Société Européenne de Production, plus communément appelée la SEP, qui produit entre autres « 20h10 pétantes », le talk-show qui a remplacé “ Nulle part ailleurs ” sur Canal +.

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epuis seulement une semaine, ce jeune homme est passé du statut de rédacteur de “blanches” à celui de rédacteur-prompteur. C’est lui qui a le privilège d’écrire les questions que Stéphane Bern pose aux invités. Une semaine de prompteur, c’est un peu court pour parler de ce métier. C’est pourquoi Olivier a préféré s‘exprimer longuement de sa première fonction, rédacteur de blanche. Un travail, qui demande des compétences rédactionnelles, de la rigueur et du flair. Je suis arrivé sur l’émission “ 20h10 pétantes” début septembre 2004. Avec trois autres stagiaires, qui, comme moi, avaient en charge d’écrire les blanches des invités de l’émission. Avant toute chose, définissons la blanche. Une blanche, c’est une sorte de mini-biographie sur un invité, de construction très précise, qui permet de parcourir la vie de la personne en quelques rubriques prédéfinies. Une fois que le service programmation a choisi les invités de la semaine, notre bureau (le bureau des stagiaires…) doit réaliser une blanche sur chacun d’entre eux. Nous commandons à la base d’archive de Canal + tous les articles de presse qui les concernent. Suivant la notoriété de l’invité, on reçoit 50 à 80 pages d’articles. Par exemple, la semaine dernière, nous avons reçu Julio Iglésias et les articles s’échelonnaient de novembre 1990 à octobre 2004. Nous privilégions certains articles comme ceux de VSD, les portraits de Libération, et, pour la vie privée ou les anecdotes « people », Gala ou Voici. C’est une émission de divertissement… Nous avons d’autres sources bien sûr, comme

Internet, ou les biographies. Si l’invité a écrit son autobiographie, nous la lirons. Le but du rédacteur de la blanche est de sélectionner les moments marquants de la vie de l’invité, qui vont être exploitables par les rédacteurs (du prompteur), et donc par le présentateur (Stéphane Bern). Le tout doit être homogène, lisible rapidement et classé par grande étape de la vie. Une blanche représente environ 15 pages. Sa rédaction dure en moyenne six heures. On doit la donner aux animateurs quelques jours avant l’émission. Elle est bonne si au bout des quinze pages, on a capté la personnalité de l’invité. Par ailleurs, chaque émission fonctionne autour d’un thème général. Les questions doivent donc, si possible, s’inscrire dans ce thème. C’est une variable que prend en compte le rédacteur dans la sélection des informations utiles de la blanche. Par exemple, quand on a reçu « Julio », le thème était la séduction. On recherche toujours à orienter “ divertissement ”. Si on reçoit un homme politique, on ne parlera pas de son programme mais de ce qui fait parler de lui, de ce qui crée la polémique. Les profils de ceux qui « blanchent » ici sont très différents. Je sors d’un master de production, un autre de sciences politiques, mais, pour la plupart, les blancheurs sont issus d’écoles de journalisme. Pour moi, les blanches c’est fini, je suis désormais rédacteur du prompteur de l’émission. C’est un job plus créatif, plus riche. En résumé, il faut lire les blanches, trouver des univers communs aux différents invités et rédiger les questions que le présentateur va poser. On garde environ 5 à 10% des informations sélectionnées dans la blanche. C’est un travail qui n’a pas de règles précises. Ce qui est obligatoire, c’est de rester dans l’esprit de l’émission, d’être original, et de faire en sorte que l’invité n’évite pas la question. Il faut qu’il soit amené à raconter sa vie lui-même, éviter que Stéphane Bern le fasse à sa place… Propos recueillis par Edouard Loiseau

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Une blanche type Photo Etat civil Famille, naissance... Très important, il faut avoir le maximum d’informations à ce sujet.

Actualité La raison pour laquelle l’invité a été... invité, ce qu’il est venu vendre.

Parcours Il aime-il aime pas Intéressant si anecdotique

Anecdotes Les moments marquants de la vie de l’invité. Drôles ou tristes…

Citation Du type “Il a dit...”, principalement sur ses succès, sa vie, sa façon de vivre..

Ce que les autres disent de lui Discographie, bibliographie, etc.


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Actualité

Remise en forme pour la maison ronde Conçue dans les années 50, la Maison de la Radio ne tient plus la route en matière de sécurité. Architecture Studio s’engage à la remettre en état, sans en empêcher le bon fonctionnement.

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a maison ronde tourne 24 heures sur 24, 365 jours par an. Hors de question de priver les auditeurs de leurs France Info, Inter, Culture, Musiques, ou encore des Fip, City et autres Mouv’. Pourtant, le message de la préfecture est clair et désormais entendu : cette vieille bâtisse imaginée par Henry Bernard, que Charles de Gaulle a lui-même inaugurée en 1963, n’est vraiment plus conforme aux règles de sécurité, régulièrement révisées. A titre d’exemple, prenons « la partie au centre, qui est métallique. En cas de feu, il lui faudrait entre 11 et 17 minutes pour s’écrouler. Or, on sait que le temps d’évacuation est de 20 minutes ». Rodolphe Febvrel, secrétaire général de la direction chargée de la sécurité et de l’architecture de Radio France, avoue par ailleurs, sourire à l’appui, avoir « un peu joué, pendant des années, au chat et à la souris avec les autorités » ! Rendre conforme un tel monument, représente « des travaux énormes et très compliqués ». Tout est à revoir, jusqu’au stationnement des voitures : aujourd’hui encore bon nombre de véhicules encerclent la maison de la Radio ; pourtant, selon la réglementation, il est interdit de stationner à moins de huit mètres de la façade d’un Immeuble à Grande Hauteur (IGH), ce qu’est, en grande partie, la Maison. 110 000 m2 à rénover, un budget de 238 millions d’euros L’affaire du désamiantage - trop tardif de Jussieu, la sensibilisation des autorités à la suite de « l’attentat spectaculaire du 11 septembre, la sensibilisation de l’opinion publique sur ces notions de sécurités et de précautions », une visite de la commission de sécurité début 2003, auront finalement raison de Jean-Marie Cavada… Le président d’alors se voit octroyer 15 jours pour faire part de ses propositions et mesures, faute de quoi le préfet prononcerait l’interdiction de la poursuite de l’exploitation du bâtiment. S’ensuivront les premières évacuations, la production d’un schéma directeur de mise en sécurité et « une procédure du dialogue compétitif » dont Architecture Studio sortira vainqueur. En effet, si le premier objectif vise la conformité, c’est aussi l’occasion de « redonner du lustre à la Maison, d’améliorer l’accueil du public », ou encore, de « créer un auditorium à renommée internationale ». Pour 110 000 m2 à rénover, les travaux devraient s’étendre jusqu’en juillet 2012 ; le coût d’ensemble est estimé à 238 millions d’euros.

13 Ci-dessus : L’atrium créé au centre du bâtiment deviendra le nouveau cœur de Radio France. La circulation devrait être facilitée, et les espaces lumineux développés. Quant au projet de parvis extérieur se prolongeant jusqu’à la Seine, son sort dépendra de la ville de Paris. Ci-contre : Rodolphe Febvrel, en charge du dossier à Radio France.

Et les journalistes dans tout ça ? Tout est prévu : les travaux sont organisés en « phasage », ainsi personne ne devrait avoir à déménager plus de 2 ou 3 fois. Ce sont les journalistes de France Inter qui ont eu à investir les premiers un nouveau lieu de travail ; ils sont désormais installés en face de la maison ronde. Les nuisances techniques ? « Nous mettrons au point des systèmes d’alarme : quand les niveaux sonores des travaux deviennent trop fort, l’alarme s’allume. Nous ferons aussi beaucoup de travaux la nuit, lorsque la maison est moins occupée ».

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Sur le long terme, les conditions de travail seront nettement améliorées : « Les travaux nous obligent à tout enlever - les cloisons, les faux plafonds - pour traiter les structures. On ne va pas remettre tout cela à l’identique, ce serait idiot. Nous allons remodeler les espaces, travailler sur leurs agencements, sur des open spaces, sur la lumière ». Améliorer l’ergonomie, le confort au travail, et réaménager les 5 km de couloirs de circulation au sein de Radio France en créant une sorte de double peau, sont autant d’objectifs logiques pour la direction. Marie Kergoët


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« Ma seule peur était que l’agonie du pape dure trop longtemps. » La Croix, quotidien catholique national, préparait la mort de Jean-Paul II depuis une quinzaine d’années. Responsable des pages Religion depuis 1997, le prêtre Michel Kubler nous explique comment le journal a couvert l’événement. pape. Depuis des années, il avait un billet d’avion open et son costume était prêt à la rédaction. JeanMarie s’est rendu au Vatican quelques heures après le décès. Notre correspondant de Lourdes a également rejoint la cité vaticane. Moi-même, je suis allé à Rome entre l’enterrement de Jean-Paul II et l’entrée en conclave. Le reste de la rédaction s’est également mobilisé : un journaliste du service Monde est parti à Cracovie ; un autre a été envoyé au Brésil ; un reporter a visité la France profonde pour constater l’émotion de la population.

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Disposiez-vous de moyens importants ? M.K : Nous avions provisionné un budget spécial pour la mort du pape, en terme de piges et pour soutenir la vente au numéro. Il faut savoir que les abonnements représentent 92% de notre diffusion. Nous avons donc lancé une campagne radio pour booster la vente en kiosque. Le résultat s’est révélé intéressant : nos ventes ont été multipliées par 10. Michel Kubler, membre de la congrégation des Assomptionnistes.

Scoop : Comment un journal catholique peut-il se distinguer des autres quotidiens généralistes sur un tel sujet ? Michel Kubler : C’est par notre méthode de travail que nous pouvons nous différencier. Jean-Paul II était un personnage important dans le monde entier et nous avons mis en place un dispositif à la hauteur de l’homme. Notre frigo était prêt à paraître dès l’annonce de la mort du Saint Père. Il ne se composait pas seulement d’un article mais d’un cahier spécial en chan-

tier depuis une quinzaine d’années. Notre numéro spécial de 32 pages est sorti en kiosque le lundi après sa mort. Combien de personnes à la rédaction ontelles couvert l’événement ? M.K : Nous avons un correspondant permanent à Rome, Yves Pitette. A Paris, Guillaume Goubert et Jean-Marie Guénois couvrent aussi l’actualité du Vatican. Guillaume est parti à Rome le vendredi, dès le début de l’agonie du Scoop n°9 • saison 2005

Quelles difficultés avezvous rencontrées ? M.K : Nous n’avons pas trop rencontré de problèmes. Ces trois semaines ont été très fatigantes mais se sont déroulées comme nous l’avions prévu. Ma seule peur était que l’agonie du pape dure trop longtemps. Comment auraiton géré cette longue souffrance vers la mort et le voyeurisme qui l’accompagne ? Heureusement pour nous et pour lui, il est parti paisiblement. Après sa mort, nous savions que nous entrions dans un tunnel d’un mois et il fallait tenir le coup.


