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BELGIE(N)-BELGIQUE

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Editeur responsable : Axelle Fischer • Commission Justice et Paix francophone de Belgique, asbl Rue Maurice Liétart, 31, Bte 6 • B-1150 Bruxelles - Belgique

Revue d’analyse des conflits internationaux et des enjeux de paix

Migration :

a u-delà d’une crise, une obligation d’accueil

N° 101 4e TRIMESTRE 2017


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ÉDITO SOMMAIRE ÉDITO

Chère lectrice, cher lecteur,

Aujourd’hui, c’est notre anniversaire ! page 3

L’ACTUALITÉ : REGARDS ET POSITIONS Un pas en arrière, un regard en avant

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PORTRAIT / POINT DE VUE L’histoire de Mahmoud : La vie plus forte que la mort !

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DOSSIER MIGRATION : AU-DELÀ D’UNE CRISE, UNE OBLIGATION D’ACCUEIL Introduction Première réflexion Migrations forcées : La face non désirée de la mondialisation

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En effet, en 1967, voyait le jour la Commission Justitia et Pax belge. Pour célébrer nos 50 ans, nous avons souhaité moderniser notre image : un nouveau logo et une toute nouvelle version du Pour Parler de Paix ! Grâce à ceux-ci, nous voulons partager avec vous notre identité multiple, notre inspiration catholique et notre engagement international. À l’heure où beaucoup passe par le numérique, nous faisons le pari que vous êtes encore nombreux à aimer lire sur papier. Alors nous ajoutons de l’espace de parole, pour vous en dire plus sur nos projets et réflexions, pour vous donner de la voix. 50 ans… et notre mission est toujours d’actualité : conscientiser citoyens et décideurs sur les situations de conflits et les encourager à être acteurs de paix et de justice ici et ailleurs. Dans ce premier numéro revisité, nous revenons sur un sujet qui vous tient à cœur et qui fait la une des médias : les migrations. Prenons le temps ensemble de nous poser les bonnes questions, d’entendre l’appel des témoignages et, enfin, de faire basculer les stéréotypes…

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Seconde réflexion Des politiques migratoires ou des politiques d’externalisation ?

Je profite de ces quelques lignes pour remercier chaleureusement nos partenaires associatifs avec qui cet important enjeu de société est travaillé : le CNCD-11.11.11 et Caritas International.

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Troisième réflexion L’accueil des élèves migrants dans nos écoles : “Pacte pour un enseignement d’espérance”

Axelle Fischer Secrétaire générale

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BRÈVES

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L’ACTUALITÉ : REGARDS ET POSITIONS

Un pas en arrière,

un regard en avant Au milieu de l’hiver belge, la question de l’accueil des migrants ressort ponctuellement, mais laborieusement. De nombreuses questions peinent à être posées : pourquoi ces personnes parcourent-elles des milliers de kilomètres pour se retrouver en errance transitoire dans les parcs bruxellois ? Qui sont-ils ? Qui sont-elles ? De combien de personnes parle-t-on réellement ? Trop souvent, le phénomène est abordé de façon épidermique, sans prendre le temps d’appréhender l’histoire et le parcours qui se cachent derrière ces élans de misère. Alors que la thématique est souvent récupérée dans l’émotion et le discours, il convient donc peut-être de se décentrer une seconde afin de percevoir les vrais enjeux de ce que beaucoup appellent encore aujourd’hui la “crise des migrants”.

Malgré le pic de 2015, le nombre de personnes introduisant une demande d’asile en Belgique reste stable dans le temps (voir figure 1). Ce nombre est évidemment lié à la situation politique internationale et les différentes crises graves que traversent certaines régions (voir figure 2). Pourtant, malgré ces chiffres, la Belgique est loin d’être la championne de l’accueil ! Selon les données d’Eurostat, la Belgique ne recueille que 0,8 % des demandes d’asile européennes, contre 3 % pour le Royaume-Uni, 4,14 % pour la Grèce, ou encore 10 % pour l’Italie. C’est l’Allemagne qui mène la politique d’accueil la plus ambitieuse, avec 60 % des personnes demandeuses d’asile au sein de l’Union européenne (soit quelque 722.265 demandes).

À nouveau, il convient de faire un pas de recul supplémentaire pour observer la tendance mondiale et relativiser la situation européenne. Ce sont toujours des pays en voie de développement qui accueillent le plus de migrants, avec un “top 5” reprenant l’Éthiopie (736.100 personnes), l’Iran (979.400 personnes), le Liban (1,1 million de personnes), le Pakistan (1,6 million de personnes) et finalement la Turquie (avec 2,5 millions de personnes). Il convient toutefois de préciser que le chiffre des migrations mondiales semble stable à travers les années, gravitant généralement autour de 3 % de la population mondiale 2.

Et l’accueil dans tout ça ? Après ce rapide regard mondial sur le phénomène migratoire et les déséquilibres flagrants qui règnent entre les États, il convient donc d’interroger nos politiques belges et européennes. Les murs qui se sont érigés à travers l’Europe n’ont pas freiné ces personnes en quête d’avenir, les routes n’en sont devenues que plus mortelles et totalisent, pour l’année 2016, plus de 6.363 décès ou disparitions, rien qu’en Méditerranée…

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Et chez nous ? La situation est devenue morose, avec les fermetures de places d’accueil individuelles, la précarisation du statut de réfugié (devenant davantage flexible et temporaire), les rafles au sein des communautés à la rue, ainsi que les campagnes de communication et de dissuasion pour limiter un “appel d’air” spéculatif, qui n’a encore jamais été démontré empiriquement 3. Si des citoyens s’organisent pour proposer un accueil que l’État belge ne prend plus en charge, certaines voix s’élèvent pour dénoncer les priorités du gouvernement. Au-delà de l’exercice de communication délétère auquel se livrent certains ministres, le gouvernement souhaite désormais mettre sa priorité budgétaire dans la lutte contre la migration 4. Si cela peut sembler vain et inapproprié, celui-ci a même eu l’audace de mettre ces opérations à charge du budget… de la Coopération au Développement. Timur Uluç

1. Voir à ce sujet : https://www.amnesty.be/camp/ asile/prejuges/toutescesquestions 2. Source : International Organization for Migration 3. Hein de Haas, 2017 www.heindehaas.blogspot.com 4. C hambre des Représentants de Belgique, Note de politique Générale, Développement international – Agenda Numérique, 06/11/2017

n Reconnaissances du statut de réfugié n Octrois du statut de protection subsidiaire n Décisions négatives

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première demande d’asile

Quels sont les chiffres réels ?

Si l’on totalise l’ensemble des personnes migrantes internationales dans le monde, pour l’année 2015, on arrive à plus de 244 millions d’individus ! De quoi relativiser les quelque 15.000 personnes qui font la demande d’asile en Belgique chaque année.

