Le réveil des combattants 764 aôut/septembre 2010

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Le droit à réparation en danger

L’arac au festival d’avignon

le réveil Août-Septembre 2010 - N°764 - 5 e

Hommage à Marie-claude Vaillant-couturier (partie 2)

des combattants

Pour l’amitié, la solidarité, la mémoire, l’antifascisme et la paix

Les droits de la République doivent être défendus et développés

Pour tous !

Le journal des droits de tous les anciens combattants et victimes de guerre


LE RÉVEIL actualité

Non à la réforme des retraites Affaires, retraites, dette, G20, sécurité, football... Nicolas Sarkozy, à la télé cet été, a tricoté un invraisemblable patchwork même pas digne du meilleur du café du commerce. Le Président n’a pas hésité à se fendre en direct d’un conseil à son ami Woerth, « un homme honnête et compétent ! », celui de démissionner de ses fonctions de trésorier de l’UMP. Il n’hésite pas à manier légèrement les contrevérités prétendant qu’au nom de la République irréprochable il n’aurait pas hésité à se séparer de deux ministres indélicats. Sur les retraites, comme sur les autres sujets d’actualité, il a répété les mêmes ritournelles : « la fiscalité en faveur des plus riches », « c’est utile pour les plus pauvres », « travailler plus », mais maintenant il n’est même plus question d’y rajouter pour gagner plus et, pire encore, les leaders syndicaux seraient populistes, les manifestants animés par la peur... Rassurez-vous, Nicolas Sarkozy serait là pour nous protéger. Les Français connaissent bien la chanson, mais c’en est une autre qu’ils réclament. Comme l’ont montré les puissantes manifestations du 24 juin et la défaite de la droite ce week-end dans son fief de Rambouillet, la politique du gou-

vernement est durablement contestée, il doit arrêter de faire la sourde oreille et changer de politique. Le disque de la droite est rayé. C’est ce qui a conduit Nicolas Sarkozy à prendre le ton patelin du conseilleur, en qui plus personne ne croit. La droite est incapable d’inventer les réponses à la crise à laquelle ses politiques ont conduit. En réalité, c’est le spectacle tout entier de la politique gouvernementale qui doit s’arrêter. Le gouvernement et Nicolas Sarkozy doivent cesser de passer en force. La démocratie doit retrouver ses droits et la dignité sa place dans la conduite des affaires publiques. Plutôt qu’un jeu de chaises musicales destiné à amuser la galerie sans rien changer, la situation exige du gouvernement trois

mesures immédiates : - l’abandon de son projet de réforme des retraites, - le bouclier fiscal doit être supprimé et les fonds récupérés mis au service de l’emploi public et du pouvoir d’achat populaire, - les attaques contre la démocratie doivent cesser et le projet de réforme des collectivités territoriales, que le gouvernement cherche actuellement à imposer, doit être immédiatement abandonné. C’est cela qu’a exprimé la forte manifestation contre la réforme des retraites à l’appel de tous les syndicats unis, le 7 septembre dernier. Claude Delevacq

Appel à la souscription ! Pour la réussite du nouveau Réveil mensuel : de nouveaux moyens financiers… Ensemble, faisons vivre les valeurs de l’ARAC Le comité départemental : ......................................................................................................................................................... La section :................................................................................................................................................................................... M. ou Mme :................................................................................................................................................................................ Fait un don de :........................................................................................................................................................................ e • Joindre un chèque au nom du Réveil des Combattants • Envoyer votre souscription au Réveil des Combattants - 2 place du Méridien - 94807 Villejuif cedex

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LE RÉVEIL - N° 764 - AOÛT-SEPTEMBRE 2010


ÉDITO LE RÉVEIL

SOMMAIRE Actualités p. 4 « Je crois au rassemblement » Alain Ruscio.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4 Liberté, égalité, fraternité.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 Les cheminots et la Résistance.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 Concurrence et hausse des prix.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8 International p. 8 Solidarité avec Salah Hamouri. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10 Lapidation, une pratique du moyen-âge. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12 Mémoire p. 21 Les événements de Sétif. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21 Vos droits p.22 Campagne double : un décret restrictif.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22 Décristallisation : où en est le gouvernement ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23 Droit à reparation, la réforme ne passe pas. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24 L’affaire Marice Audin .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25 Vie de l’ARAC p. 26 L’ARAC au festival d’Avignon. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27 La vie des departments et sections. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28 Magazine p. 30

P. 13 D ossier

Hommage à Marie-Claude Vaillant-Couturier Partie 2 Une vie au service de l’humain : son action après 1945

Nos remerciements à la Photothèque du mouvement social : © photos de couverture et P. 4

LE RÉVEIL DES COMBATTANTS Fondé en 1931 par Henri-Barbusse Mensuel de l’Association républicaine des anciens combattants et victimes de guerre. Commission paritaire n° 0713-A 06545 Édité par les Éditions du Réveil des Combattants SARL au capital de 45 734,41 - Siret : 572 052 991 000 39 2, place du Méridien, 94807 Villejuif cedex Téléphone : 01 42 11 11 12 Télécopie : 01 42 11 11 10 reveil-des-combattants@wanadoo.fr Gérant-directeur de la publication : Raphaël

