RECHERCHE MÉDICALE
Recherche médicale contre le cancer : le chien au service de l’homme
L
a problématique de la détection du cancer est directement liée à l’efficacité des tests diagnostiques, et plus particulièrement sur la sensibilité et la spécificité des biomarqueurs. Le cancer de la prostate est l’un des plus fréquents chez l’homme de plus de cinquante ans. Son dépistage repose sur le dosage du PSA (Prostatic specific antigen) sanguins et sur un examen clinique. La sensibilité et la spécificité de ces outils ne sont cependant pas optimales et aucun témoin urinaire du cancer n’est actuellement disponible. Aussi, d’importants efforts sont faits par les équipes de recherche pour aboutir à une détection précoce et fiable, notamment par la détermination de nouveaux biomarqueurs volatils présents dans les urines.
Historique et concept Depuis 2007, le service de santé des armées (SSA), l’hôpital Tenon à Paris et les états-majors des armées (Terre et Air) œuvrent ensemble sur les capacités olfactives du chien à dépister le cancer de la prostate chez l’homme. À l’initiative du Professeur Cussenot, chef du service d’urologie à l’hôpital Tenon, une collaboration scientifique est née entre des médecins des hôpitaux
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Actu ActuSanté Santén° 154 n° 150••Été Printemps 2019 2018
publics, des vétérinaires des armées et des cynotechniciens militaires afin de mener ces travaux de recherche, qui constituent une première en France. Dans d’autres pays, la détection du cancer par les chiens sur des échantillons de fluides biologiques a été appliquée à de nombreux cancers (poumons, vessie, sein, mélanome) avec des résultats probants. La publication princeps date de 2004 sur le cancer de la vessie, où WILLIS et al. ont utilisé comme hypothèse de travail l’existence des biomarqueurs urinaires. Dans le domaine urologique, les marqueurs ur inaires sont particulièrement intéressants du fait de leur contact avec la tumeur. Ce principe de la détection du cancer par l’odorat canin repose sur un concept simple : la reconnaissance d’odeur particulière due à des quantités variables de composés organiques volatils produits par la tumeur et présents dans les fluides biologiques. Pourquoi le choix du chien pour ces études ? Leurs performances olfactives exceptionnelles sont depuis longtemps mises à profit dans les armées, la gendarmerie et la sécurité civile pour la détection : recherche de personnes,
de stupéfiants, d’explosifs, d’armement. Ces capacités sont en effet bien supérieures à celles de l’homme, les chiens possédant plus de 200 millions de cellules olfactives, contre une dizaine de millions chez l’homme. Ils ont également une très bonne mémoire olfactive et possèdent la faculté de discerner les odeurs non seulement sur la plan quantitatif mais aussi sur le plan, qualitatif avec un maximum de précision et d’efficacité.
Nos travaux de recherche Nos travaux de recherche sur le dépistage du cancer de la prostate et l’aide au diagnostic apportée par le chien s’échelonnent sur deux périodes. Entre 2007 et 2010, la détection a été étudiée avec la participation de l’armée de l’ Air. L’objectif était alors d’évaluer les caractéristiques et résultats d’un test de détection olfactive du cancer de la prostate sur des échantillons d’urines, par des chiens militaires préalablement dressés. Aspirant, berger belge malinois est sélectionné pour cette étude. Son dressage est basé sur le jeu et s’effectue selon une méthode de renforcement positif (récompensé quand il marque le bon échantillon, échantillon « cancer »).