Pierre-Bénite, territoire en mutation

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JULIETTE MARMONIER

PIERREbénite



AVANT-PROPOS Ce projet de fin d’étude, fruit d’une année de travail, explore une démarche sur un territoire suburbain, et une posture sur le rôle que l’architecture doit y jouer. Bien qu’à intégrer dans une dynamique métropolitaine, la mutation de ces territoires délaissés doit pouvoir s’ancrer sur des actions locales, situées et concrètes. La connaissance des lieux et leur caractère propre sont essentiels à la viabilité des projets envisagés. En partant de la petite échelle - l’acte architectural - il faut proposer le faire avec. En impliquant les habitants, les usagers, le projet doit proposer de faire autrement la ville. Car c’est bien là l’enjeu de la petite échelle sur la grande. Arriver à proposer une évolution des modes d’habiter afin d’enclencher un processus de mutation. Sans chercher à trouver un modèle - il n’y en a pas c’est donc une méthode qu’il est nécessaire d’acquérir. Questionner les modes d’habiter en place permet non pas de les rejeter en bloc, mais au contraire de les comprendre et voir comment ils peuvent faire émerger un art de vivre spécifique au lieu. La réalité constructive du projet devient un axe de recherche et d’exploration. Il s’agit d’affirmer un caractère propre, en lieu et place de la systématisation ambiante. La volonté de sortir du cadre non pas de manière ostentatoire et criarde mais sobrement et avec finesse, guide le projet dans son évolution. Afin de peut être réhabiliter un fragment de ces périphéries.

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SOMMAIRE

APPROCHE TERRITORIALE

p.7

PIERRE-BÉNITE

p.17

- La place des villes dans la Vallée de la Chimie

- Habiter une frange de ville, la question de la limite, projet ou processus?

