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LA MAIRESSE DE MONTRÉAL S’EXPRIME SUR SA VISION D’UN DÉVELOPPEMENT IMMOBILIER OÙ CHACUN TROUVERAIT SON COMPTE PAR JOHANNE LANDRY, JOURNALISTE
Une ville dotée de quartiers qui ont leurs particularités, qui offrent des milieux de vie riches et agréables et qui, surtout, accueillent une mixité de résidents de tous les âges, de toutes les cultures, de toutes les couches sociales et de tous les niveaux de revenus, voilà une plus-value pour la métropole du Québec, préconise Valérie Plante.
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ative de Rouyn-Noranda, Valérie Plante avait 19 ans lorsqu’elle a décidé de déménager à Montréal. Pourquoi ? « Parce que j’aime les grandes villes et que Montréal en est une à taille humaine, accessible, avec beaucoup de vie dans ses quartiers », répond-elle, ajoutant qu’elle a aussi vécu quelques mois à Paris et à Buenos Aires durant ses études. Détail surprenant, la mairesse de Montréal détient un baccalauréat en anthropologie, une maîtrise en muséologie ainsi qu’un certificat en intervention multiethnique. Comment ce parcours universitaire a-t-il mis la table pour sa carrière politique ? « Faire des études supérieures dans des disciplines qui relèvent des sciences humaines, c’est travailler en interdisciplinarité, avec des partenaires qui ont d’autres champs d’intérêt que les nôtres, d’autres perspectives, ce qui a formé ma façon de réfléchir. J’aime toujours m’entourer de gens qui ont des antécédents variés, des opinions différentes et des points de vue diversifiés qui amènent plus de richesse et de profondeur aux projets », explique-t-elle. En début de carrière, Valérie Plante a travaillé sur le terrain dans des organismes communautaires et dirigé le réseau national de la Fondation Filles d’action, dont la mission est de renforcer la confiance et les compétences des jeunes femmes. En 2013, elle s’est présentée contre Louise Harel dans l’arrondissement VilleMarie et a été élue conseillère municipale. « Je suis rapidement ressortie comme l’une des femmes de la relève de mon parti, je prenais ma place et j’avais une vision », relate celle qui parle d’intégrité, de famille et d’égalité quand on lui demande quelles sont ses valeurs, qui se dit féministe et qui définit une société juste comme un milieu de vie qui donne des occasions d’avancer à tout un chacun. Mère de deux fils, Valérie Plante adore se promener à vélo. « J’ai traversé tous les quartiers de Montréal, à différents moments, juste pour m’imprégner de l’esprit de chacun », raconte-t-elle. La famille Plante-Harvey, qui habite le quartier Rosemont, ne possède d’ailleurs pas d’automobile et n’en ressent pas le besoin. Métro, autobus, Communauto, Bixi et taxi… « un cocktail de moyens de transport est disponible, nous ne nous privons pas de sortir et nous faisons tout ce que nous avons à faire », dit la mairesse, faisant valoir l’effet positif que peut avoir sur le budget l’élimination du poste dépenses d’automobile. BÂTIR DANS UNE VILLE EN SANTÉ Quelle part voit-elle pour l’immobilier dans le développement économique de Montréal ? Importante, car les promoteurs immobiliers sont de grands investisseurs qui font en sorte que la ville se porte bien. « Une ville où l’on investit, où l’on bâtit est une ville en santé », affirme Valérie Plante, ouvrant la porte pour parler de mixité sociale et économique qu’elle considère comme cruciale pour la métropole. S’il s’agit d’un objectif prioritaire pour la mairesse, la mixité sert aussi les promoteurs, soutient-elle : « Ce sera gagnant / gagnant d’arriver à un consensus, à des règles qui seront bonnes pour tout le monde, pour les promoteurs et la population montréalaise. Si Montréal est reconnue dans le
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monde comme une ville accessible en regard de l’habitation, ça fera en sorte que plus de personnes voudront y vivre et qu’on construira davantage. » L’INCLUSION DES LOGEMENTS SOCIAUX Mais le gros point d’interrogation qui préoccupe nombre d’investisseurs immobiliers, c’est l’adoption d’ici l’année prochaine d’un règlement qui obligera tous les projets de développement à inclure 20 % de logement social et communautaire, 20 % de logement abordable et 20 % de logement familial. « Ce 20 / 20 / 20 ne fera pas 60 % au total parce que les catégories se chevaucheront. En réalité, ce sera davantage 40 % », précise la mairesse. Valérie Plante insiste, elle cherche une formule gagnante pour tous. « C’est sûr qu’il faudra jaser et s’entendre. Quand je rencontre les représentants de l’Institut de développement urbain du Québec, je leur réitère ma volonté de travailler ensemble en prévision des changements de la réglementation. Pas question que j’impose quelque chose sans avoir eu de discussions préalables et obtenu une étude d’impact. C’est ce que je me suis engagée à faire, nous avons besoin de nous appuyer sur des données et des chiffres », dit-elle. Cette étude d’impact, qui servira de base à l’élaboration d’un modèle, se mène en trois volets : d’abord, une estimation des coûts de construction, puis une analyse financière – ces deux volets ont été confiés à une firme externe. Enfin, un dernier IMMOBILIER COMMERCIAL : : OCTOBRE – NOVEMBRE 2018
