Revue BE7-FR- flasher3

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STRATÉGIES PAYS EN DÉVELOPPEMENT

Un aperçu du bois-énergie dans les

pays en développement Y v e s S c h e n ke l , M i c h a ë l Te m m e r m a n , C R A

Le bois est la principale source d’énergie de la majorité des pays en développement. Quelles pistes pouvons-nous envisager pour diminuer la pression du bois-énergie sur la dégradation du milieu dans ces pays ? LA SITUATION DU BOIS-ÉNERGIE DANS LES PAYS EN DÉVELOPPEMENT

(> 25 %) et le gaz (> 15 %), dans les pays en développement, elle participe à plus de 40 % à la satisfaction des besoins énergétiques (Benabdallah et al., 1994). En Afrique, la biomasse contribue à plus de 60 % des besoins énergétiques, mais avec une situation très v aria b le d ’ un p a ys à l’ a ut re (tableau 1).

sub-saharienne, hors Afrique du sud, comptabilise plus de 90 % de la consommation finale de bioénergie du continent. Cet état de fait n’évoluera pas dans un avenir proche, malgré les programmes de substitution de combustibles domestiques (kérosène, gaz butane, LPG) développés dans certaines zones urbaines. Mais le bois-énergie prend une très

CRA

Photo 1 : Sciures non utilisées, en Côte d'Ivoire.

Dans les pays en développement ou en voie d’industrialisation, la biomasse, et particulièrement le bois, d e m eu re la p r in cip a le s o urce d’énergie. Si au niveau mondial, la biomasse ne représente qu’environ 10 % de l’énergie consommée, derrière le pétrole (> 40 %), le charbon

La figure 1 illustre les très grandes disparités des chiffres entre pays voisins et aux caractéristiques géographiques et économiques similaires. Ces différences sont dues à la difficulté d’obtenir des statistiques fiables sur les combustibles non-commerciaux ou échappant aux circuits de distribution enregistrés, en particulier dans les pays en développement. Il faut également noter que l’Afrique

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grande part dans la satisfaction des besoins énergétiques également dans d’autres régions du monde (figure 2).

LES BIOCOMBUSTIBLES ET LES TECHNIQUES DE CONVERSION Parmi les biocombustibles, le bois de feu et son produit de carbonisation, le charbon de bois, proviennent essentiellement (à plus de 80 %) des forêts et autres formations végétales naturelles (savane, bush, mangrove…). Une faible partie (10 %) est produite à partir de plantations (Eucalyptus, Acacia). Le solde est constitué des déchets agricoles – pailles de riz, de mil, tiges de coton, de sorgho, bouses de vaches – et agro-industriels – parches de café, balle de riz… Le bois de feu utilisé pour la cuisson domestique ou par les industries rurales (briquetteries, boulangeries, séchage ou fumage du poisson…) est du bois mort là où ce dernier est encore disponible. Ailleurs, il s’agit de bois vert prélevé dans les formations naturelles ou les jachères agricoles. Cependant, peu d’informations sont disponibles sur les pratiques de collectes et d’approvisionnement en bois de feu (Amous et al., 1999). Le bois de feu est principalement utilisé dans les zones rurales, essentiellement pour la consommation domestique. La conversion du bois de feu en chaleur se réalise encore en grande partie dans des foyers en terre ou en pierre, dont les rendements énergétiques sont désastreux. Barnard (dans " Wood fuel in Developing Countries " en 1987) cite les chiffres de consommation énergétique de 90 à 180 GJ/an pour une famille de 6 personnes en pays en développement, alors que la consommation d’une famille européenne est de l’ordre de 80 GJ/an, y compris le chauffage de l’habitation et les appareils électriques. D’importants efforts ont été réalisés par les agences internationales pour populariser l’utilisation de foyers améliorés au rendement de


STRATÉGIES PAYS EN DÉVELOPPEMENT Tableau 1. Afrique: part de la biomasse dans la satisfaction des besoins énergétiques. (source: Commission Européenne, 2002)