VERS UN AUTRE HABITAT SUBURBAIN p.45

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approche territoriale

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QUINCIEUX

GENAY

SAINT-GERMAINAU-MONT-D'OR CURIS-AUMONT-D'OR

FONTAINESCOUZONSAINTAU-MONT-D'OR ROCHE- MARTIN TAILLEESUR-SAONE SATHONAY-VILLAGE

SAINT-DIDIERAU-MONT-D'OR DARDILLY

COLLONGESAU-MONT-D'OR

SATHONAYCAMP RILLIEUX-LA-PAPE

SAINT-CYRAU-MONT-D'OR

CHAMPAGNEAU-MONT-D'OR

MARCY-L'ETOILE

FONTAINESSUR-SAONE

SAINT-ROMAINAU-MONT-D'OR

LIMONEST

LA TOUR-DE-SALVAGNY

MONTANAY

FLEURIEUALBIGNY- SUR-SAONE SUR-SAONE CAILLOUX-SUR-FONTAINES

POLEYMIEUXAU-MONT-D'OR

LISSIEU

NEUVILLESUR-SAONE

CALUIRE-ET-CUIRE JONAGE

VAULX-EN-VELIN CHARBONNIERESLES-BAINS

SAINT-GENISLES-OLLIERES

ECULLY VILLEURBANNE

MEYZIEU DECINES-CHARPIEU

TASSIN-LADEMI-LUNE LYON

CRAPONNE FRANCHEVILLE

BRON

SAINTE-FOYLES-LYON

CHASSIEU

LA MULATIERE OULLINS

VENISSIEUX SAINT-FONS

SAINT-PRIEST

PIERRE-BENITE SAINT-GENIS-LAVAL

IRIGNY

FEYZIN

CORBAS MIONS

VERNAISON CHARLY

GRIGNY

GIVORS

SOLAIZE


LA PLACE DES VILLES DANS LA VALLÉE DE LA CHIMIE

CONTEXTE ETUDE OMA

< La Métrople de Lyon 59 communes 538 km2

La Vallée de la Chimie représente un enjeu majeur pour le développement de la Métropole de Lyon. C’est dans ce cadre que l’OMA a été mandaté afin de réaliser une étude prospective et pré-opérationnelle. Ce territoire méconnu et peu valorisé possède de nombreux potentiels, autres que ceux économiques liés à l’industrie chimique. L’OMA tente d’amener un autre imaginaire pour la vallée, en revalorisant notamment la qualité du paysage existant, lônes et îles du Rhône. Mais c’est bien le développement métropolitain qui reste l’objectif principal. En s’appuyant sur une étude approfondie des réseaux existants, le plan guide démontre une structure du territoire en veille, qui ne demande qu’à être réactivée. Ainsi, le réseau ferré en place initie l’idée d’un train léger permettant de relier directement ce vaste territoire de 17 km de long au coeur de la Métropole. Le travail sur les gares des villes de la Vallée de la Chimie apparaît alors comme essentiel à ce besoin de métropolisation. Le réseau ferré devient l’entrée thématique de notre analyse du territoire à 7, durant tout le semestre 9.

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Lyon

Oullins

Pierre-BĂŠnite

Saint-Fons

Irigny Feyzin

Vernaison Solaize

Serezin

Grigny

Industrie

Habitat

Gares


LA PLACE DES VILLES DANS LA VALLÉE DE LA CHIMIE

< La Vallée de la Chimie carte de l’État-Major 1820-1866

< Entre les rails, les industries A l’extérieur, les villes

LES GARES DE LA VDC

Au sein de la Vallée de la Chimie, le réseau ferré est historiquement lié à l’implantation des industries durant le XIXème siècle, ainsi qu’au contrôle progressif du lit du Rhône. Positionné sur la courbe altimétrique limite aux inondations, son tracé devient intimement lié à la géographie même de la vallée, marquant la distinction entre zones habitées et zones inondables. Dans la ville industrielle du début du siècle, la gare symbolise le moteur économique et la relation forte entre usines et villes.

Le développement croissant des industries, tant au niveau économique que spatial, amplifie la séparation entre paysage et ville, tandis que la relation ville/travail s’amenuise. Aujourd’hui, le déclin des gares et de leurs quartiers participe à la sensation de frontière entre deux mondes. Celui des grandes industries et celui des villes dortoirs que sont devenues Pierre-Bénite, Saint-Fons, Feyzin et d’autres. Tout le long de la VDC, les gares sont souvent le seul point de passage entre industries et habitat.

La proposition de repartir du réseau ferré en place pour développer une nouvelle mobilité métropolitaine énoncée par l’OMA devient extrêmement pertinente replacée dans ce contexte historique. Avant même d’avoir évoqué les chiffres - 7min entre Jean Macé et SaintFons, 9min entre Pierre-Bénite et Perrache - on comprend tout le potentiel de dynamisme, social comme économique, que peut apporter un tel projet.

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LA PLACE DES VILLES DANS LA VALLÉE DE LA CHIMIE

DES VILLES DÉLAISSÉES

Si le point de vue métropolitain sur le territoire est largement traité, la question des villes constituant le territoire se pose. En introduisant la problématique des gares, l’OMA ne fait qu’effleurer le sujet. En adoptant une démarche critique du plan guide, il apparaît essentiel de se recentrer sur ces communes. Identité commune, identité propre, comment appréhender ces villes banales et pourtant maillons essentiels de la Métropole? Quels dénominateurs communs? Nous repartons de la définition du territoire: la Vallée de la Chimie

< Le paysage de la vallée, entre coteaux, balmes, îles et lônes

< Le risque industriel, un marqueur territorial fort

LE PAYSAGE Les balmes et les coteaux sont caractéristiques de la géographie du territoire, tout comme les lônes et les îles du Rhône. S’ils sont peu valorisés, ils participent cependant au fonctionnement d’un système écologique et paysager qui se déroule tout le long de la vallée. Venant presque se raccorder à l’anneau vert de la Métropole, ce paysage ressource, comme le nomme l’OMA, représente pour les villes un potentiel de reconnection au fleuve et au grand paysage. LE RISQUE L’industrie de la chimie est un marqueur très fort dans l’imaginaire du territoire, mais surtout un risque majeur impactant de nombreuses communes. La réglementation PPRT est un calque administratif complexe et flou à appréhender, auquel doivent faire face les villes. Le foncier concerné par la réglementation est lourdement contraint.

