COMPRENDRE L’ÉNERGIE
Du même auteur : Panorama mondial du développement durable (avec Emile H. Malet) – Passages 2004 Les Nouvelles Régulations électriques (Ouvrage collectif sous la direction de Michel Lapeyre) Éditions Hermès – EGEM Génie électrique 2012
© L’Harmattan, 2014 5-7, rue de l’École-polytechnique ; 75005 Paris http://www.harmattan.fr diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr ISBN : 978-2-343-03155-2 EAN : 9782343031552
Jean-Pierre Hauet
COMPRENDRE L’ÉNERGIE Pour une transition énergétique responsable
Préface d’Émile H. Malet
Intelligence stratégique et géostratégie Collection dirigée par Viviane du Castel La collection « Intelligence stratégique et géostratégie » vise à mieux comprendre les évolutions du monde découlant de la nouvelle donne géopolitique en construction. Le recours à l’intelligence stratégique et à la géostratégie sont des incontournables du décryptage du monde. Les éditions L’Harmattan ont souhaité éclairer les lecteurs sur les changements géostratégiques en créant cette collection « Intelligence stratégique et géostratégie ». Celle-ci se donne pour objectif de présenter des analyses et des mises en relation d’événements internationaux, ainsi que des projections de la géographie et des composantes intrinsèques des États, face à un contexte spécifique, dans une perspective stratégique. Déjà paru : Fanny E.KOWAL, Être femme : une chance ! Quelle stratégie pour une vraie égalité ? 2014. Jeanne RIVA, Europe à géométrie variable : la survie de l’UE ?, 2013. Chantal REVAULT d’ALLONES, Feu les psy, 2013. Julie ELIE, Nous ne sommes pas des quotas. Manifeste contre la discrimination positive, 2013. Jeanne RIVA, La difficile cohabitation États-nations Europe, 2013. Henri PRÉVOT, Moins de CO2 pour pas trop cher. Propositions pour une politique de l’énergie, 2012. Thierry Jacques LAURENT, Camus et de Gaulle, 2012. Jacques DA-ROCHA, Gao, je t’aime, 2012. Paul OHANA, Mon Père au cœur du Judaïsme marocain, 2012. Henri PROCHOR, Israël-Palestine : vers une paix historique. Le scénario d’une sortie de crise au ProcheOrient, 2012. Isabelle TISSERAND, La prise en charge du choc en situation de crise, 2012.
Préface Préfacer un ouvrage dont on partage l’essentiel, à la fois par les problématiques exposées qu’au niveau des scenarii envisagés sur l’avenir énergétique, l’environnement et les interférences sur la croissance, peut paraître un exercice convenu. C’est vrai au premier abord, parce qu’on s’intéresse en priorité à ce qui concourt à une réflexion partagée, quitte à en ensemencer les perspectives, mais il y a aussi l’exigence intellectuelle née d’un travail scientifique en commun avec Jean-Pierre Hauet – au sein du groupe Passages-ADAPes – depuis de nombreuses années et qui oblige à une relecture attentive et critique de cette somme de considérations savantes pour comprendre l’énergie. Jean-Pierre Hauet est à la fois un pédagogue de la transition énergétique, ce qui est précieux tant on dit tout et n’importe quoi sur ce concept économique, environnemental et stratégique, et un praticien de terrain puisqu’il exerça des fonctions de responsabilité dans l’industrie après de brillantes études d’ingénieur. Autant dire que l’auteur sait de quoi il parle en déclinant les tenants et les aboutissants du sujet énergétique et il le fait avec une démarche pluridisciplinaire. Nous sommes donc en présence d’une véritable clinique énergétique, avec un diagnostic établi à partir des symptômes industriels et environnementaux et un pronostic prenant en considération les progrès de la science et des techniques et la volonté de coopération des différents acteurs. Des principes de la thermodynamique à l’examen minutieux des applications technologiques, des répercussions économiques aux effets sociaux, de la disponibilité des ressources aux incidences écologiques et environnementales, Jean-Pierre Hauet cherche à approcher la vérité mouvante du futur de l’énergie pour conclure scrupuleusement qu’il « ne s’annonce pas facile ». On ne saurait mieux dire quand l’honnêteté prime. Dans une période où pullulent les idées fausses et les partis pris mal informés, au nom du principe sacré (et manipulateur) qu’il ne saurait y avoir de savoir acceptable au-delà de la transparence exigée par les sociétés civiles et d’un principe de précaution dilaté jusqu’à inhiber tout risque industriel, parler de la transition énergétique oblige à un effort cartésien qui peut s’avérer en décalage avec la béatitude et la bienpensance écologistes. Dans un registre responsable et modérément optimiste, on peut considérer qu’une transition énergétique raisonnée et raisonnable, où les besoins des hommes et les contraintes naturelles et technologiques seraient correctement objectivés, pourrait aider à guider une économie soucieuse de l’industrie et du
numérique, de la préservation de l’environnement et de l’accompagnement social. Ainsi charpentée, la transition énergétique peut favoriser l’amorce d’un nouveau modèle de développement économique, promouvant autant la croissance pour corriger les asymétries de développement que la solidarité en permettant l’accès à l’énergie au plus grand nombre et le respect de tous les environnements naturels, au premier chef du climat dont il devient impérieux de freiner le réchauffement. Dans son inventaire sur la géographie énergétique mondiale, Jean-Pierre Hauet a raison d’insister sur la diversité des situations observées en fonction des ressources disponibles, des mix énergétiques, des inégalités de développement, des comportements individuels et des modèles économiques et sociaux… et de préciser judicieusement que le temps de l’énergie est le temps long. On pourrait ajouter que l’énergie, par ses diverses implications, est une ressource à potentialité politique et stratégique, connectée sur la richesse des nations et les évolutions des modes de vie. Quand on songe qu’il y a un siècle et demi on lisait à la lueur de la bougie et que l’on se chauffait au charbon de bois avec une espérance de vie de moitié inférieure à celle d’aujourd’hui, on mesure tous les progrès dont nous sommes redevables à la fée électricité. Ce travail prospectif est établi à partir d’une chronologie qui va de 1973 à un présent « crispé » sur le réchauffement climatique et établit sa balise du futur de l’énergie au milieu du XXIe siècle. Ce temps long qui démarre à la fin de l’opulence économique des « trente glorieuses », remonte au premier choc pétrolier et passe en revue avec minutie un état des lieux des ressources disponibles, conventionnelles et renouvelables, mais aussi des huiles de schiste et du nucléaire et de ce qu’il faut attendre de l’efficacité énergétique et de tous les procédés technologiques de décarbonation, est un outil précieux pour les acteurs publics et privés en quête d’une information objective en vue de la prise de décision et des choix d’investissement. L’énergie mélange les temps sans ignorer les événements, c’est autant un facteur majeur économique qu’un curseur de civilisation. S’en tenant toujours à un point de vue de scrutateur responsable, JeanPierre Hauet évite toute prophétie incantatoire et reconnaît humblement que l’avenir de l’énergie est pavé d’incertitudes. A propos de la décarbonation de l’énergie, dont on peut penser raisonnablement qu’il n’y a pas d’autre choix si on veut éviter une catastrophe naturelle, l’auteur constate avec lucidité que des évolutions positives sont en cours mais que le chemin de la transition énergétique restera aléatoire tant qu’un prix du carbone « relativement homogène » n’est pas envisagé partout dans le monde. Personne ne s’offusquera de ce constat de principe et plein de bon sens, sinon pour observer que la mondialisation est autant régie par les bons sentiments que par les égoïsmes des nations, particulièrement de ces nationalismes
énergétiques en cours dans les pays émergents. Aussi, une vigilance environnementale s’impose-t-elle et la création d’une institution onusienne des énergies serait-t-elle un observatoire bienvenu pour prendre le pouls de la planète énergétique. La fin du XXe siècle et les premières décennies du XXIe siècle ont sonné le glas d’une Europe triomphante. L’unilatéralisme américain a disparu, laissant place à une mondialisation éclatée où sont apparues quelques grandes économies émergentes, des pays toujours en recherche de développement mais aussi une Europe stagnante. Ce bouleversement stratégique, qui s’accompagne d’un affaissement des idéologies et de fragmentations sociales, n’est pas sans conséquences énergétiques instructives et préoccupantes à l’échelle de la planète. Les Etats-Unis ont certes perdu leur leadership mondial, mais ils doivent à une indépendance énergétique, recouvrée miraculeusement grâce à l’exploitation des gaz de schiste, une revigoration de leur économie. La Chine et d’autres pays émergents sont devenus à la fois des producteurs et des consommateurs majeurs d’énergie, illustrant avec éloquence que l’énergie est un bien et un service économiques porteurs de croissance et de développement. Quant à l’Europe, dont la France, Jean-Pierre Hauet pointe la faille d’une frugalité énergétique assise sur une préoccupation environnementale obsessionnelle. Si personne ne saurait remettre en cause la nécessité impérieuse de lutter contre le réchauffement climatique, il faut aussi faire montre d’audace non politiquement correcte en disant qu’il n’y a pas de conquête économique durable sans recherche de souveraineté énergétique pour asseoir la sécurité des approvisionnements et ne pas s’endetter outrageusement sur les marchés extérieurs des hydrocarbures. En somme, ce livre vient à point nommé pour mieux comprendre l’énergie et préparer quelques transitions économiques au service des nouvelles générations. Emile H. Malet