Part de la biomasse dans la demande énergétique finale (%)

3,1 234,2 12,0 237,3

5 73 19 63

conversion énergétique nettement meilleur. Ces efforts ont donné des résultats plutôt décevants, principalement dus au coût des foyers améliorés, mais se poursuivent néanmoins. Cependant, on assiste aujourd’hui à des mutations importantes dans les habitudes de consommation énergétique. Les changements sociaux et économiques liés à l’urbanisation des populations ont conduit à un glissement du bois de feu vers le charbon de bois. Dans le futur, cette tendance devrait se confirmer. L’approvisionnement en charbon de bois des grandes villes passe généralement par un circuit de commercialisation organisé. Par exemple, au Sénégal, des concessions forestières sont accordées à des organismes agréés pour la fabrication de charbon de bois. Chaque année, une région est désignée par les Eaux et Forêts et les forestiers de terrain indiquent aux exploitants les surfaces qui peuvent être utilisées à des fins de carbonisation. La coupe et la carbonisation sont effectuées par des tâcherons (Sourghas). Ensuite, le charbon de bois est acheminé vers les grandes villes par camions. À l’entrée de chaque ville les camions doivent franchir un poste de contrôle avant de livrer leur chargement à un négociant de charbon de bois (Coxeur). Le charbon de bois est ensuite acheminé vers les grossistes, puis vers les détaillants (Eaux et Forêts Dakar, communication personnelle). La pression sur les écosystèmes devrait ainsi s’accroître. En effet, la conversion du bois en charbon de bois, dans les pays en développement, se caractérise par un rendement massique variant de 10 à 25 %. En d’autres termes, il faut de 4 à 10 kg de bois anhydre pour faire 1 kg de charbon de bois. Il faut y ajouter le rendement de combustion des foyers à charbon de bois, supérieur à celui des foyers à bois mais néanmoins relativement faible, de l’ordre de 30 à 40 % en pratique. Par

Consommation énergétique par personne (kg équivalent pétrole) Biomasse 23 381 291 317

conséquent, le rendement énergétique utile total est très faible : il faut beaucoup de bois pour obtenir une faible quantité de chaleur. On peut ainsi se rendre compte de l’impact particulièrement négatif de ces sys-

Combust. conventionnel 405 139 1 203 187

tèmes énergétiques sur les gisements de ressources en bois dans les pays en développement. Une possibilité de diminuer la pression sur les ressources naturelles ligneuses serait de valoriser les

À titre d’exemple, la figure 1 donne la situation de la bioénergie dans quelques pays de l’Afrique occidentale.

Photo 2 : Fabrication de charbon de bois en Côte d'Ivoire.

CRA

Afrique du Nord Afrique sub-saharienne dont Afrique du Sud Afrique (total)

Biomasse totale dans la demande énergétique finale (Mtep)

Part du bois de feu dans la demande énergétique finale (%)

Nombre de chaufferies 90 80 70

Figure 1. Afrique : part de bois de feu dans la consommation énergétique de quatre pays africains (en %). (source : ENDA/IEPE, 1995)

60 50 40 30 20 10 0 Bénin

Côte d’Ivoire

Sénégal

Togo

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STRATÉGIES PAYS EN DÉVELOPPEMENT Figure 2. Asie : part de la bioénergie dans la consommation énergétique totale (en %). (source : Commission Européenne, 2002)

Part de la bioénergie dans la consommation énergétique totale (%)

Nombre de chaufferies 90 80 70 60 50 40 30 20 10 0 Bengladesh

résidus agricoles, d’une manière générale peu utilisés : pailles de riz, de mil, tiges de sorgho, de coton, etc. Notamment, leur mise en briquettes permettrait de les transformer en un biocombust ib le efficace, transportable à un co ût faible sur de longues distances g r â ce à s a haute densité énergétique. Mal-

CRA

Photo 5 : Support utilisé pour la cuisson au bois de feu.

