COGÉNÉRATION MARCHÉS
L’implantation de la cogénération à la biomasse forestière au Québec MM. Réal Carbonneau et J e a n - M a u r i c e Tr e m b l a y, i n g é n i e u r s , Ministère des Ressources Naturelles du Québec Canada
Le Québec réunit plusieurs conditions pour favoriser le développement de la cogénération à partir de la biomasse forestière. D’une part, la ressource forestière y est abondante. Son exploitation, pour la production de bois d’œuvre autant que pour celle de la pâte à papier, permet de dégager des quantités considérables de résidus de bois. D’autre part, on retrouve, au Québec, de nombreuses
MINISTÈ
RE DES
RESSO URCES
NATUR
ELLES
DU QU
ÉBEC
Malgré la forte implantation de l’hydroélectricité et au-delà de ses mérites environnementaux, la cogénération à la biomasse forestière a pu bénéficier des opportunités du marché énergétique pour s’y insérer durablement.
LE CONTEXTE ÉNERGÉTIQUE
usines de pâtes et papiers qui sont elles-mêmes de très grosses utilisatrices d’énergie ; en conséquence, elles représentent un marché naturel pour la cogénération. C’est pourquoi la politique énergétique du gouver-
BOIS ENERGIE N°7 < NOVEMBRE 2002 > 44
COGÉNÉRATION MARCHÉS nement du Québec reconnaît les mérites économiques et environnementaux de la cogénération utilisant la biomasse forestière.
accordée aux développeurs et aux exploitants de centrales de cogénération à base de biomasse forestière.
Par ailleurs, le Québec est particulièrement riche en ressources hydrauliques. Il en tire 97 % de son électricité, et ce à un coût parmi les plus bas au monde. De plus, la grande taille de son territoire peut entraîner des frais pour le transport des résidus forestiers, lesquels frais affectent négativement la rentabilité des centrales de cogénération qui doivent subir la concurrence directe de l’hydroélectricité. En effet, contrairement à la situation qui a cours actuellement en Europe et auparavant aux ÉtatsUnis, la cogénération, même lorsqu’elle est obtenue à partir d’écorces provenant généralement de scieries habituellement confrontées à l’obligation de les enfouir, est entièrement
UNE OPPORTUNITÉ POUR LE BOIS-ÉNERGIE Malgré l’immense concurrence que représente l’hydroélectricité au Québec, des centrales électriques alimentées en biomasse forestière ont quand même connu un important développement. En effet, bon nombre de ce type de centrales électriques ont
Au Québec, la cogénération au bois se développe. pu voir le jour au Québec au cours des dix dernières années et elles totalisent 243 MW soit moins de 1 % de toute l’électricité produite au Québec (voir la carte " Usines de cogénération et centrales électriques à base de biomasse au Québec "). De plu s, deux autres projets devraient prochainement por te r ce total à près de 300 MW. De u x r a i sons principales expliquent ce succès. Premièrement, la rapidité d’exécution des projets de centrales électriques alimentées à la biomasse forestière constitue un outil stratégique important pour combler un retard dans la mise en service des ouvrages hydrauliques ou pour combler une demande en électricité plus grande que celle qui avait été prévue. De plus les scieurs, face à une nouvelle interdiction de brûler simplement leurs écorces et autres résidus pour s’en débarrasser, comme ils en avaient auparavant l’habitude, et devant la perspective de devoir bientôt les enfouir dans des sites comme tout autre matériau sec, ont préféré en faire profiter les promoteurs de projets de centrales électriques.
régie par les lois du marché. En conséquence, Hydro-Québec, la société d’État responsable de l’alimentation en électricité des marchés québécois, n’a aucune obligation d’achat ; de p l us, au c u n e s u b v e nt io n n’ es t
égales au moyen de petites centrales hydroélectriques et de centrales électriques alimentées en biomasse forestière. Généralement, ces dernières sont des centrales de cogénération associées à des usines de pâtes et papiers. Cependant, deux projets sans valorisation industrielle de l’énergie thermique ont été réalisés dans des régions où il n’a pas été possible de trouver des clients pour la vapeur et d’où il n’aurait pas été possible d’exporter la ressource en raison des frais liés à son transport.
En 1991, Hydro-Québec a lancé un appel d’offres afin de combler un possible déficit entre l’offre et la demande électrique à l’horizon 1995-1996. Mis à part un projet éolien expérimental, ces besoins ont été comblés en parts
Le prix payé par Hydro-Québec pour l’électricité acquise en vertu de son programme d’achat de production privée de 1991 est de l’ordre de 6 cents canadiens/kWh (soit environ 0,04 euro/kWh) électrique et il est augmenté de 3 % par année. Ce prix correspondait alors au coût de l’électricité que Hydro-Québec aurait pu produire elle-même par la mise en service de son prochain méga projet hydroélectrique. Mais celui-ci ne pouvait pas, contrairement à la cogénération à la biomasse, être réalisé suffisamment tôt pour éliminer le déficit prévu à l’horizon de 1995-1996. Les revenus provenant de la vente de la vapeur peuvent varier considérablement d’un projet à l’autre mais sont toujours significativement inférieurs à ceux tirés de la vente d’électricité.