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Métier Avez-vous des regrets ? Des reportages manqués ou des personnages que vous n’avez pu interviewer ? M.K : Nous avons pêché dans l’infographie et nous ne nous sommes pas assez mobilisés pour recueillir les témoignages de grandes personnalités. Vos lecteurs ont-ils beaucoup réagi à votre couverture de l’événement ? M.K : Ils ont été heureux de la place qu’on a donnée à l’événement, à l’hommage rendu à Jean-Paul II. Ils ont apprécié notre distance critique. L’élection de Joseph Ratzinger les a beaucoup fait réagir. Les lecteurs étaient soit très heureux, soit très déçus. Nous devions donc être mesurés dans nos propos et nous ne devions pas enfermer le nouveau pape dans une image, qu’elle soit positive ou négative. Les lettres de nos lecteurs nous encouragent à effectuer un travail d’accompagnement pour mieux comprendre qui est cet homme. Quel est d’après vous le quotidien généraliste qui a le mieux couvert l’événement ?

Un papier ou un sujet télé ou radio vous ontils particulièrement frappé ? M.K : Après nous, je pense que c’est Le Figaro qui s’est le plus mobilisé. Il a consacré énormément de place à l’événement. Globalement, mes confrères ont fait un gros effort pour comprendre qui était le pape. J’admire le résultat mais je ne comprends pas Libération, qui n’a consacré qu’une brève par jour au sujet entre les funérailles du pape et l’entrée en conclave. “A La Croix, on s’est interdit de spéculer sur le prochain pape” Les biographies des candidats les mieux placés pour devenir pape étaient-elles déjà prêtes ? M.K : Nos confrères se sont excités sur les papabiles. A La Croix, on s’est interdit de spéculer sur le prochain pape. En revanche, durant la période d’interrègne, nous avons décliné quotidiennement des portraits de cardinaux. Celui de Joseph Ratzinger fut le premier a être publié, sans arrière-pensée sur ses chances d’être élu.

Quelle a été votre politique photo pour couvrir l’événement ? M.K : Nous avons évité les photos trop macabres de la dépouille de Jean-Paul II. Mise à part cette réserve, nous ne nous sommes rien interdit. Comment expliquez-vous l’augmentation régulière de la diffusion de La Croix depuis plusieurs années ? M.K : Nous assumons notre identité catholique. Nous sommes aussi un quotidien généraliste qui parle de politique, de sport, d’économie, de culture… La Croix n’est pas un journal ringard, coincé. Il est assez bien fait et reconnu par ses confrères. Les lecteurs sont en majorité catholiques mais pas seulement.

Diffusé en moyenne à 99 000 exemplaires (source Diffusion-Contrôle 2004), La Croix est édité par le Groupe Bayard-Presse.

Propos recueillis par Claire Neilz

Le correspondant local de presse, esclave moderne ? Le CLP exerce une activité de journaliste mais n’en a pas le statut.

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vant tout, qu’est-ce qu’un correspondant local de presse (CLP) ? Sous cette appellation barbare se cache en fait un journaliste qui n’en est pas un. Le CLP couvre des événements locaux, afin de pallier le manque d’effectif des rédactions en période pleine, essentiellement le week-end. Il est généralement chargé du reportage, de la photographie et bien évidemment de la rédaction de l’article. Et ils sont près de 30 000 aujourd’hui à exercer, dont près de 2 500 pour OuestFrance. Pourtant, la loi se refuse toujours à admettre que le travail de CLP est bien assimilable à celui d’un journaliste. Selon la circulaire ministérielle du 1er décembre 1993, « l’activité de correspondant local de presse (CLP) n’est pas une activité professionnelle au sens propre du terme. […] Elle doit être strictement distinguée de celle de journaliste. […] ». Malgré tout, près de la moitié de ces CLP vivent uniquement de ces correspondances, sans bénéficier des mêmes droits que leurs pairs officiellement reconnus. Pas de sécurité sociale ni de retraite, pas de congés payés, le correspondant local est payé sous forme d’honoraires. Une situation précaire, en somme, comme le définit Michel Diard, président du SNJ-CGT : « Les CLP sont les plus exploités des journalistes, ils sont un peu les esclaves des temps modernes. » On estime le prix moyen d’un article aux environs de douze euros, frais kilométriques compris. Sachant que le CLP passe en moyenne

Cette situation précaire et inégalitaire comdeux à trois heures sur un reportage, nul besoin mence à provoquer la grogne des correspond’être fin mathématicien pour constater que le dants locaux. Certains ont décidé de se regrou« corres’ » n’est pas Crésus… per pour défendre leurs intérêts, comme par A qui la faute ? Comme souvent, difficile de exemple à Nantes dans l’association Pressedésigner un coupable. D’un côté, les regroupePapier. Mais il semble déjà que ces rassemblements patronaux se refusent à évoquer le sujet ments soient menacés, puisque sur son site, et la CCIJP (Commission de la Carte d’Identité Presse-Papier déplore le fait que ses adhérents des Journalistes Professionnels) affirme, quant ne soient plus dans les petits papiers de leurs à elle, que le métier de CLP n’est encore qu’un employeurs. job d’appoint et que « les personnes vivant de ces correspondances ne sont que des cas isolés ». Yann Buxeda Les syndicats, eux, déplorent le statut des CLP, mais sans pour autant proposer des solutions. Un statu quo que regrette Jérôme Egger, ancien élève de l’ISCPA-Institut des Médias, aujourd’hui CLP : « Personnellement, je n’ai pas trop à me plaindre de ma rémunération, mais je constate de grandes disparités au niveau des indemnités selon les journaux. J’ai des amis qui exercent dans le Sud-Ouest et qui se voient rémunérés à raison de 3 euros par papier et 0,80 euro pour une photographie, lorsque je touche 15 euros. Et quand on sait que le prix du feuillet est généralement fixé aux alentours de 60 euros pour un Le CLP Jérome Egger couvre la fête communale de Homeray, dans les Yvelines. journaliste reconnu… » Scoop n°9 • saison 2005

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Cette femme ne paye jamais ses notes de restaurant Colette Monsat est journaliste gastronomique au Figaroscope depuis 18 ans. frétillement lorsque l’on entre dans un établissement que l’on ne connaît pas. C’est comme les journalistes de cinéma, ils ont encore cet émerveillement même s’ils n’en sont pas à leur premier film. Mais il faut tout de même avouer qu’il m’arrive certains soirs de ne pas avoir très envie de sortir.

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Scoop : Comment êtes-vous devenue critique gastronomique ? Colette Monsat : J’ai un parcours un peu atypique, comme c’était le cas il y a une vingtaine d’années. Je n’ai pas, comme beaucoup de mes collègues, fréquenté les écoles de journalisme ou Sciences-po. J’ai suivi une formation en sciences humaines conclue par un troisième cycle de criminologie. J’ai ensuite travaillé pour le ministère de la Justice, puis dans une agence de publicité. Enfin, j’ai été embauché par le groupe Marie-Claire pour développer à l’époque leur service minitel. J’y ai travaillé plusieurs années mais ce n’était pas mon truc. Je n’avais qu’une envie, c’était d’écrire. Au démarrage du Figaroscope en 1987, le rédacteur en chef de l’époque, François Simon, que je connaissais bien depuis ma période Marie-Claire, m’a proposé de rejoindre son équipe. Avez-vous immédiatement travaillé comme critique gastronomique ? C.M. : Non, pas tout à fait. A l’époque, il y avait une passerelle entre les rubriques du journal. On était un peu voltigeur, on écrivait aussi bien des papiers patrimoine que people. Mais la volonté de François Simon, qui avait travaillé dix ans au Gault&Millau, a toujours été de créer un journal avec une identité forte sur la «bouffe». Il m’a alors demandé de travailler sur la rubrique resto. Vous arrive-t-il, parfois, d’être lasse d’aller au restaurant ? C.M. : Non, pas du tout. A la rédaction, nous sommes une équipe de 5 à 6 journalistes et nous sommes tous encore dans le plaisir, la curiosité. Il y a toujours cette espèce de petit Scoop n°9 • saison 2005

Quel est votre budget restaurants ? C.M. : Nous avons des conditions de travail extrêmement confortables et rares dans la presse parisienne. On a le droit d’aller à deux au restaurant avec quelqu’un d’extérieur à la rédaction. Cela donne d’avantage de plaisir et de confort, mais également la possibilité d’un double regard sur une adresse pas forcément évidente. Êtes-vous invitée parfois par certains restaurateurs ? C.M. : Non, nous payons nos additions et nous réservons sous un faux nom. François Simon a toujours voulu cela. Et maintenant que je suis chef de la rubrique, j’ai conservé cette règle. Il est hors de question que quelqu’un se présente en disant qu’il vient du Figaroscope. Car tout ce qu’il y a autour des plats euxmêmes, le petit apéritif gratuit, le grand cru qui remplace le beaujolais, peut influencer notre critique. Cette démarche permet d’éviter les papiers de complaisance.

Y- a-t- il déjà eu des tensions avec certains restaurateurs ? C.M. : Nous avons vu des mécontents arriver à la rédaction fous furieux avec le journal sous le bras. Mais peu, finalement. Les principaux problèmes que l’on rencontre, ce sont les plaintes de restaurateurs qui viennent d’ouvrir leur établissement après avoir beaucoup investi et affirment que les journalistes ne leur laissent pas leur chance. Ils sont souvent dans une situation économique difficile. Nous sommes pris entre deux feux : nous représentons le lecteur moyen, qui n’a pas envie de se faire arnaquer, et nous ne voulons pas lui dire n’importe quoi pour faire plaisir au restaurateur. Quand je teste un établissement, je suis dans la même logique que lorsque je vais le week-end déjeuner dans un endroit avec des amis : j’ai les mêmes énervements quand je paye la note et que c’est n’importe quoi. Un critique gastronomique peut-il se reconvertir dans la restauration ? C.M. : Non, c’est un mythe. On ne peut pas devenir restaurateur car on connaît trop les contraintes de ce métier. Il faudrait être vraiment naïf pour croire qu’il est facile d’ouvrir un restaurant. C’est un travail de chien. Pour l’instant, je suis ravie de mon métier. Et à partir du moment où l’on sait écrire, on peut demain travailler dans un autre journal et faire quelque chose de complètement différent. Le critique gastronomique est-il menacé par la prise de poids ? C.M. : On a toujours l’image de l’ancienne génération : cigare, digestif, le club des 100 kilos. Mais même si les critiques sont toujours en surchauffe de quatre kilos, vous constaterez que personne n’est obèse. Propos recueillis par Jonathan Rapaport

Votre plus mauvais souvenir… Jean-Michel Maire, chef de la rubrique télévision au Figaro :

Lorsque j’étais à Sarajevo pour couvrir le conflit, j’avais 10 000 francs que m’avait donnés France-Soir pour vivre. J’étais logé chez l’habitant et à la fin de mon séjour, il me restait 3000 francs. Le dernier jour, j’ai invité ma famille d’accueil au restaurant et

l’addition s’élevait pour tous les convives à 3000 francs, car en période de guerre, manger au resto est un luxe énorme. Du coup je n’ai rien pu leur laisser, alors qu’avec cet argent la famille aurait pu très bien vivre et acheter de la nourriture pendant un long moment. Cette histoire m’a travaillé pendant longtemps, je me suis senti coupable.

