couverture : portrait de Therese Clerc (fondatrice de la maison des Babayagas, maison de retraite autogĂŠrĂŠe Ă Montreuil) par Elisabeth Schneider (photographe)
merci à Marie-Hélène Brebion, au personnel du domicile-service Voisin’Age de Rezé, à Julie Mariel, à Christophe Lefevre, à Gengu Owzareck et Monsieur Guillou et la directrice de la crèche des «Lapins Bleus», à Katell Brieuc, à Christine Desbois, qui ont accepté avec plaisir les interviews et m’ont donné accès à leurs documents. au caue44 pour l’accès aux archives et à leur photocopieuse, à Lorène Chiron, Julie Derré, Ana Bernard et Marie Tesson pour nos échanges autour de notre sujet commun, à Marie-Paule Halgand et Élisabeth Pasquier pour leur implication, leur expérience et tous leurs précieux conseils, et à Agathe Moison, pour ses nombreuses relectures et sa persévérance.
05 préambule 09 problématique 11 méthodologie 17 introduction 21 la vieillesse et son habitat 23 perception et intégration sociale de la vieillesse au cours du temps 24 la vieillesse, un sort individuel transformé en grand destin collectif 30 la vieillesse devient l’objet d’une politique spéciale à résoudre 37 aujourd’hui : qu’est-ce qu’être âgé? 38 il n’existe pas une personne âgée mais des personnes âgées 41 derrière les mots 46 quel est notre rapport à la vieillesse? 51 pratiques résidentielles des personnes âgées 51 prendre racine : l’habitat comme repère structurant 55 vieillir en logement social : subi ou choisi? 62 conclusion : trouver un équilibre 65 les nouveaux lieux du vieillir 67 l’innovation à grande échelle : le maintien à domicile 67 une adaptation matérielle et humaine 77 inscrire les personnes âgées au coeur de la cité 85 l’innovation à petite échelle : l’habitat, source de rencontre 86 quand l’habitant réinterroge son habitat 93 qu’est-ce qu’un logement pour personne âgée?
100 favoriser le contact social autour de l’habitat 103 conclusion : un habitat adaptable ou adapté? 109 conclusion : repenser nos modes d’habiter pour accueillir la vieillesse annexes 115 lexique 119 documents complémentaires 123 bibliographie
préambule Le logement social et les personnes âgées sont les deux grandes notions de ce mémoire, il convient d’expliquer brièvement en quoi ils sont intéressants individuellement, mais aussi comment ils sont liés et forment une problématique.
le logement social ?
1
Institut Kervégan, Nantes, 2010.
préambule
Beaucoup de personnes sont concernées par ce type de logement, en effet : « 75% de la population française peut rentrer dans un logement social ». Ce chiffre énorme est donné ici par le directeur d’agence du bailleur social Habitat 44-Rezé, mais aussi par de nombreux autres bailleurs sociaux. Il montre l’importance de la demande et l’urgence du développement de cette offre. En Loire-Atlantique, « deux tiers des ménages de l’agglomération nantaise sont éligibles au parc HLM mais la part du parc locatif social dans le parc du logement elle n’a cessé de régresser en dix ans pour ne plus représenter que 18% du parc total de l’agglomération »1 selon l’institut Kervégan. Cette donnée constitue un indicateur clé qui impose l’augmentation de la construction de logements sociaux. Mais augmenter signifie s’adresser à plus de personnes et donc proposer une diversité d’habitation plus large. C’est-àdire s’adapter aux multiplicités des types d’habité. Le logement social paraît donc primordial à étudier pour comprendre la fabrication de la ville.
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les personnes âgées ? Aujourd’hui, en France, la population vieillit. Cela est dû à une augmentation de l’espérance de vie favorisée par un progrès des soins médicaux et de l’hygiène de vie en général. Les personnes âgées ont changé : elles sont actives et en bonne santé plus longtemps. Ce constat amène à reconsidérer la place des plus âgés d’entre nous, non plus à l’extérieur, mais au sein de la société.
le logement social et les personnes âgées ? De plus en plus de personnes sont donc éligibles au logement social notamment chez les personnes âgées, plus précaires financièrement en rapport avec leur retraite qui est souvent moins importante que leur salaire d’actif. Alors qu’est-ce qu’être âgé en terme de logement social ? Le logement social peut être un avantage pour la personne âgée qui souhaite en général rester vieillir à domicile puisque : en payant le loyer mensuellement, on peut le conserver toute sa vie sans en être délogé. Le logement social offre donc une sécurité d’habitat. Par contre, c’est un logement qu’on ne peut transformer, car il ne nous appartient pas juridiquement, nous n’en sommes pas propriétaire. L’adaptation dont une personne vieillissante peut avoir besoin est alors difficilement exécutable par elle-même, financièrement et légalement. Quels sont les acteurs pouvant aider les personnes âgées et vers quoi aller en terme d’innovation afin d’intégrer socialement cette population ?
problématique et plan
Le sujet est traité d’abord historiquement afin de comprendre l’évolution du rapport à la condition âgée dans notre société. Nous verrons que les grandes évolutions en terme d’aides sociales et de logements pour les personnes âgées vont progressivement leur permettre de mieux s’intégrer dans la société. Pour comprendre ce qu’il reste à faire, il convient d’analyser ensuite les comportements résidentiels des personnes âgées. Enfin dans la deuxième partie, nous montrerons comment les acteurs du logement social s’occupent de l’habitat des personnes âgées. Nous verrons qu’une réflexion sur l’habitat pour les personnes âgées ne se limite pas à la seule adaptation matérielle, c’est aussi un travail social qui doit être effectué. Parler de la vieillesse en logement social c’est aussi parler des autres populations vulnérables, les problématiques ne sont pas exactement les mêmes mais elles se ressemblent. Et donc prévoir un logement social « pour » les personnes vieillissantes, c’est prévoir un logement pour tous. C’est reconnaître les différentes populations, leurs problématiques, leurs différences et comprendre alors comment les intégrer dans la ville.
problématique
Quelle place à la personne âgée aujourd’hui et à travers les âges dans notre société, et quels enjeux cela implique sur l’habitat et particulièrement l’habitat social ? Ce dernier ayant un attrait particulier car il reflète la gestion de la politique publique du logement.
9
méthodologie La recherche a été menée progressivement au fil des entretiens, des lectures de documents officiels et d’ouvrages. Deux temps ont scindé cette exploration : l’étude de terrain puis la recherche bibliographique.
Les entretiens ont un peu tous été conduit de la même manière : j’avais préparé dans une logique exploratoire une liste de questions afin de comprendre les fonctionnements de chaque projet, de chaque acteur et leurs rôles respectifs. Finalement, les entretiens ont été menés de manière très libre. Les interlocuteurs répondaient souvent à mes questions avant que je ne les pose. Tous ces entretiens m’ont permis d’approfondir le sujet, les hypothèses déjà formulées ou au contraire de bouleverser mes paradigmes.
1
voir définition dans le lexique du livret L’amicale du logement social.
Tout d’abord, mon intérêt sur les logements sociaux pour personnes âgées s’est focalisé sur le système de « domicileservice »1, novateur et inconnu pour ma part. J’ai très, trop, vite effectué un premier entretien avec la directrice du secteur gestion locative et social du bailleur social Habitat 44 : MarieHélène Brebion. Ma connaissance sur le sujet était encore trop floue, mes questions sont restées trop générales. J’aurais pu
méthodologie
le récit par étape de mes entretiens.
11
trouver toutes les informations sur les plaquettes informatives distribuées par Mutualité Retraite. Néanmoins, cette brève entrevue téléphonique, m’a mise en confiance dans la prise de contact. J’ai donc voulu approfondir mes connaissances sur le sujet et je suis allée à la rencontre d’une des gouvernantes du domicile de Rezé. J’ai choisi celui-ci, car c’est le premier qui s’est mis en place dans la région Loire-Atlantique, j’ai pensé que cela permettait un recul suffisant pour savoir si ce dispositif fonctionnait ou pas. Lors de l’entretien, j’ai aussi pris contact avec l’une des habitantes, c’était celle qui passait le plus de temps dans le salon commun, elle m’a fait visiter son appartement. J’ai ensuite effectué un entretien avec l’Assistance Coordinatrice Réseau à Mutualité Retraite : Julie Mariel. Suite à ces entretiens, j’avais l’impression d’avoir fait un tour complet sur la question du domicile-service, il me manquait néanmoins un acteur important : le bailleur social. J’ai donc pris contact avec Habitat 44 et j’ai rencontré Christophe Lefevre, directeur de l’agence à Rezé. Cet entretien a été marquant et cela m’a permis d’orienter mes recherches différemment, d’élargir mon champ de vision. Les domicilesservices ne sont pas une solution adaptée à tous, de par leur prix notamment. Les bailleurs réfléchissent plutôt à des projets de plus grande ampleur qui peuvent s’appliquer à tous leurs locataires. Je me suis alors tournée vers le projet des Logements Bleus qui me paraissaient une solution de plus grande échelle, plus démocratique. Je me suis alors documentée sur le sujet puis ai décidé d’aller
Septembre
Octobre
Novembre
Décembre
Domicile-service frise organisation des entretiens sur l’année
Habitat 44
Mutualité Retraite
Janvier
Février
Ha
rencontrer l’un des acteurs de Nantes-Habitat, le bailleur qui s’occupait de ce dispositif. Cependant, j’ai dû y retourner plusieurs fois pour obtenir un rendez-vous.
Peu de temps après Nantes-Habitat m’a proposé un entretien avec la responsable du secteur des logements bleus : Katell Brieuc. Cet entretien que j’attendais impatiemment depuis longtemps m’a permis d’éclaircir ma vision sur ce dispositif qui consistait aussi beaucoup à mettre en place un suivi social avec les habitants. Cette veille sociale m’intéressant beaucoup, j’ai ensuite pris contact avec le CLIC Nantes Entour’âge2. Ma volonté était de suivre une des examinatrices durant une visite d’un logement bleu afin de comprendre le procédé, mais
Janvier
Février
Mars
Avril
Habitat 44-Rezé
Mai
Juin
CS + CLRPAC Nantes-Habitat
Juillet
Août
CLIC de Nantes
1
Voir les définitions dans le lexique p. 115 et p. 116
2
voir la définition dans le lexique du livret commun l’Amicale du logement social
méthodologie
En attendant une réponse positive, je me suis tournée vers le projet de l’ilot Bessonneau à Couëron, il m’intéressait vivement, car il avait été mis en place par les habitants et la municipalité. Je suis d’abord allée visiter le site et j’ai aussi eu l’occasion d’enregistrer quelques paroles d’habitants et d’interviewer la directrice de la crèche « Les lapins Bleus ». J’ai ensuite pris contact avec la mairie afin de rencontrer des membres du Conseil des Sages et du CLRPAC1. J’ai rapidement pu obtenir un entretien avec : Gengu Owzareck et Monsieur Guillou. Cet entretien m’a permis de constater que les habitants pouvaient être de réel moteur de démarche, mais qu’ensuite leur rôle était amoindri notamment lorsqu’aucun des membres de ces deux instances ne vivaient sur le site, la dynamique sociale est difficile à lancer, ils se sentent un peu trop étrangers pour être encore interventionnistes sur le projet.
13
aussi de rencontrer un habitant. Après réflexion, ma demande s’est centrée sur la simple interview de l’un des examinatrices du CLIC : Christine Desbois. En effet, visiter un appartement était chose facile sur le site de Nantes-habitat (une vidéo explicative parcourt un logement adapté) et rencontrer un habitant ne me permettait pas d’avoir un réel constat global de la réussite ou non de ce dispositif. Je me suis plutôt penchée sur tous les documents que Katell Brieuc m’avait fournis et qui récapitulaient les résultats de satisfaction des habitants selon des questionnaires distribués par le bailleur. En parallèle, je me suis intéressée à deux opérations architecturales spécifiques présentes sur le département, effectuée par des architectes que Marie Tesson a pu rencontrer. Ainsi, l’entretien qu’elle a eu avec eux m’a permis de récolter les informations sur ces logements « pour personnes âgées ».
une recherche bibliographique
Puis après avoir effectué tous ces entretiens, mon travail de recherche s’est plutôt porté sur l’évolution historique de la perception des personnes âgées et de leur habitat. Social ou non. L’étude des grandes réformes faisant évoluer la réflexion sur la vieillesse, m’ont permis ensuite de me documenter avec des ouvrages plus sociologiques sur la condition et notre rapport à la vieillesse en général. La recherche des ouvrages s’est faite par mots clés à la bibliothèque de l’ENSA- Nantes et à la médiathèque Jacques Demy de Nantes.
choix des images
Les photographies des projets sont personnelles ou tirées des sites des architectes ou des mairies. Celles choisies pour la première partie sont à titre illustratives, elles proviennent soit : - des documents d’informations du CLIC, de la ville de Nantes, de Mutualité Retraité ou des bailleurs sociaux. Ce choix permet de rendre compte de la représentation des personnes âgées aujourd’hui dans notre société.
- d’émissions, de bande dessinée, de peinture, de travaux photographiques d’artistes ou d’image cinématographique. Ces autres visions de la vieillesse, peut-être plus décomplexées, livrent des points de vues divers mais personnels.
rédaction
Elle a réellement débutée en fin d’année universitaire 2014 quand tous mes entretiens ont été effectués. L’écriture a commencé par la description précise de tous les acteurs qui entraient en compte dans la problématique. Pour mettre en place le plan, j’ai effectué des schémas représentants les liens qu’avaient chaque acteur entre eux, et leur rôle. L’analyse n’a pu commencer qu’à partir de ce moment-là. Avant cela, les premiers écrits ont été tenus sur un journal de bord, où étaient aussi annotées les remarques soulevées lors des réunions avec les professeurs.
conclusion
méthodologie
La première partie historique, contextuelle a été plus difficile à écrire que la deuxième partie que je maitrisait mieux. En effet, les notions de cette partie m’étaient plus familières à force de les avoir côtoyées tout au long de l’année lors des entretiens. Et la première partie m’a demandé un long travail de lectures croisées pour comprendre l’évolution et les notions différentes sur la vieillesse au cours du temps.
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J’habite une maison, non isolée, faisant partie d’une société, d’une ville, d’un village. De plus en plus dans une grande ville d’ailleurs, comme 80% de l’humanité. La société aménage le quartier, la ville, cet environnement dans lequel je réside aussi. La société ne peut donc pas se désintéresser de la manière dont j’habite, où, quoi, comment. Il importe qu’elle fasse en sorte que je ne sois pas marginalisée à cause de mon habitat parce que cela conditionne mon état d’être et mes actions en tant que citoyen. Plus mes conditions d’habitat seront en adéquation avec ce que je suis, plus je serais disponible pour être actif dans la société, ma société. Maintenant, je vieillis, mon habitat aussi, mais pas forcément à mon avantage. Pourtant, j’aimerais y rester jusqu’au bout, y mourir paisiblement. Q u ’ e s t - c e que la société peut m’offrir pour que je reste intégré dans la vie quotidienne de la société et que mon habitat ne devienne pas un handicap ? Notamment parce que j’habite un logement social et que si la société décide de faire évoluer l’habitat pour les personnes âgées alors les premières mesures à envisager se feront au niveau du logement public.
introduction
introduction
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Chaque année de nouvelles villes en France et notamment en Loire-Atlantique sont nommées : VADA (Villes Amies Des Ainés). Cette certification est attribuée par l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) depuis 2007, elle indique que ces villes conviennent dans leur « environnement naturel et bâti à accueillir des usages aux capacités divers et non conçues seulement pour l’individu mythique « moyen » jeune. Une VADA est accueillante pour les personnes de tout âges ». Guide mondial des villes-amies des aînés,
première partie : la vieillesse et son habitat
Le vieillissement de la population, phénomène actuel qui s’amplifie grandement, n’est pas en soit un problème si la société s’adapte à cette nouvelle situation. Mais comment intègre-t-elle cette population ? D’ailleurs, comment l’a-t-elle intégrée dans les siècles passés ? L’étude de l’évolution de la perception de la vieillesse et son intégration sociale au cours du temps permettra de comprendre qu’est-ce qu’être âgé aujourd’hui. Et quelles sont les habitudes résidentielles de cette population, de manière générale puis plus particulièrement dans le logement social. Ce qui nous amènera vers la seconde partie : comprendre comment l’habitat peut rompre avec les habitudes ségrégatives et marginalisantes que nous avons envers les plus âgés d’entre nous.
A priori, nous sommes tentés de réduire la définition d’une personne âgée selon son âge. Pourtant, la limite entre l’âge adulte et celui de la vieillesse reste floue parce que ce n’est pas
la vieillesse et son habitat
2336 perception et intégration sociale de la vieillesse au cours du temps 3750 aujourd’hui : qu’est-ce qu’être âgé? 5162 pratiques résidentielles des personnes âgées 6262 conclusion : trouver un équilibre
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une étape précise dans l’évolution du corps ou de l’esprit. D’autant plus que cette limite a beaucoup varié selon les époques : alors qu’en Grèce Antique, la vieillesse commençait à 45 ou 50 ans, à la Renaissance Montaigne s’estimaient vieux dès 40 ans. Puis, cet âge a quelque peu augmenté aujourd’hui puisque Simone de Beauvoir a décidé qu’elle serait vieille à 65 ans et que l’âge de la retraite est fixé légalement entre 60 et 62 ans. Cette évolution de la définition de la vieillesse montre combien elle reste subjective et liée à des représentations sociales. Il semble alors nécessaire de regarder l’évolution chronologique de la perception de la vieillesse et de son intégration dans la société afin de comprendre la manière dont elle est considérée aujourd’hui et quelles réflexions mener pour les constructions futures.
perception et intégration sociale de la vieillesse au cours du temps
Nous allons voir dans cette première partie, que même si la notion de vieillesse a quelque peu évolué, les vieux ont toujours été mis à l’écart de la société, déconsidérés, particulièrement quand ils sont affaiblis par l’âge ou pauvre. Cependant à partir du XVIIè (à la Révolution de 1789), une rupture dans la perception des personnes vieillissantes va amener la société à les considérer différemment, même si ce ne sont que les prémices et qu’il faut attendre la révolution industrielle pour
1
Simone de Beauvoir, La Vieillesse, p.47
la vieillesse et son habitat
De manière générale, « toute société tend à vivre, à survivre ; elle exalte la vigueur, la fécondité liée a la jeunesse ; elle redoute l’usure et la stérilité de la vieillesse»1, selon les mots de Simone de Beauvoir. La vieillesse est perçue comme une déchéance de la société, parce qu’elle ne participe pas à la croissance, incapable de se reproduire ni de produire, elle est alors jugée inutile. L’image traditionnelle que l’on se fait de la vieillesse, est donc plutôt négative, c’est une déchéance physique voire une disgrâce. C’est un synonyme de déclin visible qui ne permet plus d’être inséré dans la société soit par incapacité, soit par rejet.
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voir apparaître des aides spécialement dédiées. Ce chapitre tente de donner un aperçu historique des grands enjeux de la thématique de la vieillesse et de son intégration au niveau social et de l’habitat, mais non pas une liste exhaustive et détaillée de chaque initiative publique.
la vieillesse, un sort individuel transformé en grand destin collectif 1
Philippe Albou, L’image des personnes âgées à travers l’histoire, p.93
la vieillesse dans les anciennes sociétés
Depuis l’Antiquité, les vieux ne sont pas identifiés comme un groupe mais comme des individus seuls face à leurs destins1, chacun doit affronter ses difficultés. La vie des anciens repose sur la solidarité inter-générationnelle au sein de la famille, ce sont les enfants qui s’occupent de leurs parents. Cependant, la vieillesse prend des formes très différentes selon les catégories sociales, c’est-à-dire que la situation sociale du vieillard dépend de son statut avant sa dépendance. Lorsqu’il est pauvre, on ne le distingue pas des autres pauvres, il n’est pas considéré comme faisant partie d’un groupe à part entière. En effet, pour une personne âgée pauvre qui n’a pas de famille ou qui en a une trop pauvre pour l’entretenir, les solutions d‘habitats qui s’offrent à elle sont les mêmes que celles destinées aux délaissés de la société comme les malades, les prostitués ou les enfants abandonnés. Il recourt à la charité hospitalière dans les hospices, asiles, refuges, hôtels-dieu : des établissements d’hébergements qui dépendent à l’époque principalement de l’Église. Cependant, ces lieux en plus d’être dégradants, ne fournissent pas tous des soins médicaux, ils ont bien plus une fonction carcérale afin d’écarter les miséreux de la société que des véritables lieux de prise en charge de l’individu
sommaire des ĂŠmissions
Anders Petersen photographe, Nursing Home, 1984.