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LA PLACE DES VILLES DANS LA VALLÉE DE LA CHIMIE

< Les gares de - Saint-Fons - Feyzin - Pierre-Bénite

LES VILLES «PORTE D’ENTRÉE», DES POTENTIELS À RÉACTIVER Parmi toutes les communes, Saint-Fons, Feyzin et Pierre-Bénite marquent l’entrée sur le territoire, et possèdent des enjeux particuliers vis à vis de la Métropole. Ce sont donc ces trois situations, centrées sur le territoire des gares, qui retiennent notre attention et pour lesquelles l’enjeu de projet est le suivant - Par le point d’entrée de la gare, comment révéler/ réactiver des identités propres au différents lieux tout en faisant partie d’une dynamique métropolitaine commune? PIERRE-BÉNITE DANS LA VDC

< Pierre-Bénite, une reconquête paysagère est/ouest à mettre en place pour un futur accès au fleuve?

< Pierre-Bénite, un redessin du PPRT par l’OMA, outil foncier pour une mutation urbaine future?

Bien que le système paysager de la vallée tende à se dérouler en continu depuis le nord de la Métropole jusqu’à Givors, la ville de Pierre-Bénite se situe à un point d’éloignement entre coteaux et fleuve. Ce retrait des coteaux a fait historiquement de la ville le « potager de Lyon » jusqu’au début du XXème siècle. Le parcellaire maraîcher subsistant en est aujourd’hui la seule trace, tandis que l’implantation et les développement des industries et infrastructures a émietté et démembré ce système paysager Est/Ouest. Dans un processus de fragment , il paraît essentiel de participer à la reconstruction paysagère du lieu. Le risque industriel à Pierre-Bénite provient de l’usine Arkema. Poumon économique majeur pour la ville, sa présence impacte cependant considérablement sa zone résidentielle. Ainsi, le centre historique et la plupart des institutions et équipements sont situés dans le périmètre de risque élevé. Cette situation entraîne aujourd’hui une cristallisation totale du tissu historique de faubourg. La volonté d’approche territoriale du risque énoncé par l’OMA tente de faire avec la réglementation. 15



pierre-bĂŠnite

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Habiter une frange de ville, la question de la limite, projet ou processus?


< 1949 potager de Lyon

< 1966 essor industriel amĂŠnagement du lit du RhĂ´ne construction autoroute A7

< 1990


Habiter une frange de ville, la question de la limite, projet ou processus?

< Analyse de l’évolution du centre ville Photos historiques , source http://www.geoportail. gouv.fr/accueil

SITUATION ACTUELLE

Ville suburbaine parmi tant d’autres de la Métropole de Lyon, Pierre-Bénite ne déroge pas à la règle. Organisée autour d’un ancien centre de faubourg développé le long d’un axe Nord/Sud, un étalement pavillonnaire toujours croissant et un vaste grand ensemble viennent compléter le tableau. D’un simple coup d’oeil sur une carte, on comprend qu’à proximité de la gare les terrains sont progressivement délaissés. En cherchant à comprendre l’évolution du site, il apparaît que ce bout de ville a endossé depuis des décennies le rôle d’espace tampon entre la ville et les différentes nuisances auxquelles elle a dû faire face. Les inondations du Rhône dans un premier temps, auxquelles se sont ensuite ajoutées les nuisances liées au train, puis remplacées aujourd’hui par l’industrie et son lot de risques. En résulte une situation lâche «d’arrière de ville». Cette partie de ville niée représente pourtant un terrain des possibles, tant au niveau urbain qu’architectural. Son potentiel de mutation, tant métropolitain que local, amène le questionnement de projet à s’axer sur ce site. La présence de la halte ferroviaire étant essentiellement liée à l’industrie chimique Arkema, elle est majoritairement utilisée par des employés. Ironie du sort, c’est pourtant bien le risque technologique qui menace de fermeture la desserte ferroviaire.