Introduction Depuis le premier choc pétrolier de 1973-74, les questions énergétiques occupent une place de premier rang sur le devant de la scène des débats politiques, économiques et sociaux. L’énergie est consubstantielle au développement économique et humain. Chacun sait que c’est grâce à l’énergie que des progrès immenses ont été réalisés au cours des siècles et ont permis à l’humanité de mieux vivre. Aujourd’hui encore de nouveaux pays abordent la modernité grâce aux énergies auxquelles ils ont accès. Pendant de longues années, l’accès à l’énergie fut si simple et si évident qu’il ne venait pas à l’esprit de beaucoup qu’un jour elle pût manquer. La première crise pétrolière de 1973-74 constitua un choc majeur qui marqua la fin des périodes de développement facile qu’on appellera plus tard les Trente glorieuses. A l’époque le monde industrialisé prit peur : peur de l’épuisement des ressources, peur d’être assujetti à passer sous les fourches caudines des producteurs pour y avoir accès, peur des conflits qui pourraient en résulter, peur de manquer… Les gouvernements occidentaux réagirent avec vigueur. Les pays consommateurs inscrivaient alors leur action dans une logique de rapport de force avec l’OPEP. Dès 1974 était créée l’Agence Internationale de l’Energie dont la mission initiale était de coordonner les politiques énergétiques des pays membres afin d'assurer la sécurité des approvisionnements. Cependant les réponses furent essentiellement nationales. En France, un vaste programme nucléaire fut engagé, l’Agence pour les économies d’énergie (AEE) créée, la production charbonnière quelque peu relancée et tout un ensemble de mesures visant à limiter les consommations et à diversifier les approvisionnements mis en place. A l’époque, les préoccupations étaient axées sur les problèmes d’accès aux ressources en hydrocarbures et sur la dérive des prix du pétrole qui était résultée de l’embargo décidé par les pays producteurs. On prévoyait un épuisement des ressources en pétrole à l’horizon de 30 ou 40 ans et le monde découvrait qu’il y avait urgence à s’y préparer. Assurer la sécurité et contenir les coûts des approvisionnements étaient ainsi les deux impératifs majeurs qui sous-tendaient la politique de la plupart des pays et de la France en particulier. Une réplique du séisme de 1973-74 intervint en 1979 qui entraîna le prix du pétrole vers des niveaux inconnus jusqu’alors. La hausse des coûts d’approvisionnement porta une nouvelle estocade à l’économie française déjà 9
INTRODUCTION
fragilisée par le premier choc pétrolier. La balance du commerce extérieur se trouva à nouveau profondément déséquilibrée mais l’alerte fut relativement passagère car dès 1986 le contexte géopolitique et économique conduisit à un contre-choc pétrolier ramenant le prix du baril aux environs de 10 USD. Pendant ce temps, un phénomène qui allait se révéler majeur intervint : la prise de conscience que l’homme pouvait avoir un impact sur l’atmosphère plus important qu’il ne l’imaginait. Après le trou dans la couche d’ozone, l’effet de serre commence à occuper la une des médias. Les rapports et les déclarations alarmistes s’enchaînent et les Nations Unies se saisissent du problème. Si le climat a toujours constitué une préoccupation essentielle dans l’histoire de l’homme, pour la première fois se trouve posée la question de la survie de l’humanité. A la fin des années 1990, on croit avoir trouvé une voie de salut : les Nations Unies rangent les pays en deux colonnes, les pays développés d’une part, les pays moins avancés d’autre part1. Elles demandent aux premiers de modérer leurs émissions de gaz à effet de serre et à tous de développer de nouvelles formes d’énergie dans le cadre notamment d’un mécanisme de développement propre. Mais à partir des années 2000, la mécanique s’enraye. Les Etats-Unis refusent de ratifier le protocole de Kyoto2, réalisant notamment que la dichotomie qu’il institue entre les pays est dépassée et que la Chine en particulier ne peut plus être exonérée d’engagements. Les conférences internationales sur le climat se succèdent mais sans succès tangible. Le doute s’installe et le mouvement des climato-sceptiques gagne du terrain malgré l’évidence quasi-quotidienne du réchauffement des températures et malgré la survenance de plus en plus fréquente d’événements climatiques majeurs. Pourtant l’Union européenne continue à y croire et poursuit la course en tête dans la relève du défi climatique. La politique climat tient lieu de politique de l’énergie, des mesures volontaristes mais coûteuses sont prises pour réduire les émissions de CO2, promouvoir les énergies renouvelables et accroître l’efficacité énergétique. Mais la crise économique et financière de 2008 survient alors que les prix du pétrole sont à nouveau au plus haut. On croit la crise passagère mais elle 1
La Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC), adoptée au siège des Nations Unies, à New York le 9 mai 1992, comprend dans son annexe 2 une liste de 40 pays dit « développés » (plus la Communauté économique européenne) soumis à des obligations particulières au titre de cette convention. Celle liste a été reprise, à l’exception de la Biélorussie et de la Turquie, dans l’annexe B au protocole de Kyoto adopté le 11 décembre 1997. 2 Le protocole de Kyoto adopté le 11 décembre 1997 fixait pour les pays de son annexe B des obligations de réductions de leurs émissions de gaz à effet de serre sur la période 2008-2012. Il est entré en vigueur le 16 février 2005. Cependant les Etats-Unis qui figuraient parmi les pays initialement signataires n’ont jamais déposé leurs instruments de ratification.
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INTRODUCTION
perdure et devient multiforme, financière, économique, sociale… Le chômage s’aggrave et les déficits publics s’empilent. On réalise que c’est vraiment la fin d’une époque ; l’Europe et la France passent sur la défensive. Pendant ce temps les pays émergents poursuivent leur croissance à un rythme plus rapide qu’aucun ne l’avait imaginé. La Chine devient le plus grand émetteur de gaz à effet de serre de la planète et s’inquiète moins que l’Europe des retombées de l’accident nucléaire de Fukushima tant l’approvisionnement en énergie est pour elle un impératif vital. En France, certains voudraient faire croire que l’énergie n’est plus un levier indispensable au progrès économique et social. On berce l’illusion d’un bonheur collectif fondé exclusivement sur la sobriété, l’efficacité et les énergies vertes. Les slogans font florès : la croissance sobre3, le facteur 44 et plus récemment la transition énergétique5… Mais la thermodynamique6 est têtue. L’énergie demeure nécessaire aux activités humaines même si le ralentissement économique et la délocalisation de beaucoup activités industrielles laissent penser que l’on a trouvé la pierre philosophale permettant de découpler durablement la croissance économique de la consommation d’énergie. La situation est devenue très complexe. En 1974, les pays industrialisés, dont la France était plus clairement qu’aujourd’hui l’un des leaders, dominaient le monde. Il n’y avait pas de clivage entre la crise que traversait le monde et celle à laquelle notre pays avait à faire face. Les pays émergents étaient encore peu présents et la préoccupation climatique restait balbutiante. Aujourd’hui, la France est un acteur parmi d’autres, confronté au problème général de l’énergie mais avec ses propres problèmes et il n’y a plus coïncidence entre les deux. La toile de fond planétaire est avant tout le problème du climat et celui des risques de conflits liés à l’accès à des ressources très inégalement réparties même si leur épuisement reste lointain. Les problèmes de la France, ce sont la sécurité d’approvisionnement et l’efficacité économique : emploi, compétitivité de nos entreprises et maintien du pouvoir d’achat des ménages. C’est entre les trois piliers du trilemme, climat, sécurité et efficacité économique, que la France doit 3
La notion de croissance sobre a été précisée par Hughes de Jouvenel dans un éditorial de la revue Futuribles daté d’avril 2011. Une telle forme de croissance vise à éviter des tensions croissantes sur les ressources naturelles et une dégradation accélérée de l’écosystème. 4 L'expression Facteur 4 désigne un objectif ou un engagement écologique qui consiste à diviser par 4 les émissions de gaz à effet de serre d'un pays ou d'un continent donné. En France, cet objectif formulé dès 2003 a été acté par le « Grenelle de l’environnement de 2007 » et confirmé par la loi Grenelle I ou loi n° 2009-967 du 3 août 2009. 5 La transition énergétique (Energiewende en allemand) désigne le passage du système énergétique actuel utilisant des ressources non renouvelables vers un mix énergétique basé principalement sur des ressources renouvelables. La question du positionnement de l’énergie nucléaire au regard de ce concept fait débat. 6 La thermodynamique est la science de la transformation de systèmes, ouverts ou fermés, isolés ou non. Dans son acception classique, elle s’intéresse aux notions d’énergie, de température, d’enthalpie, d’entropie et d’efficacité énergétique.