Propos recueillis par Jonathan Rapaport


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Jean-Claude Allanic, « l’emmerdeur de service » Médiateur de la rédaction de France 2, Jean-Claude Allanic fait tampon entre les téléspectateurs et ses confrères journalistes. Scoop : En quoi consiste votre rôle de médiateur ? Jean-Claude Allanic : Je m’occupe de faire la liaison entre les téléspectateurs et la rédaction de France 2. Je suis à l’écoute et reçoit les critiques avant de les transmettre à la rédaction. Dans l’émission hebdomadaire du samedi, j’organise le dialogue, je m’assure que les téléspectateurs sont entendus. Le poste a été créé au lendemain de la guerre du Golfe. Connaissez-vous d’autres médiateurs aujourd’hui en France ? Je sais qu’il y a un médiateur à la rédaction du Monde. A France Télévisions, nous sommes trois : Marie-Laure Augry, médiatrice de la rédaction de France 3, Alain Le Garrec pour les programmes et moi-même qui suis médiateur de la rédaction de France 2. Comment êtes-vous devenu médiateur ? J’ai été désigné par le président de France Télévisions. Pour tout vous dire, un collège de journalistes nomme d’abord trois confrères qu’ils jugent compétents pour ce poste, puis c’est le président qui choisit parmi les trois candidats proposés. Les journalistes acceptent-ils facilement la critique ? Certains d’entre eux ont de la peine à se

remettre en question, d’autres refusent même. En règle générale, les meilleurs acceptent.

le rôle de celui-ci de consacrer un reportage au complice de Mesrine ? Nous avons été grandement interpellés là-dessus. La deuxième diffiUne anecdote particulière ? culté, c’est que le médiateur est le porteur des L’affaire Juppé-Pujadas(1). Il y avait un mauvaises nouvelles pour les journalistes. Il faut donc être costaud dans sa tête. On ne se conflit entre la direction d’une part et la rédacfait pas que des amis dans la rédaction mais tion de l’autre. La direction ne voulait pas se surtout à la direction. remettre en question, On est considéré comme car cela aurait sup« l’emmerdeur de service ». posé qu’elle en tire L’important, c’est que ce soit les conséquences, ce « Les journalistes le médiateur qui soit vu que la rédaction n’a sont décisifs comme un casse-pied, pas pas hésité à faire. On Jean-Claude Allanic. peut parler aussi de dans une démocratie » l’affaire Baudis(2) où Pourquoi, selon vous, y-a-t’-il la présomption d’intant à redire sur le travail nocence n’a pas toudes journalistes ? Sont-ils mal formés ou les jours été respectée. Au vu de ce qu’ils produitéléspectateurs sont-ils trop exigeants ? sent, TF1 ou Canal + n’ont pas besoin de Les journalistes sont décisifs dans une médiateurs. Ce que Karl Zéro a fait est inaddémocratie. On attend beaucoup d’eux et on a missible(3). raison. Mais les hommes ont leurs limites et il faut apprendre à décrypter pour être citoyen. Quelles difficultés rencontrez-vous dans Dans le courrier que je reçois, une phrase votre fonction ? revient souvent : « Moi, ce qui m’inquiète, Je dirais qu’il y en a essentiellement deux. c’est qu’à chaque fois que les journalistes parD’abord, examiner toutes les critiques des télélent d’un sujet que je connais, je m’aperçois spectateurs avec beaucoup de sérieux. Il faut qu’ils ont souvent tort ». Le métier de journaliste être très précis, très rigoureux dans le traiteest exaltant mais difficile car la réalité est comment du courrier. Les téléspectateurs attendent plexe. Simplifier les choses n’est pas facile. une qualité de l’information irréprochable, surtout quand elle vient du service public. Est-ce Quel est votre meilleur souvenir en tant que médiateur ? Je suis content quand journalistes et téléspectateurs sortent satisfaits du débat. Dans l’affaire Alègre-Baudis, j’ai eu le sentiment d’avoir satisfait à la vérité, à l’honnêteté intellectuelle. En bref, la satisfaction du devoir accompli, d’autant que j’avais mis, alors, mon poste en jeu. propos recueillis par Jean-Marie Bagayoko (1) Le 3 février 2004, après la condamnation à dix ans d’inéligibilité d’Alain Juppé, David Pujadas, le présentateur du vingt heures de France 2, annonçait dès l’ouverture de son journal le retrait de la vie politique du maire de Bordeaux. Ce dernier affirmait le contraire au même moment sur TF1. David Pujadas sera privé d’antenne pendant quinze jours. (2) Dominique Baudis, président du CSA, avait été mis en cause dans l’affaire Alègre. Il a, depuis, été relaxé mais bon nombre de journalistes, dont certains de France 2, avaient à l’époque accordé du crédit aux déclarations de personnes qui l’accusaient de viol et de torture.

Nous avons rencontré Jean-Claude Allanic la veille de son départ pour la conférence annuelle mondiale des médiateurs.

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(3) L’animateur de Canal + Karl Zéro a reconnu avoir versé 15 000 euros à “Fanny”, une ex-prostituée impliquée dans l’affaire Alègre pour pouvoir l’interviewer.

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Un journaliste, un blog Un blog est un site web créé par une ou plusieurs personnes pour s’exprimer librement sur les sujets de leur choix. Emmanuel Davidenkoff, journaliste spécialisé dans l’éducation, a lancé le sien en décembre dernier. Scoop : Pouvez-vous vous présenter ? E m m a n u e l Davidenkoff : Je suis journaliste depuis 15 ans, je travaille pour Libération dans le domaine de l’éducation et de la formation (depuis 2000) et je réalise des chroniques pour France Info (depuis 1997). J’ai écrit plusieurs livres qui tournent tous autour du sujet de l’éducation. En quoi consiste votre blog ? Qu’est ce que l’on peut y trouver ? Des notes personnelles sur l’actualité. C’est donc une sorte de carnet de bord public diffusé sur le web. Ces notes évoquent avant tout des questions liées à l’éducation et à l’école.

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Quelle est la différence entre l’écriture d’un article et l’écriture pour votre blog ? A la différence de mon travail pour le journal Libération, je ne dispose pas de délais. J’écris

autant que je le souhaite et personne ne me relit. Mais il n’est pas question non plus d’écrire n’importe quoi : les règles sont les mêmes que dans le journal pour la simple raison que le droit applicable est le même. Que vous apporte ce blog ? Il me permet d’établir un autre lien avec les lecteurs. Les commentaires sont publics alors que les réactions à mes articles de Libération sont justes lues par moi ou par la rédaction. Comment choisissez-vous les sujets que vous abordez ? Je les choisis en fonction de l’actualité (mes livres, mes articles, mes interventions sur le blog…) et en fonction des commentaires que je reçois. Il m’arrive de revenir sur des sujets déjà anciens. Mon blog a plusieurs entrées, politiques, culturelles, sociales, mais on en revient toujours à l’éducation. Qui assure la maintenance du site ? Je m’occupe de tout et je ne travaille pas

avec un technicien. J’utilise le logiciel Type Pad, dédié à la création et la maintenance de blogs. Quelle est l’audience de votre blog ? Est-elle en progrès ? Je ne connais pas l’audience de mon blog. J’ai accès au nombre de « clics », c’est-à-dire au nombre de fois où les internautes ont cliqué sur une page de mon site, mais il m’est impossible de savoir combien de personnes différentes naviguent sur mon blog. Le nombre de «clics» est en augmentation et je recueille de plus en plus de commentaires. Comment voyez-vous l’avenir de votre blog ? Mon objectif est d’essayer d’internationaliser mon audience. Et de pouvoir dialoguer avec des personnes francophones partout dans le monde. Propos recueillis par Guillaume Batailler Retrouvez le blog d’Emmanuel Davidenkoff sur : http://education.blogs.liberation.fr/

Que deviennent les anciens de l’ISCPA Institut des Médias - Paris ? Diplômé en 1999, Thibaut De Jaegher est aujourd’hui journaliste à l’Usine Nouvelle. Carrière : « J’ai commencé mon parcours professionnel par un stage de six mois (1999) à l’Usine Nouvelle avant d’accepter un CDI de huit mois au sein de la rédaction du Journal de l’automobile. Le 1er mars 2000, je suis revenu à l’Usine Nouvelle, en CDD, et pendant un an j’ai travaillé sur les investissements industriels au niveau français et international. J’ai ensuite rejoint le service social/management où je suis encore actuellement. Je suis désormais en charge du secteur formation. A ce titre, je gère chaque année un dossier et une enquête sur les écoles d’ingénieurs. Il m’arrive également d’intervenir sur l’organisation industrielle (sécurité au travail, normes et certifications) et sur les ressources humaines (salaires, recrutement). » L’Usine Nouvelle : « C’est un hebdomadaire de presse professionnelle dédié à l’industrie et plutôt destiné aux dirigeants. Notre journal est unique en France par l’étendue des champs qu’il couvre (économique, social, ressources humaines, technologie…). Il n’a aucun concurrent direct mais il souffre aujourd’hui de la mauvaise passe que traverse l’industrie française. Une

restructuration est d’ailleurs en cours qui devrait se solder par un plan social. » Le boulot : « Ce qui me motive le plus dans mon métier, ce sont les reportages. Aller sur le terrain dans la durée, une semaine ou plus, à l’étranger. Rencontrer des personnes de talent est toujours riche d’enseignement pour mon travail et pour ma propre personne. L’enquête qui m’a le plus marqué est celle que j’ai réalisée dans les nouveaux pays membres de l’Union Européenne sur les dessous des délocalisations. Sans brosser un portrait tout noir du travail dans l’ex-bloc de l’Est, j’ai voulu montrer aux industriels que délocaliser n’était pas qu’une histoire de coût du travail. Que derrière ces salaires faibles, se cachaient aussi des rendements moindres et des salariés moins indépendants. »