VAHÉ • Directeur délégué : Patrick STAAT • Rédacteur en chef : Raphaël VAHÉ • Directeur promotion et publicité : Claude Delevacq • Secrétariat de rédaction, conception graphique : Escalier D Communication • Impression : RIVET P.E. - 24 rue Claude-Henri-Gorceix, 87022 Limoges cedex 9 Tirage : 60 000 exemplaires Ce numéro du Réveil a été tiré le mercredi 15 septembre et remis le jour même à la Poste. Il devrait donc parvenir à chaque abonné le 20 septembre au plus tard. Merci de nous faire part de vos observations.

Urgence :

Défendre les valeurs sociales et humaines, Défendre les valeurs de la République

L

e combat est engagé pour défendre les valeurs sociales et humaines que le peuple de France s’est construit, en un mot défendre les valeurs de la République. Alors qu’une majorité d’hommes, de femmes, en France aspirent à une vie meilleure, à une vie digne, Sarkozy et son gouvernement piétine ce que notre Nation a construit à force de luttes au fil des siècles. En s’attaquant à la santé, à l’école, aux retraites, à l’éducation… en clair aux grands acquis du CNR, en développant l’exclusion, le racisme, en expulsant à tour de bras c’est aux valeurs républicaines de la Nation que s’attaque le gouvernement de Nicolas Sarkozy. Cette attaque vise à mettre au service de la finance l’ensemble de l’économie sociale de notre pays. Ils n’acceptent pas que les milliards destinés aux retraites par les cotisations des salariés échappent aux banques. Ils veulent récupérer cet argent pour spéculer. Le gouvernement veut faire de l’éducation des enfants une arme contre les familles les plus en difficultés en promulguant des mesures où les études dépendront de plus en plus des moyens financiers des parents, l’école pour tous risque de disparaitre. A l’ARAC nous n’acceptons pas que toute la richesse humaine de notre nation soit soumise à la loi des marchés. Nous sommes tous concernés : la Réforme générale des services publics (RGPP), est également une attaque frontale au droit des Anciens Combattants. C’est bien la volonté gouvernementale de détourner demain nos valeurs, l’économie, la politique sociale de notre pays au seul profit de l’avidité financière... Le résultat de tout cela c’est l’accélération de la pauvreté, de la précarité, des petits boulots, c’est faire vivre des millions de Français dans l’angoisse, l’austérité et la misère. Les millions de manifestants à travers notre pays démontrent l’exigence de préserver, et développer l’action pour une France sociale et solidaire s’appuyant sur les valeurs républicaines, et donner les moyens à chacun de vivre dans la dignité. Voilà pourquoi riches de notre histoire, riches de nos combats, nous sommes déterminés, comme nous l’avons prouvé les 4 et 7 septembre derniers, à être présents dans toutes les actions du 23 septembre. Dans le pays des droits de l’homme, l’ARAC ne sera pas en dessous des exigences et des luttes menées par toutes les générations. Patrick Staat AOÛT-SEPTEMBRE  2010 - N°764 - LE RÉVEIL

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LE RÉVEIL ACTUALITÉS

Je crois au mot rassemblement Une interview d’Alain Ruscio Le Réveil : La dérive actuelle du Président Sarkozy ne correspond-elle pas à une volonté de masquer des responsabilités dans les conséquences de la crise ? Alain Ruscio : C’est en effet une pratique très ancienne de tous les pouvoirs, et surtout les réactionnaires : lorsqu’une crise sociale, et même aujourd’hui sociétale, s’affirme, il faut tenter de trouver une diversion. Tentons de nous mettre à la place du gouvernement (même si ce n’est pas très drôle !). Sur les retraites, il a réuni contre lui l’unanimité des syndicats, de la gauche et même d’une partie de sa majorité. Sur l’école, le niveau de vie, il est en situation d’échec. Que peut-il bien faire ? Céder à ce que firent avant lui tous les pouvoirs : jouer sur la peur, la crainte, monter les catégories les unes contre les autres... Le Réveil : Pourquoi une telle dérive en opposition aux valeurs républicaines constituantes de la nation française ? A.R. : Mais la nation française a toujours, en tout cas depuis les Lumières, eu deux traditions : la progressiste, celle qui s’ouvrait aux valeurs humanistes, à la diversité, à la fraternité. Et l’autre, qui s’est exprimée depuis la même période, faite de réaction, d’égoïsme, de rejet, de racisme. Cela n’a pas été une série de parenthèses malheureuses dans l’histoire française, mais des moments constitutifs. En 1940, il y eut des Guy Môquet, mais il y eut aussi, et ils furent plus nombreux alors, des pétainistes. On peut le déplorer, mais c’est comme ça. Donc, le sarkozysme est la continuation d’une vieille tradition réactionnaire française. Le Réveil : A quoi une telle démarche peut conduire ? A.R. : Nous sommes déjà dans une situation grave. La chasse aux Roms n’est qu’un épisode supplémentaire. Je ne fais pas par4-