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INTRODUCTION
définir une trajectoire répondant à ses préoccupations propres tout en prenant en compte l’intérêt général. On ne peut pas se contenter de transcrire au niveau national des lignes d’action qui font sens au niveau international mais qui n’intègrent pas les préoccupations propres à nos concitoyens. Il ne s’agit pas pour autant de piloter à vue ; il faut voir loin car le temps de l’énergie est le temps long. 2050 est le bon horizon auquel il faut à présent se projeter. Nous avons à présent dépassé la mi-chemin entre 1974 et le milieu du siècle et des problèmes considérables restent devant nous. La question de la rénovation du parc des logements existants est identifiée en France depuis des décennies. Au rythme actuel, il s’amplifie plus qu’il ne se résorbe. Le programme des transports et de leur dépendance vis-à-vis des hydrocarbures est un problème prégnant. Il explique à lui seul la moitié de notre déficit commercial. Il faudra des décennies pour lui apporter une solution technique et économique. Nos centrales nucléaires ont à présent 29 ans de moyenne d’âge. La plupart n’atteindront pas l’horizon 2050 et nous risquons d’avoir à faire face à un effet « falaise » impressionnant lors de leur retraite. Il faut s’y préparer. Dans quelle mesure peut-on faire confiance aux énergies renouvelables pour les remplacer ? Mais nous n’avons plus les leviers pour mener une politique énergétique dirigiste comme celle de années 1970-80. La concurrence et la dérégulation se sont imposées et un retour en arrière n’est plus possible en admettant qu’il fût souhaitable Nous n’en avons plus au demeurant les ressources : la dette publique est passée en 35 ans de 21 % à 90 % du PIB. Les problèmes sont cependant devant nous et il faut les traiter. L’énergie ne se contente pas de mots, de formules, d’incantations. Elle nécessite des choix et des investissements pour les mettre en œuvre. Ces choix sont politiques mais ils ne sont pas que politiques. Ou plutôt, la politique doit accepter de prendre en compte les données physiques, techniques et économiques auxquelles elle viendra tôt ou tard se heurter si elle voulait les ignorer. Le présent voyage au centre de l’énergie n’apporte pas de solutions miracles. Il vise simplement à mieux faire comprendre la problématique de l’énergie pour essayer de lui apporter une réponse aussi rationnelle que possible dans une optique d’espoir de retour vers une croissance raisonnable. Faire comprendre les problèmes, c’est déjà pour partie en faire accepter les solutions. Vis-à-vis des questions énergétiques, l’opinion reste très divisée. Elle reçoit des messages contradictoires et est prête à s’enflammer pour des solutions intellectuellement et humainement séduisantes. Mais la réalité est plus difficile et le compromis est souvent nécessaire. L’acceptabilité des solutions, indispensable à toute politique énergétique, se trouvera simplifiée si les problèmes sont posés dans un cadre rationnel et apaisé. 12
Chapitre 1
Qu’est-ce que l’énergie ?
L’énergie est le principal trait d’union entre l’économie et l’écologie. Pour l’économiste, c’est le moteur de l’activité et donc de la croissance. C’est l’énergie qui permet à l’homme de se déplacer, de se chauffer, de transformer la matière, d’usiner le produit… bref, de mettre en œuvre tous les processus qu’il a au fil des siècles imaginés et développés pour améliorer son confort et répondre à ses aspirations. L’énergie a ses filières avec, pour chacune, des sources fossiles ou renouvelables, des caractéristiques propres, des avantages et des inconvénients, notamment en termes de coût pour les individus et pour la collectivité. L’écologiste s’intéresse moins aux vertus intrinsèques de l’énergie qu’à ses externalités. Côté sources, l’épuisement des ressources naturelles et les nuisances de tous ordres que peut engendrer leur exploitation sont regardés avec attention. Mais le transport, la transformation, la distribution, l’utilisation de l’énergie rentrent également dans la problématique complexe des débats sur son empreinte écologique7. Plus que toute autre activité humaine, l’exploitation et l’utilisation des ressources énergétiques appellent une évaluation environnementale, comptabilisant, afin de la minimiser, la pression exercée par les hommes sur les biens naturels. Pour l’économiste comme pour l’écologiste, l’énergie est une matière première que l’on peut exploiter, transformer, façonner, transporter, distribuer, utiliser et si possible recycler. Elle est encore abondante mais elle est de plus en plus chère. Il faut donc l’utiliser de façon ménagère et s’efforcer de substituer aux énergies rares et chères des énergies renouvelables, à l’empreinte écologique moins forte.
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L'empreinte écologique est un indicateur et un mode d'évaluation environnementale qui comptabilise la pression exercée par les hommes envers les ressources naturelles et les « services écologiques » fournis par la nature (source : Wikipédia).
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QU’EST-CE QUE L’ENERGIE ?
On sait que, par ses guerres successives, Louis XIV, vida les caisses du royaume et demanda à tous ses sujets de faire fondre leur vaisselle d’argent. C’est ainsi que l’orfèvrerie d’étain acquit ses titres de noblesse et vint orner les vaisseliers et les tables de l’aristocratie et de la grande bourgeoisie françaises. Mais au XIXe siècle l’étain fut délaissé en faveur de la faïence et de la porcelaine, moins chères et plus faciles à produire. Aujourd’hui, c’est la mélamine qui vient renouveler les arts de la table. Alors ce qui est valable pour la plupart des matières premières, ne l’est-il pas également pour l’énergie ? Pourquoi attendre autant avant de migrer vers des formes d’énergies « douces » et, au fond, pourquoi ne pourrait-on pas se passer complètement d’énergie ? Mais la collusion entre l’économiste et l’écologiste s’arrête là et la comparaison entre énergie et matières premières a ses limites. L’économiste est davantage un homme de chiffres et pour le physicien qui sommeille quelque part en lui, l’énergie est un curieux produit : l’énergie se conserve et ne disparaît jamais, dans un système isolé du moins, selon le premier principe de la thermodynamique. Il n’y a pas à proprement parler de consommation d’énergie et il n’est pas possible de la comptabiliser. Il n’y a pas en conséquence de pertes d'énergie, ni d'énergies renouvelables car l'énergie ne peut ni se créer ni disparaître. S’il n’y a pas de consommation d’énergie, il ne peut pas y avoir non plus d’économies d’énergie, notion pourtant fortement médiatisée depuis la création en 1974 aux lendemains de la première crise pétrolière de l’Agence pour les économies d’énergie (AEE). Un exemple simple aide à comprendre l’ambiguïté de la notion : un individu qui installe une pompe à chaleur fait-il des économies d’énergie ? Oui, si l’on considère qu’il est vertueux d’affecter une partie de son épargne à l’acquisition d’une telle pompe et qu’ainsi on économisera de l’électricité ou toute autre forme d’énergie chère. Non, si l’on considère que nonobstant l’installation d’une telle pompe, il continuera, peut-être, à ouvrir les fenêtres à contretemps ou à se chauffer à l’excès. Il utilisera toujours la même quantité d’énergie pour se chauffer mais l’électricité, fluide à haute valeur énergétique, lui aura permis de transférer grâce à la pompe à chaleur, une partie de cette énergie depuis l’environnement extérieur vers sa maison, que cet apport réputé gratuit provienne de l’eau, de l’air ou de la terre. L’énergie existe en effet sous différentes formes et toutes les formes d’énergie ne sont pas équivalentes. Dans certains cas l’énergie est un travail ou est aisément transformable en travail : c’est typiquement le cas de l’électricité. Mais dans d’autres cas, l’énergie n’est qu’énergie calorifique ou chaleur et cette chaleur n’a pas la même valeur selon qu’elle est à haute ou à basse température. Mais il faut aussi tenir compte de l’énergie radiative
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QU’EST-CE QUE L’ENERGIE ?
transmise notamment sous forme de rayonnement électromagnétique ou lumineux. L’énergie peut provenir d’origines très diverses que l’on appelle communément des sources d’énergie : énergies fossiles (charbon, gaz, pétrole), énergie nucléaire, énergie solaire, énergie électrique, énergie chimique, énergie thermique, énergie de la biomasse (biomasse sèche, biomasse humide, biocarburants…). Certaines sont intermittentes, d’autres ne le sont pas. Certaines sont qualifiées de « renouvelables » mais elles ne le sont que par rapport à un référentiel propre à l’homme ; par rapport à un référentiel plus vaste ou plus permanent, elles ne le sont ni plus ni moins que les autres formes d’énergie. En outre la distinction entre ces différentes formes d’énergie prête à débat et n’a valeur que de référence usuelle : l’énergie solaire sous toutes ses formes (photovoltaïque, thermique, éolienne, biomasse, hydraulique, géothermique de surface) n’est qu’une manifestation de l’énergie nucléaire de fusion développée au centre du soleil ; l’énergie géothermique profonde est une manifestation de l’énergie nucléaire de fission développée au sein des profondeurs de la terre. En toute rigueur, il ne faudrait considérer comme énergies premières que l’énergie nucléaire, l’énergie gravitationnelle et l’énergie de rotation de la terre. L’énergie marémotrice est ainsi très majoritairement d’origine gravitationnelle (lune et soleil) mais ces formes d’énergies premières peuvent se combiner entre elles et donner par exemple naissance à l’énergie hydraulique (solaire donc nucléaire + gravitation de la terre) ou à l’énergie des vents (solaire + rotation de la terre). Dans certains cas, il est possible de définir une fonction d’état que l’on appelle « énergie potentielle » qui caractérise l’état d’un système plongé dans un champ de force donné. Mais un tel potentiel ne peut être défini que lorsque ce champ est conservatif, c'est-à-dire que le travail développé par la force ne dépend que de l’état initial et de l’état final. La force électrique et la force gravitationnelle sont conservatives. Les forces de frottement et de pression ne le sont pas. En outre, tout potentiel n’est défini qu’à une constante additive près.