FIGURE 2 - Top 10 des pays d’origine selon le nombre de personnes qui ont reçu une décision de reconnaissance de statut de réfugié en 2017

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n Nombre de personnes qui ont introduit une

histoire personnelle, le contexte socio-politique du pays dont il provient, afin de voir si celui-ci peut bénéficier d’une protection légale. Dans leur fonction, les agents chargés de cette procédure n’ont évidemment pas de place pour la flexibilité. Pourtant, la frontière peut sembler ténue entre une migration “forcée” et une migration “volontaire”. De nombreux exemples peuvent témoigner de la porosité réelle qui existe entre les deux phénomènes. Une personne dénuée de tout espoir de vie dans son propre pays, migre-t-elle réellement par choix ? Quid des réfugiés climatiques, ou économiques ? Comment répondre à ces demandes qui ne sont pas encore encadrées par les traités internationaux ?

FIGURE 1 - Évolution du nombre de personnes ayant introduit une demande d’asile (premières demandes et demandes multiples)

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demande d’asile multiple

En Belgique par exemple, c’est le CGRA (Commissariat général aux réfugiés et aux apatrides) qui chargera ses inspecteurs de juger de la situation d’un demandeur d’asile, d’examiner son

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n Nombre de personnes qui ont introduit une

ment un statut complémentaire, qui sert à protéger les personnes qui ne répondent pas à la définition de réfugié : il s’agit de la protection subsidiaire. Tous les individus qui risquent de graves préjudices dans leur pays d’origine (peine de mort, torture, traitements inhumains) doivent donc être protégés par le pays d’accueil 1.

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Un demandeur d’asile, quant à lui, est la personne qui a déjà réalisé son exode en quête de protection et se trouve dans le pays dans lequel elle demande refuge. Examinée par un organisme lié à l’État dans lequel elle se trouve, elle doit poursuivre une procédure qui déterminera finalement si la demande est acceptée ou rejetée. S’il est établi que la vie ou la liberté de

C’est la Convention de Genève de 1951 qui délimite très clairement le cadre permettant d’avoir accès à ce statut : il s’agit de tout humain qui craint “avec raison d’être persécuté du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays”. Il existe égale-

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Le mot “migrant” est le terme générique utilisé pour désigner toute personne qui quitte son pays pour chercher à vivre sur un autre territoire, de façon temporaire ou permanente. Les raisons qui poussent un humain à se déplacer de la sorte peuvent être nombreuses, certains faisant le choix volontaire de quitter leur foyer (pour des raisons touristiques, académiques, familiales, personnelles…), alors que d’autres sont contraints au départ par un environnement hostile (persécutions, guerre…).

cette personne est menacée dans son pays d’origine, elle obtiendra le statut formel de réfugié.

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Avant toute chose, il est primordial d’utiliser le vocabulaire adéquat lors d’une telle réflexion ! Régulièrement, des articles de presse sont faits dans l’urgence, sans prendre la peine d’avoir recours aux nombreuses nuances qui existent dans le vocable lié à la thématique.

Un migrant, c’est évidemment bien plus qu’un simple statut, c’est un parcours de vie complexe, qui justifie des milliers de kilomètres et d’euros investis dans un trajet souvent dangereux, dans l’espoir de quitter la terre qui l’a vu naître.

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Une personne migrante, c’est quoi qui ?

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PORTRAIT

L’histoire de Mahmoud : La vie plus forte que la mort !

Pour ce Pour Parler de Paix dédié aux migrations, nous avons choisi de présenter ce portrait publié en juin 2017 sur MagMa, magazine de journalisme citoyen sur la mixité et l’altérité 1. C’est une histoire vraie qui reflète la complexité d’un parcours de vie. Qui montre à la fois l’angoisse et l’espoir que peut revêtir le fait de devoir quitter son pays et de se retrouver dans un nouveau contexte avec plein d’idées et d’aspirations à construire. Voici l’histoire de Mahmoud. MAHMOUD est arrivé en Belgique en août 2015, après un périple de plus d’un an au départ d’Alep. Je l’ai rencontré au centre de demandeurs d’asile de Nonceveux, où aujourd’hui, il apporte son aide. Il m’a raconté son périple personnel pour dénoncer, pour expliquer, pour ne pas oublier, pour rassurer et donner de l’espoir… Il raconte son histoire avec une simplicité et une générosité qui vous épatent. Il va de soi que son parcours est exceptionnellement rude : de la décision de s’enfuir d’Alep à la complexité de son nouveau défi : s’adapter à une nouvelle culture et construire une nouvelle vie.

Les épreuves de la traversée Après avoir quitté son pays en guerre en mai 2014, Mahmoud est resté plus d’un an à Istanbul. Comme plus de 2 millions de Syriens, il y commence son parcours du combattant. Il apprend le turc, il vit avec le racisme ambiant qui l’empêche de trouver un emploi - même sous-payé - il vit dans un 3 pièces avec 9 personnes, mais rien de tout ça ne l’accable car il croit en l’avenir. S’il a d’abord songé à retrouver sa famille en Syrie, il a vite compris que c’est l’aventure européenne qui l’attendait. De la Turquie à la Grèce, de la Grèce à la Serbie, de la Serbie à la Hongrie, de la Hongrie à l’Allemagne, de l’Allemagne à la Belgique. Un mois agité : des échecs de traversées, des heures à ne pas bouger, des corps entassés, des pleurs, des espoirs, des décès, des camions, des bateaux, des policiers…. Il a vécu 11 mois au centre de demandeurs d’asile de la Croix-Rouge de Nonceveux où il a traversé son deuxième périple : l’aventure administrative qui lui donnera le droit d’asile en Belgique. C’est là

que je l’ai rencontré. Il n’y vit pourtant plus depuis 2 ans. Il aime y revenir pour accompagner ceux qui passent par là. Il prête main forte à l’équipe présente, il joue au grand frère et au traducteur. Il connaît la réalité du parcours que les résidents ont vécue et celle qui les attend.

langue et la nourriture. Le reste n’est que bagatelle. Son pragmatisme m’impressionne, son parcours est fort en émotion mais il sait ce qu’il doit faire.

Des valeurs familiales fortes pour affronter l’éloignement de sa famille et de sa culture

Quand je l’entends me répéter que la vie en Belgique est belle et que les gens sont fantastiques, je me dis que le pari de la fuite et de l’intégration est gagné. Et si chaque parcours est différent, l’histoire de Mahmoud permet de croire aux bienfaits de l’accueil, de la générosité et de la volonté.