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tie de ceux qui crient à chaque instant au danger fasciste. Mais enfin, prenons bien conscience de ce que nous vivons. Lorsque le président emploie le mot « guerre », ce ne peut être une bavure de plus, après les « karcher » et les « casse-toi pauvre con ». C’est une démarche de fond. On peut s’attendre au pire dans les deux années qui viennent, car la droite ne changera plus de registre, si près des présidentielles. Le Réveil : La référence à notre histoire est-elle justifiée ? A.R. : Oui, je vous l’ai dit, il y a des permanences : la Restauration, l’ordre moral, l’affaire Dreyfus, le régime de Vichy, plus près de nous la réaction au temps de Giscard... Même si l’histoire ne se répète pas, il y a des similitudes troublantes. Et puis, je crois qu’il ne faut pas oublier le lourd héritage de la colonisation. Pendant un siècle et demi, on a martelé que les Noirs, les Arabes, les « bronzés » étaient d’une catégorie inférieure, même les plus grands esprits y ont cru. Cela laisse des marques. Le lepénisme

et, aujourd’hui, une partie de la droite sarkozyste s’appuient sur un inconscient collectif puissant. Ce ne sont pas quelques déclarations d’intention sur la « diversité », quelques cautions comme Rama Yade ou Rachida Dati qui inverseront la tendance : il y a un « racisme à la française », il faut en être bien conscient. Le Réveil : Doit-on donc appeler au rassemblement et à la résistance ? A.R. : Oui, je crois que le mot « rassemblement » autour des valeurs républicaines est d’actualité. « Résistance » est un mot plus fort, il évoque d’autres moments. Mais qu’il faille se dresser, oui, mille fois oui. En n’accordant pas pour cela un chèque en blanc à une gauche française qui me paraît encore bien timide. Les voies sont à trouver.


ACTUALITÉS LE RÉVEIL

Face à la xénophobie et à la politique du pilori :

liberté, égalité, fraternité Communiqué de 50 organisations - Publié le 4 août 2010 Une avalanche de discours et d’annonces provocatrices s’est abattue depuis plusieurs jours sur notre pays. Jusqu’au plus haut niveau de l’État, on entend des propos qui étaient jusqu’à présent l’apanage de l’extrême droite. Le Président de la République lui-même montre du doigt des communautés et des groupes sociaux entiers, stigmatise les Roms, les gens du voyage, les étrangers, les Français qui ne sont pas « de souche », les parents d’enfants délinquants, etc. Ce faisant, il ne lutte en rien contre la délinquance, qui est répréhensible pour tout individu sans distinction de nationalité ou d’origine : il met délibérément en cause les principes qui fondent l’égalité républicaine, alors que déjà une crise sociale et économique d’une extrême gravité menace la cohésion de la société tout entière. En quelques jours, les plus hautes autorités de l’État sont passées de l’exploitation des préjugés contre les gens du voyage au lien, désormais proclamé, entre immigration et délinquance, puis à la remise en cause de la nationalité française dans des termes inédits depuis 1945. Ce qui est à l’œuvre dans cette démarche s’inscrit dans une logique de désintégration sociale porteuse de graves dangers. Il ne s’agit plus du débat légitime en démocratie sur la manière d’assurer la sûreté républicaine, mais bien d’une volonté de désigner comme a priori dangereuses des millions de personnes en raison de leur origine ou de leur situation sociale. Quelle que soit la légitimité que confère l’élection, aucun responsable politique n’a reçu mandat de violer les principes les plus élémentaires sur lesquels la République s’est construite. Parce que le seuil ainsi franchi nous inquiète pour l’avenir de tous, nous, organisations associatives, syndicales et politiques diverses mais qui avons en commun l’attachement aux principes fondamentaux de la République laïque, démocratique et sociale, rappelons avec force que l’article 1er de la Constitution « assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion », et que toutes propositions qui méconnaîtraient cette règle fondatrice de la démocratie constituent une atteinte à la paix civile. Nous n’accepterons sous aucun prétexte que le nécessaire respect de l’ordre public soit utilisé pour créer des distinctions entre les habitants de ce pays et désigner des boucs émissaires. Nous appelons donc l’ensemble des citoyens de ce pays à manifester publiquement leur opposition aux stratégies de stigmatisation et de discrimination et aux logiques de « guerre » qui menacent le vivre ensemble. A cet effet, nous proposerons dans les prochains jours à la signature en ligne d’un « Appel citoyen » refusant toute politique de la peur ou de la haine. Et nous appelons à un grand rassemblement citoyen à l’occasion du 140e anniversaire de la République, le samedi 4 septembre, à 14h00, Place de la République à Paris, et partout en France, pour dire ensemble notre attachement à la liberté, à l’égalité et à la fraternité qui sont et qui resteront notre bien commun.

