1 Histoire pour Chabbath, Tome 1 (Binyamin Benhamou)

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les histoires les plus passionnantes racontées par Binyamin Benhamou

 Leilouy Nichmat Rahel bat Esther ‫ ז״ל‬


COORDINATION David BERISSI • RELECTURE Tamara ELMALEH • MAQUETTE Cynthia BENDANAN • COUVERTURE Dafna UZAN • DIRECTION Binyamin BENHAMOU

Publié et distribué par les EDITIONS TORAH-BOX France Tél.: 01.80.20.5000 Israël Tél.: 02.37.41.515 support@torah-box.com www.torah-box.com/editions © Copyright 2022 / Torah-Box • Imprimé en Israël Ce livre comporte des textes saints, veuillez ne pas le jeter n'importe où, ni le transporter d'un domaine public à un domaine privé pendant Chabbath.


Note de l’éditeur Les Editions Torah-Box sont heureuses de publier l’ouvrage « 1 Histoire pour Chabbath ». La narration d’histoires, de paraboles et d’allégories occupe une place essentielle dans la tradition juive. Par son aspect captivant et attrayant, riche en émotions, l’histoire permet de traduire la profondeur des valeurs de la Torah en réalités tangibles, rendant accessibles ces messages profonds à nos perceptions. Ainsi a vu le jour le programme « 1 Histoire pour Chabbath ». Depuis 8 ans déjà, vous avez eu l’occasion d’écouter plus de 300 émouvantes et désormais célèbres histoires pour Chabbath préparées et contées par Binyamin Benhamou. Parce que ces récits authentiques et vécus vous ont ému, touché, parfois mis les larmes aux yeux et vous ont même invité au repentir, nous avons eu l’idée de les colliger en un recueil. Ce livre, que vous tenez enfin entre les mains, sera l’invité idéal de votre table de Chabbath. Vous ne vous contenterez plus uniquement d’en écouter l’agréable récit hebdomadaire sur Torah-Box : dorénavant, vous pouvez lire, relire et conter à l’envi lors de ce jour saint ces histoires authentiques de Tsadikim ou de ces personnes du quotidien, vécues il y a quelques siècles ou quelques semaines, qui les ont transformées, et qui changeront positivement votre vision de la vie.

‫להגדיל תורה ולהאדירה‬ L’équipe Torah-Box


SOMMAIRE Lettre d'approbation de Rav Gabriel Dayan

p.7

Préface

p.9

Le secret de la Ménora

p.11

Le lacet du soldat Dani

p.17

Le virement fou au Mexique

p.21

Le vrai patron du supermarché

p.27

Torah en Prison

p.31

Le bout de Matsa d’une valeur infinie

p.39

Le centre commercial le plus rentable d'Israël

p.45

La prière d'un fils unique

p.51

L’effrayant poil de ma main

p.57

Le Bureau du BOSS

p.61

Celui qui m’embrassera le front

p.67

Les Nazis fument le Chabbath

p.71

Ma fiancée a le cancer

p.77

L’oncle cruel de Nathanel

p.83

Et j’ai lâché la corde

p.89

Sauvées de la gentille dentiste

p.95

Même si l’avion du Rav s’écrase

p.101

Qui a sauvé notre fils soldat ?

p.105


Prends les bijoux et laisse-moi le bébé

p.109

Au moment exact de ma prière

p.113

Samuel le ressort

p.117

7-4-0-1

p.125

Un mois de voyage pour recoudre un bouton ?!

p.131

La Ségoula du Rav 'Ovadia pour se marier !

p.137

Lékha Dodi, le chant qui troubla le non-Juif

p.143

Le Kotel m'a parlé

p.149

Par le mérite d’un Kaddich

p.155

Danse devant les camps de la mort

p.161

Les Ciseaux Bleus Ciel

p.167

L’ange aux pommes

p.173

Les Tsitsit du petit Ouri

p.179

Air Daf Hayomi

p.185

Sa propre chair !

p.191

Une Seule Maman

p.195

Les colliers de la mère Greenberg

p.201

J’ai percuté un vieil homme...

p.207

Projet Immobilier à Mexico !

p.213

En short à Ouman

p.219

5 contre 5

p.223


Le bon geste avant de mourir

p.227

Ma Aliya grâce à Baba Méïr !