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Conseil aux futurs journalistes : « Le seul vrai conseil que je puisse donner se résume en un verbe : Ecrivez ! Quel que soit le média auquel vous vous destinez, c’est sur votre écriture et parfois aussi sur votre voix que vous serez jugés. N’hésitez pas à écrire encore et toujours même si ce n’est pas toujours payant. Cela vous permettra en plus de vous constituer un book, qui, à l’heure des entretiens ou de vendre une pige, est un sésame incontournable…» L’école : « La marque de fabrique ISCPA - Institut des Médias de Paris, c’est la large place que l’école accorde à la pratique. Cette particularité permet aux étudiants les plus motivés de se frotter très tôt aux réalités de l’enquête, de l’interview et de l’écriture. Je suis convaincu que c’est cette grande place laissée à la pratique qui m’a permis de m’insérer rapidement dans la vie professionnelle. » Propos recueillis par Jean-Christophe Bacri


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Confessions d’un « intermittent de la presse » Marc Fernandez, 34 ans, intervenant à l’ISCPA - Institut des Médias de Paris, et journaliste pigiste depuis quatre ans pour Courrier International, Libération et Le Journal du Dimanche, nous éclaire sur ses conditions de travail. Scoop : Etes-vous devenu pigiste par choix ou par défaut ? Les deux, mon général ! En fait, je suis devenu pigiste après avoir été licencié pour raison économique du magazine Transfert, en 2001. Dans un premier temps, j’ai cherché un poste en tant que salarié à temps complet. Mais face à la dure réalité du marché du travail, j’ai été contraint de piger. Mais si je le fais toujours aujourd’hui, c’est davantage par choix que par défaut. Après quatre ans de piges, j’avoue désormais le faire par plaisir. Quels sont les avantages à travailler dans la presse aujourd’hui en tant que pigiste ? S’il fallait résumer en un mot l’ensemble des avantages du statut de pigiste, je dirais : liberté ! D’abord, liberté dans le choix des médias avec lesquels on veut travailler. Ensuite, et surtout, liberté dans le choix des sujets que l’on veut traiter. Lorsque vous êtes salarié dans une rédaction, très souvent, c’est votre rédacteur en chef qui vous impose vos sujets. En revanche, quand vous êtes pigiste, vous êtes force de proposition. C’est vous qui allez vendre un sujet à un rédacteur en chef. En règle général, le pigiste traite très peu de l’actualité brûlante. La plupart du temps, il va proposer des sujets peu communs ou alors traités avec un angle neuf. On est souvent amené à se déplacer pour aller chercher l’info. Il faut être débrouillard. Personnellement, je ne suis jamais autant parti en reportage que depuis que je suis pigiste. Et les inconvénients ? Ah! on y vient. Le gros problème pour le pigiste, c’est qu’il travaille de manière cyclique. Pendant un mois, on peut être surchargé de demandes et puis ensuite, plus rien. Et ça, bien entendu, ce n’est pas toujours évident à gérer financièrement, mais aussi psychologiquement. Quant on est pigiste, on travaille chez soi. Or, si on n’a pas de commande, ou d’idée intéressante à proposer, c’est très dur mentalement. Le pigiste, c’est un véritable intermittent de la presse. Et je le répète, il est difficile de garder le moral après avoir passé une journée tout seul face à son téléphone en attendant qu’il sonne… Il vous arrive de partir à l’étranger. Concrètement, cela se passe comment? Tout est question de dialogue, de négociation et d’argent. Un pigiste, c’est un peu un chef de PME. On doit souvent batailler pour se faire avancer les frais du voyage, pour avoir une assurance … Sur ce dernier point, le salarié n’a pas de problème, car il est obligatoirement

Marc Fernandez a réalisé pour Canal + un reportage sur les enlèvements de femmes au Mexique.

couvert par son employeur. En revanche, le pigiste doit négocier une assurance particulière qui couvre les risques qu’il court, comme le décès, l’enlèvement… Comme je le disais, le pigiste est un chef de PME, c’est un négociateur, un comptable, un commercial et, enfin, un journaliste. La pige est-elle en développement ? Absolument ! Il suffit pour s’en persuader de constater que le nombre de journalistes pigistes encartés ne cesse d’augmenter. La raison en est simple : les médias réduisent les budgets qu’ils allouent à la rédaction. Certaines rédactions permanentes de la presse magazine mensuelle sont maintenant ultraréduites, à moins de dix personnes. Quel est votre meilleur souvenir en tant que pigiste ? Sans hésitation, mon dernier reportage. En avril dernier, je suis parti au Mexique pour réaliser un sujet sur les enlèvements de femmes. Enlèvements perpétrés par les mafias locales. J’ai réussi a vendre mon documentaire à l’émission « Lundi Investigation » de Canal +. Je connais bien le sujet : j’avais déjà écrit un livre sur le même thème qui paraîtra au moment où le reportage sera diffusé, en octobre prochain. C’est plutôt une belle pige pour Canal, non ? propos recueillis par Thibaut Chervet et Thomas Chesseboeuf Scoop n°9 • saison 2005

Une association pour s’entraider arc Fernandez fait partie du collectif La 25ème ligne, créé par des M anciens de Transfert, magazine sur les nouvelles technologies qui n’existe plus aujourd’hui que sous sa forme web. Le collectif a pour objectif de faire travailler ensemble des journalistes complémentaires et de briser la solitude dans laquelle le pigiste est trop souvent enfermé. Depuis sa création en mars 2002, l’association a connu des changements de membres, mais elle est toujours composée de sept journalistes rédacteurs et d’un photographe. Marc Fernandez confie que le but originel de La 25ème ligne était de « créer une mini-agence de presse, afin de pouvoir fournir des reportages ou des enquêtes complets, en profitant des qualités spécifiques des membres du collectif »… En attendant de concrétiser cet objectif ambitieux, les membres de La 25ème ligne partagent le même local, pour lequel ils cotisent tous les mois. Toutes les semaines, ils se réunissent autour d’un café ou d’un déjeuner pour parler de leurs sujets respectifs, échanger des contacts, s’entraider… F.C.

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Etre journaliste en Italie… Après quatre années passées à Radio Vatican, le journaliste français Thibaud des Grottes nous décrit la situation du journalisme en Italie. Un bilan moins noir qu’on pourrait le penser. Les chaînes de télévision publiques Rai 1, 2 et 3 sont dirigées par des personnes de l’entourage de Berlusconi. On ne peut pas dire pour autant qu’elles sont aux mains du pouvoir en place. L’information qu’elles diffusent reste libre et elle n’est pas plus uniformisée qu’en Les réseaux d’information du Vatican France. Mais on trouve aussi des présentateurs sont-ils aussi nombreux qu’on le dit ? partisans de Berlusconi sur le service public. C’est vrai qu’en travaillant au Saint Siège on C’est par exemple le cas de Bruno Vespa, ania accès à une mine d’informations venant du mateur d’une émission très populaire sur Rai monde entier. Et cela, grâce à la présence de Uno. Silvio Berlusconi a récemment fait channonciatures (1) partout dans le monde, que ce ger le conseil soit au fin fond du Pérou d’administraou au Congo. tion de la Rai et limoger cerAvez-vous eu l’occatains journalission de rencontrer « Les jeunes journalistes tes vedettes qui Jean-Paul II ? le dérangeaient. J’ai eu la chance de sont très mal payés » Il est très critipouvoir l’accompagner qué pour cela et lors de son 100ème voyaa été plusieurs ge à l’étranger, en fois jugé pour Croatie. Nous avons dis«conflit d’intérêt» devant la Cour des droits de cuté dans l’avion pontifical, et il nous a même l’homme. accordé une audience privée. Mais il était déjà très affaibli par la maladie et je parlais plus que Les médias soutenaient-ils généralement lui pendant l’interview. la guerre d’Irak ? Non, les médias ont largement retransmis le Comment jugez-vous l’information diffumessage anti-guerre de la majorité de la popusée par les chaînes de Silvio Berlusconi ? lation italienne. Trois millions de personnes L’influence de Berlusconi pèse aujourd’hui sont descendues dans la rue pour manifester sur près de 90% des médias italiens (2). Le contre la guerre, ce n’est pas rien. Berlusconi journaliste le plus partisan est sans aucun doute était déjà très critiqué sur sa politique intérieuEmilio Fede qui présente les informations et re, alors c’était facile d’en rajouter en soutenant anime des émissions sur Rete 4, une chaîne de la rue. Mediaset, la holding de Silvio Berlusconi. Il a pris la défense de Berlusconi lorsque ce derExiste-t-il des lois sur la diffamation et nier a été insulté à la sortie d’un procès, l’anl’atteinte à la vie privée en Italie ? née dernière, et ne manque pas une occasion de Les médias italiens se rapprochent davantage vanter ses mérites. On peut ajouter Maurizio du modèle britannique que du modèle français. Costanzo, journaliste sur Canale 5, chaîne En général, les médias cherchent à faire du senappartenant également à Mediaset. sationnel en utilisant des photos ou des chiffres choc. Je me rappelle par exemple qu’ils ne se L’information sur le service public vous sont pas gênés pour montrer des images de cersemble-t-elle neutre ? Jamais je n’ai été censuré, mais on ne s’amusait pas non plus à promouvoir l’avortement. Je respectais la ligne éditoriale de mon boss, JeanPaul II.

Thibaud des Grottes est actuellement présentateur à France Info.

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Comment fonctionne Radio Vatican ? C’est une radio qui existe depuis 75 ans et qui diffuse des programmes dans le monde entier. Elle dépend du Saint Siège mais ce n’est pas l’organe officiel. Parmi ses 400 employés, 200 sont des journalistes. Chaque flash comporte une actualité générale de 15 minutes dont deux minutes qui sont consacrées exclusivement à l’actualité du Vatican. A Paris, on la capte sur Radio Notre-Dame, mais elle est diffusée en français dans tous les pays francophones, Canada, Liban, Afrique noire… Peut-on tout dire sur Radio Vatican ? Les jeunes journalistes qui s’attendent à être dirigés par un curé et à travailler avec des bonnes sœurs se plantent complètement. Il ne faut pas croire que sous prétexte que Radio Vatican dépend directement du Saint-siège, elle n’est pas libre. La rédaction francophone dans laquelle je me trouvais était dirigée par une femme et la moyenne d’âge était de 32 ans.

SOMMAIRE du Cahier Europe 20 Etre journaliste en Italie. Thibaut des Grottes a travaillé quatre ans pour Radio Vatican.