À Alep, il était professeur de management à l’université, fils d’une mère enseignante et d’un père avocat. Il pense que sa famille, ouverte et éduquée, lui a donné les clefs pour pouvoir faire des choix en connaissance de cause. Sa capacité d’adaptation et sa force de réflexion, il les doit en partie à son éducation. Pendant son parcours, les mots de son père ont résonné plus d’une fois : “You must be strong and challenge yourself if you want to get somewhere” 2. Depuis, son père est décédé, mais pas sous les bombes qu’il évitait au quotidien ; un moindre mal pour son fils qui préfère relativiser. Le plus difficile pour Mahmoud, c’est d’être loin de sa maman et de sa sœur restées là-bas. De son pays, en revanche, il n’attend plus rien. Il sait qu’il n’y retournera jamais, il sait qu’il ne reverra jamais sa famille… et il vit avec. Mahmoud est le premier à dire que l’adaptation à une nouvelle culture est sans doute l’étape la plus fastidieuse. C’est la plus longue, celle qui demande un effort quotidien. Et selon lui, les deux choses les plus difficiles sont la

Ses projets pour venir en aide aux personnes sans-abri

Aujourd’hui, il vit dans son appartement à Liège, a trouvé un job de mise à jour d’un site internet, il donne des cours d’anglais pour débutants et prend lui-même des cours d’anglais pour passer son TOEIC 3. Il a de nombreux projets en tête qu’il tente de mettre en œuvre doucement mais sûrement. Leurs points communs ? Venir en aide aux personnes en difficulté. Il sait qu’il aura un jour toutes les clefs en main pour réaliser ses rêves. Parce que Mahmoud, pour moi, est un parfait exemple de ce qu’est l’optimisme ! Un bel exemple de résilience ? Sabrina Monteiro De Sousa Volontaire chez MagMa

1. http://www.mag-ma.org/ 2. Tu dois être fort et te motiver si tu veux arriver quelque part. 3. Test of English for International Communication.

Pour en savoir plus sur l’histoire de Mahmoud, rendez-vous sur sa page Facebook : @syrianrefugeedailylife

DOSSIER Migration : au-delà d’une crise, une obligation d’accueil

Les actions de solidarité qui sont nées ces derniers temps en Belgique pour venir en aide aux réfugiés sont non seulement une source d’espoir, mais également le signe qu’une interpellation citoyenne politique est bien présente. Face à certains discours simplistes qui véhiculent des stéréotypes, il semble aujourd’hui qu’émerge une question fondamentale : n’avons-nous pas un lien avec celles et ceux qui fuient la violence… pour préserver leur liberté de parole, pour préserver leur vie et celle de leurs enfants ? Ce dossier du Pour Parler de Paix n’a d’autre objectif que de poser quelques bonnes questions, entre autres sur l’une des causes de ces migrations forcées : l’exploitation abusive des ressources naturelles qui entretient certains conflits armés. N’avons-nous pas la responsabilité d’accueillir celles et ceux qui, indirectement, subissent les effets de notre consommation ? Et dans quelles conditions de vie voulons-nous le faire ? L’exemple de la scolarité des plus jeunes est une question, certes complexe, mais néanmoins essentielle. Nos responsables politiques, belges comme européens, devront en tenir compte s’ils souhaitent garder leur légitimité d’élus. Axelle Fischer


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PREMIÈRE REFLEXION Migrations, conflits et ressources naturelles

Migrations forcées : La face non désirée de la mondialisation

Depuis quelques années, la question migratoire est omniprésente dans le débat public. Dans un contexte européen d’austérité et de “menace” terroriste, l’arrivée des migrants ravive les peurs d’une partie de la population. Mais plutôt que de stigmatiser l’autre, les citoyens européens ne devraient-ils pas d’abord se questionner sur le rôle que jouent nos pays européens dans cette affaire ? NOTRE ÉPOQUE est celle de la mondialisation qui correspond à la libre-circulation des marchandises, des services, des capitaux, des techniques, de l’information et des personnes. Aujourd’hui, il n’est plus possible de vivre replié chez soi. Nous sommes en contact permanent avec le monde extérieur, ne serait-ce que par les biens que nous consommons. Les bananes d’Amérique centrale, le café de Côte d’Ivoire, ou encore notre téléphone portable dont les quelque 60 composants viennent des 4 coins de la planète. En effet, les chaînes d’approvisionnement de la plupart des produits, surtout les produits transformés, sont devenues extrêmement complexes et bien souvent opaques. Cette situation, globalement, nous l’acceptons et y trouvons même de nombreux avantages. Ces produits venus d’ailleurs sont entrés dans notre quotidien et il serait compliqué de devoir s’en passer.

Idées reçues sur les migrations Les flux humains posent quant à eux plus de problèmes que les flux commerciaux. Bien que nos sociétés occidentales aient connu différentes vagues de migrations donnant lieu aujourd’hui à un profil très diversifié (nous pouvons compter environ 184 nationalités différentes à Bruxelles 1), notre ouverture vis-à-vis des migrants reste pourtant mesurée. Les idées reçues sont multiples sur le sujet. Par exemple, l’attention remarquable accordée par les médias à l’arrivée des migrants en Europe donne l’impression d’un événement sans précédent et a priori problématique. La politique de fermeture aux niveaux belge et européen ne contribue pas non plus à construire une image positive des migrants. Heureusement, il n’est pas compliqué de trouver des voix qui proposent un autre discours, un discours nuancé déconstruisant les stéréotypes

et reposant sur des chiffres et des faits 2. Oui, il est vrai que le chiffre absolu des migrations a augmenté, tout comme la population mondiale. Quand on regarde par contre le chiffre relatif, il est étrangement stable depuis environ 25 ans : les migrants internationaux représentent 3 % de la population mondiale. Ce chiffre nous rappelle que la migration est un phénomène naturel qui existe depuis les débuts de l’humanité. Une autre idée reçue est que la majorité des migrants quittent leur lieu de vie, uniquement dans le but d’atteindre l’”eldorado économique” qu’est l’Europe. L’on peut pourtant penser que si les conditions de vie y étaient agréables, la plupart des migrants préféreraient rester chez eux. Mais ceux qui sont forcés 3 de partir y sont majoritairement contraints par la dégradation de leur cadre de vie. Les facteurs peuvent être multiples : famine, guerre, oppression politique, discrimination religieuse, sexuelle, etc. Les conflits représentent la cause principale des déplacements forcés. Notons aussi que 2/3 des personnes forcées de quitter leur maison restent à l’intérieur de leur pays. Pour partir loin, il faut avoir les moyens de le faire. Le voyage coûte cher et les plus pauvres ne peuvent se le permettre. L’Europe n’est que l’ultime recours. Prenons le cas de la Syrie : on compte environ 12 millions de déplacés (pratiquement la moitié de la population du pays) dont 7,6 millions sont des déplacés internes, 4,5 se trouvent dans les pays voisins et environ 350.000 en Europe 4.