p.231

Jacques Chirac et le Grand-Rabbin d'Israël

p.235

Le miracle de la nappe ivoire !

p.241

Un jackpot matériel & spirituel

p.245

Un chèque de l’autre monde

p.251

Rav Ovadia Yossef pilier éternel de Myriam

p.257

Une barbe à 220 000 $...

p.263

Les chaussures contre les Sifré Torah

p.267

Ménaché Dayan l’assassin ?!

p.271

Le boxeur du Talmud

p.277

Hachem m’enterrera Lui-même

p.283

Chico, le prisonnier Juif

p.289

Un Chabbath avec Bill Gates ?

p.295

Le fils unique aux 1200 descendants...

p.301

Glossaire

p.307


Lettre d'approbation de

Rav Gabriel Dayan

C

’est avec un grand plaisir que j’écris ces quelques lignes afin de faire part de ma joie aux futurs lecteurs du présent ouvrage "1 Histoire pour Chabbath". Une joie qui envahira sans le moindre doute, tous ceux et toutes celles qui le tiendront en main. Il s’agit du premier volume d’une série de recueils réunissant les fameuses histoires pour Chabbath® racontées sur le site Torah-Box par Rabbi Binyamin Benhamou avec une grâce touchante, séduisante et... d’une main de maître. Ces histoires racontées toutes les semaines font fureur. Elles sont écoutées [avant Chabbath] et racontées à travers le monde, chaque Chabbath durant les repas qui deviennent alors, une vraie source de plaisir et qui, bien souvent, font couler des larmes joyeuses et bienfaisantes. Il y a en elles une vertu magique et si l’on peut s’exprimer ainsi, "une force surnaturelle qui vaincrait le diable". Elles ont des effets extraordinaires et produisent un effet purificateur sur nos âmes ! C’est ici l’occasion de le remercier pour ces si belles histoires qu’il cherche pour nous et qu’il ne choisit pas au hasard mais avec soin et minutie et ce n’est pas une tâche des plus faciles. Je peux vous l’assurer. A la fin de chaque histoire, Rabbi Binyamin nous propose une morale qui est, en fait, une eau douce qu’il va puiser au fond de chacune d’entre elles ; une eau que nous devons consommer avec soif et distribuer à nos enfants ou à notre entourage. Ainsi, cela permettra de mieux choisir nos réactions et nos comportements dans un quotidien parfois obscur et confus.


Nos Sages disent : "Tu désires connaître Celui qui a créé le monde par Sa parole ? Etudie donc la Aggada" Sifri Ekev, chapitre 11, passage 22. Les Aggadot - histoires du Talmud - ont des vertus curatives et régénératrices ; elles brisent toutes les barrières nous séparant du Créateur et inclinent notre cœur à Son service. Elles forgent nos traits de caractère et débarrassent notre esprit de toutes ses impuretés. Les histoires racontées par Rabbi Binyamin ont exactement les mêmes effets. Elles nous portent vers des hauteurs où la modestie et la simplicité sont reines, vers des hauteurs où le mauvais penchant n’a plus d’emprise et vers des hauteurs où il est possible de goûter aux délices du paradis tout en étant ici-bas. On le félicite pour cela ! Je conseille vivement à chacun de faire l’acquisition de cet ouvrage afin d’agrémenter les repas du Chabbath [ainsi que ceux de la semaine] et de susciter un débat autour des plats, si bien préparés par nos épouses. Avec cet ouvrage, Rabbi Binyamin vient combler un manque se faisant de plus en plus important et je suis persuadé que tous ceux et toutes celles qui le liront, ressentiront la pureté jaillissant de sa plume et fera naître chez le plus grand nombre, un désir de mettre ses/ ces enseignements en pratique. Il est certain que ceux qui l’ÉTUDIERONT ne resteront pas sur leur faim mais attendront avec impatience le prochain volume qui devrait paraître prochainement.