22 Russie : l’encre coule rouge. Le métier de journaliste est aujourd’hui très risqué en Russie.

21 Une directive européenne fait trembler les journalistes financiers. La Market Abuse Directive remet en cause le secret des sources.

22 Bonnet d’âne pour la Pologne. La liberté d’expression en Pologne est un sujet de préoccupation pour l’Union Européenne.

21 Protection des sources : l’exemple belge. Un point sur la loi du 17 mars 2005.

23 Slovénie : vers l’indépendance des médias. Il y avait 51 supports d’information en 1991, il y en a 700 aujourd’hui.

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23 On peut (presque) tout dire au Royaume-Uni. La définition de la diffamation est beaucoup plus restrictive en Angleterre qu’ailleurs. 23 Qu’est-ce-que la Fédération Européenne des Journalistes ? Une organisation régionale de la Fédération Internationale des Journalistes, basée à Bruxelles.


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CAHIER EUROPE cueils de soldats morts en Irak. D’une façon générale, ils sont plus libres qu’en France car la notion de vie privée est moins défendue. Et puis, les Italiens ont besoin d’émotions… Existe-t-il encore beaucoup de médias indépendants en Italie ? La 5ème chaîne, qui n’est pas détenue par Berlusconi, diffuse quelques émissions contestataires. Les animateurs du programme « Les Yennes » ont posé par exemple des questions dérangeantes à l’Assemblée, notamment sur la concentration des médias. Le quotidien communiste Il Manifesto a aussi une grande influence, qui n’a rien à voir avec celle de L’Humanité en France. Les syndicats de journalistes sont-ils puissants ? A Radio Vatican, il existe une association de défense des journalistes assez importante. Bien que le droit de grève soit strictement interdit au sein du Vatican, l’association des laïcs du Vatican lutte pour faire augmenter les salaires, embaucher du personnel étranger… Les journalistes italiens sont-ils mieux payés qu’en France ? Il faut savoir qu’il est très compliqué de devenir journaliste en Italie. L’examen est très difficile. De plus, les jeunes journalistes sont très mal payés. Mais en avançant dans leur carrière, ils arrivent à des salaires plutôt plus élevés qu’en France. Ce n’est pas un hasard si les Italiens restent chez papa et maman jusqu’à l’âge de 30 ans… A Radio Vatican, les journalistes reçoivent entre 1400 et 2200 euros par mois avec des avantages fiscaux. Et à la mort du pape Jean-Paul II, tous les employés ont reçu une prime de 1000 euros, plus 500 euros pour l’arrivée de Benoît XVI. A Rome, vous étiez également correspondant pour RMC et France Culture. Comment devient-on correspondant ? Il faut savoir que les correspondants sont en grande majorité des pigistes. RTL, par exemple, ne travaille qu’avec des pigistes. La pige d’un correspondant à l’étranger est payée en moyenne 90 euros le feuillet. Cela m’a permis de mettre du beurre dans mes épinards. Devenir un jour permanent à l’étranger, c’est une sorte de consécration. C’est très rare d’être nommé avant 40 ans et il faut avoir une belle carrière derrière soi. Mais dans ce cas, le salaire correspond à celui des expatriés, c’està-dire environ 7000 euros mensuels et un appartement de fonction. Propos recueillis par Marc Ollivier (1) nonciature : prélat chargé de représenter le pape auprès d’un gouvernement étranger. (2) La loi « Gasparri » sur la réforme du système audiovisuel a été définitivement adoptée le 29 Avril 2004. Elle autorise la possession d’intérêts plurimédias et réforme les limites antitrust. Appelée aussi loi Berlusconi, elle donne au président du conseil et aux magnats de la presse encore plus de pouvoir d’influence. Silvio Berlusconi est à la fois président du Conseil et propriétaire de trois chaînes privées nationales ainsi que du premier groupe de presse et d’édition, Mediaset.

Une directive européenne fait trembler les journalistes financiers D’après la Market Abuse Directive (MAD) du 22 décembre 2003, les journalistes de la presse économique et financière seraient tenus de révéler leurs sources.

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lors que la MAD devrait être transposée en loi avant octobre 2004, ce n’est que le 29 mars dernier qu’en France, elle est devenue un projet de loi (n°267). Après avoir été remanié, ce projet a finalement été adopté par le Sénat le 2 mai 2005 (texte n°101) puis transmis à l’Assemblée Nationale. L’objectif de la directive est de faire en sorte que, partout en Europe, une réglementation harmonisée existe qui combatte les opérations d’initiés et les manipulations de marché. Le texte exige des journalistes de la presse financière les mêmes obligations de transparence que celles auxquelles sont astreints les analystes financiers quand ils font des recommandations d’achat ou de vente d’un titre, même s’il s’agit de recommandations «implicites». Dans les grandes rédactions européennes, les avis sont plutôt mitigés. D’un côté, certains éditeurs sont partis en guerre pour tenter d’infléchir le texte. Henry Manisty, responsable des affaires réglementaires chez Reuters, pense qu’il « pose de graves problèmes cons-

titutionnels ». Comme lui, le directeur de la rédaction du Wall Street Journal, Fred Kempe, estime que « les gouvernements vont s’immiscer dans les rédactions ». Pour beaucoup de professionnels, cette directive n’améliorera pas la transparence de l’information financière, l’autodiscipline devant être la règle générale. D’autres comme Guido Gentili, directeur de Il Sole 24 Ore, le quotidien économique de référence en Italie – qui, rappelons-le, est souvent secouée par des scandales financiers -, jugent cette application nécessaire. Il estime que les affaires Parmalat ou Enron ont démontré combien la presse devait être vigilante : dans le premier cas, les journaux avaient été accusés d’aveuglement incroyable et coupable ; dans le second, certains journalistes auraient touché des rémunérations occultes. Bien qu’intrusive, la directive européenne fournit finalement à tous ceux qui ne l’avaient pas déjà fait l’occasion de réfléchir à leur pratique. Johanna Simonin

Protections des sources : l’exemple belge Le 17 mars 2005, la Belgique s’est dotée d’une loi qui scelle la protection des sources pour les journalistes.

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a mésaventure du correspondant à Bruxelles du magazine allemand Stern, Hans Martin Tillack, ne sera bientôt plus qu’un mauvais souvenir. Après avoir publié un livre sur les dysfonctionnements des institutions européennes et écrit de nombreux articles sur des fraudes impliquant des fonctionnaires européens, Tillack est accusé d’avoir acheté des informations confidentielles. Son domicile et son bureau sont perquisitionnés par la police belge. En Belgique, au cours des dix dernières années, le secret des sources a très souvent été violé. Interrogatoires, perquisitions, saisies et privation de liberté, autant de pratiques musclées utilisées par la Justice pour que les journalistes cèdent sous la pression et dévoilent leurs sources d’information. Des méthodes qui conduisent la Belgique à être condamnée

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en 2003 par la Cour Européenne des Droits de l’Homme pour « violation de la liberté de la presse ». Grâce à la nouvelle loi du 17 mars 2005, les journalistes ont le droit de se taire lorsqu’ils sont convoqués à titre de témoins. Ils sont protégés contre les perquisitions, les saisies et les écoutes téléphoniques. Les poursuites pour recel de documents ou complicité de violation du secret professionnel par un tiers sont désormais interdites. La Justice ne peut désormais plus contourner le secret des sources que “pour prévenir des infractions qui représentent une atteinte sérieuse à l’intégrité physique d’une ou de plusieurs personnes”. Ces droits s’appliquent non seulement aux journalistes professionnels mais également à tous les collaborateurs de la rédaction. Olivier Tasch

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Russie : l’encre coule rouge Le métier de journaliste est aujourd’hui très risqué en Russie.

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Gazeta, dénonce un retour à la presse soviétique de propagande au service de l’Etat. Dans son livre Le Déshonneur Russe, elle affirme : « Vladimir Poutine, pur produit des services secrets, n’a pas réussi à dépasser ses origines et n’a jamais cessé de se conduire comme lieutenant-colonel du tristement célèbre KGB. » Anna Politkovskaïa est peut-être le seul journaliste russe qui s’ aventure encore en Tchétchénie. Elle est régulièrement menacée de mort et a dû s’exiler en Autriche. La Novaïa Gazeta est très régulièrement harcelée par l’Etat et, pire encore, par des citoyens russes mécontents qu’un journal contredise la vérité du Kremlin. « Il y a des médias gouvernementaux mais aussi des jourAnna Politkovskaïa reçoit en 2002 l’Ulysse Award du meilleur reportage. naux qui appartiennent à des oligarques qui sont proches du pouvoir. TV-6, étaient réduites au silence alors que les Seul le journal dans lequel travaille Anna chaînes publiques dotées d’un véritable monoPolitkovskaïa, Novaïa Gazeta est financièrepole diffusent une information « étatisée ». Il ment indépendant, car il n’appartient ni au n’y a plus de grandes chaînes de télévision en pouvoir ni à un groupe privé tenté d’influencer Russie qui soient indépendantes du pouvoir, sa ligne éditoriale. Mais il rencontre de grosses alors qu’en 1999 elles fourmillaient. Il n’existe difficultés économiques », précise Pascale plus aucun débat politique à la télé, plus aucuBonnamour, responsable du bureau Europe ne émission d’analyse et surtout plus aucun et ex-Union Soviétique de Reporters sans journal télé impartial… frontières. Anna Politkovskaïa, journaliste à la Novaïa

Crédit : ITAR

ès son accession au pouvoir en 2000, Vladimir Poutine a pris pour cible les médias à travers deux grands magnats: Goussinski et Boris Berezovski. Ces derniers ont dû s’exiler, tandis que les chaînes de télévision qu’ils contrôlaient, respectivement NTV et

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Anna Politkovskaïa n’est pas la seule victime des agissements du Kremlin. En 2003 déjà, l’Association mondiale des journaux (AMJ), réunie à Moscou, avait classé la Russie au deuxième rang mondial du nombre de journalistes tués. De plus « la violence à l’encontre des journalistes est telle depuis plus de quatre ans que cela conduit la plupart d’entre eux à s’autocensurer car cette violence s’exerce dans l’impunité la plus totale. Aucun meurtrier de journaliste n’a été traduit en justice pour l’instant », insiste Pascale Bonnamour. D’autant que l’URSS a laissé des traces indélébiles dans les consciences russes. Tout un pan de la population ne conçoit pas le journalisme comme libre et les dénonciations des crimes commis par l’armée sont considérées comme anti-patriotiques. Aude Rapin et Anne Odru

Le bilan RSF de la Russie en 2004 • 2 journalistes tués • 2 journalistes enlevés • 18 journalistes interpellés • 17 journalistes agressés ou menacés • 3 journalistes expulsés • 14 médias censurés

Bonnet d’âne pour la Pologne Des dix pays entrants, la Pologne est celui qui possède le plus grand marché de l’information. Mais la pratique du journalisme est loin d’y être sans risque.