Dans bien des cas, ce sont les conflits violents qui forcent les habitants d’un pays à chercher refuge ailleurs. Chez Justice et Paix, nous travaillons plus spécifiquement sur les conflits liés à l’exploitation des ressources naturelles. Selon les Nations Unies, “au moins 40 % des conflits qui ont éclaté ces 60 dernières années sont liés, d’une façon ou d’une autre, aux ressources naturelles” 5. Les ressources naturelles représentent en effet aujourd’hui un enjeu géostratégique majeur. Essentielles au bon fonctionnement des industries et plus globalement de notre système économique, la sécurité de leur approvisionnement est cruciale pour la bonne santé économique des grandes puissances internationales. Et la concurrence pour leur accès est rude compte tenu de la présence sur le marché de nouveaux acteurs qui visent à accéder au “développement”. Les BRICS 6 évidemment mais aussi de nouveaux pays émergents comme le Nigéria, la Turquie ou encore l’Indonésie. La pression sur les ressources est donc croissante, pression augmentée encore par le caractère limité de certaines d’entre elles : les ressources fossiles et minérales ne sont pas renouvelables. De plus, ces ressources tant convoitées se trouvent, pour certaines, concentrées dans un nombre restreint de pays. Quatre pays détiennent ainsi 69 % des réserves d’étain ou encore 78 % du manganèse 7. Plus les ressources sont concentrées dans un nombre réduit de pays, plus le risque de tension géopolitique et donc de conflit est grand. Malgré cette convoitise internationale pour les ressources naturelles, de nombreux pays du Sud riches en ressources ne parviennent pas à élever le niveau de vie de leur population. Ce phénomène est parfois appelé “malédiction des ressources”. Malgré l’abondance des ressources naturelles présentes sur son territoire, la population du pays reste dramatiquement pauvre. C’est le cas de la RD. Congo. Riche en bois, pétrole, diamant, or, cobalt, étain, coltan etc., le pays se trouve à la 182e place sur 187 pays au classement de l’Indice de Développement Humain 8. Depuis plus de 20 ans, le pays connaît aussi des conflits violents qui ont fait de nombreuses

victimes et de déplacés. Ces conflits sont principalement le fait de groupes armés ou de membres corrompus de l’armée régulière qui continuent de commettre des violences dans l’Est de la RD. Congo. Ceux-ci se financent notamment grâce au commerce des ressources minières qu’ils contrôlent. Ils assoient leur domination par des actes de violence à l’égard de la population, forcée de quitter sa maison. En 2015, la RD. Congo était ainsi le 6e pays d’où provenait le plus de réfugiés dans le monde, environ 500.000 9. Ces minerais, exportés à 90 % illégalement, se retrouvent bien souvent dans nos biens de consommation courants. Smartphones, ordinateurs, frigos, voitures, panneaux solaires, sont dépendants de minerais issus de pays, comme la RD. Congo, où ils alimentent des conflits et engendrent la dégradation du cadre de vie des personnes qui y habitent. Notre consommation de ce type de biens nous met en lien direct avec la situation des creuseurs artisanaux de la RD. Congo. Pouvons-nous l’ignorer ? Pouvons-nous faire le choix de ne profiter que de la face positive de la mondialisation ?

Pour une migration choisie Avec notre partenaire associatif Caritas International, il nous semble important de replacer les migrations dans un contexte plus global et d’en comprendre les causes. De dépasser les émotions pour établir une analyse réfléchie des raisons qui ont poussé les gens à partir. Et de voir comment agir pour lutter contre la dégradation des cadres de vie dans les pays tiers, dégradation dont nous portons bien souvent une part de responsabilité qu’il nous faut pouvoir reconnaître : responsables politiques, entreprises et consommateurs. Dans ce sens, nos

Les conflits représentent la cause principale des déplacements forcés.

responsables politiques ont un rôle à jouer notamment en régulant davantage les chaînes d’approvisionnement des ressources naturelles. En mettant en place des politiques commerciales conditionnées au respect des droits de l’Homme et de l’environnement. L’impact de ces politiques sur la dégradation des cadres de vie des pays tiers doit être pris en compte. Il nous semble important de repenser la vision des migrations de façon positive ; nous plaidons pour une migration libre, fidèle à la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, qui reconnaît le droit de quitter son pays, de décider de migrer. Rappelons que la grande majorité des migrants sont des migrants légaux : touristes, étudiants Erasmus, expatriés qu’on se garde bien d’appeler migrants. Tout comme le FORIM 10, nous pensons que “si les politiques de développement doivent servir un objectif en matière de migrations, c’est celui de créer les conditions de ce choix. Tant qu’il n’y aura pas de possibilités de vie décente, tant que les guerres et les violations des droits humains prévaudront dans certains endroits de la planète et tant que des États seront fragiles, la migration restera une nécessité plutôt qu’une option” 11. Géraldine Duquenne

1. http://ibsa.brussels/chiffres/le-saviez-vous/combien-de-nationalites-de-naissance-differentes-retrouve-t-onparmi-les-bruxellois#.WhLSvVXiaUk 2. Les fiches “N’importe quoi” d’Amnesty, Petit guide anti-préjugés du CIRE, Campagne “10 mythes” du FORIM… 3. Les déplacements forcés concernaient 65,6 millions de personnes en 2015. Ces personnes forcées au déplacement sont des réfugiés, des personnes déplacées à l’intérieur de leur pays et des demandeurs d’asile. Ce seuil des 60 millions n’avait jamais été franchi avant 2015. 4. Formation “Migrations et réfugiés : regard global et bilan de la situation en Belgique”. 5. http://www.un.org/fr/peacekeeping/issues/environment/resources.shtml 6. Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud. 7. B IHOUIX Ph. Et de GUILLEBON B., “Quel futur pour les métaux ?”, EDP Sciences, p.37. 8. Indice fondé par le Programme des Nations Unies pour le Développement qui mesure le développement humain sur base du PIB, du niveau d’alphabétisation et de l’espérance de vie à la naissance. 9. UNHCR. 10. Forum des Organisations de Solidarité Internationale issues des Migrations. 11. http://www.forim.net/sites/default/files/MYTH1_francais_IndF.pdf


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DEUXIÈME REFLEXION

Des politiques migratoires ou des politiques d’externalisation ? Dans une Communication publiée le 7 juin 2016, la Commission européenne a annoncé sa volonté d’entreprendre un nouveau cadre de partenariat avec les pays tiers 1 afin de “mieux gérer les migrations”. Problème : une partie de ces pactes est conclue avec des pays où les violations des droits de l’Homme sont fréquentes. Pour l’Union européenne, il est devenu acceptable d’y renvoyer les personnes ayant fui ces conditions de vie. Sommet de la Valette de 2015 2, s’inspire de l’accord UE-Turquie de mars 2016 3, tout en prenant un nouvel élan sous le nom de “migration compacts”.

Le retour des migrants comme nouvelle conditionnalité !

Refugee family from Afghanistan in Lesbos, Greece Copyright Lefteris Partsalis, Caritas Switzerland

Poursuivant le but de “gérer les migrations”, l’UE est en train de conclure des pactes (ou partenariats globaux) systémiques et mieux structurés avec les pays tiers considérés comme les principaux pays d’origine, de transit ou d’accueil d’un grand nombre de migrants.

Le non-respect des politiques européennes en matière de migration Face à l’intensification des flux migratoires vers le territoire européen en 2015, la Commission européenne a publié en mai de la même année un “Agenda européen en matière de migration” afin d’établir une politique commune et cohérente au niveau européen. De plus, la prise d’actions immédiates constituait une priorité pour faire face aux tragédies en Méditerranée. L’Agenda reprenait ainsi les mesures européennes existantes concernant la réduction de la migration irrégulière, la gestion des frontières et le renforcement de la migration légale, se proposait d’établir une politique commune européenne en matière d’asile et lançait le système de relocalisation, de réinstallation, de même que l’approche des “hotspots”.