Inde

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Photo 4 : Fourneau utilisé pour la cuisson au charbon de bois.

Chine

heureusement, peu de projets de ce type ont été un succès, principalement à cause des coûts de collecte des résidus agricoles et d’investissement des équipements nécessaires. De plus, l’acceptabilité des briquettes par les utilisateurs est souvent difficile du fait de leurs propriétés physiques particulières (inflammabilité faible, cohésion variable…) et de leur prix de vente trop proche de celui du charbon de bois. Dans le secteur des industries agro-alimentaires et du bois, les techniques de combustion utilisées sont souvent

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Indonésie

Myanmar

Népal

Pakistan

anciennes (années 50-60) et peu performantes. On retrouve les vieilles chaudières à grille plate et fixe, avec chargement manuel. La régulation de l’air est également manuelle. La conversion énergétique du bois ou des résidus agro-industriels n’est donc pas performante, ni sur le plan énergétique ni sur

Sri Lanka

Vietnam

de stockage et surtout de substitution des combustibles fossiles est théoriquement considérable (Riedacker, 1997). Mais le défi est de parvenir à une gestion cohérente et durable de la ressource biomasse. Il est nécessaire de convertir le

Dans les pays en développement, la biomasse répond à 40 % des besoins énergétiques. le plan environnemental. Les installations énergétiques satisfont uniquement les besoins de l’usine à laquelle elles sont attachées, alors que les ressources en biomasse disponibles sur le site industriel sont souvent largement suffisantes et permettent d’envisager l’établissement d’un petit réseau électrique rural autour de ce site.

L’AVENIR DU BOISÉNERGIE DANS LES PAYS EN DÉVELOPPEMENT La biomasse, et singulièrement le bois, restera encore pour de nomb re u s e s a n n é e s l a p r i n c i p a l e source d’énergie des pays en développement. De plus, elle contribue à la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Le potentiel

bois et les biocombustibles de manière plus efficace, que ce soit dans l’industrie rurale ou dans le secteur domestique. Pour ce dernier, l’amélioration et la généralisation de foyers domestiques, industriels ou de type cuisine est une première étape indispensable. Dans le secteur de l’industrie, l’adoption de techniques de combustion et de gazéification performantes mais simples doit conduire à une utilisation de la biomasse plus raisonnée et respectueuse de l’environnement. De plus, ces techniques permettent la production décentralisée d’électricité, vecteur énergétique essentiel du développement des zones rurales. Ceci nécessite la mise en œuvre d’actions articulées autour : - de l’aménagement et de la ges-


tion durable des formations végétales naturelles, - de la diffusion de technologies de conversion énergétiques performantes, - de la formation des techniciens et développeurs de projets, - de structures de financement adaptées (microcrédit par exemple). Trop souvent dans les pays en développement, les besoins réels sont ignorés ou mal compris. Cette mise en œuvre doit respecter le principe de connexion entre les besoins des utilisateurs et l’offre de technologies et de services. Le transfert de technologies doit aller de concert avec le transfert de s a v o i r- f a i re n é c e s s a i re à l e u r implantation, à leur adaptation au contexte socio-économique local, aux travaux d’entretien et de maintenance. C’est la condition pour assurer une gestion durable des ressources en biomasse pour la satisfaction des besoins énergétiques des populations des pays en développement dans le respect des contraintes imposées par la problématique des changements climatiques. 5

CRA

STRATÉGIES PAYS EN DÉVELOPPEMENT

Photo 3 : Résidus inutilisés dans une entreprise de tranchage et déroulage du bois en Côte d'Ivoire.

CONTACTS : Yves Schenkel schenkel@cragx.fgov.be Michaël Temmerman temmerman@cragx.fgov.be

CRA – Département Génie rural 146, Chaussée de Namur 5030 Gembloux – Belgique Tél. : +32 81 627 140 www.cragx.fgov.be ou Lamine Badji – ITEBE lamine.badji@itebe.org

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