ENTREVUE
Luc
MAURICE
DÉVELOPPER DANS LE RESPECT DES PERSONNES RETRAITÉES PAR EMMANUELLE GRIL, JOURNALISTE
Luc Maurice, le fondateur du Groupe Maurice, résidences pour retraités, a sa propre conception des aînés. Pour lui, il ne s’agit pas d’une simple colonne dans les données de Statistique Canada, mais bien de personnes à part entière, aux besoins et aux réalités variés. Portrait d’un visionnaire qui a le cœur à la bonne place.
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Vous savez, je suis rarement au bureau. Je m’y trouve aujourd’hui pour notre entrevue, mais sinon, je suis toujours sur le terrain », précise Luc Maurice au début de la rencontre. Sportif et énergique, débordant d’idées et de projets, le fondateur et président du Groupe Maurice n’en prend pas moins le temps de parler et d’écouter les retraités qu’il croise dans ses résidences. Il serre des mains, prend des nouvelles de la santé, règle des problèmes logistiques parfois aussi anodins que l’installation d’un parterre de tulipes… Des enjeux qui peuvent sembler banals, mais qui, aux yeux des résidents, revêtent une tout autre importance. « On a tendance à englober les personnes âgées dans un seul groupe. Or, les besoins et les aspirations des individus de 65 ans n’ont rien à voir avec ceux de 75 ans et encore moins avec ceux de 85 ans ! Et à l’intérieur de ces catégories, on trouve des gens aux centres d’intérêt variés. On a tort de généraliser, et tant et aussi longtemps que l’on fera ce genre d’amalgame et d’analyse grossière, voire barbare, la qualité de ce que l’on propose aux personnes âgées ne sera pas à la hauteur », affirme-t-il. Cette philosophie est d’ailleurs le pivot de sa vision d’affaires : des complexes résidentiels d’avant-garde où tout est conçu pour assurer la liberté et un certain art de vivre aux retraités. UN PARCOURS ATYPIQUE Les grands-parents maternels ont occupé une place importante dans la vie du jeune Luc. Très engagés dans le développement de l’économie de leur région, ces aînés à la débrouillardise et à la culture entrepreneur iale solides l’ont profondément influencé. « C’était des gens brillants, pauvres, mais de grands leaders », se souvient-il. Son père, Robert Maurice, petit entrepreneur général, a également constitué
une grande source d’inspiration et l’a initié à la construction. C’est pourtant vers une carrière militaire qu’il s’oriente en étudiant au Collège militaire royal de Saint-Jean. Pilote en chef d’une escadrille au sein des Forces armées canadiennes à Edmonton, il passe plusieurs années dans l’Ouest canadien. Durant cette période, il s’inscrit à l’Université d’Alberta où il obtient un MBA, avec une spécialisation en marketing et techniques quantitatives. Un jour, en faisant son jogging, il aperçoit une résidence pour aînés en construction dont la qualité laissait grandement à désirer. « Cela avait l’air d’un poulailler ! », commente-t-il. Et c’est le déclic. Il décide donc que sa thèse portera sur l’optimisation du design pour résidences de retraités. Un signal annonciateur du tournant qu’allait prendre sa vie quelques années plus tard… À l’âge de 29 ans, il est recruté comme aide de camp par la gouverneure générale du Canada, Jeanne Sauvé. Durant cette période, il a l’occasion de croiser le chemin de grands noms du milieu des affaires comme Paul Tellier, et son projet entrepreneurial prend forme peu à peu. Il confie que cette étape de son existence a été très formatrice, Maurice Sauvé, homme d’affaires aguerri avec qui il avait beaucoup d’affinités, ayant été une sorte de mentor pour lui. Il fait le saut en 1987, en créant Gestion Dali Management, une firme de consultation dans l’aménagement de résidences pour retraités. Il réalisera des études de marché dans 38 villes au pays. L’entreprise grossit, mais malheureusement, à la suite d’une mauvaise association et de déboires financiers, Luc Maurice doit repartir à zéro.
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Il œuvre ensuite comme directeur de projets à Services gouvernementaux Canada, puis il devient le principal responsable de la Conférence d’études canadiennes du Gouverneur général. Deux ans plus tard, en 1995, il intègre CANAC International, une division d’ingénierie du CN, à titre de directeur général des affaires corporatives.
