ENVIRONNEMENT ET URBANISME
LA RÉHABILITATION ENVIRONNEMENTALE D’UN SITE :
QUELLES SONT LES OPTIONS ? Frédéric Dufault
Mauvaise nouvelle, vous apprenez que votre site est contaminé. Que pouvez-vous
Expert invité
sites en milieu urbain, ces situations pourraient devenir de plus en plus courantes.
faire ? Comment devez-vous procéder ? Avec la revitalisation et la densification des Un site contaminé n’est pas une situation sans issue ; il existe plusieurs façons d’aborder la problématique en vue de la régler.
Frédéric Dufault, urbaniste, est évaluateur environ nemental de site agréé (EESA) et vérificateur environnemental agréé (VEA), agréments qui sont décernés par l’Association québécoise de vérification environnementale (AQVE). Il cumule plus de 15 années d’expérience dans le domaine de l’urbanisme et de la gestion immobilière et environnementale. Il est président de la firme Enviro 3D Conseils inc.
Notons toutefois qu’il n’y a pas de méthodologie parfaite ni de solutions miracles dans le cas de sites contaminés. Il est primordial de procéder aux études environnementales de site, Phases I-II-III, afin de connaître le ou les types de contaminants présents dans les sols ou dans l’eau souterraine et de faire affaire avec des professionnels certifiés et reconnus. De plus, lorsque cela est possible, on doit idéalement connaître l’origine de la contamination, afin de mieux comprendre le comportement des contaminants dans les sols et l’eau ; ainsi, les interventions seront plus précises, et les professionnels pourront suggérer des actions selon la nature de la contamination, l’usage projeté des lieux, mais également les objectifs du propriétaire. Car, rappelons-le, un site contaminé peut être exploité, tant et aussi longtemps que les critères du Guide d’intervention – Politique de protection des sols et réhabilitation des terrains contaminés ou du Règlement sur la protection et la réhabilitation des terrains sont respectés (voir encadré p. 57). EXCAVER LES SOLS ET EN DISPOSER Une fois l’ensemble des critères étudiés et les objectifs définis, quelles sont les options possibles pour la gestion des sols contaminés ? La plus répandue est sans aucun doute la méthode de dig and dump, soit l’excavation des sols et le transport de ces derniers vers un site de traitement ex situ ou de dépôt définitif autorisé par le ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MDDELCC). Cette option est souvent préconisée pour des questions de rapidité et de contrôle des coûts. Elle peut cependant générer des frais astronomiques, liés à l’excavation et au transport des sols excavés dans les secteurs problématiques vers un site externe où l’on peut
les accepter, les traiter et les enfouir. Les prix sont variables d’une région à l’autre, d’un type de contaminant à l’autre, et il faut s’assurer que le professionnel mène une étude de faisabilité qui prend l’ensemble des variables en compte. Une fois sur le site externe, les sols sont parfois traités ou simplement disposés dans une cellule d’enfouissement, le tout en fonction du type et du degré de contamination. Sur le terrain à exploiter, l’excavation est remblayée avec des matériaux propres autorisés. IN SITU OU EX SITU ? Cependant, le MDDELCC, avec la révision de la Loi sur la qualité de l’environnement, veut préconiser les approches autres de traitements des sols, comme les traitements in situ et ex situ sur place. Ces traitements favorisent une procédure à même le site au moyen de technologies qui évoluent de plus en plus et qui deviennent des options intéressantes, tant sur le plan technique que sur le plan financier. Il existe plusieurs technologies de traitement in situ dont les avantages sont nombreux, entre autres traiter une plus grande quantité de sols conta minés, poursuivre les activités ou la production
GETTY IMAGES PAR MILLERSTOCK
IMMOBILIER COMMERCIAL : : FÉVRIER – MARS 2018
55
ENVIRONNEMENT ET URBANISME
ADOBE STOCK PAR GOODLUZ
sur le site, prévenir une contamination de la nappe phréatique ou permettre un traitement lorsqu’il devient difficile d’excaver le sol. De plus, ces approches sont à considérer dans une optique de développement durable. Il va de soi que certains inconvénients doivent aussi être pris en compte. L’efficacité du traitement s’avère parfois difficile à prévoir, bien que les technologies soient de plus en plus fiables, la durée du traitement est assurément plus longue que celle du traditionnel dig and dump, et certains sols ne se prêtent pas aussi facilement à ce type de traitement. Pour les eaux souterraines, les approches sont similaires ; le traitement in situ sera plus souvent utilisé, puisqu’il devient difficile de pomper une nappe phréatique contaminée et d’en disposer à l’extérieur du site, sans
engendrer des coûts exorbitants de transport, de traite ment et de disposition. DES TECHNOLOGIES IN SITU AVANT-GARDISTES Il existe plusieurs types de traitement pour les approches in situ. Que ce soit par l’oxydation chimique, la bioventilation, l’extraction de vapeurs ou la ventilation, la technologie permet même d’utiliser les champignons et les bactéries présents naturellement dans les sols, en les aidant au moyen d’une oxygénation ou en ajoutant des membres à la population existante pour digérer les contaminants organiques (produits pétroliers, composés organiques volatils, etc.). On parle alors de bioaugmentation ou de biostimulation. Depuis quelques années, on fait de plus en plus d’essais au moyen de la phytoremédiation, c’est-à-dire la réhabilitation par les plantes pour certains terrains contaminés en surface.