Page suivante, plan de situation, état actuel, et les différents équipements de la ville

Les jardins partagés du Brotillon, gérés par le comité d’entreprise d’Arkema sont aujourd’hui la seule caractéristique - identié? - du lieu. Présents sur de larges tenants fonciers fortement impactés par la réglementation PPRT, ils représentent une certaine vision de la ville, collective et partagée. Avec les terrains de sports situés le long des voies ferrés, ils occupent des terrains a priori non constructible par défaut. 21


Gare




Habiter une frange de ville, la question de la limite, projet ou processus?

< Vue des divers porches et cours présents sur le site

La proximité directe du tissu faubourg renforce cette sensation de non-lieu autour de la gare. Cette structure urbaine reprend celle du parcellaire en lanière Est/Ouest hérité du passé maraîcher de la ville. Dans ce contexte, une sorte de micro-système urbain a pris place au fil du temps. Les porches et cours permettent aux habitants d’inerver en profondeur ces longues parcelles, aboutissant à plusieurs épaisseurs de bâtis. La cour devient presque venelle. Un complexe équilibre entre collectif et privé est au fur et à mesure mis en place. Petit immeuble, maison, jardin, entrepôt, atelier, garage , commerce composent ces concentrés de ville à la parcelle. Loin de vouloir tenter un pâle pastiche de ce tissu historique, l’enjeu est plutôt d’analyser et comprendre comment cette spatialité peut être réinterprétée, dans les usages plus que dans la forme. Déjà la question de la limite se dessine au travers de ces différents contrastes qui composent ce site. Si la ville suburbaine est caractérisée par une sur-représentation du trait séparatif franc entre tout privé et tout public, comment faire autrement?

> in Manifeste du Tiers-paysage

« Considérer les limites comme une épaisseur et non comme un trait Envisager la marge comme un territoire d’investigation des richesses à la rencontre de milieux différents »

citation et croquis

Gilles Clément

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Habiter une frange de ville, la question de la limite, projet ou processus?

DÉFINIR LA LIMITE

L’INVARIANT < Mie en place de l’invariant de projet Destructions et délocalisation nécessaires

Dans une recherche de définition de la limite, il semble nécessaire de porter une action de projet forte sur le site. En repartant des hypothèses du risque et du paysage, une réserve paysagère est mise en place. Devenant espace tampon entre Arkema et la ville, cet invariant est à la fois une mesure compensatoire à la réglementation, mais surtout une façon d’assumer la présence du risque sur le territoire. L’enjeu est de pouvoir redessiner le zonage du PPRT, en s’appuyant sur le parcellaire existant afin de redonner à certaines assiettes foncières une possibilité de mutation. En choisissant de rendre ces terrains inaccessibles, il est aussi question de reconquête paysagère et de permettre la mise en place d’un fragment paysager supplémentaire entre coteaux et lône. En projetant cette réserve, un entre-deux se révèle. Tissu faubourg constitué d’une part, nouvel horizon créé d’autre part, comment faire la limite? Cependant il n’est pas question ici de la limite exclusive, mais bien au contraire d’une limite qui ferait lien, un tissage. En effet, si sur un objectif à long terme la présence d’Arkema à Pierre-Bénite est souhaitable, nous ne pouvons nous empêcher de penser à un éventuel après. Il s’agit donc d’envisager non pas une plus grande fragmentation en éléments isolés, mais bien au contraire comme un système progressif, se constituant au fur et à mesure.

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Habiter une frange de ville, la question de la limite, projet ou processus?