Les États Membres de l’Union européenne (UE), sensés respecter ces injonctions, se sont révélés incapables de prendre des mesures coordonnées et solidaires pour répondre aux nouveaux flux. Certains, comme la Suède, la Norvège, l’Autriche, l’Allemagne et le Danemark, ont préféré préserver leurs intérêts nationaux, en réintroduisant par exemple des contrôles aux frontières internes du système Schengen. D’autres ont construit des murs pour empêcher les migrants de passer comme la Bulgarie, la Hongrie, la Macédoine, la Slovénie, l’Autriche et la France. Face à ces initiatives désordonnées, l’UE a décidé de mettre en place une coopération renforcée avec les pays d’origine et de transit des migrants. Une coopération sur la migration et la mobilité qui, dans la continuité du Processus de Khartoum de 2014 et du

Des accords ont été conclus avec le Liban et la Jordanie en 2016, tandis que la coopération avec la Lybie s’intensifie à travers l’entraînement des gardescôtes libyens et la lutte contre la traite des êtres humains, dans le cadre de l’opération EUVAFOR Med Sophia. Dans son quatrième rapport d’avancement, la Commission européenne se félicite des progrès effectués avec les pays considérés comme prioritaires 4 : le Nigeria, le Sénégal, l’Éthiopie, le Mali et le Niger. Les autres pays visés sont l’Afghanistan, le Pakistan, le Bangladesh, l’Iran, l’Egypte, le Maroc, la Tunisie, l’Algérie, mais aussi les pays de l’Afrique de l’Ouest et de la Corne de l’Afrique. Ces accords se basent sur des objectifs à court et à long terme, parmi lesquels on trouve “sauver des vies en mer”, mais aussi “accroître les taux de retour et de réadmission”. D’après nos responsables européens, ces partenariats visent à lutter contre les causes profondes de la migration. Des causes considérées comme politiques, dues aux violations de l’état de droit et de la

mal gouvernance ; économiques pour l’absence d’opportunités de travail ; et sociales sur la base du difficile accès à l’éducation. Les “leviers” dont la Commission parle représentent une nouvelle forme de conditionnalité : en échange d’une aide financière, mais aussi d’un soutien politique et diplomatique, ces pays doivent accueillir et réintégrer les “migrants irréguliers” dans leur société. Tant les pactes que l’aide financière mobilisée sont ciblés sur la base des caractéristiques de chaque pays concerné, comme dans le cas de la Lybie où l’entraînement des gardes-côtes libyens est lié à la position stratégique du pays, entre l’Afrique, continent de départ, et l’Europe, continent d’arrivée. Cette nouvelle politique s’apparente à un compromis pour la résolution de problèmes structurels à long terme et pour la prévention et l’adaptation rapides à la crise actuelle à court terme. Mais c’est aussi un compromis face à la contradiction entre d’une part la convergence des efforts sur la migration et la sécurité ; et d’autre part la défense de la stratégie et des valeurs de l’UE. Dans ce contexte, un défi crucial − pour l’UE mais aussi pour l’Union africaine - consistera à s’attaquer de façon efficace et réfléchie aux causes profondes de la migration forcée. Les causes profondes telles que la violence et la guerre, la persécution, la détérioration du climat ou le changement climatique en général. Comme l’ensemble des instruments actuels ne pouvait pas faire face à l’ampleur des défis à relever, l’UE a créé en 2015 au sommet de La Valette sur la migration le “Fonds fiduciaire UE-Afrique” (EU-Africa Trust Fund). Selon Caritas International et Justice et Paix, la philosophie sur laquelle cette politique semble s’appuyer - qui est celle de “plus de développement signifie moins de migration” - est imparfaite, mal conçue, et représente une trahison de l’objectif réel de l’aide au développement : atteindre les plus pauvres des pauvres. En d’autres mots, empruntés du nouveau jargon de l’Agenda 2030 5 : il trahit ceux qui sont les plus grands laissés-pour-compte, ceux furthest left behind.

L’exemple de l’Éthiopie Citons ici notre collègue de Caritas travaillant à Sodo, une ville du sud de l’Éthiopie. Suite à une conférence tenue récemment sur les facteurs d’attraction des migrations locales, il explique les différentes raisons de départ des jeunes éthiopiens. Les jeunes ne perçoivent pas beaucoup d’opportunités d’avenir dans les zones rurales. Il y a plus d’opportunités d’emploi dans les zones urbaines. Ils ressentent aussi la pression de ceux qui ont émigré auparavant. En général, le piètre état économique de la famille, la pression des pairs et le manque d’opportunités économiques non agricoles forcent les jeunes à chercher une vie meilleure en s’éloignant des zones rurales. La conséquence de la migration des jeunes est dévastatrice. Les jeunes migrants souffrent de problèmes physiques, mentaux et émotionnels”, ajoute-t-il. Beaucoup de jeunes éthiopiens migrent vers les grandes villes. La plupart partent pour l’Arabie Saoudite. C’est le cas de 90 % d’entre eux. Et certains d’entre eux - mais seulement une petite partie - vont essayer de venir en Europe.

Besoin d’une vision nouvelle Plus de 65 millions de personnes se déplacent aujourd’hui à la recherche d’un endroit pour survivre. Mais on parle trop peu de la nécessité de les aider en s’attaquant aux causes profondes de la migration forcée et du déplacement. Cependant, l’UE utilise des ressources de l’aide au développement, telles que le Fonds fiduciaire d’urgence pour l’Afrique, non seulement pour la gestion des migrations afin de “contenir” les personnes mais, de plus, ces ressources sont également orientées vers les pays “producteurs” de migrants. Est-ce ainsi que l’Europe prévoit de mettre en œuvre l’Agenda 2030 pour, sans laisser personne de côté, mettre fin à la pauvreté ?

Une “meilleure gestion des frontières” ne résoudra pas les causes profondes de la migration forcée et du déplacement.

Il est important de se rendre compte qu’une “meilleure gestion des frontières” ne résoudra pas les causes profondes de la migration forcée et du déplacement. Certes, le refoulement des gens sur la Méditerranée va les empêcher de se noyer. Mais nous les repoussons dans les États où ils se trouveront perdus dans les limbes : la Turquie, le Maroc, la Libye. Les pays européens, particulièrement ceux confrontés à l’extrême droite, veulent une solution rapide à leur “crise” migratoire. D’où les accords et pactes avec les pays tiers. Mais il y a un risque que l’approche actuelle puisse prospérer à plus long terme si, en cherchant des résultats rapides, l’UE et les États membres sous-estiment malencontreusement les efforts à déployer simultanément pour résoudre les crises économiques et politiques. Ceci pourrait compromettre le retour nécessaire à la stabilité. En Libye, par exemple, mais aussi plus au sud. En Éthiopie. Au Soudan. Et plus loin à l’Est. Là où l’aide ne suffit pas. Là où la paix est nécessaire. Veronica Lari (Justice et Paix) Tom Devriendt (Caritas International)

1. Plus de 16 pays, dont le Nigeria, le Sénégal, l’Ethiopie, le Mali et le Niger. 2. Il s’agit d’une coopération inter-régionale entre l’UE et l’Union Africaine qui prévoit, entre autres, de mieux gérer les flux migratoires au travers de : la lutte contre les passeurs, l’échange d’informations, l’assistance technique, les campagnes de prévention et le développement durable des pays d’origine et de transit des migrants. 3. L’accord prévoit un partage de responsabilité entre l’UE et la Turquie, selon la formule “1 pour 1”: pour chaque Syrien renvoyé en Turquie à partir de la Grèce, l’UE accepte d’accueillir un Syrien se trouvant dans des camps en Turquie. L’UE a aussi promis l’octroi de 3 milliards d’euros à la Turquie. 4. C ommission européenne, Cadre de partenariat pour les migrations : le point de la Commission sur un an de résultats et d’enseignements, 13 juin 2017. 5. Lors du Sommet sur le développement durable le 25 septembre 2015, les dirigeants du monde entier ont adopté l’Agenda 2030 pour le développement durable, qui comprend un ensemble de 17 Objectifs mondiaux de développement (ODD) pour mettre fin à la pauvreté, lutter contre les inégalités et l’injustice et faire face au changement climatique d’ici à 2030.