Signataires : AC !, Agir ensemble contre le chômage, Les Alternatifs, Les amoureux au banc public, Association de défense des droits de l’homme au Maroc (ASDHOM), Association France Palestine Solidarité (AFPS), Association des Marocains en France (AMF), Association nationale des gens du voyage catholiques (ANGVC), Association républicaine des anciens combattants (ARAC), ATTAC, Autremonde, Cedetim, Confédération française démocratique du travail (CFDT), Confédération générale du travail (CGT), La Confédération paysanne, La Cimade, Le Cran, Droit au logement (DAL), Emmaüs France, Europe Ecologie, Fédération pour une alternative sociale et écologique (Fase), Fédération des associations de solidarité avec les travailleurs immigrés (FASTI), Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale (FNARS), Fédération SUD Education, Fédération syndicale unitaire (FSU), Fédération des Tunisiens pour une citoyenneté des deux rives (FTCR), FNASAT-Gens du voyage, Fondation Copernic, France Terre d’Asile, Gauche unitaire, Groupe d’information et de soutien des immigrés (GISTI), Les Jeunes Verts, Ligue des droits de l’Homme (LDH), Ligue de l’enseignement, Marches européennes, Médecins du Monde, Le Mouvement de la Paix, Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (MRAP), le Nouveau parti anticapitaliste (NPA), le Parti communiste français (PCF), le Parti de gauche, le Parti socialiste (PS), Réseau d’alerte et d’intervention pour les droits de l’Homme (RAIDH), Réseau éducation sans frontière (RESF), SNESUP-FSU, SOS Racisme, Syndicat des avocats de France (SAF), Syndicat de la magistrature (SM), Union syndicale Solidaires, Les Verts. AOÛT-SEPTEMBRE  2010 - N°764 - LE RÉVEIL

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LE RÉVEIL actualités

Les cheminots et la Résistance La bataille pour la mémoire reste un combat Lettre de Didier Le Reste, secrétaire général CGT Cheminots, à Jean-Christophe Chanut, journaliste à La Tribune.

Monsieur, Dans l’édition du journal La Tribune, datée du 18 août 2010, vous avez commis un écrit intitulé « Séance de rattrapage - La bataille du rail ». Celui-ci a retenu notre attention et suscité de notre part les commentaires suivants. Sans vous prêter cette intention, force est de constater que ces dernières années, nombre de personnes s’évertuent à réécrire l’histoire en tentant de discréditer, d’affadir, de caricaturer voire de nier toutes formes de résistance qui ont remis et remettent en cause l’ordre établi. Au plan socio-économique, celles et ceux qui ont l’outrecuidance de s’opposer à la pensée unique, en refusant, par exemple, les privatisations, en défendant les acquis sociaux, en portant des propositions alternatives aux politiques imposées sont systématiquement accusés de ringardise, de conservatisme, de corporatisme, voire d’irresponsabilité. Par contre, ceux qui courbent l’échine en acceptant sans renâcler la casse des droits, qui négocient les reculs sociaux, 6-

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sont adoubés et présentés comme des modernistes, des pragmatiques, des gens sérieux. Il y a quelques jours, un éditorialiste d’un quotidien national regrettait dans un pamphlet anti-CGT, que celle-ci ne prenne pas de vacances en vitupérant la CGT de Dunkerque qui a eu - Ô sacrilège ! - la cynique audace d’obtenir, après un an de fermeture, le redémarrage de la raffinerie Total. C’est bien connu, les forces libérales et leurs relais médiatiques ne supportent pas la contestation sociale, les empêcheurs de licencier en rond et exècrent par-dessus tout les résistances aux sacro saintes politiques de maximisation des profits. Cela dit, nous ne sommes pas surpris qu’à la faveur de la sortie du film de René Clément, La bataille du rail, en version remasterisée et restaurée, des voix s’élèvent pour crier à l’imposture et tenter de remettre en cause la réalité de la résistance lors de la deuxième guerre mondiale et là, singulièrement, celle des cheminots. Cette démarche est encouragée aujourd’hui par les politiques auxquelles on est confronté, faites de stigmatisation, d’opposition, de division, de haine, de peur. Les libertés sont sérieusement écornées, le droit de grève attaqué, les acquis sociaux laminés, les services publics saccagés ! On est loin des idéaux de la Résistance et du contenu du programme du Conseil national de la Résistance ! Dans votre papier, vous empruntez une fumeuse démonstration mathématique de Raphaël Delpard, auteur d’un documentaire douteux baptisé Les convois de la honte, selon lequel il n’y a eu que « 10 % de résistants au sein de la SNCF soit 41 000 cheminots sur un total de 410 000 ».