LE MUR COMME PROJET

Une première esquisse est réalisée au cours du semestre 9. Commençant à appréhender la question de la limite, une recherche de son expression par le mur est dessinée. < Plan masse

En repartant du trait administratif de la limite, on vient le plier, le plisser et l’épaissir afin de venir y creuser les différents usages. La référence au mur habité est évidente, et se décline sous différentes spatialités. La volonté du dessin est de constituer un système complet, un mur , qui modifie en profondeur le site. Réhabilitations, nouveaux logements, gare et parkings sous-terrains, sont intégrés, creusés, entre le mur, qui devient une méga structure presque autonome. Mais à être trop autonome, se pose alors la question de l’autarcie - «l’autisme» - du projet tel que présenté. En cherchant l’expression de la limite, ce n’est finalement qu’un trait supplémentaire rajouté, posé, sur le territoire, qui ne vient que reformer de part et d’autre espaces niés, sans identité ni caractère.

< Maquette 1:2000E

En imposant un tel système de but en blanc, la volonté de limite comme tissage disparaît complètement, et oriente le projet vers une démarche de plan masse qui n’est pas l’enjeu pour ce territoire. Cette première étape et ce bilan critique sont nécessaires à la maturation du projet et permettent de prendre du recul afin de bien clarifier les objectifs et la démarche.

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Habiter une frange de ville, la question de la limite, projet ou processus?

LE MUR COMME PROCESSUS TENTATIVE DE TISSAGE AU COURS DU TEMPS PRINCIPE

< Croquis Recherche d’un récit et d’un parcours Intention d’infiltration

> in Collective Form: Three paradigms

Il est donc question d’arriver à mettre en oeuvre une limite épaisse - frange, lisière, tissage - fragment par fragment. La pensée du groupe des métabolistes japonais a été une grande inspiration dans la mise en place du processus de conception. Alors que précédemment le mur était envisagé comme la figure du projet, la définition de la forme de groupe oriente le dessin vers une vision élémentaire du mur. Il est donc élément de base, constitutif du lieu et forme au fil du temps cette frange habitée. « Forme de groupe: associer de manière répétitive et agrégative des éléments structurants architecturaux et paysagers de petite échelle, eux-mêmes générateurs de la forme d’ensemble, par conséquent non finie. Directement pétris par les usages, ces éléments construisent un système de relations sociales et spatiales suffisamment fondamental et complexe pour perdurer et se transformer au fil du temps sans altérer l’ensemble.»

> Schémas des trois formes collectives des principes métabolistes

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Fumihiko Maki


> Maquette conceptuelle Recherche de spatialité par l’élément mur


Habiter une frange de ville, la question de la limite, projet ou processus?

MUR PARCELLAIRE / MUR CREUX

Expérimenter la question du mur comme élément de base a été la première approche du projet. En repartant du tracé parcellaire historique Est/Ouest, les murs organisent l’espace public, la parcelle et le logement La tradition agricole du Dauphiné veut que les murs de clôture soient en pisé, couronnés de tuiles ou tôles. Dès lors, le pisé devient la matérialité première du projet. Deux types de murs sont développés: de longs murs très épais délimitent la parcelle, tandis que d’autres sont creusés et habités par les logements. Au sein de ces murs, espaces privés et collectifs s’organisent. La cour et le porche sont réinvestis dans un espace commun sillonnant l’intérieur des parcelles. Volontairement étroit puis dilaté, il est à investir par les habitants.

> Plan de rdc

+0 +

+1

+1

+2

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Habiter une frange de ville, la question de la limite, projet ou processus?

