MONDE MUNICIPAL
AIRBNB :
MENACE OU AVANTAGE POUR LES MUNICIPALITÉS ET LES RÉGIONS ? Jean Bouchard Expert invité
Depuis quelques années, la location de logements en ligne par l’intermédiaire du « modèle Airbnb » ne cesse de gagner en popularité partout sur la planète, et le Québec n’y fait pas exception. Depuis sa création à San Francisco en 2008, cette plateforme communautaire payante de location et de réservation de logements de particuliers a révolutionné le marché de l’hébergement touristique.
Elle permet en effet à n’importe qui dans le monde de louer, en tout ou en partie, sa propre habitation comme logement d’appoint. Par l’entremise d’un site Web et d’une application mobile, un vacancier à la recherche d’un hébergement temporaire peut ensuite chercher et réserver un logement, à un prix convenu avec le particulier offrant la location. Depuis près de 10 ans, pas moins de 3 millions de locations ont ainsi été offertes sur Airbnb dans 65 000 villes réparties dans 191 pays. Jean Bouchard est maire de Mirabel depuis 2013, après avoir été conseiller municipal de 2005 à 2013. Avant de se consacrer à la politique municipale, il a œuvré pendant 25 ans à titre d’urbaniste au sein tant de municipalités que de cabinets privés. Depuis 2015, il siège au conseil d’administration de l’Union des municipalités du Québec (UMQ) à titre de représentant de la Couronne Nord pour le Caucus des municipalités de la métropole. Il préside également, depuis 2016, la Commission de l’aménagement et des transports de l’UMQ.
Ce modèle suscite évidemment certains ques tionnements, entre autres en ce qui a trait à l’équité fiscale par rapport à l’industrie de l’hébergement touristique traditionnelle, qui doit percevoir des taxes sur les locations de chambres qu’elle vend à sa clientèle. C’est d’ailleurs pourquoi le gouvernement du Québec a adopté, en 2015, la Loi visant principalement à améliorer l’encadrement de l’hébergement touristique et à définir une nouvelle gouvernance en ce qui a trait à la promotion internationale. Cette nouvelle loi modifie la Loi sur les établissements d’hébergement touristique en obligeant tous les exploitants d’un tel établissement à obtenir une attestation de classification de la Corporation de l’industrie touristique du Québec (CITQ). Selon la Loi, un établissement d’hébergement touristique est un établissement dans lequel au moins une unité d’hébergement est offerte en location contre rémunération, pour une période n’excédant pas 31 jours, à des touristes sur une base régulière au cours d’une même année civile et dont la disponibilité de l’unité est rendue publique. Ainsi, les établissements de type Airbnb se trouvent visés par la Loi.
L’entrée en vigueur de cette nouvelle obliga tion constitue une bonne nouvelle pour les municipalités, puisqu’elle se traduira, à terme, par un élargissement de leur assiette foncière non résidentielle. Les municipalités appliquant un taux de taxe non résidentiel pourront doré navant inclure ces établissements touristiques dans leur catégorie d’immeubles non résidentiels en leur appliquant une classe de mixité. L’évaluateur municipal devra alors déterminer le pourcentage que représente, par rapport à la valeur imposable totale de l’unité, la valeur imposable de l’ensemble des immeubles non résidentiels compris dans l’unité. L’évaluateur municipal pourra y parvenir en fonction de la superficie occupée à des fins touristiques ou encore de la période d’exploitation. Cette régularisation du statut des établissements de type Airbnb aura aussi un impact positif pour le développement économique des régions. Une entente conclue en août dernier entre le gouvernement du Québec et l’entreprise et en vigueur depuis le 1er octobre dernier amènera dorénavant cette dernière à percevoir la taxe sur l’hébergement (TSH) sur l’ensemble des
GETTY IMAGES PAR KATARZYNABIALASIEWICZ
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IMMOBILIER COMMERCIAL : : DÉCEMBRE – JANVIER 2018