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1
Olga Pioux, Les cahiers de profession banlieue, p.83/84 2
directrice du centre de liaison, d’étude, d’information et de recherche sur les problèmes des personnes âgées en Ile-de-France
vieillissant. On ne dissocie pas les vieux des malades car il n’y a pas de symptômes du vieillissement établi, ce sont plutôt des maladies ou des défauts naturels des personnes qui amènent progressivement au décès. Les besoins particuliers de l’âge ne sont jamais pris en compte car « la vieillesse est régie par des lois d’assistance, comme pour les pauvres si une personne âgée était à la rue, qu’elle n’était pas prise en charge par sa famille, elle allait à l’hospice» 1 confirme Olga Pioux2. On regarde vieillir un homme comme on le regarderait mourir d’une maladie. De plus, la longévité chez les personnes pauvres est faible, leurs conditions de vie ne leur permettant pas de vivre aussi vieux que dans les classes privilégiées. Ils ne sont donc pas considérés comme vieux. Le sort était complètement différent pour une personne âgée riche issue d’une grande famille aisée et unie, on s’occupe de lui, il continue de vivre dans son habitat et surtout il conserve son autorité. Son pouvoir au sein du cercle privé reste grand parce qu’il possède un patrimoine à léguer. Les personnes âgées ont toujours eu un statut privilégié, mais sous certaines conditions. La longévité, preuve de sagesse et de qualité n’est valable que pour les vieux intégrés auparavant dans le système élitiste. Cependant dès qu’ils perdent certaines de leurs facultés motrices, peu importe leur place dans le maillage social, ces vieillards sont dévalorisés : ils sont déconsidérés, car ils n’ont plus d’utilité sociale. Il a toujours subsisté une ambivalence entre l’acceptation de l’ancêtre, porteur d’une histoire à la fois familiale et sociale, et son rejet par la société lorsqu’il devient sénile. Cette vision de la personne âgée va persévérer durant les différentes époques jusqu’au XVIIIè où l’on distingue les prémices d’une pensée où les vieux vont devenir un groupe social indépendant, intégré dans la société avec des besoins propres à leur âge.
les commencements d’une pensée nouvelle : une reconnaissance de la vieillesse Cette vision de la vieillesse évolue par rapport aux pensées
À cette époque, il y a les progrès de la médecine permettant aussi la diminution des maladies et l’augmentation de la durée de vie. Il y a une croissance démographique plus forte qu’auparavant, pendant de long siècles la proportion des individus de plus de 60 ans n’avait pas évolué et à la fin du XVIIIè le vieillissement commence à augmenter. On commence à se demander quelle place ont les personnes âgées dans la société ? La révolution et ses grands penseurs reconsidèrent la vieillesse : Montesquieu et Rousseau parlent de « la misère et l’infirmité considérées comme une injustice de la nature qu’il appartient à la collectivité de réparer »2. C’est un mouvement éloquent envers la sénescence que l’on voit apparaître, on gratifie la vieillesse en inventant l’idée du « bon vieillard, comme on a crée le bon sauvage.»3 Ces mythes sont des idéalisations de l’humain, le vieillard est considéré comme un vénérable qui a travaillé toute sa vie, qui sait les choses de la vie et qu’il faut respecter. La vieillesse n’est plus une dégénérescence.
1
Philippe Ariès, Essais sur l’histoire de la mort en Occident, p.52
2
Philippe Albou, L’image des personnes âgées à travers l’histoire, p.186 3
J.-P. Bois, Histoire de la vieillesse, p.70
la vieillesse et son habitat
nouvelles, à l’époque des Lumières. Mais aussi et surtout par rapport à la religion : la pratique religieuse est toujours aussi répandue, mais le rapport à la mort évolue. «À partir du XVIIIe siècle, l’homme des sociétés occidentales tend à donner à la mort un sens nouveau. Il l’exalte, la dramatise, mais il est moins occupé de sa propre mort que de la mort de l’autre. Désormais la mort est une rupture et il se développe une intolérance nouvelle à la séparation»1, Philippe Ariès historien, explique que ce sont notamment les attitudes des gens devant la mort qui évoluent. Avant, la résignation face à la mort est admise par tous, cela fait partie du destin d’un homme, et ce n’est qu’une étape qui menait vers la vie dans l’au-delà. Mais aussi parce que ce rapport à la disparation du proche était plus apprivoisé : la mort était autrefois une figure familière, il n’y avait pas plus ou moins de peurs face à la mort mais, les nombreuses maladies comme la peste, le choléra, qui décimaient les populations rendaient quotidienne la vue des morts, de la mort. Cette évolution des attitudes devant la mort va donc entrainer une évolution par rapport à la prise en charge des vieux dans la société.
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1
Patrice Bourdelais, L’âge de la vieillesse, p.66
Dans cette continuité, en 1791, les révolutionnaires vont mettre en place différentes directives en faveur des vieux : des prévoyances-retraites, l’idée d’assistance aux vieillards nécessiteux, mais aussi une pension pour les vieux indigents, résidents à l’hospice ou à domicile. Ce sont les prémices de la retraite comme on l’a conçoit aujourd’hui. Pour la première fois l’Etat se substitue à la solidarité familiale et à la charité religieuse en offrant des aides sociales réservés aux personnes âgées indépendamment de leur statut social. Par ailleurs, les vieux sont progressivement différenciés des autres pauvres. On voit apparaître un développement d’études démographiques dans lesquelles le groupe des plus de 60 ans commence à être mesuré et détaillé. Il est d’ailleurs fixé un seuil dans le « groupe des vieillards » à 60 ans. Cette limite permet de distinguer clairement les personnes âgées des autres adultes. L’âge de 60 ans correspondant à celui où le corps devenu plus faible ne peut plus porter les armes.1 Cet âge de la vieillesse s’enracine dans le temps, on le retrouve aujourd’hui encore. En plus de cette nouvelle distinction, on voit apparaître des événements comme la « fête de la vieillesse ». Elle est imaginée par Robespierre le 26 octobre 1795 et sera célébrée durant tout le Directoire (première république française). Ces fêtes avaient pour but les échanges entre les générations. « Enfants, honorez la vieillesse » dit Robespierre. Le pouvoir politique tente de redonner une image positive de la vieillesse, emplit de sagesse et de sérénité. La personne âgée peut avoir un rôle moral et social, en étant porteuse de connaissances à enseigner aux jeunes générations.
le souffle retombe vite
Cependant seul ces fêtes vont persister durant la première république française, toutes les autres dispositions révolutionnaires envers les personnes âgées vont être supprimées. Le nombre de pauvre ne cesse de croître, mais la société continue de les exclure en construisant de nouveau hospices pour les loger, et la jeunesse reste encore imposante
dans tous les domaines, en politique comme dans la famille. Les situations demeurent, encore, très variées selon les classes sociales. Le vieillard respectable continue d’être celui qui détient un patrimoine. Et la personne vieillissante inconsidérée reste le déshérité qui travaille jusqu’à la mort ou jusqu’au handicap, dépendant de sa famille ou des institutions charitables. Ce pauvre devenu vieux ne vit de toute façon pas très vieux, ils ne sont donc pas très importants en nombre.
des ruptures à nouveau brisées par les événements
Arrivent, au début du XXè siècle, de grandes réformes sociales. Des lois sont votées, mettant en place une assistance obligatoire aux vieillards sans ressources, ainsi qu’une retraite nationale à 60 ans (après 30 ans de cotisations) donnant droit à une pension au moins égale à 40% du salaire moyen. Ces lois représentent une grande avancée dans la prise en charge des vieux, parce qu’elles permettent aux personnes de rester indépendantes financièrement à la fin de leur vie professionnelle et d’avoir une reconnaissance de leur travail par la société. Cependant, les événements des deux grandes guerres vont empêcher leur bonne exécution. Il faudra attendre la fin de la deuxième Guerre Mondiale pour que de réels changements sociaux à l’égard des personnes âgées s’opèrent en profondeur.
la vieillesse et son habitat
Au début du XIXè, la structure familiale va évoluer : les aînés sont moins pris en charge par leur famille, car la révolution industrielle, qui entraine l’exode rural et la croissance des villes, ne permet parfois plus d’accueillir trois générations sous un même toit. Alors apparaît dans les statistiques en 1870 la répartition de la population en trois groupes : les jeunes (moins de 20 ans), les adultes (20 à 59 ans) et les vieillards (60 ans et plus). Ce classement par âge va permettre de définir des populations précises avec des besoins propres ; et ainsi initier des tentatives d’assistances aux vieux, comme des lois pour une allocation aux vieillards nécessiteux ou une assistance médicale. Toutefois, elles sont éphémères et peu respectées.
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la vieillesse devient l’objet d’une politique spéciale à résoudre À la libération de la France, en 1945, la croissance démographique est relativement faible mais elle va rapidement augmenter, on parle alors de « baby-boom ». Et en parallèle, on constate une forte augmentation de l’espérance de vie. Alfred Sauvy, économiste et démographe français, reproche cette augmentation : il invente la notion de « vieillissement de la population » en 1928. On prend conscience que la population européenne vieillit, et l’on parle de la vieillesse comme un « problème à résoudre ». Il va falloir prendre en charge ces personnes âgées de plus en plus nombreuses en multipliant les structures d’accueil. Et l’idée qui en ressort, c’est que cela va engendrer un coût financier à la société, ce qui va freiner la croissance. Si ce constat, à la connotation négative, semble ne pas être propice à une évolution du statut des vieux dans la société il va cependant être créé d’importantes lois qui vont marquer la politique sociale (et notamment gérontologique) en France. Les lois misent en place à partir de 1945 construisent le régime d’aides sociales encore en place aujourd’hui et bouleversent le mode de vie des personnes âgées.
une entraide nationale
Cette solidarité entre individus, va se baser sur la cotisation de chacun pour distribuer à ceux qui ont besoin : soit pour la maladie (maladie, maternité, décès, invalidité), soit pour la vieillesse et le veuvage (retraites), soit pour la famille (handicap, logement,...) ou soit pour les accidents du travail ou maladies professionnelles. Ce sont les quatre branches de la sécurité sociale en France depuis 1945. Et c’est sous l’influence de Pierre Laroque que ce système sera institué au lendemain de la deuxième guerre mondiale. Ce conseiller d’état, sera connu comme le « père » de la sécurité sociale. En 1962, il est nommé président de la caisse nationale de sécurité sociale, et va
Affiche du film Amour, Michel Haneke, 2012.
constituer « le rapport Laroque ».
le rapport Laroque : une volonté d’intégration des anciens
1
Extrait du rapport Laroque in Gérontologie et Société, p.153
2
Ibidem
Ce rapport est un état des lieux du vieillissement social de la France et un questionnement par rapport à la place qui devrait être faite aux personnes âgées dans la société française. Dans ce rapport, il s’agit pour la première fois, de mettre en avant le maintien à domicile afin de permettre aux gens qui vieillissent de conserver leur place dans la société. Il s’agit de les considérer comme des citoyens à part entière et non plus de les mettre à l’écart dans les hospices. Donc, de conserver le lien social entre les personnes âgées et le reste de la population. Le rapport parle bien de mettre « L’accent est mis[...] sur la nécessité d’intégrer les personnes âgées dans la société tout en leur fournissant le moyen de continuer le plus longtemps possible à mener une vie indépendante »1. C’est un changement important dans la perception que peut avoir la société de cette population, même si ce constat avait déjà été fait au lendemain de la révolution. Ce rapport parle beaucoup du soutien à domicile comme solution pour maintenir à domicile, il préconise le développement des services : « l’effort le plus important à cet égard doit porter sur l’aide ménagère »2.
... mais la solution reste encore les mouroirs
Néanmoins il n’y a pas de réponses législatives immédiates suite à ce rapport, les personnes continuent de compter sur leur famille pour leur apporter du soutien et les accueillir. À cette époque il y a plutôt la création d’établissements appelés maison de retraite, réservés aux personnes âgées, ils vont petit à petit remplacer les anciens hospices et se multiplier. Ces établissements prennent de l’importance et sont même plus favorisés que le maintien à domicile. Cette mesure fait de la vieillesse toujours un problème à isoler du reste de la société. Cependant, le rapport montre une volonté nouvelle d’intégration des personnes vieillissantes dans la société, ce qui va marquer progressivement les futures législations.
premières allocations vieillesse
En effet, il faut attendre quelques années plus tard, en 1971, pour voir apparaître en continuité de ce rapport, l’Allocation Logement à caractère Social (ALS) à destination des personnes âgées. Elle permet d’aider à payer le logement pour les personnes n’ayant pas assez de ressources, dans l’idée du maintien à domicile. Suivra ensuite l’ACTP, l’Allocation Compensatrice pour Tierce Personne en 1975, permettant de rémunérer les services à domicile. Il y aura aussi la création de nombreux clubs du troisième âge, qui sont des associations ou des lieux d’activités et de rencontre permettant de conserver les liens sociaux. Tous ces changements permettent d’offrir à de plus en plus de personnes vieillissantes le choix de rester à domicile, comme le souhaitait le rapport Laroque.
Dans ces années là, en parallèle des politiques de maintien à domicile, apparaissent les foyers-logements. Ce sont des logements intermédiaires (conçus comme passage entre le logement personnel et la maison de retraite) rassemblés dans un immeuble où chaque habitant est autonome, mais bénéficie facultativement de services comme les repas, la surveillance, l’aide ménagère, etc. Ce sont des lieux qui permettent aux personnes fragilisées mais indépendantes de ne pas être isolés socialement tout en accédant facilement à des soins ou des services. Cela permet aussi de réduire les demandes en maison de retraite.
les hospices transformés en maisons de retraite « humanisées »
Ces maisons de retraite l’Etat investit aussi pour les rénover et les humaniser car les conditions de vie dans ses établissements sont parfois déplorables. Il prévoit également la disparition des hospices et le développement de la médicalisation de ces établissements adaptés aux besoins gérontologiques. Peu
la vieillesse et son habitat
premières alternatives spécifiques pour les personnes âgées en terme d’habitat
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après sous le mandat de François Mitterrand (1981-1988) le gouvernement abaisse l’âge de la retraite à 60 ans (il était monté à 65 ans) et crée des MAPA(D) (Maison d’Accueil pour les Personnes Agée (Dépendantes)) sur la même base que les foyers-logements, c’est-à-dire qu’on adapte seulement les structures en ajoutant avec des normes techniques précises et la possibilité de créer une section de cure médicale. La mise en place des ces instituts va permettre d’offrir une assistance spécialisée pour les personnes âgées, mais elles vont considérer ces lieux comme des mouroirs puisqu’elles vont se retrouver enfermées entre personnes en fin de vie.
la vieillesse analysée sous le spectre de la dépendance.
Dans les années 1990, des rapports rendent compte du dynamisme important des personnes âgées, notamment des jeunes retraités, qui sont capables d’aider à la fois leurs petitsenfants, leurs enfants et leurs parents. Pourtant cette évolution des moeurs ne va pas transparaitre dans le secteur médical, en effet, on voit apparaître le terme de « dépendance » dans leur vocabulaire. La vieillesse est alors perçue comme non-autonome vis-à-vis de la société. Ce terme stigmatise les vieux, encore aujourd’hui, parce qu’il va créer un amalgame entre vieillesse et dépendance. Et cela va détériorer la place des personnes âgées dans la société en les reléguant au statut d’handicapé. L’objectif d’intégration sociale des anciens se remplace par une prise en charge sanitaire.
1
Serge Guérin, Vive les vieux, p.13
Créée en 1997, la PSD (Prestation Spécifique Dépendance) vient remplacer l’ACTP : c’est une aide financière qui vient aider spécifiquement les personnes âgées et permet de financer leur maison de retraite ou les services à domiciles. En complément, il est crée l’AGGIR (Autonomie Gérontologie Groupe IsoRessources) : une grille qui permet de quantifier la dépendance. (GR1, dépendance la plus forte, GR2, plus autonome,....) « Les pouvoirs publics orientent l’ensemble de la filière vers une réponse médicalisée, comme si vieillir était une maladie qui devait affecter tout le monde de la même façon »1, souligne Serge Guérin, sociologue. La
personne âgée qui intéresse les professionnels se caractérise par son degré de dépendance, la personne âgée se transforme en individu nécessairement souffrant qu’il faut aider financièrement dans ses charges médicales.
l’APA : démocratisation inégalitaire de l’aide
la nouvelle maison de retraite médicalisée
Cette loi de janvier 2002 va aussi mettre en place les EHPA(D) (Etablissements d’Hébergements pour Personnes Agées (Dépendantes)) qui vont remplacer les MAPAD en médicalisant encore plus ces établissements. Ils sont définis comme les nouvelles maisons de retraites médicalisées. De nombreux foyers-logements vont être reconvertis en EHPAD mais devront alors respecter des exigences de confort et de sécurité qui feront fortement augmenter les tarifs à la journée. Ce coût financier important fera qu’un certain nombre de foyerslogements resteront des EHPA mais du coup n’hébergeront plus de personnes dépendantes. Cette loi propose une
1
description affichée sur le site de la Région : www.loireatlantique.fr/apaa-domicile-2014, consulté en juillet 2014
la vieillesse et son habitat
En janvier 2002, une loi va mettre en place l’APA (Allocation Personnalisée d’Autonomie) , elle remplace la PSD : c’est une allocation universelle pour les plus de 60 ans, que même les plus aisés peuvent obtenir. Ce n’est pas une aide financière directe, elle octroie des « heures de services. » Gérée par les conseils généraux qui évaluent le niveau de dépendance de la personne (avec la grille AGGIR) et quantifient les heures des services dont la personne à besoin. Ces services peuvent être de l’aide à domicile, du portage des repas, … Mais l’aide peut aussi permettre l’accès à un accueil de jour ou un hébergement temporaire.1 Cette aide est dans la continuité des autres lois, en faveur du maintien à domicile. Cependant avec les lois de décentralisation, nombre de prestations sont maintenant gérées par les Conseils Généraux et selon le développement de leurs politiques sociales, les prestations sont plus ou moins chères, et plus, ou moins importantes sur le territoire. Cela crée des inégalités, il vaut mieux vieillir dans certains départements que dans d’autres.
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diversification de l’offre d’hébergement, favorisant à la fois le maintien à domicile mais aussi l’amélioration des établissements médicalisés. Malgré le fait que cette dernière offre ne soit pas démocratisée financièrement et qu’elle reste souvent une solution non choisie par la personne, car elle est irréversible, il y a peu de retour possible au domicile.
évolution progressive
Même si l’image du vieillard indigent que l’on avait autrefois s’est estompée, la notion de dépendance montre que la personne âgée n’est toujours pas vraiment considérée comme un adulte mais comme un malade relégué dans son parcours habité à passer nécessairement par un stade d’assistanat médicalisé. Néanmoins, la canicule de 2003 qu’a connue la France et qui a causé de nombreux décès de personnes âgées, a aussi fait apparaître de nombreux plans de solidarité envers les personnes âgées pour le logement, la santé… Notamment dans le secteur du logement social. Le niveau de vie de ses personnes tend à s’améliorer, il se rapproche de celui des actifs, même s’il reste un grand nombre de petites retraites, et qu’il y a encore beaucoup d’inégalités sociales. Mais cette aisance ne rassure pas : on dit souvent que le troisième et quatrième âge actuel est et sera plus aisé que les futures générations âgées. Avec l’augmentation continue du chômage et la multiplication des emplois précaires en France, les pouvoirs publics s’inquiètent de savoir comment prendre en charge financièrement cette nouvelle masse de personnes vieillissantes. Cela nécessite une réorganisation de notre mode de fonctionnement : quand les baby-boomers avaient deux actifs cotisants pour payer un retraité, aujourd’hui cela tend presque à un pour un. Ce bouleversement de l’équilibre financier des régimes de retraite remet en question les solidarités familiales et les comportements résidentiels des personnes âgées.
aujourd’hui : qu’est-ce qu’être âgé?
Le processus de vieillissement est plus ou moins prononcé selon les régions, mais en Loire-Atlantique la tendance au vieillissement est nettement confirmée : « en proportion, la part des personnes âgées de plus de 60 ans passerait de 20 à 29% en LoireAtlantique entre 2007 et 2040. Cette hausse concernera l’ensemble des territoires. »2 C’est-à-dire que les zones urbaines comme les autres vont connaître une augmentation de leur population âgée. Ce vieillissement généralisé de la population incite à remettre en question notre rapport à la vieillesse dans la société. Mais tout d’abord posons nous la question de ce que
1
estimations INSEE, consulté le 28 juillet 2014. 2
étude du département, 2007.
la vieillesse et son habitat
Aujourd’hui le nombre de personnes âgées a explosé en raison de l’allongement de l’espérance de vie et du vieillissement des générations du baby-boom. On peut remarquer que la part des plus de 65 ans est passé de 7 % en 1750, à 13 % en 1901 puis de 16 % en 1946, à 18% aujourd’hui (en 2014). Les estimations sont diverses mais toutes prévoient près de 30% de la population de plus de 60 ans en France d’ici 20 ans1.