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TROISIÈME REFLEXION

L’accueil des élèves migrants dans nos écoles :

“Pacte pour un enseignement d’espérance” L’intégration des élèves migrants dans notre société passe par l’accès à l’enseignement, qui constitue un droit fondamental de l’enfant 1. L’accueil réservé à ces élèves dans notre système éducatif francophone permet-il cet espoir d’intégration ? Réponse : “Peut mieux faire”. EN FÉDÉRATION Wallonie-Bruxelles, depuis 2012, un décret réglemente la mise en place d’un Dispositif d’Accueil et de Scolarisation des élèves Primo-Arrivants (DASPA), anciennement les “classes passerelles”. Une réforme de ce dispositif est actuellement en cours de discussion au gouvernement et un nouveau décret devrait être d’application dès la rentrée 2018. La principale mission du DASPA est l’apprentissage intensif de la langue française et une remise à niveau adaptée pour que l’élève rejoigne le plus rapidement possible le niveau d’études approprié. En général, sa formation sera complétée par des cours favorisant l’accès à la culture belge et à son intégration dans notre société. Il peut bénéficier de ce dispositif entre une semaine et un an, cette durée pouvant être prolongée de 6 mois maximum. Ensuite, un conseil d’intégration, formé par le directeur, un enseignant du DASPA et un représentant du PMS, parfois aidé d’un membre d’une association, oriente l’élève primo-arrivant. Souvent, celui-ci intègre une 1ère ou une 2ème Différenciée 3 (le but ultime étant l’obtention du CEB) ou une 3ème Professionnelle. Si des difficultés plus

QU’EST-CE QU’UN ÉLÈVE “PRIMO-ARRIVANT” ? Sont considérés comme primo-arrivants, les élèves qui, au moment de leur inscription dans une école de la Fédération Wallonie-Bruxelles, ont au moins 2 ans ½ et moins de 18 ans, sont arrivés sur le territoire national depuis moins d’un an et ont introduit une demande de reconnaissance de la qualité de réfugié (ou se sont vus reconnaître la qualité de réfugié), sont mineurs accompagnant une personne ayant introduit une demande de reconnaissance de la qualité de réfugié (ou se sont vus reconnaître la qualité de réfugié), sont reconnus comme apatrides, ou sont ressortissants d’un pays considéré comme en voie de développement ou d’un pays en transition aidé officiellement par le Comité d’aide au développement de l’OCDE.

profondes sont constatées, il peut être orienté vers l’enseignement spécialisé, où il sera mieux encadré. Cependant, ce système n’est pas d’application pour les Européens, pour qui l’équivalence de diplômes prévaut et qui se retrouvent parfois intégrés dans des classes qui ne leur conviennent pas.

En pratique ? Un système de financement qui ne tient pas compte des réalités de terrain Le public DASPA augmente ou diminue au gré de l’actualité. Selon les chiffres de la Fédération Wallonie-Bruxelles,

Le but du DASPA est d’assurer “l’accueil, l’orientation optimale et l’insertion 2” des élèves primo-arrivants dans notre système éducatif. Il s’adresse également aux élèves de nationalité étrangère qui ont moins de 18 ans, qui fréquentent l’enseignement organisé ou subventionné par la Fédération Wallonie-Bruxelles depuis moins d’une année scolaire complète, qui ne connaissent pas suffisamment la langue et dont l’un des deux parents (ou tuteurs) au moins ne possède par la nationalité belge, sauf en cas d’adoption.

les élèves primo-arrivants en secondaire sont deux fois plus nombreux aujourd’hui qu’il y a 10 ans 4. Alain Clignet, coordinateur DASPA au Campus Saint-Jean à Molenbeek, constate en effet un afflux régulier de Roumains depuis 10 ans, d’Espagnols et d’Italiens suite aux crises économiques de leur pays, de migrants venus du Maroc et, dernièrement, de nombreux Syriens fuyant la guerre. Pour faire face à la demande, le nombre d’écoles proposant du DASPA a augmenté alors que l’enveloppe budgétaire reste fermée 5. Chaque équipe d’enseignants doit donc continuer à travailler avec moins de moyens, ce qui influe sur l’encadrement pédagogique et l’apprentissage des élèves qui ont besoin d’une aide plus ciblée. Entre autres conséquences, les élèves sont trop nombreux dans les classes 6. Faute de moyens, des élèves de 12-13 ans se retrouvent parfois en cours avec des élèves de 16-17 ans. De plus, Charlotte Béllière, enseignante en

DASPA au Campus Saint-Jean, nous apprend qu’au fil des ans, beaucoup d’initiatives mises en place ont dû être abandonnées comme l’encadrement logopédique ou le travail en binôme. Les professeurs ont perdu des heures de coordination pour organiser les remédiations, les projets extrascolaires ou gérer l’administratif du titulariat. Et, comment faire sans interprète pour organiser des réunions de parents ?

Un travail complexe pour les enseignants La tâche des enseignants de DASPA est difficile alors que ceux-ci ne sont parfois pas assez bien formés ou reconnus pour leur travail. Enseigner en DASPA demande une grande flexibilité et des nerfs solides. Les profils varient entre les élèves : certains maîtrisent déjà un peu le français car ils viennent de pays où le français est pratiqué (la RD. Congo), d’autres sont complètement analphabètes et n’ont jamais été scolarisés car ils n’ont connu que la guerre ou l’exil. Les élèves arrivent parfois en cours d’année scolaire, changent de classe selon leur niveau ou quittent la classe après une expulsion. Accompagner les élèves qui vivent un choc culturel n’est pas toujours évident. Ils doivent réapprendre les codes scolaires et trouver leur place au sein d’un groupe multiculturel, où les histoires de chacun sont parfois très dures. Cela peut prendre du temps pour qu’un élève soit prêt pour l’apprentissage, surtout s’il a été traumatisé par des événements dramatiques. Or, le dispositif n’a pas été pensé pour accompagner des traumatismes liés à la guerre et aider à gérer les difficultés psychologiques de ces jeunes. Au vu de tout ceci, il semble logique que les 18 mois maximum en DASPA ne soient pas une période suffisante pour des élèves analphabètes. Pourtant, ceux-ci sont souvent très motivés. Il faudrait donc leur donner une véritable chance de réussite en allongeant cette période. Dans une lettre ouverte parue dans La Libre Belgique, un groupe d’enseignantes en DASPA l’affirment : “Intégrer ces élèves rapidement dans des classes ordinaires, ce n’est pas leur faire un cadeau. C’est les préparer à l’échec et au déclassement”. […] Il serait préférable que la longueur du dispositif varie en fonction du profil de l’élève. Faisons confiance aux enseignants… 7”.