L’ambiguïté des statistiques Tout ceci concourt à rendre la notion d’énergie difficile à caractériser, à quantifier et à comptabiliser. Pour contourner ces difficultés, les économistes et les statisticiens ont inventé les concepts d’énergie primaire et d’énergie finale. Ces concepts sont sources de confusion et n’ont d’ailleurs pas partout la même définition.
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QU’EST-CE QUE L’ENERGIE ?
La notion d’énergie primaire laisse par exemple à penser qu’il s’agit d’une forme d’énergie première dont tout serait issu. La notion d’énergie finale serait quant à elle destinée à rendre compte de l’énergie livrée au consommateur et utilisée par lui pour la satisfaction de ses besoins, déduction faite des pertes intervenant aux différents stades de la production, de la transformation et du transport de l’énergie. Mais il ne s’agit là en fait que d’indicateurs statistiques, très utiles mais contestables s’ils sont utilisés à mauvais escient. La question posée est en effet celle des coefficients d’équivalence entre les différentes formes d’énergie, électriques et thermiques notamment, afin de parvenir à un agrégat unique exprimé dans la même unité. Mais vouloir agréger entre elles des formes d’énergie différentes est mission impossible, sauf s’il s’agit de formes d’énergies comparables, c’est-à-dire aux caractéristiques voisines et relativement interchangeables entre elles. C’est ainsi qu’historiquement on a trouvé commode de concaténer le pétrole, le charbon et le gaz en tonnes d’équivalent-charbon ou « tec » puis de façon plus moderne en tonnes d’équivalent-pétrole ou « tep ». Ainsi est née une comptabilité en « énergie primaire », concept initialement assimilable à celui d’énergie disponible dans la nature et transformable à différentes fins. Curieusement, on notera que l’acronyme « tep » peut également se lire « tonne d’énergie primaire » et la confusion entre les deux lectures est souvent faite. L’électricité pose un problème compte tenu de ses spécificités. C’est une forme d’énergie transformable en énergie thermique (effet Joule), mécanique (moteurs), chimique (électrolyse, accumulateurs), lumineuse (éclairage)… toutes formes d’énergie qui constituent autant de formes d’énergies finales telles qu’elles sont utilisées par les consommateurs. Mais l’électricité ne se rencontre pas à l’état natif dans la nature. Elle a résulté historiquement de la transformation de l’énergie hydraulique puis des énergies fossiles dans des centrales électriques. Plus récemment sont apparues l’énergie nucléaire puis les énergies renouvelables. L’électricité est ainsi une forme d’énergie secondaire, un vecteur intermédiaire, entre les énergies primaires et les énergies finales. Lorsque l’électricité d’origine nucléaire a commencé à se développer, il est apparu acceptable de l’intégrer dans les bilans en énergie primaire avec un coefficient d’équivalence entre MWh et tep égal au rendement moyen des centrales thermiques. Ainsi est né en 1972, le coefficient d’équivalence unique de 1 MWh = 0,222 tep correspondant à un rendement moyen des centrales de 38,7 %, coefficient qui succédait au coefficient de 0,4 tec/MWh soit 0,27 tep/MWh utilisé antérieurement. Mais avec le développement des énergies renouvelables, il est apparu qu’il n’était plus convenable de faire supporter par ces énergies dans les 16
QU’EST-CE QUE L’ENERGIE ?
statistiques en énergie primaire des pertes correspondant à un rendement de 38,7 %. En 2002, la France a décidé de s’aligner sur les conventions préconisées par l’Agence Internationale de l’Energie (AIE) et adoptées par d’autres organisations internationales dont Eurostat, selon lesquelles : -
dans les statistiques en énergie finale, le MWh électrique est comptabilisé selon son équivalent physique : 1 MWh=0,086 tep ; dans les statistiques en énergie primaire, l’électricité d’origine nucléaire est comptabilisée selon l’équivalence : 1 MWh=0,260606 tep (rendement supposé de 33,0 %) cependant que toutes les productions d’origine renouvelable sont comptabilisées selon leur équivalent physique de 1 MWh=0,086 tep, à l’exception de la géothermie prise pour 1 MWh=0,86 tep (rendement supposé de 10 %). Energie finale
1 MWh 1 TWh (106 MWh)
Energie primaire
Tonnes d'équivalent pétrole (tep)
Joules
0,086 tep
3 600 mégajoules (MJ)
0,086 Mtep
3 600 térajoules (TJ)
Tonnes d'équivalent pétrole (tep)
Joules
Production d’électricité d’origine nucléaire (rendement de 0,33) 1 MWh 1 TWh (106 MWh)
0,260606 tep
10 909 mégajoules (MJ)
0,260606 Mtep
10 909 térajoules (TJ)
Production d’électricité d’origine géothermique (rendement de 0,1) 1 MWh 1 TWh (106 MWh)
0,86 tep
3 600 mégajoules (MJ)
0,86 Mtep
3 600 térajoules (MJ)
Autres types de production (hydraulique, éolienne, marémotrice, photovoltaïque, etc.) 1 MWh 1 TWh (106 MWh)
0,086 tep
3 600 mégajoules (MJ)
0,086 Mtep
3 600 térajoules (TJ)
Tableau 1 : Tableau de correspondance entre énergie électrique (exprimée en MWh ou TWh) et énergie primaire. Ce tableau est établi conformément aux règles de l’Agence internationale de l’énergie qui sont censées prendre en compte les rendements respectifs des différentes filières de production de l’électricité – Source : Auteur.
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QU’EST-CE QUE L’ENERGIE ?
Le tableau 1 récapitule ces conventions8. Cette façon de procéder ne saurait être parfaite puisque la sommation de formes différentes d’énergie est impossible. Ces imperfections vont en s’accentuant au fur et à mesure que se développent de nouvelles formes d’énergie (à terme, les performances des réacteurs de 4e génération rendront par exemple complètement inadaptée la règle relative au nucléaire) et que se renforcent de nouvelles préoccupations et en particulier la limitation des émissions de CO2. L’encadré 1 (Les paradoxes de la comptabilité de l’énergie) en fin de chapitre explicite les résultats déroutants auxquelles conduisent les règles statistiques actuelles quand on les applique, sans discernement, à quelques grandes questions du moment, telles que la pénétration des énergies renouvelables, le développement du véhicule électrique et celui de la pompe à chaleur… On pourrait trouver bien d’autres exemples de paradoxes statistiques. On constate par exemple qu’en France, certaines années, la consommation d’énergie primaire augmente alors que la consommation d’énergie finale diminue, ou inversement. Quand faut-il se réjouir de l’évolution ? Il faut donc considérer avec beaucoup de prudence les statistiques et les comparaisons. Nous y reviendrons au chapitre 9 « Des énergies renouvelables, jusqu’où ? ». Les supporters des énergies renouvelables raisonnent également souvent en puissance installée et font valoir, par exemple, qu’un parc de production d’électricité d’origine éolienne de 7 500 MW est installé en France à la fin 2012 et que ceci « équivaut » à cinq tranches nucléaires ou permet de couvrir les besoins de x millions d’habitants. Ceci a un sens à un moment donné si toutes les éoliennes sont en activité à cet instant précis. Mais ceci est biaisé si la comparaison porte sur la production annuelle ou sur la puissance garantie.
Les transferts d’énergie : un peu de thermodynamique Ces remarques mettent en évidence la difficulté qu’il y a à saisir correctement la notion d’énergie et le risque de tirer des conclusions erronées à partir d’indicateurs trop synthétiques. La notion d’énergie est plus facile à décrire lorsqu’on renonce à l’appréhender de façon absolue et quand on la considère comme une grandeur représentative des interactions entre deux sous-systèmes. Le développement de toute interaction nécessite, quel que soit le phénomène, un transfert ou une transformation d’énergie. C’est 8
Il est à noter cependant que beaucoup d’organismes internationaux, y compris la Banque mondiale et les statistiques BP utilisées dans cet ouvrage continuent à utiliser une équivalence moyenne de 1 Mtep = 4,418 TWh pour l’énergie primaire (soit 1 TWh = 0,226 Mtep), en considérant un rendement moyen d’une centrale thermique équivalente de 38 %. Ces conventions sont souvent sources d’incompréhension, d’interprétations erronées des bilans, de raisonnements incorrects, voire de manipulations.