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l‘on entend par le vocable « vieillesse » ? Qui est la personne âgée aujourd’hui, et quand le devient-on ?
il n’existe pas une personne âgée mais des personnes âgées vieillesse = retraite
1
Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales
Si l’on prend la définition du mot « vieillesse » dans plusieurs sources, par exemple, celle du dictionnaire Larousse 2014 on trouve que la : « vieillesse n.f., c’est la dernière période de la vie normale, caractérisée par un ralentissement des fonctions ; c’est le fait d’être vieux ». Cette définition ne donne pas un statut trop défini du fait d’être vieux, mais elle définit la vieillesse du point de vue physique, de la même manière que la définition présente sur site du CNRTL1: « la période de la vie succédant à l’âge mûr que l’on situe actuellement chez l’homme à partir de l’âge de soixante-cinq, soixantedix ans. Dernière étape de la vie d’une personne. » Cette deuxième définition situe l’instant de la vieillesse par rapport à un âge. Elle correspond à la période bien distincte de la vie qui débute à la fin de l’activité professionnelle : 60-65 ans. L’arrivée en retraite fait rentrer dans la classe sociale des « vieux », nous parlons donc de « retraité » lorsque l’on invoque les personnes âgées.
difficile de définir la personne âgée
En effet, en France, c’est à partir de ce seuil que l’on parle habituellement de « personne âgée ». Mais on a souvent du mal a savoir qui désigne-t-on exactement lorsqu’on emploie ce terme, parce qu’on catalogue ce groupe de personnes selon un âge alors qu’il existe de nombreuses autres caractéristiques qui entrent en compte. « Les plus de 60-65 ans » regroupent des personnes très hétérogènes en terme de revenus, de milieux professionnel, de sexe, de capital culturel, de mode d’habitat, d’état de santé, de situation familiale… Et la tranche d’âge est énorme, entre 60 (âge moyen du début de la retraite) et 80 ans
Pina Bausch, Kontakthof pour dames et messieurs de plus de 65 ans, fĂŠvrier 2000.
(âge moyen de la mortalité) il y a 20 ans. Selon tous ces aspects, chacun va vivre sa retraite complètement différemment. Effectivement, en prenant pour exemple le statut professionnel, cela détermine non seulement le niveau financier de la retraite mais aussi l’état physique car si nous travaillons pendant 40 ans en tant qu’ouvrier, notre corps est plus fatigué à 60 ans que pour un cadre. L’espérance de vie est plus courte lorsque l’on vient d’un milieu professionnel plus pauvre. L’état de santé psychique et physique n’est pas le même pour tout le monde dans ces âges-là.
mise en place de critères « objectifs »
1
classification effectuée dans le Guide de l’Habitat Intermédiaire, fourni par la Région des Pays de la Loire, 2012, p.3 2
Philippe Albou, L’image des personnes âgés à travers l’histoire, p.3
Nous pouvons conclure qu’être « vieux » dépend de critères subjectifs et objectifs : selon le ressenti, est-ce que je me considère « âgé » ou pas et aussi selon les difficultés physiques, médicales que l’on connait. La vieillesse est donc une notion difficile à évaluer, elle rassemble un type de population très mixte qui évolue constamment. On ne peut donc pas la réduire à un personne type, mais à une diversité de situation avec des besoins propre à chacun. Pour affiner cette demande de besoins spécifiques et savoir un peu mieux comment y répondre, il a été institué (administrativement et législativement dans les secteurs médico-sociaux, politiques, … ) que chez les plus de 60 ans, on distingue trois grandes catégories d’âges : - les 60-75 ans sont les personnes menant une retraite active, indépendante, sans difficulté physique et participant à la vie sociale de la cité de la même manière que lorsqu’elles étaient actives professionnellement - les 75-85 ans correspondent aux personnes susceptibles d’être plus dépendantes qui demande une prise en charge et un habitat adapté. Mais qui sont encore relativement autonomes. - et les plus de 85 ans, des personnes en perte d’autonomie progressive, demandant souvent une pris en charge quotidienne et des services spécifiques.1 « L’Homme vit dans le temps, le temps est son obsession, et l’Homme ne peut pas parler de sa vieillesse ni de celle des autres en toute objectivité. »2
souligne Philippe Albou. Evidemment ces critères sont subjectifs, ils ne correspondent en aucun cas à la totalité des personnes vivant dans ces âges-là, la distinction s’effectue plus souvent au cas par cas. Alors que cette approche médicosociale, ségrègue par l’âge la vieillesse. En effet, ce classement est judicieux dans le sens où il permet de distinguer qu’une personne âgée de 60 ans, jeune retraitée, n’a pas les mêmes problématiques qu’une personne âgée de 80 ans. À cet âge on peut être en pleine forme mais notre corps est dans un état plus faible qu’à 60 ans, sans être dans un état de dépendance, nous vivons plus lentement, le corps s’affaiblit petit à petit. Même si cette dernière n’a pas de handicap physique ou mental, elle ne vit pas sa vieillesse de la même manière. Il y a donc des attentes différentes pour des seniors différents mais les politiques déterminent toujours ces types de demandes selon l’âge.
derrière les mots : comment parle t-on des personnes âgées ?
d’où viennent les termes et que signifient-ils ?
« L’expression « troisième âge », apparait à la fin des années 60, dans les milieux de la publicité» explique Serge Guérin, sociologue français, dans son ouvrage Vive les vieux. Ces nouveaux termes sont créés afin de cibler plus distinctement un type de population. C’est la première dénomination qui apparaît pour remplacer le terme trop général de personne âgée, mais elle s’est vite rendue insuffisante car elle rassemblait des personnes dynamiques représentées par les 60-70 ans, mais aussi des personnes plus âgées, de plus de 70 ans, à la santé déclinante.
la vieillesse et son habitat
On remarque que ce sont des catégories d’âges qui regroupent les personnes âgées sous de nouvelles dénominations : les « seniors » qui correspondent à la première (60-75ans), le « troisième âge » (75-85 ans) et le « grand âge » ou « quatrième âge » (les plus de 85 ans).
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1
Serge Guérin, Vive les vieux, p.13
Des nouvelles catégories ont donc été instituées : les seniors et le quatrième âge. Pour le premier c’est un vocabulaire qui a été introduit dans les publicités américaines parce que c’est une catégorie d’âge qui peut encore investir, il est donc encore un client potentiel. Le quatrième âge quant à lui est la deuxième partie de la vieillesse, l’âge où l’on est « réellement vieux, cela induit une utilisation du logement et de l’urbain plus restreinte et nécessite un accompagnement pour le maintien à domicile»1 C’est une nouvelle notion due au fait que l’âge moyen des vieux a sensiblement augmenté au fil du temps pour passer d’environ 60 ans au début du siècle à plus de 65 ans de nos jours, voir 70-75 ans. L’espérance de vie s’allonge mais en plus de cela, les personnes vivent de plus en plus sans incapacité, la durée de vie moyenne en bonne santé augmente.
disparition du mot vieux non moins politiquement correct
2
définitions CNRTL
Tous ces termes, désignant nos parents et notamment celui de « personnes âgées » remplacent le mot « vieux ». Ce dernier disparaît du langage administratif ou législatif parce qu’il est jugé politiquement incorrect. C’est un mot trop fortement connoté à ses synonymes : impotence, dégénérescence. Cela est vrai aussi dans le langage courant, on utilise peu le terme « vieux », mais plutôt tous ces euphémismes. Même si leur lexicographie est très proche : le terme vieux apparait au XIIè, issus du latin vetulus : « d’un certain âge » et le terme « âgé » dérivé de « âge » signifie en ancien français « qui a un âge assez grand »2. Les définitions de ces deux termes sont proches et pourtant ils n’ont pas du tout la même connotation aujourd’hui. L’utilisation de ces mots démontre que l’on n’assume pas de percevoir la vieillesse comme telle, c’est-à-dire comme la période de fin de vie où biologiquement on se rapproche de la mort. Cette période nous effraie, notamment lors de notre arrivée en retraite. Elle procure le sentiment d’entrer dans une classe d’âge qui discrimine.
le terme « retraité » rejette socialement.
En effet, le terme de « retraité » qui est générique et désigne
Diane Arbus photographe, Masked, 1970.
1
Simone de Beauvoir, La vieillesse, p.281
toutes les personnes au delà de 60-65 ans (dépend des annuités de cotisations et du métier effectué). C’est-à-dire toutes les personnes qui ne travaillent plus. C’est une période où l’on passe d’actif à inactif au niveau des termes, mais pas forcément en réalité. Donc où l’on n’est plus intégrés professionnellement dans la société ; le mot retraité, c’est le retrait, la mise à l’écart, se sentir socialement inutile, perdre sa place dans la société. Simone de Beauvoir explique que l’on rejette la vieillesse peutêtre par répugnance biologique, c’est-à-dire qu’elle nous renvoie à notre propre fin de vie que l’on n’accepte pas. Pour certaines personnes cette période est enfin synonyme de liberté et elle permet de réaliser tout ce qui n’a pas pu être entrepris lors de l’activité professionnelle. Pour d’autres se retrouver à ne plus rien faire alors que le travail structurait le quotidien, qu’il maintenait une sociabilité, est très mal vécu. Ils ont peur de s’ennuyer, de « s’encrouter »1. Ces sentiments sont évidemment d’autant plus forts pour les personnes financièrement défavorisées, qui sont alors restreintes dans leurs possibilités d’activités. L’arrêt du travail lors du passage à la retraite n’est pas forcément le cas pour tout le monde mais il change notre place dans la société et peut naitre alors un sentiment d’inutilité sociale.
marginalisation des personnes âgées
1
Ibidem, p.11
Ces termes enferment les personnes âgées dans des catégories comme s’ils n’étaient plus des adultes « normaux » : « avant qu’elle ne fonde sur nous, la vieillesse est une chose qui ne concerne que les autres. Ainsi peut-on comprendre que la société réussisse à nous détourner de voir dans les vieilles gens nos semblables»2 souligne Simone de Beauvoir. Il est en effet difficile de se sentir concerné par cette problématique lorsque ni maladie, ni fatigue ne nous terrasse. C’est un vertige temporel difficile que de s’imaginer vieux. La vieillesse est le moment à partir duquel notre corps évolue, il se ride, s’atrophie, devient plus fragile, plus lent, … Biologiquement, cette période commence pourtant très tôt parce que l’organisme vieillit jour après jour. Mais le stade concret, où l’homme cesse de travailler par incapacité physique
est situé temporellement loin pour beaucoup de gens, difficile à rendre compte intellectuellement. La société fabrique, et l’a toujours fait, une image standard du « corps beau » qui est celui de l’adulte jeune et fort. C’est-à-dire productif et donc utile à la société. Le corps vieillissant lui n’a plus toute cette vitalité. Intellectuellement, c’est complètement différent, des maladies peuvent diminuer nos capacités neuronales, mais lorsqu’elles ne nous atteignent pas, à un âge avancé nous connaissons et avons vécus plus de choses qu’un jeune adulte, théoriquement. « La personne âgée apporte à la collectivité son rapport au présent dans la continuité d’un passé que nous ne connaissons pas, il transmet et échange un savoir »1 souligne Serge Guérin, sociologue. À cet âge nous sommes donc acteur social, expérimenté avec une connaissance intellectuelle supérieure à celle d’un jeune.
1
Serge Guérin, Vive les vieux, p.44
« l’ancien » est un terme qui magnifie la vieillesse.
Toutes ces nominations sont importantes et leur usage joue un rôle stratégique autant que politique, démontrant que l’on
2
Simone de Beauvoir, La vieillesse, p.227
la vieillesse et son habitat
« La vieillesse serait l’achèvement de la vie au double sens du mot ; elle la termine et elle en est le suprême accomplissement. Quiconque a amassé des années et des années de vie est le vivant par excellence ; il représenterait en quelque sorte un concentré d’être »2 pour accéder à une certaine dignité, un certain respect, l’âge est une qualification. Pour une fois ce n’est pas un marqueur discriminant négativement. « Ma grand-mère était très ridée en vieillissant, et mon petit neveu disait j’aime bien ta figure, c’est un plan. C’est le plan d’une ville, les chemins qu’on a pris, ceux qu’on n’a pas pris, les impasses, les passages, les grandes routes, les chemins buissonniers. Un visage et un corps, c’est tout cela. C’est la chair, c’est le temps qui a couru, c’est le temps qui a dégradé, c’est le temps qui a magnifié. » Thérèse Clerc, fondatrice de la maison des Babayagas (maison de retraite autogérée) interrogée par le journal en ligne Rue89. Cette constatation magnifiant la vieillesse, n’est pas faite par tout le monde, car beaucoup voient dans les rides de la peau un déclin physique.
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tente toujours d’enfermer les personnes dans des archétypes alors qu’il existe des vieillesses très hétéroclites. L’image de la personne âgée oscille entre la vieillesse rayonnante et active, ou la vieillesse seule et malheureuse. Ces préjugés, que l’on se fabrique inconsciemment, se transforment en paradigmes et discriminent la vieillesse par rapport à leur place dans la société.
quel est notre rapport à la vieillesse ? Nous abordons la vieillesse souvent par le biais de ses problèmes. Perçue comme un processus de deuil progressif de toutes nos capacités physiques et mentales. La vieillesse est considérée en terme de pathologie, de dépendance et donc de prise en charge coûteuse pour la société. Alors qu’en réalité de nombreuses personnes âgées occupent leur temps libre pour s’engager dans des associations, des clubs ou bien dans leur famille, s’occupant des petits enfants lorsque les parents travaillent. Même s’ils ne sont plus actifs professionnellement ils sont toujours dynamiques et volontaires. Ou du moins ils conservent le même dynamisme qu’avant leur retraite, parce que ce n’est pas lorsqu’on vieillit que l’on devient plus ou moins sociable et dynamique, on continue à être ce que l’on était avant.
1
Philippe Albou, L’image des personnes âgées à travers l’histoire, p.14
2
Stephane Beaud, La France invisible, p.453
Cependant la stigmatisation de la personne âgée est encore présente : « il y a en réalité plusieurs images qui s’entrecroisent ou qui se superposent, avec par exemple dans le même temps : l’image de la décrépitude physique, l’image de la sagesse, l’image des grands-parents au sein de la famille, l’image du poids démographique » des personnes âgées, etc. Toutes ces images peuvent être considérées comme autant d’images mentales collectives à l’origine d’un certain nombre de mythes »1 Les vieux ne sont pas considérés comme des adultes simplement plus vieux que les autres. On perçoit les personnes âgées comme « inutiles », « malades », « dépendantes », « gagas » 2 ou comme grandsparents, sages, instructeurs. Alors que la plupart des gens âgés vivent leur vieillesse comme une période de la vie non-distincte
Image tirĂŠe du film Harold and Maude, de Hal Ashby, 1971.
des précédentes, sans être plus ou moins malheureux.
1
Colloque de Marly, Habitat et marginalité, p.34
La personne âgée peut se sentir marginale tant par rapport aux autres catégories sociales : « la personne âgée se situe entre deux modes de culture, activité et inactivité ; entre la vie et la mort, tant sociales que biologique »1 que par rapport aux autres personnes âgées : différences ressources et handicaps liés à l’âge.
vieillesse malade ?
2
l’initiative du vivre mieux de l’OCDE a été lancée en 2011, et se concentre sur les éléments qui importent aux citoyens et ont un impact sur la qualité de leur vie. 3
Stephane Beaud, La France invisible, p.454 4
rapport PUCA (Plan Urbanisme Construction Architecture), p.152
Néanmoins, la santé qui est selon « l’indicateur du vivre mieux » sur le site de l’OCDE2, le premier facteur de « bien-être » chez les Français en 2014, être malade ou non conditionne le bonheur d’une personne. Et même si la vieillesse n’est pas synonyme de maladie stricto sensus, avec la médecine moderne de nombreuses personnes vivent longtemps sans grave handicap. Pareil pour la maladie d’Alzheimer, très médiatisée, les chiffres sont plus importants dans les esprits que dans la réalité : environ 75% des plus de 85 ans ne présentent pas de détériorations intellectuelles avérées.3 Le corps est toutefois plus fragile est plus sujet à une mauvaise santé et à des maladies même si le taux d’invalidité reste faible (inférieur à 10%) avant 80 ans.4 L’image de cette vieillesse malade est entretenue, encore, par les politiques de santé publique qui axent leur questionnement sur la vieillesse par rapport à la dépendance. Les médecins prennent le pouvoir sur la parole de la personne, souvent affaiblie par sa maladie et ne respectent pas les choix du patient. Ainsi perdure des phénomènes d’enfermements des personnes âgées dans des concepts sécuritaires. On peut comprendre la peur de se retrouver en maison de retraite soumis au jugement des médecins.
vieillesse pauvre ? 5
rapport PUCA, p.12
La vieillesse est aussi perçue sous le prisme du système de retraite, comme un problème économique. Les vieux dans leur ensemble sont plus riches qu’autrefois. «Parce qu’ils ont profité des Trente Glorieuses pour améliorer leur situation résidentielle et devenir majoritairement propriétaires »5. Mais il existe toujours une partie de
donc des vieux qui se retrouveront plus facilement à habiter dans du logement social ?
En effet,« 20% des ménages locataires du parc social sont des personnes âgées. Cette proportion devrait augmenter de façon sensible dans les prochaines années en raison du vieillissement des locataires en place »4, il y a de plus en plus de personnes âgées résidant dans le parc locatif social. Longtemps les résidents des HLM n’y demeuraient pas à partir d’un certain âge. Mais la conjoncture économique, la hausse du marché de l’immobilier et la précarisation de l’emploi à changer la donne, les personnes n’ont pas toutes pu accéder à un logement locatif de plus haut standing ou
1
Fondation Abbé Pierre : L’état du mal logement en France, rapport 2009, p.18 2
Chiffres INSEE consulté en juillet 2014 3
La précarité professionnelle expose les femmes aux situations de pauvreté, rapport INSEE, 2014. 4
Les cahiers de profession banlieue, juin 2009.
la vieillesse et son habitat
cette population particulièrement touchée par la pauvreté. Et ce, en raison de petites retraites et de la montée de l’immobilier entre autres. Même propriétaires, ces personnes peuvent subir des situations de précarité. « si les retraités jouissent aujourd’hui d’un niveau de vie élevé, il s’agit d’une situation inédite dans l’histoire qui ne se prolongera pas »1 En effet ce constat augmentera avec la baisse des cotisations pour la retraite dû à des parcours professionnels non-stable car le chômage touche de plus en plus de travailleurs : un peu moins de 10% de chômeurs en France en 20142. Et ce notamment chez les femmes qui accumulent encore les temps partiels plus que les hommes pour s’occuper des enfants, ont un salaire inférieur à travail égal et des emplois moins qualifiés3. De plus ces femmes se retrouvent souvent seules à l’âge de la vieillesse parce qu’elles vivent plus longtemps que les hommes. Elles se retrouvent à toucher une retraite de veuvage qui correspond souvent à une somme moins élevée que la retraite que touchait leur mari (« réversion de la retraite »), elles sont donc une catégorie sociale souvent fragilisée. Cela aura des conséquences de plus en plus désastreuses sur la capacité à se loger dignement pour ceux qui accéderont à la retraite dans le futur. Dans son dernier rapport, la Fondation Abbé-Pierre, « estime à 600 000 le nombre de personnes âgées vivant avec une allocation vieillesse de 628 euros mensuels (ce qui correspond à 60% du SMIC) qui les place en dessous du seuil de pauvreté.»
49
1
Gérontologie et société, Habiter et vieillir, p.50
devenir propriétaire. De plus, de nombreuses personnes sont rentrées dans le secteur social lors de sa construction car c’était une avancée majeure dans le confort, et elles y sont restées. « Chaque logement comprenait une salle de bains avec eau chaude et baignoire, des toilettes, était doté du chauffage central, d’un salon où entrait une lumière qui assainissait l’intérieur par de larges fenêtres et quelquefois par des portes-fenêtres qui desservaient un balcon… »1 Elles y sont restées par manque de moyens, même si le parc de logement « moderne » dans lequel habitaient ces personnes se dégradait vite, et puis lorsqu’elles commencent à vieillir, leur mobilité est devenue assez faible : « les personnes de plus de 60 ans déménagent moins que le reste de la population (9,75 % contre 32 % en moyenne) et quand elles le font, elles conservent généralement le même statut d’occupation (propriété, locatif privé, locatif social). Toutefois, elles sont légèrement plus mobiles aux alentours de l’âge de la retraite et, à nouveau, au-delà de 84 ans » selon l’enquête Logement de l’Insee datée de 2002. Lors du passage à la retraite, une personne peut être sujette à mobilité, pour se rapprocher de sa famille ou d’un lieu qu’elle affectionne ou se retrouver à devoir déménager vers un habitat plus adapté lorsqu’elle rencontre des pénibilités de déplacement liées à l’âge. Mais de manière générale la personne vieillissante plus elle vieillit moins elle souhaitera déménager ou du moins ce déménagement sera vécu violemment parce que l’attachement à l’habitat est fort. Que signifie vieillir au sein d’un logement et en particulier d’un logement social ? Qu’est-ce que cela suppose dans le rapport qu’entretient la personne vieillissante avec son logement ? Pour répondre à ces questions il semble maintenant nécessaire d’étudier le comportement des personnes âgées face à leur habitat.
les pratiques résidentiels des personnes âgées
prendre racine : l’habitat comme repère structurant l’habitat en général que représente-t-il ?
Habiter c’est occuper habituellement un lieu, avoir un toit sous lequel dormir de manière quotidienne. Pourtant « habiter n’est pas que se loger, l’abri est porteur de significations symboliques et de valeurs particulières »1. En effet, habiter c’est le lieu, les lieux où s’accumulent les liens, les biens, tous les souvenirs. Dans l’ouvrage Gérontologie et Société, Geneviève Laroque parle de sa
1
Habiter et Vieillir, Vers de nouvelles demeures, p.10
la vieillesse et son habitat
Les choix hébergements proposés autre que la maison de retraite, sont récents mais se sont multipliées assez rapidement. Avant de se pencher sur les différentes innovations en terme de logement social qui sont réservées à cette population, nous allons étudier le fait d’habiter en vieillissant. Puis nous allons déterminer les enjeux d’un vieillissement en habitat social.