Un manque de vision globale Dès l’inscription, la gestion administrative des dossiers des élèves et leur accueil nécessitent un travail énorme et des moyens. Les critères d’inscription sont contraignants et les coordinateurs doivent gérer les différentes nationalités et les équivalences de diplômes. Certaines situations posent d’ailleurs question. Certains élèves migrants n’ont pas accès au DASPA car ils ne sont pas passés par l’administration à temps. L’organisation de l’accueil des migrants en Belgique rend certaines situations absurdes : difficile en effet de permettre un suivi scolaire quand, en raison de changements de son statut, l’élève déménage sans arrêt d’un centre à l’autre, voire d’une région linguistique à l’autre. Rappelons que l’immigration est gérée par le Fédéral, l’enseignement par les communautés et l’intégration des migrants par les régions. Selon qu’il se présente à un bureau d’accueil flamand ou francophone, le parcours d’un migrant n’est pas le même. Le choix d’un centre d’accueil par l’Office des étrangers ne tient pas toujours compte du parcours antérieur des enfants et des langues dans lesquelles ils ont étudié. Sans parler de l’organisation de l’enseignement francophone, divisé en réseaux qui ne communiquent pas toujours facilement entre eux. D’après Alain Clignet, il y a “un manque de vision globale et cohérente pour coordonner l’accueil des primo-arrivants, surtout chez les francophones”. Il souligne également un manque de vision “à long terme” et insiste : “Il faut rendre obligatoire le passage en DASPA sinon il entraîne un handicap scolaire et professionnel. La maîtrise de la langue est essentielle !”. Dans un même ordre d’idées, l’intégration de l’élève dans

la société ne s’arrête pas à l’école. Or, il faudrait renforcer et faciliter les liens entre les établissements scolaires, les centres d’accueil, les associations, les parents, etc.

Un écart social On peut également se poser des questions concernant la mixité sociale et l’égalité des chances dans ce système. Selon les chiffres de la Fédération Wallonie-Bruxelles, après une année passée en DASPA, environ 40 % vont en secondaire général, 45 % en secondaire professionnel et 15 % en technique de transition ou de qualification. Leur a-t-on réellement donné la possibilité de choisir leur orientation ? De plus, comme nous le fait remarquer le journaliste Olivier Bailly dans la revue Médor 8, sur 18 écoles secondaires qui accueillent des primo-arrivants à Bruxelles, 18 sont à discrimination positive 9 (D+) et se situent dans les quartiers pauvres d’Anderlecht et Molenbeek. Et pourquoi pas dans les autres communes ?

1. Selon l’article 28 de la “Convention internationale des droits de l’enfant”. 2. Selon le Décret du 18 mai 2012 visant à la mise en place d’un dispositif d’accueil et de scolarisation des élèves primo-arrivants dans l’enseignement organisé ou subventionné par la Communauté française. 3. Les classes du premier degré différencié, 1ère et 2ème D ou S sont des classes “préparatoires” au 2e degré du secondaire pour des élèves n’ayant pas les acquis du CEB (Certificat d’Études de Base), avec une volonté de proposer aux élèves un parcours différencié à l’aide de grilles horaires souples. 4. Nous sommes passés de 968 élèves en DASPA en secondaire en 2010 à 2.318 élèves en 2017 (Source : Belga). 5. Suite à une demande en hausse, le gouvernement a lancé des appels à candidature pour le lancement de nouveaux DASPA. En 2016-2017, 85 écoles proposaient du DASPA et 1.130 périodes (une période = 50 minutes de cours) supplémentaires ont été octroyées. Ce n’est cependant pas assez. 6. U ne classe doit compter minimum 8 élèves pour organiser un DASPA mais il n’y a pas de maximum. À partir de 13 élèves, l’école peut bénéficier de subsides complémentaires pour chaque nouvel élève mais l’encadrement perd en efficacité. 7. B ELLIERE, C., DOCK, J., LEROY N., MAINGAIN V., PONCIN M., ROUSSEAUX S., “Une école de la réussite ? Pas pour tout le monde…”, La Libre (Opinions), http://www.lalibre.be/debats/opinions/une-ecole-de-lareussite-pas-pour-tout-le-monde-opinion-59df84e5cd70be70bcf2abf4, [Consulté le 25 octobre 2017] 8. BAILLY, O., “Quelques lettres pour Leyla”, Médor, Automne 2016, pp. 20-27. 9. C es écoles reçoivent des subsides supplémentaires car elles accueillent un public plus défavorisé.


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TROISIÈME REFLEXION

Les élèves primoarrivants en secondaire sont deux fois plus nombreux aujourd’hui qu’il y a 10 ans.

ENTRETIENS : ◗ Alain Clignet, coordinateur du DASPA à l’école secondaire Campus Saint-Jean, Molenbeek. ◗ Charlotte Béllière, enseignante en DASPA à l’école secondaire Campus Saint-Jean, Molenbeek. ◗ Marie Defreyne, chargée d’éducation à la citoyenneté chez Caritas International.

BRÈVES

SOURCES : Un nouveau décret en préparation : l’occasion de combattre les injustices ? Actuellement, un projet de nouveau décret DASPA est en discussion au gouvernement, dans le cadre du “Pacte pour un enseignement d’excellence”. Les points suivants seront notamment abordés : la révision de l’enveloppe budgétaire et de l’octroi des périodes selon les besoins réels, la formation des enseignants, l’allongement de la période au sein du DASPA pour les enfants non alphabétisés ou non scolarisés et les adaptations administratives pour simplifier la gestion quotidienne. Ce décret devrait entrer en application dès la rentrée 2018. Jusque-là, les acteurs de terrain comme Alain Clignet ou Charlotte Béllière disent ne pas avoir été écoutés par rapport aux problèmes qu’ils soulèvent depuis de nombreuses années. Espérons cette fois que les auteurs du “Pacte d’excellence” prendront leurs remarques en considération et auront enfin une vision cohérente, sur le long terme, de leur politique d’accueil des élèves migrants. Il ne faut pas perdre de vue que le manque de moyens alimente les injustices sociales au lieu de les combler. En ne permettant pas aux enseignants d’encadrer les jeunes migrants correctement, nous enlevons à ces derniers le droit de pouvoir espérer en un avenir meilleur. Mais, en créant les conditions d’une intégration de qualité, on leur permet de trouver une place dans la société et d’être épanouis. C’est à travers notamment de hautes exigences en matière de justice et d’égalité des chances que l’on crée les conditions futures de paix, de vivre-ensemble et de cohésion sociale dans une société plurielle. Anne Berthet

◗ ALEN, P., MANCO, A., “Scolarisation des primo-arrivants en FWB. L’urgence d’un cadre adéquat”, Irfam, http://irfam.org/upload/ etudes/analyse012012.pdf [consulté le 2 novembre 2017]

CAMPAGNE “JUSTICE MIGRATOIRE” !

