États-Unis et révolte arabe
La décolonisation « à la française »
le réveil Mars 2011 - N°770 - 5 e
AC : un budget de renoncement
des combattants
Pour l’amitié, la solidarité, la mémoire, l’antifascisme et la paix
Penser le monde, penser la paix,
penser l’avenir Le journal des droits de tous les anciens combattants et victimes de guerre
LE RÉVEIL mémoire
Marguerite de Navarre et la guerre d’Algérie Marguerite de Navarre, c’est le nom du lycée de Bourges (Cher) qui a accueilli en décembre l’exposition de l’ARAC sur la guerre d’Algérie. Cette initiative est la septième, organisée par nos camarades de l’ARAC du Cher, qui ont aussi traité, tour à tour, des guerres 1914/1918, 1939/1945, d’Algérie, et du combat antifasciste de notre association. Ainsi nos expositions, assorties de conférences-débats, ont-elles été présentées au lycée professionnel Jean de Berry, à l’UIFM (formation des maîtres), à la salle du Duc Jean (Conseil général) et enfin au lycée Marguerite de Navarre, les 7 et 14 décembre dernier. Après une rapide visite au nouveau musée de la Résistance à Bourges (je vous la recommande vivement), Guy Mousset et Paul Fontaine, accompagnés d’André Fillère, ont rencontré 120 lycéens de terminal, dont une majorité de jeunes filles très réactives au débat. En présence du proviseur et des professeurs d’histoire, et tandis qu’était projeté en boucle un diaporama de photos d’Algérie de Paul Fontaine, les deux régionaux de l’initiative résumèrent leur guerre d’Algérie : l’un, engagé volontaire dans la marine pour ne pas faire la guerre d’Algérie s’est retrouvé fusillié marin au Sahara. L’autre, servant de batteries d’armes spéciales, a témoigné de l’emploi de celles-ci (gaz, etc.) durant cette guerre. Dans cette vaste salle dont les murs affichaient l’exposition de l’ARAC, les professeurs avaient demandé à André Fillère d’animer un débat très particulier : « L’évolution de l’opinion publique française durant la guerre d’Algérie », à partir de leur programme scolaire sur la décolonisation. Ce fut une expérience riche et saisissante, animée par le questionnement des lycéens, en particulier les jeunes filles, à la satisfaction du proviseur, des profs, des étudiants et des intervenants, bien sûr. 2-
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Mais comment clore de tels échanges ? Une expérience là aussi enrichissante fut tentée avec succès en proposant aux étudiants d’adresser à nos camarades du Cher les questions qu’ils n’avaient pas eu le temps de poser (par lettre ou par Internet) et auxquelles il leur serait répondu par les mêmes voies. Ainsi furent évoqués la torture, l’OAS et la fusillade de la rue d’Isly, la correspondance des appelés avec leur famille et la censure, les événements jugés les plus marquants ou les plus choquants par nous, l’incendie d’un camion citerne par l’OAS sur les hauteurs d’Alger, comment avons-nous ressenti, durant notre séjour en Algérie, les sentiments de la population française ? Quelle était l’attitude de la presse ? Quels journaux, quelles radios avions-nous ? Comment s’est passé notre retour en France et notre réinsertion dans la vie familiale, la vie sociale, la vie professionnelle ? Avons-nous rencontré en Algérie des personnes qui nous ont marquées et pour quelles raisons ? Que pensez-vous de la reconnaissance tardive de la guerre d’Algérie ? Quelles sont les plaies qui font que, parfois, il semble encore trop tôt pour parler de la guerre d’Algérie ? Pensez-vous qu’après avoir vécu un tel drame, il est possible de se recons-
truire totalement psychiquement ? Que pensez-vous et comment voyez-vous la réconciliation entre Français et Algériens ? Etc. Une riche moisson soulignant le vif intérêt de ces étudiants dont l’abord de l’Histoire et de la mémoire part avant tout de leur quotidien au présent et pour l’avenir, et non d’un passéisme dont la rancœur et la haine seraient les moteurs principaux. Une moisson qui nous enrichit par sa fraîcheur et l’angle original de ses réflexions et prouve que sans être bien nombreux ni historiens, il est possible d’être les passeurs de mémoire de l’ARAC sur le terrain.
ÉDITO LE RÉVEIL
Penser le monde et son avenir
SOMMAIRE Actualités p. 4 Sortie de crise et luttes sociales. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4 AC : un budget de renoncement.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 La percée de Marine Le Pen.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 Pétrole : à qui profite la hausse ?.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7 Comment agir pour la paix ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11 International p. 9 Gaza : mettre fin au blocus. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9 Argentine, les ex-combattants aussi. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10 États-Unis et révolte arabe. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11 Warren Buffet et la guerre des classes.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12 Mémoire p. 21 11 novembre 1940 à Noves (13).. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21 Vos droits p. 22 Veuves de guerre.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22 Pour la défense des droits à réparation. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23 Les combattants des OPEX.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29 Vie de l’ARAC p. 24 Les cérémonies du 19 Mars 1962.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24 Le rassemblement national du 14 mai. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25 Magazine p. 30
P. 13 D o s s ier
Réflexions
sur la décolonisation « à la française » Les causes et la nature de la décolonisation
LE RÉVEIL DES COMBATTANTS Fondé en 1931 par Henri-Barbusse Mensuel de l’Association républicaine des anciens combattants et victimes de guerre. Commission paritaire n° 0713-A 06545 Édité par les Éditions du Réveil des Combattants SARL au capital de 45 734,41 - Siret : 572 052 991 000 39 2, place du Méridien, 94807 Villejuif cedex Téléphone : 01 42 11 11 12 Télécopie : 01 42 11 11 10 reveil-des-combattants@wanadoo.fr Gérant-directeur de la publication : Raphaël
VAHÉ • Directeur délégué : Patrick STAAT • Rédacteur en chef : Raphaël VAHÉ • Directeur promotion et publicité : Claude Delevacq • Secrétariat de rédaction, conception graphique : Escalier D Communication • Impression : RIVET P.E. - 24 rue Claude-Henri-Gorceix, 87022 Limoges cedex 9 Tirage : 60 000 exemplaires Ce numéro du Réveil a été tiré le mercredi 30 mars et remis le jour même à la Poste. Il devrait donc parvenir à chaque abonné le 04 avril au plus tard. Merci de nous faire part de vos observations.
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asser par l’écoute et la prise en compte des attentes, des enjeux, des aspirations de chaque peuple est une exigence contemporaine. Cela passe aussi par la capacité de tout citoyen, hommes, femmes, à préserver la paix, à œuvrer pour des rapports humains dignes de ce nom. Force est de constater que le chemin est encore long pour que les rêves, les aspirations, les engagements de nos prédécesseurs (Jaurès, Barbusse, Paul Vaillant-Couturier, tous ces combattants de la paix et de la démocratie) voient le jour. Mais, aujourd’hui, que ce soit au Maghreb, au Proche et Moyen-Orient, en Afrique, que ce soit chez nous en Europe, en Espagne, en Angleterre, au Portugal, en Grèce, en Allemagne… la colère, l’espoir d’une autre vie s’expriment, les luttes se développent et s’organisent. La situation française ne contredit pas ce phénomène. Les attaques contre les retraites, les difficultés à se loger, le chômage, la précarité des jeunes, le coût de l’énergie, de l’alimentation, la casse de la Sécurité sociale, du droit à la santé, sont autant de coups que subit la majorité des Français dont les anciens combattants, victimes de guerre et OPEX. Eux qui voient les engagements de M. Sarkozy réduits à néant mois après mois. Que de désillusions, d’inquiétudes en France ! Ce qu’attendent les Français, c’est qu’enfin on les entende. Ils demandent une politique répondant aux besoins humains et démocratiques du pays. C’est ce grand besoin de solutions qui donne le sens des élections qui viennent d’avoir lieu, nous le voyons avec le taux d’abstention, la montée du FN. Ils attendent du gouvernement et des forces politiques les choix d’un monde où la paix soit garantie, où le respect de l’autre sera assuré, où une minorité ne s’appropriera pas les richesses de la planète qui sont le bien de tous. C’est pour tout cela qu’en 1917, en plein dans la boucherie de 14/18, des hommes attachés aux valeurs républicaines, courageux, visionnaires, rêvaient d’un monde au service de tous, un monde de paix et ont créé l’ARAC. Oui c’est un combat, un engagement difficile, courageux, mais nous n’avons jamais manqué de courage. C’est pourquoi nous œuvrerons pour peser et prendre notre place dans cette lutte émancipatrice, c’est un combat d’avenir. Patrick Staat Mars 2011 - N°770 - LE RÉVEIL
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LE RÉVEIL ACTUALITÉS
La sortie de la crise ne se fera pas sans luttes sociales et politiques A la veille du traité de Maastricht, les partisans de la monnaie unique, surtout à gauche, présentaient son adoption comme un moyen simple et évident d’échapper à l’emprise des marchés : « Supprimez la lire, la peseta, le franc, le deutsche mark, et vous supprimerez automatiquement la spéculation contre les monnaies européennes… » Vingt ans après, la spéculation n’a pas disparu : elle vise maintenant l’euro et le dollar.
La dictature des marchés financiers n’a jamais été aussi forte, elle va jusqu’à menacer l’existence de l’euro lui-même ! Loin de séduire, la fracture entre une Allemagne dominatrice et des économies « périphériques », vulnérables à tous les aléas de la crise, n’a fait que s’accentuer avec la perte des marges de manœuvre procurées par les possibilités d’ajustement à la hausse ou à la baisse des monnaies. Devant l’impasse évidente de la construction monétaire actuelle, voici revenir, surtout à l’extrême droite mais aussi parfois à gauche, la tentation de 4-
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solutions apparemment simples et évidentes : « Sortons de l’euro, et nous échapperons ainsi aux pressions des marchés financiers ! » Cette tentation est aussi illusoire que l’autre. L’effet immédiat d’une sortie de l’euro serait une dévaluation de la monnaie nationale, donc une hausse dans les mêmes proportions de la dette libellée en euros : la pression des marchés en serait encore accrue. A terme, pour espérer recouvrer un jour sa compétitivité, le pays devrait en passer par une baisse du pouvoir d’achat de ses habitants : le remède serait pire que le mal. Mais le plus grand danger d’un éclatement de l’union monétaire européenne serait l’abandon de toute solidarité face à la domination du dollar et face à celle des marchés financiers, qui lui est intimement liée depuis trente ans. Les États se concurrenceraient à coups de « dévaluations compétitives » et l’hégémonie monétaire des États-Unis sur l’Europe se ferait encore plus lourde, selon le principe « diviser pour régner ». Les États latino-américains les plus progressistes savent à quel point l’absence d’union monétaire les rend vulnérables face au géant du Nord, et c’est pourquoi ils s’efforcent de développer leur coopération autour d’une monnaie commune de la région. Décidément, il n’y a pas de remède magique pour échapper aux marchés financiers et pour sortir de l’impasse d’une construction monétaire à leur service. Fuite en avant dans la construction d’un État fédéral européen : c’était la conception de l’Union monétaire européenne soutenue par les élites françaises et c’est encore ce qui inspire les propositions de constitution d’un « groupement économique européen ». Fuite devant le combat pour changer l’Europe, y compris dans sa dimension monétaire : ces positions, apparemment antagoniques, expriment au fond la même conception surannée selon laquelle le pouvoir des États pourrait s’imposer aux marchés
sans conquête de pouvoirs nouveaux, décentralisés des citoyens sur l’argent, sa création et son utilisation. Il faut avoir le courage de dire que la sortie de la crise ne se fera pas sans luttes sociales et politiques. Luttes pour mobiliser le pouvoir de création monétaire de la BCE et libérer ainsi de la pression des marchés financiers le financement des services publics : la campagne décidée par le congrès du Parti de la gauche européenne pour un fonds de développement social européen nous en fournit la possibilité, à condition d’exiger que la BCE achète directement les titres émis par ce fonds, et d’être très vigilants sur les critères d’utilisation de la monnaie ainsi créée. Luttes pour remettre en question l’hégémonie du dollar, dans une nouvelle alliance de l’Union européenne avec les pays émergents, vers la constitution d’une monnaie commune mondiale à partir des droits de tirage spéciaux du FMI. Luttes dans chaque pays, appuyées sur des pôles financiers publics et des fonds régionaux pour l’emploi et la formation, pour changer les critères de sélectivité du crédit. Et, dès à présent, luttes dans les entreprises, les services publics, les bassins d’emploi, les régions, pour réorienter les crédits bancaires vers le financement des investissements favorables à l’emploi, à la formation et au développement maîtrisé des territoires, au lieu qu’ils servent à alimenter le cancer financier. C’est ainsi, bien loin des solutions de facilité, qu’on pourra remplacer la construction monétaire européenne actuelle par une coopération nouvelle autour d’un euro transformé en véritable monnaie commune des peuples européens. Et ce sera une contribution essentielle à la constitution du rapport de forces indispensable pour imposer une autre construction européenne, avec de nouveaux traités. Denis Durand, Économiste, syndicaliste à la Banque de France
ACTUALITÉS LE RÉVEIL
Anciens Combattants
Un budget de renoncement Extraits de la déclaration de Martine Carrillon-Couvreur, députée de la Nièvre, à l’Assemblée générale de l’ARAC de Nevers « En cette période de l’année, c’est pour moi l’occasion d’évoquer avec vous la politique nationale en faveur du monde des anciens combattants. Il n’y a malheureusement pas de surprise. Les déclarations du Président de la République sont déjà loin. Comme toujours le budget des anciens combattants est en baisse. Mais pire encore, le gouvernement a voulu le soustraire des débats parlementaires, le reléguant en commission, alors que c’est l’essence même de notre démocratie que de pouvoir exprimer publiquement nos positions. Cette attitude préparait sûrement la disparition du secrétariat d’État aux Anciens Combattants dans le nouveau gouvernement Fillon. Devant une levée de boucliers de la part des députés, un débat fut finalement programmé dans un temps limité à 30 minutes pour les explications de vote et les amendements. Mais le gouvernement n’avait pas mesuré l’ampleur de la mobilisation de la représentation nationale sur ce sujet et, notamment, dans les rangs de l’opposition. Au final, ce fut un débat animé de plus de 4 heures qui se déroula le 10 novembre dans l’hémicycle et qui obligea, par deux fois, le gouvernement à reculer. Ce fut ensuite, toujours par un vote majoritaire, l’adoption d’un amendement portant l’allocation différentielle pour les veuves à 887 euros. Le secrétaire d’État s’est alors engagé à prendre position dès le milieu de l’année 2011, à l’issue de l’étude menée sur douze départements pilotes. Enfin, nous avons proposé que les orphelins, dont les parents résistants victimes de la barbarie nazie qui sont morts au combat les armes à la main, bénéficient de la même indemnisation que celle accordée aux orphelins de parents victimes de la barbarie nazie après avoir été arrêtés. Reconnaissant le bien-fondé de cet amendement, le ministre s’était alors engagé à publier un décret très rapidement, en tout cas à remettre le rapport sur l’étude en cours dans le 1er trimestre 2011.
