ENVIRONNEMENT CENDRES
recyclage
Le de cendres de bois en forêt Emil POPOVICI, Enrico BENETTO, Patrick ROUSSEAUX, INSA de Lyon France et Suède
La dispersion de cendres de bois sur le sol des forêts d’origine : un moyen pour développer de façon durable l’utilisation du bois-énergie, qui est encore sous-exploité en France. LES FORÊTS FRANÇAISES, UNE RESSOURCE D’ÉNERGIE
CENDRES DE BOIS DE FORÊTS : DÉCHETS OU PRODUITS ? Les substances minérales qui restent après la combustion constituent les cendres. Dans le cas du bois, le contenu en cendres varie fortement de 0,2 % à 2 % en fonction du type d’arbre et de la partie d’arbre considérée. Par exemple, il est quatre fois plus élevé dans les écorces que dans ITEBE
Figure 1 : Laisser les branches sécher quelques semaines dans la forêt évite les pertes de fertilité.
La France assure plus de 20 % de la production européenne d’énergie primaire à partir du bois, ce qui correspond à environ 10 millions de tonnes équivalent pétrole (tep) par an. Les avantages de l’utilisation du boisénergie sont bien déterminés : il s'agit d'une source renouvelable, le bilan du CO 2 sur le cycle de vie du bois est neutre, les émissions par MWh produit sont généralement plus faibles par rapport aux combustibles fossiles et les sous-produits solides de combustion (cendres de bois) peuvent être valorisés. L'utilisation du bois pour la production d’énergie ne met pas en danger l’immense patrimoine forestier français (28 % de la surface totale de la France) qui ne cesse d'augmenter de façon naturelle de 30 000 hectares
par an et dont une grande partie est encore sous-exploitée. Également des quantités significatives de sous-produits de la filière actuelle, tels que les écorces et les sciures, sont encore à valoriser. L'énergie supplémentaire qui peut être récupérée de ces sources est ainsi estimée à plus de 3 millions de tep par an (soit 12 millions de tonnes de bois).
les tiges. La proportion des substances minérales dans les cendres de bois varie en fonction du type de bois utilisé, de la filière d’origine et de la partie de la chaudière où elles sont retenues. En moyenne la composition des cendres est la suivante : Ca (17 %), Si (7,6 %), K (4,2 %), Mg (1,9 %), Al (1,4 %), Mn (1,2 %), Fe (1 %), P (0,9 %), Na (0,7 %), S (0,5 %) et métaux lourds en traces (0,5 %). Les métaux lourds ont une concentration de 1,5 à 3 fois plus élevée dans les cendres volantes (dans les fumées) par rapport aux cendres de foyer. La plupart des substances nutritives accumulées par l’arbre pendant la croissance, principalement le calcium, le potassium, le magnésium et le phosphore et en moindre mesure d'autres micronutriments, peuvent se trouver dans des concentrations importantes dans les cendres du bois. C'est pour cela que, en France, la plupart des cendres issues des chaufferies qui brûlent seulement du bois de forêts sont utilisées par les agriculteurs qui ont stipulé des conventions avec les producteurs d’énergie. Ces cendres, qui autrement seraient mises en décharge, sont cédées gratuitement aux agriculteurs qui les utilisent comme engrais naturel et prennent en charge les coûts de transport et d'épandage.
IMPACTS DES CENDRES SUR LES ÉCOSYSTÈMES L'impact de la récolte du bois de tige sur l'écosystème forêt est négligeable, même si cela interrompt le circuit de décomposition du bois qui permet de transférer dans le sol les nutriments accumulés par les arbres. Lorsque les branches et les feuilles sont aussi enlevées, les perturbations deviennent plus importantes car environ 60 % du phosphore, de l'azote et du potassium se trouve dans ces parties. Les pertes nutritives deviennent évidentes à long terme et la fertilité du sol de forêt peut diminuer sensiblement. Pour éviter tout cela, lors de la récolte du bois de résineux on peut laisser les branches à sécher dans la forêt pendant quelques semaines (figure 1).
