l’invité. SYLVAIN
GROUD, CRÉATION ET PONTS HUMAINS mais aussi.
PONTS DE ROUEN DOMPTER LA SEINE
patrimoine.
CULTURE ET PASSERELLES DANS LE SPECTACLE VIVANT
discussion.
DES PORTFOLIOS, UNE BANDE DESSINÉE, DES PAGES POUR S’ÉVADER...
MICHEL
SUR LES PONTS NUMÉRO ZÉRO — HIVER 2016 — 14,90 € — GRATUIT MICHEL-LAREVUE.FR
ART, C U LT U R E & S O CI ÉTÉ EN NO R M AND IE
ZÉRO - FÉVRIER 2016
SUR — SOUS LE PONT DES ARTS
arts.
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LE PROJET
… montrer ce qui se dit, dire ce qui se fait, ce qui se crée sur le territoire au travers d’articles de fond, de portfolios, d’entretiens, de rencontres… MICHEL veut être un relais d’expression pour ceux qui agissent en faveur de la culture et de la société en Normandie. Après plus de deux années de travail, nous avons mis en place l’organisation et les outils nécessaires pour développer cet ambitieux projet. Un support de médiation plutôt que de médiatisation. MICHEL se détache du domaine de l’information pour apporter de la connaissance et de la réflexion. Le comité de publication souhaite que la rédaction soit riche mais aussi abordable par le plus grand nombre : une plateforme qui parle des savoirs et de la création sans inflation analytique, en allant chercher aussi des points de vue amateurs. La lecture se veut simple et plaisante, en apportant une réelle connaissance du territoire, de ses acteurs et de ce qui s’y déroule, en évitant le « normandisme », ce qui se déroule ici se passe aussi bien ailleurs !
MICHEL « art, culture et société en Normandie » est une nouvelle revue culturelle thématique et régionale développée pour révéler les talents et les actions, mettre en lumière la création émergente et valoriser le patrimoine…
LE CONTENU Dans chaque nouveau numéro, une thématique est définie et développée sur plusieurs rubriques : – DES CHAPITRES traitant de la thématique selon des axes différents – UN(E) INVITÉ(E) un entretien et une carte blanche lui seront consacré.
La ligne éditoriale. MICHEL donne la parole à ceux qui font la culture : artistes, programmateurs, médiateurs… mais aussi aux citoyens, spectateurs avertis ou simples curieux. Une grande liberté est laissée aux contributeurs : prises de paroles par de longs entretiens, rencontres incongrues, portraits décalés, reportages insolites, regards croisés, témoignages érudits… un ancrage dans la culture et la société, au quotidien. La ligne rédactionnelle est portée par la transversalité des sujets selon un principe d’ouverture et de proximité, de pluridisciplinarité artistique, culturelle et sociale. La place des images est primordiale et participe à la qualité : portfolios d’illustrateurs, de photographes, de plasticiens. Une expression libre liée à la thématique, produite grâce à des commandes ou des publications de travaux des nombreux talents régionaux.
– UNE BD un auteur invité proposera sa vision du thème sur huit pages. – DES PORTFOLIOS plasticiens, graphistes, photographes… présenteront leurs travaux. – DES RÉFÉRENCES « S’évader » autour de la thématique, une sélection de livres, de films, de musique, des lieux patrimoniaux ou des promenades, ou encore du fooding… – RIEN À VOIR quelques articles seront abordés en mode « hors-sujet », coups de cœur, initiatives, projets, portraits, nouvelles… donner du souffle et de la liberté d’expression sur quelques pages disséminées…
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MICHEL fonctionnement. Le comité de publication – piloté par les éditions Lapin Rouge – définit la thématique accompagné d’un invité. Sur un principe de contributions, journalistes professionnels, auteurs, écrivains, scientifiques, plasticiens, conservateurs… ainsi que d’éventuelles grandes « signatures » sont sollicités sur l’ensemble du territoire pour développer le contenu envisagé. MICHEL numéro zéro. Ce numéro est une version réduite du futur numéro un, il est diffusé gratuitement auprès de l’ensemble des acteurs et décideurs culturels de Normandie afin de recueillir les avis et d’envisager son mode de financement privé, public et participatif. MICHEL numéro un. En fonction des retours, le numéro un sera diffusé pour l’été 2016 en Normandie. La version imprimée sera vendue moins de 15 €. Composée de 128 pages elle sera disponible deux fois par an (été et hiver) dans les librairies, maisons de la presse et relais culturels. MICHEL est numérique. Un site web présente une partie des contenus du sommaire, des sujets enrichis et complémentaires.
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MICHEL
L
l e zéro es t neu t r e , ni p o ni nég at if… l e zéro es t tout pe comme
e zéro est neutre, ni positif, ni négatif. Le zéro est rond, ni avant, ni après. Le zéro c’est la fin du début, c’est maintenant, c’est le point de départ. Le zéro est là, tout peut commencer. Depuis plus de deux ans, l’association éditions Lapin rouge travaille à concrétiser ce projet de revue culturelle, thématique, régionale. Un comité de publication composé d’acteurs culturels, d’auteurs, de gens curieux et impliqués s’est réuni pour définir le projet, la ligne, trouver les thématiques pertinentes et concevoir une publication semestrielle qui veut être le témoin de l’action culturelle, de la création d’hier et d’aujourd’hui, de points de vue et d’opinions. Dans un contexte social particulièrement complexe, MICHEL est né de ces envies de révéler les talents, de solliciter des contributions, de se pencher sur le fond, proposer du contenu artistique, culturel, patrimonial, politique ou social. Un besoin de révéler ce qui se dit, ce qui se fait, ce qui se crée au sein de notre désormais « grand » territoire, la Normandie. Nous sommes face à un enjeu de société. Beaucoup d’entre nous ont mal au cœur, nous cherchons des valeurs – nous dit-on – elles sont pourtant là, sous nos yeux, chaque jour : l’éducation, la formation, la recherche, la création et la culture sont portées par les artistes, les responsables de structures, les médiateurs, les chercheurs, les enseignants, les conservateurs. Ces faiseurs sont nos passeurs, des acteurs qui ont tous la même ambition : transmettre. Jamais nous n’avons vu autant d’initiatives collectives et individuelles, l’intelligence est à chaque coin de rue, dans les bibliothèques, les centres d’art, les salles de spectacles, les musées ou dans les bistrots. MICHEL souhaite s’immiscer dans ce territoire vivant où le travail quotidien engendre tant d’échanges, de partages, de bien être et de création. Créer du lien, vraiment. Et nous sommes nombreux à refuser de laisser les puissances financières et les violences dominer un système économique et médiatique, sur lequel les politiques tentent, tant bien que mal, de garder le contrôle. À la (sur)médiatisation, nous répondons par la médiation. MICHEL est un médiateur, un relais de paroles et d’expressions, un passeur de savoir et de création.
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MICHEL
ÉDITORIAL
s i t i f, l à, ut n cer .
D’où cette thématique « Sur les ponts ». Nous y sommes sur le pont, l’ouvrage d’art qui nous permet de passer d’une rive à l’autre, de casser les frontières, de traverser vers un ailleurs. C’est aussi un symbole territorial fort pour nous, les Normands, qui nous rassemblons, enfin. Nous témoignons d’histoires de ponts où des artistes sont intervenus, nous souhaitons aller voir sous les ponts, interroger ces no man’s land, ces entredeux où des gens se retrouvent pour cultiver des jardins secrets… Le pont nous permet d’aller au-delà, plus loin. Nous proposons alors d’observer les passerelles qui se créent entre les acteurs culturels au sein du territoire mais également au-delà de nos frontières. Ce numéro zéro est une expérimentation sur 36 pages, il permet de poser les intentions d’un futur numéro un de 128 pages. Nous avons sélectionné quelques articles ou des résumés, des notes d’intentions, des extraits de portfolios… Ces contenus étant amenés à être enrichis et complétés dans le futur numéro un que nous souhaitons diffuser l’été prochain. Le sommaire exhaustif témoigne de la variété et de la richesse des sujets. En complément, nous avons commencé à développer le site michel-larevue.fr. Aujourd’hui vitrine éditoriale, cet outil numérique est appelé à largement s’enrichir de mots, d’images et de sons. MICHEL est un projet collectif, il s’adresse à tout le monde. Au-delà du triangle Rouen - Caen - Le Havre, nous souhaitons témoigner des histoires et des actions de l’ensemble de la Normandie et même d’ailleurs. Nous réfléchissons déjà aux thématiques futures et même si nos choix seront souvent arbitraires, nous tenterons de révéler les initiatives et le travail effectué par l’ensemble des acteurs, sans langue de bois, sans élitisme, souvent avec humour, toujours avec passion. MICHEL a besoin d’argent, c’est évident. Avec ce numéro zéro, nous sollicitons les entreprises et leurs décideurs qui pourront investir dans un projet culturel indépendant, innovant et fédérateur. Nous incitons l’ensemble des collectivités à s’impliquer pour cette initiative territoriale pluridisciplinaire. Nous proposons aux structures culturelles de nous soutenir par l’achat d’espace publicitaire. Et nous appelons l’ensemble des lecteurs, associations, militants, passionnés à nous soutenir grâce au financement participatif en ligne (www.kisskissbankbank.com/michel-la-revue). Mais pourquoi MICHEL ? C’est le bon copain Michel, le chouette tonton. Il aime bien rendre service, il a ses petites habitudes, il est discret mais faut pas le contrarier, c’est un sensible. Et pourquoi pas Michelle ? C’est que saint Michel, est notre saint patron à nous les Normands, l’archange qui a terrassé le diable… Ça tombe bien. — XAVIER GRANDGUILLOT
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MICHEL
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MICHEL
SOMMAIRE
OUVERTURE 01
LE PROJET
04 ÉDITORIAL 07
BANDE DESSINÉE : LE PONT ——steve baker
A chaque numéro un auteur de bande dessinée régional s’exprime sur la thématique : une petite h istoire complète commandée spécifiquement. C ’est Steve Baker qui s’y frotte ici avec le début des aventures de mestre Michel.