< Croquis

MUR PLIS DU SOL

Si la première esquisse reprend clairement la volonté du mur comme élément de base, sa déclinaison à toutes les échelles fige le projet dans un système peu satisfaisant. Un processus au cours du temps semble difficile voire impossible à mettre en place. En repartant de la situation de frange de notre lieu de projet, une nouvelle logique se met en place. Si les murs parcellaires en pisé témoignent d’un caractère immuable, intégrer une dimension éphémère au processus est essentiel. Émerge alors une constitution du lieu en deux temps : - Les murs en pisé, hauts de 3m, peuvent être le support à divers programmes - jardin partagé toujours en place, habitat, commerce, petit équipement... Ils sont les plis du sols - Les volumes dits éphémères, en structure légère et filière sèche, viennent s’égrener au fur et à mesure des besoins et du temps sur les murs. Si dans un premier temps les murs ne sont plus que des enceintes accueillant les différents usages, ils sont finalement élargis et creusés. Il permettent d’offrir soit un espace collectif donnant accès ,soit un espace privé plus secondaire, intime. Ils peuvent être une remise pour les jardins partagés, un espace de stockage ou de sanitaires pour les locaux d’artisanat, ou encore contenir les chambres et sanitaires dans les logements.

Page suivante Maquette concept murs plis du sol et volumes éphémères

Les structures éphémères imbriquées entre les murs viennent créer au rez-de-chaussée des espaces couverts plus flexibles, pièce de vie ou atelier. Le volume habitable contenue devient un espace sur un, deux ou trois niveaux à investir par les habitants.

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Croquis Recherche de dĂŠcomposition - trame - murs - volumes habitables

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Habiter une frange de ville, la question de la limite, projet ou processus?

< Photo aérienne état actuel Parcelles mutables et réserve paysagère

PROCESSUS DE MUTATION Après différentes évolutions du projet, une mutation à la parcelle est proposée. Si les 23 parcelles faisant limite sont mutables, nous nous intéresserons à celles situées au nord de l’école, constituant la première situation de projet. Chaque mutation se déroule en trois temps - choix de la parcelle en fonction de son statut - construction des murs en pisé - usages de la parcelle, mixité programmatique et évolution au cours du temps. MUTATION TEMPS 1

< Mutation temps 1 - jardins partagés - parking de la ville - local d’artisanat

La première parcelle mutable est celle où est implantée une partie des jardins partagés du Brotillon. Le foncier est la propriété d’Arkema, cependant la politique de l’entreprise est de mettre en place le maximum de mesures compensatoire vis à vis du risque imposé à la ville de Pierre-Bénite. Cette mutation va donc dans ce sens. La construction des murs en pisé demandant peu de logistique, il semble cohérent de préserver les jardins durant le chantier. Une fois les murs édifiés, les jardins partagés retrouvent leur tranquillité et les murs peuvent alors servir de remise et atelier pour chaque jardinier. En parallèle, la longue parcelle contiguë à l’école appartenant à la ville rentre elle aussi en mutation. L’enrobé est retiré, afin de retrouver la bonne terre, et à nouveau les murs en pisé sont construits. La mutation en simultanée de ces deux parcelles est stratégique. En effet, à l’emplacement des jardins partagés il est projeté une évolution futur des usages. Afin de ne pas priver certains de leurs jardins, la deuxième parcelle mutée peut désormais recevoir des jardins. Libérant ainsi une possibilité de recevoir un autre programme. 39



Habiter une frange de ville, la question de la limite, projet ou processus?

< Mutation temps 2 - Maison pavillonnaire - Maison et entrepôt - Prolongement impasse des écoles