◗ ANONYME, “Primo-arrivants-DASPA (classes passerelles)”, http://www.enseignement.be/index.php/index.php?page=23677&navi=117 [consulté le 04 octobre 2017]

LES INJUSTICES liées à l’immigration sont innombrables ! Aujourd’hui, notre lieu de naissance détermine nos conditions d’existence. Le droit à la libre circulation est essentiellement réservé aux populations du Nord alors que ce sont principalement celles du Sud qui fuient la guerre et la désolation. Enfin, les politiques répressives et restrictives de la Belgique en matière de migration sont en totale contradiction avec ses engagements internationaux et les valeurs de solidarité, de partage, d’accueil.

◗ ANONYME, “Les élèves primo-arrivants sont deux fois plus nombreux en secondaire”, RTL Info (Belga), https://www.rtl.be/ info/belgique/politique/les-eleves-primo-arrivants-sont-deux-foisplus-nombreux-en-secondaire-966516.aspx [consulté le 2 novembre 2017] ◗ BACCICHET, M., “Débat sur les classes d’accueil pour les primo-arrivants”, La ligue, https://ligue-enseignement.be/ debat-sur-les-classes-daccueil-pour-les-primo-arrivants/ [consulté le 2 novembre 2017] ◗ BAILLY, O., “Quelques lettres pour Leyla”, Médor, Automne 2016, pp. 20-27 ◗ BELLIERE, C., DOCK, J., LEROY N., MAINGAIN V., PONCIN M., ROUSSEAUX S., “Une école de la réussite ? Pas pour tout le monde…”, La Libre (Opinions), http://www.lalibre.be/debats/ opinions/une-ecole-de-la-reussite-pas-pour-tout-le-mondeopinion-59df84e5cd70be70bcf2abf4, [Consulté le 25 octobre 2017] ◗ FERON, J., “Accueil et intégration des élèves d’origine immigrée”, Ufapec, http://www.ufapec.be/nos-analyses/accueil-etintegration-des-eleves-d-origine-immigree.html [consulté le 2 novembre 2017]

À rebours complet des discours qui font de la migration une menace, le CNCD-11.11.11, ses partenaires et ses membres (dont la Commission Justice et Paix) militent en faveur de “la justice migratoire”. À travers cette campagne 2017, ils exigent l’égalité des droits, un accueil digne des réfugiés dans leur pays d’accueil et davantage de voies légales de migration pour faire cesser les violences aux frontières. Nous aussi, au niveau local, nous pouvons agir ! En exigeant, par exemple, que notre commune soit hospitalière : www.communehospitaliere.be

À VOS CRAYONS ! LES INJUSTICES vous démangent et vous brûlez d’envie de vous exprimer ? La nouvelle rubrique

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Dès le prochain numéro de notre revue, nous serons prêts à accueillir vos textes (témoignages, poésies, plaidoyers) ou vos créations artistiques engagées (dessins, photos) ! Pour toute idée ou proposition, n’hésitez pas à contacter Timur Uluç : timur.uluc@justicepaix.be

◗ HOUSSONLOGE, D., “L’accueil des primo-arrivants à l’école, dispositifs législatifs”, Ufapec, http://www.ufapec.be/nos-analyses/3513-primo-arrivants.html [Consulté le 2 novembre 2017] ◗ LOVENFOSSE, M.-N., “DASPA Pour reprendre pied à l’école… et dans la vie”, Entrée libre, n°94, décembre 2014, pp. 14-15 ◗ “Décret du 18 mai 2012 visant à la mise en place d’un dispositif d’accueil et de scolarisation des élèves primo-arrivants dans l’enseignement organisé ou subventionné par la Communauté française” : http://www.gallilex.cfwb.be/fr/leg_res_01.php?ncda=37785&referant=l02&bck_ncda=5108&bck_referant=l00 [Consulté le 25 octobre 2017] ◗ “Archives de la Commission de l’éducation du Parlement de la Communauté française. Session 2016-2017” : http://archive.pfwb.be/1000000020650d8?action=browse [consulté le 2 novembre 2017] ◗ “Convention internationale des droits de l’enfant”, Unicef, https://www.unicef.fr/sites/default/files/userfiles/50154.pdf [consulté le 11 novembre 2017]

COMMISSIONS RÉGIONALES : UN MOMENT DE PARTAGE RICHE ! LE 30 SEPTEMBRE DERNIER, les permanent·e·s de Justice et Paix ainsi que les volontaires des Commissions de Namur et du Brabant wallon ont été chaleureusement accueillis par la Commission régionale de Liège. L’occasion de s’informer sur les actions que nous menons dans nos régions respectives, d’imaginer nos collaborations futures et de découvrir, à l’initiative du groupe de Liège, un projet concret pour davantage de dignité et de justice : la Casa Béthanie, un foyer où vont vivre en communauté des volontaires et des personnes issues de la rue.


PUBLICATION

Une école hors les murs Transmission, émancipation et citoyenneté LE GROUPE DE TRAVAIL “PÉDAGOGIE” de la Commission Justice et Paix s’est interrogé, pendant plusieurs mois, sur les liens entre l’éducation permanente et le monde de l’école. Ces deux lieux d’éducation, même si leurs approches et méthodologies sont très différentes, partagent un objectif commun : vouloir favoriser l’émancipation de leurs publics respectifs. À l’issue de cette réflexion, l’étude explore ce concept, tel qu’il est envisagé d’une part et de l’autre. Une intuition : le monde de l’école pourrait s’inspirer des réflexions du mouvement d’éducation permanente pour relever le défi de l’émancipation. Sous la coordination de Laure Malchair Prix : 8 euros, à commander auprès de info@justicepaix.be (+32 2 738 08 01)

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CONTACTS Arnaud Gorgemans, président Axelle Fischer, secrétaire générale Hannane Ahedar, Miguel Arrimadas, Chantal Bion, Clara Debeve, Géraldine Duquenne, Timur Uluç, Valéry Witsel, permanents Volontaires ayant collaboré à ce numéro : Laetitia Belsack, Anne Berthet, Esi Darko, Tom Devriendt, Véronica Lari, Sylvain Lauwers, Sabrina Monteiro De Sousa, Angela Ocampo. Design : www.acg-bxl.be Dessin : www.sylvainlauwers.be

Publié avec le soutien de la Direction Générale de la Coopération au Développement et Aide Humanitaire et de la Fédération Wallonie-Bruxelles

N’hésitez pas à nous contacter ! Commission Justice et Paix francophone de Belgique, asbl Rue Maurice Liétart 31/6 B - 1150 Bruxelles - Belgique Tél. +32 (0) 2 738 08 01 - Fax +32 (0) 2 738 08 00 E-mail : info@justicepaix.be Facebook : facebook.com/justicepaix Twitter : @Justice_et_Paix

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