51
1
Gérontologie et société : Habiter et Vieillir, p.8
2
Gaston Bachelard in Gérontologie et société, p.8
maison comme : « mon château, c’est le lieu de mon intimité, celui dont je peux interdire l’accès, celui dont j’ai la clé. On dit très justement que ma maison c’est mon repère et mon repaire. C’est mon repaire, celui de mon intimité, mon lieu de ressources, individuel, familial. C’est mon repère, mon point fixe (même s’il peut être nomade) où j’y construit ma personnalité.»1. La maison est un point à partir duquel et dans lequel on se définit. C’est le cadre de la vie familiale intime, investi très différemment selon les personnes, et que l’on maitrise. Le fait de rester chez soi signifie rester maitre de chez soi, conserver une emprise sur son intimité, sa maison. Mais la signification d’habiter ne se limite pas au logement, il comprend aussi l’environnement dans lequel celui-ci s’intègre, donc le milieu de vie de la personne. Habiter c’est aussi vivre et échanger, au niveau de l’immeuble, de la rue, du quartier, de la ville ; c’est là où se passe la rencontre, c’est le sentiment d’appartenance à une communauté. Et cette rencontre du dehors ne se passe que s’il existe « l’assurance d’une intimité » souligne Gaston Bachelard2. Plus largement la notion d’habiter est pensée comme un rapport existentiel au monde, l’habitat est un des modes qui installe l’homme dans un espace structurant, qu’il partage avec d’autres et avec qui il créer une histoire.
pour les personnes âgées : l’habitat est le lieu de résidence principale
Cette sacralisation de l’habitat est d’autant plus justifiable puisque pour la majorité d’entre nous c’est le lieu où s’écoule la plus grande partie de notre vie. Et cela est d’autant plus vrai pour les personnes âgées éloignées par la retraite du lieu de travail : autre endroit particulièrement fréquenté lors de notre existence. Le temps passé à l’intérieur du logement est plus important, s’installe alors un rapport différent avec le logement. Ce lieu de vie devient un espace pleinement investi, et l’attachement se renforce : particulièrement lorsque l’avancée dans l’âge et l’apparition de la dépendance réduisent la possibilité d’être aussi mobile en extérieur qu’avant.
La minute vieille, ĂŠmission Arte, saison 1 en 2012.
rester vivre chez soi pour être « comme tout le monde »
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Cahier de l’IAURIF N°121, p.191
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Gérontologie et société, Habiter et vieillir, p.107
3
rapport PUCA (Plan Urbanisme Construction Architecture), p.23 4
Habiter et vieillir, Vers de nouvelles demeures, p.15
Le chez-soi devient le lieu de résidence majeur, les personnes retraités souhaitent donc comme tout le monde rester chez elles, rester vieillir à domicile. Parce que rester chez soi signifie rester dans un quartier ou une ville où la personne a des relations sociales établies, des habitudes de vie. Mais aussi parce que parfois les enfants habitent la même ville ou le même quartier, et cela est important car les relations et soutiens intra-familiaux sont encore très présents, les familles se soucient et aident leurs parents et vice-versa. Encore aujourd’hui, l’aide familiale joue un rôle primordial. Dans les cahiers de l’IAURIF (Institut d’Aménagement et d’Urbanisme de la Région d’Ile-de-France) : « les visites des enfants procurent aux personnes âgées de la compagnie, mais aussi une aide domestique (ménage, entretien, commissions) et une aide à la personne (toilette, habillage, prise des repas). D’ailleurs plus les parents sont dépendants et plus les visites des enfants sont quotidiennes. »1 Cette intervention des enfants n’est possible que s’ils habitent géographiquement proche mais on constate dans cet ouvrage que peu de personnes ont leurs enfants trop éloignés. Rester chez soi, c’est aussi rester dans un « logement ordinaire », banalisé, afin de n’être ni stigmatisé ni regroupé dans un ghetto de personnes du même âge. Finalement la volonté est de « rester dans habitat ordinaire comme tout le monde »2 afin d’être mieux intégré dans la société. Pour avoir le choix de décider si oui ou non, elles veulent rester à domicile, elles souhaitent souvent en complément un certain nombre de services liés à leur habitat. « Cette demande concerne aussi bien des services à domicile que des services au niveau de l’immeuble, privé ou public (gardien, sécurité) ; elle concerne également les services au niveau du quartier et de la ville. »3 La volonté générale est donc d’accéder à des services d’aides mais sans transformations radicales du domicile : « quand l’espace domestique est envahi par la multiplication des interventions des professionnel(le)s du soin, les personnes disent ne plus se sentir chez elles. Ce chez soi n’est plus celui de l’intimité et de l’accueil où l’habitant(e) se sent souverain(e).»4 Cela est synonyme de rupture, c’est-à-dire que l’on ne peut plus faire les choses comme avant alors que l’avancée dans le
grand âge est considéré comme la simple continuité de la vie et que le logement reste le même. La personne perd la maîtrise de son habitat.
vieillir en logement social : subi ou choisi ? Rester vivre chez soi est d’autant plus vrai pour les locataires du parc social car compte tenu de la règle au maintien dans les lieux et de l’absence de modulation des loyers, peu de locataires auraient intérêt à quitter leur logement, l’occupation des logements est alors d’autant plus longue. Le logement social
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Habiter et vieillir, Vers de nouvelles demeures p. 209 2
www.drees.sante. gouv.fr, site de la Direction de la Recherche des Etudes des Evaluations et des Statistiques, chiffres pour 2014. 3
Chiffres INSEE, consulté en juillet 2014
la vieillesse et son habitat
Il y a aussi, dans l’envie de rester à domicile, la peur de l’institution avec la crainte d’entrer dans un mouroir ; aller dans un établissement, c’est confier sa santé à un médecin et à une équipe hospitalière et perdre la maitrise du choix de ce que l’on veut faire de notre corps. « C’est une perte identitaire où l’on ne tient pas compte des singularités de chacun, car tout le monde est traité de la même manière.»1 L’entrée en établissement est donc souvent vécue comme un placement par défaut, un départ pour un anti-domicile. C’est aussi un coût financier trop élevé pour la plupart des personnes : 1857 euros est le coût mensuel quand en moyenne la pension de retraite est de 1288 euros par mois2. Mais on remarque que « les personnes qui entrent en établissement représentent 17% des plus de 85 ans, sachant que les plus de 85 ans représentent 1,8% des plus de 60 ans. Les personnes de plus de 60 ans habitent donc majoritairement chez elles.»3 Il y a donc aujourd’hui peu de personnes qui finissent par aller en établissement médicalisé : car la possibilité d’éviter et de n’avoir jamais recours aux institutions est dû à l’amélioration des services à domicile, des conditions de logements et de l’état de santé psychique et mental des personnes. Toutes les personnes âgées qui deviennent « dépendantes », atteintes d’incapacités importantes, ne rentrent donc pas obligatoirement en institution.
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est donc appréciable pour les personnes âgées car les loyers sont peu chers sachant que la retraite se traduit fréquemment par une baisse de revenus.
un environnement non adapté aux handicaps liés à la vieillesse
Mais la plupart des gens âgées aujourd’hui qui habitent dans un logement social sont entrés à une époque où les normes d’adaptabilité et d’accessibilité des logements aux handicapés n’étaient pas encore en vigueur. Dans le jeune âge, la question de l’adaptation du logement à son vieillissement ne se posait pas et surtout parce que les locataires n’avaient pas les moyens pour transformer leur habitat. L’évolution de la famille, sans l’évolution de logement crée un décalage entre l’habitant et l’habitat qu’il occupe.
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Propos recueillit lors d’un entretien avec Christine Desbois, évaluatrice CLIC Nant’entourage, en juillet 2014.
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Propos recueillit lors d’un entretien en mars 2014.
Le logement social au moment de sa construction n’était pas un endroit où l’on était sensé y vieillir, seulement une étape vers l’accès à la propriété. Mais les gens sont finalement restés toute leur vie dedans : « les gens âgées d’aujourd’hui que l’on retrouve en logement social sont souvent ceux qui sont arrivés en même temps que la construction des HLM, à l’époque les personnes étaient dans un habitat nouveau, luxueux, donc elles voulaient y rester »1. Et c’est ce qu’elles ont fait. Cela est aussi dû à des conditions économiques qui n’ont pas pu les faire sortir du logement social et elles ont fini pas s’y attacher et veulent aujourd’hui rester dedans. Les déménagements sont très compliqués, ils sont sollicités par le bailleur dans le cas de sous-occupation du logement (une personne seule vivant dans un T3, T4 ou T5) : « on a un taux de rotation qui baisse, ce qui nous empêche de répondre aux demandeurs qui eux sont de plus en plus nombreux. Mais depuis la loi Boutin sur le logement de 2009, le bailleur peut, lorsqu’il y a sous-occupation du logement, faire des propositions de relogement à condition que le locataire ait moins de 65 ans.»2 explique Christophe Lefevre, directeur d’agence du bailleur social Habitat 44. Les bailleurs veillent à rationaliser avec tact l’occupation des logements, ils font de la prévention auprès de leur locataire pour anticiper la sous-occupation, mais
Freya Maes photographe, Her Rijk der Vrouw, 2007.
comme beaucoup de personnes de plus de 65 ans occupent encore de trop grands logements cela ne résout pas le problème à court terme.
faiblesse des mobilités dans l’avancée dans l’âge
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Habiter et Vieillir, Vers de nouvelles demeures, p.15
C’est en effet une démarche compliquée pour une personne âgée que de déménager notamment à un âge avancé. Ces personnes souvent plus fragiles physiquement et psychologiquement sont donc plus déstabilisées par un déménagement qui implique de changer d’environnement, d’habitudes, d’abandonner les meubles, les souvenirs,.... Le deuil affectif du logement souvent occupé depuis longtemps est difficile, d’autant plus lorsque le départ n’est pas choisi. Même si la personne est relogée par le bailleur dans un logement situé dans le même immeuble ou même quartier, « le départ reste toujours perçu comme un échec.»1 Quand le déménagement est soumis aux aléas de la vieillesse, il est difficilement accepté. Car cela signifie que l’on ne peut plus se mouvoir comme avant dans son logement, que l’on ne maitrise plus l’espace que l’on a toujours connu, et cela renvoie à notre déclin physique ou mental. Cet effrayant constat freine le départ car beaucoup de personnes ne se considèrent pas comme vieilles et séniles au point de ne plus vivre comme avant. De plus même s’il existe des aides telles que l’APA ou le minimum vieillesse les personnes en logement social sont souvent démunies financièrement, il leur est difficile de payer une maison de retraite ou de nombreux frais pour les services d’aides à domicile quand elles ont besoin d’une surveillance journalière. Il est par ailleurs difficile de déménager vers un autre logement social locatif car le loyer peut être plus important même si c’est un logement plus petit car l’habitat est adapté avec des normes PMR, donc plus récent et souvent plus cher. Il est compréhensible que ces personnes préfèrent rester chez elles pour ne pas dépenser plus que ce qu’elles ne dépensaient avant. Notamment lorsque les personnes sont rentrées dans un logement social le bailleur ne peut la déloger. C’est une sécurité
jusqu’à la fin de leur vie, comme si elles étaient propriétaires mais en payant un loyer. Seulement lorsque arrive des symptômes de difficultés physiques ou mentales se pose la question de l’adaptation du logement, ou du déménagement. Ce dernier cas peut être indispensable lorsque l’habitat devient handicapant, c’est-à-dire qu’il devient source de problèmes au quotidien pour l’habitant.
à quel moment part-on du logement social : quand l’habitat devient souffrance ?
En dehors du logement qui peut devenir inconfortable, il y a aussi le quartier : « nous faisons partie de la génération qui a habité les grands ensembles dans un tout autre contexte socio-politique. La paupérisation de ces quartiers n’était pas si forte et les problèmes de délinquance étaient moins marqués et stigmatisants»2 déclare un locataire âgé de 75
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voir définition dans le lexique du livret commun l’Amicale du logement social
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Témoignage recueillit par des étudiants en L3 dans le cadre d’un travail sociologique UE 53-3 2013/2014, ENSAN
la vieillesse et son habitat
Pour plusieurs raisons, la personne âgée peut être amenée à changer de logement, notamment lorsqu’elle vit des ruptures dans son entourage familial ou environnemental. Tout d’abord, lorsque survient la perte du conjoint : le lieu de vie chargé de souvenirs, le coût et l’entretien du logement deviennent parfois trop difficiles. Madame M., 84 ans locataire d’un domicileservice1 à Rezé raconte : « avant j’habitais une grande maison à étage, mais je ne pouvais pas rester, c’était trop dur pour moi, et puis les souvenirs de mon mari tout ça ». Le logement aussi peut devenir inhospitalier parce qu’à partir d’un certain âge lorsque l’on rencontre une perte d’autonomie avec des difficultés physiques ou mentales, il devient alors compliqué d’utiliser son lieu de vie comme avant. La montée des escaliers, les travaux d’adaptations ou la localisation deviennent des réels inconvénients au quotidien. Le logement devient un espace, que l’on ne contrôle plus. Cette cause du départ est plus souvent vécue par les femmes qui ont une durée de vie plus importante, c’est elles qui se retrouvent souvent veuves, difficilement capables de prendre en charge financièrement la maison car elles ne touchent qu’une petite retraite personnelle et la réversion amoindrie de la pension maritale.
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ans habitant à Malakoff (Nantes) depuis 1981. En effet, le quartier peut tellement changer que les personnes s’y sentent étrangères alors qu’elles y ont toujours vécu. Elles subissent des changements de société, de nouveaux dynamismes, qui peuvent chambouler les habitudes de vie de la personne qui se sent alors menacée par son environnement, cela peut amener à un repli sur soi et dans son domicile, ou à un départ.
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Habiter et vieillir, Vers de nouvelles demeures, p.15
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Témoignage recueillit par des étudiants en L3 dans le cadre d’un travail sociologique UE 53-3 2013/2014, ENSAN
Mais finalement cette volonté de déménagement est « rarement du fait des personnes elles-mêmes, cette décision met en jeu l’entourage, plus ou moins proche. Les proches familiaux y jouent un rôle en négociant avec leur parent âgé les difficultés d’assurer ce « maintien à domicile » parce que la situation devient lourde et surtout risquée pour la personne. »1 Les enfants du parent âgé sont souvent moteurs d’un départ, le rapprochement familial est régulièrement un facteur de choix pour un déménagement ou l’envie de placer son parent dans un habitat où l’on se souciera de lui quotidiennement. Mais cela reste une négociation difficile avec le parent âgé, qui n’est souvent pas d’accord de quitter son logement même s’il ne peut plus y vivre convenablement. « J’ai vu des gens obligés de vendre à 80 ans parce qu’ils ne pouvaient plus monter les marches, les gens ne pensent pas à ça quand ils s’installent dans leur logement, ils ne s’imaginent pas qu’ils vont vieillir, ils veulent rester chez eux mais ne peuvent plus utiliser leur maison » témoigne Viviane, locataire d’un logement social à Saint-Nazaire2. L’anticipation sur son logement est chose peu effectuée, car on se projette rarement sur notre vie et notamment sur notre vieillesse.
une anticipation rare
Cependant on peut imaginer que tout cela évolue et que les personnes anticipent plus jeune un déménagement en vue de leurs possibles futures difficultés. En effet, les générations des baby-boomers, à la différence des générations précédentes voient leurs parents vieillir et difficilement gérer leurs problématiques de logement. Ils développeront alors certainement des stratégies différentes : « on a vu assez loin en
se disant qu’un jour on ne conduirait plus et on a préféré s’habituer encore jeune. On avait les parents de mon mari à la ferme et c’est vrai qu’à la fin, ils attendaient au carreau. L’histoire de tes parents nous a bien servie de leçon. »1 déclare deux époux retraités locataires d’un logement social dans le projet du Ruban Bleu à Saint-Nazaire. Lorsque l’équilibre de vie du domicile est anéanti, et que les évolutions n’ont pas été prévues, la solution trouvée est souvent soit une mobilité (brève ou pas) vers un établissement médicalisé, soit un déménagement vers un habitat plus individuel mais adapté (type foyer-logement) ou comme certains bailleurs le proposent : l’adaptation ou le déplacement vers un autre logement social plus approprié.
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Témoignage recueillit par des étudiants en L3 dans le cadre d’un travail sociologique UE 53-3 2013/2014, ENSAN
une mobilité en logement social parfois assumée
Encore une fois, l’acceptation de cette décision de mobilité dépend du fait que cela ait été un choix ou une contrainte. Cela joue un rôle déterminant, le départ choisi permet de mieux assumer le changement. Dans tous les cas, la solution et la demande semblent être véritablement le maintien à domicile ou du moins la conservation d’un habitat auto-géré dont on détient la clé et les droits. Et les bailleurs sociaux semblent d’accord sur ce point, comme peut le confirmer Christophe
2
rapport PUCA, (Plan Urbanisme Construction Architecture), p.13 3
rapport PUCA, p.16
la vieillesse et son habitat
Il existe de nombreuses histoires de mobilité mais on observe chez les personnes âgées, qui sont propriétaires en majorité : « 73 % des ménages retraités sont propriétaires de leur résidence principale et 76 % sont propriétaires d’au moins un logement, que ce soit leur résidence principale, une résidence secondaire, un logement mis en location, ou encore un logement vacant. »2, une volonté de se « diriger d’avantage vers l’habitat collectif en location, voire vers le locatif social et profiter de ce changement de logement pour choisir une localisation proche des centres urbains et réduire leur espace »3. Les personnes ne vont pas forcément vendre leur maison pour aller en logement social mais si elles rencontrent des difficultés avec leur logement ou qu’elles connaissent le décès de leur conjoint, elles sont souvent amenées à se tourner vers le logement social.
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Lefevre, directeur d’agence d’Habitat 44 : « je pense que la bonne solution c’est de travailler sur les logements actuels pour faire en sorte que les gens puissent y vivre le plus longtemps possibles». Le rôle du secteur du logement social semble donc être de s’adapter à ces nouvelles réalités en aménagent son parc existant et/ou en construisant de nouveaux habitats plus adaptés à ce type de population. Les bailleurs sont soucieux de l’équilibre occupationnel de leur parc tout autant que l’équilibre financier.
conclusion : trouver un équilibre Pour conclure nous pouvons constater qu’il semble nécessaire de trouver un équilibre entre le refus absolu de toute ségrégation et l’impossibilité de nier la spécificité des besoins de certaines personnes âgées. Leur statut social a été amélioré dans le sens où l’on vit plus vieux et dans des conditions physiques et financières meilleures qu’avant. On remarque que le vieillissement de la population est un enjeu fort, qui embarrasse les politiques publiques. En effet, quelle place donner aux plus âgées d’entre nous ? On aimerait répondre logiquement : peut-être la même que celle qu’ils avaient avant leur passage à la retraite ? La vieillesse est avant tout un processus évolutif, dans une continuité et non comme un état définit, absolu. L’hétérogénéité de la population concernée montre l’impossibilité de créer un seul type d’intervention, il y a donc nécessairement de multiples réponses à apporter pour la politique de la ville en faveur de ces personnes, et notamment au niveau de leur habitat. Jusqu’à un âge avancé, la majorité des personnes âgées vivent donc dans leur logement sans handicap particulier lié à l’âge. Ce constat indique bien que la vieillesse n’est que la continuité de la vie, et que l’habitat pour les personnes âgées quel que soit leur niveau de dépendance doit rester tout aussi diversifié que pour le reste de la population. Pour rester conscient de cette réalité, nous allons étudier plusieurs projets qui tentent d’apporter des solutions plus globales ou plus spécifiques, à petite échelle. Nous allons donc voir dans cette nouvelle partie quelles sont les propositions aujourd’hui effectuées en Loire-Atlantique.
deuxième partie : les nouveaux lieux du vieillir 6783 l’innovation à grande échelle : le maintien à domicile 85103 l’innovation à petite échelle : l’habitat, source de rencontres 103106 conclusion : un habitat adaptable ou habité?
Néanmoins, il existe des particularités communes à tous les logements étudiés : il y a eu une attention particulière à l’ajout de barre de sécurité, à la création d’une douche «à l’italienne» donc sans marche-pied, ou à des prises électriques à hauteur de mains entre autres. Ces éléments paraissent essentiels à tous pour qualifier un habitat destiné aux personnes âgées. Mais sont-ce les seules solutions d’estimer un logement comme approprié aux conditions de vie des personnes vieillissantes ?
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définition dans le Lexique du livret L’amicale du logement social
les nouveaux lieux du vieillir
Avec les normes PMR1 (Personne à Mobilité Réduite) obligatoires aujourd’hui dans toute construction neuve, la question de l’accessibilité n’est plus un enjeu. Tout logement peut accueillir une personne handicapée, quelle soit vieillissante ou non. De plus, une personne âgée n’est pas forcément sujette à des problèmes de santé qui l’empêche de se mouvoir dans son logement. Donc le logement social spécifique aux personnes âgées est aussi complexe à définir que le statut de la personne âgée elle-même.