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a liberté d’expression en Pologne est depuis quelques années déjà un sujet de préoccupation pour l’Union Européenne et les ONG qui luttent pour le respect de ce droit fondamental. Selon l’article 11 de la Charte des Droits Fondamentaux de l’UE, « ce droit comprend la liberté d’opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu’il puisse y avoir ingérence d’autorités publiques et sans considération de frontières. » L’article 54 de la Constitution polonaise de 1997 va d’ailleurs dans ce sens : « Toute personne a droit à la liberté d’expression et à la liberté de recevoir et de propager des informations. » Pourtant, en avril 2002, quarante-et-un eurodéputés exprimaient leurs craintes dans une déclaration publique. Mais c’est en 2004 que la situation a pris une tournure beaucoup plus

inquiétante. Au moins quatre journalistes ont écopé de peines de prison ferme en raison de la loi sur la diffamation. C’était la première fois depuis l’accession à la démocratie en 1989 que le pays retombait dans des travers dignes de sa période soviétique. La vingtaine d’actions en justice en cours ne laisse pas présager un essoufflement de cette dynamique. Dans la majorité des cas, un fonctionnaire ou un notable local qui s’est senti directement insulté porte plainte. Les peines vont pour l’instant jusqu’à dix mois de prison. La diffamation devient dès lors un crime et non plus seulement un délit. Une affaire se dégage, celle de Jerzy Urban, instruite depuis 2002. A cette époque, le journaliste publie un éditorial satirique à la veille de la venue de Jean Paul II. En absence de plainte du pape, nécessaire pour instruire la difScoop n°9 • saison 2005

famation, le procureur polonais a fait appel à une subtilité du droit polonais : en s’en prenant à un chef d’Etat, Urban s’est exposé à l’article 136.6 du code pénal. En janvier dernier, il a écopé de 5 000 euros d’amende. Depuis des années, les autorités polonaises subissent la pression d’ONG comme Reporters Sans Frontières, l’Institut International de la Presse (IIP) mais surtout de l’Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe. Pour l’instant, Varsovie joue la montre, comme le dévoile l’attitude de Aleksander Kwasniewski. Au forum 2004 de l’IIP, qui se tenait à Varsovie, le président polonais s’est dit prêt à prendre les mesures nécessaires pour éviter de telles actions en justice. Un an après, la situation des journalistes polonais est loin de s’être améliorée. Pierre Régniez


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Slovénie : la marche vers la liberté Le rapport annuel de Reporters sans Frontières place la Slovénie au quinzième rang en terme de liberté de la presse, soit 4 rangs avant la France…

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vant la guerre en ex-Yougoslavie, qui ravagea la région des Balkans de 1991 à 1996, seule la revue étudiante slovène Mladina (Jeunesse), fondée en 1943, était une revue contestataire du régime. Au ton provocateur, elle a contribué à la démocratisation et à l’émancipation du pays en attaquant les tabous du communisme. Depuis 1991, c’est-à-dire depuis que la République de Slovénie, reconnue souveraine par la plupart des pays de l’Union européenne, Allemagne en tête, jouit d’une totale indépendance, la situation a beaucoup changé. Les autorités, conscientes du désir de liberté des médias et du peuple slovène, muselés pendant plus de 45 ans, se sont engagés à garantir l’accès à l’information tout en définissant des règles transparentes sur les moyens d’obtenir cette information. La première loi sur les médias fut votée en mars 1994. Elle affirmait des principes fondamentaux tels que la liberté d’information et fixait les droits et les devoirs des journalistes. Elle précisait également le pouvoir d’intervention de l’Etat dans la presse qu’il subventionnait, afin de préserver la culture et l’identité nationale nouvellement acquise, dans une région encore plongée dans le conflit. Un nouveau texte de loi sur la liberté de la presse a été voté en 2001 en Slovénie. L’autonomie et l’indépendance des journalistes slovènes n’a pas été remise en cause et la plupart des solutions libérales contenues dans l’ancienne loi sont restées telles qu’elles. Ce texte contient une disposition sur la protection des sources, qui n’était pas prévue par l’ancienne loi mais pour laquelle la Société

La revue Mladina a contribué à l’émancipation du pays.

des journalistes slovènes s’était constamment battue. Cette nouvelle loi prévoit également une plus grande sécurité d’emploi pour les 872 journalistes et 620 rédacteurs professionnels slovènes. Ils ne peuvent être limogés tant qu’ils respectent la ligne éditoriale du média pour lequel ils travaillent. Alors qu’en 1990, on ne dénombrait que 51 supports d’informations en Slovénie, aujourd’hui ce petit pays rural de deux millions d’habitants en compte plus de 700. Lejla Sadovic

La FEJ, qu’est-ce que c’est ? a Fédération Européenne des journalistes (FEJ) est une organisation régionale de la Fédération Internationale des Journalistes (FIJ). Ses 280 000 membres journalistes, répartis dans plus de 30 pays, font d’elle la plus vaste organisation de journalistes d’Europe. Son rôle ? Représenter les intérêts des syndicats de journalistes et ceux de ses membres. La FEJ lutte en faveur des droits sociaux et professionnels des journalistes actifs dans tous les secteurs des médias. Basée au cœur de l’Europe, à Bruxelles, l’organisation agit au niveau national et international. Récemment, elle a soutenu l’appel pour une action européenne contre la concentration des médias. En novembre dernier, la FEJ a effectué une mission d’enquête à Rome alors que le gouvernement de Berlusconi s’apprêtait à voter la loi Gasparri qui réforme les limites antitrust. Pour Arne König, président de la FEJ, « Il y a urgence. Les journalistes et les citoyens en ont marre des beaux discours pour la défense du service public ». Il rappelle que « la FEJ soutient toutes les actions qui émanent des syndicats et de la société civile pour limiter la concentration des médias et la marchandisation de l’information ». La FEJ est reconnue par l’Union européenne, le Conseil de l’Europe et la Confédération européenne des syndicats comme étant l’organisation habilitée à s’exprimer au nom des journalistes d’Europe. Créée en 1926, elle fêtera bientôt ses 80 ans. Et, au regard de la situation que traverse la profession de journaliste actuellement, elle a encore de beaux jours devant elle.

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Marc Ollivier

On peut (presque) tout dire au Royaume-Uni Les journalistes britanniques bénéficient d’une liberté de ton inégalée et d’un cadre juridique à leur avantage.

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n Europe, le Royaume Uni est souvent considéré comme l’Eldorado de la libre expression. Il peut ainsi paraître étonnant pour le touriste de voir des islamistes prêcher la charia en plein milieu de Hyde Park. Sur un autre plan, les insertions dans la vie privée de personnes publiques sont beaucoup plus courantes et marquées qu’ailleurs en Europe. La Commission d’Examen des plaintes en matière de déontologie créée en 1991 est l’instance d’autorégulation de la profession. Ses

compétences concernent essentiellement le respect du Code de la déontologie entré en vigueur en 1997. Sans permettre le règlement des dossiers juridiques, elle permet d’assurer un équilibre entre protection des particuliers et droit à l’information. Les plaintes pour diffamation sont quand même nombreuses, mais la définition de cette infraction est beaucoup plus restrictive au Royaume-Uni qu’ailleurs. Les média inculpés se voient alors infliger une amende ou doivent

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s’acquitter de dommages et intérêts à l’égard du plaignant. Le principal cas en 2004, le dossier Galloway contre le Daily Telegraph, a coûté 1 200 000 livres au journal dont 150 000 pour George Galloway. Le journal avait accusé le parlementaire britannique d’avoir été corrompu par Saddam Hussein via le programme Pétrole contre nourriture. Pierre Régniez

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Les mémoires du roi Sacco Présentateur de « On refait le match » sur RTL et LCI, Eugène Saccomano relate dans un livre ses quarante années de carrière, dont trente aux Sports.

24 Eugène Saccomano à son bureau de RTL.

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ugène, travaille ! hurlait mon tout premier rédacteur en chef, Maurice Rouquette, à l’agence nîmoise du Provençal. Eugène, tu en fais trop. Tu es toujours par monts et par vaux ! s’inquiète Noël Couëdel, mon patron à RTL ». Ces lignes, extraites de Je refais le match, ne nous renseignent guère sur le moment précis de ce déclic. Mais Eugène Saccomano se rappelle d’une cassure qu’il a connu vers 22-23 ans. A son retour de l’armée, le rédacteur en chef du Provençal lui propose un poste à Marseille. « Là-bas, j’étais dans l’obligation de travailler plus durement qu’à Nîmes. Je devais monter 9-10 pages avec deux autres personnes. J’avais une grosse responsabilité mais avec à la clef une carte de presse et une embauche », explique le journaliste. Jeune lycéen et footballeur à Nîmes Olympique, Eugène Saccomano gagne à 16 ans un concours de journalistes juniors, organisé par l’Equipe, qui le conduit aux Jeux

Olympiques d’Helsinki en 1952. Il assiste au sacre du nageur Jean Boiteux. A son retour de Finlande, le Provençal lui demande quelques papiers sur son voyage. Ses articles étant bien tournés, le patron local lui propose de remplacer un rédacteur malade. Au cœur de la prise d’otages des JO de Munich Dans les années 60, Eugène cumule deux boulots : rédacteur pour le Provençal et pigiste d’Europe 1, dont il est le correspondant à Marseille. « Au départ, ce n’était pas facile de gérer les deux. J’avais l’obligation d’être au bureau du Provençal. Si un gros fait divers s’était produit, j’y allais le matin pour recueillir des témoignages car je ne travaillais que l’après-midi. De 65 à 70, mes reportages me servaient dans les deux médias ». Saccomano a mené plusieurs vies. Critique de cinéma en 1962, très marqué par les films de

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Truffaut, il fut également organisateur de galas et écrivain. En 1968, il est l’auteur de Bandits à Marseille qui deviendra au cinéma le célèbre Borsalino. Après la publication du livre, il reçoit des menaces de mort. Il songe à partir à l’étranger. Il pose sa candidature à l’AFP pour un poste lointain et prend des cours intensifs d’anglais. L’été suivant, il part en Suède seul. Il apprendra plus tard que les menaces de mort étaient l’œuvre d’un farceur. Après dix années de correspondance pour Europe 1, Saccomano débarque à Paris dans les locaux de la station en janvier 1970. Les débuts sont durs : les premiers flashs sont catastrophiques. On le mute au service des sports, où il se trouve tout de suite dans son élément. Il assure la couverture des JO de Munich en 1972. Là-bas, il est au cœur de la prise en otage des athlètes israéliens. Minute après minute, il commente en direct l’événement. La saga de l’OM, les grandes heures de gloire de Michel Platini et le sacre de l’équipe de France de football à la coupe du monde en 1998 sont ensuite des événements majeurs des sa carrière de journaliste sportif. En 1996, Eugène crée Europe Sport, une émission quotidienne de deux heures et demie. Mais vit mal l’arrivée de Jérôme Bellay à la direction de l’antenne. Passé sur les ondes de RTL en 2001, il reste indémodable. « Il y a une vingtaine d’années, j’ai créé un style à la radio. Je me suis inspiré des journalistes sud-américains. Je pense qu’en prenant de l’âge, on ne risque plus rien. J’ai plus de liberté, je me lâche davantage ». A 68 ans, petit homme rondouillard, le crâne dégarni, les cheveux blancs, “Sacco” compte lâcher du lest la prochaine saison : « Je vais commenter moins de matchs le week-end. Cette saison a été dure avec la télé et la radio ». Un retrait progressif du monde journalistique pour profiter davantage de sa famille, écrire des livres et voir des films. Claire Neilz Je refais le match, 2005, Plon, 292 pages, 18,50€


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Dans l’enfer des immigrés clandestins Grégoire Deniau, 43 ans, est grand reporter à France 2. Il a reçu en mai 2005 le prix Albert Londres pour son reportage « Traversée Clandestine ».