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cette universalité de l’énergie, jointe au premier principe de la thermodynamique, qui en assure la transversalité. Elle fait la force du concept et assure la cohérence de toutes les branches de la physique et explique l’importance de l’énergie en économie. Du transfert d’énergie dépend l’intensité de l’interaction, quelle qu’en soit la nature. Un cycliste va plus ou moins vite selon qu’il appuie plus ou moins sur les pédales. Une automobile va plus vite si son moteur passe à un régime supérieur et absorbe davantage de carburant. L’éclairage sera plus fort si la puissance lumineuse d’une lampe augmente. Un individu aura une impression de chaleur d’autant plus forte qu’il recevra une plus grande quantité de chaleur d’une source chaude, etc. Aucun phénomène ne peut donc se développer sans transfert d’énergie. Au niveau le plus élémentaire et le plus conceptuel, manipuler des bits d’informations met en jeu de l’énergie. Rolf Landauer a montré en 1961 que le minimum d’énergie nécessaire pour effacer un bit était égal à kT x ln2 (k étant la constante de Boltzmann et T la température du système) soit 0,0178 électronvolt ou 2,85 10-21 J à 25 °C. La justesse de cette théorie9 a été validée expérimentalement en 2012 par une équipe du laboratoire de physique de l'Ecole normale supérieure de Lyon. L’énergie se transmet et ce faisant permet à une action de s’exercer. Ce principe très général va à l’encontre de l’idée promue par certains selon laquelle une vie serait possible qui soit faite d’un ensemble d’activités exemptes de toute dépense d’énergie. Mais si le concept d’énergie zéro est un non sens, combien faut-il transférer d’énergie pour qu’une action soit possible ? Le premier principe de la thermodynamique apporte une première réponse. On comprend par exemple que pour élever une cage d’ascenseur, il faut lui apporter a minima une quantité d’énergie proportionnelle au nombre d’étages. On comprend que pour porter de l’eau de la température ambiante à une température donnée, il faut lui apporter une quantité minimale de chaleur fonction linéaire de cette température. Il est généralement possible dans une interaction d’analyser les flux d’énergie et d’isoler ceux qui concourent réellement à l’objectif recherché. Prenons le cas du chauffage des locaux. Les êtres humains, dont la température du corps est de 37 °C ont besoin de compenser les pertes de chaleur de leur corps avec l’environnement extérieur qui leur donnent une impression de froid. Ils le font en revêtant des vêtements qui les isolent du froid ou en absorbant des nourritures ou des boissons énergisantes. Mais il faut souvent en venir à se chauffer et le chauffage des locaux est, comme chacun sait, un poste de dépenses important. Il faut en effet compenser les pertes qui interviennent par conduction, convection et radiation. Mieux isoler 9
The unavoidable cost of computation revealed – Rolf Landauer – Nature (mars 2012).
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QU’EST-CE QUE L’ENERGIE ?
les logements et les bureaux, lutter contre les courants d’air, installer des doubles vitrages pour éviter le phénomène de parois froides sont autant de remèdes, relevant du premier principe de la thermodynamique, qui évitent de chauffer inutilement l’espace externe au local considéré. Mais on peut aller plus loin et « chauffer le pèlerin et pas l’église » grâce à des systèmes de chauffage infrarouge dont le rayonnement, si la longueur d’onde est bien choisie (typiquement entre 2 et 10 μm) viendra réchauffer le corps humain sans réchauffer l’air ambiant. Ces chauffages radiants, que l’on trouve non seulement dans les églises mais aussi à la terrasse des cafés, ont l’inconvénient de ne réchauffer que la partie du corps qui est en exposition directe. On a donc trop chaud devant et trop froid derrière. Un meilleur confort est apporté par un chauffage approprié de l’environnement de vie. Mais comment faire alors pour réduire au minimum l’apport d’énergie nécessaire ou du moins l’apport d’énergie donnant lieu à facturation ? C’est ici qu’intervient le concept de pompe à chaleur qui nous conduit au second principe de la thermodynamique. Le second principe de la thermodynamique constitue l’une des lois fondamentales de la physique dont la compréhension, au moins dans ses généralités, est indispensable à l’appréhension de la problématique de l’énergie. Usuellement, l’introduction du second principe se fait au travers du théorème de Carnot (ou égalité de Clausius-Carnot) qui, en thermodynamique, régit l’obtention de travail à partir de deux sources de chaleur de températures constantes. Mais cette approche scolaire classique ne fait pas toujours suffisamment comprendre la très grande généralité du second principe axé sur les irréversibilités et l’évolution spontanée des systèmes vers un état stationnaire caractérisé par l’uniformité. La vie courante est truffée d’irréversibilités : un verre se casse et il n’est pas possible de le reconstituer10, un explosif se brise et il serait bien difficile d’en rassembler les ingrédients, le morceau de sucre se dissout dans le café et il devient rapidement impossible de le reconstituer, les frottements ralentissent un pendule et celui-ci ne redémarrera pas spontanément, etc. Les phénomènes réels sont dissipatifs et les systèmes ne peuvent pas revenir en arrière de façon spontanée. L’évolution se fait dans un sens : c’est la flèche du temps que l’on observe à tous les niveaux, aussi bien au niveau microscopique qu’au niveau de l’univers tout entier. Cette évolution se fait toujours vers davantage de désordre, jusqu’à ce que le stade de l’uniformité soit atteint, où tout caractère distinctif a été ôté et où le système n’a plus de raison d’évoluer. C’est le stade du désordre voire du chaos total où tout est 10 Ou du moins, la probabilité de le voir se reconstituer est extraordinairement faible à défaut d’être complètement nulle, de façon à satisfaire le théorème de Poincaré selon lequel « Tout système macroscopique repasse une infinité de fois aussi près que l'on veut de son état initial ».
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mélangé. Il est rapidement atteint lorsqu’on mélange l’eau au vin, il le sera un jour lorsque l’expansion de l’univers sera achevée sans que l’on sache dire si malgré ses 14 milliards d’années, il en est encore aux débuts ou déjà vers la fin de sa course vers l’infini. Peu de lois physiques prennent en compte cette irréversibilité et c’est là l’apport fondamental du second principe de la thermodynamique. Ce principe pose qu’un système, en l’absence d’interaction avec l’extérieur, évolue spontanément vers un désordre croissant qu’il est de plus en plus difficile à décrire, faute d’information. Prenons l’exemple d’une salle de réunion réservée la veille pour un ensemble de participants. Quand ceux-ci prennent possession de la salle, on sait parfaitement combien de sièges ont été installés et à quels emplacements. A la fin de la journée, après plusieurs heures de discussions, le désordre s’est installé. La salle est « sens dessus dessous » mais personne dans le couloir ne peut savoir dans quel état exact elle se trouve. Mais on sait que l’intervention de personnel de service extérieur à la salle permettra de remettre en ordre celle-ci pour le lendemain. Pour décrire cette évolution spontanée vers toujours plus désordre, le second principe introduit la notion d’entropie qui est une fonction d’état caractérisant le manque d’information sur le système. Dans un système isolé, l’entropie ne peut qu’augmenter et le désordre s’installer. Ceci ne veut pas dire qu’il ne soit pas possible de revenir en arrière ; mais il faut alors transférer l’entropie vers le système extérieur grâce à l’injection de travail. La notion d’entropie est d’une généralité absolue. L’analyse statistique des phénomènes a permis à Claude Shannon (1916) d’établir un parallèle fondamental entre les systèmes thermodynamiques et les systèmes d’information en considérant les probabilités d’occurrence des différents messages émis par une source11. L’entropie de Shannon est une mesure du degré d’incertitude régnant sur les informations produites par cette source. Elle se formalise de façon similaire à l’entropie de Boltzmann utilisée en thermodynamique et les travaux de Léon Brillouin (1969) ont permis de faire le lien entre les deux12. On peut penser également que la propension au désordre que nous avons souligné dans notre exemple de la salle de réunion, se retrouve également au niveau des sociétés et que les démocraties tombent progressivement dans le chaos jusqu’à ce qu’un gouvernement extérieur au système vienne y remettre de l’ordre, parfois manu militari. Plusieurs auteurs ont dans le même ordre d’idée décrit la dégradation progressive des sociétés vers ce qu’Emile Durckheim (1914) a appelé l’anomie13, c'est-à-dire une 11
A mathematical theory of communication – Claude E. Shannon – Bell System Technical Journal, vol. 27, p. – (juillet et octobre 1948) 12 Science and Information Theory – Léon Brillouin – New York, Academic Press (1956) – Traduction française : La science et la théorie de l'information – Masson (1959). 13 De la division du travail social – Emile Durkheim – (1893 et Paris PUF Quadrige 2013).