Que ça plaise ou non, les cheminots ont résisté, jouant un rôle déterminant dans la lutte contre l’occupant nazi et ils ont, pour ce faire, payé un lourd tribut à la paix, à l’indépendance et à la liberté. Je dois vous rappeler, Monsieur Chanut, que 8 938 cheminots y laissèrent leur vie, 15 977 ont été blessés pour faits de Résistance, 6 500 furent internés ou déportés dont 1 157 sont morts dans les camps d’extermination. Qu’il y ait eu, au sein de la SNCF, des collaborateurs zélés et des agents obéissants vis-à-vis du gouvernement de Vichy et des occupants allemands qui doublaient la hiérarchie dans les entreprises ferroviaires, c’est l’évidence même. Des représentants de la SNCF ont notamment participé à l’élaboration des conditions techniques (horaires, matériels) des transports de déportation. Nous sommes bien placés pour le savoir, notre Fédération ayant connu, dès 1939, la répression, l’arrestation de nos dirigeants engagés contre le fascisme et contre la guerre, puis la dissolution des syndicats, l’emprisonnement, la déportation, les assassinats de nombreux militants. Que la corporation, dans sa plus large composition, ce soit particulièrement distinguée par des actes de résistance, de désobéissance, de désorganisation et de sabotages des transports, malgré un attachement légendaire à leur statut depuis 1938, les cheminots sont porteurs d’un esprit de solidarité et de lutte, valeurs qui, dès l’occupation, structurent de manière prépondérante une conscience de résistance reconnue historiquement et politiquement. En témoignent les travaux d’historiens d’horizons divers et le fait que la SNCF fut la seule entreprise à se voir décerner la Légion d’honneur et la


ACTUALITÉS LE RÉVEIL

Croix de guerre avec palmes pour son attitude pendant la deuxième guerre mondiale et dans la libération du pays. Le déclenchement de la grève insurrectionnelle des cheminots du 10 août 1944 donnait le signal du soulèvement du peuple parisien qui fut décisif dans la libération de Paris. Cette grève insurrectionnelle est la seule grève qui est officiellement et annuellement commémorée avec les honneurs militaires, par une cérémonie à l’Arc de Triomphe. Voilà exposées les réflexions que nous inspire votre écrit qui succède à d’autres de tonalité similaire. Soyez assuré que nous continuerons avec lucidité et détermination à honorer et à défendre la mémoire des cheminots résistants, de tous les résistants et à porter haut les valeurs du programme du Conseil national de la Résistance. En restant à votre écoute pour tout échange que vous jugerez utiles de solliciter, dans l’attente, je vous prie d’agréer, Monsieur, l’expression de mes sentiments respectueux. Montreuil, le 24 août 2010

Roms, gens du voyage Le gouvernement divise pour mieux régner

Le Président de la République a décidé de plusieurs mesures concernant les Roms et les gens du voyage. Après avoir stigmatisé une population entière, après avoir fait l’amalgame entre délinquance et communauté de personnes, le Président de la République ne se décide toujours pas à les prendre en considération. En prenant ces mesures, le Président de la République désigne une communauté dans son ensemble comme responsable de tous les problèmes et de tous les maux de la société. Stop aux mesures d’annonce qui ne résoudront rien ! Stop aux exigences d’un gouvernement qui, en plus de jouer la provocation, ne fait que mettre le feu aux poudres ! Le cas des personnes venues des pays de l’est de l’Europe est un sujet qui doit être traité au plan européen. Aujourd’hui, un sort inhumain et scandaleux est réservé aux Roms, ces millions d’Européens abandonnés à l’extrême pauvreté, ballottés d’un pays à l’autre, voués aux discriminations, aux stigmatisations et au racisme. Comme le demande Thomas Hammarberg, commissaire aux droits de l’homme au Conseil de l’Europe, il faut que les États membres respectent leur engagement

de créer une stratégie nationale et régionale contre la discrimination de ces communautés et pour le renforcement du principe d’égalité. Cette recommandation sur les politiques concernant les Roms et les gens du voyage en Europe a été votée en 2008 par le Comité des ministres au Conseil de l’Europe. Elle doit être appliquée. Quant aux gens du voyage, il ne suffit pas d’exiger le démantèlement de quelques centaines de camps illégaux. L’ARAC demande que le gouvernement travaille, en concertation avec les collectivités locales, à l’application de la loi Besson prévoyant la mise à disposition d’aires d’accueil. L’ARAC en appelle aux partis de gauche, au monde associatif et syndical et aux militants, trop c’est trop. Ce gouvernement affaibli est dangereux. En le laissant surfer sur la vague sécuritaire, nous lui permettons à nouveau de diviser pour mieux régner. C’est insupportable, nous ne laisserons pas faire ! Claude Delevacq

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LE RÉVEIL actualité

Gaz et électricité

Concurrence et hausse des prix L’histoire de la casse organisée d’un joyau de notre nation, financé par les Français et indispensable à l’indépendance énergétique de notre pays. Ou comment enrichir des entreprises privées sur le dos de tout un peuple. En 1946, selon le programme du Conseil national de la Résistance, sous l’impulsion des salariés de l’énergie et du ministre communiste Marcel Paul, les industries électriques et gazières étaient nationalisées. Il s’agissait de reconstruire la France et de se donner les moyens de cette reconstruction en offrant, sur le plan national, des outils performants notamment dans le domaine de l’énergie : « Le retour

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à la nation des grands moyens de production monopolisée, fruits du travail commun, des sources d’énergie, des richesses du sous-sol, des compagnies d’assurances et des grandes banques » (extrait du programme du CNR). A partir de 1946, de lourds investissements ont été faits par la nation pour produire, transporter et distribuer l’électricité dont le pays avait besoin. EDF a ainsi fourni un kw parmi les

moins cher, le plus proche du prix coûtant, les tarifs étant fixés par l’État. Ce sont les usagers qui ont payé ces investissements en acquittant leurs factures d’électricité. A partir des années 90, les gouvernements inscrits dans le concept du libéralisme économique prôné par l’OMC (Organisation mondiale du commerce) construisent l’Europe de « la concurrence libre et non faussée ». Les directives européennes se succèdent, instituant la concurrence dans les domaines jusque-là attribués à de grands services publics : Télécom, électricité et gaz, transport ferroviaire, La Poste… Dans les années 2000, tout s’accélère, la France transpose les directives européennes : - 6 lois adoptées depuis l’an 2000 pour ouvrir le marché, - ouverture progressive puis totale des marchés électricité et gaz, - GDF marié à Suez et privatisé, - E DF transformée en société anonyme, - morcellement d’EDF et de GDF en plusieurs et nombreuses entreprises, - obligation faite à EDF de racheter des énergies renouvelables à des prix, souvent très élevés(1) et compensés financièrement par l’ensemble des usagers. En France, les salariés de l’énergie, appuyés par de nombreuses organisations et défenseurs du service public, combattent l’ouverture à la concurrence et obtiennent le maintien des tarifs réglementés (fixés par l’État). On nous a dit et répété « la concurrence fait baisser les prix ». Mais, dès l’ouverture du marché, les prix ont flambé : à l’échelle européenne, entre 2005 et 2007, hausse générale des prix de l’énergie : + 18 % pour le gaz domestique, + 14 % pour l’électricité domestique. En France le prix du gaz s’est envolé : + 51,8 % depuis 2004.


international LE RÉVEIL Évolution des prix du gaz aux particuliers Près de 90 % des 10,8 millions de foyers raccordés au gaz naturel sont soumis aux tarifs réglementés proposés par GDF Suez. Jusqu’en 2009, ces tarifs étaient fixés par les ministres de l’Économie et de l’Énergie. Mais c’est désormais GDF Suez qui décide des éventuels changements de prix, sous le contrôle de la CRE (Commission de régulation de l’énergie). Le nouveau mécanisme mis en place par le gouvernement l’exonère de prendre la décision d’autoriser ou de refuser les hausses ! 1er avril 2010 : hausse du gaz + 9,7 %. Le mécanisme de fixation des tarifs du gaz aux usagers mis en place par le gouvernement prévoit que ceux-ci soient indexés sur les prix du pétrole. Or si les cours du pétrole augmentent, les prix à l’approvisionnement du gaz stagnent. Donc la nouvelle envolée du prix du gaz ne peut pas être expliquée par une hausse des coûts ! Il s’agit d’accroître encore les marges financières de GDFSuez au seul bénéfice des actionnaires. Le groupe a réalisé un bénéfice de 4,5 milliards d’euros en 2009.

Prix de l’électricité En France, malgré un racolage souvent indécent, les profits tant espérés par les nouveaux fournisseurs d’électricité ne sont pas au rendez-vous ! Les raisons : - avec le parc nucléaire (payé par les Français), EDF produit 80 % de son électricité à un coût très compétitif. Coût du kwh domestique : en Allemagne : 20,9 centimes d’euro, en France : 11,5 centimes d’euro, - le maintien provisoire des tarifs réglementés (EDF), calculés sur la base des coûts de production, transport et distribution. Ainsi, en France les tarifs sont trop bas : ils nuisent à la concurrence ! Échec de la concurrence : 96 % des Français sont restés fidèles aux tarifs réglementés de leur opérateur historique EDF. Bon élève de la classe libérale européenne, le gouvernement Fillon entend trouver la parade : un projet de loi pour redonner vie à la concurrence : la loi

« NOME » (Nouvelle organisation du marché de l’électricité) ! Objectifs : - Octroyer aux concurrents d’EDF la possibilité d’acquérir à prix coûtant 1 000 millions de KW, soit 25 % de la production annuelle d’EDF et transférer ainsi une partie de la rente nucléaire à des groupes privés.C’est un hold-up d’État ! - Supprimer les tarifs réglementés : pour les entreprises à compter de 2015, pour les particuliers c’est la CRE qui les fixera, celle-ci devant intégrer « une référence aux prix du marché ». Ce qui permettra d’aligner progressivement les tarifs sur le prix, bien plus élevé, du marché. Il faut empêcher cela et exigeons : - L a création d’un pôle public de l’énergie : une structure juridique indépendante qui fixe un cadre contraint (législatif) à toutes les entreprises du secteur, quel que soit leur type de propriété, pour permettre d’aller vers de nouvelles nationalisations et ainsi répondre équitablement à l’exigence

de fourniture d’énergie à tous et au moindre coût. Une maîtrise publique qui passe par la démocratisation des entreprises, des droits accrus pour les salariés et les usagers. - Une maîtrise publique à l’échelle européenne, à créer sur la base d’une coopération renforcée entre pays, autour d’objectifs communs tels que la réduction des gaz à effet de serre, la recherche, le droit à l’énergie et la réduction des inégalités. - Une agence européenne de l’énergie, regroupant toutes les formes d’énergie existantes, et dont les missions consisteraient à valoriser les groupements d’achat à long terme, la sécurité d’approvisionnement ou bien encore l’interconnexion des réseaux nationaux, dans le respect et l’indépendance de chaque pays. (1) Jusqu’à 58 centimes d’euro pour le solaire photovoltaïque.

Produire autrement Dépasser le système capitaliste suppose de produire et d’entreprendre autrement, d’échanger et de consommer autrement, d’épargner et de financer autrement le développement national, européen et international. Sociétés coopératives, mutuelles d’assurances, banques de l’économie sociale, associations… Des hommes et des femmes ont choisi pour produire, entreprendre, échanger, financer, des outils coopératifs et mutualistes qui ont fait la preuve qu’il est possible d’organiser l’économie dans tous ses aspects hors du champ capitaliste de l’exploitation des hommes et de la nature, du profit immédiat et de la spéculation. De plus en plus de citoyennes et de citoyens aspirent à consommer autrement, à travailler et produire autrement. Comment peut-on transformer ce phénomène de société en projet de société ?

Quelle complémentarité entre services publics et économie sociale ? Entre pôle public, social et financier et banques coopératives ? Quels dangers de dérive pour ces outils aujourd’hui face à euxmêmes, au capitalisme et aux institutions européennes ? Comment l’ARAC peut-elle contribuer à ces évolutions par des voies concrètes de résistance et de construction, et promouvoir un nouveau mode de développement durable, renouvelable sur le plan écologique, générateur de nouvelles solidarités sociales d’épanouissement individuel et d’émancipation humaine, démocratique et citoyen ? Un vaste sujet qui prend place dans notre réflexion pour une véritable transformation de la société. Claude Delevacq

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LE RÉVEIL INTERNATIONAL

Salah Hamouri : 2 000 jours en pris « Une tache indélébile sur les valeurs Jean-Claude Lefort, président du Comité de soutien à Salah Hamouri (1) et député honoraire du Val-de-Marne, répond aux questions du Réveil.

Salah Hamouri dans sa prison le 13 août dernier

Le Réveil : Le 4 septembre 2010, cela fera 2 000 jours que le jeune Franco-Palestinien, Salah Hamouri, est en prison en Israël, suite à une décision d’un tribunal militaire d’occupation, illégal au regard du droit international. Les autorités françaises ne semblent pas avoir agi avec conséquence pour sa libération. Que vous inspire cette situation unique au demeurant ? Jean-Claude Lefort : Oui, cette situation est absolument unique et significative. Salah Hamouri est innocent. L’acte d’accusation du tribunal militaire d’occupation parle d’une « intention » qu’aurait eue Sa10 -

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lah d’agir contre le rabbin Yossef Ovadia. Une simple « intention ». Et il a pris sept ans de prison pour cela, lui qui n’avait pas 20 ans à l’époque. Secondement : Salah est Franco-Palestinien mais, du fait qu’il réside à Jérusalem-Est occupée et considérée illégalement comme la capitale d’Israël, Salah n’a pas d’autre nationalité de jure, en droit ou de fait, comme on voudra, que celle de Français puisque la dimension palestinienne de sa nationalité lui est refusée, comme elle est refusée à tous les habitants palestiniens de Jérusalem-Est. Troisièmement : contrairement à tous les autres concitoyens en difficulté à l’étranger, le Président de la République refuse de recevoir ses parents à l’Élysée. Il refuse. C’est incroyable : il a reçu toutes les familles qui avaient des parents dans des situations difficiles à l’étranger, sauf dans un cas : il refuse de recevoir la famille de Salah Hamouri, dont la mère est née à Bourg-enBresse ! Salah est innocent et il le sait et il ne reçoit pas sa mère et il ne prononce jamais son nom ! De sorte que Salah est, malgré son jeune âge, le plus vieux prisonnier politique français à l’étranger, pour lequel le pouvoir ne fait rien de sérieux. On ne nous fera pas croire que Sarkozy a pu libérer Clotilde Reis d’Iran et qu’il ne peut pas faire libérer Salah d’Israël. Où alors quoi ?