Gabriel Dayan


Préface Parmi les centaines de projets mis en place par l’association Torah-Box, celui de diffuser une très belle histoire vécue en vidéo chaque jeudi est assurément un des meilleurs. Chaque semaine, elle est attendue par plusieurs dizaines de milliers de personnes qui interagissent ensuite avec nous. Plusieurs d’entre elles ont même dépassé le million de vues. Le succès de ce projet nous a échappé. Pas un jour ne passe sans recevoir un chaleureux encouragement à ce propos, car elles contiennent l’énergie qu’on arrive pas toujours à transmettre. De nombreux professeurs nous disent la diffuser chaque semaine en classe, combien de parents nous ont dit avoir la coutume de la regarder en famille avant Chabbath… et combien nous en “veulent” de faire chaque semaine couler une larme à leur conjoint, homme ou femme ! A l’origine, c’était “mon” projet. Je racontais les histoires que j’avais retenues et qui m'avaient le plus marqué. Puis je suis rapidement arrivé à court. Pour tenir le rythme d’une excellente histoire chaque semaine, il me fallait être aidé par le public et tenir compte de leurs expériences de vie, les vérifier, et surtout en chercher d’autres. A ce moment-là, c’est devenu un vrai projet d’équipe. Je vous dévoile donc une partie de la recette du succès : chaque histoire est préalablement cherchée et triée sur le volet par ma chère sœur Sarah Abitbol dont c’est la principale occupation chez Torah-Box, avant ma décision finale. Car l’histoire ne doit pas être “standard”. Elle doit contenir les bons ingrédients, autant que possible. On y travaille dur, on ne se moque pas des gens, et ils l’ont remarqué.


Mais le véritable responsable du projet “1 Histoire pour Chabbath” est mon cher collègue David Berissi. Aussi méritant qu’il est humble, c’est lui qui orchestre le projet. Il filme, enregistre le son et monte la vidéo chaque semaine, parfois jusqu’à tard le soir. Avant mes voyages à l’étranger, il s’assure de m’enregistrer à l’avance afin qu’aucun internaute ne manque ce rendez-vous attendu. Merci Hachem pour ce mérite, merci à tous ceux qui prennent le temps de nous envoyer leurs réactions à chaque nouvelle histoire, merci à Eric Avidan et Benjamin Soulem du Studio Torah-Box, merci à Eric Bennephtali d’avoir aidé à la parution de l’ouvrage en mémoire à sa maman Rahel bat Esther, merci à Rabbi Its'hak Zylberstein, Rabbi Paysach Krohn, Rabbi Binyamin Pruzansky ainsi qu’aux autres auteurs anonymes pour les témoignages vérifiés qu’ils nous ont confié et enfin merci à mon collègue Alexandre Kisielewski pour son aide extrêmement utile. Ce livre, vous l’avez réclamé, voilà un premier tome dans vos mains pour une année d’histoires à raconter chaque Chabbath, en attendant le tome 2.

Binyamin Benhamou


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Le secret de la Ménora

H

arry Jones était un mécanicien apprécié habitant une petite banlieue dans le nord de l’État de New York. Il menait une vie calme et paisible dans le bon air de la campagne, en compagnie de son épouse, de ses deux fils et de son chien, Chipper. À tous égards, c’était un chrétien honnête et un voisin agréable. Harry s’intégrait parfaitement dans sa petite ville tranquille. Mais cette petite vie paisible cachait un secret profondément enfoui dans le cœur d’Harry. C’était le seul secret que l’aimable et amical Harry ne partageait avec personne : il était juif, un survivant de la Shoah.

Une trentaine d’années plus tôt, Harry Jones s’appelait Herschel Miller et était le plus jeune de cinq frères et trois sœurs – le bébé gâté de la famille, pour qui les grands frères et sœurs étaient toujours présents pour le conduire au Talmud Torah, jouer avec lui et l’aider dans les moments difficiles. La vie d’avantguerre était calme et paisible, et Herschel apprenait lentement