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Nous allons d’abord étudier la manière dont les acteurs qui gravitent autour du logement social et de la vieillesse, agissent. Nous commencerons par examiner la manière dont procèdent les bailleurs et les institutions départementales afin d’adapter leur parc existant. Comme nous l’avons constaté auparavant les personnes veulent rester vieillir chez elles, ce fait est connu et reconnu par les bailleurs puisque leur politique première est celle de l’adaptation, ils répondent donc en faveur de la demande manifeste. Mais qu’entend-on par cela ? Est-ce une solution qui convient à tous ? Comment répond-elle aux demandes spécifiques de chacun au vu de l’hétérogénéité de la population concernée ? Ces enjeux seront explicités selon les actions de la politique de la ville de Nantes et de celle du bailleur social : Nantes-Habitat. En deuxième temps, nous examinerons trois typologies de projets à petite échelle présents dans le département LoireAtlantique. Ainsi, nous étudierons l’habitat pour les personnes âgées selon le discours de la population, des architectes, et enfin du point de vue d’une mutuelle particulièrement active pour les retraités sur Nantes : Mutualité Retraite. Toutes ces études nous permettront de constater la manière dont ces divers protagonistes parlent et agissent sur l’espace social habité par la vieillesse.
On sait à présent que la politique du « maintien à domicile » n’est pas nouvelle puisque déjà en 1962, avec le rapport Laroque, cette problématique était déjà une préoccupation majeure. Il existe un fort consensus pour le maintien à domicile qui répond à la demande sociale. Pour les acteurs que nous allons étudier, la question qui se pose est celle du rôle qu’ils peuvent jouer pour le maintien des personnes âgées à leur domicile, ce que souhaite la très grande majorité d’entre elles. Comment peuvent-ils adapter le logement pour une personne avec un état de santé et une situation familiale qui ne correspond plus à cet habitat ?
une adaptation matérielle et humaine Le mouvement HLM de par sa vocation sociale s’est toujours préoccupé de l’habitat des personnes âgées. Déjà
les nouveaux lieux du vieillir
l’innovation à grande échelle : le maintien à domicile
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par la construction de foyers-logements, mais aussi à travers des initiatives innovantes mais isolées. Le rôle des bailleurs sociaux est crucial face à la demande toujours plus forte de vivre son vieillissement à domicile, alors même que le nombre de places en établissements risque d’être toujours plus insuffisant. De plus, il existe une augmentation de personnes éligibles au logement social et notamment de personnes âgées, car plus précaires financièrement, ce qui complique la situation et oblige les bailleurs à proposer des solutions. Cependant, il existe peu de logements spécifiques réservés aux personnes âgées, « tous les logements sociaux sont destinés à tout le monde, on donne évidemment une priorité aux personnes âgées ou à mobilité réduite quand les logements permettent d’accueillir ce type de public » précise Christophe Lefevre, directeur d’agence de Habitat 44-Rezé. Cette démarche d’adaptabilité est habituellement effectuée par les bailleurs sociaux puisqu’ils doivent respecter des normes (PMR) et notamment en matière d’accessibilité. Ce levier d’action leur permet de rendre les logements plus attractifs et d’aller vers une occupation plus diversifiée, entrainant l’augmentation de la mixité sociale et générationnelle à l’intérieur des immeubles. Mais ces logements ne sont souvent pas réservés spécifiquement pour les personnes vieillissantes. Ici nous allons étudier le cas des « logements bleus », une solution de grande ampleur où les logements sont « bloqués » pour les personnes âgées. Avec ces projets les bailleurs ont mis en place des stratégies pour que l’habitat ne soit plus un endroit hostile à la personne âgée avec le refus de créer des « ghettos de vieux » comme certains foyers-logements ou maisons de retraite, mal vécus et rejetés par cette population. 1
défintion dans la partie Bailleurs sociaux et Lexique du livret L’amicale du logement social
une coopération facile
La ville de Nantes et le bailleur social Nantes Habitat1 sont en partenariat depuis 2008 pour répondre aux demandes d’adaptations souhaitées par les locataires par le dispositif : « logement bleu ». Le déclenchement s’est effectué lorsque la ville et le bailleur ont mesuré l’importante augmentation
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visite immersive d’un logement bleu sur le site de Nanteshabitat 1 salle de bains avec mitigeur, barre de maitien, paroi de douche, sol anti-dérapant
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2 salon avec volets électriques et prise à hauteur (1,1m) 3 cuisine avec prises à hauteur (1,1m) et volets électriques
3
des personnes âgées notamment dans le parc locatif social. L’envie de ses personnes de se maintenir à domicile et le besoin d’accompagnement humain de cette population suite à la canicule de 2003 qui a causé une mortalité importante chez les plus de 75 ans. Cette collaboration s’est faite très simplement sur ce constat commun, Nantes-Habitat avait déjà « une démarche d’adaptabilité de ses logements aux handicaps de tout genre depuis 1995 », c’est le bailleur le plus important sur la ville de Nantes, tous son parc locatif y est concentré, il travaille donc sur le même territoire géographique que la ville de Nantes : ce qui facilite les partenariats avec les services de la ville, qu’il connait depuis « très très longtemps, on s’est retrouvé naturellement parce qu’on a déjà des partenariats sur plein de problématiques» souligne Katell Brieuc, responsable des logements bleus à Nantes-Habitat.
une solution prévue à court terme et stratégique
Il est proposé aux personnes de plus de 65 ans locataires de Nantes-Habitat ou à celles qui ont des besoins en matière de logement et de services à la personne, et qui répondent aux critères d’attributions de logement sociaux (en fonction des plafonds de ressources). Tous les locataires âgées sont recensés et ceux susceptibles de bénéficier d’un logement bleu se voient proposés des plaquettes informatives sur le dispositif. Ces logements se dénombrent au total de 1000 (ce chiffre a été exécuté pendant cinq ans durant le mandat municipal de l’ancien maire de Nantes, Jean-Marc Ayrault), ils sont répartis dans le patrimoine existant de Nantes-Habitat dans tous les quartiers. Ils ont été ciblés selon des critères bien précis avec la volonté d’éviter de les concentrer pour ne pas créer des « résidences » de personnes âgées. Géographiquement en dehors du fait qu’ils soient dispersés dans toute la ville, NantesHabitat a repéré des logements qui se trouvaient « près des commerces, des transports en commun, des services de la ville, associatifs mais aussi des logements relativement accessibles, au rez-de-chaussée ou aux
étages mais avec ascenseurs ». Les autres critères ont été de trouver des logements déjà occupés par des personnes de plus de 65 ans et qui ne dépassaient pas le type T3 pour ne pas engendrer de la sous-occupation, les personnes âgées vivant souvent seules ou en couple. Les personnes âgées se sont vues proposer ce dispositif lorsque leur appartement avait été labellisé « logement bleu » mais elles ont eu le choix d’accepter ou non les adaptations, et peuvent aujourd’hui revenir sur leur décision, leur habitat est, et restera labellisé, les travaux pourront être déclenchés quand ils le voudront.
le « Pack Logement Bleu » : une solution unique mais ajustable
Pour la ville de Nantes (service du CLIC dépendant du CCAS) leur rôle consiste à évaluer les situations des locataires pour ensuite proposer des services à la personne comme l’aide à domicile, la télé-assistance, le portage de repas, les soins infirmiers, etc. Le CLIC est en partenariat (c’est-à-dire que ce n’est pas lui qui effectue ces services) avec des associations de la ville de Nantes, ou des services sociaux. Cette collaboration permet d’informer la personne sur l’existence de ces services et de faciliter les démarches. Ces offres d’adaptabilités et de services sociaux, sont proposées à tous, mais chaque personne ajuste suivant ses besoins. Il peut donc être décidé que seulement quelque-uns des critères soient mis en place. Les logements ne sont pas figés, le locataire peut revenir sur sa décision et contacter le bailleur afin qu’il revienne
les nouveaux lieux du vieillir
Le dispositif consiste pour Nantes-Habitat à adapter le logement de la personne en proposant différentes installations standards, comme : une douche à l’italienne, un sol anti-dérapant dans la salle de bains, des prises à hauteur d’accès, des barres d’appui, des témoins lumineux sur les interrupteurs ou la motorisation des volets. Mais aussi de proposer une accessibilité minimum à l’immeuble : rampe d’accès, ascenseurs, proximité des transports et des commerces.
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installer un élément manquant, ou souhaiter une aide sociale quelques années plus tard. Ainsi bien que les « logements bleus » soit une réponse globale, elle est individuellement ajustable.
les logements bleus : des solutions
Cependant tel qu’il est proposé par Nantes-habitat et la ville de Nantes, le maintien à domicile n’est pas une prétention de solution fermée, unique mais comme une diversité de solution. Chaque aménagement s’adaptant au vouloir et aux nécessités de l’habitant, lui permettant ainsi de conserver le contrôle de son habitat. C’est l’habitant qui continue de décider la manière dont il veut vivre mieux dans l’instant. On peut envisager que cette proposition puisse être une forme de réponse pour les logements existants. Surtout que cette demande d’adaptabilité devrait augmenter dans les prochaines années par rapport à l’augmentation du nombre de personnes âgées.
un dispositif peu onéreux
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site de l’ANAH, www.strategie.gouv/ logement dépendance
Ce dispositif n’engendre aucun coût pour l’habitant, tout est pris en charge par le bailleur. Ce dernier bénéficie d’un dispositif fiscal engagé par l’Etat qui consiste à un dégrèvement de la Taxe Foncière sur les Propriétés Bâties (TFPB). Ceci, à hauteur des factures qui ont été engagées pour les travaux d’accessibilité ou d’adaptations des logements pour les personnes âgées ou en situation de handicap. La stratégie financière du gouvernement est de favoriser l’adaptabilité des logements sociaux. Au niveau des aides nationales il existe donc l’ANAH (Agence Nationale de l’Habitat) qui propose des subventions aux bailleurs désirant réaliser des travaux d’adaptations de leur logement ou d’accessibilité des parties communes. Ces subventions sont délivrées pour un certain type d’aménagements comme par exemple l’installation de volets roulants ou de sols antidérapants avec un montant maximum couvrant 35% du prix des travaux.1 Ces aides permettent d’adapter à moindre coût un logement sans créer de frais supplémentaires trop importants pour le bailleur social. C’est ce qui a permis à la ville de Nantes
et au bailleur de créer 1000 logements en 5 ans.
le logement pour vieux n’est pas un logement pour handicapé
Les aménagements ont été effectués sur un patrimoine existant, ce qui n’a pas laissé une grande liberté d’adaptation : « on est restés sur des choses standards »1, et c’est ce qui n’a pas pu installer les logements en PMR. La plupart des immeubles sont en rezde-chaussée surélevé, sans ascenseurs (seul 10% du parc de Nantes-Habitat en détient un), car c’est ce qui correspondait aux normes de l’époque de leur construction. De plus, la volonté était de ne pas placer les personnes âgées en tant qu’handicapés. Lorsqu’une personne se retrouve en fauteuil roulant ou en déambulateur, il est préconisé un déménagement, plutôt qu’une adaptation parce que cette dernière solution a les limites du logement existant.
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propos tenus par Katell Brieuc, responsable des logements bleus, Nantes-Habitat
l’accessibilité pour tous : non spécifique aux les personnes âgées
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propos tenus par Christophe Lefevre, directeur d’agence Habitat-44-Rezé
les nouveaux lieux du vieillir
Des bailleurs, comme Habitat 44, œuvrent aussi à l’adaptation du domicile ou au relogement, notamment suite à l’appel effectué par le PUCA (Plan Urbanisme Construction Architecture), un organisme financé par l’Union Européenne qui a demandé aux bailleurs une réflexion sur l’accessibilité de leurs logements notamment par rapport au positionnement des immeubles : s’ils sont placés sur des terrains en pente, facile d’accès par rapport aux commerces, aux institutions, aux transports en commun, ou par rapport aux parties communes : portes de halls pas trop lourdes à pousser, escaliers pas trop long, appuis pour monter les marches. Toutes ces prérogatives ont initié les efforts d’aménagements de la part des bailleurs, Habitat 44 dispose « de plus de 3000 logements qui sont facilement accessibles sur [son] patrimoine »2. En plus de bénéficier aux personnes âgées ces aménagements profitent aussi aux handicapés, aux enfants, aux femmes enceintes, etc. En outre, cela permet simultanément aux personnes âgées d’être intégrés au sein des populations actives.
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la « veille sociale » : une offre de service gérée par la ville de Nantes
Pour revenir sur les logements bleus, la caractéristique principale qui le démarque des autres projets en faveur des locataires âgées est : l’aide sociale apportée et comprise lors de l’accession au logement. « Les logements bleus sont une spécificité de la ville de Nantes. Mais la spécificité n’est pas simplement l’adaptation, c’est-à-dire le remplacement d’une baignoire par une douche par exemple, le volet social y est primordial ! » souligne la responsable Katell Brieuc des logements bleus à Nantes Habitat. Si les logements bleus prennent en compte le plan matériel c’est-à-dire l’adaptation de l’habitat, des résidences à taille humaine ils prennent aussi en compte le plan social avec la proposition de services à la personne. Ce suivi humain est ce qu’on appelle la « veille sociale ».
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les aidants sont les personnes qui entourent et aident la personne âgée, bien souvent la famille.
Actuellement l’offre patrimoniale est pratiquement bouclée, chacun des 1000 logements a connu les adaptations que souhaitait son habitant. Il subsiste aujourd’hui l’autre partie de l’opération : le suivi social permanent. Celui-ci est assuré par des « évaluateurs » des services du CLIC, dépendant du CCAS de Loire-Atlantique. Ce ne sont ici que des femmes donc on les nomment les évaluatrices. Elles sont aussi appelées « référentes de territoire », leur rôle est de rendre visite aux locataires des logements bleus et ce de manière régulière, afin de définir selon des critères la mise en place ou non de services et de mobiliers adaptés. Elles effectuent alors un plan d’aide personnalisé. Cette démarche a été effectuée une première fois avant d’adapter le logement, aujourd’hui c’est la seconde étape : elles retournent visiter chaque personne pour connaître leur satisfaction et leurs nouveaux besoins, afin de repérer les bonnes ou mauvaises situations de vie. Par la suite, les visites se feront plus ou moins régulièrement à la demande du locataire selon son état de santé et ses ressources en terme d’« aidants »1. Cela est déterminé en fonction d’une grille d’évaluation précise (la grille AGGIR), l’évaluatrice va établir le degré de dépendance, c’est-à-dire le nombre d’heure d’aide à domicile nécessaire au bien-être de la
personne âgée. Cette veille sociale est pour le bailleur et la ville, aussi importante que l’adaptation matérielle : « c’est à la fois une offre patrimoniale pour que les gens puissent rester chez eux plus longtemps mais c’est aussi et beaucoup cette présence pour lutter contre l’isolement des personnes âgées » estime Katell Brieuc, car le lien social est ce qui va permettre à la personne de ne pas se retrouver seule en situation de détresse physique ou mentale.
saturation de l’offre
Cependant sur le long terme, le nombre de 1000 logements bleus va devenir insuffisant par rapport à la demande. Actuellement, cette demande d’augmentation n’est pas envisagée par Nantes-Habitat, « parce qu’on retire déjà cette offre accessible à tous du parc locatif social », les logements sont bloqués spécifiquement pour les personnes âgées donc cela fait 1000 logements en moins pour les autres locataires. De plus, un des critères qui a été fixé pour déterminer ces logements spécifiques dépend de l’accessibilité, or seulement 10% du patrimoine locatif de Nantes-Habitat est desservi par un ascenseur. Il est donc difficile d’augmenter le nombre de logement bleus dans le parc actuel. L’enjeu aujourd’hui est d’étendre ce dispositif sur l’ensemble du département aux autres bailleurs qui eux disposent peut-
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Principaux résultats de l’enquête des logements bleus 2013. (documents donnés par Nantes-Habitat)
les nouveaux lieux du vieillir
L’intérêt de ce dispositif réside dans ce qu’il constitue une réponse de masse à un enjeu démographique. En effet, cela permet de contribuer au maintien à domicile des personnes âgées aux ressources modestes, sans avoir à élaborer des innovations coûteuses et non accessibles à tous, en matière de construction de logement. La satisfaction des locataires est grande : « 96% des locataires sont satisfaits des travaux, le logement est maintenant adapté à leurs besoins et 97% conseilleraient aux autres personnes de demander un logement bleu »1.
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être d’un patrimoine accessible.
extension du dispositif aux autres bailleurs
Actuellement de nombreux bailleurs, en Loire-Atlantique ou ailleurs en France, effectuent des adaptations techniques dans les logements quand une personne âgée les sollicitent. Ou alors proposent un relogement au rez-de-chaussée de l’immeuble par exemple ou dans un autre bâtiment avec ascenseur.
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propos tenus par Christine Desbois, évaluatrice du CLIC Nant’entourâge
L’enjeu du concept des logements bleus avec le système de veille sociale est de le contractualiser avec d’autres opérateurs au niveau de la métropole pour que chaque bailleur puisse avoir des logements adaptés à l’avancée en âge de leurs locataires. Actuellement le partenariat entre la ville de Nantes et les autres bailleurs n’est pas encore statué : « les termes des contrats ne sont pas arrêtés aujourd’hui, en tant qu’évaluatrice du CLIC nous n’avons pas encore d’élément sur ce sujet »1. Mais il va s’enclencher prochainement, cependant cela prendra plus de temps qu’avec Nantes-Habitat car les autres bailleurs sociaux eux sont beaucoup plus dispersés dans le département, souvent sur plusieurs communes ce qui ne facilite pas les coopérations. En effet, lorsque un bailleur à son parc locatif dispersé sur différents secteurs géographiques, les enjeux divergent ainsi que les commissions d’attribution de logements, c’est alors plus complexe de trouver un consensus entre les différents acteurs. Et pourtant comme le souligne la responsable des logements bleus chez Nantes-Habitat, Katell Brieuc : « ce dispositif pour qu’il évolue, il faut qu’il aille sur la dimension de la communauté urbaine maintenant». Donc l’enjeu est que ce dispositif des logements bleus s’élargisse. Néanmoins pour que cela fonctionne à plus grande échelle, la solution serait que les autres bailleurs se fassent aider par le département pour tenter de faciliter les démarches de collaboration. Et, que les CCAS et CLIC de la Région aient des politiques moins locales.
le rôle des politiques municipales et nationales : inscrire les personnes âgées au cœur de la cité La volonté politique du département est « d’aider les personnes âgées qui le souhaitent à continuer de vivre chez elles »1. Le maintien à domicile est une priorité. C’est une solution économe résolvant d’une certaine manière le débat social sur les retraites et l’augmentation démographique, qui pose la question de savoir comment on prendra en charge toute cette nouvelle masse de personnes âgées. C’est aussi une approche qui cherche à formaliser un habitat plus intégré dans la ville et plus adapté aux attentes évolutives des personnes.
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Mais les mesures d’adaptations du logement sont insuffisantes si elles ne sont pas conçues en parallèle avec un certain nombre de services, surtout quand la proximité géographique avec la famille est moindre. Comment les besoins des personnes âgées modestes sont-ils pris en compte au niveau local par les villes ? Quel accompagnement spécifique peut-on mettre en place pour les personnes âgées en situation précaires et en perte d’autonomie ?
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Colloque de Marly, Habitat et marginalité, p.103 3
site de la ville de Nantes, consulté en juin 2014
les nouveaux lieux du vieillir
Les politiques nationales : « reposent sur des plans d’action prônant le maintien à domicile et pour cela trois types d’actions doivent être engendré : les services d’aides et de soins à domicile, les équipements légers de quartier que sont les clubs et associations et les centres de jour.»2 En effet, le département Loire-Atlantique accueille de nombreuses associations d’aide à domicile, de club des ainés, … Ce sont des acteurs importants dans la vie des personnes âgées. De plus, il gère et délivre l’APA (Allocation Personnalisé d’Autonomie) à plus de 9000 personnes résidant à leur domicile3. Cette aide financière permet de payer des services de télé-assistance (7jours sur 7 et 24H/24) ainsi qu’une aide à domicile (ménage,
Vidéo « que fais le département pour les personnes âgées ? » consulté en juillet 2014 sur le site : http://www. loire-atlantique. fr/jcms/services/ personnesagees-retraitesfr-c_5029
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voir la carte de leur emplacement dans la partie annexe, p.119
courses, repas, toilettes) pour les personnes à faibles ressources. Le département finance aussi les 20 CLIC1 situés en LoireAtlantique. Ces CLIC permettent de coordonner tous les services d’aides à la personne et de favoriser la lisibilité des informations. « On est pas un service social, mais on est en partenariat avec les associations d’aides à domiciles, des services sociaux, parfois même des médecins » souligne Christine Desbois, évaluatrice du CLIC.
l’accompagnement social : le moyen d’action de la ville
2
Opération SOS Taudis, fondation Abbé-Pierre in Les cahiers de la profession, 2009.