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la même année, où il devient pigiste free lance pour la presse écrite espagnole. « Ce qui m’intéresse c’est l’étranger ». Grégoire Deniau est le fils de Jean-François Deniau, écrivain, journaliste, diplomate et ministre sous Valéry Giscard D’Estaing. « Assez jeune j’ai été au contact d’endroits plutôt difficiles et loin de notre culture » raconte-t-il. « J’ai vu des gens venant de rebellions diverses et variées débarquer chez moi ». Petit, il a beaucoup habité

Crédit : Juan Medina EPA/SIPA

u premier contact l’homme impressionne. Ce grand gaillard de deux mètres à la barbe courte et au crâne rasé se déplace toujours en moto. « Ca va plus vite. En bagnole, je deviens dingue » dit-il. Il mêle le sourire à la poignée de main. Un blue jean et un pull léger sous son épais blouson de motard, Grégoire Deniau affiche la bonhomie d’une personne simple. Comme beaucoup de journalistes formés à l’école du terrain, Grégoire

2, le 4 novembre 2004. « C’est toujours plus plaisant de recevoir des prix que des coups de pieds au cul » dit-il. « Je vends plus facilement mes idées de reportage en ayant la reconnaissance de la profession ». Pendant un mois et demi, il a partagé les conditions de vie d’une trentaine de clandestins au cours de leur voyage infernal d’Afrique en Europe. Contre mille euros, ces hommes sont dirigés par des passeurs sans scrupule à travers le sud du Maroc pour rejoindre les îles Canaries espagnoles. « J’ai lu un dossier de courrier internationale sur les filières de l’immigration clandestine et je me suis très vite intéressé à ce sujet ». Il a rencontré les journalistes qui avaient écrit les papiers et pris contact avec les responsables des filières. Un an et demi de travail de préparation

Olivier Jobard (gauche), et Grégoire Deniau à leur arrivée aux Îles Canaries après un mois et demi de périple.

Deniau n’a pas un parcours « tout à fait normal ». Une maîtrise de droit pour bagage universitaire, il entame sa vie professionnelle comme commercial dans la publicité. « Une activité alimentaire » car il entretient l’envie de devenir journaliste. Les quelques demandes de stages qu’il dépose chez différents médias resteront d’abord lettres mortes. « N’ayant pas fait d’école de journalisme, trouver un stage dans une rédaction a été un peu plus compliqué » explique-t-il. C’est finalement TF1 qui lui offre sa chance en 1987. Après quatre mois de stage au service étranger de la première chaîne, il contribue à l’aventure éphémère de la Cinq. La chaîne disparaît en 1992. Il s’envole ensuite vers Sarajevo

hors de France : au Paraguay et en Espagne surtout . « Que mon père ait été journaliste et diplomate a certainement joué sur ma propre vocation ». De retour à Paris fin 1992, il intègre la rédaction de France 3 pour un moment avant d’aller à LCI où il découvre le travail de la caméra. Il crée son entreprise de production et vend des reportages à différentes chaînes. « Avec ce statut de free lance, mon but était d’aller là ou les autres ne vont pas ». Après une importante campagne irakienne, France 2 décide de l’engager. Il y travaille depuis un an. Le 10 mai 2005, Grégoire Deniau reçoit le prix Albert Londres pour son reportage « Traversée clandestine », une enquête diffusée dans l’émission « Envoyé spécial » sur France

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« Avant de commencer, il y a un an et demi de travail sur ce projet. Je voulais suivre intégralement le parcours des clandestins » précise-til. « On s’est fait mener en bateau plusieurs fois par des types qui veulent prendre votre pognon et pas forcément vous aider à faire votre boulot ». Ce reportage a été « le plus difficile de ma vie » confie-t-il dans un article de l’Humanité. « Lorsque l’on couvre un conflit on reste mettre de son destin, on peut choisir de s’arrêter. Ici, une fois embarqué dans le bateau c’est fini, on doit aller au bout ». Journaliste depuis 17 ans, Grégoire Deniau raconte ses galères avec le sourire et le recul des évènements. En Irak, il est le dernier journaliste français à rester à Faloudja aux côtés des insurgés sunnites lors de l’assaut, en avril dernier, par l’armée américaine. « Je me suis retrouvé dans des situations où j’avais un flingue pointé sur la tête, mais tout s’est terminé très vite à chaque fois ». Et quand on lui demande si ses proches sont au courant de ses péripéties et s‘inquiètent, il répond simplement : « Ma famille est habituée aux risques que je prends », et rit. Vincent Giraldo

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Benoît Duquesne à la barre du 13 heures de F2 Depuis le 28 janvier 2005, Benoît Duquesne, 47 ans, présente le 13 heures sur France 2. Tenace et polyvalent, il a gagné sa place à force de remplacements.

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l traîne un peu la jambe, blessé au genou, mais il n’est pas question pour Benoît Duquesne de manquer à ses obligations professionnelles. A 9 heures, c’est la conférence de rédaction avec toute l’équipe du journal. Puis, vers 11 heures, après avoir lu la presse, il commence à écrire ses lancements et à visionner les premiers sujets. Un passage rapide au maquillage avant d’accueillir les invités. Il enfile sa veste et se place devant le mur d’images, prêt à annoncer les titres. Autour de lui, c’est l’effervescence. La météo se termine et l’assistant plateau commence le décompte… Il est 13 heures, Benoît Duquesne, journaliste, présentateur et animateur, se lance pour quarante minutes d’information.

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Après le lycée et sans réelle vocation, il s’inscrit en fac de médecine. Un peu paumé, il cherche sa voie et s’essaye au théâtre. Pendant près d’un an,

avec une troupe de jeunes amis comédiens, il s’amuse de sa liberté sur des petites scènes de France. Le journalisme est finalement venu à lui par hasard. A force de petits boulots dans sa région du Nord, il entre au quotidien Nord Eclair, puis à Nord Matin pour travailler la nuit comme correcteur. « C’est là que j’ai rencontré des journalistes et que j’ai commencé à faire mes premières piges », raconte Benoît Duquesne. C’est décidé, il en fera son métier. Et pour y arriver, il décroche une licence de droit à Lille dans le but d’entrer à l’ESJ, l’Ecole Supérieure de Journalisme.

des Infos Génés avant de mener sa caméra sur tous les fronts. Il suit notamment la Guerre du Golfe, le conflit en Bosnie ou encore le tremblement de terre en Arménie. De retour à Paris, il crée le magazine hebdomadaire d’actualité « A la Une » qu’il présente avec Catherine Nay, une émission qui ressemble sensiblement à l’actuel « Sept à Huit ». Parallèlement, il fait des reportages pour les magazines « Le Droit de Savoir » et « Reportages », couvrant entre autres l’enquête sur le DC10 ou encore l’affaire Touvier. Elkabbach l’appelle

Jeune diplômé en juin 1982, il obtient la bourse Lauga décernée par Europe 1 au meilleur jeune journaliste radio. Récompensé par un stage de trois mois, il restera en fait sept années derrière le micro. « J’ai commencé par tout faire. Je réalisais des reportages, j’écrivais pour le présentateur et puis je suis entré au service des Informations Générales en charge des dossiers police, justice, faits divers, le service « Bavure Balance » comme on l’appelait. On était une bande de quatre et on rigolait bien. » Benoît Duquesne découvre ensuite la présentation des journaux du matin avant de quitter la station en février 1988 pour suivre Michèle Cotta, alors patronne de la rédaction de TF1. Il reste un temps dans ce domaine

En 1994, Benoît Duquesne a besoin d’air. Cela tombe bien : Jean-Pierre Elkabbach vient d’arriver à la tête de France 2 et l’appelle pour superviser le service France / Informations Générales. Il prend également en main la gestion des bureaux de province et travaille avec le service Enquêtes et Reportages. « C’est aussi à ce moment-là que j’ai commencé à remplacer les présentateurs du 13 heures et du 20 heures. Et puis, à partir de 1995, j’animais l’émission « La France en direct », un programme sociétal de débat. » Vers 1997, la direction de France 2 bouleverse l’organisation des services de la rédaction et Benoît Duquesne se retrouve au « placard », couvrant les opérations exceptionnelles. Deux ans plus tard, pour sortir de l’impasse, il s’exile comme correspondant permanent à Londres et y reste en poste jusqu’en juin 2000. On le rappelle pour lui confier à nouveau la responsabilité des Infos Génés et il devient cette même année rédacteur en chef. Il propose un nouveau magazine en 2001 : tous les quinze jours, « Complément d’enquête » approfondit l’actualité sur un thème de société. Le 28 janvier 2005, alors que Benoît Duquesne est en tournage à l’extérieur, il est appelé en catastrophe par Arlette Chabot, directrice de l’information, pour remplacer au pied levé le présentateur du 13 heures Christophe Hondelatte, alors en conflit avec la rédaction. Il jongle depuis avec ses deux fonctions. Quelle peut bien être la clé d’un si beau parcours ? De l’organisation, de la disponibilité, et surtout : « Un jour, un prof de l’ESJ m’avait dit : il faut être en bonne santé ! Je n’ai mesuré cette vérité que bien plus tard, quand j’ai sillonné le monde. » Nicolas Briard Béatrice Corceiro NDLR - Depuis le 26 août 2005, Élise Lucet remplace Benoît Duquesne au 13 H de France 2

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PROGRAMMES ET DÉBOUCHÉS ECOLE PROFESSIONNALISANTE L’ISCPA - Institut des Médias de Paris f o rme 470 étudiants aux métiers de la communication, du journalisme, et de la production TV, cinéma, musique, jeux vidéo, spectacle vivant. Créé en 1991, l’ISCPA-Institut des Médias a pour spécificité de former : - En 3 ans après le baccalauréat : des journalistes - En 3 à 4 ans après le baccalauréat : des chefs de projets en communication - En 2 ans après un bac + 3 : des responsables de la communication et des relations extérieures - En 3 ans après un bac + 2 ou en 2 ans après un bac + 3 : des professionnels de la production dite " entertainment ". 3 FILIÈRES DISTINCTES Elles intègrent - des stages de longue durée chaque année (stages à l’étranger possibles, sous convention ) - une pédagogie axée sur des apprentissages professionnels ( t o u rnages, journaux, compétitions d’agences, pitchs…). Le mode d’évaluation des étudiants est tourné vers le Système Académique répondant aux normes des crédits ECTS, système initié par le Groupe IGS (Institut de Gestion Sociale) auquel l’école est rattachée. Ces méthodes d’organisation semestrielle et d’évaluation pédagogique permettent une plus grande ouvert u re sur la poursuite d’études en Europe.