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volet découlera des deux premiers, soit les projections économiques des différents scénarios. « Mon leadership n’est pas de style bulldozer. Je suis une personne de consensus qui travaille en amont. Est-ce que ça veut dire que ça va toujours dans le sens des souhaits de chacun ? Non. Mais il y a toujours une grande recherche d’équilibre de ma part », soutient Valérie Plante. Par ailleurs, la mairesse se dit à l’écoute des préoccupations des promoteurs immobiliers qui souhaitent savoir à l’avance ce qui va se passer et quelles seront les mesures transitoires. L’étude d’impact, explique-t-elle, sera une espèce de structure dans laquelle on entrera des données comme le type et l’envergure du projet, la taille des unités ou sa situation en évaluant si le ratio sera le même au centreville ou ailleurs. « Il faut bien comprendre tous les aspects. J’ai un objectif de 20 / 20 / 20, mais j’ai aussi le souci que ce soit faisable. Nous ne voulons pas précariser l’industrie immobilière, c’est notre partenaire », poursuit la mairesse. COMPÉTITIVITÉ DES PRIX AVEC LA BANLIEUE Si des promoteurs immobiliers s’inquiètent, une fois le règlement sur l’inclusion adopté, que leurs unités d’habitation ne soient plus compétitives avec celles de la banlieue en regard du prix, la mairesse, pour sa part, dit ne pas être en compétition avec les banlieues. « Ailleurs dans le monde, des gens veulent venir s’installer à Montréal
parce que, par exemple, elle est la seule métropole francophone en Amérique du Nord. Ces gens seront d’autant plus nombreux si nous leur offrons ce qu’ils veulent, c’est-à-dire la mixité dans les milieux de vie. » Comme présidente de la Communauté urbaine de Montréal, Valérie Plante fait aussi valoir que les autres municipalités membres attendent de voir le règlement de Montréal pour s’en inspirer. Le règlement d’inclusion que la mairesse prévoit adopter l’automne prochain aura-t-il pour effet d’harmoniser les pratiques entre les différents arrondissements ? « Oui, absolument, répond-elle. Mais la ville de Montréal étant ce qu’elle est, il y a aussi des particularités. L’idée du règlement demeure d’en arriver à un modèle unique qui tiendra compte avant d’être appliqué que, par exemple, les projets de plusieurs centaines d’unités sont plus nombreux au centre-ville qu’à Pointe-aux-Trembles. » Et le fonds d’inclusion mis en place en 2005, quel bilan Valérie Plante en fait-elle ? « Positif, mais étant donné qu’il ne s’applique que lorsqu’il y a demande de dérogation, sa portée demeure limitée. Il nous faut davantage pour nous assurer que la ville soutient la mixité sociale et économique. C’est avant-gardiste, oui, mais j’aime bien rappeler que Montréal se démarque justement par cette mixité. Quand je parle avec les maires de Toronto et de Vancouver, ils me disent avoir trop tardé pour instaurer des mécanismes qui assurent leur mixité à long terme et avoir manqué le bateau. »
« Mon leadership n’est pas de style bulldozer. Est-ce que ça veut dire que ça va toujours dans le sens des souhaits de chacun ? Non. Mais il y a toujours une grande recherche d’équilibre de ma part. » – Valérie Plante
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En terminant, comment la première femme maire de Montréal voit-elle la ville idéale ? Elle est verte, sécuritaire, dynamique et inclusive, énumère-t-elle. « Ça a l’air tout simple, mais ça passe par des gestes forts. Il faut accélérer la cadence du développement économique, de l’habita tion et de la mobilité, qui sont mes grands axes d’intervention depuis un an, et je vais continuer sur cette voie », conclut Valérie Plante.
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ET LE FARDEAU FISCAL ? Quels sont les objectifs de l’administra tion Plante en matière de rééquilibrage fiscal entre les secteurs résidentiel et non résidentiel ? « Nous souhaitons pouvoir donner une pause aux promoteurs, inves tisseurs et entrepreneurs, mais tant et aussi longtemps que notre budget de fonctionnement dépendra de la taxe foncière dans une proportion de 70 %, je n’ai pas la capacité de réduire les taxes. Il y a deux choses que je peux faire : limiter la hausse à l’inflation et continuer de talonner le gouvernement québécois pour demander un pacte fiscal qui nous donnera d’autres sources de financement. »
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Parlant gouvernement, le fédéral a annoncé de nouveaux efforts en matière de logement social et abordable. Ne serait-il pas préférable d’attendre la conclusion d’une entente entre les instances canadienne et québécoise avant d’imposer des obligations au secteur privé montréalais ? « Les autres paliers de gouvernements sont aussi nos partenaires, mais ce n’est pas au gouvernement fédéral d’émettre des règles comme nous sommes en train de le faire avec notre projet de règlement sur l’inclusion. Le fédéral dit qu’il va consentir du financement pour rénover du loge ment abordable et social, et c’est une bonne nouvelle. Mais ce sont uniquement des sources de financement et non de la création de politique », rappelle la mairesse Plante.
Autre point au chapitre des logements sociaux, le nombre d’unités Accès Logis autorisées, mais non construites, était de plus de 3 500 en mars 2018. Pourquoi ? « Nous avons reçu des pouvoirs et des sommes d’argent, mais nous avons un problème avec les seuils admissibles, ce qui bloque nos projets. Tranquillement, des unités sont construites, mais ça ne va pas aussi vite que nous l’aimerions, et nous poursuivrons la conversation avec le nouveau gouvernement », dit Valérie Plante.