Ces quelques avancées ne vont pas demeurer très longtemps en l’état. Le 17 novembre 2010 au soir, de façon impromptue, le ministre du Budget a demandé à l’Assemblée nationale de revenir sur le vote d’un grand nombre d’amendements adoptés lors de la discussion sur les différents budgets. Lors de cette seconde délibération, tous les amendements améliorant les crédits des anciens combattants, adoptés contre l’avis du gouvernement, ont été annulés par un nouveau vote des députés de la majorité. De ce fait : - l’augmentation de la retraite du combattant de 2 points est alors annulée, - l’augmentation de l’allocation différentielle des veuves est supprimée et le plafond de ressources reste à 817 euros. C’est donc un budget de renoncement, le plus mauvais historiquement connu que l’Assemblée nationale a transmis au Sénat et qui a été adopté de manière définitive. Ce mauvais coup s’ajoute à la décision scandaleuse de laisser les 3 millions d’anciens combattants et victimes de guerre, ainsi que les ressortissants de l’ONAC sans un interlocuteur privilégié avec la disparition du secrétaire d’État aux Anciens Combattants. On nous dit depuis qu’un ajustement gouvernemental pourrait réparer cette erreur. Mais ne nous y trompons pas : ce n’est pas une volonté délibérée de donner du corps à cette politique de justice et de mémoire qu’incarne ce ministère, mais plutôt une nécessité de rééquilibrage politique dans un gouvernement construit à la va-vite et qui a tout simplement oublié de répartir des postes à l’intention de sensibilités de la majorité présidentielle. La politique que nous subissons n’est faite que d’annonces médiatiques sans lendemain. Je ne prendrai qu’un exemple, celui du décret portant attribution du bénéfice de la campagne double aux anciens combattants d’Afrique du Nord. Ce décret fixe, de
manière tellement restrictive, les conditions d’application de ce dispositif qu’il ne permet pas à la grande majorité de ces derniers le bénéfice de la campagne double. Voilà, en quelques mots, les conditions dans lesquelles nous travaillons à ce jour. Le gouvernement ne veut plus entendre le Parlement. Alors, en cette nouvelle année où nous aurons des rendez-vous électoraux, je vous invite à vous faire entendre pour porter un autre projet de société, une société plus juste et plus solidaire. Je vous remercie.
Communiqué de l’ARAC
A la suite du remaniement ministériel • Le Chef de l’État vient de nommer Gérard Longuet ministre de la Défense et des Anciens Combattants, sixième responsable ministériel en charge des anciens combattants et victimes de guerre (ACVG) depuis 2007. • L’ARAC continue avec le mouvement ACVG d’exiger la désignation urgente et sans attendre d’un secrétaire d’État aux ACVG, comme interlocuteur spécifique des trois millions et demi de ressortissants de l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre. • L’ARAC considère que cette nomination, compte tenu des antécédents et du parcours de l’intéressé, relève plus d’une manœuvre électoraliste destinée à une droite extrême qu’aux réponses attendues par les ACVG sur le respect de leurs droits, sur la justice sociale pour tous, et la défense des valeurs républicaines. • Dans ces conditions, l’ARAC ne participera pas à la cérémonie de la Flamme du mardi 1er mars, à l’occasion de la prise de fonction du nouveau ministre.
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LE RÉVEIL actualités
La percée de Marine Le Pen La faute à qui ? Depuis plusieurs semaines, les sondages se multiplient et agitent le spectre d’une présence de l’extrême droite au second tour. Pour réel que soit le danger, il ne saurait cacher les causes de cette percée. A gauche comme à droite, c’est l’impasse sur les questions économiques et sociales qui ont nourrit le populisme. Elle avait pourtant raté son entrée, à cause des arabes ! L’intronisation officielle de Marine Le Pen à la tête du Front national, le 16 janvier dernier, avait été préparée comme un grand évènement médiatique, les médias jouant le jeu puisque France 2, entre autres, l’avait invitée pour son 20 heures. Seulement voilà, de l’autre côté de la Méditerranée, les Tunisiens s’entêtaient à manifester et au moment où les congressistes du Front national votaient, la France entière tournait les yeux vers cette jeunesse pleine d’espérance qui venait de réussir à chasser Ben Ali. Mais l’événement d’outre-mer ne fera pas renoncer France 2 à sa fidélité envers la famille Le Pen. Car, si les médias ne sont pas pour rien dans la « poussée » sondagière
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du Front national, le service public y a, malheureusement, une grande part de responsabilité. Mais ils ne sont pas les seuls à jouer ce jeu malsain. Et les passages télévisés de la fille Le Pen ne seraient sûrement pas performants sans un brouillage politique dont on commence à penser que, s’il n’est pas organisé, il arrange beaucoup de monde. La droite d’abord. Quoiqu’en disent les ténors de l’UMP, c’est bien le passage en force de la contre-réforme des retraites qui a du mal à passer. Les syndicats, bien que battus, semblent y avoir gagné en cohésion et donc en capacité à représenter les salariés. Mais, côté pouvoir, et comme le montrent depuis les sondages sur la popularité de l’exécutif, cette bataille des retraites a marqué une nouvelle rupture avec le monde du travail. Car la droite a déjà beaucoup joué avec l’exigence sociale des Français : elle a ignoré les manifestations de 2009 contre les effets de la crise, s’est montrée impuissante face à la mondialisation capitaliste et a ainsi avoué l’indécence de ses slogans de campagnes électorales, de la « fracture sociale » chiraquienne en 1995, au « travailler plus pour gagner plus » sarkozyste en 2007. Et le Parti socialiste… Il a joué dans cette période la figuration nécessaire auprès des mouvements sociaux. Mais chaque apparition semblait condamnée à une ambiguïté immédiate. A l’image des sorties de la secrétaire nationale Martine Aubry qui, pas une seule fois, n’a réussi à parler des retraites en paraissant en adéquation avec les attentes exprimées par des millions de salariés. Bien plus que par la « guerre des ego » sur laquelle insistent nombre de commentateurs, son parti semble avoir perdu pied sur sa capacité à produire du discours et des propositions crédibles pour une transformation progressiste. Ressortir les vieux démons extrémistes, c’est donc peut-être la solution de
secours pour gagner sur la peur plutôt que sur la conviction. Pour la droite, enchaîner les incursions sur les terres frontistes (sécurité, immigration, attaques contre les travailleurs…) est une technique récurrente. C’est celle qui a assuré au candidat Chirac de bénéficier d’un « bouclier républicain » en 2002 et qui a permis au candidat Sarkozy de siphonner les voix d’extrême droite en 2007. Et, pour le PS, la manœuvre n’est pas complètement inutile. Certes, 2002 leur laisse un souvenir amer, celui de l’élimination dès le premier tour. Mais ce parti n’en ayant tiré comme leçon que l’éparpillement des voix à gauche, il croit aujourd’hui pouvoir agiter le chiffon rouge pour imposer à la gauche toute entière de se ranger derrière son candidat, unique. Sauf que… Sauf que l’exaspération sociale est telle… Le gouvernement a beau cacher les chiffres, en 2011 ce seront encore plus d’un million de chômeurs qui arrivent en fin de droits. Un million de travailleurs menés dans la misère. Une situation dans laquelle les responsabilités commencent à être clairement identifiées, comme l’avaient montré les mobilisations du printemps 2009 pour « ne pas payer « leur » crise ». Mais, à force de refuser de s’émanciper des dogmes ultra-libéraux et de brandir la menace d’un scénario à la grecque, les politiques (de l’Élysée au FMI) ne font que se décrédibiliser et pousser les travailleurs dans les bras de l’extrême droite. En bonne populiste, Marine Le Pen l’a bien compris. Elle tente de noyauter les syndicats, s’adresse aux fonctionnaires pour regretter avec eux les conséquences des mesures d’austérité (1) et parle de laïcité pour ratisser plus large quand d’autres ignorent la question sociale et croient pouvoir gagner des « parts de marché » dans la division. Parce qu’ils ne sont plus crédibles, ces deux grands partis jouent donc plus que jamais avec le feu. Vincent Bordas 1 / Voir l’Humanité Dimanche du 3 mars 2011.
ACTUALITÉS LE RÉVEIL
Pétrole
A qui profite la hausse ? L’inquiétude sur les approvisionnements paraît, pour partie, entretenue afin de doper les cours. En France, les prix à la pompe se rapprochent du pic de 2008. Selon certains commentateurs, les opérateurs s’inquiéteraient des effets de l’arrêt de la production libyenne et des risques de contagion du soulèvement populaire à d’autres pays producteurs de pétrole. L’Europe est particulièrement concernée. Le pétrole libyen couvre en effet 15,7 % des importations françaises, 22 % des italiennes, 23,3 % des irlandaises, 7,7 % des allemandes. Mais cette inquiétude paraît largement entretenue, l’Agence internationale de l’énergie estimant que de 500 000 à 750 000 barils par jour de brut, soit moins de 1 % de la consommation mondiale quotidienne, font défaut, en raison de la situation en Libye. L’Arabie saoudite, principal producteur de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP), se dit prête à pallier les carences de l’offre de brut et serait déjà « en discussions actives » avec les raffineurs européens, selon plusieurs sources. De son côté, le gouvernement américain a estimé que les États-Unis et le monde pouvaient faire face à une rupture d’approvisionnement en pétrole. Cette flambée des cours de l’or noir intervient certes sur fond d’un décalage entre la demande et l’offre mondiales. En 2010, la première a été de 87,1 millions de barils par jour contre 86,5 millions pour la seconde. Cet écart a été creusé à la fois par la réduction durant plusieurs années par les grandes compagnies pétrolières de leurs activités de recherche de nouveaux gisements et par la volonté légitime des pays producteurs de maîtriser leur production afin de relever leur prix de vente. Sur cette base se greffe une spéculation acharnée, organisée et entretenue par de grands intervenants financiers et les
majors de l’or noir. Une affaire assez récente vient d’en donner une idée dans un autre secteur que le pétrole. Début décembre 2010, le quotidien britannique The Daily Telegraph révélait que le mystérieux trader qui avait acheté entre 50 % et 80 % du stock de cuivre de la Bourse des métaux non ferreux de Londres pour 1,2 milliard d’euros, faisant monter le cours du cuivre à 8 700 dollars la tonne, un niveau record, n’était
autre que la grande banque américaine JP Morgan. En France, les prix des carburants à la pompe se rapprochent du pic de l’été 2008, lorsque le prix moyen du super sans plomb caracolait à 1,49 euro le litre. Pourtant, le prix du baril de brut est en dessous de ce qu’il était à l’époque. On devine à qui profite le crime. Claude Delevacq
Faillite politique Le Président de la République s’est livré à une incroyable opération de maquillage de ses propres faillites à propos des formidables mouvements populaires dans les pays Arabes. Il semble soudain découvrir la force et la lucidité des peuples qui ont entamé des processus révolutionnaires, depuis le mois de décembre en Tunisie, et qui se répandent désormais partout. Normal, le pouvoir sarkozyste était du côté des dictateurs. Aujourd’hui même il n’a pas eu un mot pour les Libyens dont le sang coule à cause de l’utilisation d’armes fournies par des pays européens ; pas un mot pour les Tunisiens qui ont obtenu le départ de leur Premier ministre lié à Ben Ali. Le maintien de Mme Alliot-Marie au gouvernement était devenu intenable. Encore qu’elle n’est pas la seule qui ait bénéficié de vacances payées par ces dictatures. Mais le fond des problèmes réside dans les orientations de M. Sarkozy ; de l’intégration de la France dans l’OTAN à une intégration européenne à marche
forcée qui fait tant de mal aux peuples ; au soutien aux guerres en Irak et en Afghanistan, à la connivence avec les autocrates de pays arabes jusqu’à l’inertie totale vis-à-vis de la création de l’État Palestinien. Il n’a non plus rien dit sur la nature des accords de partenariat ou de libre-échange qui servent aux multinationales européennes et aux banques à piller et surexploiter les travailleurs de ces pays. Face aux drames humanitaires qui se préparent à cause de la fuite de milliers de personnes de Libye et d’autres qui cherchent refuge en Europe, la France s’honorerait de leur venir en aide avec les autres pays européens au lieu de tenter de les refouler. Les « flux migratoires » ne sont pas synonymes de « terrorisme », comme il l’a laissé entendre dans une phrase ambiguë pour faire peur. D’autre part, elle doit prendre les dispositions pour restituer les fortunes des dictateurs aux peuples qui en ont besoin d’urgence. Sans attendre, il faut refonder les relations entre les peuples des pays des deux rives de la Méditerranée. Voilà un beau chantier d’avenir, à mille lieues de la petite opération de maquillage de Sarkozy. Claude Delevacq Mars 2011 - N°770 - LE RÉVEIL
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Journée internationale de la paix
Comment agir aujourd’hui ? Agir pour la paix, construire la paix… C’est aujourd’hui un défi et une urgence alors que les dépenses d’armement dans le monde ne cessent de croître et dépassent les 1 500 milliards de dollars par an. Il est choquant de devoir constater, en même temps, qu’un milliard de personnes souffrent de la faim tandis que les Objectifs du millénaire pour le développement, définissant pourtant des ambitions minimums en matière de développement et de lutte contre la pauvreté, ne seront pas atteints. Même les 0,7 % du PIB pour l’aide publique au développement restent un rêve pour les « pays les moins avancés » alors qu’il s’agit d’un engagement de ce qu’on appelle la « communauté internationale » depuis les années 70. Cette situation désastreuse pour l’ensemble des peuples du monde appelle un sursaut politique et des décisions majeures touchant à l’ensemble des règles et des institutions qui fondent les relations internationales. Nous avons besoin d’un nouvel ordre international qui puisse assurer la paix et la sécurité dans la satisfaction des besoins sociaux et dans une lutte sans merci contre les stratégies néo-impériales, contre les mécanismes de prédation et d’exploitation générateurs de pauvreté massive et d’inégalités insupportables. C’est sur le terrain de la vulnérabilité économique et sociale que naissent les guerres et la violence politique. Il y a urgence à faire reculer les politiques de puissance, à traiter les conflits et les insécurités qui se nourrissent du mépris des conditions d’existence, des droits et de la dignité des peuples. On ne peut marquer la journée internationale de la paix sans souligner l’impasse consternante, et pourtant 8-
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prévisible, des négociations israélo-palestiniennes en cours. Non seulement le Premier Ministre israélien refuse le geste minimum d’une poursuite du gel de la colonisation, tout en maintenant son refus de toute application des résolutions de l’ONU, mais il reformule aux Palestiniens l’exigence de la reconnaissance d’Israël comme État juif, au mépris des 2 millions d’Arabes palestiniens citoyens de ce pays. Une telle exigence confirme à la fois la volonté de poursuivre la colonisation en Palestine et l’inacceptable discrimination dont sont victimes les Palestiniens d’Israël : une discrimination qui prend des formes multiples et qui s’aggrave. Le refus de négocier, le refus d’application du droit international, le refus du principe même d’égalité entre les peuples sont porteurs de tensions exacerbées et de violence. C’est une politique permanente d’agression. Par leur soutien politique et militaire à Israël, ou leur passivité, les États-Unis et les Européens, et notamment la France, portent une responsabilité directe dans cette situation lourde de menaces pour l’avenir. Plus que jamais s’impose le
besoin de sanctions contre la politique israélienne et de mobilisation pour une paix dans la justice et le droit et dans la sécurité pour tous les peuples. La responsabilité de Washington et des pays européens est aussi engagée dans les autres guerres et conflits du MoyenOrient, notamment en Afghanistan. L’intervention militaire de l’OTAN est considérée par une majeure partie du peuple afghan comme une occupation. Elle ne contribue en rien à la paix. Elle contribue au contraire à une détérioration préoccupante de la sécurité au profit des groupes de l’islamisme politique le plus violent que l’on prétend pourtant combattre. Agir pour la paix aujourd’hui c’est d’abord agir pour la retraite d’Afghanistan des troupes de l’OTAN, pour une véritable politique de reconstruction, pour la recherche d’un consensus régional favorisant la sécurité et la confiance, pour la convocation d’une conférence internationale de paix sous l’égide de l’ONU afin de définir et garantir les conditions et les moyens d’une paix véritable. On ne peut marquer la journée internationale de la paix sans souligner l’impor-
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tance cruciale du désarmement sur le plan mondial et notamment du désarmement nucléaire. On voit comment l’enjeu du désarmement nucléaire et de la non-prolifération est lié aux conflits et aux crises. On ne peut avancer sur la voie de l’élimination de l’ensemble des armes nucléaires sans progrès réels dans le règlement de ces conflits. Une paix durable au Proche-Orient doit prendre en considération l’enjeu nucléaire et poser la question du déséquilibre de la sécurité issu de l’existence du nucléaire israélien. Pour construire une zone de paix, exempte de toute arme nucléaire au Moyen-Orient, il est indispensable aussi de résoudre la crise du nucléaire iranien et d’engager un grand effort multilatéral, dans le cadre de l’ONU, pour redéfinir les conditions de la sécurité et d’un processus de désarmement et de démilitarisation d’ensemble. La paix est un défi global et une responsabilité collective qui demandent aujourd’hui un engagement politique, une mobilisation citoyenne, une conscience élevée des réponses nécessaires aux impasses dangereuses dans lesquelles les stratégies de domination et les politiques de guerre et de puissance ont conduit. Construire la paix, aujourd’hui, c’est agir indissociablement pour le désarmement et pour résoudre les crises et les problèmes du nouvel état du monde en ce début de XXIe siècle. Claude Delevacq
Gaza
Mettre fin à un blocus illégal ! Condamné par l’ONU, le blocus de Gaza viole le droit humanitaire et les libertés fondamentales de la population gazaouie. Les habitants, enfermés sur leur propre territoire, subviennent de plus en plus difficilement à leurs besoins. L’économie de Gaza est asphyxiée par le blocus. Le taux de chômage s’élève à 40 %, quatre habitants sur cinq dépendent de l’aide humanitaire, 61 % de la population souffrent d’insécurité alimentaire. Une véritable crise humanitaire couve à Gaza. L’ARAC tient à renouveler son appel à la levée totale du blocus israélien sur Gaza. Ce blocus économique est doublé d’un blocus politique. La dernière mission parlementaire française n’a pas été
autorisée à pénétrer dans la bande de Gaza, contrairement à l’engagement initial des autorités israéliennes. Inacceptable revirement qui prive des parlementaires de l’accès à un territoire autonome et librement administré. C. D.