La mutation de ces deux parcelles donne un accès public au fond de parcelle. La mise en place de la réserve paysagère ayant induit la mise en sous-terrain de la gare - avec un accès depuis la route le long d’Arkema - une sortie direct côté ville est désormais possible. L’étroite parcelle abritant un petit entrepôt d’artisan est donc mutée. Dans une recherche de mixité programmatique, l’artisan peut être relocalisé au sein des murs des jardins partagés. Un volume exploitable en charpente bois est imbriqué entre les murs, venant créer un local sur deux niveaux. Ici, la mutation donne lieu à la création d’un nouvel espace public, en lien avec la gare grâce à une large rampe donnant un accès piétonnier et mode doux. L’école jusque là faisant dos à notre intervention, se voit offrir un espace public en coeur d’îlot, relié et à la rue de faubourg et à la gare. Une deuxième entrée peut donc être envisagée, afin de renforcer sa position d’équipement de quartier majeur. MUTATION TEMPS 2 Le processus commence à avoir une certaine visibilité au sein de la Métropole. L’espace public et le cheminement piéton Est/Ouest est quotidiennement emprunté. Le développement de la mobilité métropolitaine fait déjà effet, les fonciers encadrant la descente vers la gare prennent de la valeur et permettent aux propriétaires de rentrer dans le processus de mutation. Le petit pavillonnaire existant est détruit pour permettre l’édification des murs en pisé. De nouveaux habitants, aussi bien des familles que de jeunes couples, choisissent un mode d’habiter autrement à Pierre-bénite. Ils sont intéressés par la proximité avec la métropole mais aussi par la qualité de vie entre mur et grand horizon. La parcelle mutable à droite de la rampe devient la partie émergé de la gare, accueillant petits commerces et services. Elle vient renforcer le statut du nouvel espace public, qui devient accessible aux véhicules par le prolongement de l’impasse des écoles. 41



Habiter une frange de ville, la question de la limite, projet ou processus?

< Mutation temps 3 - Jardins partagés - Voie mode doux bus/ vélo

MUTATION TEMPS 3 La mutation de la large assiette foncière de jardins devient nécessaire. Une voie partagée mode doux bus et vélo est tracée. Elle dessert la gare, l’école et les autres équipements au sud de la ville. La réserve paysagère ayant bien commencé son rôle de renouvellement du sol, le terrain nécessaire à la voie mode doux est donc repris côté réserve. Selon le processus, une fois les murs en pisé construits, les nouveaux logements peuvent se mêler aux jardins existants selon la demande. Une continuité écologique s’installe bien évidemment depuis la réserve paysagère jusqu’aux jardins partagés les plus proches du faubourg. Le tissage se créé, peu à peu. Suite aux arrivées successives de nouvelles familles, l’école a besoin d’une extension. La parcelle mutée qui lui est adossée délaisse alors en partie son usage de jardin partagé pour accueillir des salles supplémentaires.

<

MUTATION TEMPS 4

SITUATION 2 - Tissu pavillonnaire

La mutation de la première situation est achevée. La deuxième, essentiellement constituée de maisons pavillonnaires existantes, peut commencer. En gardant le principe des murs en pisé comme dénominateur commun au lieu, il faut arriver à s’appuyer sur cet existant tout en exerçant une mutation de l’habiter.

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VERS UN NOUVEL HABITAT SUBURBAIN

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Vers un nouvel habitat suburbain

ENTRE FAUBOURG, PAVILLONNAIRE ET GRAND ENSEMBLE Si la mutation de la ville passe par un processus très urbain, elle doit bien évidemment se coupler à une réflexion fine sur l’habitat périurbain. Nous l’avons déjà évoqué précédemment, la ville de Pierre-Bénite est composée de trois tissus caractéristiques: faubourg, pavillonnaire et grand ensemble.

< Photos aériennes et analyse graphique du rapport au sol des trois tissus - Faubourg - Grand ensemble - Pavillonnaire

Le faubourg, constitué au cours du temps, est caractérisé par un fonctionnement collectif, permettant un certain équilibre entre public et privé. Le pavillonnaire est clairement caractérisé par son «chacun chez soi», le vivre ensemble n’est pas recherché, sa spatialité l’exprimant très clairement. Dans les grands ensembles, cette confrontation collectif/privé est en revanche complètement imposée aux habitants. Nous avons retenu l’importance des multiples seuils présents dans la typologie de faubourg, espaces intermédiaires nécessaires à cette acceptation de l’autre, du voisin. Cette recherche d’habiter autrement la ville périrubaine passe aussi par une réflexion sur le long terme et l’évolution des habitants. Loin des programmes mono typologiques, l’enjeu est de proposer une richesse de logements. Permettre aux habitants de retrouver un logement qui leur convient au sein du même quartier, qu’ils soient jeune couple, personne âgée ou grande famille. Afin de garantir une certaine pérennité au processus de mutation.