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situation caractérisée par une désintégration des normes qui règlent la conduite des hommes et assurent l'ordre social. L’encadré 2 (Rappels de thermodynamique élémentaire) en fin de chapitre permet de comprendre comment les calculs d’entropie peuvent être conduits dans le cas particulier des systèmes thermodynamiques caractérisés par les notions macroscopiques de température et de pression. L’énergie n’existe qu’au travers des phénomènes qu’elle rend possibles par ses échanges et par ses transformations. Sans énergie, aucune activité n’est possible. Mais dans ces échanges ou ces transformations, l’énergie se dégrade et l’entropie croît, sauf si un apport d’énergie, venant d’une source extérieure, permet de diminuer le niveau entropique, c'est-à-dire de remettre de l’ordre dans le système. Prenons le cas du charbon et du pétrole. Il a fallu des centaines de millions d’années et l’apport de l’énergie solaire pour que la biomasse luxuriante qui se développait à la surface de la terre aux temps géologiques débarrasse l’atmosphère terrestre de son excès de CO2 et, avec le renfort des algues, vienne constituer, en combinaison avec les sédiments, de gigantesques accumulations de « kérogène », substance intermédiaire entre la matière organique et les combustibles fossiles14. Puis en quelque cent millions d’années, sous l’influence de deux autres formes d’énergies premières : la chaleur de la terre et la pression des sédiments, ce kérogène s’est transformé, selon les circonstances, en charbon, en gaz ou en pétrole, toutes formes d’énergies dites fossiles que nous exploitons aujourd’hui. Cette exploitation nous permet de développer nos activités humaines mais elle engendre des rejets de CO2 qui constituent une préoccupation majeure de nos civilisations, puisque ce sont 50 Gt (1 Gt = 1 milliard de tonnes) de CO2 qui sont renvoyées chaque année dans l’atmosphère. L’homme a recréé le désordre en quelque décennies là où les apports d’énergie du soleil et de la terre étaient parvenus en quelque centaines de millions d’années à créer l’ordre et à empiler sagement les couches d’énergies fossiles. Pour lutter contre cette montée inquiétante de l’entropie, on a imaginé de capter le CO2 émis par les installations thermiques et de le réinjecter dans le sous-sol. Plusieurs filières de capture du CO2 sont en développement depuis des décennies avec des résultats mitigés. Nous en parlerons au chapitre 10 « Energies conventionnelles sans carbone ». Certains s’étonnent que ces procédés, en admettant qu’ils puissent être un jour mis au moins industriellement, conduisent à une dégradation sensible du rendement des 14
Aujourd’hui, le kérogène est une matière organique complexe contenue dans les schistes bitumineux et susceptible d’être transformée en hydrocarbures par pyrogénation.
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Table des encadrés Encadré 1 : Quelques paradoxes auxquels conduit la comptabilisation des énergies en « énergie primaire ». ............................................................................................ 30 Encadré 2 : Rappels de thermodynamique élémentaire. ........................................... 31 Encadré 3 : Lien entre consommation énergie et produit intérieur brut. .................. 47 Encadré 4 : La hausse du prix des tortillas au Mexique en mars 2007. Source : informations presse. .................................................................................................. 68 Encadré 5 : Les révolutions de l’éclairage. ............................................................... 96 Encadré 6 : Le coût moyen actualisé – Incidence de la prise en compte de l’intermittence......................................................................................................... 184 Encadré 7 : Le stockage de l’électricité : services rendus et techniques disponibles. ................................................................................................................................ 187 Encadré 8 : Centrales à charbon en Allemagne. Source : Documents RWE, ALSTOM et coupures de presse (2012). ................................................................ 192 Encadré 9 : Aperçu sur les technologies de captage et de stockage du CO2 – Source : Auteur (2013). ........................................................................................................ 230 Encadré 10 : Extrait de l’article 2 de la loi de programmation du 30 août 2009 relative à la mise en œuvre du Grenelle de l'environnement. ................................. 247 Encadré 11: « Le Gouvernement reçoit la synthèse du débat national sur la transition énergétique – La transition énergétique en marche ». Source : http://www.transitionenergetique.gouv.fr ................................................................................................. 248 Encadré 12 : Illustration sommaire de quelques effets néfastes du déficit du commerce extérieur. ............................................................................................... 257
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Table des figures Figure 1 : Evolution de la population mondiale de la préhistoire à nos jours – Source : INED (octobre 2003). ................................................................................. 35 Figure 2 : Evolution de la consommation mondiale d’énergie (en EJ) – Source : Statistiques BP (2013). ............................................................................................. 37 Figure 3 : Evolution de la part du charbon dans la consommation mondiale d’énergie primaire – Source : Statistiques BP (2013)............................................................... 38 Figure 4 : Evolution de la part du pétrole dans la consommation mondiale d’énergie primaire – Source : Statistiques BP (2013)............................................................... 40 Figure 5 : Evolution de la part du gaz dans la consommation mondiale d’énergie primaire – Source : Statistiques BP (2013)............................................................... 41 Figure 6 : Evolution de la part des énergies fossiles dans la consommation mondiale d’énergie primaire – Source : Statistiques BP (2013). .............................................. 41 Figure 7 : La biosphère au cœur de l’écosphère – Source : Auteur (2013). ............. 44 Figure 8 : Thermodynamique simplifiée des activités humaines au sein de la biosphère – Source : Auteur (2013). ......................................................................... 44 Figure 9 : Corrélation entre la consommation d’énergie primaire dans le monde et le PIB mondial sur la période 1965-2011 – Sources : Statistiques BP et Banque mondiale (2013)........................................................................................................ 46 Figure 10 : Corrélation entre la consommation d’énergie primaire des 67 principaux pays en 2011 et leur PIB en USD corrigé de pouvoir d’achat – Sources : Statistiques BP et FMI (2013)...................................................................................................... 47 Figure 11 : Evolution comparative de la population et de la consommation mondiale d’énergie depuis 1965 – Source : Banque mondiale et statistiques BP (2013). ........ 50 Figure 12 : Evolution récente de la consommation d’énergie primaire par tête dans le monde – Source : Banque mondiale (2013).............................................................. 51 Figure 13 : Evolution récente de la consommation d’énergie primaire dans le monde – Base 100 en 2001 – Source : Banque mondiale (2013). ........................................ 52 Figure 14 : Evolution des consommations mondiales d’énergie primaire selon les scénarios 2012 de l’AIE – Source : AIE - World Energy Outlook (2012). .............. 53 Figure 15 : Le mur de l’environnement et des ressources se rapproche – Source : Auteur (2013). .......................................................................................................... 55 Figure 16 : Evolution comparative des réserves mondiales de pétrole prouvées et du ratio réserves/production – Source : Statistiques BP (2013)..................................... 56
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Figure 17 : Evolution comparative des réserves mondiales de gaz prouvées et du ratio réserves/production – Source : Statistiques BP (2013)..................................... 57 Figure 18 : Elévation de la température moyenne d’équilibre selon différents scénarios d’évolution de la concentration en CO2e de l’atmosphère – Source : GIEC Rapport AR4 (2007). ................................................................................................ 60 Figure 19 : Augmentation de la température moyenne mondiale de surface en fonction des émissions cumulées de CO2e d’origine anthropique depuis 1870 – Source : d’après le rapport du GIEC AR5-WG1 (2013)........................................... 61 Figure 20 : Emissions cumulées de CO2 dans le monde depuis 2001 et tendance actuelle comparées au plafond admissible calculé par le GIEC pour le XXIe siècle pour limiter le réchauffement à 2°C depuis 1870 – Source : Auteur d’après données GIEC (2013). ........................................................................................................... 62 Figure 21 : La pollution dans les grandes villes chinoises un jour ordinaire (16 janvier 2014) – Source : www.aqicn.info/city/beijing. ............................................. 64 Figure 22 : Evolution des consommations d’eau pour la production d’énergie entre 2010 et 2035 – Source : Evaluations AIE World Energy Outlook (2012)................ 66 Figure 23 : Evaluation des consommations d’eau de certaines filières de transformation de l’énergie – Source : d’après AIE World Energy Outlook (2012).66 Figure 24 : Evolution des prix du pétrole (en USD2011 par baril de Brent) – Source : statistiques BP (2013). .............................................................................................. 70 Figure 25 : Evolution du prix du gaz sur les trois grands marchés gaziers (en USD/MBtu) – Source : Platts (1988-2012)............................................................... 71 Figure 26 : Représentation de l’élasticité – Source : Auteur (2013). ........................ 79 Figure 27 : Evolution comparée du PIB et de la consommation d’énergie primaire en France – Base 100 en 1980 – Source : Chiffres Banque mondiale (2013). .............. 80 Figure 28 : Scénarios d’évolution de la consommation mondiale d’énergie à horizon 2035 et effort d’investissement correspondant – Source : Auteur d’après les chiffres AIE WEO 2012.. ...................................................................................................... 86 Figure 29 : Méthode résumée de calcul de l’indice de développement humain (Méthode 2011) – Source : Auteur d’après documents PNUD. ............................. 102 Figure 30 : Relation « Espérance de vie – PIB par habitant » – Source : Auteur d’après données PNUD (2011). .............................................................................. 104 Figure 31 : Schématique de la recherche d’une nouvelle voie. Source : Auteur. ... 105 Figure 32 : Evolution de la population mondiale depuis l’an 1500 – Source : United Nations Department of Economic and Social Affairs (juin 2013). ......................... 108 Figure 33 : Projections d’évolution de la population mondiale dans différents scénarios – Source: United Nations Department of Economic and Social Affairs (juin 2013). ............................................................................................................. 111
