Monde municipal - Immobilier commercial volume 12 - numéro 2

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MONDE MUNICIPAL

LES TOITS VÉGÉTALISÉS : LEURS UTILITÉS DANS UN CONTEXTE DE CADRE BÂTI URBAIN Jean Bouchard Expert invité

On le sait, l’urbanisation apporte son lot de défis, dont la densification du cadre bâti et la raréfaction des espaces verts. Parmi leurs conséquences directes figure évidemment la multiplication des îlots de chaleur, qui peuvent causer des désagréments, de l’inconfort, voire des décès dans les tranches de population les plus vulnérables, et contribuer à une hausse importante de la demande en énergie pour la réfrigération et le rafraîchissement ainsi qu’à l’augmentation de la demande en eau potable. C’est dans ce contexte de santé publique et de problèmes environnementaux que les toits végétalisés sont de plus en plus utilisés un peu partout dans le monde. Utiles à l’échelle urbaine, ces toits « verts » se révèlent un inves­tissement intéressant, autant pour les bâtiments résidentiels que pour les bâtiments commerciaux et industriels.

Jean Bouchard est maire de Mirabel depuis 2013, après avoir été conseiller municipal de 2005 à 2013. Avant de se consacrer à la politique municipale, il a œuvré pendant 25 ans à titre d’urbaniste au sein tant de municipalités que de cabinets privés. Depuis 2015, il siège au conseil d’administration de l’Union des municipalités du Québec (UMQ) à titre de représentant de la Couronne Nord pour le Caucus des municipalités de la métropole. Il préside également, depuis 2016, la Commission de l’aménagement et des transports de l’UMQ. 66

La liste des avantages des toits végétalisés est longue et ne se limite pas aux îlots de chaleur. Comme tout autre espace vert en milieu urbain, ils réduisent le ruissellement des eaux de pluie et l’engorgement des égouts, filtrent l’air, augmentent les surfaces de culture et offrent de nouveaux habitats à une faune utile comme les abeilles. L’agriculture urbaine a de belles perspectives devant elle. Et les effets bénéfiques ne s’arrêtent pas là. L’ensemble des citoyens, tout comme les commerces et les industriels, peut tirer profit de ces infrastructures vertes. Agissant comme zone tampon, les toitures vertes tempèrent les bâtiments. Elles sont de vrais climatiseurs naturels l’été et d’efficaces isolants l’hiver. S’ajoutent aussi les économies d’énergie, la prolongation de la durée de vie d’une toiture et la diminution du bruit – des expériences ont démontré qu’un aménagement de 12 cm d’épaisseur réduit le niveau sonore de 40 décibels. Sans oublier qu’un toit végétalisé

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représente un lieu de détente et ajoute un réel agrément au patrimoine bâti. Malgré tout, et en dépit de leur popularité en Europe, les toits végétalisés peinent à s’imposer sous nos froides latitudes. Dans la métropole par exemple, les toits représentent environ 85 km2, soit 16,9 % du territoire de l’agglomération montréalaise, selon la Direction de l’urbanisme de la Ville. Est-ce leurs coûts qui freinent leur prolifération au Québec ? Avec un coût très variable de 10 à 120 $ / pi2 selon le type de projet et de toiture d’après l’organisme Écohabitation, il est clair que certains investissements peuvent paraître importants. Dans sa forme la plus simple, il peut s’agir d’un simple tapis de verdure, et l’entretien s’avère facile. C’est un plus pour ceux qui souhaitent se lancer dans l’aventure. Une chose est sûre : nous pouvons faire mieux. Les milliers d’hectares de toitures plates disponibles et adéquates pour recevoir une structure végétalisée représentent une belle occasion à saisir. En cela, nous pouvons nous inspirer de nos voisins, comme la ville de Portland qui, pour réduire les effets négatifs du ruissellement des eaux de pluie, a adopté un programme promouvant l’utilisation des toits verts. Depuis 2001, des subventions d’au moins 5 000 $ US sont offertes pour ce type de projet. Plus loin, au Japon, le gouvernement métropolitain de Tokyo a mis en place un règle­ ment qui force la construction d’une toiture végétalisée sur au moins 20 % des nouveaux bâtiments privés de 1 000 m2 et plus, ainsi que sur les bâtiments publics de plus de 250 m2. En bref, avec un peu de volonté et d’imagination, le Québec peut lui aussi se doter d’un parc immobilier avec des toitures vertes. La ville de demain a compris que les toits verts font partie de la solution.


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