Pour relancer la paix, refuser l’impunité d’Israël Les discussions sont aujourd’hui au point mort entre Israël et l’Autorité palestinienne. Après l’attaque de la bande de Gaza en décembre 2008, Israël poursuit sa politique de colonisation sauvage des territoires palestiniens de Cisjordanie et de Jérusalem-Est au mépris de toutes les règles du droit international. Le peuple palestinien se trouve ainsi dépossédé de ses terres, de ses ressources et de son honneur. Cette politique ruine le processus de paix. Elle empêche la création d’un État palestinien souverain et nuit à la sécurité d’Israël. Depuis 1947, près d’une trentaine de résolutions adoptées par l’ONU n’ont
pas été respectées par Israël : retrait des territoires palestiniens, droit au retour des réfugiés, fin du blocus de Gaza, arrêt des violences… La communauté internationale, dont les États-Unis et la France, ont renoncé à faire appliquer le droit international. L’ARAC demande au gouvernement français d’accentuer sa pression diplomatique et économique sur Israël pour relancer le processus de paix et permettre la création de l’État palestinien. C’est la voie pour réaliser le rêve du jeune franco-palestinien Salah Hamouri : une région de fraternité et de paix, où Palestinien et Israéliens bénéficieraient des mêmes droits au sein d’États laïcs. C. D. Mars 2011 - N°770 - LE RÉVEIL
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« En Argentina, los ex-combatientes tambien… » L’Argentine, là-bas en Amérique latine, patrie du tango avec son chanteur idole Carlos Gardel (né à Toulouse !), pays de la meilleure des viandes, des « asados » (grillades de bœuf) et des « empanadas » (chaussons fourrés à la viande, au jambon-fromage, au maïs ou aux épinards, etc.), voilà pour le folklore. Nos lecteurs sportifs y associeront les noms de Juan-Manuel Fangio, de Maradona et de Lionel Messi, tandis que d’autres, ou les mêmes, se souviendront que l’Argentine est le pays où est né et a grandi le « Che » Guevarra ; ils évoqueront Péron, son épouse Eva (et le film de 1996, Evita, avec Madona et Antonio Banderas) et, surtout, ils se rappelleront les années terribles de la dictature militaire de la junte de Videla qui, du putsch du 24 mars 1976 à 1983, fit régner la terreur sur le pays. On estime à 30 000 le nombre des « disparus » (enlèvements, séquestrations, tortures, assassinats…) au cours de cette période que les Argentins nomment « la guerra sucia » (la guerre sale). C’est à Buenos Aires, la capitale, que naquit en 1977, à l’initiative de 14 femmes, le mouvement des « Mères de la place de Mai » qui manifesta chaque jeudi courageusement, bravant la dictature, les interdits et la répression, pour exiger du gouvernement de Videla d’être informées sur le sort de leurs enfants disparus. Fin 1981, le général Léopold Galtieri succède à Videla et, afin de se maintenir au pouvoir dans un contexte économique et social explosif, imagine de jouer sur la fibre nationale argentine pour une union sacrée engageant l’armée dans une guerre « de libération » qui chasserait les Anglais des îles Fakland (pour les Britanniques) ou islas Malvinas pour 10 -
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les Argentins (îles Malouines pour les Français), situées au sud du pays, près du cap Horn et de la Terre de feu, dans les eaux antarctiques.
La guerre de Malouines En avril 1982, l’action militaire menée en une nuit atteignit son objectif, notamment en créant une vague d’euphorie nationaliste en Argentine. Mais c’était sous-estimer « la Dame de fer », Margaret Thatcher, alors Premier Ministre d’Angleterre, qui, en 74 jours (et malgré les avions « super étendards » et les missiles « exaucet » argentins achetés à la France) infligea une sévère défaite aux jeunes troupes argentines.
Des combattants non reconnus Cette guerre, qui fit officiellement 904 morts (dont 649 Argentins et 255 Anglais), fut cuisante pour le peuple argentin et une double humiliation pour les soldats argentins. Hier héros, ces jeunes militaires tous conscrits, et venus en majeure partie de l’intérieur du pays, des lieux les plus pauvres, sont rejetés dans l’ombre comme des proscrits, écartés de tout débat public, sans plus aucune assise morale voire sociale (269 d’entre eux se sont même suicidés) et sans aucune reconnaissance officielle de leur qualité de combattant. Certes le Président Duhalde reconnaîtra bien, dans un discours prononcé le 2 avril 2003 à Ushuaia, la dette de l’Argentine envers ses combattants… mais aujourd’hui encore, ils attendent la concrétisation officielle de leur qualité d’ex-combattant.
Un camp sur la place de Mai C’est ainsi que j’ai découvert à Buenos Aires le camp revendicatif de ces ex-combattants, camp ceinturé de multiples banderoles exigeant la reconnaissance de leur statut, un camp en bordure de la place de Mai, à quelque cent mètres de la « Casa Rosada », l’équivalent de l’Élysée à Paris.
J’ai pris contact avec ces hommes qui avaient 18 ans en 1982. Ils m’ont accueilli en me disant : « En Argentine, les ex-combattants aussi », et, à les écouter, m’est venu immédiatement à l’esprit ce parallèle avec nous-mêmes, les AC en Algérie, contraints de lutter durant des décennies avant que la guerre ne soit officiellement reconnue. Des appelés, comme nous, envoyés dans une guerre perdue d’avance, puis rejetés dans l’ombre, psychotraumatisés et à qui est refusée la reconnaissance de leur qualité de combattant. Certes, ceux qui étaient sur les îles sont reconnus officiellement. Mais tous les autres, ils sont encore 8 000, qui furent « seulement » engagés dans la zone opérationnelle de défense du littoral, le TOAS, « Territoire des opérations de l’Atlantique Sud », voient leur droit à réparation morale totalement nié. A l’image de notre carte du combattant, attribuée à tous ceux qui séjournèrent 120 jours en Algérie, le gouvernement argentin ne pourrait-il faire le même geste pour tous ses appelés lancés dans cette guerre, alors même qu’ils sont soutenus par toutes les associations et même « les Mères de Mai », les juristes, les avocats, la Ligue des droits de l’homme, les anciens combattants des autres conflits. C’est ce que réclament ces ex-combattants argentins TOAS, qui souhaitent notre solidarité, celle de l’ARAC et des ACVG français. C’est ce que nous vous proposons de faire, amis lecteurs du Réveil. Qu’en dites-vous ? Ecrivez-nous, car nous reviendrons sur ce sujet dans le Réveil. André Fillère
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États-Unis / révolte arabe Une stratégie à géométrie variable Valse-hésitation à la MaisonBlanche. Les révolutions arabes inquiètent Washington qui veut conserver le contrôle de la région et particulièrement celui de l’approvisionnement en pétrole. Depuis plusieurs semaines, le monde arabe secoue le reste de la planète. Contre toute attente le mouvement, parti de Tunisie, s’étend un peu plus chaque jour, du Maghreb aux Émirats du Golfe. Les peuples réclament la liberté et la démocratie mais aussi des changements radicaux en matière de politique sociale. La plupart vivent depuis des années dans la misère tandis que les castes et les oligarchies de leur pays se gavent, puisant honteusement dans les richesses du pays. A l’exemple des Tunisiens qui, après s’être débarrassés des anciens dirigeants, poursuivent le combat pour une meilleure répartition des richesses. Certes les situations varient d’un État à l’autre, souvent en fonction de la puissance de l’armée et de son positionnement politique, des alliances internationales et parfois du poids de la religion. Mais la contagion démocratique gagne du terrain chaque jour. L’Algérie est comme une cocotte-minute prête à exploser. Au Maroc, les promesses de réformes annoncées par le roi n’ont pas désamorcé la contestation. L’Égypte s’est affranchie de la famille Moubarak, le Yémen, l’Irak ont été «contaminés » par la vague démocratique. En Libye, Kadhafi résiste en faisant assassiner son peuple par l’armée et des mercenaires payés à coups de pétrodollars. Même le sultanat Oman, verrou du détroit d’Ormuz par lequel transitent 40 % du pétrole exporté par voix maritime dans le monde, a dû faire face à des mouvements sociaux. En dépit de
promesses d’augmentation du salaire minimum et de la création de 50 000 emplois, le sultan s’est vu contraint de nommer un nouveau gouvernement sous la pression de la rue. L’Arabie saoudite, première puissance de la péninsule arabique, le Bahreïn, les Émirats, le Qatar, qualifié avec Oman de pétromonarchie sont, à des degrés divers, également touchés par le mouvement. Qui peut dire aujourd’hui où et quand cela s’arrêtera ? Évidemment cette situation, cette évolution, inquiète le « monde occidental ». Après avoir commercé durant des années avec les dictateurs, ignorant la souffrance des peuples, les gouvernements « saluent » du bout des lèvres ceux-là même qu’ils ont parfois contribué à réprimer. En réalité, outre les différents commerces (armes, matières premières…), ils sont pour la plupart dépendant énergétiquement de ces pays et particulièrement les États-Unis. Le cas de la Libye est édifiant. Les échanges avec les USA ont plus que triplé au cours des dernières années, passant de 10,3 à près de 30 milliards de dollars. Tripoli a ouvert les vannes aux produits US après des dizaines d’années d’embargo. Elle a vendu du pétrole et du gaz et importé des céréales, des équipements pétroliers, des avions… Les atermoiements de la stratégie américaine vis-à-vis de Kadhafi trouvent peut-être là leur explication. De plus Obama ne souhaite pas apparaître, aux yeux du monde, trop interventionniste comme par le passé. Washington préfèrerait déléguer à son bras armé, l’OTAN, « un choix naturel pour une opération militaire » selon un haut fonctionnaire de la Maison-Blanche, « sans équivalent en terme de planification, de prise de décision, de commandement et de moyens ». Enfin, pour des raisons évidentes de politique intérieure, Washington ne peut s’engager dans
un nouveau conflit militaire terrestre au Moyen Orient. Un véritable casse-tête pour le président US, car les Américains qui représentent 2 % de la population mondiale consomment 22 % du pétrole de la planète. D’où une attitude que l’on peut qualifier d’attentiste ou à géométrie variable de la part du locataire de la Maison-Blanche. Si l’on prend le cas des six pays du Golfe, l’armée américaine y est présente et fortement implantée. Elle peut, à tout moment, constituer un rempart contre la « déstabilisation ». Ainsi, le 24 février dernier, l’amiral Mullen, chef d’étatmajor en visite à Bahreïn, base de la Ve flotte, s’est félicité « des pas de géant accomplis par le royaume en terme de réforme » et a souligné « la force de l’alliance militaire entre les deux pays ». Plus près de nous, à la mi-mars, l’Arabie saoudite a dépêché plus de 1 000 hommes dans ce pays pour voler au secours du roi confronté à une contestation grandissante. Washington n’a élevé aucune critique contre l’arrivée de troupes étrangères. En clair, pour la Maison-Blanche « les réformes c’est bien, mais pas trop ». Il ne faut surtout pas remettre en cause la stabilité de l’approvisionnement en pétrole. Jean-Pierre Delahaye
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Warren Buffet et la guerre des classes ! Le 26 novembre 2006, à l’occasion d’une interview au New York Times, Warren Buffet, une des plus grandes fortunes du monde (fortune personnelle évaluée à 65 milliards de dollars, soit 10 fois le budget d’un pays comme l’Angola - la seule différence, c’est que l’Angola a une population de 13 millions d’habitants et que Warren Buffet est tout seul), Warren Buffet a donc déclaré avec une franchise totale sur l’état des rapports sociaux, je cite : « Il y a une guerre des classes, mais c’est ma classe, la classe des riches qui mène cette guerre, et nous sommes en train de la gagner. » Cette déclaration d’un cynisme absolu marque bien la ligne de front vers laquelle convergent et achoppent toutes les questions fondamentales qui taraudent notre société. La lumière crue que projette une telle déclaration sur la question essentielle de l’existence dans notre société de richesses hors norme confirme bien, paradoxalement, la possibilité d’une évolution sociale, politique et économique majeure positive pour les salariés, les jeunes, les retraités pour peu que ceux-ci se dotent des moyens politiques à la hauteur de ce combat. En fait, c’est toute la société qui est interpellée par cette analyse.
Existe-t-il, en France de telles fortunes ? C’est la question que l’on doit se poser. Au dire des grands patrons eux-mêmes,
2010 serait du point de vue des profits réalisés parmi les meilleures années. 86 milliards d’euros redistribués aux actionnaires. Aussi bien, voire mieux que 2007, pourtant année record pour les profits capitalistes. Effectivement, le CAC 40 ne s’est jamais aussi bien porté, au détriment, de fait, des intérêts de l’ensemble de notre peuple. Le groupe Total, par exemple, annonce des niveaux jamais atteints de reversements de dividendes à ses actionnaires, dans le même temps, le prix des carburants à la pompe affichent, quant à eux, des niveaux d’augmentation sans précédent. Autre exemple, madame Betancourt, troisième fortune en France, empoche, en 2009, 280 millions d’euros de dividendes. Dans la même année, son ami Sarkozy organise fiscalement une protection maximum pour les riches et fiscalise les indemnités versées par la Sécurité sociale en cas d’accident du travail pour les salariés. Tout est ainsi structuré dans notre pays, et par tous les moyens, pour prendre au peuple et donner sans fins toujours plus aux plus riches. Nous sommes bien au cœur de rapports sociaux, au cœur d’un combat de classe sans concession de la part des capitalistes qui sont prêts à tout pour préserver et développer leurs privilèges. Nous sommes bien en opposition totale avec ce système sans foi ni loi. Toutes les richesses de la société
s’accumulent à un pôle (10 % de la société) pour les nantis, à l’autre pôle de la société (80 % du pays), la misère, les difficultés pour simplement vivre et exister n’ont jamais été aussi grandes. En même temps, les luttes sociales en France restent fortes et déterminées, le gouvernement va-t-il entendre ces exigences qui ont déjà conduit 2,5 millions de Français dans la rue. Il nous faut encore être plus nombreux et plus engagés, plus actifs, plus fermes pour que le désastre qui se profile pour la société française soit battu. Oui, n’ayons pas peur de le dire, c’est le système capitaliste lui-même, sa logique libérale, qui tourne le dos à l’intérêt de la Nation. Personne ne peut à l’avance prédire l’issue de la guerre des classes si parfaitement décrite par Warren Buffet. Pour construire une société neuve, progressiste il faut la mobilisation, l’action, la construction collective de solutions où l’homme devra être au centre du développement social, politique, économique et humain pour triompher. Ne vous en déplaise, rien n’est acquis monsieur Warren Buffet, la volonté populaire est moteur de l’histoire des sociétés, l’histoire récente, comme celle depuis 1789, nous le prouve. Hervé Corzani
Renault - Vitry-sur-Seine Partenaire du Réveil des Combattants Acteur de la tombola 2010 du Réveil 21 avenue Eugène-Pelletan 94400 Vitry-sur-Seine Tel. 01 46 80 72 70 - Fax: 01 46 80 16 64 12 -
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LE CAHIER MÉMOIRE
le réveil
N° 770 Mars 2011
des combattants
Pour l’amitié, la solidarité, la mémoire, l’antifascisme et la paix
ÉDITO - Par Paul Markidès Notre association, à l’initiative de deux de ses fondateurs, Henri Barbusse et Paul Vaillant-Couturier, a engagé la lutte anticolonialiste dès le début des années 30. Henri Barbusse, en particulier, n’a pas mâché ses mots pour dénoncer la réalité du colonialisme à son époque : « Les pays colonisateurs font prisonnières les populations faibles, confisquent les territoires, et l’indigène est l’ennemi et l’animal domestique. On le pressure, on le décime, on le condamne aux travaux forcés et, s’il veut sa liberté, on l’exécute… C’est un régime pénitencier à rendement intensif… » (extrait de Paroles d’un combattant). A partir de la fin des années 50, la lutte des peuples colonisés et celle des peuples des pays colonisateurs ont conduit à ce qui est appelé « l’accession à l’indépendance des peuples colonisés », à la décolonisation. Mais cette décolonisation est en fait une colonisation sous une autre forme, une colonisation économique. C’est à démontrer cette nouvelle situation que nous avons consacré cette édition du Cahier de la Mémoire.
Réflexions sur la décolonisation « à la française » Édité par le Réveil des combattants - 2 place du Méridien - 94807 Villejuif - Tél. 01 42 11 11 12
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LE RÉVEIL dossier
Les causes et la nature
de la décolonisation “ à la française ” A lai n ruscio
Hô Chi Minh et la révolution vietnamienne, Modibo Keita et la révolution malienne Tenter une comparaison entre ces deux leaders, entre les deux processus, est évidemment un exercice périlleux. Des milliers de kilomètres séparent les deux pays. Les histoires nationales, avant la colonisation, furent différentes. Mais un élément extérieur a réuni ces deux pays, ces deux hommes : ils furent confrontés à la même domination coloniale. Hô Chi Minh est né en 1890, Modibo Keita en 1915. Une génération les sépare donc. Lorsque le Vietnam fonde le PC indochinois, en 1931, après déjà vingt années de vie clandestine, le Malien est 14 -
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lycéen. Lorsque Hô Chi Minh devient chef d’un État indépendant, en 1945-1946, Keita est l’un des membres fondateurs du RDA (Rassemblement démocratique africain). Quand le Mali parvient
Alain Ruscio est président du Centre d’information et de documentation sur le Vietnam contemporain
à l’indépendance, le Vietnam l’a déjà conquise depuis six années. Leur seul point commun chronologique, hélas, est le terme de leur parcours politique et humain : Keita est victime d’un lâche coup d’État, en 1968, Hô Chi Minh meurt en 1969.
Les traits communs, pourtant ? Il me semble qu’ils figurent avant tout dans une formule : le Vietnamien et le Malien ont toujours fait preuve de patriotisme, d’anticolonialisme, mais ils n’ont jamais été anti-français. Ils ont tous deux, au contraire, cherché à se faire du peuple de France un allié, comme
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en témoignent, dans la biographie d’Hô Chi Minh, sa longue période de militance (1918-1923) au sein du Parti socialiste, puis du tout jeune PCF, mais aussi ses efforts désespérés, en 1946, lors de son voyage en France, pour contrer les plans bellicistes de BidaultMoutet-d’Argenlieu, son adhésion sincère à l’Union française. Mais à y regarder de près, ne fût-ce pas, dans des conditions évidemment différentes, le cas de Modibo Keita ? Ne fut-il pas un des inspirateurs du programme du RDA qui théorisait l’union avec le peuple de France, qui affirmait son adhésion à l’Union française ? Plus tard, sa vice-présidence de l’Assemblée nationale française puis sa participation aux gouvernements Bourgès-Maunoury puis Gaillard, ne furent-elles pas des tentatives de tirer de la loi-cadre de 1956 tous les éléments démocratiques pour hâter la marche vers l’indépendance ? A cette bonne volonté, qu’a opposé l’impérialisme français ? La guerre au Vietnam, la répression et la manœuvre politicienne partout. Sans pousser trop loin la comparaison, n’est-il pas troublant de constater que le système a tenté, au Mali comme au Vietnam, de jouer la partition contre l’unité ? Qu’a fait Paris pour tenter de répondre au défi de l’indépendance vietnamienne proclamée par Hô Chi Minh ? Des politiciens ont voulu jouer la carte Bao Dai, expérience qui s’est achevée de la façon que l’on sait. N’est-ce pas une manœuvre du même type qu’a tentée, et hélas réussie, Paris lorsqu’il a brisé, avec la complicité de politiciens sénégalais, la toute jeune Fédération du Mali ? J’ajoute un second parallèle : la volonté passionnée de situer les processus révolutionnaires des deux pays dans le contexte régional et mondial. Hô, patriote vietnamien, s’est toujours pro-
1 / Bulletin de la Fondation Modibo Keita Revue du Cerma, Montreuil n°1 - 1987 2 / Marcel Rouff, Un opéra politique de Beaumarchais. Revue d’histoire moderne et contemporaine - 14 octobre 1910.
clamé internationaliste, militant de l’Internationale communiste, attaché par ailleurs aux processus révolutionnaires, dans son continent, l’Asie, comme en attestent ses passages clandestins en Chine et en Thaïlande. Keita fut, de son côté, un militant et un homme d’État malien, évidemment, mais aussi un homme-clé du non-alignement (son rôle majeur au second sommet, à Belgrade, en 1961) et de l’Unité africaine (il fut l’un des rédacteurs de la Charte de l’OUA). Je vois un dernier trait commun entre les deux hommes : portés par l’Histoire et porteurs de l’Histoire, ils sont tous deux restés modestes. Et l’on sait bien que ce ne fut pas une évidence. On sait combien la mégalomanie, la prise de distance avec le peuple, ont été des maux terribles qui ont atteint une grande partie des dirigeants à l’origine démocrates au passé irréprochable, tant ici en Afrique que dans des pays d’Europe, qui se voulaient construire le socialisme. Quelle distance entre les idéaux égalitaires des origines et ces hommes bardés de médailles, inaccessibles sur leurs estrades ! Je lisais, afin de préparer cette intervention, le témoignage de Gilbert Julis, ancien responsable des questions internationales de la CGT, qui fut chargé par le gouvernement malien nouvellement indépendant, de l’école de formation des cadres du jeune mouvement syndical malien, durant les premières années de l’indépendance1. Julis y côtoya durant ces années Modibo Keita. Dans son témoignage il soulignait : « Il avait le souci de l’homme, de l’homme responsable, du militant engagé, ce terme revenait souvent dans ses interventions ». Il ajoutait qu’il avait également un sens aigu de la place de la classe ouvrière, pourtant jeune, et faible, dans le processus engagé alors au Mali. Comment
en lisant ces lignes, ne pas penser à l’oncle Hô ?
Quelques réflexions sur la décolonisation « à la française » Décolonisation : interrogeonsnous sur ce que signifie ce mot, dé-coloniser. Cela signifie que les puissances européennes ont toujours et partout conservé l’initiative historique. Elles ont colonisé lorsque cela était conforme à leur intérêt, puis ont maintenu le système aussi longtemps que cela les arrangeait. Enfin, à un certain moment, elles ont décolonisé, selon toujours leur intérêt, au rythme et dans les formes choisis par elles. On pourrait d’ailleurs étendre cette critique à ce qui touche la période précédente, marquée par la traite des Noirs : l’homme blanc a esclavagisé puis, toujours quand cela l’a arrangé, il a désesclavagisé, pardon pour les néologismes. Je n’exagère pas. Tout un courant de l’historiographie, en France, en est resté là. En histoire de l’esclavage et de la colonisation, le péché majeur de la société française, l’intériorisation, souvent sincère, de la formule creuse « France, pays des droits de l’homme » fait des ravages. Et son corollaire, la foi dans les grands hommes porteurs de l’émancipation. C’est l’action de la Révolution française, non celle des révoltés guadeloupéens, martiniquais ou haïtiens, qui est présentée comme l’initiative historique qui a présidé à la première abolition, celle de 1793. Faut-il citer ici notre grand Beaumarchais ?2. En 1790, il fait donner son opéra Tarare. Il met en scène son héros humaniste qui promet le bonheur (mais non la liberté) à un chœur de nègres éperdus de reconnaissance, à qui il fait dire : « Bon blanc pour nègre, il est humain - Nous, bon nègre a cœur Mars 2011 - N°770 - LE RÉVEIL
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sur la main. Nous, pour blanc - Sacrifie - Donner sang - Donner vie ». Ce n’est pas du meilleur Beaumarchais, mais c’est significatif de l’état d’esprit d’une époque. Franchissons un demi-siècle. En 1848, c’est l’action de Schoelcher, non la lutte des esclaves, qui est présentée comme la seule explication de la seconde abolition. Immédiatement après sera peint un tableau célèbre, l’abolition de l’esclavage, de François-Auguste Biard (l’archétype du mauvais peintre selon Baudelaire). On peut y observer, à gauche, les abolitionnistes français montrant d’un geste noble le drapeau tricolore à des nègres, à droite, fous de bonheur, certains encore à genoux, d’autres debout, leurs chaînes brisées à la main ; une jeune négresse, également à genoux, devant deux blanches, que l’on devine femmes de colons, baise la main de l’une d’elles. Mais cet écœurant paternalisme qui pouvait, à la rigueur, s’expliquer en 1848, avait toujours cours lors des cérémonies du centenaire et de l’entrée des cendres de Schoelcher au Panthéon ou, plus près de nous, en 1998, pour le cent cinquantenaire, une affiche fut éditée : « Tous nés en 1848 ». Comme si l’abolition avait également pu effacer les déportations, les souffrances et les morts d’avant cette date. Au 20e siècle, à propos du processus de décolonisation, c’est exactement le même raisonnement qui est appliqué. Ce serait Mendès-France qui aurait été l’homme de la paix en Indochine, de Gaulle, l’homme de la décolonisation pacifique de l’Afrique noire avant d’être celui de la paix en Algérie. …Raccourcis vertigineux qui gomment derrière des formules imbéciles trois guerres coloniales (car on oublie en France celle qui présida à l’élimination de l’Union des populations du Cameroun, UPC, et la mort de dizaines de milliers de Camerou16 -
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3 / Conférence de presse, 5 septembre 1961 : Discours et messages, vol. III - Avec le renouveau -1958-1962. Paris, Plon – 1970.
nais), trois guerres coloniales, avec leur cortège de tortures, de corvées de bois, d’élimination physique des patriotes, qui masquent également la répression, précisément en Afrique noire, contre le RDA, l’emprisonnement des ses leaders, l’opposition farouche de de Gaulle à l’idée même d’indépendance des colonies à Brazzaville (1944) et dans les années qui ont suivi, la mise en place, par un ministre UDSR de la France d’outre-mer, François Mitterrand, dix ans avant les indépendances de ce qui ne s’appelait pas encore la Françafrique, l’imposition de la balkanisation par un ministre socialiste, Gaston Deferre (loi cadre de 1956), puis les manœuvres gaullistes de communauté en communauté rénovée, pour repousser les échéances. La thèse sous-jacente est : il y eut des Français racistes, des Français colonialistes, des Français chicoteurs, des Français napalmiseurs ? Oui, hélas ! Mais il y en eut tant d’autres lucides ! Et, si les seconds l’emportèrent finalement, c’est bien que la vraie France, la France pays des droits de l’homme, s’est réveillée. C’est à elle que reviennent logiquement les honneurs. Les méchants et les bons, singulière science historique ! Tout cela est bien loin d’investigations profondes sur ce que fut la décolonisation à la française. Exposons ces investigations, sans avoir bien sûr la prétention d’être pionnier. Il y a heureusement des décennies que ces sornettes ont trouvé des réponses argumentées. Je partirai d’une citation du général de Gaulle, encore : « Notre conception pour l’Algérie est complètement différente de celle que nous avions pratiquée depuis la conquête, et cela parce que toutes les conditions, françaises, algériennes et mondiales de cette affaire ont complètement
changé »3. Avant de nos ébahir devant une telle lucidité, précisons tout de suite que cette phrase a été prononcée le 5 septembre 1961, c'est-à-dire après sept années de guerre, dont trois sous de Gaulle lui-même. Mais soit ; reprenons la thématique gaullienne, elle nous convient : françaises… algériennes… mondiales ; remplaçons seulement algériennes par coloniales, puis inversons l’ordre en : coloniales… mondiales… françaises… et nous avons là un triptyque explicatif, me semble-t-il, assez convaincant.
Causes propres au système colonial et aux luttes des peuples colonisés Les premiers acteurs de la décolonisation furent les colonisés eux-mêmes. Nous n’affirmons pas cela par on ne sait quelle volonté démagogique d’évoquer d’abord les principales victimes du système, mais parce que c’est la vérité. Il est historiquement incontestable que les peuples colonisés se sont toujours opposés à la conquête, puis à la paix française, que les révoltes n’ont pas cessé, de Woyowoyanko sur les terres qui nous accueillent aujourd’hui, à Yen Bai au cœur du Tonkin, de la révolte de Ataï, en Kanaky, à la résistance de Samory en Afrique, des maquis du De Tham en Indochine à la République du Rif d’Abd-El-Krim… Ces révoltes et contestations prirent, après la seconde guerre mondiale, une dimension et surtout une généralisation sans précédent. Partout, ce fut l’effervescence, comme si les peuples colonisés que d’aveugles colonialistes croyaient endormis avaient compris que les failles du système n’attendaient plus que d’être agrandies. De 1945 à 1947, l’Empire, rebaptisé Union française par une pudeur frisant l’hypocrisie,
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connaît une crise majeure dont on peut dire à présent qu’il ne se relèvera plus. Partout, les peuples secouent le système. C’est, en respectant la chronologie, Thiaroye (décembre 1944) Sétif et Guelma (mai 1945), la proclamation de la République du Vietnam (septembre 1945), la fondation du RDA à Bamako (octobre 1946), le début de la guerre d’Indochine (novembre 1946), l’insurrection de Madagascar (mars 1947), le discours de Tanger du Sultan du Maroc (avril 1947) et j’en passe. De tous ces faits majeurs, j’insisterai sur la première des guerres de décolonisation, celle d’Indochine. Non par vietnamophilie exacerbée, mais parce que je crois sincèrement que l’action de Hô Chi Minh et de ses camarades fut déterminante, au sens propre du terme, pour tous le processus de la décolonisation. Des indices permettaient de penser que la lutte entreprise au Vietnam était suivie bien au-delà de ses frontières, dans le monde colonisé. En 1949, l’écrivain conservateur Maurice Genevoix voyage en Afrique noire française. Il écrit : « Partout où je suis allé, Tunisie, Algérie, Maroc, Sénégal, Soudan, Guinée, Côte d’Ivoire ou Niger, il était tout de suite évident que l’importance des événements d’Indochine était tenue par avance pour décisive. Les silences, sur ce point, étaient plus éloquents que les paroles. Quand se rompt le cordon qui retient les grains d’un collier, les grains filent tous, l’un après l’autre : le problème de l’Union française est un. »4 C’est surtout la date de ce journal de voyage qui est intéressante : 1949, soit cinq année avant Dien Bien Phu. Autre fait qui dépasse largement l’anecdote. En 1949 toujours, Hô Chi Minh, du fond de son maquis, apprend que le vieux lion du Rif, Abd-El-Krim, a réussi à échapper à ses geôliers français et vit en exil au Caire. Les dirigeants du
4 / Afrique blanche, Afrique noire Paris - Flammarion – 1949. 5 / Cité par Abdallah Saaf, Histoire d’Anh Ma - Paris l’Harmattan - 1996. 6 / Guerre et révolution d’Algérie, la nuit coloniale Paris - Julliard - 1962.
Madagascar 1947 : l’armée française massacre 89 000 personnes.
Viet Minh lui écrivent et lui demandent de tenter de persuader les soldats maghrébins de déserter l’armée française. On ne sait comment la lettre lui parvint, on ne sait pas plus comment AbdEl-Krim fit parvenir son appel en Indochine. Mais il le fit, et ce texte est un des joyaux de l’histoire de l’internationalisme5. Vint Dien Bien Phu. Nous manquons de témoignages sur l’écho qu’eut l’annonce de la victoire vietnamienne en Afrique noire. Nous avons, par contre, des témoignages sur l’accueil de Dien Bien Phu au Maghreb. Le 11 mai 1954, moins d’une semaine après la victoire du Viet Minh, Christian Fouchet, simple député gaulliste, signale, outré, à la tribune de l’Assemblée nationale que des Français du Maroc ont reçu par la poste de petits cercueils avec ce
seul nom gravé : Dien Bien Phu. Des années plus tard, le premier président du gouvernement algérien (GPRA) Ferhat Abbas, se souvenait : « Dien Bien Phu ne fut pas seulement une victoire militaire. Cette bataille reste un symbole. Elle est le « Valmy » des peuples colonisés. C’est l’affirmation de l’homme asiatique et africain face à l’homme de l’Europe. C’est la confirmation des droits de l’homme à l’échelle universelle. A Dien Bien Phu, la France a perdu la seule légitimation de sa présence, c'est-à-dire le droit du plus fort. »6 Un an après Dien Bien Phu, c’était Bandoeng. Mais la libération en Afrique vint surtout de l’action de ses propres enfants. L’épopée du RDA mériterait en soi une étude exhaustive. Le ciment idéologique de ce rassemblement était un réel attachement à l’africanité, que l’on ne
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peut certes pas appeler toujours et partout nationalisme. En outre, la référence au marxisme, si elle était superficielle pour beaucoup, était réelle pour d’autres, symbolisée par le compagnonnage de route avec le PCF. Ce RDA, première organisation de masse (il dépassa le million d’adhérents) de l’histoire de l’Afrique contemporaine, préfiguration de ce qui aurait pu être une Afrique unifiée, fut en butte à une répression intense : morts d’hommes lors des manifestations (Treicville 1949, Dimbroko 1950…) éliminations physiques ou politiques d’opposants ou de dirigeants non malléables (Boda, Côte d’Ivoire 1950, Boganda, premier président de la Centrafrique 1959, Olympo, premier président du Togo 1963, Modibo Keita, premier président du Mali 1968, Diori, président du Niger 1974, plus tard le capitaine Sankara, Burkina Faso 1987 …). Sans compter la guerre ouverte contre l’UPC et l’assassinat de ses dirigeants. Lorsque les leaders africains étaient considérés comme intégrables - un mot qu’aiment les colonialistes - ils étaient tout simplement approchés, travaillés, comme Léopold Senghor, ou retournés, comme Houphouet-Boigny, par François Mitterrand. Insister sur cet aspect me paraît indispensable. Vous savez tous que la légende dorée d’une décolonisation pacifique de l’Afrique subsaharienne court encore en France, colportée par des politiciens, des intellectuels et des journalistes sans mémoire. A ceux-là, nous répondrons, paraphrasant un certain président, que bien des Français ne sont pas entrés dans l’histoire… critique. Nous dirons en conclusion sur ce point que c’est donc de la périphérie du monde colonisé qu’ont été allumées les flammes qui allaient finalement brûler tout l’édifice. Ce 18 -
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sont les nouveaux damnés de la terre qui ont, sinon fait table rase du passé, du moins sont entrés de plain-pied dans le présent, qui ont fermé la parenthèse de la domination coloniale qui, à l’échelle de l’histoire, n’aura été finalement qu’un épisode.
Causes liées à l’évolution des relations internationales Cette décolonisation s’est également déroulée dans un contexte international nouveau. La constitution à partir de 1945 d’un camp socialiste en Europe, renforcé à partir de 1949 en Asie par la victoire de la révolution chinoise, fut un coup dur porté à l’hégémonie de l’impérialisme, peu contestée depuis 1939. Si l’aide directe aux mouvements de libération nationale ne fut pas déterminante, à l’exception de l’Indochine, le seul poids de cet acteur nouveau des relations internationales a obligé l’Occident à revoir ses valeurs, à repenser sa politique vis-à-vis de ce que l’on n’appelait pas encore le « tiers-monde ». Notre propos est de constater que l’impérialisme a été contraint de composer, du fait même de l’existence d’un autre camp, perçu par des millions d’hommes dans le monde colonisé ou para colonisé comme un espoir, une alternative possible. L’impérialisme n’avait pas les mains libres. Cela peut entraîner bien des réflexions sur l’actualité, alors qu’il n’y a plus même si c’est beaucoup - que la détermination des peuples face à l’Occident. L’autre fait historique majeur de ces décennies décidément riches en bouleversements est le surgissement des peuples jusque là colonisés ou para colonisés, l’émergence de ce que sera appelé dès 1952, le « Tiers Monde », Là aussi, l’histoire s’est accélérée : Inde 1947, Chine 1949, Bandoeng 1955…
Causes internes à la société française Nous avons dit que c’est de la périphérie, donc au sein même du monde colonisé, qu’ont été allumées les flammes qui ont finalement fait brûler tout l’édifice. Façon de dire : ce n’est pas du centre, de la métropole. Cette décolonisation s’est faite en inversant les schémas habituels de la gauche française selon lesquels la démocratisation du centre entraînerait l’amélioration du sort des colonisés, puis la sortie en douceur du système colonial. Illusion pure, la vie l’a prouvé, mais aussi vision qui a durablement érodé la qualité des relations entre cette gauche française et les forces patriotiques des pays colonisés. Lorsque je dis : la gauche, j’introduis évidemment des graduations entre un Parti socialiste empêtré dans la co-responsabilité des guerres coloniales, de Léon Blum et Marius Moulet en 1946 en Indochine, à Guy Mollet et Robert Lacoste, dix ans plus tard en Algérie, sans compter une omniprésence dans toutes les administrations de la France d’outre-mer, et un Parti communiste qui a clairement affirmé le droit à l’indépendance des peuples colonisés, même si sa politique connut des hésitations (attachement tardif à l’Union française), des méandres (vote des pouvoirs spéciaux en Algérie 1956) et des fautes gravissimes d’appréciation (Sétif 1945). Mais enfin, pour ne parler que de l’Afrique, le PCF a bel et bien été un solide appui des luttes anticoloniales. En 1960, vient en débat à l’Assemblée nationale la ratification des accords déjà passés entre la France et certaines anciennes colonies. Robert Ballanger y affirme d’emblée : « Le fait a précédé le droit. Rien ne s’est fait de bon gré, mais sous la contrainte, sous la pression des faits... ». Le groupe com-
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L’accession au pouvoir de Lumumba
muniste, annonce-t-il, votera en faveur de la ratification, tout en regrettant certaines clauses limitant les droits des nouveaux États. En août, on le sait, le Sénégal rompt unilatéralement l’union avec le Mali. La presse, en général, défend Senghor contre Modibo Keita. Dans un portrait de celui-ci dans Le Monde, on peut lire qu’il a dans son entourage « de nombreux partisans des méthodes autoritaires et des solutions marxistes, des problèmes africains », ce qui n’était pas un éloge sous la plume du journaliste anonyme7. Le discours de l’Humanité fait contraste. Les prises de positions progressistes de Modibo Keita sont citées, avec un intérêt non feint. Presque seule dans la presse nationale, elle expose sa méfiance envers Senghor, rendu coupable de la crise. On sait
que, un an plus tard, le président Modibo Keita devait utiliser une formule qui collera à la peau du président du Sénégal (« Senghor qui, comme chacun le sait, est plus Français que le plus Français des Français »)8. L’Humanité, pour sa part, n’oubliait cependant pas de dénoncer avant tout le pouvoir gaulliste, machiniste machiavélique. En fait, comme le pressentaient tant de leaders progressistes africains que des hommes de gauche en France, cet épisode, l’un des premiers actes de la Françafrique après les indépendances, préfigurera ce que devait être la pratique de Paris sous six présidents, de de Gaulle à Sarkozy, un interventionnisme permanent.
7 / Le Monde du 21 août. 8 / Discours. Bamako, 20 août 1961 : Site interne Modibo Keita. 9 / Claude Cheysson et Charles Frappart : Présence française dans des États indépendants associés - Revue La Nef - Juin 1955 - numéro spécial. 10 / Profession : Fonctionnaire - Paris Le Seuil 1976.
Conclusion Cela m’amène à une conclusion sur l’articulation entre formes anciennes et formes nouvelles de la domination occidentale. Je partirai de 2 citations : la première émane de deux hauts fonctionnaires. L’une de Claude Cheysson, intéressante par sa date, 1955, un an après le début de la guerre d’Algérie, cinq années avant les indépendances africaines : « Le Français... ne sait pas et ne veut pas évoluer. Il est sincèrement convaincu que la présence française avec l’exercice de l’autorité, le maintien des troupes et du drapeau… Le jour où ces attributs lui sont retirés, il estime que la partie est définitivement perdue… Une tâche urgente est donc d’éclairer, par des études objectives, les milieux intéressés, organisations spécialisées, grandes entreprises industrielles, commerciales et bancaires, presse, étudiants… La mise sur pied de vastes programmes d’assistance économique et technique au profit des territoires et États associés, l’élaboration d’une politique à long terme, seraient vaines si l’opinion française n’était pas au préalable convaincue de la possibilité pour la France d’être présente sous de nouvelles formes, aussi fructueuses que celles du passé, mais mieux adaptées à la conjoncture actuelle et, par conséquent, plus durables. »9 Vingt années plus tard, en 1976, l’autre est celle du haut fonctionnaire étroitement lié aux milieux d’affaires, François Bloch-Lainé. Il écrit : « Il était clair, dès le début des années 1950, que la souveraineté française allait évoluer beaucoup. Et que les liens monétaires seraient les plus durables, susceptibles de survivre aux liens politiques. »10 Il est difficile de mieux définir le néocolonialisme. Mais ce mot est-il adapté ? Ne cache-t-il pas un autre mot : impérialisme ? Impérialisme : il faut reconnaître que ce mot est autrement plus exMars 2011 - N°770 - LE RÉVEIL
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plicatif, qu’il a l’avantage de recouvrir toutes les formes de domination d’un pays sur un autre ou sur une région, toutes les formes, les politiques et les autres, militaire, financière, économique, mafieuse. Qui oserait dire, aujourd’hui, que les troupes américaines sont sur le pied de guerre sur tous les continents, que des troupes françaises, italiennes, allemandes, japonaises même les épaulent, aujourd’hui qu’une crise boursière à la Bourse de New York appauvrit les petits propriétaires français, plonge dans la misère les paysans maliens et fait mourir les enfants bengalis, aujourd’hui que les capitaux des pays riches circulent et que les hommes des pays pauvres sont pourchassés, que l’impérialisme n’existe plus ? L’impérialisme français est une
réalité séculaire qui a entremêlé, selon les époques et les circonstances, des rapports d’hégémonie et d’exploitation de toute nature. La domination politique directe, celle qui fit flotter le drapeau tricolore sous les Tropiques, celle qui impliquait la présence du gendarme, du missionnaire, du fonctionnaire et du colon, n’aura été finalement qu’un épisode de cette domination. Le colonialisme est la forme particulière, l’impérialisme la forme générale. Aussi, je me permets de m’étonner de la quasi disparition de ce mot dans le vocabulaire politique contemporain. On dit aujourd’hui globalisation, mondialisation pour ne pas dire impérialisme, comme on dit libéralisme, fût-il sauvage, pour éviter le gros mot de capitalisme.
1960 à Brazzaville, on était fiers ! François, de nationalité congolaise, est aujourd’hui infirmier à domicile dans Le Blosne, un quartier sud de Rennes. Nous lui avons demandé qu’il évoque non une analyse politique, mais quelques souvenirs. Vous étiez adolescent à cette période. Comme avez-vous vécu l’indépendance du Congo ? Colonisé par la France à la fin du XIXe siècle, le Moyen Congo, comme on l’appelait à l’époque, faisait partie de l’Afrique équatoriale française. Comme dans beaucoup de familles, on ne s’intéressait pas à la politique, on lisait rarement les journaux. Mais on savait qu’en 1940, le gouverneur général Félix Eboué avait choisi la France libre, que le général de Gaulle était venu en 1944 faire un important discours à Brazzaville. On espèrait nous, les indi20 -
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gènes, que nous aurions plus de droits. Après 1958, la création de la République du Congo, ce fut l’indépendance en août 1960, les jeunes étaient dans la rue. Comme spectateurs ? Mais non ! Les collégiens défilaient dans les rues avec leurs professeurs. Il y avait rassemblé les drapeaux français avec nos nouveaux drapeaux de couleur verte, jaune, rouge. C’est le ministre André Malraux qui représentait la France, il nous fit un grand discours. A la tribune, il était avec celui qui serait le Président du Congo, l’Abbé Fulbert Youlou,
que moi comme beaucoup de jeunes, j’admirais à l’époque. C’était la liesse ! Pourquoi un tel enthousiasme ? On était d’abord contents que cette indépendance se passe ici « en douceur ». Et nous étions fiers : nous aurions une administration, un gouvernement de Congolais. A Brazzaville, on habitait dans des quartiers différents ; ici, un blanc ne devait jamais se montrer inférieur, c’est toujours lui qui devait diriger. Un cousin était venu en France et avait vu un ouvrier parisien ramasser les poubelles, il nous disait : « Est-ce vraiment un blanc, il doit être africain ? » Donc, il n’y aurait pas le Moundélé le blanc à nous dire toujours : « Fais ceci ! Fais cela ! » Année après année, des enseignants, des médecins, des infirmiers congolais ont été formés dans la coopération avec la France. Beaucoup d’évènements et de drames se sont passés depuis, mais aujourd’hui, je garde en mémoire ces moments d’espoir. Propos recueillis par Georges Ploteau
Additif au cahier consacré à Mai 1968 Bibliographie sommaire Ce cahier prend appui sur les données saisies dans les ouvrages suivants : • Histoire de la France contemporaine - tome 7, Éditions sociales - Le Livre club Diderot • Les Grands événements de l’histoire du monde, Éditions Larousse • Les Grandes contestations de l’histoire, Pierre Paraf, Éditions Petite Bibliothèque, Payot 1978 •L es Intellectuels et la politique en France, Michel Leymarie , Éditions PUF, Collection Que sais-je, janvier 2001 •L e Siècle des hommes - tome II, Éditions Atlas • Journal l’Humanité, hors série mai 2004
mémoire LE RÉVEIL
11 novembre 1940 à Noves (13)
Il était une fois… Lors des manifestations du 11 novembre 2010, nous nous sommes souvenus de la manifestation des étudiants parisiens du 11 novembre 1940. Avant d’attendre le 70e anniversaire, je voudrais, au nom des familles concernées, évoquer les faits qui se sont passés à Noves (13) le 11 novembre 1942. En effet, jusqu’au 10 novembre 1942 notre village était en zone libre. Le 11 novembre au matin, le bruit courrait que toutes les manifestations étaient interdites. Malgré cela, quelques anciens combattants de la guerre de 1418, accompagnés de patriotes d’autres générations (en tout, ils étaient 16) se rendent au monument aux morts pour y déposer une gerbe. A leur retour, sur la place de la mairie, la camionnette de la gendarmerie les
attendait et les emmenait sur le champ à la prison Sainte-Anne d’Avignon. Certains dans le groupe étaient particulièrement visés car ils étaient communistes. Mais, tous sont restés soudés et malgré la proposition faite à certains d’entre eux, tous ont été emprisonnés sans distinction d’opinion et n’ont pas abandonné les trois anciens combattants de 1418 qui étaient « censés savoir officiellement que la manifestation était interdite ». Ils effectuèrent 33 jours de prison. Mais dès le premier moment ce fut la consternation dans le village et un élan de solidarité exceptionnel se manifesta dans la population. Les jeunes de l’équipe de rugby se relayèrent pour, en vélo, apporter jusqu’à Avignon (12 km) le fruit des collectes de nourriture offertes par la population. De plus, nous n’oublie-
rons pas que dans le groupe se trouvait un épicier qui, généreusement, par l’intermédiaire des membres de sa famille approvisionnait ses camarades et leurs familles dans le besoin. Beaucoup d’autres détails pourraient être cités, il y avait à la fois cet élan d’humanité et la peur des familles qui savaient qu’à la moindre occasion ces prisonniers pouvaient être pris en otages. Après ces 33 jours de prison et l’arrêt de la Cour d’Appel d’Aix du 16 avril 1943, l’affaire s’arrêta là. Mais, dans notre village, ce premier acte de résistance a ouvert la voie à d’autres combattants qui se sont engagés dans le maquis et Marcel Ginoux, alors âgé de 20 ans, devenu maire communiste de Noves, aimait répéter que ces faits historiques avaient montré le chemin aux quelque quarante-cinq jeunes qui se sont engagés volontaires en 1944 dans la 1ère DFL. Marcelle Rivoire-Donnat, fille d’un des 16 patriotes
Guerre d’Algérie
Un groupe pour partager ses souvenirs L’ARAC, en association avec Émilie Seguin, psychologue ayant récemment réalisé une étude sur le ressenti des anciens appelés, projette de mettre en place des groupes de discussion ouverts à tous ses adhérents ainsi qu’à leurs proches, autour de diverses thématiques concernant la guerre d’Algérie. En effet, aujourd’hui, cinquante ans après les faits, certains anciens d’Algérie manifestent le besoin de ne plus rester isolés dans leurs souvenirs et beaucoup semblent avoir envie de partager et d’échanger, non seulement sur les
événements, mais aussi sur leur vécu personnel. Ainsi, ce nouveau dispositif se voudrait être un espace de parole, d’écoute et de reconnaissance entre hommes qui ont vécu la même guerre, mais à travers des époques, des lieux, des postes et des expériences parfois très différents.
moment fort, d’évoquer ses joies, son soulagement, mais peut-être aussi ses difficultés ou son sentiment de solitude. Les proches peuvent également participer, épouse, frères, sœurs qui ont attendu leur proche, qui l’ont accompagné dans sa réinsertion, parfois heureuse, parfois plus douloureuse.
Bientôt une première séance
Renseignements, inscription
Chaque réunion sera animée par Émilie Seguin. La première séance aura lieu dès la constitution du groupe (de 14h30 à 16h30), à l’ARAC, 2 place du Méridien, Villejuif, métro Villejuif-Louis Aragon. Cette première réunion sera consacrée au thème du « Retour de l’appelé en métropole ». Pour les anciens appelés, elle pourra être l’occasion de revenir sur ce
Renseignements et inscriptions auprès d’Isabelle Capela (service juridique et social) au 0 1 4 2 1 1 1 1 1 3 ou par mail : reveil-des-combattants@wanadoo.fr. Participation gratuite pour les adhérents et leurs proches. La séance sera suivie d’un pot amical.
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LE RÉVEIL vos droits
Veuves de guerre
et conjointes survivantes de grands invalides L’article 147 de la loi de finances pour 2011 a décidé de la création d’une majoration spécifique en faveur de certains conjoints survivants de pensionnés au titre du code PMI. La note d’information n° 101/136/2011/BERG du 24 janvier 2011 en définit les bénéficiaires et le processus d’application. Cette disposition modifie l’article L50 du code PMI en créant une nouvelle majoration de 360 points applicable aux pensions de réversion des conjoints survivants (ou partenaires d’un pacte civil de solidarité) lorsque l’invalide était pensionné, lors de son décès, à hauteur de 12 000 points d’indice minimum.
Pension de conjoint survivant Les 360 points s’ajoutent à la pension de base du conjoint survivant, calculée aux taux du soldat ou du grade, et se cumulent avec la majoration uniforme de 15 points (article L 51-1 – 2e alinéa du code PMI). Peuvent s’y ajouter, le cas échéant, la majoration applicable aux conjoints survivants ayant apporté leurs soins à l’invalide (titulaire de la majoration tierce personne) durant 15 ans au moins (article L.52-2), ainsi que le supplément exceptionnel prévu par l’article L.51. La majoration de 360 points ne s’intégrant pas au taux de base de la pension de conjoint survivant, elle ne modifie donc pas le montant du supplément exceptionnel possible. • Exemples - Pension de base 500 + majoration uniforme de 15 points + majoration de 360 points = 875 points. Soit à 13,81 euros (valeur du point PMI) = 1006,98 euros/mois. - Pension de base 500 + majoration uniforme 15 points + majoration de 360 points + 167 points de supplément exceptionnel (versé sous conditions de 22 -
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ressources) = 1042 points. Soit 1199,17 euros mensuels. En cas de bénéfice de la majoration L.52-2, le montant de celle-ci s’ajoute aux calculs ci-dessus. Ces calculs sont basés sur une pension au taux de soldat. En cas de bénéfice au taux du grade, les calculs sont identiques, seul le montant de la pension de base est différent.
Cas des orphelins Selon l’article L.55 du code PMI, le titulaire d’une pension d’orphelin (mineur ou majeur infirme) peut bénéficier de la majoration des 360 points, si l’auteur du droit était pensionné pour 12 000 points au moins. • Pluralité d’orphelins : les 360 points sont partagés en parts égales entre les orphelins. Lorsque le droit de l’un des orphelins vient à s’éteindre, sa part de majoration est reportée sur les autres orphelins. • Partage entre un conjoint survivant et un orphelin d’un autre lit. Dans le cas de partage d’une pension de conjoint survivant avec une pension d’un orphelin d’un autre lit, l’article L-56 du code PMI prévoit que la majoration sera versée pour une demi-part à l’orphelin, soit 360 points divisés par 2 = 180 points. S’il y a pluralité d’orphelins, la demi-part sera fractionnée au prorata du nombre d’orphelins.
Date d’effet de la mesure La majoration est applicable à toutes les nouvelles concessions de pension à partir du 1er janvier 2011. • Pensions déjà en paiement : le ou la titulaire peut demander à bénéficier de la majoration de 360 points. La demande doit être déposée : - soit auprès de la Direction interdépartementale des anciens combattants si le demandeur réside dans le secteur d’une DIAC encore en exercice et si l’invalide était un militaire appelé ou
une victime civile de guerre, - soit auprès de la Direction des ressources humaines du ministère de la Défense, sous-direction des pensions, place de Verdun, 17016 La Rochelle cedex 1, dans tous les autres cas, à savoir : l’invalide était un militaire engagé ou de carrière ; la DIAC a disparu, remplacée par la sous-direction des pensions du ministère de la Défense. Il n’est pas nécessaire de déposer la demande au service départemental de l’ONAC, mais, si l’intéressé le fait, le service départemental de l’ONAC la fera transiter vers La Rochelle. • Pièces à fournir : la demande doit être accompagnée d’une copie du titre de pension de l’invalide faisant apparaître le montant indiciaire de sa pension (au moins 12000 points). • Date de mise en œuvre : la date d’effet des demandes émanant de conjoints survivants déjà pensionnés à la date d’entrée en vigueur de la loi de finances 2011 est fixée à la date de réception de leur demande par l’administration.
Rappelons cependant … Que les crédits votés dans la loi de finances pour 2011 ne s’élèvent qu’à 250 000 euros, ce qui relativise « l’effort financier » du gouvernement. En effet, 360 points x 13,81 = 4 971,60 euros, soit, traduits en pensionnées, 250 000 divisé par 4971,60 = 50 pensionnées au plan national. Nous nous en réjouissons pour elles, mais, tout en prenant acte de ce relèvement, on ne peut s’empêcher de rappeler qu’il y a encore en France près de 90 000 veuves de guerre, dont une majorité ont des pensions de réversion calculées sur la base 500 + 15, soit 592,68 euros par mois ! Comment peuvent-elles survivre, simplement survivre… Il est donc plus que temps, pour le gouvernement et les élus, de relever de façon conséquente le droit à réparation des veuves de notre pays.
vos droits LE RÉVEIL
La veuve de guerre, le PDG et la politique
Ensemble,
Elle va avoir 75 ans et la guerre l’a douloureusement frappé. Veuve d’un ancien combattant en Algérie, son second mari est décédé il y a quelques années.
Depuis sa création en 1917, l’Arac s’est affirmée à la pointe de l’action revendicative pour le respect, la défense et l’élargissement des droits à réparation de tous les anciens combattants ou victimes de guerre ayant eu à souffrir dans leur corps, leur psychisme et/ou leur affection des méfaits des guerres mondiales, coloniales et autres opérations extérieures actuelles. Ces droits ont toujours été tributaires de l’environnement social et politique. Brimés, diminués, voire supprimés lors des périodes les plus sombres de notre histoire, ils se sont au contraire réveillés, renforcés lors de l’épanouissement républicain, telles la libération de la France et l’application du programme du Conseil national de la Résistance. C’est dire si l’existence de ces droits, et leur respect, dépendent d’un monde en paix, d’une société dont le centre d’intérêt est l’homme, d’une situation économique permettant le plein emploi,
Celui-ci, pupille de la Nation 14-18, s’est engagé en 1940. Il entre dans la Résistance en 1941. Arrêté, c’est Buchenwald puis Mauthausen. Libéré en 1945, Croix de guerre avec palme, officier de la Légion d’honneur, il revient totalement brisé de la déportation, grand invalide pensionné avec un taux de 11 500,50 points. Un rein en moins, bi-amputé, dépressif chronique, atteint par la maladie d’Alzheimer (il ne parlait plus les trois dernières années de sa vie), grabataire, la vessie sondée, il n’a jamais été hospitalisé. « J’ai mis ma vie entre parenthèse pour m’occuper exclusivement de lui durant 13 ans », écrit sa veuve… qui subit à son tour une grave dépression pendant 10 ans. « Aujourd’hui, ma pension de guerre est de 680 euros par mois ! » Hélas, avec les 11 500,50 points de pension du mari décédé, elle est en dessous de la barre des 12 000 points et ne peut prétendre aux 360 points récemment votés. Une vie consacrée aux soins, soulignant de ce fait l’économie pour l’État des frais d’hospitalisation durant 13 ans… ça ne « vaut » pas plus de 680 euros par mois ? Une aumône ? La charité ? « Une malheureuse victime de la crise », nous diront en cœur M. Sarkozy, le MEDEF, le milliardaire Voboré, les actionnaires de l’Oréal, Vinci, Mouet et Chandon et autres, PDG et administrateurs qui « pèsent », avec leurs 250 000 à 800 000 euros par mois ! Eh bien oui ! Pour en finir avec ces scandales, nous devons nous mêler de rejeter la politique qu’ils nous imposent !
pour la défense des droits à réparation le développement de la santé, du logement, de l’éducation, des retraites, de la dignité, ancrée sur l’existence concrète des valeurs républicaines de liberté, d’égalité et de fraternité. C’est pourquoi l’action pour le droit à réparation est indissociable de toutes les initiatives intergénérationnelles pour la paix, contre le racisme, les résurgences néo-fascistes, pour un social immédiat permettant de répondre aux attentes et aux besoins de tous, donc des droits des anciens combattants et victimes de guerre. Ancien combattant ou victime de guerre, seul(e), vous ne pouvez que peu de chose. Avec l’ARAC, le nombre, l’union et la fraternité vous donnent la force et l’impact dont vous avez besoin pour défendre et faire progresser vos droits spécifiques, face à un gouvernement qui veut faire disparaître de la scène publique les trois millions d’ACVG français et ne leur verse que la moitié de ce qu’il leur doit.
Communiqué de l’ARAC La France est engagée par le Président de la République dans un nouveau conflit. Va-t-on vers un nouvel engagement des troupes françaises sur un 34e territoire extérieur ? Les risques pour notre pays sont lourds de conséquences dans cette région du monde. Défendre la démocratie, assurer la protection et le respect des populations civiles, répondre aux attentes des peuples n’implique jamais le recours à la force. Depuis des décennies, les gouvernements français n’ont eu de cesse d’entretenir des liens obscurs et contestables avec le colonel Kadhafi et son régime. Plutôt que de poursuivre cette politique néo-colonialiste dite « françafrique » il aurait mieux valu œuvrer à l’ouverture vers la démocratie, répondre aux légitimes aspirations des peuples de cette région du monde, au lieu de favoriser l’intérêt des grandes sociétés capitalistes.
La politique extérieure de la France doit s’exercer dans la durée, en respectant les intérêts de chaque pays, et non par des effets oratoires, incitant à la guerre et ne visant qu’à masquer l’alignement derrière les US, et la situation intérieure française catastrophique. L’ARAC soutient, depuis sa fondation, l’aspiration des peuples à la démocratie, à la sécurité, à l’entente, dans l’intérêt mutuel, à la paix. Elle refuse de s’associer à toute démarche visant à une nouvelle répartition des zones d’influence dans le monde, notamment au Proche et au Moyen-Orient et en Afrique. L’ARAC est engagée dans le combat républicain pour la démocratie, le respect des droits fondamentaux des peuples à la liberté. Elle s’oppose à tout règlement de conflit par la guerre. Villejuif, le 18 mars 2011
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LE RÉVEIL VIE de l’arac
Saint-Brieuc (22)
Notre camarade François Le Bars a été fait Chevalier de la Légion d’honneur par Edouard Quemper, conseiller général honoraire, ancien maire-adjoint de Saint-Brieuc, l’été dernier à l’hôtel de ville de Saint-Brieuc. François fit preuve d’un grand courage et d’une grande action pendant l’occupation nazie qui lui a valu la Croix de guerre et la Médaille militaire. Fidèle aux idéaux de la Résistance, aux valeurs républicaines, à la cause de la paix, il assuma aussi pendant des années la responsabilité de trésorier départemental. Toutes nos félicitations à François Le Bars.
Les cérémonies du 19 mars 1962 Les cérémonies commémorant le cessez-le-feu du 19 mars 1962, ouvrant la porte à la fin de la guerre d’Algérie, ont connu un immense succès dans toute la France. L’ARAC y a tenu toute sa place. A l’Arc de Triomphe de Paris, avec la FNACA, l’ANCAC et de nom-
Bagnolet (93)
Assemblée générale de la section de l’ARAC de Bagnolet en octobre dernier : 47 cartes 2011 remises, 3 adhésions, 91 personnes présentes au repas 24 -
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breuses associations d’anciens combattants, Raphaël Vahé, président national de l’ARAC, Paul Markidès et André Fillère, vice-présidents nationaux, ont déposé la gerbe nationale de notre association.
de clôture. Le bureau élu se compose de 5 femmes et 5 hommes. La section de l’ARAC de Bagnolet a été créée en octobre 1919, son premier président était Jules Vercruysse, ancien combattant de la grande guerre. Il sera fusillé le 22 octobre 1941 à la clairière de Châteaubriant en compagnie de Guy Môquet. Pour perpétuer le souvenir de nos anciens, la section de Bagnolet a mis en place, en 1997, un Club de la mémoire et de l’histoire et une exposition permanente « L’ARAC de 1917 à nos jours ». Une bibliothèque et des archives sont consultables aux heures des permanences ou sur rendez-vous tous les mardis de 16h30 à 19 h.
Saint-Étienne (42)
André Jacquemond, membre de l’ARAC à Saint-Étienne depuis 1959, a été nommé en décembre dernier Chevalier dans l’Ordre national du mérite. Notre camarade André a participé à la Résistance auprès de son père Antoine qui fut déporté. Nous lui présentons nos plus vives félicitations.
Antibes (06)
Pour les 60 ans de l’ARAC à Antibes : un beau rassemblement républicain. Le député-maire d’Antibes, Jean Léonetti et Francis Boursel, président honoraire représentant Marcel Innocenti, président de l’ARAC 06, ont célébré cet événement. Une partie de l’assistance attentive, 13 drapeaux présents… Une bonne organisation utile pour l’audience de notre association dans ce département.
vie de l’arac LE RÉVEIL
Le rassemblement national de l’ARAC à Chartes, en 2010
Rassemblement national du 14 mai Active préparation en cours Notre rassemblement national du 14 mai prochain, à Tergnier dans l’Aisne, se prépare activement. Les enseignants et les élèves des école primaires, les directions, les professeurs d’histoire et de géographie et les élèves des classes terminales des collèges et du lycée, mettent au point actuellement les animations qu’ils présenteront sur la scène du Rassemblement. Huit établissements scolaires ont accepté d’apporter leurs concours : les écoles primaires Decarpigny de Quessy Centre, Camus de Vouel, Blériot de Tergnier Centre et aussi Malraux de Tergnier Centre ; le collège Joliot-Curie de Tergnier ; le lycée Gay-Lussac de Chauny ; la cité scolaire de l’Immaculée Conception de Tergnier (école primaire et collège). A l’heure où nous écrivons ces lignes, chaque établissement prépare son animation et ils ne sont pas tous en capacité de révéler leurs choix car leur décision dépend de l’avis de l’ensemble du collectif constitué pour sa réalisation (enseignants et élèves). Mais nous pouvons déjà indiquer que les élèves du CM1 et CM2 de l’école Decarpigny présenteront au public du Rassemblement leurs dessins sur la paix et ils poursuivront leur découverte après le Rassemblement par une conférence sur la vie d’un enfant durant l’occupation allemande et une projection-débat sur « les fusillés pour l’exemple » en 1914-1918.
Au sein de plusieurs classes de terminale du lycée Gay-Lussac, l’établissement où se rendent les jeunes de Tergnier, les élèves participant au Concours national de la Résistance avec leurs professeurs d’histoire et de géographie préparent une animation spécifique au lycée qui
Savigny-sur-Orge (91) Des collégiens au Mont Valérien Ce mardi 1er février, une quarantaine de collégiens de Savigny-sur-Orge se sont rendus au Mont Valérien accompagnés de Laurence Spicher-Bernier, maire de la commune, et des représentants de la Commission du devoir de mémoire de la ville. Cet après-midi, riche en émo-
vécut des heures dramatiques durant la guerre 1939-1945, comme il a été expliqué dans une édition précédente du Réveil. Dix élèves du collège JoliotCurie préparent une lettre d’hommage aux cheminots résistants et une interprétation particulière du Chant des Partisans. Dans notre édition d’avril, nous présenterons le programme arrêté par tous les établissements. D’autre part, une délégation du syndicat CGT des cheminots, conduite par son secrétaire général, Gilbert Garrel, viendra témoigner sur la lutte de leurs aînés durant la guerre 1939-1945. Attention Le rassemblement commencera à 10 heures précises pour finir à 12 heures par un dépôt de gerbes au monument aux morts. L’accueil se fera à partir de 9 heures 30.
tions, a été l’occasion de rendre hommage au millier d’hommes fusillés au Mont Valérien pendant la Seconde Guerre mondiale, et de permettre aux jeunes générations de ne pas oublier ceux qui se sont battus et sont morts pour une France libre. La visite des lieux s’est déroulée en présence de Georges Dufau, président de APL Souvenir des fusillés du Mont Valérien et d’Ile-deFrance avec qui les échanges ont été plus que passionnants. Un moment émouvant et enrichissant pour tous ! Mars 2011 - N°770 - LE RÉVEIL
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LE RÉVEIL vie de l’arac
Le décès d’André Duroméa
A partir d’aujourd’hui, vous pouvez connaître, au jour le jour, l’activité du Comité français pour le village de l’amitié et du Comité international, en allant sur :
www.villageamitie-vancanh.fr • Faites-nous partager vos initiatives ! • Envoyez-nous des photos !
Le Conseil national de l’ARAC a appris avec grande tristesse la disparition de son camarade André Duroméa, membre du Conseil national d’honneur de notre association. Il présente ses plus sincères condoléances à sa famille, à ses proches. André fut un militant, qui, dès 1936, alors jeune ouvrier au CEM du Havre, s’engage dans le combat, qui est toujours le nôtre, pour la défense des valeurs républicaines, l’indépendance nationale, l’antifascisme, la solidarité
internationale, la mémoire, l’amitié entre les peuples, l’émancipation humaine, la paix… Il fit partie de ceux qui, en 1940, refusèrent de capituler devant l’envahisseur nazi. Il a vécu la déportation toujours en combattant pour la libération de son pays, pour la vie dans un monde de paix. Nous perdons un frère courageux, généreux, ouvert, rassembleur. Nous poursuivons notre action dans sa trace. Pour le Conseil national, le 17 mars 2011 Raphaël Vahé Président National de l’ARAC
NOS PEINES mars 2011 Le Réveil des Combattants adresse aux familles et aux amis de nos camarades décédés ses sincères condoléances. ALLIER (03) Vichy : Claude CARTON, Résistant.
HÉRAULT (34) Sète : Damien NARDONE, AC 39-45.
BOUCHES-DU-RHONE (13) Endoume : Melchior CARTON, ancien des Brigades internationales. La Ciotat : Louis JEANSOULIN, AC 39-45.
ISÈRE (38) Bourgoin-Jallieu : André NEPLE, 90 ans, AC 3945, Résistant. Raymond VIAL, 76 ans, AC ATM. Fontaine : Joseph CANOVA, AC 39-45 Vizille : Jean-Pierre HARIBEY.
CHARENTE (16) Saint-Cybard : Jean-Pierre FICOT, AC ATM. CÔTES-D’ARMOR (22) Étables-sur-Mer : Jean LE LEVRIER, 86 ans, Résistant, FTPF, déporté à Buchenwald. Laurenan : Arsène JOUET, 89 ans, AC 39-45, volontaire de la Résistance. Georges LAUBE, 85 ans, AC 39-45. Victor PIRIOT, 96 ans, AC 39-45. Plounevez-Moedec : Jean-Yves DUBOURG, AC 39-45. DORDOGNE (24) Excideuil : Eloi MASSIAS, 86 ans, AC 39-45. La Coquille : Guy BESSE. Léon BONTEMPS, AC 39-45. Montrem : Jacques CANTIRAN, AC ATM. Périgueux : André DAIX. Robert LAPORTE, AC 39-45. Pierre LESCAREL, AC 39-45. Marcel MURAT, AC 39-45. Gabriel TRIGOULET. Villars : Edmond GROLHIER GARD (30) Vallée-de-l’Auzonnet : Gabriel GUTIEREZ. Clovis PARIS.
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LOT-ET-GARONNE (47) Agen : René TREPONT, 88 ans, AC 39-45, Résistant. Villefranche-du-Queyran : Wladislaw KURAS, AC ATM. NIÈVRE (58) Decize : Georges MATSAERT, AC 39-45.
SAVOIE (73) La Bridoire : Edmond BERLAND, 86 ans, Résistant, AC 39-45. Roger GENTIL-PERRET, 87 ans, Résistant, AC 39-45. SEINE-MARITIME (76) Le Havre : Maurice LE MAISTRE, 70 ans, AC ATM. VAR (83) Saint-Raphaël : Albert REBUFFEL, AC 39-45. Jacques WIGNIOLLE, AC 39-45. VIENNE (86) Châtellerault : Jean DRAPEAU, 88 ans, Résistant.
NORD (59) Feignies : Jean ROBBE, AC 39-45. Solre-le-Château : Michel HUCKEM, 78 ans, AC ATM, porte-drapeau de la section.
ESSONNE (91) Limours : Arthur DURAND, AC ATM. Sainte-Geneviève-des-Bois : Gaston LEBOULANGER, 90 ans, AC 39-45. Vauhallan : Mme Huguette VIGNEAUD, amie.
PUY-DE-DÔME (63) Clermont-Ferrand : Mme Bernadette BOYER, veuve. Jean GERANT, AC 39-45, secrétaire de la section. Mme Marie SURE.
HAUTS-DE-SEINE (92) Antony : Claude BADER. Malakoff : Mme Marie MARTINET, 83 ans, veuve.
PYRENEES-ORIENTALES (66) La Tour-de-France : Louis BOREIL, 90 ans, AC 39-45. Rivesaltes : Jean-Louis BOUZON, 77 ans, AC ATM. Jacky MOUGENOT, 72 ans, AC ATM.
SEINE-ST-DENIS (93) Noisy-le-Grand : Marcel MUSSAULT. Saint-Denis : René BERNIER, AC 39-45. Hervé JACOB, ami.
vos droits LE RÉVEIL
Et si, demain, « elles » disparaissaient ? Aujourd’hui, les gouvernements français ont doté notre pays d’une armée professionnelle. Aujourd’hui, les gouvernements du Chef de l’État ont supprimé le poste de secrétaire d’État aux Anciens Combattants, fait disparaître le secrétariat d’État, exploser ses services, atomisés au sein du ministère de la Défense, pour l’essentiel. Aujourd’hui, le ministère des Pensions, voulu par la loi du 31 mars 1919, a disparu. Tout est entre les mêmes mains : l’envoi des hommes au combat, le droit à réparation de ceux qui y survivront. Est-il farfelu de penser que, pour ces gens-là, le droit à réparation peut être vu sous un autre angle, voire même disparaître tout simplement ? Des accidents du travail ? Dès la « suspension » de la conscription, des voix se sont fait entendre dans les milieux plus ou moins officiels, militaires voire secrétariat d’État aux Anciens Combattants… Si les soldats sont tous, désormais, des volontaires, c’est qu’ils ont choisi le « métier » des armes ; et si c’est leur métier, ce qui peut leur advenir relève alors des « accidents du travail » et non plus du droit à réparation. Fort heureusement, la réaction du mouvement anciens combattants fut telle que cette vision des choses sembla être remisée aux « vestiaires ». Mais le temps passant…
La carte du combattant aux ATM ? Mais le temps passant, la RGPP faisant son œuvre et réduisant les effectifs, la Défense ayant la haute main sur les combattants et les anciens combattants, qui peut assurer que ces « vieux démons » ont bien été chassés ? Les difficultés à mettre en œuvre le logiciel KAPTA et le retard enregistré dans l’attribution des cartes du combattant et des Titres de reconnaissance de la Nation (TRN) ne pourraient-ils servir de « paravents » masquant d’autres projets ? Interrogeons-nous ? Le gouvernement, malgré l’engagement de Hubert Falco, alors secrétaire d’État aux Anciens Combattants, a-t-il vraiment la volonté politique d’attribuer la carte du combattant aux anciens d’Algérie présents dans ce pays 120 jours, dont une partie avant le 2 juillet 1962 ? Et ne serait-il pas tentant, pour le gouvernement, de prétexter des difficultés de mise au point de KAPTA pour repousser aux « calendes grecques » la concrétisation de cette mesure ?
La carte du combattant aux OPEIX ? Pourquoi faudrait-il « précipiter » l’attribution de la carte du combattant aux OPEX ? Ils ont déjà le TRN, qui en fait des ressortissants de l’ONAC et leur donne droit de se constituer une rente mutualiste AC. La retraite du Combattant ? Certes les plus anciens des OPEX, ceux des années 1970, atteignent les 6065 ans et pourraient y prétendre. Mais les autres, les plus jeunes ? Alors, n’y a-t-il pas dans la tête de certains, cette idée qu’on peut attribuer la carte du combattant aux plus anciens OPEX et demander aux plus jeunes, ceux d’hier et d’aujourd’hui, ceux de 25 à 55 ans, d’attendre d’avoir 60 ans pour recevoir leur carte du combattant et prétendre à la retraite du combattant ?
Une carte du combattant ou un certificat de travail pour OPEIX Et pourquoi ne pas pousser jusqu’au bout cette « logique » de « fossoyeur » du droit à réparation ? Si les militaires d’aujourd’hui sont des professionnels, pourquoi s’arrêter à la notion « d’accident du travail » ? La carte du combattant, dans le droit à réparation, a été prévue pour tous les appelés, conscrits, mobilisés envoyés à la guerre alors que ce n’était pas leur métier. Mais des militaires professionnels, pourquoi y auraient-ils droit alors qu’ils se sont « engagés volontairement » en connaissant les risques encourus ? Pourquoi ne pas remplacer la carte du combattant par un « certificat de travail » à leur égard ? Ce qui aurait un autre avantage : celui de supprimer la retraite du combattant, puisqu’elle est attachée à la carte du combattant !
Irréaliste, vraiment ? Ainsi présenté, ce « cauchemar » peut sembler bien « farfelu » et loin de la réalité. Voire… « Les accidents du travail » d’hier n’ont pas disparu de la tête de ceux qui nous gouvernent, de la Défense ni du fameux « Observatoire de la santé des vétérans » dont le rôle est nul en ce domaine. Et, quand on voit le sort réservé à la demande de carte du combattant aux ATM « à cheval » sur le 2 juillet 1962, quand on voit la lenteur, pour ne pas dire plus, de la parution des textes permettant l’attribution de la carte du combattant pour les OPEX, quand on voit le sens que prend la réforme engagée du code des pensions militaires d’invalidité, le sort des écoles de réinsertion professionnelle et des maisons de retraite de l’ONAC sorties de celui-ci au bénéfice d’une fondation privée… peuton être sûr que ces « rêves » de longs retards, de suppression de la carte du combattant, de la retraite du combattant Mars 2011 - N°770 - LE RÉVEIL
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LE RÉVEIL vos droits
sont des idées fumeuses qui ne trottent pas dans certaines têtes officielles et ne verront pas le jour… si le mouvement ACVG baissait la garde, perdait de sa vigilance et troquait son action pressante contre une confiance aveugle envers les « bons sentiments » de ceux qui nous régissent.
Réagir et s’unir Il est grand temps que les ACVG, victimes de la double peine, touchés par toutes les mesures gouvernementales antisociales comme tous les citoyens, et atteints par toutes les attaques au droit à réparation, dupés par les engagements reniés de Nicolas Sarkozy envers eux, développent avec force leur action revendicative légitime et se mêlent à tous ceux qui agissent pour que les acquis sociaux de la Résistance, pour que le programme du Conseil national de la Résistance ne soient pas écrasés - et nous avec - par la loi du profit maximum des dirigeants filous des sociétés du CAC 40 cotées en Bourse et de leurs complices du MEDEF patronal. André Fillère
A partir d’aujourd’hui, vous pouvez connaître, au jour le jour, l’activité du Comité français pour le village de l’amitié et du Comité international, en allant sur :
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Commission nationale de la carte du combattant Le groupe de travail préparant les travaux de la Commission nationale d’attribution de la carte du combattant s’est réuni le 15 février 2011 à l’Office national des anciens combattants (ONACVG), aux Invalides à Paris. André Fillère y a participé. Après avoir été informé des améliorations en cours sur le logiciel KAPTA, chargé du traitement des dossiers de demandes de cartes du combattant et de Titre de reconnaissance de la nation, le groupe s’est enquit de la situation des militaires et ex-militaires ayant servi en opérations extérieures (OPEX). Un large tour d’horizon a été effectué à partir des textes de décret du 12 novembre 2010 et de l’arrêté du 10 décembre 2010 précisant les critères d’attribution (actions de feu et actions de combats) et la définition de celles-ci au plan des opérations terrestres, maritimes et aériennes. Il appartient maintenant au Service historique de la défense (SH Def) de préciser et publier les listes d’unités reconnues combattantes en fonction des territoires et des périodes retenues. Selon les éléments recueillis, on peut craindre que cette opération nécessite du temps, le SH Def devant déjà remettre à niveau les listes d’unités reconnues combattantes depuis 2005 (par arme et par territoire, sauf le Rwanda), avant de se pencher sur l’ensemble de la situation avec, en priorité, l’Afghanistan. Puis le groupe a, en fonction du travail du service ONAC de Caen et de KAPTA, ratifié l’attribution de 1 564 cartes du combattant, lesquelles, après signature par le préfet directeur général de l’ONAC, seront adressées directement aux intéressés. Ces 1 564 cartes se répartissent ainsi : - 25 pour la 2e guerre mondiale - 18 pour la guerre d’Indochine - 1 306 pour l’Afrique du Nord (à savoir 1 137 pour la guerre d’Algérie, 114 pour les combats au Maroc et 55 pour les combats en Tunisie),
- 215 pour les opérations extérieures. Les 215 cartes des opérations extérieures se répartissent ainsi : - 2 pour le Kossovo (mission des Nations unies), - 1 pour l’Irak (opération « Ramure » et « Libège »), - 6 pour la Côte d’Ivoire (opérations « Licorne » et ONUCI), - 2 pour le Cambodge (pays limitrophes et approches maritimes et aériennes,) - 2 pour la République Centrafricaine, 1ère période, - 12 pour la République Centrafricaine, 2e période, - 3 pour la République Centrafricaine 3e période, opération « Boali », - 1 pour le Timor Oriental, - 37 pour l’ex-Yougoslavie (opérations « Trident, Astrée et Proxima »), - 64 pour l’ex-Yougoslavie (Yougoslavie, Slovénie, Croatie, pays limitrophes et eaux avoisinantes), - 4 pour la région du Golfe persique et d’Oman (opérations maritimes), - 2 pour la région du Golfe persique et d’Oman (opérations militaires), - 1 pour le Tchad (opérations de police des Nations unies, MINURCAT, 1ère période), - 1 pour le Tchad (opération EUFORTchad/RCA sur le territoire du Tchad, de la République Centrafricaine et pays avoisinants), - 2 pour la République du Liban et d’Israël (Opérations Daman FINUL et « Balista »), - 9 pour le Liban, - 38 pour l’Afghanistan (pays et eaux avoisinants, notamment le Kirghizstan, opérations « Héraclès, Pamir et Epidote »). - 1 pour la Somalie et ses approches maritimes et aériennes. Les prochaines réunions du groupe et de la Commission plénière sont prévues pour les 3 et 4 mai prochains.