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les voies de son père, le célèbre Rav Yérou’ham Miller, dans son approche de la Torah et des Mitsvot, à Varsovie. Mais l’année de ses 13 ans, trois jours avant ‘Hanouka, la vie de Herschel changea pour toujours. Herschel fut déporté. Le bébé de la famille n’eut d’autre choix que de grandir très rapidement. Il lutta, se battit avec l’espoir de retrouver sa famille, que tous se retrouvent à nouveau réunis autour de la Ménora de ‘Hanouka. Mais à la sortie du camp, ce fut la désillusion, les images idylliques d’une famille réunie partirent en fumée, tout comme sa foi. « À quoi bon s’attacher à un D.ieu qui m’a abandonné, qui a ignoré toutes mes prières ? » songea-t-il. C’est animé de ces idées qu’il arriva en Amérique et devint Harry Jones, apprenti mécanicien. Il se maria avec Stacy, une Juive éloignée du judaïsme qui avait également perdu toute sa famille pendant la guerre et s’installa le plus loin possible des communautés juives. Harry se contenta de la vie qu’il avait choisie, loin de la douleur et de l’angoisse de la guerre. Pendant 13 ans, cette vie se poursuivit sans interruption – jusqu’à un événement remarquable. Pour les 13 ans de son fils aîné Jason, Harry voulut marquer cette étape, et promit à son enfant de l’emmener au centre commercial lui acheter le cadeau de son choix. Excité, Jason accepta immédiatement l’idée et ils se mirent en route. Harry entra d’un pas assuré dans le centre commercial en se dirigea vers le magasin de jouets. Mais après quelques mètres, il aperçut son fils à l’arrière, les yeux rivés sur la vitrine d’un magasin d’antiquités.


le secret de la ménora

Jason le pria de venir voir la vitrine. Ennuyé, Harry le rejoignit et là, il cessa de respirer. Des souvenirs commencèrent à l’assaillir. ‒ Papa, regarde comme c’est beau, je veux ça pour mon anniversaire. ‒ Tu rigoles ou quoi ? explosa Harry. Tu peux avoir un vélo, ou des jeux, ou des milliers d’autres choses ! Tu ne peux même pas jouer avec ce foutu objet ! Pourquoi voudrais-tu que je dépense de l’argent pour ça ? C’était surréaliste. Jason était un Américain à tous points de vue, son père lui avait promis de lui acheter le jouet de ses rêves et lui restait comme hypnotisé devant une Menora en bois. Harry ne voulait pas la Ménora, mais il ne voulait pas non plus rompre la promesse faite à son fils, qui le regardait d’un air suppliant. Il saisit la Ménora avec un dégoût évident, puis sonna au comptoir. Le vendeur, en arrivant, lui expliqua que la Ménora n’était pas à vendre. Harry, sentant la déception dans les yeux de son fils, fit tout pour convaincre le vendeur et lui acheta la Ménora pour 1400 dollars. C’était une énorme somme, mais cela valait le coup, pour éviter que Jason ne se souvienne de son anniversaire comme du jour où son père n’avait pas tenu sa promesse. Jason était aux anges. Arrivé à la maison, il s’enferma immédiatement dans sa chambre avec son nouveau jeu et se demanda comment jouer avec. Tout d’abord, il le tourna dans tous les sens, puis le jeta en l’air. C’était drôle, et il le lança à nouveau. Tout se déroula très vite ensuite : Jason l’attrapa mal, la manqua et la Ménora s’écrasa sur le sol, ses branches s’éparpillant en dizaines de petits morceaux de bois.

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Harry soupçonna le pire et se rua dans la chambre de son fils, pour constater que ses craintes s’étaient réalisées. Il tomba à genoux. ‒ Oh non, Jason. Non ! Je t’avais dit de choisir autre chose ! Sais-tu ce que cette bêtise m’a coûté ? Et maintenant, elle ne vaut plus rien. Je ne peux pas croire que tu l’as cassée ! Harry regarda ensuite le visage de son fils, désespéré, tentant de ravaler ses larmes et réalisa que Jason se punissait déjà assez, et de plus, que c’était son anniversaire. Harry s’excusa et aida son fils à ramasser les débris quand il repéra un papier glissé dans une crevasse de l’un des bougeoirs. Ébahi, il le déroula et trouva un petit mot en yiddish. Pendant une bonne minute, il lut le papier avec concentration et ensuite, devenant tout pâle, il hurla et s’effondra sur le sol de la chambre de son fils. « Appelez une ambulance ! » hurla Jason, accourant pour chercher sa mère. Il fallut un certain temps pour réanimer Harry. Mais il était encore pâle et tremblant, et pleurait à chaudes larmes. ‒ Qu’est-ce qui est écrit sur ce petit mot ? le pressa Stacy en lui tendant un verre d’eau. ‒ Je vais te le lire, répondit-il enfin à voix basse. Il déroula à nouveau le petit papier.