BOIS ENERGIE N°6 < JUILLET 2002 > 46
QUOI, COMMENT ET QUAND RECYCLE-T-ON ? Principalement il s'agit d'enlever les branches et les autres résidus des forêts là où le recyclage des cendres issues de la combustion ou l'apport des substances nutritives de compensation sera possible. Afin de soutenir d'une façon optimale la croissance d’une nouvelle génération d’arbres, la dispersion des nutriments contenus dans les cendres doit commencer cinq ans avant la coupe finale. Le circuit de recyclage des biocendres issues de la combustion comprend la collecte, le traitement, le transport et la dispersion dans la forêt (figure 2). Il peut aussi être nécessaire de stocker les cendres dans des dépôts intermédiaires entre ces étapes principales. En Suède, par exemple, toutes ces opérations sont strictement réglementées pour prévenir la formation de lixiviat, à cause duquel la plupart des nutriments pourrait être enlevée par l'eau de pluie et dispersée dans des sols différents des ceux de la forêt d’origine. La quantité recyclée est limitée en fonction de la qualité des sols, du type du bois extrait et de la quantité de bois qui va rester dans la forêt. La quantité maximale qui peut être recyclée dans le cas d’enlèvement du bois et de tous ses résidus est 3 tonnes par hectare pendant le temps de croissance d’un arbre (50 ou 60 ans). Cette quantité est limitée à 2 tonnes dans le cas d’enlèvement de tiges et d'écorces. Les cendres recyclées ne doivent pas être trop solidifiées et agglomérées
pour faciliter l'épandage et la dissolution lente pendant 5 à 25 ans et la concentration en substances nutritives et métaux lourds est strictement réglementée. Les cendres recyclées doivent être stabilisées par addition d'eau et ensuite solidifiées. Cela se fait par : - auto-solidification qui comprend un broyage mécanique à la dimension souhaitée, la dispersion uniforme sur le sol, l'addition d’eau et la compression ; - granulation : dans des installations fixes de compactage ou roulage et en présence d’eau, cette technique est la plus adaptée aux petits gisements de cendres et donne un produit qui présente un temps de lixiviation assez élevé. Pour maximiser la rentabilité économique du recyclage, il faut essayer d'utiliser des équipements déjà existants sur place qui nécessitent des adaptations minimales, par exemple des camions avec plateformes échangeables ou des tracteurs avec des dispositifs de dispersion (figure 3). Dans les sites isolés ou à accessibilité réduite, il est possible d’utiliser des hélicoptères mais les coûts sont trois fois plus élevés. Le coût de la mise en décharge a augmenté suite aux dispositions environnementales et à la taxe sur la mise en décharge. À l'heure actuelle, le coût varie de 68 à 114 euros par tonne, taxes comprises. En Suède les coûts de recyclage des cendres en forêts se montent en moyenne à 150 euros/ha, soit de 50 à 75 euros
pour une tonne. En conclusion, compte tenu des coûts de stockage et des avantages pour les propriétaires de forêts et de chaufferies, cette option semble de plus en plus prometteuse. ᔤ
Figure 3 : Pour une dispersion économique des cendres, on utilise du matériel déjà existant.
CONTACT : Enrico BENETTO, Emil POPOVICI EcoInnova sas Environment Park via Livorno 60 10144 Torino Italie www.ecoinnova.it ebenetto@ecoinnova.it epopovici@ecoinnova.it
Figure 2 : le recyclage des cendres est un bon exemple d'écologie industrielle car c'est un circuit fermé et auto-alimenté.
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Les aiguilles vont alors tomber et libérer la plupart des nutriments dans le sol. Cependant, dans ce cas le taux de récolte de biomasse diminue et le coût total peut augmenter. Une autre solution pour rééquilibrer le bilan des substances nutritives dans le sol est le recyclage des cendres issues de la combustion du bois. Dans ce cas tous les nutriments prélevés des forêts pendant la récolte de la biomasse (sauf l’azote et quelques autres composants qui sont perdus dans les fumées) retournent au sol et les cations Ca 2+, Mg 2+, K 2+, avec leur caractère alcalin aident à diminuer l’acidité des sols. Le recyclage peut être considéré comme un très bon exemple d'écologie industrielle du bois-énergie car aucune substance externe à l'écosystème et/ou anthropique n’est introduite.
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