Le rôle des CLIC ou des CCAS est parfois délicat : ils détectent des situations de détresse, des personnes très isolées mais ces personnes n’expriment pas forcément de demandes précises. « comme elles sont habituées à vivre de cette manière, elles n’ont pas de demande particulière. Il faut des mois avant qu’elles ne prennent conscience qu’elles ont envie de vivre autrement. Plus la situation existe depuis longtemps, plus elles s’y sont accoutumées, plus elles sont fragilisées au plan psychologique et plus c’est compliqué »2 Les personnes entourées par leur famille ou ayant un réseau social important peuvent plus facilement parler de leurs problèmes et leurs proches peuvent détecter plus facilement des situations d’inconfort. La question qui se pose après, est jusqu’où doit-on aller ? Si une personne ne réclame pas d’aide, même si elle semble avoir quelques difficultés, comment lui imposer un mode de vie normé ? Si les évaluatrices s’arrêtent aux demandes de la personne, les actions seront plus difficilement imposable. Mais elles ne peuvent soumettre une adaptation à une personne, il faut prendre en compte les envies de la personne. Cette ambivalence montre qu’il faut agir avec une approche globale prenant en compte l’état psychologique de la personne et l’accompagner avec des services sociaux. Le lieu de vie participe de l’identité de la personne, matériellement et psychiquement. Il n’est pas forcément toujours bien vécu parce qu’il peut refléter l’évolution d’usage des espaces. Psychologiquement le maintien à domicile n’est pas toujours facile. Le maintien à domicile se met en place avec les logements bleus dans une réflexion globale, « cette mise
photos du Guide du soutien à domicile et des établissements réalisé par le CLIC Nantes Entour’âge 1 la ville gère des restaurants collectifs, p.23 2 le CLIC assiste dans la mise en place de l’aide à domicile, p.7
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2
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3 évaluation du besoin d’aide, possibilité d’hébergement temporaire dans un établissement médicalisé, p. 43
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Florence Brunet, Les cahiers de profession banlieue, p.71
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résultats de l’enquête de satisfaction sur les logements bleus, documents de NantesHabitat
en place ne peut se faire qu’en accord avec la personne concernée et à sa demande, ce qui nécessite bien souvent en amont un travail de conviction ».1 il est difficile d’accepter une personne étrangère venir bousculer un quotidien, une intimité. Les coordinatrices du CLIC procèdent par étapes, elles distribuent tout d’abord un guide recensant toutes les aides à domicile disponibles sur la ville puis prennent soin de demander au locataire âgé s’il est d’accord pour continuer à voir l’évaluatrice, qu’elle prenne de ses nouvelles… Les personnes refusent ou non. Pour la personne fragile qui refuse : « elle sait que demain elle peut nous appeler et nous l’accompagneront, nous lui trouverons un suivi social adéquat mais on peut pas obliger quelqu’un à être aidé s’il ne veut pas » Et, c’est ce qu’on peut remarquer dans la plupart des cas, environ 70%2, les personnes souhaitent être recontactés seulement un an après par la personne de la ville de Nantes. Ce délai important permet à la personne d’assumer sa volonté de demande d’aide, ce qui devient plus facile à accepter et intégrer au quotidien. C’est pour cela que la ville de Nantes favorise le dispositif des logements bleus et positionne le CLIC sur ce projet afin d’élaborer un partenariat social régulier en rapport avec le logement de la personne tout en laissant le temps faire et la personne décider d’elle-même l’accès à des services. « La richesse du dispositif est d’avoir ce regard que va porter sur la personne le CLIC, en allant les visiter, et en proposant de repasser dans six mois, dans un an … quand la personne ne ressent pas de besoin précis, ou n’est pas prête » déclare Katell Brieuc de Nantes-Habitat. Le dispositif reste à l’écoute de l’habitant et s’ajuste à lui plutôt que l’inverse.
l’accueil de jour
L’action de la ville s’accompagne aussi du développement des lieux d’accueil de jour et des hébergements temporaires. Ce système consiste à se déplacer une demi-journée ou plusieurs jours par semaine dans un centre d’accueil de proximité où les personnes bénéficient d’activités ou de soins médicaux, permettant à la famille ou aux aides à domiciles d’alléger leurs responsabilités. Ces structures d’accueil de jour sont souvent
Grâce au développement des aides à domiciles et des logements mieux adaptés aux handicaps, l’entrée en institution se fait de plus en plus tardive. Ce constat incite les politiques à prôner la tendance du maintien à domicile, cela permet de désengorger les demandes en maison de retraite ou en structure d’accueil autre. Cependant le département continue de favoriser la création des EHPAD. Cette initiative de multiplier toujours plus les places en établissement médicalisé semble vaine, d’abord parce que tout le monde n’a pas forcément besoin de soin, ensuite parce qu’une journée en maison de retraite revient en moyenne à 60 euros.2 Ce coût supplémentaire ne peut pas forcément être pris en charge par les personnes vivant en logement social. Ce constat est aussi souligné par le directeur d’agence d’Habitat 44, : « ce n’est pas une solution à terme, ça n’a aucun sens de construire autant d’établissements qu’il faudrait pour toutes les demandes, je pense que la bonne solution c’est de travailler sur les logements actuels pour faire en sorte que les gens puissent y vivre le plus longtemps possible ». Il faut néanmoins prendre en compte que l’ EHPAD est une réponse nécessaire pour certaines personnes, mais non généralisable. Les personnes âgées résidantes en logement social peuvent parfois payer une ou deux journées en
1
voir définition dans le lexique du livret commun l’Amicale du logement social
2 http://www. liberation.fr/ societe/2013/02 /07/une-journee -en-maison-deretraite-coute-en -moyenne-61euros_880117
les nouveaux lieux du vieillir
proposées par des EHPA(D)1. Ces établissements ouvrent aussi leurs services à des personnes n’y résidant pas à l’année. Cette solution favorise le maintien à domicile tout en faisant des séjours de courte durée dans des établissements spécialisés. La personne conserve une semi-autonomie qui lui permet de rester décideuse de sa vie tout en étant suivie médicalement et entourée socialement. Elle garde ainsi une certaine indépendance et est stimulée. Mais cet assistanat à la journée ballotte une personne âgée entre son domicile et l’institution médicalisée, on la place dans divers endroits pour se décharger. Est-ce pour ces personnes la meilleure stabilité et maîtrise de leur environnement possible ? Le fait de ne pas avoir une place fixe au sein de la société peut être à la fois enrichissant et en même temps ces personnes ne sont jamais intégrées pleinement à un milieu.
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établissement médicalisé pour des soins spécifiques.
au niveau de l’urbanisme
L’adaptation du logement est donc évidemment le premier enjeu. Mais pas le seul. Le logement est familier, sécurisant, l’habitant le maitrise, beaucoup plus que son environnement extérieur. Traiter cet environnement en parallèle avec l’adaptation du logement sont deux démarches indissociables pour favoriser le maintien à domicile, car ce « domicile » ne s’arrête pas au périmètre du logement, mais englobe le quartier, la ville. Il existe une réelle interaction entre les handicaps liés à l’âge et l’environnement extérieur : ce dernier peut atténuer ou accentuer les fragilités de l’individu. Il semble donc primordial de rendre la rue plus hospitalière aux personnes vieillissantes. Cela se joue sur la porosité des lieux pratiqués, c’est-àdire que le rôle des politiques publiques est d’exiger une qualité d’organisation urbaine qui permette aux personnes vieillissantes de pratiquer la ville tout aussi aisément que les autres personnes. Pour cela il est nécessaire de diversifier et de multiplier les transports en commun, de les situer proches des domiciles, que l’espace public contienne des bancs à proximité de l’immeuble, des stationnements automobiles, des cheminements extérieurs éclairés et protégés, de faire du site environnant un espace ouvert, où il y a des activités, de l’animation, du passage, permettant ainsi de garantir du lien social et la mixité des publics. Mais aussi d’implantation de centres commerciaux dans les centres-villes et leur facilité d’accès qui doit être favorisée pour permettre l’autonomie de la personne. Toutes ces préconisations sont revendiquées par le système des logements bleus et s’affichent dans le message politique de la ville.
des outils pour raisonner sur le long terme
Ces volontés sont inscrites dans les « schémas gérontologiques » qui sont des plans d’action réguliers (tous les cinq ans) instaurés par la Région. Ils permettent de cibler les enjeux essentiels et
de déterminer un plan d’action afin d’adapter en amont les infrastructures au vieillissement progressif des populations. La région explore aussi les possibilités diverses d’occupation d’un logement, en rédigeant des guides d’orientation pour l’habitat des personnes âgées. Elle exploite aussi les SCOT1, outil précieux pour améliorer le dynamisme des territoires en faveur de l’allongement de la vie.
1
Schéma de Cohérence Territoriale, voir lexique p.117
Le maintien à domicile paraît donc une solution qui convient à tout le monde, tant au niveau des bailleurs, que des politiques ou de la population. Mais est-elle adaptée à tous les types de cas ? Et n’y a-t-il pas d’autres solutions de logements intermédiaires ? C’est ce que préconise le département. En effet, certaines personnes sont obligées de quitter leur logement en raison de leur état de santé très dégradé et dont l’entourage ne peut plus s’occuper, se pose alors souvent la question du financement d’un établissement. On sait que le maintien à domicile n’est pas toujours possible, pour des raisons techniques (logement trop grand ou trop petit, mal adapté), financières, psychologiques (isolement) ou de santé. Ce départ peut ne pas être dans un établissement médicalisé, mais rester dans un autre logement dont on reste maître des lieux. C’est ce dont nous allons nous intéresser maintenant : les innovations en terme de parc locatif neuf. Qu’est-ce qu’un logement pour personne âgée ? Nous verrons cela suivant l’initiative des personnes vieillissantes elles-mêmes puis par les architectes et enfin par un acteur habituellement peu relié au logement social : les mutuelles.
les nouveaux lieux du vieillir
La liste des outils pour raisonner sur le long terme n’est ici pas exhaustive, et là n’est pas l’intérêt : il s’agit simplement de constater par la lecture de ces quelques documents l’attention que montre le département de Loire-Atlantique pour les questions de vieillissement et l’envie d’installer une réflexion large à long terme.
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Le secteur du logement social cherche donc à s’adapter aux réalités nouvelles en terme de vieillissement de la population, et ce tant au niveau de l’aménagement du parc existant que de la mise en chantier de nouvelles constructions. Ces nouveaux projets ne correspondent en aucun cas aux besoins de l’ensemble de la population des personnes âgées, mais tentent de proposer des solutions selon des problématiques spécifiques. On peut imaginer que les projets suivants ne peuvent être inscrits que dans un contexte particulier et non reproductibles ou du moins pas à grande échelle. Les spécificités trop importantes de la population étudiée ne peuvent s’accommoder que d’une seule proposition. Néanmoins ces projets proposent tous des lieux qui favorisent l’échange, la rencontre et notamment entre les générations. Les actions de regroupements d‘habitats individuels spécifiques aux personnes âgées sont plutôt dispersées sur le territoire même si la plupart se font en zone rurale et ont vu le jour pour maintenir les habitants sur le territoire
les nouveaux lieux du vieillir
l’innovation à petite échelle : l’habitat, source de rencontre
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(cf carte d’emplacement des projets en annexe p.120). Vieillir à la campagne ou dans le périurbain peut être parfois plus intéressant en matière de tranquillité, ce n’est pas un problème si les logements sont situés au centre bourg ou à proximité des services (commerces, équipements et transports) et des lieux d’animations ou intégrés dans des équipements publics, sociaux ou de santé.
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Dossier de presse logement bleus Nantes-habitat 2013
Donc, intéressons-nous tout d’abord aux initiatives prises par la population, car ce sont les premiers concernées par l’habitat social. Puisqu’aujourd’hui 70% de la population peut prétendre au logement HLM et 11% sont des retraités.1 Peutêtre que leurs solutions sont les plus justes puisque ce sont eux les porteurs de la demande ?
quand l’habitant réinterroge son habitat Les habitants sont sollicités par les municipalités pour connaître leurs besoins en terme d’habitat, mais de leur propre initiative, ils peuvent aussi convoquer le politique et être porteurs d’un projet. 2
voir définition dans le lexique p.114
L’exemple du projet de l’ilot Bessonneau à Couëron, nous démontre bien cela. C’est une initiative proposée à la municipalité par le « Conseil des Sages »2 et le CLRPAC (Comité Local des Retraités et Personnes Âgées de Couëron)3.
3
Ibidem, p.113
Le projet s’est mis en place en 2005 suite au constat d’un manque d’accueil grandissant pour les personnes âgées sur la commune : il n’existait qu’une seule maison de retraite, pas d’habitats intermédiaires, alors « qu’il y a plus de 4000 personnes de plus de 70 ans à Couëron » souligne un membre du CLRPAC. C’est aussi suite à un questionnaire délivré aux personnes âgées
1 1 photo personnelle. vue des façades Est depuis la rue
2
3
2 photo du site des architectes Enet-Dolowy. vue intérieure de l’ilôt avec la crèche «Les Lapins Bleus» photo 3 photo du site de la ville de Couëron. vue intérieure de l’ilôt avec la crèche «Les Lapins Bleus»
4
4 photo personnelle. vue des façades Nord depuis la rue (partie locative sociale Voisin’âge)
de la commune, qui a permis de conclure que le maintien à domicile restait la demande générale. Après avoir convaincu la mairie que ce projet était nécessaire, les membres du Conseil des Sages et du CLRPAC ont constitué un groupe de travail et se sont impliqués dans les différentes phases d’études pour la préparation du projet. Leurs exigences notamment vis-à-vis de l’adaptabilité des logements pour personnes âgées ont été respectées.
1
voir définition dans la partie Bailleurs sociaux du livret L’amicale du logement social
Le projet a été mené afin de proposer une nouvelle alternative de logement où les personnes âgées sont moins stigmatisées et mieux intégrées, dans une mixité sociale. Une solution pour le maintien à domicile qui promeut les solidarités et la lutte contre l’isolement ainsi que la suppression des préjugés malmenant la vieillesse. Le projet situé proche du centre-ville et de la maison de retraite contient : une crèche, une résidence locative sociale Voisin’âge (géré par le bailleur social : SAMO1), un ADAPEI (Association Départementale des Amis et Parents de personnes handicapées mentales), un centre médico-social ainsi que 53 logements en accession à la propriété (géré par le promoteur : ICADE). Cette mixité sociale et générationnelle est la base principale du projet. Il s’est construit de 2009 à 2011 (aménagement des premiers habitants) et regroupe aujourd’hui une centaine d’habitants venant de Couëron ou d’ailleurs.
un projet, pas à la hauteur des espérances
Le concept du site Bessonneau s’est inspiré d’un projet existant à Saint-Apollinaire, commune située en Bourgogne, qui a été visité en amont par le Conseil des sages et le CLRPAC. «Le projet au départ était plus ambitieux, ça devait être vraiment un site intergénérationnel comme à Saint-Apollinaire, avec les salles d’accueils, un domicile-service avec Mutualité Retraite, des commerces, mais ça ne s’est pas fait pour des raisons financières et un manque de superficie» déclare un membre du Conseil des Sages. Il regrette aussi qu’il n’y ait pas de suivi permanent pour les personnes âgées, qui peuvent quand même avoir des aides à domicile, mais cela n’est pas
suffisant selon lui.
une triple mixité
Il y a une mixité sociale : la résidence ADAPEI qui accueille des personnes handicapées mentales y participe, des activités en commun avec les personnes âgées et la crèche les relient socialement. De plus, les personnes âgées et les handicapés habituellement peu intégrés dans la cité sont ici inscrits fortement dans le projet. La mixité sociale s’observe aussi par la juxtaposition de logements sociaux et de logements en accession à la propriété. La partie privée a notamment pris naissance parce qu’à l’époque il y avait les parents des enfants handicapés (de l’ADAPEI) qui souhaitaient acheter un logement à proximité. Il n’y en a finalement pas, mais le but était de lier cette partie avec les autres par ces contacts familiaux. Il y a aussi une mixité fonctionnelle par la superposition d’une crèche avec un ADAPEI, ainsi qu’un cabinet médical, paramédical et médico-social. Toutes ces activités garantissent une ouverture de l’îlot, permettant d’accueillir les habitants venant des autres quartiers de Couëron, ou autre. Cela crée une dynamique qui permet de ne pas enclaver le projet.
les nouveaux lieux du vieillir
Malgré ces déceptions, il existe une mixité générationnelle, mais aussi sociale et fonctionnelle sur l’îlot Bessonneau. En effet, il y a une mixité générationnelle comprise dans la résidence Voisin’âge, car elle contient : 56 logements dont la moitié sont pour des locataires âgées et l’autre pour des « jeunes couples avec un enfant, pas plus parce qu’avec trop d’enfants la cohabitation avec les personnes âgées peut causer problème» souligne un membre du Conseil des Sages. Donc ce sont des appartements ne dépassant pas le T3. Il y a aussi la cohabitation avec la crèche, située au centre du projet, le contact avec les enfants n’est pas que visuel, les personnes âgées sont conviées à des activités avec les jeunes enfants.
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Cette mixité très forte se voulait comme porteuse d’un idéal social pour faire de ce projet une petite communauté basée sur l’entraide et la bienveillance.
« Bonjour Voisins »
Une charte de bon voisinage écrite par le CLRPAC et le Conseil des Sages, sur la base de celle déjà existante sur le projet de Saint-Apollinaire, a été instituée dès le début du projet. Chaque habitant la découvre avant son arrivée et se doit de la respecter. Elle consiste à favoriser les rapprochements de voisinages, éviter le quartier-dortoir et garantir la qualité de vie entre voisins (politesse, entraide,…). On la voit accrochée dans le bâtiment de la crèche, posée sur les paterres, mais recouvert des manteaux d’enfants : « elle n’est pas très applicable pour tous, elle ne fonctionne réellement qu’avec les personnes âgées de la résidence Voisin’âge ou l’ADAPEI, avec qui on a vraiment des contacts» explique la directrice de la crèche. Les règles sont assez simples, elles pourraient être appliquées partout, mais pourtant elles ne sont respectées qu’entre personnes qui se connaissent. Cela ne change finalement pas de ce que l’on pourrait connaître dans tout autre quartier. « On reste souvent très cordial, on dit bonjour, on est de bons voisins, mais sans aller plus loin et devenir plus proche, de peur d’être envahi » constate une habitante du projet. Les habitants veulent protéger leur intimité et ne pas toujours être sollicités par leur voisin.
l’écart générationnel peu propice aux relations ? Conflit des générations ?
1
Serge Guérin, La nouvelle société des seniors, p. 136.
L’intergénérationnel base l’échange entre générations sur le fait que la personne âgée n’est pas une catégorie de population à part, qu’il faut protéger des influences extérieures, mais comme un citoyen à part entière, susceptible d’échanger avec toutes les composantes de la société, quel que soit son âge.1 Et cela fonctionne plutôt bien, pour Madame M. par exemple locataire du domicile-service de Rezé (qui fonctionne aussi sur le mixage entre générations) : «On vient faire la lecture aux enfants tous les mardis
après-midi à la crèche, c’est très divertissant». Évidemment ces liens sociaux sont créés par des initiatives autres que celles des habitants, mais ils génèrent des envies et du plaisir dans la rencontre de l’autre, plus jeune.
Mais le projet de l’ilôt Bessonneau tente de pallier à cet individualisme et prône l’échange dans la ville et notamment à l’échelle du quartier, de l’ilot. Les immeubles du projet sont établis autour d’une large place centrale composée d’un parking, de la crèche, mais aussi d’un jardin aménagé ouvert à tous, avec des bancs pour y séjourner et un espace de jeux pour les enfants. « À notre grand regret, il aurait fallu une petite maison de quartier pour fédérer tout ça » déplore un membre du CLRPAC. Il était prévu, nous raconte-t-il, une salle, un foyer pour animer le quartier avec une personne médiatrice « dans un rôle de gouvernante. Mais le nerf de la guerre c’est l’argent et il en a manqué donc ça n’a pas pu se faire». Toutefois, une commission d’animation a pu être mise en place, elle est composée de membres du CLRPAC, du conseil des sages, de l’ADAPEI et d’une animatrice. Elle s’occupe d’organiser des activités mettant en relation la crèche, l’ADAPEI, la résidence Voisin’âge et les habitants comme : la
les nouveaux lieux du vieillir
La différence d’âge est fréquemment décrite comme une barrière, on remarque que les différentes générations se côtoient peu. Les structures collectives peuvent représenter une réelle amélioration pour les personnes qui le choisissent, car elles permettent de développer une certaine entraide, de nouer des sociabilités. Mais elles peuvent aussi être sources de conflits, à l’origine de nuisances sonores, du non-respect de l’intimité du voisin dû au décalage de rythme de vie ou à certains handicaps. Tout cela peut faire dégénérer des relations de voisinage et n’engendrer aucune solidarité. Ces deux côtés de la vie en communauté ne sont cependant pas spécifiques aux personnes âgées, il est difficile d’une manière générale de nouer des relations avec ses voisins. Les mobilités résidentielles étant plus fréquentes, ainsi que les espaces communs peu investis, il est rare de nouer des liens fraternels avec les voisins.