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Vers un nouvel habitat suburbain

< Croquis Recherche de l’interaction entre les deux registres, massif et léger.

AMBIANCES : REGISTRE MASSIF / REGISTRE LÉGER

Les murs en pisé sont donc l’interface entre public, collectif et privé. La venelle collective fait partie intégrante d’un mur creusé. En lieu et place des habituels grillages de clôture, la beauté de la terre, la texture riche et pérenne du pisé participe à la poésie du lieu. La mise en place d’un nouveau logement entre les murs commence par l’appropriation du mur habité. Creusé, il accueille les chambres et les sanitaires. Entre les murs, se développe alors la pièce de vie, en continuité complète avec le jardin. L’intention est d’offrir aux habitants ce qui est nécessaire dans l’épaisseur du pisé, et laisser flexible le reste du logement. La matérialité se suffit à elle-même, aucun artifice ne vient la perturber. On essaye par ce mode d’habiter de rester cohérent avec le processus général mis en place, faire au fur et à mesure, rendre possible la mutation des lieux et des programmes. Si dans un premier temps le logement peut rester au niveau des murs, une extension, ou l’installation d’un autre logement au-dessus, fait intervenir un deuxième registre. Dans une recherche d’un volume habitable dit éphémère, la filière sèche de la construction bois semble pertinente.

< Extrait de coupe

Pour ce registre léger, de nombreuses expérimentations ont été faites. L’intention est cependant claire : un volume habitable correspond à un logement, à l’intérieur duquel on retrouve des sous-espaces pour les chambres et sanitaires. Là encore il est question de pièce à vivre et d’espace extérieur à composer selon son propre mode d’habiter.

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< Croquis Recherche de strucure légère et d’assemblage sur les murs en pisé

> Croquis

> Maquette d’étude Premier test de sous-espace dans le volume habitable


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< Disneyland, maison individuelle Zutzendorf GENS - asssociation libÊrale d’architecture


Vers un nouvel habitat suburbain

SYSTÈME CONSTRUCTIF, SYSTÈME SPATIAL

Dans un premier temps, le volume habitable est schématiquement une boîte. Elle se pose ensuite simplement sur les murs en pisé. Si la clarté du système au premier abord semble acquise, il offre une qualité d’espace à habiter médiocre, peu conforme aux intentions initiales.

< Koyasan guest house Koyasan Alphaville Architects

La situation de frange et d’instabilité vient requestionner cette boîte pleine, massive. Dans une logique de mutation, le volume éphémère est finalement supporté par un système poteaux/poutres en bois, indépendant des murs en pisé, venant assumer la vérité constructive du processus. Il est alors question d’une structure bois constituant le volume à habiter. Cette structure bois couronnant les murs en pisé fait appel à l’imaginaire des édifices agricoles en pisé, dont la couverture est soutenue par une charpente bois. En parallèle, l’image d’Arkema et de ses usines tubulaires complexes, identité du lieu, fait surgir des références de structure foisonnante.

< L’usine Arkema Une présence visuelle et un imaginaire identitaire du lieu

L’idée de charpente bois comme matrice du volume habité fait son chemin. Un rythme serré des charpentes est une première recherche de mis en oeuvre. Il permet de venir créer différents espaces en fonction du dessin de la charpente matricielle. Ainsi, le système constructif devient générateur d’espace, au sein duquel on vient aménager les sous espaces secondaires. Suivant le nombre d’étage intégré à la charpente, des jeux de doubles hauteurs et de lumière sont crées.

Page suivante Maquette d’étude d’un extrait de volume habitable sur trois niveaux

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Juliette Marmonier

Projet de fin d’étude développé dans le DEM SPAA

Directeur d’étude: Marc Bigarnet

Encadrement: Boris Bregman Boris Roueff Noune Tchilingaryan

Christophe Boyadjian Federico Ferrari Pierre Gras

ENSAL - Juin 2016

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PFE - SPAA ENSAL 2016


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