sur les ponts LE PONT PATRIMOINE COLLECTIF 18
UN SOMMAIRE DÉTAILLÉ POUR CE NUMÉRO ZÉRO, MICHEL PRÉSENTE L’ENSEMBLE DES SUJETS AMENÉS À ÊTRE DÉVELOPPÉS DANS LE NUMÉRO UN, SUR 128 PAGES.
DOMPTER LA SEINE LE PONT DE PIERRE DE ROUEN ——stéphane rioland
Le pont médiéval de Rouen construit en 1167 a entretenu un rapport complexe avec le fleuve Seine. Ce pont fragile qui ne cesse de s’écrouler, va dicter aux Rouennais pendant près de sept siècles une organisation spatiale, sociale et économique dont les traces perdurent aujourd’hui.
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RENCONTRE AVEC JEAN GAUMY ——maryse bunel
À propos de son témoignage photographique de la construction du Pont de Normandie en 1994.
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PONTS DE MÉMOIRE ——marylène carre
Le récit commence en 1944. Des ponts, génialement conçus par une armée en guerre, traversent la Manche pour porter la liberté. Celle-ci retrouvée, les ponts partent reconstruire les provinces sinistrées. Le pays relevé, ils reviennent en Normandie pour aider la mémoire à franchir le temps.
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N U M É R O 1 - É T É 20 1 6
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PORTFOLIO #01
COUPER LES PONTS ——stéphane marie néef — dessins : françois trocquet
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Couper les ponts est le procès-verbal d’une enquête
——photographies claire le breton — texte marie bazire
(en cours) sur les origines. Une enquête qui,
inévitablement, fait reparaître l’exil. Celui de nos aïeux
Le portfolio « Autographie » regroupe une sélection
qui, un jour, ont dû fuir le pays. Car dans nos mémoires
d’œuvres de Claire Le Breton, plasticienne installée
vivent obscurément ceux qui ont coupé les ponts.
au Havre depuis 2012. Des photographies réalisées « sur la route », et qui croisent, un instant et pour
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Michel, un texte de Marie Bazire.
LE PONT DANS LE PAYSAGE
SUR/SOUS LE PONT DES ARTS
——éric germain
Un arbre s’est couché au-dessus d’un cours d’eau,
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reliant ainsi les deux rives : « Au moins, il ne sera
CAMILLE ET LES AUTRES ——marie bazire
pas tombé pour rien… » Nous ne cessons de vouloir
traverser, aller de l’autre côté, nous cherchons
Regard posé sur quelques œuvres de plasticiens
tous cet arbre couché, nous nous arrêtons tous au
contemporains ayant eu pour terrain de jeu le motif
milieu pour voir ce qu’il se passe en dessous et nous
du pont et la Normandie.
formulons tous l’espoir que ce sera mieux en face. Cette quête motive toutes les audaces en termes
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de constructions de ponts.
UNE VIE SOUS LES PONTS ——jessica perisse
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LE PONT COLBERT À DIEPPE
De la passerelle du Mont Saint Michel au pont Colbert de Dieppe, en passant par Pont-Audemer et Tancarville,
DE L’OBSOLESCENCE À LA RENAISSANCE,
plusieurs mondes se croisent sous les ponts. Une vie
UN MOUVEMENT CITOYEN
maritime et migratoire, une vie de travailleurs et de
——jean - bernard cremintzer
passants. Voire une vie artistique et bohémienne.
Face à la menace de destruction de l’un des trois derniers ponts tournants en Europe, et le dernier
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utilisant encore son mécanisme hydraulique d’origine,
JEUX DE MOTS ——david poullard — marie chéné
le pont Colbert fait l’objet depuis plusieurs années
d’une menace de démolition, sans que les arguments
Michel invite un auteur, poète, typographe, graphiste,
pour une telle opération s’avèrent pertinents.
jongleur de lettres à composer un jeu de mots sur
Une association s’est créée face à cette opération,
la thématique du numéro. Pour ce zéro, Marie Chéné
et par son engagement, et le support de ses experts
et David Poullard s’amusent de « mots ponts ».
extérieurs, a réussi à mobiliser la population dieppoise et à sensibiliser les décideurs.
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REMIXER LES MUSÉES
RIEN À VOIR #01
——marylène carre
ESPRIT DE MARCEL, ES-TU L À ?
RIEN À VOIR #02
Depuis quatre ans, Museomix remue le monde des
——marie bazire
musées en inventant de nouvelles rencontres avec le
Il est des personnes dont la rencontre promet
public. Chaque année en novembre, pendant trois jours,
de belles surprises. Comment, en effet, s’imaginer
des musées sont « muséomixés » en simultané, partout
que son propre voisin soit un collectionneur éclairé
dans le monde. Dans un musée normand en 2016 ?
d’œuvres de Marcel Duchamp ? Ce collectionneur nous a ouvert sa porte, et nous livre ici un petit aperçu des merveilles qu’il possède.
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MICHEL
SOMMAIRE
L’INVITÉ 70
artistique entre la France et la Palestine qui se matérialise par un festival Entr(e)voir, une
SYLVAIN GROUD
biennale présentée en alternance dans les deux pays.
ENTRETIEN ET CARTE BLANCHE
Elle a ainsi lancé une belle aventure humaine
——maryse bunel
pour des artistes professionnels et amateurs
Avec sa compagnie MAD, installée à Vernon,
qui confrontent leur regard sur des territoires.
dans l’Eure, Sylvain Groud fait émerger une danse empreinte du quotidien. Ses différentes créations
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sont nourries de rencontres avec divers publics. Dès son premier spectacle, le chorégraphe a entrepris
PONTS ET PASSERELLES DANS LE SPECTACLE VIVANT SCÈNE NATIONALE 61 : UN PONT À 3 PATTES
un vaste chantier : construire des ponts humains.
——marylène carre 80
RIEN À VOIR #03
Atypique, la Scène nationale 61 (Orne) fait le pont entre trois villes, distantes et distinctes : Alençon,
LE PÉDALOCINÉ
Flers et Mortagne-au-Perche. Pour sa directrice,
——marylène carre
Régine Montoya, créer des passerelles n’est pas
Le Lux, cinéma d’art et essai de Caen, a imaginé
une finalité, mais le point de départ du projet
un nouveau concept de cinéma en plein air, où le
culturel.
dispositif de projection est alimenté par un peloton de cyclistes. Pour voir le film, le public doit pédaler. Le prototype, 100 % recyclé, devrait être prêt pour le
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PROJETS CULTURELS ET PASSERELLES EUROPÉENNES
Dans la continuité de l’article précédent, MICHEL
passage du Tour de France dans la Manche en juillet.
PORTFOLIO #02 81
sollicite les structures régionales qui ont fait la démarche de développer des projets artistiques
L’EXPÉRIENCE DE LA TRAVERSÉE
à l’échelle européenne. Mais comment font-ils ?
——j’aime beaucoup ce que vous faites — le bureau mécanique
Résidence de recherche et de création au Centre I nternational d’Art et du Paysage – île de
S’ÉVADER
Vassivière, du 22 juin au 9 octobre 2015
92
114 BALADES
RIEN À VOIR #04
116 FILMS 118
TA GRAND-MÈRE, ELLE TE FAISAIT
122 FOODING
——stéphane bihan
Moi j’avais toujours droit à des pâtes ou à des frites, mais par contre c’étaient les meilleures du monde.
CLÔTURE
Je m’interroge depuis longtemps sur le rapport que j’ai à la nourriture et à la qualité des produits… Et si
124 CONTRIBUTEURS
nous posions la question à quelques chefs cuisiniers ?
PONTS ET PASSERELLES CULTURELS 94
RÉVÉLER L’HUMAIN
APPEL À FINANCEMENT
128
MICHEL EST MON AMI
Photographe rouennaise, Isabelle Lebon
Pour conclure, à chaque numéro, un auteur régional est sollicité pour écrire une histoire de « son » ami Michel.
est une femme nomade, une grande voyageuse. Avec l’association Al Nour, elle a construit un pont
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127
——stéphane bihan
——maryse bunel — photographies isabelle lebon
MUSIQUE
120 LIVRES
QUOI À MANGER ?
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L E P O N T – PAT R I M O I N E C O L L E C T I F
p o n t s d e mé mo ire C’est le récit de ponts génialement conçus par une armée en guerre pour porter sinistrées. Le pays relevé, ils reviennent en Normandie pour aider la mémoire À Saint-Denis-de-Méré, dans le Calvados, la départementale franchit le Noireau sur un pont métallique, repeint en orange. Sur le Territoire de Belfort, à Foussemagne, le pont est bleu et dit « d’Arromanches ». Non loin de là, à Chaux, un ouvrage identique, « en forme de ventre de poisson » enjambe la Savoureuse. À Pont-de-l’Arche, dans l’Eure, il ne sert plus qu’aux pêcheurs. Celui de Pont-Farcy, en Normandie, dort dans un entrepôt de l’Équipement. Le profil caractéristique ne trompe pas. Cette architecture métallique à l’allure de baleine a la même origine. Arromanches, été 1944. UN CHEF-D’ŒUVRE D’INGÉNIERIE
1942. Churchill comprend que la prise d’un port en Europe ne sera pas possible et qu’il convient, pour gagner la guerre, d’en construire. Le génie britannique relève le défi : fabriquer et acheminer depuis l’Angleterre les pièces d’un immense Meccano qui seront assemblées en quelques jours devant les côtes normandes, sous les feux de l’ennemi. Le major Allan Becket imagine des « jetées flottantes, capables de monter et descendre avec la marée ».
Elles sont constituées d’une succession de passerelles, de 24 mètres de long et 28 tonnes chacune, posées sur des flotteurs en béton. Près de sept kilomètres de jetées parviennent à destination, une semaine après le Débarquement. Là, elles vont servir à la construction de deux ports artificiels, les « Mulberry ». Le port américain, à Saint-Laurentsur-Mer, est anéanti par la tempête du 19 juin 1944. Mais à Arromanches, le port britannique, ou Port-Winston, fonctionne jusqu’au 19 novembre 1944. Plus que sa capacité logistique (17 % du ravitaillement allié débarque à Arromanches), il joue un rôle stratégique et psychologique déterminant. C’est aussi une merveille technologique et un modèle de durabilité. Faites d’acier trempé, les passerelles d’Arromanches sont indestructibles. À l’automne 1944, le front s’est déplacé à l’Est ; les autorités britanniques entreprennent le démantèlement de Port-Winston : 183 passerelles sont démontées et stockées à Blainvillesur-Orne. Les Alliés en ont cédé la propriété à la France pour remplacer les ponts détruits. En 1945, le Ministère des Travaux publics et des Transports orchestre la grande distribution. Les
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« ponts d’Arromanches » sont expédiés par voie ferrée dans tout le pays, où des villageois, privés de voie de communication depuis des mois, les accueillent avec reconnaissance. Ces ponts, qui ont libéré l’Europe, vont désormais reconstruire la France. LES PONTS RENAISSENT
Après guerre, la France compte 5 944 ponts détruits. On ne traverse la Seine qu’à Paris. L’Oise est infranchissable jusqu’à Noyon, la Loire jusqu’à Nevers. Il faut parcourir des dizaines de kilomètres pour subvenir aux besoins quotidiens. Faute de matériaux, on récupère toutes sortes de charpentes pour fabriquer des tabliers provisoires ; barges et bacs sont remis en service. L’attribution des « ponts d’Arromanches » est alors un privilège, auquel peu de communes accèdent. L’inventaire réalisé en 1993 par l’association Port-Winston d’Arromanches fait état de 25 sites, principalement dans l’est et le nord du pays. Les passerelles arrivent en 1946 en Picardie, en Lorraine et en Rhône-Alpes, en 1947 en Alsace, en 1948 dans le Morbihan. Près d’une décennie s’écoule avant qu’elles ne parviennent
MICHEL
PONTS DE MÉMOIRE
© NARA
la liberté. Celle-ci retrouvée, les ponts partent reconstruire les provinces à franchir le temps. — MARYLÈNE CARRE en Franche-Comté, Pays de Loire et région Centre. Certaines sont réutilisées à plusieurs reprises : le pont de Cattenon, en Moselle, est construit en 1965 à partir de cinq passerelles rapportées de Sarrebourg. En principe provisoires, elles sont inébranlables et si l’on cesse de les utiliser, c’est parce que leur dimension (3,48 m de large) ne suffit plus au trafic. Aujourd’hui, neuf ponts sont encore en service. Certains ont été ferraillés. D’autres sont rapatriés en Normandie, où ils deviennent les passerelles de la mémoire. DES OBJETS DE MÉMOIRE
Le déblaiement des plages du Débarquement s’achève en 1956. Il ne reste plus du port artificiel que quelques caissons Phoenix i m mergés, des Ces ponts, qui f lotteurs et un quai de déchargement échoués sur la plage. Des blocs de béton. Le reste est vendu au prix de la ferraille, qui vaut alors de l’or, pour reconstruire les communes sinistrées et bâtir le futur musée du Débarquement à Arromanches. Mais très tôt, on s’émeut de la disparition des vestiges du
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port. Habitants et commerçants signent en 1950 une pétition pour demander « la conservation de ces vestiges qui ont une valeur touristique considérable pour la région ». Le tourisme de mémoire naît au lendemain de la guerre. Mais à mesure que le nombre de visiteurs augmente, la mer grignote un peu plus le béton. Les moins optimistes prédisent que les caissons auront disparu dans trente ans. Les autorités de tutelle se renvoient la responsabilité de ces vestiges, qu’aucun classement ne protège. L’inscription des Plages du Débarquement au patrimoine mondial de l’Unesco pourrait changer la donne. L’Unesco abhorre les reconstitutions historiques ; il faut des « restes ». Les passerelles, qu’on avait fini par oublier, rentrent en scène.
Vierville-sur-Mer finance le rapatriement de cinq passerelles stockées par l’Équipement en Indre-et-Loire, afin de reconstituer une chaussée flottante. Elle repose sur le bas-côté de la route, où elle surnage étrangement un champ de bovins. 70e anniversaire, nouvel emballement de l’Histoire. Deux des quatre p a s s e r e l le s de Re v i n , d a n s le s Ardennes, promises à la ferraille, sont sauvées. La Région finance leur retour à Arromanches, où elles campent la falaise, près du monument consacré au Corps of Royal Engineers, celui de Beckett. Inaugurées le 6 juin 2015, elles deviennent les « témoins emblématiques de l’histoire de la Normandie et de l’Europe ». En 2016, le Conseil départemental de Moselle remplace
ont libéré l’Europe, vont désormais reconstruire la France. En 2004, à la faveur du 60 e anniversaire du Débarquement, le pont de Quincy-Landzécourt, dans la Meuse, revient à Arromanches ; la passerelle est exposée sur la cale, à quelques brasses de sa position historique. La même année, le musée (privé) de
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le pont de Cattenon. Cinq passerelles sont disponibles, mais le cadeau est un peu embarrassant. Arromanches, qui ne sait plus quoi faire de ses ponts historiques, a persuadé les communes voisines de Saint-Côme-de-Fresné et Tracy d’accueillir l’héritage.
L’ I N V I T É
entretien avec
sylvain groud Dans son premier numéro, MICHEL, donne une carte blanche à Sylvain Groud. C’est une occasion pour le danseur et chorégraphe de revenir sur son parcours singulier, sur le travail mené dans diverses structures du territoire, comme l’hôpital, les maisons de retraite, les écoles… Des temps de partage et d’échange qui ont une influence sur sa danse. Sylvain Groud souhaite également évoquer toutes ces personnes, artistes ou pas, qui le nourrissent en tant qu’homme et créateur. Regarder danser Sylvain Groud est un moment de grâce. L’émotion est immense face aux longs étirements et aux vifs enchaînements de cet ancien interprète phare d’Angelin Preljocaj à la silhouette longiligne. Toujours élégant, généreux, Sylvain Groud a fait de la danse « un projet de vie », un « outil de médiation. Pourquoi ? Je ne sais pas
Sylvain Groud en répétition. Donc, septembre 2009 © TORMOD LINDGREN
le dire. Néanmoins, je suis convaincu qu’il faille convoquer délicieusement le chaos. » Le danseur est devenu chorégraphe. Sylvain Groud a fondé la compagnie MAD en 2002 qu’il installe à Vernon, dans l’Eure. Il écrit une danse jubilatoire, explosive, profonde, sensuelle qu’il confronte aux diverses disciplines artistiques et nourrit de rencontres. « Créer un spectacle, c’est continuer à être dans un processus de recherche à travers l’autre. J’ai besoin de l’autre, des autres. » D’une création à l’autre, Sylvain Groud « construit des ponts avec les autres, les espaces des autres ». Il va alors s’immerger dans divers lieux tels que les écoles, les hôpitaux, les résidences pour les personnes âgées.
S Y LVA I N G R O U D
« Je suis en perpétuel apprentissage. Tant que je fabrique, je recherche et je continue à apprendre. » Durant ces dernières années, Sylvain Groud a mené de nombreuses actions dans le milieu hospitalier. Il y retourne volontiers. Il a besoin d’y retourner. « Pourquoi ? Ce pourrait être d’autres territoires. Mais, à l’hôpital, c’est toujours productif dans le sens poétique. Il y a un rapport au corps singulier qui m’oblige à la plus grande exigence artistique. J’aiguise ainsi des outils en permanence. » Dans son travail, Sylvain Groud constr uit éga lement des « ponts huma ins » Tout d’abord avec les malades, le personnel hospitalier. « Je dois me retrouver sur le territoire de ces personnes. C’est la même chose avec un créateur. Il est nécessaire
que je comprenne le cheminement de cet artiste avec lequel je vais travailler. » Il l’a fait avec des musiciens. Le chorégraphe a bousculé les codes de l’orchestre de l’Opéra de Rouen Normandie, alors dirigé par Benjamin Lévy, dans Cordes. « J’ai dû orchestrer des corps, imaginer un langage pour que ce chef, un être brillant, me comprenne. » Sylvain Groud a travaillé sur l’image avec Grégoire Korganow. Il s’est plongé dans le hip-hop avec une troupe de jeunes danseuses dans Elles. Lors de la carte blanche donnée dans le premier numéro de MICHEL, le danseur et chorégraphe évoquera dans un long entretien toutes ces expériences, ces personnes qui l’ont marqué. « Chaque création est un événement dans une vie. » — MARYSE BUNEL
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© COLLECTION LO GIUDICE & MITROFANOFF, PARIS
ESPRIT DE MARCEL, ES-TU LÀ ?
Marcel Duchamp, artiste majeur du xxe siècle né à quelques kilomètres de Rouen, participait en 1968 à une aventure artistique singulière. Sa contribution, sous la forme d’une drôle d’équation, fut publiée dans le numéro 2 d’un ensemble de portfolios édités à New York la même année, sous l’impulsion du surréaliste William Copley. Des artistes de renom participent alors à l’aventure : Arman, John Cage, Christo, John Giorno, Alain Jacquet, Ray Johnson, On Kawara, Joseph Kosuth, Roy Lichtenstein, Man Ray, Walter de Maria, Bruce Nauman, Claes Oldenburd, Yoko Ono… Chacun y contribue à sa façon (par un dessin, un collage, un texte…), et accepte que son œuvre soit reproduite à 2000 exemplaires pour intégrer l’un des six portfolios vendus par abonnement. Et tous s’engagent aux côtés de Copley pour dénoncer, à travers ce projet, le fonctionnement du monde de l’art new yorkais de la fin des années soixante. Le titre de la série de portfolios sonne comme une provocation, teintée d’humour : « Shit Must Stop ». Un esprit décalé que l’on retrouve ici chez Marcel Duchamp, maniant les mots et les concepts comme lui seul savait le faire pour apposer son écriture au dos du portfolio « SMS » numéro 2. — TEXTE COLLECTIF
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MICHEL
P O R T F O L I O #0 1
J’aime ces espaces qui nous mènent à tout à l’heure, seuils vers l’ailleurs, fils tendus dans les airs. Ceux qui les empruntent en sont les funambules.
AUTO-GRAPHIE — PHOTOGRAPHIES CLAIRE LE BRETON — TEXTE MARIE BAZIRE EXTRAIT DU PORTFOLIO À PARAÎTRE DANS LE NUMÉRO 1
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Tout mon temps, je le passe sur la route. Ou presque.
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Roads, 2006-2015. Claire Le Breton réalise ses Autographies comme j’ai vécu cette aventure indienne de 2006 : sans que le pied ne vienne toucher terre, le champ visuel dessiné par le cadre du pare-brise. Il est devenu évident, à force de voir défiler ses images, chargée que j’étais de l’accompagner dans sa sélection d’œuvres pour ce portfolio, qu’un partage s’imposait. Ou plutôt : une rencontre. Entre ses photographies et mes mots. De la tension, des contradictions semblent vouloir naître de la confrontation de ces deux expériences distinctes dans le temps et dans l’espace, comme pour mieux faire émerger la pensée – et dire la singularité de ces « ponts autoroutiers » que nous avons en commun l’une et l’autre. — MARIE BAZIRE pour echo(e)s*
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MICHEL
SUR — SOUS LE PONT DES ARTS
De Pissarro à Arne Quinze, les ponts ont inspiré de nombreux artistes en région. MICHEL a souhaité témoigner de ces expériences artistiques autour de ponts en Normandie. À venir dans le futur numéro un, un documentaire urbain réalisé grâce à des contributions croisées : graffs, affichage, jardins, skate-park, trafics, circulations mais aussi lieux de vies pour de nombreux sans logis… que se passe-t-il sous les ponts des villes ?
SUR— SOUS LE PONT DES ARTS
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Camille et les autres
(extraits)
— MARIE BAZIRE POUR ECHO(E)S *
Somme toute, un pont reste un pont. Il dresse un lien entre deux espaces séparés par du vide (ou quelque autre obstacle infranchissable aisément), et, la plupart du temps, remplit parfaitement ses fonctions. Utilitaire donc. Pourtant, pourtant, le mot s’est immiscé dans le langage courant, empruntant bien des détours de langage. « On ferait bien le pont de l’Ascension l’année prochaine. » « Mais d’ici là, de l’eau aura passé sous les ponts… » C’est dire alors que de l’utilitaire, on passe au symbolique. C’est justement ce jeu du déplacement qu’ont opéré les artistes qui nous intéressent ici. Qu’ont-ils, eux, à dire du pont, de ses fonctions urbanistiques ou autoroutières ? de ses formes et de ses modes de construction ? de son histoire ? de ce qu’il peut signifier ? des métaphores dont il est l’objet ? * (art contemporain, diffusion, édition, commissariat d’exposition)
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MICHEL
SUR — SOUS LE PONT DES ARTS
Somme toute, un pont est plus qu’un pont. Les premiers créateurs à s’emparer de cette idée sont les artistes impressionnistes. Avant eux, le pont ne peut faire figure de motif de la peinture. S’il apparaît ici et là, c’est en qualité d’élément de décor. Jamais comme sujet même d’une œuvre. Les impressionnistes développent donc le motif, lui faisant prendre un sens bien particulier, de Claude Monet et ses vues des ponts franciliens à Camille Pissarro dépeignant à l’envi ceux de Rouen. D’autres artistes leur ayant succédé l’ont également adopté. Futurisme, Nouvelle objectivité, Land art, Hyperréalisme… bref, le pont passe à travers les époques et les mouvements artistiques, et se décline d’autant de façons qu’il y a d’artistes à s’y frotter. En Normandie, plusieurs expériences récentes ont permis d’expliciter la vision que peuvent avoir les artistes du pont, dans un double mouvement de rappel et de déconstruction du travail des impressionnistes. Sur un axe traversant la Normandie de Paris à l’estuaire et dessiné par la Seine, et dans le contexte d’une région réactivant sans cesse l’impressionnisme pour développer le tourisme culturel et retravailler son image, un pont temporel se voit dressé entre impressionnisme et art contemporain. (…) ROUEN
En parallèle de la première édition du Festival Normandie Impressionniste, la ville de Rouen proposait, en 2010, une manifestation d’art contemporain sous le titre « Rouen Impressionnée ». Dans une ville au patrimoine bâti et muséal riche, les pouvoirs publics entendaient
Arne Quinze, Camille. Installation sur le pont Boieldieu, Rouen Impressionnée, 2010. © JEAN-PIERRE SAGEOT POUR LA VILLE DE ROUEN
ZÉRO - FÉVRIER 2016
ainsi accorder une place à la création contemporaine, pour qu’elle se donne à voir, dans l’espace public. L’une des œuvres les plus marquantes de cette édition, Camille, est due à l’artiste belge Arne Quinze, choisi par la commissaire des expositions, Laure Delamotte-Legrand, pour, notamment, le jeu de relecture qu’elle proposait à partir de références historiques – les mêmes Claude Monet et Camille Pissarro. (…) ÉVREUX
Quelques années plus tôt, la Ville d’Évreux avait, elle aussi, proposé une manifestation culturelle pendant laquelle une installation d’art contemporain venait réactiver la question du pont. En 2000, dans le cadre de Passavents, un festival d’art contemporain qui venait d’être créé, elle invitait l’artiste japonais Tadashi Kawamata à investir l’espace public, et plus particulièrement le centre historique de la ville. (…) Mais l’art est sujet à discussion. Et l’installation de Kawamata fait polémique à Évreux. Il y a ceux qui voient l’impact « environnemental » de l’installation (de par sa prise au sol, l’installation oblige à la destruction de différents parterres par exemple). D’autres se disent que l’opération est bien coûteuse (il est vrai que le montant annoncé peut sembler pharaonique à qui ne sait pas dans le détail ce qu’il permet de financer). D’un autre côté, le projet est assumé par les responsables politiques de la ville, et revendiqué comme le lieu possible d’accords et de désaccords, de dialogues et d’échanges… pendant que leurs opposants politiques crient au scandale. Bref, l’art remplit ici toute sa fonction sociale. (…) Le pont n’est plus seulement un entre-deux : il est un espace critique, un espace de relations sociales. Il invite à la réflexion sur l’histoire et le
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vivre ensemble. Un interstice comme une fabrique du regard. Kawamata crée des ponts entre le dehors et le dedans, entre construction, destruction et reconstruction, mais également entre le passé et le présent. (…) CAS À PART
En 2012, était présenté le projet de Musée éclaté de la presqu’île (de son petit nom MEPIC). En vue de l’édition 2013 du Festival Normandie Impressionniste, un certain nombre d’acteurs de la Ville de Caen et de sa communauté d’agglomération entendaient répondre d’une façon spécifique aux grandes expositions qui se profilaient alors dans les musées de Rouen, du Havre, de Caen ou de Giverny. Les organisateurs évoquaient le « mariage de l’art et du territoire », la construction d’un « pont entre les habitants de ce territoire et l’art contemporain ». Cas à part ici puisqu’il ne s’agit pas de s’intéresser au motif du pont utilisé comme motif d’une œuvre sculpturale, ni du support d’exposition de l’œuvre en question. Invisible, le pont pouvait se définir par et dans le projet, dans la projection que se faisaient ses créateurs de l’idée de l’animation culturelle d’un territoire. (…) L’article de Marie Bazire sera ponctué de deux entretiens : — Laure Delamotte-Legrand revient sur la réception de l’installation Camille, et plus largement sur cette aventure artistique qui a marqué les esprits. — En 2013, à Honfleur, l’art contemporain s’invitait au lycée Albert Sorel. Mireille Fulpius et Katherine Louineau ont investi l’établissement, en usant, elles aussi, du motif du pont. Ainsi est née La Passerelle, une installation réalisée en partie in situ.
JEUX DE MOTS
MICHEL
P O N T S E T PA S S E R E L L E S C U LT U R E L S
Comment les acteurs culturels tissent-ils des liens sur le territoire, comment les structures travaillent-elles ensemble : résidences, coproductions, codirections, mutualisations… Il existe des passerelles peu visibles entre les artistes, les diffuseurs, les producteurs, les financeurs. MICHEL souhaite révéler ces liens par un entretien croisé entre les acteurs de différentes structures culturelles du territoire et éclairer leur démarche par des exemples concrets. Nous tenterons d’effectuer ainsi un état des lieux des fonctionnements existants et imaginables, des évolutions et des enjeux. Pour ce numéro zéro, MICHEL a rencontré Régine Montoya, directrice de la Scène nationale 61, qui fait le pont entre trois territoires distants et distincts.
PONTS ET PASSERELLES CULTURELS
Ces passerelles existent aussi au-delà de nos frontières grâce à des projets de coopération européenne : pourquoi et comment développer ce type d’actions culturelles ? La question sera posée à plusieurs structures qui participent au rayonnement des artistes par des actions internationales.
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CHAPITRE XXX
Révéler l’humain — MARYSE BUNEL
ci-dessus :
Isabelle Lebon, Bil’ in Palestine, 2014 à droite :
Isabelle Lebon, Yacoub Jerusalem, 2013
Pour Isabelle Lebon, la photographie devient un lien entre les cultures et entre les peuples.
La photographie comme un pont, un lien, un fil qui se tisse lentement, délicatement mais assurément entre les êtres. C’est la vision d’Isabelle Lebon. Dans son travail, cette photographe rouennaise, pétillante et curieuse, porte un regard sans concession et plein d’humanité sur ses sujets ; qu’ils soient le portrait, le corps, le paysage, la Chine, la Palestine… La rencontre entre Isabelle Lebon et la photographie a été un pur hasard. « Je voulais être paléontologue. » Adolescente, elle s’amusait avec une caméra à tourner des vidéos. « À Caen, je faisais partie d’une association.
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À plusieurs, on réalisait des petits films en super 8. Plus tard, je suis allée à Paris, j’ai travaillé dans un studio. Et, je ne sais pourquoi, la photo a pris de plus en plus de place dans ma vie. Au départ, je n’avais pas d’ambition particulière. » Il a fallu la rencontre avec Christian Siloé et Michel Francisci pour qu’Isabelle Lebon se lance dans cette belle aventure. « Michel m’a soutenue, m’a mise en confiance. Beaucoup de personnes me disaient de continuer. Je me suis alors laissée prendre au piège ». La photographie est devenue son moyen d’expression. Pour Isabelle
MICHEL
P O N T S E T PA S S E R E L L E S C U LT U R E L S
Lebon, « les mots sont trop réducteurs alors que la photographie est métonymique. Elle peut avoir plusieurs sens. J’écris seulement pour expliquer ma démarche. » Avant l’image, il y a toujours le dialogue. Pour bien évidemment instaurer un climat de confiance. « Là, tout passe par les mots. J’arrive plutôt bien à apprivoiser les gens. Je suis quelqu’un de naturel, de simple. J’aime la rencontre. Je suis aussi à l’écoute. Quand j’entame un travail avec des personnes, elles savent qui je suis. » Depuis une quinzaine d’années, la photographe mène de multiples projets dans des lieux et des pays différents et avec diverses personnes. Avant tout, elle veut « être libre dans le choix des sujets. Pour moi, la presse, c’est frustrant. Mon travail, c’est l’humain ». Le portrait reste le thème favori d’Isabelle Lebon. « Une photo commence toujours par une interrogation. J’ai besoin de réfléchir à la manière dont je peux mettre en image ces personnes. La question est la même. Qu’est-ce que tu me donnes à voir de toi ? » Dans ses portraits, Isabelle Lebon capte certes une expression du visage, un geste, un regard mais surtout la part mystérieuse ou invisible des êtres. Elle révèle tout ce qui les constitue, les doutes, les joies, les espoirs, les passions, les secrets… Elle parvient à entrer avec bienveillance dans une intimité qui devient universelle. D e s p ont s , I s a b e l le L eb on e n construit aussi entre les pays, notamment entre la France et la Palestine. « Lorsque j’étais enfant, je me suis dit, un jour, que j’irai en Palestine. Peutêtre parce que j’ai reçu une éducation judéo-chrétienne. Avant d’y aller, je ne connaissais pas bien les enjeux politiques. J’avais juste des images de ce pays. Avec les années, j’ai oublié cette idée d’y faire un voyage. » Un oubli vite effacé quand la photo-
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graphe fait connaissance il y a sept ans, à Pékin, d’un Israélien. « Il m’a parlé de la Palestine. De mon côté, je me suis beaucoup documentée sur l’actualité politique, économique, culturelle. L’année suivante, je suis partie. » Isabelle Lebon ne s’est pas rendue uniquement en Palestine. Elle est aussi allée en
L’image est au cœur de toutes ces rencontres. Il fallait bien un festival pour raconter cette belle aventure. Pour le porter, Isabelle Lebon a fondé l’association Al Nour… l’autre photographie. Les objectifs : faire connaître cet art de l’image, développer la pratique auprès des jeunes et organiser
« Des ponts, Isabelle Lebon en construit aussi entre les pays, notamment entre la France et la Palestine. » Israël, en Cisjordanie… « J’avais besoin de découvrir les deux peuples, d’être proches d’eux pour comprendre les tensions. Depuis sept ans, chaque année, je fais un voyage là-bas. » Elle y a ses amis chez qui elle peut arriver sans prévenir. « Je suis un peu chez moi. Nous partageons un vrai plaisir à nous retrouver régulièrement. » Isabelle Lebon a noué des liens forts. Pour cela, elle a pris son temps. Le temps de rencontrer, d’échanger, de se faire confiance. « Aujourd’hui, je peux parler avec les femmes, jouer avec les enfants et aussi participer aux discussions avec les hommes. » Elle a mené plusieurs campagnes photographiques pour questionner ce rapport entre peuple et territoire.
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une biennale photographique internationale avec les mêmes expositions, une année en Palestine, la suivante en France. La première édition s’est déroulée durant l’été 2011 à Bil’In, un village situé non loin de Ramallah. En novembre 2015, le festival Entr(e) voir s’est installé à la Cité des métiers à Rouen. En France, comme en Cisjordanie, cette initiative qui a demandé beaucoup de courage et d’énergie à la photographe rouennaise rappelle une actualité brûlante, interroge notre regard sur un peuple et fait sauter quelques verrous. « Grâce à ces rencontres, on apprend autant de soi que des autres parce que tout cela passe par des émotions extrêmes. »
S C È N E N AT I O N A L E 61
Scène nationale 61 : un pont à trois pattes — MARYLÈNE CARRE
ATYPIQUE, LA SCÈNE NATIONALE 61 (ORNE) FAIT LE PONT
ENTRE TROIS VILLES, DISTANTES ET DISTINCTES : ALENÇON,
FLERS ET MORTAGNE-AU-PERCHE. POUR SA DIRECTRICE,
RÉGINE MONTOYA, CRÉER DES PASSERELLES N’EST PAS UNE
FINALITÉ, MAIS LE POINT DE DÉPART DU PROJET CULTUREL.
La Snat 61 est labellisée depuis 1992. Elle a d’abord réuni Alençon et Flers, puis Mortagne. Être sur trois sites, qu’est ce que cela signifie ? Régine Montaya : La Snat 61, c’est un cœur qui bat pour trois villes. C’est une scène labellisée sur trois pla-
Régine Montaya © DR – SCÈNE NATIONALE 61
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teaux. L’idée n’est pas de faire tourner les spectacles entre les sites, mais de développer un projet culturel de qualité sur un territoire pluriel. Flers se situe à 70 km d’Alençon, Mortagne à 45 km. Alençon est une préfecture et une communauté urbaine de 54 000 habitants, quand Flers est une ville industrielle de 15 000 habitants et Mortagne, une commune rurale résidentielle de 4 500 âmes… Entre ces bassins de population, distants et distincts, le grand écart pourrait sembler permanent. Je les considère comme les trois quartiers d’une grande ville, à ceci près qu’il n’y a pas le métro… mais le bus « 61 » qui relie les trois villes les jours de représentation. Cette mutualisation était nécessaire pour l’attribution du label « Scène nationale », puisque nous devons justifier d’un seuil minimum de population et de financement. Dans un contexte de mise en danger de la culture, elle devient indispensable. Plus que jamais, on a besoin d’établir
MICHEL
P O N T S E T PA S S E R E L L E S C U LT U R E L S
des ponts. La nouvelle génération de directeurs de salles, qui ont souvent travaillé au sein de compagnies, est plus sensible à cette nécessaire solidarité.
Comment se matérialisent ces ponts entre les structures ? R.M. : La Scène nationale, inscrite dans son territoire, tisse des liens et fait partie de réseaux multiples. Elle doit être reconnue parmi ses pairs – les autres structures consacrées au spectacle vivant – et travailler en coopération active. Cela va du simple compagnonnage ou échange de pratiques à la programmation de spectacles créés ou soutenus par les autres scènes, la coproduction, le co-accueil d’une compagnie, l’abonnement partagé. Les passerelles s’établissent de structure à structure, de manière formelle (réunions encadrées) ou non. Parfois, ce sont les artistes eux-mêmes qui font le lien, parce qu’ils sont accompagnés par les deux salles. C’est assez simple de coopérer entre scènes labellisées*, qui sont très encadrées dans leurs missions par le contrat d’objectifs et de moyens qu’elles passent avec leurs partenaires publics. Ça l’est moins avec des structures qui n’ont pas cette maturité.
Il y a aussi des passerelles à créer avec le public ? R.M. : Sur un territoire comme le nôtre, il faut du temps et un travail de grande proximité pour trouver son public. Les « relations publiques » consistent à construire des ponts, en s’appuyant sur des relais sur le territoire, tels les maisons de quartier, les centres sociaux, mais aussi les commerçants, qui deviennent nos « diffuseurs de rêve », et des spec-
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tateurs fidèles à qui l’on propose de venir « entre amis et voisins ». Les actions culturelles constituent une autre passerelle vers le spectacle : stages et ateliers de pratique, créations partagées entre amateurs et professionnels, visites des coulisses, projets menés dans le cadre des dispositifs ministériels (Culture santé, Culture justice, Arts et publics en numérique, Territoire ruraux, Territoires de culture). Les nouveaux médias ont aussi bousculé les modèles de médiation. Nous recourons aux réseaux sociaux, nous proposons des rendez-vous « skypés » avec des artistes dans des cafés de village… Toutes ces passerelles finissent par constituer une architecture durable sur le territoire.
*
5 SCÈNES NATIONALES EN NORMANDIE ALENÇON Scène Nationale Alençon Flers – Mortagne-au-Perche CHERBOURG Le Trident LE HAVRE Le Volcan DIEPPE Le Drakkar EVREUX Le Cadran
« Dans un contexte de mise en danger de la culture, la mutualisation devient indispensable. Plus que jamais, on a besoin d’établir des ponts. »
Quid des ponts entre les arts ? Cet article est le point de départ
R.M. : La programmation de la Snat 61 est un dialogue permanent entre tous les arts vivants. Pluridisciplinarité et transdisciplinarité en sont les maîtres mots. Elle s’attache chaque saison à respecter un équilibre entre œuvres classiques et propositions contemporaines, genres reconnus et formes expérimentales, spectacles fédérateurs et émergences. Elle s’offre aussi des échappées sur des terrains plus inattendus, comme les arts plastiques, la cuisine ou l’art paysager. Bousculer les codes, franchir les frontières, briser les murs, c’est aussi quelque part élever des ponts.
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d’une rencontre à venir pour le numéro un de MICHEL. Nous souhaitons inviter des responsables de structures culturelles de chaque département à témoigner des expériences de passerelles construites sur le territoire : coproduction, partenariats, résidences, médiation, publics… Une discussion collective révélant le travail quotidien des acteurs de la culture.
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MICHEL
Documents extraits du travail de recherche sur « l’expérience de la traversée » réalisé par le BUREAU MÉCANIQUE, sarl d’architecture & J’AIME BEAUCOUP CE QUE VOUS FAITES, atelier de création graphique, de juin à octobre 2015 au Centre International d’Art et du Paysage de l’île de Vassivière en Limousin.
P O R T F O L I O #02
Maison de l’Estuaire, Seine-Maritime Au Havre, à l’est de port 2000, un reposoir sur dune fait face à Honfleur. Cette zone d’accueil de l’estuaire de la Seine de 70 hectares, bâtie artificiellement dans les années 2000, a été créée pour les 81 espèces animales de l’embouchure et ainsi, leur permettre de se reposer, de nicher et de se nourrir. Depuis l’automne 2015, deux postes d’observation sont désormais ouverts quotidiennement à tous les publics. Au pied du pont de Normandie, la Maison de l’Estuaire propose aussi régulièrement des visites thématiques, dépaysantes et très instructives dans ces marais. — j. perisse
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DR.
BALADES DÉPAYSANTES PRÈS DU PONT DE NORMANDIE
DR.
DR.
balades films livres food
BALADE
BALADE
VIADUC DE LA SOULEUVRE : ICI, ON SAUTE !
Vallée de la Vire, Calvados Il domine la vallée de la Vire à 61 mètres de haut. Construit sur des plans de Gustave Eiffel, le viaduc ferroviaire ouvre aux voyageurs en 1891. Rescapé de la Seconde Guerre mondiale, il sert encore jusqu’en 1960. Mais face à l’effondrement qui menace, les travées sont dynamitées le 13 juin 1970. Les piles restent intactes et vont attirer la curiosité d’un jeune entrepreneur en quête d’adrénaline, le Néo-Zélandais A.J. Hackett, réputé pour avoir sauté de la Tour Eiffel à l’élastique. En 1990, il y installe le premier centre de Bungy au monde permanent et spécialement construit pour cette activité : le « Viaduc de la Souleuvre ». — jb quentin LIVRE
TOUS LES PONTS SONT DANS LA NATURE
de Didier Cornille. Hélium, 2014. Ce qu’il y a de bien avec les livres pour enfants d’aujourd’hui c’est que les grands peuvent aussi en profiter ! Avec cet ouvrage, tout le monde se plongera avec délectation dans l’histoire de quelques ponts remarquables, porté par le dessin élégant de Didier Cornille. L’auteur et illustrateur réussit le tour de force d’allier technique et poésie pour nous parler de ces constructions spectaculaires – et de ne pas oublier la
formidable capacité de l’Homme à créer, imaginer, inventer… — mb FOODING
LE RELAIS PONT V ROUTIER AUTHENTIQUE
128, bd de Graville 76600 Le Havre En pleine zone industrielle et portuaire havraise, à seulement deux pas du pont V, se dresse un petit restaurant simple à la devanture bleue. Il est treize heures et ce routier grouille de monde, de travailleurs venus des entreprises alentour qui ont fait de ce Relais accueillant et chaleureux leur cantine quotidienne. Des serveuses
MICHEL
S ’ É VA D E R
Bénouville, Calvados En 1944, les parachutistes anglais portaient l’insigne de Pégase, le cheval ailé grec. En libérant le pont à bascule sur le canal de Caen à la mer, dans la nuit du 5 au 6 juin, ils ont donné à l’ouvrage son nom et DISQUE
SONNY ROLLINS « THE BRIDGE »
DR.
1962. RCA Sonny Rollins - ts ; Jim Hall - g ; Bob Cranshaw - b ; Ben Riley - dm À New York, Sonny Rollins joue du saxophone sur le pont de Williamsberg qui enjambe l’East River. Le « Colosse du saxophone » passe par une période de doute, il s’inquiète de la concurrence directe de John Coltrane. Il s’isole pour ne pas être influencé par les autres musiciens et affirmer son propre style. Il a assimilé le Be-Bop de Charlie Parker et il impose sa voix. Il enregistre l’album The Bridge qui concrétise sa recherche. L’originalité de sa formation, sans piano, fait date. Le choix de la guitare de Jim Hall renforce le son puissant du saxophone. La quête de son propre style sera constante au cours de sa longue carrière. — sb
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inventés par le génie britannique pour le passage des chars, dont le premier sur le sol français fut construit le 8 juin 1944 sur le canal, près de Pégasus. — mc
BD
LA FIÈVRE D’URBICANDE
Schuiten et Peeters, 1985. Casterman
LIVRE
UN VOYAGE SUR LES PONTS DE LA SEINE
Ponts sur Seine : 2000 ans d’histoire le long du fleuve. Éditions des Falaises, 2008 C’est ce que propose ce livre, illustré par les photographies de Thibault Rousseau. Pas moins de 33 ponts construits au-dessus de la Seine ont été sélectionnés par les auteurs Véronique Baud et Franck Boitelle pour retracer ce voyage fascinant à travers ces édifices tous plus éton-
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PEGASUS BRIDGE, VEDETTE DE CINÉMA
sa notoriété. « Pegasus Bridge » est immortalisé en 1962 dans Le Jour le plus long. À l’automne 2016, le réalisateur britannique Lance Nielsen y tournera un nouveau long-métrage Pegasus Bridge, the movie. Le véritable pont, démantelé en 1993, repose à côté, dans le parc du Mémorial Pégasus. Il côtoie l’un des fameux ponts « Bailey »,
DR.
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nants et particuliers les uns que les autres. Du pont de Tancarville à celui, suspendu des Andelys, en passant les fameux ponts parisiens, ce livre revient sur l’histoire de chacune de ces constructions et fait la part belle aux hommes qui n’ont cessé de les façonner. — jp
DR.
aux clients, l’ambiance est très familiale. Pour 12,50 €, on satisfait très largement son appétit avec des hors-d’œuvre frais en entrée, un plat soigné, du fromage, un bon dessert et une boisson. Une belle simplicité pour ce routier pourvu d’une grande authenticité ! — jp
Opus emblématique du travail de Schuiten et Peeters, cette BD prend comme point de départ l’enjeu urbanistique de la création d’un troisième pont entre deux rives. Faut-il en effet « mettre fin au spectacle d’une désolante dissymétrie » au sein de la ville ? Par quels moyens imposer l’ordre et l’harmonie ? La réflexion sur la liaison et sa symbolique est pourtant bouleversée lorsqu’un mystérieux réseau surgit, n’obéissant à aucune règle. — sb
CONTRIBUTIONS
l’invité. SYLVAIN GROUD, CRÉATION ET PONTS HUMAINS mAis Aussi.
pAtrimoine. PONTS DE ROUEN DOMPTER LA SEINE
Arts. SUR/SOUS LE PONT DES ARTS
Discussion. CULTURE ET PASSERELLES DANS LE SPECTACLE VIVANT
DES PORTFOLIOS, UNE BANDE DESSINÉE, DES PAGES POUR S’ÉVADER...
MICHEL
SUR LES PONTS NUMÉRO ZÉRO — HIVER 2016 — 14,90 € — GRATUIT MICHEL-LAREVUE.FR
ART, C ULT UR E & S OC IÉ TÉ EN N ORMAN DIE
ZÉRO - JANVIER 2016
CLAIRE LE BRETON
POUR LE NUMÉRO 1 MICHEL INVITE…
plasticienne
— le havre
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dessinatrice
ÉDITH
STEVE BAKER
auteure
auteur de bd
— le havre
— rouen
STÉPHANE RIOLAND
FRANÇOIS TROCQUET
ÉRIC GERMAIN
fouilleur
plasticien
paysagiste
dessinateur
Née en 1960. Est venue s’installer à Sainte-Adresse en 1991. Auteure et dessinatrice, principalement de bandes dessinées et albums jeunesse. Dernier album paru : Le Jardin de Minuit aux éditions Soleil (Prix Pépite BD du Salon du livre jeunesse de Montreuil, 2015)
Jeune auteur né à Rouen où il vit encore. Collaborateur régulier des magazines Spirou et Pif Gadget, il a réalisé la série La vie en slip chez Dupuis et illustré un album chez Casterman (Inoxydable). Il prépare actuellement une nouvelle série, Bots, un « road-bot movie » chez Ankama avec Aurélien Ducoudray.
archéologue
— rouen
En 1993, Stéphane Rioland s’installe comme architecte dplg et se consacre à l’aménagement urbain et à la formation. En 1999, il crée les éditions Point de vues. Il enseigne à l’école nationale supérieure d’architecture de Versailles et à celle de Normandie et finalise un doctorat en histoire.
STÉPHANE MARIE NÉEF auteur
— rouen
Stéphane Marie Néef écrit pour explorer. Mais ce n’est pas un explorateur. À peine existe-t-il. Comme l’homme réchappé de D.H. Lawrence, il n’est que le vent qui souffle à travers lui (Not I, not I, but the wind that blows through me ! ).
— le havre
Les grands dessins au stylobille noir de François Trocquet montrent des paysages déserts où se dressent encore, dans des ciels vides, des arbres, des maisons en bois, des immeubles en béton, des caravanes. […] François Trocquet dresse l’état des lieux d’une vaste prison abandonnée, un paysage énigmatique où un œil inquiet chercherait encore des traces de vie. (Christian Tangre)
MARYLÈNE CARRE journaliste pigiste
– caen
Après 16 ans en agence, elle prend la tangente pour aller voir ailleurs où elle est. Depuis, elle expérimente beaucoup, écrit ce qui lui plaît (ou pas), explore le documentaire, le data, les réseaux et les grands formats multimédia.
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— yvetot
51 années, entouré de cinq enfants, laïc, paysagiste concepteur, dirige une agence connue sous le nom de Folius. La qualité des espaces publics, la protection de la ruralité, le maintien d’une belle diversité écologique, les plaisirs simples de la vie sont ses éléments porteurs.
Sensible aux paysages en mouvement et au recyclage, elle travaille à partir de matériaux liés au monde de l’emballage. Intéressée par l’architecture et le graphisme elle réunit l’ensemble de ses centres d’intérêt dans la fabrication d’installations : elle réalise des prises de notes photographiques, lors de trajets en voiture, et les accumule telle une palette et comme base de réflexion.
MARIE BAZIRE rédactrice
JEANBERNARD CREMINTZER
architecte - urbaniste
— rouen - paris
Diplômé de l’Ensa Paris-Bellleville. DEA en Histoire de l’architecture. Enseignant à l’École nationale supérieure d’architecte de Normandie. Spécialisé dans les questions de réhabilitation et de sauvegarde du patrimoine industriel. Administrateur du Cilac (association de sauvegarde du patrimoine industriel)
— le havre
Responsable du Service des publics du MuMa – Musée d’art moderne André Malraux du Havre, Marie Bazire poursuit en parallèle une activité indépendante dans le champ de l’art contemporain, avec l’association echo(e)s.
MICHEL
CONTRIBUTIONS
JESSICA PERISSE
MARYSE BUNEL
MERCI !
journaliste
journaliste
MERCI AU COMITÉ
MERCI AU COMITÉ
MERCI AUX
MERCI à Laure
DE PUBLICATION
DE RÉDAC TION
CONTRIBUTEURS
Delamotte-Legrand,
qui depuis juillet 2013,
qui a participé
qui ont développé les
Franck Dubois, Thibault
a participé au
à l’élaboration du
contenus du numéro zéro
Leforestier, Anne-Edith
développement du
numéro zéro : Marylène
et du numéro un à venir :
Pochon, Laure Voslion,
projet et définit les
Carre, Maryse Bunel,
Edith, Steve Baker,
Florence Deguen,
thématiques : Farid
Marie Bazire, Nathalie
Marylène Carre, Jean-
Jérôme Boyer, Sophie
Abdelouahab, Edith
Colleville, Stéphane
Baptiste Quentin, Claire
Bernard, Raphaëlle
Grattery, Claire
Bihan.