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décoration du sapin de Noël, la chasse aux œufs, la galette des Rois, la fête des voisins. Ces activités sont organisées dans les salles de restaurations de la crèche ou de l’ADAPEI, les manifestations peuvent aussi se faire dans les jardins de l’îlot. « Mais les habitants même ceux âgés, à part deux ou trois personnes, ne participent pas » précise un membre du Conseil des Sages. Avec si peu de participation, cette commission d’animation qui n’était là que pour lancer une dynamique de quartier, se pose la question de son utilité.
les enjeux futurs sur ce projet
« La solution serait peut-être de créer une association pour créer une animation permanente et obtenir des subventions» déclare un membre du Conseil des Sages. C’est peut-être la prochaine étape du projet selon lui. Cette association pourrait être reprise par des habitants. Sauf qu’encore une fois peu sont réellement motivés pour s’investir : « les gens me disent qu’ils sont partants, mais il faut toujours les tenir par la main » regrette le membre du conseil des sages. Il souhaiterait aussi qu’une salle de convivialité soit établie sur le futur site d’habitation jouxtant l’îlot, qui va être construit, mais il se demande encore une fois si cela vaut la peine quand on voit le peu de personnes qui se déplacent pour les manifestations. « C’est peut-être un projet qui a péché par sa nouveauté » finit-il par conclure. On peut en effet penser que les habitants ne sont pas encore prêts à fonctionner comme cela, et qu’il faut attendre encore un peu avant qu’un réel dynamisme s’ancre dans le quartier. 1
paroles de Monsieur Gengu Owzareck référent de la commission Affaires sociales et solidarités du Conseil des Sages.
la cohabitation est bien, mais « c’est un peu trop calme »1
Mais l’engouement pour ce modèle consistant à favoriser la cohabitation ouverte sur le voisinage et encourager l’entraide n’est-ce pas difficile à décréter ? Surtout si c’est un moyen pour lutter contre la solitude des personnes âgées. Comment imposer à ces personnes qui n’ont jamais eu l’habitude d’être proches de ses voisins, de devenir ultra-sociables à l’âge de la retraite. Vieillir n’est souvent pas synonyme de changement d’habitude vis-à-vis de la société. Et de toute manière « est-ce à des personnes
de 65 ans et plus que l’on doit apprendre à s’insérer dans un club ? Ne peut-on pas plutôt y entraîner les adolescents, les enfants, dès leur plus jeune âge ?»1 En effet, une pratique plus courante de l’insertion sociale amènerait peut-être à ne jamais subir d’isolement. Il faudrait donc conclure par le fait qu’il est actuellement difficile de vouloir créer une dynamique de quartier de cette manière quand les personnes n’ont aucune attache ?
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Colloques de Marly, Habitat et marginalité, p.37
Mais pourtant de nombreuses opérations se montent dans la région avec les mêmes volontés que pour l’ilôt Bessonneau à Couëron, en restant du logement locatif social, et cela correspond aux attentes des futurs locataires, car ils sont consultés par des enquêtes et font parfois partie des commissions de montage comme pour ce projet. Il serait intéressant de s’arrêter sur quelques autres projets pour examiner les résultats. Mais pour le moment, attardons-nous sur ce que peuvent proposer les architectes en terme de logement pour personne âgée.
Pour développer cette partie, nous nous appuierons sur deux projets : celui de l’agence Mabire-Reich à Riaillié et celui de l’agence Berranger-Vincent à Montbert. Le choix de ces deux projets a été porté par rapport au choix des architectes que Marie Tesson2 avait sélectionnés pour mener son étude. Leurs témoignages sont donc tirés des entretiens de celle-ci. Nous remarquons que pour ces deux projets, les logements sont de type individuel et le projet est situé en zone rurale. Ce qui nous intéressera ici c’est de constater le rôle les architectes qu’ils ont eu à avoir ou pas autour de cette question ? Et, où peut se jouer la variation pour proposer des solutions innovantes pour les personnes âgées ?
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voir J’ai demandé aux archis, mémoire de master
les nouveaux lieux du vieillir
qu’est-ce qu’un logement pour personne âgée?
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adaptabilité des logements dans le parc locatif neuf : les innovations se font plus d’un point de vue architectural
Le projet de Montbert d’Habitat 44 par Berranger-Vincent a été choisi pour le rapport avec l’extérieur qu’entretiennent ces logements, tous rez-de-chaussée, avec jardins et aucun vis-à-vis direct. Celui de Riaillé d’Harmonie Habitat par Mabire-Reich, a été choisi pour l’innovation technique des logements, qui sont situés de manière optimale sur le terrain en pente, et où les intérieurs sont adaptés aux vues baissantes des personnes âgées et aux besoins d’intimité tout en offrant des espaces largements ouverts à l’intérieur. . L’une des architectes d’un des projets, Stéphanie Vincent, s’est demandé « Comment accompagner une personne vieillissante qui commence à avoir des problèmes de santé et comment éviter de les mettre tout de suite dans une maison de retraite ? ». C’est ce questionnement qui a amorcé la réponse à la commande complexe demandée par le maitre d’ouvrage : concevoir un habitat pour une personne âgée. Le rôle de l’architecte autour de cette question est aussi complexe que pour la création de logements non-spécifiques à un type de population. Antoine Mabire, de l’agence d’architecture Mabire-Reich, parle du fait qu’il n’y a pas « de définition universelle de ce qui est un bon logement pour personnes âgées, donc il y a toujours une part d’erreur ». Ceci est vrai, notamment dans le logement social où le maitre d’oeuvre dessine un logement sans savoir qui va l’habiter. Il fait forcément une spéculation sur les qualités attribuées au logement qui vont convenir ou non au futur locataire. Pour la conception des logements à Riaillé, les architectes élaborent le projet avec le bailleur en s’inspirant d’autres ouvrages et en discutant de modèle, non « pas à copier, mais par analogie à repérer les qualités qui font un logement pour personnes vieillissantes ». Pour ces architectes, la réflexion autour de la qualité spécifique d’un logement pour personnes âgées se porte plutôt sur la
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3 Projet Montbert, photos personnelles 1 vue de la cour centrale de l’ilot 2 vue depuis la rue 3 vue de la cour sur le clocher de l’église
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Projet Riaillé, photos de l’architecte 4 entrée d’une maison pour personne âgée
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5 vue du dénivellé, maison pour personnes âgées au premier plan
modularité du logement pour l’adapter à l’évolution physique de la personne ou sur la possibilité de rencontres avec le voisinage pour lutter contre l’isolement. Créer un logement pour personne âgée c’est constituer « quelque chose de simple, pratique, et qui ne génère pas de difficultés dans la gestion du quotidien » souligne le responsable d’agence d’Habitat 44-Rezé, dubitatif sur l’idée d’imaginer des nouveaux concepts habités pour les personnes vieillissantes qui ne veulent pas des logements extravagants c’est-à-dire avec des formes et des aménagements complexes.
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paroles d’Alexandre Chemetoff cité par Stéphanie Vincent
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voir définition dans le lexique du livret commun L’amicale du logement social
«le logement ne commence pas à la porte d’entrée du logement, mais bien avant.»1
La réalisation d’habitat pour personnes âgées amène à une réflexion plus large sur l’aménagement des abords du site pour permettre tout d’abord aux habitants de se déplacer aisément. Ainsi créer des pentes douces, des éclairages publics, des cheminements piétons sans danger, des zones de repos,... jusqu’au commerce ou service pourra faciliter les déplacements des personnes. Pour le projet de Riaillié, le nivellement du terrain, très fort, a amené les architectes à placer les logements réservés aux personnes âgées sur le bas du terrain. Aussi, au plus proche de la maison de retraite. De plus, les abords du logement ont été travaillés, pour créer des espaces communs agréables, qui vont donner envie d’y séjourner et ainsi permettre l’échange et la rencontre entre voisins. Pour le projet de Montbert, l’intérêt est la situation géographique, car il se situe à quelques mètres du centre-bourg de la ville. Les personnes peuvent se rendre à pied jusqu’aux commerces même si actuellement plus aucun ne peuple le bourg, les habitants sont obligés de se rendre en voiture jusqu’au premier supermarché situé dans la ville d’à côté. Ce fonctionnement ne marchera pas à long terme lorsque les locataires vont rencontrer des difficultés de déplacement, et qu’ils ne pourront plus prendre la voiture pour aller faire leurs courses. Ils deviendront dépendants d’une aide à domicile ou devront déménager dans un centre-ville actif. C’est pour cela que le projet contient un domicile-service2 qui permet d’aider les habitants afin qu’ils puissent rester chez-eux.
des parties communes pour lutter contre l’isolement
En effet, en plus de ce local commun imposé par le programme, les architectes ont créé une place centrale commune, au cœur du projet, sur laquelle toutes les entrées des maisons donnent. «Il y a un temps avant de rentrer chez soi qui est important, c’est là qu’il peut s’y passer quelque chose avec les voisins, que l’on peut être amenés à les rencontrer éventuellement.» Cet espace collectif non bâti constitue une « place de village » à petite échelle où les interactions sociales sont sensées s’effectuer. C’est une place aménagée agréablement où l’on peut y séjourner, plantés d’arbres, et constitué de graviers « idéal pour les partis de boules ou pour jouer aux palets » soulève un habitant. Finalement quelques habitants ont l’air de faire fonctionner la place centrale dans le rôle que lui ont attribué les architectes. En plus d’un petit jardin privatif
les nouveaux lieux du vieillir
Pour ce projet, la conception des logements s’est notamment reposée sur la question des relations de voisinage, ce qu’ils ont appelé le « vivre ensemble ». « La question que l’on s’est posée c’est : comment va t-on faire pour que ces personnes ne soient pas isolées et qu’elles soient vraiment amenées à se rencontrer ? Tout est parti de là. Les personnes ne sont pas obligées de s’aimer, mais elles seront obligées de se croiser. » Pour cela la création de parties communes aux habitants a donc été décidée pour permettre de favoriser un lien social. La densité sociale des logements a été misée comme moyen d’interaction. On se connait, on s’observe, on peut s’entraider. Il y a aussi le local commun appelé la « maison des aînés », compris dans le programme en rapport avec le système du « domicileservice », qui n’est pas seulement dédiée aux personnes âgées, mais aussi aux associations des habitants de la commune. Ces occupations permettent de créer de l’activité, du passage près des maisons de l’îlot. Ce pari sur le rapprochement physique qui va permettre une entraide sociale est difficile, car on ne peut pas promettre que les locataires vont apprécier de se croiser tous les jours. Lorsqu’on visite on observe les fenêtres cachés par des rideaux et, alors que le beau temps est au rendez-vous, aucun investissement des espaces extérieurs, notamment celui de la place centrale.
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attribué à chaque maison, cette cour est considérée comme l’extension de l’intérieur des cinq maisonnettes, la porte d’entrée n’est qu’une simple porte vitrée sans volets. Lors de ma visite, mon passage dans la cour à tout de suite intriguer un habitant, le joueur de palets, qui est venus à ma rencontre, me questionner sur ma venue. Cet espace est donc étroitement lié avec l’intimité de la maison, même si elle n’est pas investie par des objets, cette cour semble leur appartenir, elle est semiprivative pour eux. Celle-ci fonctionne comme un commun d’immeuble collectif. De plus, la proximité resserrée de ces petites maisons individuelles de plain-pied, offre des venelles piétonnes traversantes, ce qui donne l’image d’un hameau où tout le monde se connait et s’entraide. Selon l’habitant rencontré, la réalité n’est pas vraiment celle-ci, mais lui connait tout le monde.
un habitat qui s’adapte à la personne vieillissante et non l’inverse
Une des autres spécificités de ces logements est la modularité de son intérieur. Les architectes ont conçu une « pièce en plus ». Toutes les maisonnettes, d’une superficie d’environ 65m2 contiennent en plus d’un salon, d’une cuisine et d’une salle de bain : deux chambres. Bien que l’ensemble des locataires soit âgé de plus 70-80 ans, vit seul et n’a plus d’enfants à charge. Cette volonté de la part des architectes « d’évolutivité de l’habitat selon les moments de la vie d’une personne âgée », permet d’accueillir confortablement la famille, les petits-enfants... comme le constate l’un des habitants : « mes petits- enfants, c’est bien quand ils viennent là, ils ont une chambre à eux ». Ou bien, elle peut servir de chambre avec un lit médical dans le cas où l’un des deux conjoints tombe malade. Ces types d’aménagements pourraient être appliqués à tous les logements, qu’ils soient spécifiques ou non, souligne l’architecte Stéphanie Vincent. En effet, cela paraît logique et permettrait à chaque logement de s’adapter aux étapes de la vie et d’offrir à l’habitant le choix de rester à domicile jusqu’à la fin de sa vie. L’architecte poursuit en ajoutant que l’idée pourrait se prolonger en installant « une paroi
Pour le projet de Riaillié, la spécificité a été de concevoir une des deux chambres plus grande : 16 m2. L’argument étant : « parce qu’on se dit qu’il y a des personnes âgées qui sont malades longtemps et qui vont passer du temps dans leur chambre ». Il leur semblait important que cet espace de la maison soit privilégié et puisse être une pièce aménagée agréable pour les possibles convalescences de l’habitant âgé. La chambre peut devenir un endroit où l’on déménage un « buffet avec la télévision » ou autre mobilier pour le confort médical et personnel. Cependant il confine la personne à vivre dans une seule pièce de la maison ce qui n’est pas souvent souhaité. Ces deux projets, agréables dans leur ensemble et à priori plutôt appréciés par leurs habitants (notamment pour le projet de Montbert car celui de Riaillé n’étant pas encore livrés lors de ma visite, aucune parole habitante n’a put être récoltée afin de connaître la satisfaction du projet). Ces projets pourrait être tout aussi bien destinés à des personnes sans caractéristiques particulières. Seulement ils tentent d’anticiper les possibles besoins des habitants par rapport à une dépendance et un handicap normé et en misant sur des transformations et une
les nouveaux lieux du vieillir
pliable ou coulissante à cette pièce afin qu’elle devienne l’extension de la pièce à vivre par exemple ». Le logement ne peux pas s’agrandir, mais les pièces peuvent évoluer dans leur forme, s’imbriquer pour avantager l’habitant, dans ce projet la pièce en plus disparaît pour venir offrir une superficie plus grande au salon. Cette solution est malléable vis-à-vis de l’usager, elle n’est qu’une parmi d’autres, mais elle permet d’adapter le logement sans démolition ou lourde réhabilitation. Analogiquement, cette cloison ne devient qu’un meuble que l’on peut déplacer ou enlever. Mais on peut imaginer que cette disposition est peu appliquée, puisque garder la cloison, c’est garder l’intimité de la chambre et ne pas exposer lors des visites la partie la plus privée de la maison. De même pour l’extension du salon par exemple qui supprime alors une chambre et ne permet plus d’accueillir des proches.
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modularité qui ne sera peut-être jamais faite, mais qui est possible. Il existe un habitat intermédiaire entre le domicile privé et l’établissement médicalisé que l’on appelle les « domicilesservices », nous allons maintenant étudier ce type d’habitat cogéré par le bailleur social et une mutuelle, en Loire-Atlantique, c’est Mutualité Retraite.
favoriser le contact social autour de l’habitat Quand le maintien à domicile n’est plus possible, on développe une offre d’habitat intermédiaire : les habitants conservent un statut de locataire et non de personne accueillie en établissement tout en étant regroupés autour de services à l’accès facilité. Ce système est mis en place par une mutuelle particulièrement active pour les retraités à Nantes : Mutualité Retraite. Il est difficile d’imaginer au premier abord que ce type d’acteur puisse rentrer en compte lors de la conception d’un logement social. Et pourtant, en collaboration avec les bailleurs sociaux, cette mutuelle offre un type de logement combinant le domicile privé et l’aide à domicile quotidienne.
le suivi social comme solution pour lutter contre l’isolement
Les « domicile-services » sont des logements intégrés dans un immeuble locatif intergénérationnel, eux-mêmes divisés en logements sociaux ou en logement donnant accès à la propriété. Les logements agrées domicile-services sont au nombre de 15 maximum par immeuble, ils sont loués au bailleur social par la mutuelle qui reloue aux personnes au prix d’un loyer HLM. Ce type de proposition, se limitant à quelques appartements par immeubles et quelques immeubles par quartier, permet de ne pas enfermer les vieux dans un regroupement ghettoïsant.
1 1 photographie illustrative d’un salon commun de domicileservice vu par MutualitÊ Retraite Projet Montbert, photo personnelle 2 vue extÊrieure du local commun du domicile-service de Montbert
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Ces logements sont adaptés aux personnes âgées par des normes PMR et proposent un service de veille sociale à domicile aux locataires âgées qui payent une redevance mensuelle à la mutualité. Cette veille consiste en la présence, dans l’immeuble, d’une ou deux personnes (appelée « gouvernantes »), présentes quotidiennement (de 8h à 18h) et assurant des activités (repas, jeux, thé,...) et divers services dans un appartement commun au rez-de-chaussée. Ce salon commun est plus ou moins utilisé par les habitants : peu se rendent aux repas du midi et seulement quelques-uns descendent régulièrement occuper cet espace : « tous les matins à 9h je viens lire le journal, mais je mange chez moi sauf pour les repas spéciaux comme celui de Noël » nous raconte l’une des habitantes.
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voir définition dans le lexique p.117
Les gouvernantes ne sont pas des aides médicales, ni du soutien à domicile, mais plutôt une présence, rassurante. Elles permettent de générer des rencontres entre voisins (âgées ou non) par des préparations de repas ou d’activités. .. Elles aident les personnes à faire leurs courses, organisent des activités ou des sorties pour créer du lien et de la convivialité entre les locataires. La gouvernante joue pour les personnes âgées un rôle de gardien (en journée puisqu’il n’y a pas de surveillance de nuit), mais aussi de veille, d’alerte, en étant à leur écoute. En effet, elles effectuent des visites journalières à domicile pour récolter les requêtes qui peuvent être : « aller acheter un médicament ou conduire la personne au centre-ville faire ses courses, ou tout simplement discuter avec la personne et s’assurer de son bien-être » précise la gouvernante du domicile-service de Rezé. Ce modèle installe l’idée de pouvoir accéder à un domicile plus sécurisant où l’on sait que l’on va pouvoir y rester jusqu’au bout de sa vie. S’il y a un réel problème médical, les personnes disposent de la télé-assistance1 et des secours extérieurs interviennent. Les gouvernantes n’étant pas des aides médicales, lorsqu’un problème se pose, cela implique l’intervention de personnel extérieur. Elles ne sont pas non plus des aides à domicile : l’entretien du studio reste à la charge du locataire, il peut toutefois faire appel à des associations ou des services municipaux d’aides à la personne, mais c’est
un coût supplémentaire qu’il doit assurer de lui-même. Les gouvernantes peuvent cependant détecter les situations de détresse et proposer des services d’aides extérieurs ou faire appel à un CLIC pour engager un suivi social. Ce type d’habitat est proposé par la mutuelle à ces mutualistes âgés, qui peuvent accéder à ce type d’habitat seulement s’ils sont admissibles à un logement social (la mutuelle loue les appartements au bailleur social) et ont la capacité financière de payer une redevance mensuelle (environ 400 euros par individu). Ces mutuelles entretiennent un rapport privilégié avec leurs clients, ils s’informent régulièrement sur leur satisfaction par des questionnaires écrits ou des réunions. L’habitant d’un domicile-service connaît mieux sa mutuelle que son bailleur. Il passe de obligatoirement par la mutuelle pour accéder à un domicile-service.
concept collaboratif
dispositif non accessible à tous
Ce modèle propose une bonne alternative, mais ne reste pas accessible pour tous. En effet, les services sont rendus au prix d’une redevance mensuelle obligatoire payé par le locataire en plus de son loyer d’habitat social de type T2 ou T3. « On arrive à 900 euros mensuellement par ménage (souvent des femmes seules) simplement pour se loger » souligne le directeur d’agence d’Habitat 44-Rezé. En effet, pour ce bailleur comme pour d’autres ce type d’habitat pose certains problèmes, car les conditions financières des locataires sont souvent difficiles et peu de gens peuvent à la fois répondre aux critères d’un demandeur de
les nouveaux lieux du vieillir
Un autre point important de ce dispositif est l’implication des familles, elles se doivent de passer des week-ends dans le domicile, le but étant de conserver les échanges familiaux. La volonté est de rapprocher les familles avec leurs aînés, mais de manière ponctuelle. Ces familles n’ont pas vocation à être des aides ménagères, médicales, mais plutôt incitées à être des présences familières, des soutiens affectueux.