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Ne parvenant pas à donner vie à sa vision et à ses idées, il quitte tout en 1997 et fonde le Groupe Maurice l’année suivante. « Mon besoin d’être entrepren eur, de réaliser des choses et de rendre les gens heureux, tant les clients que les employés, me hantait constamment », confie-t-il. LA RECETTE DU SUCCÈS Aujourd’hui, Groupe Maurice compte à son actif 31 complexes résidentiels pour personnes retraitées, 10 000 résidents et 1 800 employés. Avec un taux d’occupation de 98,3 %, le plus haut au Canada dans ce champ d’activité, quelle peut bien être la recette de Luc Maurice? « J’ai compris qu’en travaillant sur cinq aspects précis, nous pourrions mieux réussir que la moyenne. C’est sans doute la raison pour laquelle nous avons pu percer plus vite que les autres », explique-t-il. Le premier de ces éléments est simple, mais pourtant pas toujours compris ni appliqué par l’industrie : un aîné est une personne à part entière. « Selon moi, une personne âgée, plutôt que de penser seulement en termes de besoins et de sécurité, a le droit de réfléchir en termes de life style, de plaisir. Comme vous et moi, elle veut avoir du fun dans la vie, dans la mesure de ses capacités. D’ailleurs, des
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sondages nous ont révélé que 38 % des gens qui viennent s’installer chez nous le font non pas parce qu’ils sont malades, mais parce qu’ils désirent socialiser davantage », souligne M. Maurice, qui espère contribuer à recréer un environnement de vie pour ses résidents, les aider à se rebâtir une identité, en quelque sorte. Cette notion d’aide est d’ailleurs ancrée au cœur de ses motivations : « Faire de l’argent, cela ne m’intéresse pas. Construire un bâtiment pour en tirer une plus-value non plus. Certes, je n’ai pas à me plaindre, mais ce qui est important pour moi, c’est d’être utile. Quand j’étais pilote, je m’ennuyais, je ne réalisais rien. Aujourd’hui, j’ai un métier qui me permet de mobiliser les gens et d’essayer de les rendre heureux », affirme-t-il. Deuxième aspect qui le préoccupe tout particulièrement : des statistiques qui ne sont pas représentatives de la réalité. « On entend dire que 18 % des personnes
âgées vivent en résidence, qu’il faudra construire 6 000 nouvelles unités pour répondre à la demande… C’est bien beau, mais 6 000 quoi? Des unités avec soins, sans soins ? En ville, à la campagne ? Il y a autant de différences possibles que de personnes. Pourquoi à 75 ans, faudrait-il que nous ayons tous des goûts identiques ? », s’interroge M. Maurice. C’est pour cela, précise-t-il, qu’il s’efforce d’offrir des complexes diversifiés, dans des secteurs variés, qui répondent réellement aux besoins et aux envies de ses résidents. « Nous les écoutons beaucoup, nous tenons des groupes de discussion, cela nous aide à connaître leurs désirs. Par exemple, nous avons fait partie des premiers à offrir des douches dans nos unités. Les gens venaient nous voir et nous disaient : “ On n’a plus de genoux, on ne veut pas de bains ! ”, alors nous avons modifié notre offre », illustre-t-il. Cela rejoint d’ailleurs le troisième aspect mis de l’avant par M. Maurice. « Je ne veux pas avoir des clients satisfaits, mais plutôt des clients engagés ! Une personne engagée n’est pas quelqu’un qui endure ou qui subit quelque chose qui ne lui plaît pas. Elle va parler, faire connaître son désaccord, et c’est ainsi que nous pouvons nous ajuster et nous améliorer. Un client satisfait, lui, s’il ne l’est plus, ne dira rien et ira simplement s’installer chez un concurrent », indique M. Maurice qui insiste sur le fait qu’une personne engagée et heureuse est le meilleur ambassadeur qui soit!
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UNE BASE SOLIDE Le fondateur de Groupe Maurice estime que pour pouvoir durer et proposer de la qualité, il est important de mettre en place une plate-forme de gestion solide, ce qui constitue d’ailleurs son quatrième point. « La vague institutionnelle dans le domaine des résidences pour aînés a fait en sorte d’instaurer une grande rigueur en matière de gestion. C’est une très bonne chose, car c’est la qualité de la plate-forme qui, globalement, permet de faire baisser les taux de capitalisation et donc la perception du risque par les investisseurs ; par le fait même, ils démontreront plus d’intérêt à s’investir dans cette superbe industrie », explique-t-il. Cela dit, placer la profitabilité à court terme avant celle à long terme ne fait pas partie de sa philosophie. Il s’estime d’ailleurs très prudent dans sa gestion du risque tout comme dans ses décisions d’affaires, préférant pouvoir « dormir sur ses deux oreilles ». La profitabilité maximale n’est pas non plus une fin en soi pour Luc Maurice, qui distribue à la fin de chaque année financière 30 % de ses profits à ses plus proches collaborateurs, environ 25 personnes. Par ailleurs, Groupe Maurice remet 0,6 % de ses revenus bruts à la collectivité, ce qui représente annuellement de un à deux millions de dollars.
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Cinquième aspect, et non le moindre : le savoir. « Quand j’ai démarré mon entreprise, je me suis dit que si je voulais réussir, je devais être celui qui en connaissait le plus sur ce domaine. Alors je suis allé voir les façons de faire dans plusieurs pays, je me suis informé, j’ai beaucoup appris. Pour être un leader et regarder la compétition dans son rétroviseur, il faut constamment innover. On reste curieux, on va de l’avant tout en restant à l’écoute de la clientèle. Les gens changent, il faut répondre à leurs attentes », croit-il. Pour faciliter la vie de ses résidents, les nouveaux complexes proposent d’ailleurs des milieux de vie où l’on trouve notamment des magasins et des supermarchés. « En pouvant aller faire leur épicerie à proximité, les aînés demeurent autonomes plus longtemps et ne dépendent de personne. Mon travail est de faire en sorte qu’ils se sentent plus libres… » Un objectif dont il s’efforce de se rapprocher un pas à la fois.
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Architecture et urbanisme « Il est révolu le temps où l’on offrait aux personnes âgées des résidences de deuxième ordre. Nous construi sons des bâtiments qui n’ont rien à envier à ce qui se fait pour toutes les autres strates d’âge. D’ailleurs, nos appartements se doivent d’être de qualité supérieure, car nos locataires y passent davantage de temps », affirme Luc Maurice.
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Ces logements à la fenestration généreuse et situés dans des bâtiments en béton se prêteront d’ailleurs très bien aux éventuelles transformations que nécessitera la baisse de la demande, d’ici quelques années. « On pourra alors facilement en faire des appartements tradi tionnels. Mais ce n’est pas tout, car en plus de l’architecture, il faut aussi tenir compte de l’urbanisme. À ce chapitre, nos complexes rési dentiels sont situés à proximité de plusieurs services utilitaires et commerciaux, ce qui facilitera encore davantage la transition de clientèle », ajoute M. Maurice.