RÉTROSPECTIVE 2018 SUR LES TENDANCES EN IMMOBILIER Andrée De Serres Experte invitée
Je propose dans cet article une brève rétrospective des changements ou des innovations qui ont provoqué d’importantes perturbations dans l’écosystème de l’immobilier en 2018 et qui sont susceptibles de se poursuivre en 2019. Ces perturbations touchent de nombreux types d’activités en immobilier, que ce soit la conception, la construction et l’exploitation des immeubles, le financement, l’assurance et l’investissement, ou encore l’offre de services privés ou publics qui leur est associée.
Pourquoi s’intéresser à ces sources de pertur bations ? Parce qu’elles risquent de déstabiliser les façons de procéder et les modèles d’affaires employés actuellement par les acteurs en immobilier. Il faut donc réfléchir dès maintenant aux mesures à adopter pour faire face à ces enjeux. Vous en trouverez quelques exemples dans les paragraphes suivants.
Andrée De Serres, Ph.D., est titulaire de la Chaire Ivanhoé Cambridge d’immobilier ESG UQAM.
En tête du classement, les changements clima tiques. Ils nous obligent à mettre en œuvre de façon urgente la nécessaire transition éner gétique et à prendre des mesures pour réduire les gaz à effet de serre (GES). Il faudra donc considérer encore plus sérieusement leurs impacts considérables et étudier les options permettant de concevoir et de construire des bâtiments assurément plus durables. Même si les GES générés par la consommation d’énergie des immeubles québécois restent peu élevés par rapport aux autres provinces et aux autres pays du fait qu’on utilise de l’hydroélectricité (9 % des GES produits au Québec), une attention plus forte risque d’être dirigée vers une source encore plus importante de l’empreinte carbone des bâtiments, attribuable au choix des maté riaux utilisés pour construire les immeubles et à l’énergie consommée pendant la phase de construction. Les changements technologiques occupent aussi une place prépondérante. Ils sont associés à la transformation numérique, au développement et à la gestion des mégadonnées, à l’intelligence artificielle. Ils s’appliquent aussi à la transfor mation des bâtiments pour qu’ils deviennent de plus en plus intelligents et qu’ils s’arriment harmonieusement à une ville de plus en en plus intelligente elle aussi.
GETTY IMAGES PAR ME4O
Les changements sociaux sont amplifiés par de grands bouleversements démographiques découlant notamment du vieillissement de la population, de la rareté de la main-d’œuvre, des flux migratoires et de l’efficacité des politiques d’immigration. Du point de vue des employeurs, cela soulève la problématique et la difficulté d’attirer et de retenir les talents. Il y aura une pression sur les avantages salariaux, mais aussi sur tous les autres éléments qui peuvent rendre une organisation plus attirante : les conditions de travail, la qualité et l’aménagement des espaces de travail, de l’immeuble et du quartier où il est situé, son accessibilité par les transports collectifs, mais aussi par les moyens de transport actif (marche, vélo). La rareté de la main-d’œuvre sera aussi vécue par l’industrie de la construction IMMOBILIER COMMERCIAL : : FÉVRIER – MARS 2019
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et devrait soulever un intérêt encore plus fort de ses leaders et de ses innovateurs envers les nouvelles technologies et les modèles d’affaires accompagnant l’industrialisation de la construction qui pourraient les aider à répondre à la demande future. Plusieurs changements d’ordre social et démographique se transforment en phénomène de densification des villes, accompagnés par les problèmes de transport (que l’on vit déjà à Montréal, à Québec et à Ottawa). On peut facilement en évaluer les impacts économiques négatifs sur la productivité, mais également sur la santé. La solution à cet immense problème ne peut provenir uniquement du développement des réseaux de transport routier et collectif. Une partie de la réponse viendra du développement de ce concept innovateur appelé nouvelle mobilité. Celle-ci est devenue possible grâce aux nouvelles technologies de l’information, mais aussi grâce aux changements d’habitude des générations plus jeunes, les milléniaux. Ils privilégient l’accès à des moyens de transport faciles d’usage plutôt que la propriété d’une automobile, aiment l’autopartage, les autos communautaires, le transport à pied et par vélo, ainsi que l’achat local diminuant les déplacements. Cette nouvelle tendance est à surveiller de près : il faut bâtir des immeubles et des quartiers qui les accommodent, car on a plus que jamais besoin d’eux pour le travail !
LAURÉAT PRIX EXCELLENCE EN TOITURE CLAUDE-JACQUES ÉDITION 2018 – CATÉGORIE 2 – TOITS PLATS Lors de son congrès annuel tenu à l’Estérel du 30 janvier au 1er février 2019, l’Association des Maîtres Couvreurs du Québec soulignait le travail remarquable d’un de ses membres pour les travaux de couverture sur le projet COMPLEXE DES SCIENCES - SITE OUTREMONT à Montréal.
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Il importe aussi de réfléchir à la manière de mieux occuper nos territoires en favorisant plus de mixité des usages et des quartiers plus complets. Sur le plan de l’investissement, on note un intérêt accru pour l’investissement social, soit la prise en compte par les investisseurs institutionnels des impacts sociaux et environnementaux créés par les projets immobiliers et d’infrastructures, incluant tout particulièrement la réduction des GES, dans les différentes classes d’actifs qui composent leur portefeuille. Cela touche les actifs immobiliers, que ce soit les investissements dans les titres émis par les sociétés du domaine de l’immobilier, dans les actifs réels, soit les immeubles eux-mêmes, ou dans les créances hypothécaires ou autres titres de dettes ayant des bâtiments comme actifs sous-jacents. En conclusion, les effets des tendances remarquées en 2018 ne se sont pas arrêtés avec la fin de l’année. Le fait qu’ils se manifestent de façon simultanée génère encore plus d’incertitude sur la forme et sur la vitesse de leur déploiement en 2019. Il demeure crucial d’exercer une veille continuelle. Toutefois, il devient encore plus important d’analyser les impacts de ces tendances sur son propre modèle d’affaires et d’enclencher le plus tôt possible un exercice de réflexion stratégique pour amorcer les adaptations à y effectuer.
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