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Figure 34 : Indicateurs-clés du scénario simplifié à horizons 2012/2013 et 2050 – Source : Données AIE et Banque mondiale pour 2012-2013, auteur pour 2050 (2013). .................................................................................................................... 117 Figure 35 : Evolution des consommations d’énergie par tête dans le scénario simplifié (en tep/habitant par an) – Source : AIE et Banque mondiale pour 19802010, auteur pour 2015-2050 (2013). ..................................................................... 118 Figure 36 : Evolution des consommations d’énergie primaire dans le scénario simplifié (en EJ) – Source : AIE et Banque mondiale pour 1980-2010, auteur pour 2015-2050 (2013). .................................................................................................. 119 Figure 37 : Emissions cumulées de CO2 dans le monde depuis 2001, tendance 2050 et scénario -2 % comparés au plafond admissible pour le XXIe siècle dans le scénario 2°C – Source : Auteur d’après les données du GIEC (2013).................... 124 Figure 38 : Evolution des émissions de CO2, sur la période 1990-2013 et sur la période 2014-2050 : en tendance et dans le scénario - 2%. Source : Statistiques BP avant 2013 – Auteur au-delà (2013). ...................................................................... 125 Figure 39 : Evolution des prix de l’électricité par tranche horaire le 4 octobre 2009 sur la place d’échange EEX – Source : EEX (2009). ............................................. 128 Figure 40 : Courbe théorique d’abattement des émissions de CO2 en fonction du prix du carbone. Source : Auteur (2013). ....................................................................... 132 Figure 41 : Evolution du cours des assignats de 1791 à 1796 – Source : sceco.univpoitiers. ................................................................................................................... 133 Figure 42 : Evolution du cours des quotas carbone sur le marché de l’EU-ETS – Source : Données Point Carbon (2008-2013). ........................................................ 133 Figure 43 : Comparaison du prix de revient d’un MWh électrique produit en 2013 selon différentes filières et dans l’hypothèse d’un prix du CO2 de 1 €/t – Source : Auteur. .................................................................................................................... 139 Figure 44 : Comparaison du prix de revient d’un MWh électrique produit en 2013 selon différentes filières et dans l’hypothèse d’un prix du CO2 de 100 €/t – Source : Auteur. .................................................................................................................... 140 Figure 45 : Evolution de la production d’électricité d’origine renouvelable dans le monde – Source : Statistiques BP (2013) ............................................................... 151 Figure 46 : Evolution de la puissance éolienne installée en Europe et dans le reste du monde – Source : EWEA et Global Wind Energy Council (2014)......................... 152 Figure 47 : Evolution de la puissance photovoltaïque installée en Europe et dans le reste du monde – Source : EPIA (2013) ................................................................. 153 Figure 48 : Carte des installations photovoltaïques en Europe à la fin 2012 – Source : EPIA (2013) ............................................................................................. 154 Figure 49 : Carte des installations éoliennes en Europe à la fin 2012 – Source : EWEA (2013). ........................................................................................................ 155
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Figure 50 : Répartition par filières des variations de la puissance électrique installée en Europe au cours de l’année 2012 – Source : EPIA – EWEA (2012). ................ 155 Figure 51 : Répartition de la production d’électricité par origine en 2012 – Détail des énergies renouvelables – Source : Statistiques BP (2013). ..................................... 156 Figure 52 : Contribution des énergies renouvelables à la production d’électricité dans certains pays d’Europe en 2012 – Source : Statistiques BP (2013). ............... 156 Figure 53 : Analyse des différentiels de production d’électricité entre 2011 et 2012 – Source : Auteur d’après Statistiques BP (2013). .................................................... 157 Figure 54 : Evolution de la production de biocarburants en Europe et dans le reste du monde depuis 2001 – Source : Statistiques BP....................................................... 158 Figure 55 : Coût moyen actualisé des MWh électriques issus des principales formes d’énergies renouvelables – Source : Auteur, d’après les données AIE (2013). ...... 160 Figure 56 : Le photovoltaïque, technologie cyclique – Source : Auteur (2013) ..... 165 Figure 57 : Concept Desertec – Source : Fondation Desertec (2011). .................... 174 Figure 58 : Evolution possible du mix électrique entre 2010 et 2050 – 2010 – Source : AIE pour données 2050 ; auteur pour estimation 2050 (2013). ................ 179 Figure 59 : Evolution du taux de pénétration de l’électricité dans le monde rapporté à la consommation finale d’énergie – Source : AIE avant 2035 – Auteur de 2040 à 2050 (2013). ........................................................................................................... 181 Figure 60 : Evolution du taux de pénétration de l’électricité dans le monde rapporté à la consommation d’énergie primaire. Source : AIE avant 2035 - Auteur de 2040 à 2050 (2013) ............................................................................................................ 181 Figure 61 : Evolution possible de la consommation d’énergie primaire dans le monde entre 2010 et 2050 – Source : Données AIE pour 2010 – Estimations de l’auteur pour 2050.. ................................................................................................ 182 Figure 62 : Evolution de l’équilibre énergies conventionnelles/énergies renouvelables dans le bilan énergétique mondial – Source : AIE pour 1990-2035 (scénario 2012 « New policies ») – Estimations de l’auteur pour 2050. ................ 190 Figure 63 : Réduction des émissions et incidence sur les rendements dans le cas de la filière à charbon pulvérisé – Source : Technology roadmap AIE (2012). .......... 195 Figure 64 : Géologie schématique des gisements de gaz – Source : EIA (2010). .. 201 Figure 65 : Evolution de la production de gaz aux Etats-Unis – Source : EIA (2012). ................................................................................................................................ 202 Figure 66 : Evolution des prix du gaz spot en Europe et aux Etats-Unis. (Source : Platts). ..................................................................................................................... 203 Figure 67 : Emplois créés aux Etats-Unis en 2015 grâce aux gaz non conventionnels – Source : IHS 2012 ............................................................................................... 204
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Figure 68 : Evolution des émissions de CO2 aux Etats-Unis – Source : EIA (2012). ................................................................................................................................ 204 Figure 69 : Top ten des ressources potentielles en gaz de schiste selon l’IEA (en Md m3) – Source IEA (2013). ....................................................................................... 206 Figure 70 : Variation du prix du charbon CIF ARA (Amsterdam-Rotterdam-Anvers) – Source : EEX – Prix à 90 jours (2013). ............................................................... 211 Figure 71 : Evolution de la puissance nucléaire installée dans le monde (en GW). Source : AIEA (2012). ............................................................................................ 212 Figure 72 : Répartition du parc nucléaire installé dans le monde en 2010 et 2012 – Source : AIEA (2013). ............................................................................................ 213 Figure 73 : Evolution du mix électrique mondial de 2010 à 2012 en hypothèse favorable – Source : Chiffres 2010 : AIE (2012) - chiffres 2050 : Auteur (2013).. 223 Figure 74 : Evolution de la part du secteur électrique dans les émissions totales de CO2 dans le monde. Source : Chiffres 1990 et 2010 : AIE (2012) - chiffres 2050 : Auteur (2013) ......................................................................................................... 224 Figure 75 : Répartition des émissions de CO2 par grands secteurs émetteurs – Sources : Banque mondiale (2013) et AIE (2012). ................................................. 225 Figure 76 : Evolution, en valeur absolue (Mt de CO2) et en valeur relative (rapportée au total des émissions de GES), des émissions des secteurs des transports, de l’industrie et de l’électricité dans l’Europe des 27 – Source : Eurostat (2013). ...... 226 Figure 77 : Nombre de véhicules par 1000 habitants en 2010 – Source : Banque mondiale (2013)...................................................................................................... 227 Figure 78 : Evolution possible du bilan mondial en énergie primaire dans le monde entre 2010 et 2050 – Source : Données AIE pour 2010 –Estimations de l’auteur pour 2050. ....................................................................................................................... 233 Figure 79 : Projection des émissions de CO2 en 2050 en l’absence de tout progrès (102,7 Mdt) et empilement des réductions possibles – Positionnement du résultat final (37,9 Mdt) par rapport à la limite 2 °C supposée correspondre à 16,5 Mdt – Source : Auteur (2014). .......................................................................................... 236 Figure 80 : Evolution de la CSPE (contribution au service public de l’électricité) – En montant total (échelle de droite, en M€) et en contribution unitaire (montant proposé par la Commission de régulation de l’énergie et montant appliqué, en €/MWh) – Source : Données CRE (2013). ............................................................. 243 Figure 81 : Pyramide des âges du parc nucléaire français à la fin 2013 (en MW installés par tranche d’âge) – Source : Auteur selon chiffres base de données PRIS AIEA (2014). .......................................................................................................... 246 Figure 82 : Evolution des prix du pétrole en USD constants (2011) depuis 1970 – Source : Statistiques BP (2013). ............................................................................. 249
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Figure 83 : Evolution du commerce extérieur français et de la facture énergétique (en Md€ courants) – Source : Douanes et Commissariat au développement durable. ................................................................................................................................ 255 Figure 84 : Evolution de la balance commerciale de la France rapportée au PBI – Source : Douanes/Insee (2013). .............................................................................. 256 Figure 85 : Taux de marge des sociétés non financières en Europe en 2012 – Source : Eurostat (2012). ........................................................................................ 258 Figure 86 : Dépenses moyennes en énergie des ménages – Source : Commissariat général au développement durable et Insee (2013)................................................. 259
