4 minute read

Perpétuer le combat de Cabu et de tous les autres

Née pour défendre la liberté d'expression et célébrer l'oeuvre du caricaturiste Cabu, châlonnais d'origine, la Duduchothèque vivra, pendant la Semaine de la presse, au rythme des ateliers, des tables rondes et des souvenirs partagés. Ce vendredi, l'emblématique

Citroën Trèfle de Jean Cabut et Georges Schmitt, son ami de toujours, s'installe sur place.

Advertisement

Cette année encore à Châlons, la Duduchothèque réunira bon nombre de temps forts à l'occasion de la Semaine de la presse et des médias. Le tout sous la houlette de Véronique Cabut, veuve du regretté dessinateur, et en présence d'auteurs, de journalistes, de caricaturistes et de proches de Cabu, tous portés par une même envie : célébrer et défendre, à son image, la liberté d'expression et la laïcité. Mais les actions menées au sein de ce lieu d'exposition et de documentation ne sauraient se limiter à une semaine, aussi dense soit-elle. « Nous accueillons en moyenne 5 000 élèves dans l'année, de la maternelle au post-bac, précise Pascaline Watier, responsable de la Duduchothèque. Sans compter les visiteurs non scolaires. »

Quatre ans après le début de l'aventure, l'équipe reste convaincue, sinon plus, de l'importance de ses missions : sensibiliser, dès le plus jeune âge, à la citoyenneté, à l'ouverture d'esprit et au jugement critique. « On l'a mesuré dès les premières rencontres organisées avec l'association Dessinez Créez Liberté (ndlr : fondée par Charlie Hebdo et SOS Racisme au lendemain des attentats de janvier 2015). Lorsqu'on a évoqué les attentats et la notion de liberté, des élèves de CM1-CM2 nous ont dit que jusqu'ici, ils sentaient bien qu'il y avait quelque chose de grave, mais qu'ils ne comprenaient pas vraiment quoi. Le fait de leur expliquer, de façon pédagogique et non polémique, prend tout son sens. » Même méthode pour aborder d'autres atteintes aux libertés : la censure et l'emprisonnement de journalistes dans certains pays, l'interdiction pour les filles d'aller à l'école dans d'autres, etc. « Rien n'est acquis. Il y a encore beaucoup à faire pour la liberté et la laïcité. L'actualité nous le rappelle constamment. » Y compris en France.

En marge des projets imaginés avec les scolaires et les jeunes de la Protection judiciaire, notamment un reportage radiophonique sur l'événement, différents rendez-vous s'ouvriront au grand public. Une table-ronde sera consacrée à la lutte contre les discriminations en lien avec la Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme (Licra), plusieurs journalistes na- tionaux et le chercheur Laurent Jolly, auteur de l'ouvrage « Cabu, la rafle du Vél d'Hiv », qui rassemble les illustrations réalisées en 1967 par Jean Cabut pour un livre dédié à cette page de l'Histoire. Autre moment phare : la venue de Sylvain Gilbert, le fils du « Père Gilbert », premier à exposer, vers 1950, les œuvres de Cabu dans son salon de coiffure, rue Léon-Bourgeois. Le journaliste châlonnais Fabrice Minuel et Georges Schmitt, tous deux amis de Cabu, partageront également leurs souvenirs, parmi lesquels, forcément, ceux de la mythique Citroën Trèfle. Elle rejoint la Duduchothèque ce vendredi 10 mars, pour leur plus grand bonheur. « Quand ils la verront, les plus anciens se replongeront dans ces belles années, lorsqu'elle arpentait les rues de la ville avec Georges et Cabu à bord, les transportant vers une sortie champêtre ou un énième canular », souligne Fabrice Minuel. Pour la petite histoire, Jean Cabut et Georges Schmit se sont connus au Grand lycée de Châlons - devenu le lycée Bayen - et ont fait les 400 coups ensemble. « On faisait partie tous les deux du groupe théâtral, se remémore ce dernier. On avait aussi un goût prononcé pour les canulars et les voitures anciennes. En 1959, au cours d'une permission de Jean qui avait été incorporé en Algérie, on est allé acheter la Trèfle près d'Haussignémont, dans le vitryat. J'avais déjà une petite Rosengart des années 30, mais on voulait une décapotable. Elle date de 1923 ! » Et elle leur a valu de sacrées épopées. « Une fois sur deux, on tombait en panne, sourit Georges Schmitt. C'était la croix et la bannière pour la réparer ou trouver

« On était très attaché à cette voiture » des pièces. Mais on était très attaché à cette voiture. On allait se promener en forêt, on partait en vacances, on a même fait mon mariage avec. Jean était mon témoin. Le voile de mon épouse s'est pris dans les roues de la Trèfle au cours d'une marche arrière ! » Car ce modèle, doté d'une vitesse moyenne de 40 km/h, ne gravissait les grandes côtes qu'en marche arrière. Celles de Verzy ou de Beaulieu s'en souviennent encore. « Les gens se marraient en nous voyant, c'était une autre époque ! Et pour la conduire, c'était quelque chose. L'accélérateur se situe entre le frein et l'embrayage. Pour passer les vitesses, il faut débrayer doublement. Notre dernière sortie avec Jean, c'était en octobre 2014. Trois mois avant qu'il ne soit tué. » Georges Schmitt a cédé sa part à Véronique Cabut, qui a elle-même fait don de la Trèfle à la mairie de Châlons. « La Duduchothèque, c'est le meilleur endroit où elle pouvait être, concède-t-il. Elle sera conservée et valorisée. Elle a été entièrement rénovée il y a une quinzaine d'années. Elle est toute neuve et peut encore très bien rouler ! » Il n'est donc pas impossible de l'apercevoir, un de ces quatre, circuler joyeusement dans les rues de Châlons.

Sonia Legendre 4 Semaine de la presse et des médias, Duduchothèque et auditorium de la bibliothèque Pompidou (68, rue Léon-Bourgeois, Châlons) Table-ronde avec Laurent Jolly jeudi 16 mars à 18 h Ateliers avec les journalistes et dessinateurs samedi 18 mars de 14 h 30 à 17 h 30 – Rencontre avec Sylvain Gilbert, Fabrice Minuel et Georges Schmitt dimanche 19 mars à 15 h Inscriptions obligatoires : duduchotheque.cabu@chalonsenchampagne.fr.

Hommage aux victimes du terrorisme

À l'occasion de la journée nationale d'hommage aux victimes du terrorisme, une cérémonie se tiendra ce samedi 11 mars à partir de 11 h à la Duduchothèque, en présence du préfet de la Marne, du maire de Châlons et des jeunes conseillers municipaux. Plusieurs textes seront lus solennellement, dont le poème « Liberté » écrit par Paul Éluard en 1942. Accès libre.

This article is from: