C’est culte
Marcel « Superstar » TEXTE : JEAN-PHILIPPE LEJEUNE
En 2003, un documentaire sur Marcel de Keukeleire, éditeur, producteur de musique et dénicheur de talent à Mouscron fait énormément parler de lui. Et pour cause, ce disquaire et ancien accordéoniste est à l’origine de succès interplanétaires comme Brasilia carnaval, La danse des canards et Born to be alive… Retour sur un film presqu’aussi mythique que son personnage principal avec Olivier Monssens, réalisateur.
Marcel Superstar, un film de Olivier Monssens (2003), 52 minutes
L
e scénario est né dans les années 90, lors d’une émission de radio comme l’explique Olivier : « J’avais fait une série d’été sur les coulisses, hauts en couleur, du show business belge de notoriété internationale. Chaque fois que je m’intéressais à l’un ou l’autre chanteur, un nom revenait dans la conversation : Marcel de Keukeleire. Je lui ai donc consacré une semaine entière.» Beaucoup plus tard, le journaliste, chroniqueur et homme de radio, ajoute une corde à son arc et se lance dans un documentaire. Il rencontre un producteur séduit d’emblée par le scénario de Marcel Superstar : « J’aime partir de quelque chose de très connu dans la mémoire collective et aller voir les coulisses. Là j’étais servi : j’avais 2 producteurs, Marcel de Keukeleire et Jean Van Loo qui, sans jamais quitter leur arrière-cuisine ont travaillé avec les plus grands. Plus j’avançais dans l’enquête plus j’étais touché par le côté extrêmement humain de ces personnages. » Les disques étaient pour la plupart enregistrés au studio Katy, le studio de Marc Aryan. La RTBF a rapidement été intéressée par le scénario mais c’est Arte qui donnera vie au film. Le producteur d’Olivier, Patrick Lauber, participait à un workshop pour expliquer à des confrères comment “pitcher” un sujet. « Il a présenté mon documentaire sur scène devant une salle remplie de gens du métier. Parmi eux, une productrice d’ARTE Allemagne a été séduite par le scénario et l’a acheté. » Le film sera donc diffusé le 20 juillet 2003 lors d’une soirée Thema intitulée Paillettes et yé-yé. Les réactions ne se font pas attendre… Le journal Le Monde est élogieux. Le journaliste, en parlant du titre de JJ Lionel, dira ceci : « Derrière ces quelques notes de musique un rien ringardes se cache un producteur belge de génie, Marcel de Keukeleire, roi des hit-parades mondiaux entre la fin des années 1960 et le début des années 1980. » « L’article était positif et pas du tout moqueur. Les gens ont ri avec les protagonistes », souligne Olivier Monssens. D’autres papiers sortent sur le documentaire comme dans le Parisien, les Inrocks… En Belgique aussi bien sûr dans Ciné Télérevue, La Libre Belgique et
Larsen
Mars, avril 2021
Le Soir. France 3 a même racheté les droits du documentaire pour le diffuser plusieurs fois. « Encore aujourd’hui on m’en parle, il a tourné pendant 7 ans mais les droits sur les images d’archives sont limités dans le temps. Malheureusement on ne peut donc plus le diffuser… » Qu’à cela ne tienne, en 2016, le producteur d’Oliver reçoit un coup de fil pour que le film soit présenté dans le cadre de la 3e édition du F.A.M.E (Film And Music Experience), festival de cinéma & pop culture, à la Gaieté lyrique à Paris, dans leur section vintage. Le journal Libération en fait un article et Rebecca Manzoni, journaliste culturelle sur France Inter, parle du film pendant 10 minutes au peak time de la matinale. Le documentaire s’offre une nouvelle jeunesse… « Ce film raconte la culture populaire mais les gens ont bien compris que ce n’était pas une hagiographie de ces tubes. J’avais beaucoup de réactions de jeunes collègues ingénieurs du son en radio qui trouvaient fascinant, sans la technologie actuelle, de faire des tubes à la bonne franquette. L’histoire est touchante, elle montre que l’on peut faire les choses avec son ressenti et le plus simplement possible. » Pointons effectivement le passage du documentaire où Jean-Luc Drion, compositeur et arrangeur pour Marcel, explique comment il a transformé un boléro composé par son comptable à l’accordéon en un véritable tube : Brasilia Carnaval. Il écrit les paroles et les enregistre le jour même dans un studio bruxellois. Résultat : 7 millions d’exemplaires écoulés depuis 1975. Malheureusement peut-être pour l’auteur du documentaire, ni Marcel de Keukeleire, ni Jean Vanloo n’étaient encore vivants lors du tournage. « J’ai une tendresse particulière pour Marcel (mort en 1986) et j’aurais aimé le connaître. Ce qui me fait plaisir c’est que ces personnages continuent à vivre. Par contre, je n’aurais peut-être pas eu la même liberté de parole s’ils avaient été présents dans le film. Il n’y a jamais rien de méchant dans les propos tenus mais le film aurait été différent. » Notre cinéaste ne s’est pas arrêté en si bon chemin. C’est tout naturellement à la vie et à l’œuvre de Marc Aryan qu’il consacre son 2e documentaire. « J’avais envie de poursuivre dans cette veine-là.
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