(programmes détaillés sur simple demande)

Journalisme Les débouchés du métier de journaliste, re p o rt e r, secrétaire de rédaction ou rédacteur en chef se situent dans la presse écrite ou on-line, la télévision, la radio ou les agences de pre s s e . - 1ère année : Validation d’acquis de culture générale, de techniques d’enquêtes, des bases rédactionnelles et a p p rentissage des outils. - 2ème année : Mises en situation professionnelle dans les médias (presse écrite, Internet, radio, TV). - 3ème année : Spécialisation au travers de projets et partenariats (TV, radio, Presse écrite).

Communication Les débouchés sont variés : communication externe, interne, événementielle, relations presse ou publiques, sectorielle, d’influence, de crise, création publicitaire…, tant en secteur privé, associatif, public ou au sein des agences. - 1er cycle, 1ère année : Découverte (initiation) de l’univers de la communication (acteurs, méthodes, langage, actions de communicationpro f e s s i o n n e l l e s … ) . - 2ème année : Application pratique des outils de la communication, de la publicité, de l’audiovisuel, du multimédia ; cas d’entre p r i s e s … - 3ème année : Spécialisation métier (média / hors média) et ancrage professionnel via les compétitions d’agences. - Ancien 2nd cycle, 4ème année : Conduite de projets et/ou option " International " - Nouveau 2nd cycle en 2 ans, 4ème et 5ème années : Maîtrise des enjeux et outils de conduite du changement dans l’entreprise via des enseignements pratiques.

Production – TV, cinéma, musique, jeux vidéo, spectacle vivant Il s’agit d’appre n d re, en tant que futur pro d u c t e u r, à maîtriser un projet dans sa continuité, de l’évaluation de sa faisabilité à sa diffusion. Ce métier de coordination, de gestion et d’impulsion offre des débouchés variés dans les univers de la télévision, du cinéma, de la musique ou du multimédia. - Année Préparatoire " Prépa Prod " : Mise à niveau et contacts avec la profession - Nouveau 2nd cycle, 1ère année (BAC + 4) : Découverte économique, politique, culturelle, juridique du secteur et de ses techniques. - 2ème année (BAC + 5) : Gestion de la création à la diffusion – distribution d’une œuvre artistique. Pitch et showcase. MOYENS TECHNIQUES

VIE ASSOCIATIVE ET EVENEMENTS

ADMISSION

L’ISCPA - Institut des Médias de Paris met à disposition de ses étudiants de nombreuses caméras numériques, un studio radio/régie, un studio TV/régie, de nombreux bancs de montage Final Cut Pro, des amphit h é â t res, des salles informatiques équipées de Pentium orientés PAO et multimédia, un accès libre Internet sur le campus …

La participation des étudiants aux événements et associations de l’école crédite leur CV d’expériences vécues et concrètes, en autonomie et en équipe : - l’Open de Tennis des Journ a l i s t e s de l’ISCPA (tournoi entre 120 journalistes professionnels, organisé par les étudiants) - le BDE (Bureau des Elèves), - la Junior Création (missions e ffectuées auprès d’entre p r i s e s comme une vraie pre s t a t i o n d’agence de communication) - l’Association des Anciens Elèves, - et tous les événements de l’école (festivals, tournois sportifs, clubs culturels).

D i recte ou en admission parallèle selon les places disponibles : De Bac à Bac + 4 validé : nous consulter. Examens : - en 1er cycle : étude du dossier, culture générale, expression écrite, anglais, entretien de motivation. - En 2nd cycle : étude approfondie du dossier et entretien de motivation face à un jury. Dates des épreuves : certains m e rc redis de fin janvier à fin juillet sous réserve de places disponibles. Nous consulter. Frais de dossier et de tests d’aptitude : 50 _ en 1er cycle ; 70 _ en 2nd cycle.

Contact ISCPA - Institut des Médias - Paris Campus Parodi, 12 rue Alexandre Parodi, 75010 Paris Tél inscriptions & stages 01 40 03 15 56 Tél secrétariat pédagogique 01 44 84 30 64 Fax : 01 40 03 15 31 Email : iscpaparis@groupe-igs.asso.fr Site Internet : w w w.iscpa-paris.com Etablissement d’Enseignement Supérieur Privé

En 1918, le Syndicat des Journalistes rédige une charte des devoirs professionnels des journalistes français en réaction à la censure dont les journalistes ont été victimes pendant la guerre. L’adoption de ce texte marque une véritable rupture avec la fin du XIXème siècle, période pendant laquelle les plumes se vendaient au plus offrant. Depuis, l’ensemble des journalistes français se réclament de cette déclaration.

La Charte des Devoirs Professionnels des Journalistes Français

Un journaliste digne de ce nom : • prend la responsabilité de tous ses écrits, même anonymes • tient la calomnie, les accusations sans preuves, l’altération des documents, la déformation des faits, le mensonge pour les plus graves fautes professionnelles • ne reconnaît que la juridiction de ses pairs, souveraine en matière d’honneur professionnel • n’accepte que des missions compatibles avec la dignité professionnelle • s’interdit d’invoquer un titre ou une qualité imaginaire, d’user de moyens déloyaux pour obtenir une information ou surprendre la bonne foi de quiconque • ne touche pas d’argent dans un service public ou une entreprise privée où sa qualité de journaliste, ses influences, ses relations seraient susceptibles d’être exploitées • ne signe pas de son nom des articles de réclame commerciale ou financière • ne commet aucun plagiat, cite les confrères dont il reproduit un texte quelconque • ne sollicite pas la place d’un confrère, ni ne provoque son renvoi en offrant de travailler à des conditions inférieures • garde le secret professionnel • n’use pas de la liberté de la presse dans une intention intéressée • revendique la liberté de publier honnêtement ses informations • tient le scrupule et le souci de la justice pour des règles premières • ne confond pas son rôle avec celui du policier.

Paris, juillet 1918 - révisée en 1939


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CAHIER EUROPE

L’OPEN ISCPA TOURNOI DE TENNIS DES JOURNALISTES Organisé par les étudiants de l’ISCPA - Institut des Médias de Paris au TCBB - Tennis Club de Boulogne Billancourt

Depuis 12 ans, le seul tournoi de tennis réservé aux journalistes professionnels

Aurélien Canot et Vincent Beckaert après un match

A deux pas de Roland Garros, dans un cadre dépaysant et très fréquenté par les amateurs de tennis du monde des médias se déroulera en avril 2006 la douzième édition de l’OPEN ISCPA.

Comment La Croix a couvert la mort du Pape

SCOOP

LE MAGAZINE DES MÉTIERS DU JOURNALISME UNE PUBLICATION RÉALISÉE PAR LES ÉTUDIANTS DE L’ISCPA INSTITUT DES MÉDIAS PARIS

SAISON 2005 • N°9

Ont aussi déjà participé à l’OPEN ISCPA : Patrick Poivre d’Arvor, Antoine Cormery, Nelson Montfort, Frédéric Jaillant, Bruno Millienne, David Barouh…

Denis Brogniart

Livres : nous avons lu Lester Bangs et Alain Pacadis

4 pages sur la liberté de la presse en Italie, Belgique, Angleterre, Russie, Slovénie, Pologne…

Les compétitions sont de bon niveau et les joueurs enthousiastes. Certains réaffirment chaque année ne vouloir manquer un Open ISCPA pour rien au monde, dès lors que leur emploi du temps professionnel le permet (les aléas du métier !). Heureusement, les participants peuvent choisir leurs horaires et leurs adversaires. De nombreux cadeaux sont à gagner, la présence de sponsors permettant d’organiser une manifestation quasi-professionnelle.

TÉLÉVISION : LES RÉDACTEURS DE L’OMBRE

Ce tournoi de tennis d’une durée de deux semaines offre deux particularités : il est organisé par une école de journalisme pour des journalistes professionnels, classés ou non. Devenu une référence dans l'ouest parisien, plus précisément sur le site prestigieux du Tennis Club de Boulogne Billancourt, L’OPEN ISCPA attire une centaine de participants chaque année. Des compétitions intensives pour des journalistes qui apprécient l’ambiance et le contact avec les étudiants. Petit extrait du livre d’or : « C’était vraiment sympa, je reviendrai l’année prochaine avec plaisir » Denis Brogniart « C’est un très agréable tournoi qui doit beaucoup à la gentillesse et à la compétence des étudiants qui l’animent » Christian Quidet Nicolas Lambert

Yves Noël

« Je ne fais que deux tournois par an avec Roland Garros : celui-ci est le meilleur ! » Valentin Macovescu

Pour les étudiants de l’ISCPA-Institut des Médias de Paris, c’est aussi l’occasion d’apprendre à organiser un événement sportif, qui demande 6 mois de préparation. Constituée en association loi 1901 depuis 2004, l’équipe d’étudiants mandatée par l’école s’est structurée : chargés des partenariats, des relations presse, de l’édition, de la production, de l’organisation des matchs, de la trésorerie, et bien sûr, l’incontournable webmaster qui permet, au jour le jour, de suivre l’événement sur internet.

Contact pour participer aux matchs en 2006 : 01 40 03 79 63 e-mail : openiscpa@groupe-igs.asso.fr Retrouvez toutes les infos sur le site de l'OPEN ISCPA : www.openiscpa.com

Olivier Osten, ancien rédacteur de “blanches” et désormais rédacteur-prompteur pour “20h10 pétantes” sur Canal +


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