Les jours d’obscurité sont arrivés et les nazis rassemblent les Juifs de la ville. Ma famille m’a été arrachée, et je ne sais pas ce qui est advenu d’eux, j’ignore même s’ils sont encore en vie. Je survis dans un bunker de fortune qui peut être découvert à tout moment, et mon sort est donc incertain.


le secret de la ménora

J’ai tout de même fabriqué cette Ménora, que j’espère allumer le premier jour de ‘Hanouka. Je ne sais pas si je vais pouvoir allumer les sept jours suivants, ou le prochain ‘Hanouka, mais au moins, j’ai fait ce que j’ai pu. J’ai dissimulé ce papier dans la Ménora dans l’espoir que toute personne qui la trouve, me fasse une grande faveur. De grâce, récitez des Michnayot pour mon âme, et tentez d’accomplir autant de Mitsvot que possible pour moi. C’est le seul espoir qui me reste. Rav Yérou’ham Miller, fils de Rav Herschel Miller ‒ Mon père était Yérou’ham Miller, déclara Harry en pleurant à chaudes larmes et j’ai été nommé Herschel en souvenir de son père. Mon père a fabriqué cette Ménora ! Harry Jones – désormais Herschel Miller à nouveau – s’installa avec sa famille non loin d’une communauté juive, où ils commencèrent pas à pas à respecter la Torah et les Mitsvot, comme une famille unie. Herschel se résolut à poursuivre l’héritage de son père et se plongea dans l’étude de la Torah et finit par devenir un érudit respecté. On ne peut renoncer à nos origines juives, juif on le reste et si on l’oublie, nos ancêtres nous le rappellent. Les membres de la famille Miller sont devenus des enfants fidèles à leur Père céleste, qui ne les avait, en réalité, jamais quittés.

Chabbath Chalom !

Racontée la première fois en vidéo sur le site Torah-Box.com Jeudi 6 septembre 2018

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Le lacet du soldat Dani

V

endredi, 15h45, veille de Chabbath, Dani était sur le chemin du retour, en permission de l’armée pour le Chabbath. Le Chabbath commençait cette semaine-là à 16h25 et Dani vivait à Béer Chéva. Debout à la station d’auto-stop près de Natanya, attendant une voiture qui pourrait le rapprocher de chez lui, le Chabbath était la dernière préoccupation de Dani. Élevé dans une famille israélienne non religieuse, Dani ne croyait pas vraiment en D.ieu, mais il ne s’était jamais penché sérieusement sur le sujet. Une voiture s’arrêta sur le bas-côté et Moché ouvrit la fenêtre. ‒ Je vais juste à Natanya, je peux t’y conduire avec plaisir. Peutêtre que ça peut te rapprocher. Où vas-tu ? demanda Moché. ‒ Je rentre chez moi, répondit Dani. J’habite à Béer Chéva. ‒ Béer Chéva ! s’exclama Moché, choqué. Mais c’est à deux heures de route d’ici. Comment penses-tu y arriver avant Chabbath ? s’exclama-t-il, faisant fi du fait que Dani n’avait absolument pas l’air religieux.


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‒ En fait, pour vous dire la vérité, je ne suis pas religieux, donc peu importe si j’arrive après le début du Chabbath, répondit simplement Dani. Moché ne put résister. Juste pour l’éventualité improbable où le soldat accepterait, il ressentit qu’il devait agir comme il le pensait. ‒ Viens chez moi passer le Chabbath avec ma famille. Nous avons beaucoup de place et de la super nourriture. Dani, un peu pris au dépourvu, déclina poliment l’invitation et commença à s’éloigner, de retour à la station de bus. ‒ Essaye juste une fois. Peut-être que tu passeras du bon temps, ou, au moins, tu vivras une expérience intéressante. Tente le coup. Dani se rappelait vaguement avoir passé il y a bien longtemps un Chabbath avec une famille religieuse à Béer Chéva, chez des amis de ses parents. L’idée d’être enfermé tout un weekend dans un environnement restrictif ne le séduisait pas vraiment. De plus, ce type portait un costume et un chapeau noirs, et cela l’effrayait. Dans sa vision des choses, il représentait un élément fanatique du peuple juif. Mais, d’un autre côté, Moché avait raison. Peut-être apprécierait-il un changement temporaire dans sa routine et pourrait-il vivre une « expérience intéressante » ! Après y avoir réfléchi quelques instants, et sachant que les autres voitures derrière lui voulaient avancer, il courut de l’autre côté de la voiture et s’engouffra à l’intérieur, jetant son sac à dos à l’arrière. En chemin, ils se présentèrent. Dani semblait à l’aise avec Moché, en dépit de son apparence. Vers la fin du Chabbath, Dani dut s’avouer qu’il avait passé un meilleur Chabbath qu’il ne le pensait. Cette atmosphère