L’AVENIR DE LA COGÉNÉRATION À BASE DE BIOMASSE Deux obstacles principaux limitent la progression de la cogénération à base de biomasse forestière au Québec. Le premier est lié au prix qui peut être obtenu pour l’électricité et la vapeur produites. Pour faire suite au programme d’achat d’électricité que Hydro-Québec avait préparé en 1991, le prix offert par celle-ci pour l’électricité provenant de producteurs privés a été réduit et il n’a toujours pas atteint le niveau qui avait été offert alors. Le deuxième obstacle provient du fait que les occasions de développer des projets à proximité de grands utilisateurs de vapeur se font plus rares. Surtout, les écorces qui constituent les résidus à meilleur marché sont maintenant valorisées dans des proportions de 29 % par la cogénération et la production d’énergie électrique
BOIS ENERGIE N°7 < NOVEMBRE 2002 > 45
COGÉNÉRATION MARCHÉS
t Les bénéfices de la cogénération à base de biomasse Bénéfices environnementaux - élimination des lieux d’enfouissement des écorces et, par conséquent, des risques de contamination des eaux de lixiviat par des polluants, tels que les composés phénoliques ; - réduction des gaz à effet de serre ; - réhabilitation des anciens lieux d’enfouissement par l’utilisation de " vieilles " écorces comme combustible ; - combustion des boues de traitement secondaire des effluents des usines de pâtes et papiers ; - possibilité d’utilisation de branches et houppiers laissés sur les parterres de coupe ; - possibilité pour le Québec d’ajouter de la production électrique considérée comme énergie verte. Bénéfices économiques - création d’emplois spécialisés ; - valorisation des écorces en vapeur et électricité ; - réduction des coûts de production de l’industrie des pâtes et papiers (6 à 10 CAD/tonne) ; - capacité pour les entreprises concernées de prévoir et contrôler leurs coûts de vapeur dans le temps ; - coût du capital évité par l’impartition pour les usines de pâtes et papiers, panneaux ou scieries qui remplaceraient de vieilles chaudières ou prendraient de l’expansion ; - élimination des coûts d’enfouissement pour les scieries (30 à 50 CAD/tonne), d’où un impact positif sur leur rentabilité et leur capacité concurrentielle ; - effet positif sur l’industrie du transport ; - utilisation des cendres produites à des fins de fertilisation des terres agricoles. Bénéfices commerciaux - réduction des importations ou achats de pétrole ; - amélioration de la balance commerciale internationale du Québec.
cain sur le bois d’œuvre résineux, le qu e l a e ntr a î né la fe r m e tu re temporaire de quelques scieries québécoises. Des études sont en cours pour évaluer les volumes de biomasse forestière supplémentaire qui pourraient être dégagés en vue de la production d’énergie. Pour l’instant, seuls les besoins d’éventuelles centrales de cogénération sont examinés. Le prix
Le Québec étant lui aussi entré dans l’ère de l’ouverture des marchés de l’énergie et faisant une part de plus en plus grande aux initiatives privées, il est maintenant acquis que les promoteurs de projets de cogénération à base de biomasse forestière trouveront un marché pour écouler l’électricité à un prix concurrentiel. Les succès obtenus par la filière de la cogénération devant la formidable concurrence de l’hydroélectricité révèlent sa vigueur et permettent d’envisager son expansion. 5
CONTACTS : Ministère des Ressources naturelles du Québec Service aux Citoyens 5700, 4e Avenue Ouest, local B-302 Charlesbourg G1H 6R1 Canada Tél. : +1 418 627 8600 service.citoyens@mrn.gouv.qc.ca www.mrn.gouv.qc.ca
MINISTÈRE DES RESSOURCES NATURELLES DU QUÉBEC
Usine de cogénération Boralex Dolbeau inc., Dolbeau, Québec. Puissance électrique de 28 MW, alimentée à la biomasse forestière: 254000 TMA (tonne métrique anhydre).
e t d e 4 7 % p a r la p ro d u ct io n d’énergie thermique. Les écorces restantes et l’inégalité de leur distribution sur le vaste territoire québécois ne peuvent se prêter qu’à l’alimentation de quelques centrales de cogénération additionnelles, lesquelles sont d’ailleurs déjà à l’état de projet. En outre, la disponibilité des écorces est actuellement perturbée par le contentieux canado-améri-
relativement bas que les cogénérateurs obtiennent pour l’électricité et la vapeur industrielle vendues fait en sorte que la rentabilité des projets de cogénération dépend fortement du prix de la biomasse forestière utilisée comme combustible. C’est pourquoi, pour l’instant, la récupération des branches et houppiers laissés en bordure des chemins forestiers et sur les parterres de coupe paraît constituer l’élément de la relève le plus probable dans la poursuite du programme de cogénération.
BOIS ENERGIE N°7 < NOVEMBRE 2002 > 46
S
A
L
O
N
I
N
T
E
R
N
A
T
I
O
N
A
INSTITUT TECHNIQUE EUROPテ右N DU BOIS-ENERGIE BP 149, 28 boulevard Gambetta - F-39004 Lons-le-Saunier Cedex - Tテゥl. : +33 (0) 384 47 81 07 - Fax : +33 (0) 384 47 81 19 Email : info@itebe-expo.com - Web : www.itebe-expo.com
L