Le Breton, Marie Bazire,
Broudic, Steve Beau,
Le Breton, Anne
David Poullard, Marie
Alexandre Ronsaut,
Le Bellego, Laurent
Chéné, j’aime beaucoup
Jean-Luc Thierry,
Cuillier, Michaël Henry,
ce que vous faites
Sandra Mellot, Caroline
Stéphane Bihan.
(Alexis Debeuf, Antoine
Moreau, Isabelle Lebon,
Giard, Ludivine Mabire),
Sonia Georget, Jean-
Maryse Bunel, Stéphane
Piere Sageot.
Bihan, Jessica Perisse,
Dédicace à Isa, Nina et
Stéphane Nappez,
Colas, Michel vous aime.
— le havre
Journaliste pigiste, elle travaille pour la presse depuis 2008. En 2015, elle se pose au Havre. Collaboratrice régulière pour Ouest-France, elle aime traiter les sujets qui se rapportent à l’histoire, au patrimoine, à la société, à la culture ou à la religion.
— yvetot
Après avoir été responsable des pages culturelles à Liberté Dimanche et Paris Normandie, Maryse Bunel est fondatrice et journaliste à relikto.com, website normand d’informations sur l’actualité culturelle.
Stéphane Rioland, Eric
enseignant
J’AIME BEAUCOUP CE QUE VOUS FAITES
typographe
collectif
DAVID POULLARD
Habite de-ci de-là, mais surtout là en ce moment, un ci sous le coude au cas où. Il aime les mots, les bouches qui les prononcent, les yeux qui les entendent, et les oreilles qui divaguent. Il aime dire « Tiens tiens… » et « Ça alors ! ».
MARIE CHÉNÉ auteur
d’artistes
– caen
Leurs pratiques se cultivent dans le champ des arts visuels. Ils tentent de rendre les choses lisibles en composant avec les images, les mots, les matériaux, les objets et les gens qui les entourent. Ils partagent le goût du jeu et des inventions.
Germain, Jean-Bernard
STÉPHANE BIHAN auteur
ÉDITIONS LAPIN ROUGE
— cayenne
édition et mise
Dépositaire de la collection d’art brut de Jean-Gris jusqu’à la fin de la dation, Stéphane Bihan peut s’enorgueillir en outre de représenter les intérêts du Jean-Gonzague Gentleman’s FF Club de France depuis quatre ans déjà. Dernièrement, il a été aperçu en Amérique Latine, probablement pour échapper au fisc.
en page
— yvetot
L‘association Éditions Lapin rouge a été créée pour développer le projet MICHEL. Elle se repose sur l’expérience de son directeur en matière de graphisme et de communication et est amenée à développer d’autres projets éditoriaux mais aussi culturels sur le territoire.
Cremintzer, François Trocquet, Le bureau
MICHEL
mécanique.
NUMÉRO ZÉRO février 2016
MERCI POUR LES
ISBN 979-10-92522-01-3
CONSEILS ET LE SOUTIEN Sophie Fauché,
Directeur
Dominique Panchèvre,
de publication :
Anne Parrad,
Xavier Grandguillot
Jeanne-Marie Rendu,
Direction artistique
Emmanuèle Jeandet-
et mise en page :
Mengual, Michèle
l’Atelier de
Lebourg, Arnaud
communication
Coigné, Nathalie Lecerf,
Illustration de
Sandrine Nicollet,
couverture : Edith
Laurent Delabouglise,
Impression :
Laurent Sodini,
Iropa imprimerie
Anaïs Vavasseur,
Développement
Christine Argelès,
numérique : Steve Beau
Sophie Noël, Jérôme
(ziopod), Alexandre
Savoye, Marie-Reine
Ronsaut (appolonet.fr)
Casali, Caroline Lozé. MICHEL est une
— marseille
publication éditée par l’association
Habite à Marseille, aime s’asseoir au café Debout pour boire un café allongé, pratique la lecture de dictionnaires, écrit avec les noms des villes, remixe les audioguides, provoque la rencontre du mot et de la motte.
ZÉRO - FÉVRIER 2016
éditions Lapin rouge 21-23 rue des Champs 76190 Yvetot
Ce projet a bénéficié du soutien du Fonds pour le développement de l’économie du livre en Normandie. Il a été réalisé avec le soutien de la Ville de Rouen, de la Ville de Caen et du Département de l’Eure.
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MICHEL EST MON AMI
— STÉPHANE BIHAN
Le rencard
« Il y a des jours, on ferait mieux de rester au pieu ». Michel observait le capot fumant de sa BX sur le bas-côté. Certes, son rencard n’était pas si loin, mais avec ce temps… De plus, Jacques n’était pas du genre métronome. Bref… Partout autour, des champs. Gris, terreux, dans la bruine… Et ça caillait… La vache ! Janvier en Normandie quoi… Sans compter les bornes à se fader avant d’arriver. Quelle idée aussi de se retrouver au pied du pont. Déjà qu’il aurait préféré rester chez lui, le Michel, au chaud, à glander tranquille puisqu’on était dimanche, et que… Il chassa ces mauvaises pensées et, sans attendre l’heure où blanchit la campagne, partit. La route s’étirait rectiligne jusqu’à l’horizon, découvrant un paysage plat bordé d’arbres noirs. Pas trop glamour pensa Michel, en traçant son chemin, toute capuche rabattue. La devanture rouge et défraîchie du bien nommé « Café du Pont » tranchait avec le paysage gris des environs et annonçait la fin du voyage. La clochette tinta et, trempé comme un barbet, il s’annonça sans grand succès à l’assemblée. Direction le comptoir. Vue l’heure, manger un bout ne serait pas du tout cuit. Pourtant, un grand échalas aux joues creuses lui indiqua de ses petits yeux taiseux la direction d’une table en bois vers la baie vitrée, table où se succédèrent, à défaut de petits écoliers, des générations de buveurs écarlates. Sceptique, Michel commanda du rouge et laissa un énième message sur le répondeur de Jacques, toujours aux abonnés absents. D’un coup d’œil, il fit un état des lieux, arrêta son regard sur une affiche de Giscard, s’étonna de la décoration audacieuse (souvenirs émus de la côte de nacre), et trempa ses lèvres dans le ballon. Pas de crampe d’estomac. Sans être un nectar, ce n’était pas non plus du gros bleu. Dehors, la pluie tombait sur une place toute triste. Dedans, la douce chaleur de la salle était des plus agréables, et Michel, prenant son mal en patience, creusait son verre peu à peu, laissant la torpeur l’envahir, les yeux mi-clos. Il retrouva soudain la terre ferme lorsqu’un bras laineux se déroula devant lui pour déposer une assiette. La femme du patron (ou sa mère, difficile à dire), diminuée par le naufrage des années et autres soucis cardiovasculaires faisait donc le service du mieux qu’elle pouvait. — « C’est du pâté » hurla-t-elle de sa demi-bouche. L’audition n’était pas son fort non plus visiblement. — « Sérieux ? » maugréa Michel, mais déjà elle voguait vers les tropiques de ses fourneaux. Deux généreuses tranches de terrine aux foies de volaille, accompagnées de cornichons, d’oignons au vinaigre, et d’un peu de verdure trônaient au milieu de la faïence. — « C’est du coin, on l’achète à la ferme d’à côté » siffla le tenancier « vous m’en direz des nouvelles ! ». Dès la première bouchée, le bonheur ! Tous les champs alentour en une recette. Désormais philosophe, il se laissa couler sur la chaise, et fit contre mauvaise fortune bon cœur. Après tout, quitte à attendre, autant le faire en cassant une graine. La potée suivit, fumante, embaumant la pièce des effluves délicieuses de la simplicité. Les quarts devenaient des demis, et les demis, un litre. Ragaillardi, Michel sirotait son second verre de calva avec un local somme toute assez marrant, lorsque la voiture de Jacques dérapa devant le troquet, accompagnée d’un élégant coup d’avertisseur. Une nouvelle série de sonneries insistantes l’invitait à le rejoindre fissa. Il paya la note et s’enfonça dans l’habitacle de la R21. Les retrouvailles furent silencieuses, du moins pour Michel, Jacques n’ayant pas quitté la conversation qu’il nouait avec son oreillette. Puis, la règle de « bien regarder la route » prit tout son sens. Au bout d’une petite centaine de mètres, Jacques écrasa son mégot de clope en fixant le cendrier à défaut du bitume, et ne négocia pas le virage comme il aurait dû malgré les braiements paniqués du copilote. La voiture fit une embardée et termina sa course (quoiqu’à vitesse fort modeste selon des témoins) dans un fossé… Épilogue : — « Alors les picots, déjà de retour ? » lança le patron aux deux cascadeurs. — « On s’ennuyait… » grommela Michel.
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MICHEL