le lacet du soldat dani

de famille était sympathique : la nourriture, les chants, les discussions animées et l’atmosphère détendue et paisible. Il était temps de repartir, Dani remercia ses hôtes et dit au revoir à la famille. Moché, heureux d’avoir offert à son « frère » un bref aperçu de la vie d’un Juif, n’était pas totalement satisfait. Il lui fallait aller plus loin pour entretenir l’étincelle qu’il avait rallumée chez Dani. – Dani, avant de partir, j’ai une demande à te faire. – J’ai beaucoup apprécié ce Chabbath. Comment puis-je vous rendre la pareille ? Sortant un Kitsour Choul’han Aroukh (un recueil de lois juives) de l’étagère, Moché le tendit à Dani et lui demanda de choisir une Mitsva qu’il serait prêt à accomplir chaque jour. Il réalisa que cette requête était peut-être exagérée, mais il se devait de tenter le coup. Dani, une fois de plus pris au dépourvu, ne sut que penser. Il regarda Moché avec méfiance, mais commença à tourner les pages du livre. Il trouva un passage au début où il est écrit qu’on doit d’abord mettre sa chaussure droite, puis la gauche, ensuite nouer sa chaussure gauche, puis la droite. Il avait du mal à croire ce qu’il lisait. « C’est cela, la Loi juive ? » se demanda-t-il. Aussi étrange que cela puisse paraître, il voulait se montrer obligeant avec son hôte et cela semblait bien facile à accomplir. ‒ OK, répondit Dani, voici ma Mitsva. Moché nota le numéro de téléphone de Dani, pour qu’il puisse le suivre et voir comment il se portait. Quelques semaines plus tard, alors que sa jeep s’apprêtait à quitter la base pour une patrouille nocturne au bord de la

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frontière libanaise, Dani, qui venait de se réveiller et de s’habiller, se souvint qu’il avait oublié de mettre ses chaussures comme il en avait pris l’habitude ces dernières semaines. Il réfléchit : valait-il la peine de retenir sa patrouille pour accomplir quelque chose qu’il ne comprenait pas vraiment ? « Pourquoi s’en priver ? », se dit-il finalement. Il était cohérent dans tous les domaines de sa vie, et ce petit « projet » auquel il s’était engagé n’était en rien différent. « Attendez une minute, cria Dani à ses acolytes, j’ai oublié quelque chose dans la tente. » Dani courut en direction de sa tente, retira ses chaussures et les remit aussi vite que possible, mais cette fois-ci, conformément à la Loi juive. Lorsqu’il sortit de la tente, il s’aperçut que la patrouille ne l’avait pas attendu. Il était fâché contre lui-même : par sa faute, les autres gars de la patrouille avaient dû partir sans lui. Dix minutes plus tard, alors qu’il était assis dans sa tente, un bruit retentit au poste de commande. Il accourut pour voir ce qu’il s’était passé. L’opérateur radio annonça que toutes les personnes présentes dans la patrouille Almog 8 – la patrouille de Dani – avaient heurté une mine terrestre. Tous ses compagnons avaient été tués. Sous le choc, Dani n’en revient pas. S’il n’avait pas tenu à son engagement, il ne serait plus de ce monde. Même si nous le voyons pas toujours, le respect d’une Mitsva aussi simple que de mettre ses chaussures dans l’ordre peut avoir des répercussions inimaginables jusqu'à même sauver la vie d’une personne. C’est ce qu’a vécu Dany et nous l’a retransmis.

Chabbath Chalom ! Racontée la première fois en vidéo sur le site Torah-Box.com Jeudi 15 décembre 2016


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