vos droits LE RÉVEIL
Combattants des OPEX La France est présente dans 33 pays à travers le monde et impliquée dans des conflits.e Huit arrêtés du ministère de la Défense et des Anciens Combattants, datés du 14 janvier 2011 ont accordé le bénéfice des dispositions de l’article L. 4123-4 du Code de la Défense aux militaires participant à des opérations extérieures sur les territoires suivants : 1 - Opération « Trident » sur les territoires de l’ex-Yougoslavie, à compter du 1er janvier 2010. 2 - Opération « Épervier » sur les territoires du Tchad et des pays avoisinants à compter du 1er janvier 2010. 3 - Opération Séisme Haïti 2010 sur les territoires de la République d’Haïti et des pays et des eaux avoisinants à compter du 15 janvier 2010. 4 - Mission des Nations unies de stabilisation en Haïti (MINUSTAH) sur les territoires de la République d’Haïti et des pays et eaux avoisinants, à compter du 19 février 2010. 5 - Opération « Baliste » et « Daman » sur les territoires de la République du Liban, d’Israël et leurs eaux avoisinantes à compter du 1er septembre 2010. 6 - Opération « Force multinationale et observateurs » (FMO) sur les territoires de la République arabe d’Égypte, à compter du 1er septembre 2010. 7 - Opérations « Licorne » et « Calao » (ONUCI) sur les territoires de la République de Côte d’Ivoire et ses approches maritimes, et de la République du Togo, à compter du 18 septembre 2010. 8 - Mission de l’Union africaine en Somalie (African Mission in Somalia/ AMISON) sur les territoires de la République fédérale d’Éthiopie, de la République de Somalie et ses eaux avoisinantes, à compter du 23 septembre 2010. Ces arrêtés portent effet pendant une période de deux ans à compter des dates indiquées ci-dessus. • Rappelons que l’article L 4123-4 permet aux militaires participant aux mis-
sions extérieurs, ainsi que leurs ayants cause, de bénéficier des dispositions du code des pensions militaire d’invalidité en cas de blessures, de maladies, (articles L 2 et L 3), de pensions (articles L5, L12, L13, L15), des pensions de veuves (Art L43), de la Sécurité sociale (L136 bis), des emplois réservés (L393 à L396), des pupilles de la Nation (L461 à L490), des transferts et restitution des corps (L493 à L509), des voyages sur les tombes ou les lieux du crime (L515), du statut de grands mutilés de guerre et de l’allocation spéciale aux grands mutilés de guerre et de l’allocation spéciale aux grands mutilés (L36) et majoration de pensions (L37) dès lors, pour ces deux derniers articles, que les conditions relatives à la nature ou à la gravité de l’infirmité ou des infirmités définies sont remplies. De plus, les militaires concernés bénéficient des dispositions prévues en matière de blessures de guerre et de délégation de solde. • Signalons que la note d’information
n° 103/159/2011/BERG du 26 janvier 2011 a mis à jour la liste des services ouvrant au bénéfice des dispositions et avantages relatifs aux militaires participant à des OPEX concernés par l’article L.4123-4 du Code de la Défense. Cette liste complétée fait état des territoires concernés, des dates du début et de fin d’application de l’article L.4123-4, ainsi que des textes (arrêtés et décrets) applicable à chacun des territoires que nous résumons ici : Afghanistan, Algérie, Bosnie-Herzégovine, Cambodge, Cameroun, Congo, Côte d’Ivoire, Djibouti, Égypte, Érythrée, Éthiopie, Gabon, Géorgie, golfes Persique et d’Oman, Haïti, Irak, Israël, Kenya, Kosovo, Liban, Libéria, Maroc, Mauritanie, Mer Rouge, Ouganda, Palestine, République Centrafricaine, Ruanda, Somalie, Sultanat d’Oman, Tchad, Timor oriental, Togo, Tunisie, Yémen, Ex-Yougoslavie, Zaïre. Soit 37 territoires d’OPEX, échelonnés de 1952 (Tunisie) jusqu’à… 2012 et plus ?
ONAC Renouvellement des conseils départementaux Le renouvellement de la composition des conseils départementaux de l’ONAC devrait avoir lieu en juin prochain. Il est recommandé aux comités départementaux de l’ARAC de se préparer à déposer des candidatures dès que l’appel sera lancé par les services départementaux de l’ONAC. Un arrêté du 18 janvier 2011 vient de préciser la nouvelle répartition des conseils départementaux de l’ONAC à venir. Ils seront composés de : - 6 membres maximum au titre AC 1939-1945, Corée, Indochine, - 12 membres maximum au titre guerre Algérie, Tunisie, Maroc,
- 6 membres maximum au titre des OPEX, postérieures au 2 juillet 1964. Lorsqu’il n’y aura pas le nombre suffisant de candidats dans l’une des catégories ci-dessus, le complément pourra être choisi dans l’une ou dans les deux autres catégories. Rappelons qu’en dernier ressort, c’est le préfet qui choisit les membres du conseil départemental de l’ONAC au sein de la liste que lui présente la direction départementale de l’ONAC. Les comités départementaux ont donc intérêt à préparer la liste de leurs candidats sans tarder, en favorisant, autant que faire se peut, la présentation d’OPEX.
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LE RÉVEIL vos droits
Cartes du combattant OPEX Le décret n° 2010-1377 du 12 novembre 2010 définit les modalités d’attribution de la carte du combattant aux OPEX. Il comprend 3 articles dont le 1er explique que « constituent des actions de feu ou de combat (…), les actions de combat et les actions qui se sont déroulées en situation de danger caractérisé au cours d’opérations militaires dont la liste est fixée par un arrêté du ministre de la Défense. » L’article 2, pour sa part, précise que les dispositions ci-dessus « s’appliquent aux opérations militaires qui sont qualifiées d’actions de feu ou de combat à compter de la date d’entrée en vigueur du présent décret. » Cette définition ambiguë (« à compter de la date d’entre en vigueur ») nécessite d’être explicitée quant à la prise en compte avant ce décret. Quant à l’arrêté, qui devrait être officialisé sous peu, il définirait les types d’opérations militaires constituant des actions de feu ou de combats par arme, ainsi réparties : • Opérations terrestres : contrôle de zone, interventions sur engins explosifs, mine, piège ou munitions, recherche, sauvetage et récupération au combat, appui, protection, sécurisation des personnes, des biens et des sites, ainsi que les transports associés, évacuation sanitaire ou de personne, rétablissement de l’ordre, contrôle de foule, action de renseignement. • Opérations navales : arraisonnement, protection d’espaces maritimes, évacuation sanitaire ou de personnes, recherche, sauvetage et récupération au combat, action de renseignement, protection et sécurisation des transports, déminage, transport, débarquement et embarquement de personnes et de matériel, actions de reprises de vive force dans le cadre de la lutte contre la piraterie, le brigandage et le terrorisme en mer. • Opérations aériennes : accompagnement de transports et de troupes au sol, aérolargage, aéroportage ou poser d’assaut, appui feu, bombardement, postes de commandement volants, évacuation sanitaire ou de personnes, 30 -
LE RÉVEIL - N° 770 - Mars 2011
défense aérienne, guerre électronique, ravitaillement au sol, recherche, sauvetage et récupération au combat, action de renseignement, protection de l’espace aérien. Reste maintenant à attendre la publication des listes d’unités reconnues com-
battantes en fonction de ces critères et de l’application des actions de feu ou de combat reconnues dans le cadre de dates retenues. Patience, frères OPEX, patience… disent-ils, « là-haut ». L’ARAC, pour sa part, continuera d’appuyer « sur le champignon ».
Plus de 66 ans d’opérations extérieures En 2011, la France est présente dans 33 pays à travers le monde et impliquée dans des conflits. La note d’information n° 103/159/2011/BERG du 26 janvier 2011 a mis à jour les territoires sur lesquels des militaires français ont servi en OPEX. Très curieusement, on y trouve l’Algérie et le Maroc, mais ni Madagascar, ni la Corée, ni l’Indochine. On estime que 300 000 à 500 000 militaires français ont servi en OPEX audelà de 1962, date de la fin de la guerre d’Algérie. On dépasserait donc les 3 millions si l’on prend en compte le tableau en question de la défense. Ainsi, au-delà de la décennie 1952-1962 (Tunisie, Maroc, Algérie) on peut relever encore : le Cameroun (1956-1958 puis 1959-1963) et la Mauritanie (19571959). • De 1962 à 1970 : le Tchad (1969-durée non limitée !) • De 1970 à 1980 : - Le Liban (1978) - La Mauritanie (1977-1980) - La République Centrafricaine (19791982) - Le Zaïre (1978-1981) • De 1980 à 1990 : - Golfes Persique et d’Oman (19871990) - Le Liban (1984 à 1990) - Le Tchad (1983 à 1990) • De 1990 à 2000 : - Le Cambodge (1991-1994) - Le Congo (1997-2000) - Les golfes Persique et d’Oman (1990 à 2000) - L’Irak (1991 durée limitée !) - Le Kosovo (1999) - Le Liban (1990-1999) - La République Centrafricaine (1996-
1999) - La Somalie (1992-1995) - Le Tchad (1992-2000) - L’Ex-Yougoslavie (1992-2000) • De 2000 à aujourd’hui : - L’Afghanistan (depuis 2001) - La Bosnie-Herzégovine (2003-2009) - Le Tchad (2000 à 2011… et plus ?) - Le Congo (jusqu’à mars 2000) - L a République démocratique du Congo (2003-2011… et plus ?) - L a Côte d’Ivoire (2002-2012 ? et plus ?) - Djibouti (2008-2010) - L’Égypte (2006-2012 ? Et plus ?) - L’Érythrée (2007-2009) - L’Éthiopie (2007-2008 ? et plus ?) - Le Gabon (2003-2011 ?) - La Géorgie (2008-2010) - Le Golfe (2000-2003) - Haïti (2004-2010) - L’Irak ( ?) - Israël (2006-2012 ? et plus !) - Le Kenya (2008-2010) - Le Kosovo (2008-2010) - Le Liban (2000-2012 ? et plus ?) - Le Libéria (2007-2011 ?) - La Mauritanie (2007-2011 ?) - La Mer Rouge (2008-2010) - L’Ouganda (2003-2011) - La Palestine (2005-2008) - La République Centrafricaine (20022011) - La Somalie (2008-2012 ? et plus ?) - Le Sultanat d’Oman (2008-2010) - Le Timor Oriental (2000-2001) - Le Togo (2004-2012 ? et plus ?) - Le Yémen (2008-2010) - L’Ex-Yougoslavie (2000-2011 ?) Ainsi, on est amené à constater que, dans le même temps où se menait la guerre d’Algérie, des troupes françai-
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ses intervenaient au Cameroun et en Mauritanie. De 1962 à 1970, seul le Tchad était « au tableau » ; de 1970 à 1980, on passe de 1 à 5 interventions OPEX ; de 1980 à 1990, ce sont 6 interventions ; de 1990 à 2000, les OPEX sont dans 13 États. Et
de 2000 à 2011, c’est l’explosion avec 33 interventions dont certaines sont programmées jusqu’à 2012 et au-delà. Voilà qui illustre éloquemment l’affirmation que la « Françafrique » est loin d’avoir vécue et que « la politique de la canonnière » a pris des dimensions tel-
les que grandissent en proportion les risques de conflit généralisé attisés par l’OTAN et ses « gendarmes » dont notre pays, hélas ! Alors, plus que jamais, « Guerre à la guerre ! »
Étude La politique industrielle d’armement et de défense de la Ve République Étude sous la direction de Pierre Pascallon et Jean-Paul Hébert, Éd. L’Harmattan, collection Défense, 30 euros Le 31 mars 2008, un colloque s’est tenu à l’Assemblée nationale à Paris. Il traitait essentiellement du volet militaire et les actes ont été publiés par L’Harmattan sous le titre : La Ve République (19582008), 50 ans de politique de défense. Le 29 septembre 2008, un 2e colloque a eu lieu avec pour thème essentiel celui rappelé en titre. Cette journée d’étude à l’EHESS (École des hautes études en science sociale) a porté sur la naissance de la politique industrielle d’armement et de défense de la Ve République, l’évolution de cette politique et ses prolongements dans un cadre européen, l’état et les perspectives de cette politique (forces et faiblesses de l’industrie française d’armement et de défense aujourd’hui),
quelle orientation demain ? Et, si nous devions nous interroger quant aux axes de réflexion et aux orientations privilégiés, il suffirait simplement de se référer aux dernières phrases de la conclusion de l’amiral Pierre Lacoste (ancien directeur général de la DGSE) : « Le livre blanc (réforme sarkozyste de l’armée NDLR) a le grand mérite de présenter un concept renouvelé du continuum entre la Défense et la Sécurité : une version qui n’a plus rien à voir avec celle de la « Nation en armes » caractéristiques des grandes guerres du siècle précédent… » On est loin de Jaurès et de « l’Armée nouvelle », loin de la conscription, mais tout près de l’OTAN, de « Vive les USA » avec cette nostalgie de l’Amiral Lacoste : « Je
me souviens (…) des dernières années de la IVe République, quand la France était le principal fournisseur d’armements de l’État d’Israël menacé de succomber aux assauts répétés de ses voisins arabes. En plus des « Mirages », des vedettes rapides et des chars, nos gouvernements ont secrètement aidé à la construction du complexe de Dimona. Ils ont permis à Israël d’accéder à l’arme atomique en lui fournissant aussi le vecteur, un missile balistique de Dassault… » Vous avez dit « Palestine » ? Gageons que cet Amiral Lacoste ne sera pas le « Pacha » du « bateau pour Gaza » que préparent les forces de paix progressistes et solidaires auxquelles s’est jointe notre ARAC. Dont c’est l’honneur.
Retour du Tchad Carnet d’une correspondante
nialisme et la Françafrique. C'est-à-dire une nébuleuse d’acteurs économiques, politiques et militaires, en France et en Afrique, organisée en réseaux et lobbies polarisés sur l’accaparement de deux rentes : les matières premières et l’aide publique au développement. Cette fonction a une logique : celle du cercle des initiés. Ce système autodégradant se recyclant dans la criminalisation est naturellement hostile à la démocratie. Régulièrement reconduit, il regroupe la majorité des dirigeants africains mis en place, soutenus et protégés par la France, au Gabon, au Togo, au Cameroun, au Congo, au Burkina Faso et au Tchad. Autant de peuples exploités et privés de toute information. Un livre témoignage, en même temps qu’une formidable leçon de journalisme.
Sonia Rolley - Éd Actes Sud - 23 euros Sonia Rolley, journaliste, correspondante de presse de RFI et AFP a tenté de faire son métier au Tchad de 2006 à 2008. Sans complaisance, elle s’efforçait de dire la vérité jusqu’en mars 2008 où elle fut expulsée sur la double injonction de la présidence tchadienne et de l’ambassade de France ! Son carnet est à la fois un roman d’aventures (attaques à répétition des groupes rebelles, coups répressifs du régime, pression des autorités françaises…) et un ouvrage éclairant la réalité du colo-
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