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Table des tableaux Tableau 1 : Tableau de correspondance entre énergie électrique (exprimée en MWh ou TWh) et énergie primaire. ................................................................................... 17 Tableau 2 : Cas d’école N°1 – Analyse de l’impact de l’évolution d’un mix électrique sur les bilans énergétiques. ...................................................................... 27 Tableau 3 : Cas d’école N°2 – Analyse de l’impact du véhicule électrique sur les bilans énergétiques. .................................................................................................. 28 Tableau 4 : Cas d’école N°3 – Analyse de l’impact des pompes à chaleur sur les bilans énergétiques. .................................................................................................. 29 Tableau 5 : Réserves mondiales en énergies fossiles en 2012. ................................. 58 Tableau 6 : Chiffres-clés à fin 2011 ......................................................................... 76 Tableau 7 : Evolution de la population mondiale depuis l’an 1500 en milliards d’habitants. ............................................................................................................. 107 Tableau 8 : Projections d’évolution de la population mondiale dans différents scénarios. ................................................................................................................ 110 Tableau 9 : Hypothèses du scénario simplifié 2050. .............................................. 115 Tableau 10 : Grandeurs économiques de référence sur 2002-2012. ....................... 116 Tableau 11 : Rappel du mix énergétique 2012. ...................................................... 121 Tableau 12 : Prix du carbone dans les systèmes de marché au 1er janvier 2014 – .. 131 Tableau 13 : Valeur de switch entre centrales à gaz à cycle combiné (ρ= 58 % sur PCI) et centrale à charbon ultrasupercritique (ρ=46 %). En euro/t de CO2e.. ........ 138 Tableau 14 : Valeur de switch entre centrale à charbon ultrasupercritique (ρ=46 %) et différentes formes d’énergie alternatives. En euro/t de CO2e. ............................ 139 Tableau 15 : Les principales énergies renouvelables mobilisables pour la production d’électricité. ............................................................................................................ 147 Tableau 16 : Contribution énergétique attendue de la biomasse aux bouquets énergétiques des grandes régions en 2050 (en Mtep/an). ....................................... 175 Tableau 17 : Aperçu sur les incidences environnementales susceptibles d’affecter le développement des énergies renouvelables (Source : Auteur). .............................. 177 Tableau 18 : Part du charbon dans la production d’électricité en 2011-2012. ........ 191 Tableau 19 : Synthèse de l’étude EIA 2013 (comparée à celle de 2011) sur l’évaluation des ressources en gaz et pétrole de schiste. ........................................ 206
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Tableau 20 : Probabilité d’occurrence annuelle de l’accident le plus grave selon le type de réacteur....................................................................................................... 217 Tableau 21 : Réacteurs en construction dans le monde en mars 2010 et en novembre 2013 ........................................................................................................................ 219 Tableau 22 : Evolution possible du bilan mondial en énergie primaire dans le monde entre 2010 et 2050 .................................................................................................. 233 Tableau 23 : Evolution entre 2007 (2e semestre) et 2013 (1er semestre) du prix du MWh dans différents pays d’Europe – Industrie : consommateurs de 500 à 2 000 MWh – Ménages : Consommateurs de 2 500 à 5 000 MWh .................................. 271
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Table des matières
Introduction..................................................................................................... 9 Chapitre 1 : Qu’est-ce que l’énergie ? .......................................................... 13 L’ambiguïté des statistiques ............................................................... 15 Les transferts d’énergie : un peu de thermodynamique ...................... 18 Réflexions sur l’efficacité énergétique ............................................... 23 Chapitre 2 : L’énergie au cœur de la croissance ........................................... 33 Un peu d’histoire ................................................................................ 33 Le charbon toujours présent ............................................................... 36 Le pétrole et le gaz restent incontournables ....................................... 39 Toujours prisonniers des énergies fossiles ......................................... 42 L’énergie est nécessaire à la croissance ............................................. 42 Chapitre 3 : Une trajectoire non soutenable .................................................. 49 Les consommations d’énergie dans le monde sont reparties à la hausse ........................................................................................... 49 Quels seront les besoins en 2050 ? ..................................................... 53 Les limites se rapprochent mais les ressources restent abondantes .... 54 Les problèmes des rejets atmosphériques ........................................... 60 Le problème de l’eau .......................................................................... 65 Le problème des surfaces et de l’espace ............................................. 67 Les contraintes jouent sur les prix ...................................................... 69 Les inégalités s’accroissent et les conflits s’enchaînent ..................... 72 Une nouvelle donne planétaire ........................................................... 75 Chapitre 4 : Changer de trajectoire : l’efficacité énergétique face aux réalités .................................................................................................... 77 L’efficacité énergétique peut-elle constituer une réponse à la hauteur du problème posé ? ............................................................................. 78 La notion d’économie d’énergie ......................................................... 78 L’efficacité énergétique : quel potentiel ? .......................................... 82 Les difficultés à surmonter ................................................................. 85 L’efficacité énergétique doit être traitée dans un cadre général ........... 92 Les économies d’énergie sont souvent « survendues »......................... 92 293
Chapitre 5 : Une autre forme de croissance est-elle possible ? ..................... 97 A la recherche d’autres voies.............................................................. 97 Deux écoles de pensée ........................................................................ 98 La croissance verte ............................................................................. 98 La croissance dématérialisée ............................................................ 101 Chapitre 6 : Energie et démographie .......................................................... 107 Chapitre 7 : 2050 : un rendez-vous crucial ................................................. 113 Un scénario simplifié ........................................................................ 114 Les pays en développement au cœur du problème ........................... 119 Des émissions de CO2 qui risquent de diverger................................ 120 Chapitre 8 : Décarboner l’économie, mais à quel prix ?............................. 123 Le cas de l’Union européenne .......................................................... 125 Le prix du carbone ............................................................................ 129 La gouvernance climatique............................................................... 134 Quel serait le bon prix du carbone à horizon 2050 : le cas du système électrique .......................................................................................... 137 La décarbonation des usages non électriques ................................... 141 Quel effort rapporté au PNB ? .......................................................... 145 Chapitre 9 : Des énergies renouvelables, jusqu’où ? .................................. 147 L’énergie hydroélectrique : renouvelable sans être nouvelle ........... 148 Les énergies vraiment nouvelles ont vraiment décollé ..................... 150 Les biocarburants.............................................................................. 158 Des énergies nouvelles, jusqu’où ?................................................... 158 Les limitations financières ................................................................ 159 Les limitations techniques ................................................................ 164 L’insertion des énergies renouvelables dans les réseaux : le stockage de l’électricité est-il la solution ? ...................................................... 166 Les limites environnementales et sociétales ..................................... 169 Que peut-on in fine attendre des énergies renouvelables ?............... 178 Chapitre 10 : Energies conventionnelles sans carbone ............................... 189 Réduire les émissions des centrales à charbon ................................. 190 Capter et stocker le dioxyde de carbone ........................................... 193 Gaz naturel et gaz de schiste............................................................. 199 Peut-on encore compter sur le nucléaire ? ........................................ 212 Les vicissitudes de l’histoire du nucléaire ........................................ 212 Où en est-on aujourd’hui ? ............................................................... 218 Quel peut être le développement de l’énergie nucléaire ? ................ 222
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Un mix électrique 2050 largement décarboné .................................. 223 Peut-on décarboner les filières non-électriques de l’énergie ? ......... 225 Chapitre 11 : L’impossible équilibre .......................................................... 231 A quel bilan énergétique peut-on ainsi parvenir ? ............................ 232 Chapitre 12 : Et la France ? ........................................................................ 241 Arrêt sur image ................................................................................. 241 Une situation préoccupante .............................................................. 242 Quelle politique pour la France ? ..................................................... 246 Des objectifs clairs ........................................................................... 248 La priorité climatique ne doit pas occulter les autres préoccupations .................................................................................. 250 La sécurité et l’indépendance nationale : un impératif oublié .......... 253 L’efficacité économique : un impératif vital .................................... 254 Les emplois verts : entre le mythe et la réalité ................................. 261 Donner davantage de cohérence économique à la démarche ........... 263 Comment financer la transition énergétique ? .................................. 269 Conclusion .................................................................................................. 273 Liste des acronymes .................................................................................... 279 Table des encadrés ...................................................................................... 283 Table des figures ......................................................................................... 285 Table des tableaux ...................................................................................... 291
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