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logement social et payer la cotisation mensuelle. Madame M., 86 ans, locataire du domicile de Rezé raconte qu’elle « arrive à joindre niveau budget, car [son] mari était militaire [elle] touche sa demipension, et la rente de [sa] maison. ». Peu de personnes éligibles au logement social ont des situations aussi « confortables » que cette locataire, il y a alors peu de demandes dues à peu de candidats correspondants. Les projets de domiciles-services se retrouvent souvent vides. Ces logements sont alors « reconvertis » en logement sociaux sans spécificités. Le directeur d’agence d’Habitat 44-Rezé confirme en racontant qu’un de ces collègues bailleur social venant de lancer 17 logements domiciles-services à Bouaye, n’a pas trouvé les 17 personnes, les logements ont donc été requalifiés et redistribués. De plus, ces logements sont réservés aux personnes âgées, mais ne sont pas du tout adaptés à l’apparition de quelconques fragilités chez ces habitants notamment celle d’Alzheimer. Une personne de 85 ans par exemple ne va pas y rentrer pour seulement 5 ou 6 ans et être obligée de changer de structure à un moment où elle éprouve des handicaps liés à la sénescence. Certaines le font, mais le but était d’entrer dans un domicile-service non pas pour y rester, mais comme transition douce vers un établissement médicalisée. Ce type de cas est plus rare, ce sont des logements qui correspondent plus « à des personnes relativement jeunes, qui ont besoin d’une veille sociale, mais en restant relativement autonomes » souligne Julie Mariel de Mutualité Retraite. L’habitant d’un domicile-service est donc une personne âgée ne pouvant plus vivre isolée dans son habitat, mais qui est encore trop jeune et indépendant pour déménager dans une maison de retraite.
non applicable partout
Pour Nantes-Habitat, bailleur social possédant un patrimoine locatif situé à Nantes, proche du centre-ville, le domicileservice n’est pas la structure la plus adaptée. Parce que dans une ville comme Nantes, il existe de nombreux services d’aides mobilisables et moins onéreux financièrement que la redevance. Pour la responsable des logements bleus chez ce bailleur, le
domicile-service est beaucoup plus pertinent dans une ville comme « Ancenis par exemple, où les transports en commun sont moins nombreux et où la gouvernante a alors toute sa place parce qu’elle va faciliter l’accès aux services. Mais pour le domicile-service de Crucy-Fouré situé en plein centre-ville, c’est pas là qu’il aurait fallu le faire ». Elle souligne qu’avoir une gouvernante sur place est intéressant, cela permet de se sentir en sécurité, mais sortir de chez soi pour aller prendre des repas collectifs via l’ORPAN1 ou le CCAS quand on habite à Nantes permet de se socialiser, d’aller à la rencontre d’autres personnes.
1
voir définition dans le lexique p.116
modèle réduit
L’enjeu serait alors de diversifier l’offre d’habitat intermédiaire en logement social avec un ajout de services envisagé comme plus flexible c’est-à-dire en laissant le choix à l’habitant de prendre ses services ou non. Le futur est donc de concevoir un habitat où les habitants restent décideurs de leur vie et donc autonomes.
les nouveaux lieux du vieillir
Le domicile-service est un moyen de réponse, les locataires en sont satisfaits : « je n’ai pas eu à faire de travaux quand je suis arrivée, c’est tout propre, j’ai juste ramené mes meubles, il y a un ascenseur c’est très bien » témoigne une habitante. Mais cela n’est pas applicable partout et pour tout le monde, la majorité des personnes âgées admissibles au logement social ne pouvant y accéder. La solution tend à s’atténuer, car le directeur d’agence d’Habitat 44-Rezé parle de « ne plus vouloir s’orienter vers des domiciles-services, car c’est quelque chose qui à beaucoup fonctionné il y a quelques années, mais qui à [son] sens est un peu en perte de vitesse. »
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conclusion : un habitat adaptable ou adapté ? Ces expérimentations visent à associer le principe de solidarité avec le logement. Cette réflexion prend en compte les usages de l’habitat en dépassant la seule réponse technique de l’adaptation du logement. Le but étant de ne plus se limiter à l’aspect « bâti » du logement, mais aborder les différentes dimensions de l’habitat en tant qu’élément d’intégration de la personne à la vie sociale. L’enjeu aujourd’hui et dans les prochaines années va donc être clairement de favoriser au maximum le maintien à domicile. Mais dans quel domicile ? Pour l’aménagement du parc existant l’intérêt réside dans l’adaptable c’est-à-dire savoir comment aménager le logement pour qu’il convienne à l’habitant alors que pour la construction neuve il faut prévoir un logement adapté.
adaptable : la colocation
Des bailleurs sociaux comme Habitat 44 souhaitent mettre en place un partage de l’habitat des personnes âgées avec des demandeurs de logement temporaire. Cette démarche promeut la solidarité entre les personnes âgées -souvent seules- et les personnes en demande de logement temporaire qui ont des difficultés pour accéder aux logements sociaux dû à la saturation de l’offre. Ces personnes pourraient être des jeunes suivant une formation pendant quelques mois ou des travailleurs au contrat temporaire. L’occupation momentanée et partagée de l’appartement permettrait d’occuper des pièces vides et ainsi de résoudre le problème de sous-occupation tout en créant une dynamique dans le logement : la personne âgée offrant son logement et l’habitant temporaire l’aidant dans ses tâches ménagères. Ce système de rationalisation du logement n’est pas encore à
l’ordre du jour dans le cadre du logement social, mais il peut se développer par l’intermédiaire d’association qui sensibilise les personnes à partager leur logement. En effet, le bailleur social peut difficilement organiser les colocations en forçant les affinités. Cependant il peut mettre en place une « convention de gestion»1 avec des associations. Ce système de colocations temporaires commence à émerger dans le secteur privé. L’initiative vient de la personne âgée ellemême, qui passe souvent par une association. Cette dernière s’occupe de choisir les « candidats » et favorise ceux montrant une réelle motivation, un sens du bien-vivre et du respect de la personne. Ces logements collectifs intergénérationnels ouverts permettent de favoriser l’intégration sociale de la personne âgée qui se retrouve confrontée à un mode de vie différent du sien.
1 Guide de l’habitat intermédiaire pour personnes âgées en LoireAtlantique, 2011, p.25
Évidemment pour les bailleurs sociaux ce système mettra longtemps à se mettre en place, car les personnes âgées vivant depuis longtemps dans leur logement avec leurs habitudes acceptent difficilement pas d’accueillir une personne étrangère à leur quotidien et à leur famille.
La colocation est une solution pensée sur de l’habitat existant, maintenant si nous voulons réfléchir sur de l’innovation d’habitat neuf, nous pouvons imaginer que le futur serait de mettre en place des habitats évolutifs. C’est-à-dire un logement qui dès sa construction pourrait convenir à un handicapé, comme à une personne vieillissante ou à des enfants puis à chaque étape de la vie cet habitat serait adaptable. On pourrait détourner des différentes pièces pour moduler l’habitat en fonction de l’évolution numérique, familiale ou de la santé des personnes. Cette modularité pourrait concerner à la fois : « une réflexion sur les murs porteurs avec mise en œuvre de cloisons démontables bien localisées et permettant une modularité des cellules, l’aménagement d’un ensemble fonctionnel avec chambre et salle d’eau de plain-pied, la
les nouveaux lieux du vieillir
adapté : l’habitat évolutif
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Marine Leconte, Des logements pour vieux, TPFE, Nantes, juin 2005, p.84.
possibilité de rendre indépendant le second niveau dans le cas de duplex… »Et aussi un travail sur l’extérieur des logements avec des « marquages au sol spécifique pour l’entrée des logements, l’accès direct à l’immeuble par une pente, avec un matériau adapté pour les personnes à mobilité réduite,… »1 comme le préconise Marine Leconte dans son TPFE en 2005. Tous ces dispositifs ne sont pas d’un surcout trop important, ils ne sont pas gênants pour une personne sans handicap. Cela reviendrait à changer de logique et ne plus adapter son habitat quand les problèmes de santé surgissent, mais bien avant prévoir un habitat qui va s’adapter aux aléas de la vie.
conclusion : repenser nos modes d’habiter pour accueillir la vieillesse
Cette question de la vieillesse et de son habitat est réellement politique : « le vieillissement de la population qui traduit l’allongement de la durée de vie n’est pas en lui-même un handicap, mais il le deviendrait si la société refusait de s’adapter à cette nouvelle situation »2. Ne pas favoriser un habitat et un environnement adapté aux personnes âgées, leur permettant ainsi d’être autonomes, influe sur leur intégration et donc leur participation aux prises de décisions citoyennes. Et rester dans le prisme médical lorsque l’on parle de la vieillesse c’est s’exonérer de toute réflexion sur notre propre comportement vis-à-vis des personnes âgées, plus
1 Serge Guérin, Vive les vieux, p.60 2 Maurice Tubiana, le maintien de l’insertion sociale des personnes âgées, rapport à l’académie de médecine, mai 2005, in la nouvelle société des seniors, Serge Guérin
conclusion
La beauté, la force et la jeunesse sont des valeurs de référence qui persistent, et ce depuis l’antiquité alors que la société vieillit de plus en plus. Les personnes âgées restent souvent défavorisées financièrement, comme le souligne Serge Guérin : « La réalité de la vieillesse indigente n’a certes pas disparu mais il n’est plus supportable de la nommer ainsi»1. Et l’hébergement ultime reste encore la maison de retraite, solution de parcage des personnes âgées, réprouvée fortement par elles-mêmes.
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généralement cela permet à la société de se dégager de toute responsabilité. La solution serait-elle de changer de stratégie et non plus de faire, des logements « pour vieux » mais des logements sans spécificités, pour tous, modulables aux différentes étapes de la vie, qui s’adaptent aux évolutions ? Puisqu’il ne s’agit aujourd’hui pas d’imposer un habitat-type et que la catégorie des personnes vieillissantes est aussi diverse que celle des jeunes, il faut alors repenser l’habitat en général. Et, à travers l’habitat un nouveau paradigme de vie plus collective, permettant l’entraide et la solidarité. Cette réflexion globale permettra d’offrir une diversité plus grande d’habitat et ainsi de ne pas ségréguer les populations en leur attribuant un habitat particulier à chacun. Il n’y a pas un vieillissement, mais des vieillissements, il n’y a pas un type d’innovation, mais des innovations. Il y a des situations et des solutions.
«la véritable crise de l’habitation réside en ceci que les mortels en sont toujours à chercher l’être de l’habitation et qu’il leur faut d’abord apprendre à habiter».
conclusion
Martin Heidegger, Essais et conférences, Paris, Gallimard, 1980.
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annexes
lexique ce lexique se lit en complément de celui situé dans le livret commun : l’Amicale du logement social.
A
AIDES SOCIALES Il en existe trois types : l’APA1, les PAP (Plan d’Action Personnalisé) et l’aide sociale. Cette dernière est réservée aux gens qui ont de très faibles ressources, uniquement pour l’aide ménagère, elle est délivrée par le Conseil Général. Et les PAP sont un dispositif de conseil, d’aides financières et matérielles distribuées par la CARSAT. Toutes ces aides sont non cumulables, mesurées en fonction de l’âge, de l’autonomie (mesurée par la grille AGGIR) et des ressources. Mais il n’y a jamais 100% de l’aide à domicile qui est prise en charge
1
voir définition dans le lexique du livret commun l’Amicale du logement social
C
CLRPAC Le Comité Local des Retraités et Personnes Agées de Couëron, est une association (loi 1901) gérée par une trentaine de bénévoles et deux fonctionnaires municipaux. Elle a pour
annexes
financièrement, la personne a toujours une partie à payer.
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1
http://www.villecoueron.fr/ cohesion-socialeet-solidarites,497 /seniors,499/ clrpac,502.html# .U-4L_0hn-dM, consulté en août 2014 2
Interview du Conseil des Sages de Couëron 3
http://www. ville-coueron. fr/mairie,379/ democratielocale,387/conseildes-sages,389. html#.U-4GpUhndM, consulté en août 2014
mission de travailler spécifiquement sur les personnes âgées, il propose beaucoup d’activités de loisirs (chorale, danse, vélo, théâtre,…) et met en place diverses manifestations pour les seniors (repas annuels, thés dansants, voyages, sorties)1. Cette association est aussi constituée de commissions (sociale et de loisirs) qui travaillent sur des projets initiés ou non par la mairie. CONSEIL DES SAGES C’est une instance de réflexion, constituée de 24 citoyens retraités, âgés de 55 ans minimum, élus tous les 6 ans par les habitants de Couëron. Ils ne représentent pas les seniors mais ce conseil leur permettent de s’inscrire dans le dialogue social et politique de la ville, sur divers projets, ils ne réfléchissent « pas uniquement sur les personnes âgées »2. Le conseil est divisé en commission qui se réunissent séparément pendant l’année et rendent compte collectivement de leurs réflexions tous les trois mois lors de séances plénières assistées par le maire. « Le conseil des sages s’inscrit dans le dispositif de démocratie participative de Couëron »3, crée par la mairie, il influe sur les prises de décision de la municipalité en apportant des conseils ou des propositions sur des sujets variés. Ce conseil n’existe pas forcément dans toutes les villes en France cela dépend de la politique municipale. CODERPA Le Comité Départemental des Retraités et Personnes Agées de Loire-Atlantique est un lieu de dialogue, d’information, de réflexion et de proposition au sein duquel les représentants des retraités et des personnes âgées participent à l’élaboration et à l’application départementales des mesures de toute nature les concernant. Le Coderpa peut débattre de sa propre initiative de toute question concernant les retraités et personnes âgées (par exemple : les évolutions de la réglementation, le statut des retraités, les questions de société…), dispenser des conseils et des informations sur la vieillesse et le vieillissement… Il peut aussi engager pour son compte des enquêtes et des réflexions sur des actions ou des projets spécifiques, grâce à l’appui des informations collectées auprès des divers services
départementaux et des collectivités territoriales concernées par la mise en oeuvre de ceux-ci.
O
ORPAN Office des Retraités et Personnes Agées de Nantes. Association de défense d’intérêts des retraités ou des personnes âgées. Mission d’information, de concertation, de coordination, de prévention du vieillissement et de lutte contre l’isolement en direction du public retraité et des personnes âgées nantais.
S
SCOT Schéma de Cohérence Territoriale. Instauré par la loi SRU du 13 décembre 2000 : c’est un document d’urbanisme qui détermine, à l’échelle de plusieurs communes ou groupements de communes, un projet de territoire visant à mettre en cohérence l’ensemble des politiques sectorielles notamment en matière d’urbanisme, d’habitat, de déplacements et d’équipements commerciaux, dans un environnement préservé et valorisé.
T
annexes
TÉLÉ-ASSISTANCE C’est un système d’appel d’urgence à domicile. «c’est un bracelet et puis un collier, on nous donne les deux [...], j’en ai un dans la salle de bains et l’autre dans la salle à manger » explique Madame M., locataire d’un domicile-service à Rezé. Ce système est payant (abonnement mensuel) et est particulièrement utilisé par les personnes vivant seules à leur domicile, susceptible d’avoir besoin d’aide (médicale) d’urgence.
117
documents complémentaires carte d’emplacement des CLIC cartes d’emplacement des projets spécifiques pour personnes âgées
1 Châteaubriant
Redon
Pontchâteau Grandchamp-des-Fontaines
Ancenis
Guérande Carquefou
Paimboeuf Saint-Nazaire St-Herblain
Sautron Nantes
Bouguenais
Le Loroux-Bottereau
emplacement des CLIC en Loire-Atlantique. Ils sont plutôt concentrés autour de Nantes, dans le sud du département. Au Nord, seulement la ville de Châteaubriant en connaît un.
Rezé Vertou
La Chevrollière
Machecoul
1
Clisson
annexes
Pornic
119
La Chapelle-sur-Erdre
Sautron
Couëron
Nantes
Indre
Saint-Sébastien
Le Pellerin Rezé
Bouguenais Vertou
3
Châteaubriant
Riaillé St Gildas des bois Missillac Blain
Héric
St Joachim
St Mars du Désert
Grandchampsdes-Fontaines La Turballe Trignac
Le Croisic
Saint-Nazaire
Nantes Haute-Goulaine
Saint-Pèreen-Retz
Le Landreau
Vallet
Sainte-Pazanne Geneston
Montbert
2 carte à l’échelle du département de la Loire-Atlantique répertoriant l’emplacement des projets dits «pour personnes âgées» (en rouge) 3 carte à l’échelle de Nantes-Métropole (communauté urbaine de Nantes) répertoriant l’emplacement des projets dits «pour personnes âgées» (en rouge)
annexes
2
121
bibliographie
ouvrages
ALBOU Philippe, L’image des personnes âgées à travers l’histoire, Glyphe et Biotem, Paris, 1999, 216 p. ARIÈS Philippe, Essais sur l’histoire de la mort en Occident du MoyenÂge à nos jours, Seuil, 1975, 237 p.
BONVALET Catherine, DROSSO Férial, BENGUIGUI Francine, MAI HUYNH Phuong (sous la direction de), Vieillissement de la population et logement, les stratégies résidentielles et patrimoniales, PUCA, La documentation française, Paris, 2007, 508 p. BOURDELAIS Patrice, L’âge de la vieillesse, Odile Jacob, Paris, 1993, 413p.
annexes
BEAUD Stéphane, CONFAVREUX Joseph, LINDGAARD Jade (sous la direction de), La France invisible, La découverte, 2008, 647 p.
123
DE BEAUVOIR Simone, La vieillesse, Gallimard, 1970, 604 p. DREYER Pascal, ENNUYER Bernard (sous la direction de), Quand nos parents vieillissent, prendre soin d’un parent âgé, Autrement, Paris, 2007, 340p. GUÉRIN Serge, La nouvelle société des seniors, Michalon, Paris, 2011, 221 p. GUÉRIN Serge, Vive les vieux, Michalon, Paris, 2008, 153 p. INSTITUT KERVÉGAN (ouvrage collectif sous la direction de), Habiter demain...Changer l’ordre des rêves ?, 2010, 204 p. MEMBRADO Monique, ROUYER Alice (sous la direction de), Habiter et vieillir : vers de nouvelles demeures, Paris, Erès, 2013, 278 p.
rapports et revues Habitat et marginalité : institut national d’éducation populaire marlyle-roi. 26-27 octobre 1976, Colloques de Marly, Paris, centre de recherche d’urbanisme (CRU), 1977, 163 pages. Habiter et vieillir, Paris, revue Gérontologie et société n°136, 2011, 310p. Le défi de l’âge (volume 1), les conséquences du vieillissement de la population, les cahiers de l’IAURIF, 1998, 225 p. Fondation Abbé Pierre, L’état du mal-logement en France, 18ème rapport annuel, 2014, 264p. Vieillir dans les quartiers populaires, un enjeu de politique publique, Les Cahiers de Profession Banlieue, Saint-Denis, 2009, 145 p. Une place pour chacun dans la cité, Habitat et Société, revue trimestrielle éditée par l’union sociale pour l’habitat, septembre
2010, n°59.
publications numériques
Rapport du CORDEPA, http://www.loire-atlantique.fr/upload/ docs/application/pdf/2014-02/actes_colloque_coderpa.pdf Bien vieillir en Loire-Atlantique, http://www.loire-atlantique.fr/ upload/docs/application/pdf/2014-02/web_bien_vieillir_ en_la.pdf. Disponible sur le site www.loire-atlantique.fr, consulté en juillet 2014. Construire de l’habitat intermédiaire pour personnes âgées, Guide à l’attention des porteurs de projets, rapport de la ville http://www. loire-atlantique.fr/upload/docs/application/pdf/2014-02/ guide_habitat.pdf. Disponible sur le site de Nantes Métropole, CCAS, consulté en juillet 2014. Schéma gérontologique de Loire-Atlantique, http://www. loire-atlantique.fr/upload/docs/application/ octetstream/2010-05/schemagerontologique_hd.pdf (consulté le 19 janvier 2014) Vieillissement et habitat une étude menée par le Cordepa (comité départemental des retraités et des personnes âgées, instance consultative placée sous la direction du Conseil général de Loire-Atlantique) et l’AURAN (agence d’urbanisme de la région nantaise) http://www.auran.org/download/ vieillissement_habitat/vieillissement_habitat.swf (consulté le 19 janvier 2014)
Guide du soutien à domicile et des établissements, Nantes Entour’AgeCLIC, Ville de Nantes, 2011.
expositions et évenements
exposition Un siècle avec toit(s), Nantes-Habitat, château des ducs
annexes
documentation de communication des services publics
125
de Bretagne, Nantes, novembre/décembre 2013.
T.P.F.E
Vieillir en HLM : Sophie Mousset, Ecole d’Architecture de Nantes, 1996. Des logements pour vieux : Marine Leconte, Ecole d’Architecture de Nantes, 2005.
sites internets (consultés jusqu’en août 2014) www.loire-atlantique.fr. www.nantes.fr http://www.ville-coueron.fr/mairie,379/democratielocale,387/conseil-des-sages,389.html#.U_xIaEhn-dM http://www.mutualite-retraite.fr/pages/etablissements/ domiciles-services.php http://www.habitat44.org/?r=1&largeur=1680 http://www.nantes-habitat.fr/ http://www.enet-dolowy-architecture.com/ http://berrangeretvincent.com/ http://www.mabire-reich.com/
travaux étudiants
UE 53-3 (licence 3)-A l’épreuve du terrain, le logement social : héritage et stratégies de mutation encadrée par Elisabeth Pasquier et Marie-Paule Halgand, et autres, 2013-2014, ENSANantes.
Le vieillissement de la population française incite à remettre en question notre rapport à la vieillesse dans la société. Pour cela, il convient d’analyser leur habitat à travers le logement social afin de repenser la place de cette partie de la population au sein d’un environnement adapté. Quels lieux en logement social sont actuellement destinés aux personnes âgées et quelles innovations sont nécessaires afin qu’elles restent actrices de leur vie ?