Publicite_Coarchitecture_impression2.pdf 1 2018-02-16 10:19:55
C
M
J
CM
MJ
CJ
CMJ
N
www.coarchitecture.com
56
IMMOBILIER COMMERCIAL : : FÉVRIER – MARS 2018
CRITÈRES GÉNÉRIQUES POUR LES SOLS Les critères (A, B, C) sont définis comme suit :
CRITÈRE A Pour les eaux souterraines, on parle de traitement par récupération passive ou écrémage, de rabattement de la nappe (récupération active), de pompage et de traitement, ainsi que de diverses technologies de barrières (hydraulique ou perméable réactive). Autant de méthodes qui assurent la décontamination des sols et des eaux souterraines sans aucun déplacement du matériel à traiter. Ces approches sont appliquées directement aux sols ainsi qu’aux eaux souterraines contaminées, sans excavation ni pompage préalable. Principalement indiqué dans le cas d’une conta mination sous une structure, un bâtiment ou une surface finie, mais de plus en plus utilisé sur des terrains vacants, le traitement in situ permet de limiter l’impact sur l’environnement immédiat. L’avantage principal des techniques in situ consiste donc en la réduction, voire l’élimination des coûts d’excavation et de transport menant à des économies substantielles sur une période à moyen et à long terme. Les économies indirectes sont également à prendre en compte, que ce soit pour éviter les gaz à effet de serre liés au transport et à l’entreposage définitif, contribuer au développement durable en valorisant la matière sur place et minimiser l’enfouissement d’un matériel qui n’est pas nécessairement un déchet. De plus, l’approche vaut de plus en plus la peine d’être considérée dans une optique d’économie verte et de solution écoresponsable.
Teneurs de fond pour les paramètres inorganiques (métaux) et limite de quantification pour les paramètres organiques (produits pétroliers, composés organiques volatils, hydrocarbures aromatiques polycycliques [HAP], etc.).
CRITÈRE B (valeurs limites réglementaires de l’annexe I du RPRT) Limite maximale acceptable pour des terrains résidentiels ou des terrains où se déroulent certains usages institutionnels (établissements d’enseignement primaire ou secondaire, centres de la petite enfance, garderies, centres hospitaliers, centres d’hébergement et de soins de longue durée, centres de réadaptation, centres de protection de l’enfance ou de la jeunesse, établissements de détention) et le premier mètre des aires de jeu des parcs municipaux.
CRITÈRE C
(valeurs limites réglementaires de l’annexe II du RPRT)
Limite maximale acceptable pour des terrains industriels, commerciaux, institutionnels non sensibles et récréatifs (pistes cyclables et parcs municipaux, sauf le premier mètre des aires de jeu), de même que pour ceux destinés à former l’assiette d’une chaussée ou d’un trottoir en bordure de celle-ci.
Source : Adapté du Guide d’intervention – Politique de protection des sols et réhabilitation des terrains contaminés du MDDELCC
COLLABORATION INNOVATION EXPERTISE GÉNIE MÉCANIQUE ET ÉLECTRIQUE DU BÂTIMENT | EFFICACITÉ ÉNERGÉTIQUE
bâtiments neufs et existants www.ambioner.com QUÉBEC • MONTRÉAL • SAGUENAY IMMOBILIER COMMERCIAL : : FÉVRIER – MARS 2018
57