En fait, et sans aucun doute possible, c’est clairement politique. Son alignement total vis-à-vis des autorités israéliennes l’empêche d’agir pour autant qu’il le souhaite vraiment, ce dont je ne suis pas sûr du tout évidemment. Car il y a alignement absolu sur Israël mais aussi une certaine dose de racisme dans tout cela. J’ose l’affirmer. Cette ségrégation dont est victime Salah, qui est insupportable, n’est pas que de nature de « stratégie géopolitique », elle est aussi vénéneuse. Et donc honteuse. C’est pourquoi cette affaire, car il s’agit d’un affaire d’État, constitue une tache indélébile placée par le Président sur les valeurs de la République. Mais c’est aussi pourquoi nous ne lâchons pas ! C’est la politique qui a mis Salah en prison, c’est la politique qui l’en sortira avant les sept ans qu’il devrait faire. Nous avons la justice et le droit de notre côté. Et aussi les valeurs de la République. Nous continuerons à exiger du Président qu’il agisse pour obtenir la libération sans condition de Salah, notre ami, notre jeune frère. A nous tous d’amplifier sans renoncer le soutien à Salah et cette exigence : liberté ! (1) www.salah-hamouri.fr


international LE RÉVEIL

Jean-Claude Lefort, avec Hassan et Denise, les parents de Salah Hamouri

on de la République » Le 4 septembre 2010, cela fera 2 000 jours que mon fils, Salah Hamouri, jeune Franco-Palestinien est enfermé dans les prisons de l’occupation israélienne. Il devra encore y passer plus d’un an avant de retrouver la liberté et sa famille. Salah a été arrêté le 13 mars 2005, jugé le 17 avril 2008 et condamné à sept ans de prison selon le principe du « plaider coupable » israélien par le tribunal militaire d’Ofer, situé près de Ramallah dans les territoires occupés. Il a été accusé de tentative de préparation d’un complot visant une personnalité israélienne (le rabbin Ovadia Yossef) et de l’appartenance à la branche étudiante du FPLP (Front populaire de libération de la Palestine). Cette histoire en Palestine est malheureusement banale, il y a 10 000 prisonniers politiques dans les prisons israéliennes, des jeunes, des femmes, des enfants, des hommes âgés et malades pour certains… Des résistants à l’occupation de leur pays. Mais Salah est Français, il est né et habite à Jérusalem-Est, comme tous les habitants palestiniens de cette partie occupée de la ville, il possède une carte d’identité qui mentionne une résidence mais pas de nationalité. Salah a donc

2000 jours, l’arbitraire et le silence une seule nationalité, un passeport français. Il est aussi Français que le soldat Franco-Israélien fait prisonnier de guerre par le Hamas en juin 2006 dont le sort émeut tellement M. Sarkozy qu’il a reçu son père plusieurs fois. Pas moi. Le gouvernement français a toujours demandé la libération de Guilad Shalit (et je n’ai rien contre), mais pour Salah il a demandé un « jugement rapide » et ensuite une timide demande « d’un geste de clémence » de la part des autorités israéliennes ; demande par ailleurs refusée par le Premier Ministre israélien au motif que Salah « ne voulait présenter ni excuses ni regrets »… Argumentation d’ailleurs reprise par le gouvernement français, mais Salah ne peut regretter ce qu’il n’a pas fait et il ne s’excusera pas de vivre sous occupation et d’y résister ! Après des demandes, des courriers et une forte mobilisation populaire, j’ai été reçue deux fois à l’Élysée mais jamais par le Président, contrairement à d’autres familles de Français en difficulté hors de France (les familles de Guilad Shalit, de Clotilde Reis, de Florence Cassez, etc.) Notre dernier entretien à

l’Élysée date du 27 juin 2010 avec le plus proche conseiller de Nicolas Sarkozy. J’ai écouté des paroles, mais le résultat est là : le 4 septembre, Salah aura passé 2 000 jours dans les cellules des prisons de l’occupation. Il a eu 20 ans en prison, puis 21, 22, 23,24, 25… et bientôt 26 ans. Mais la mobilisation autour de Salah, qui est aussi une mobilisation autour des prisonniers, est bien là et ne faiblit pas, Salah reçoit beaucoup de messages de soutien qu’il partage avec ses camarades et cela l’aide à garder le moral. Reste une question majeure : comment accepter cette situation qui traduit de manière incontestable un effroyable et cynique « deux poids, deux mesures » ? Devrions nous accepter l’inacceptable ? C’est une question politique mais aussi morale. Elle concerne chacune et chacun qui est attaché à la justice et au droit. Elle constitue un défi humain et politique majeur qui dépasse le cas de mon fils. Denise Hamouri

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LE RÉVEIL international

Afghanistan

Les troupes françaises et de l’OTAN

doivent être retirées

Lapidation,

un terme venu du moyen-âge… Et pourtant, tout près de chez nous, une femme aujourd’hui est condamnée à la peine capitale par lapidation par le régime iranien. Cette femme est en prison depuis cinq ans, où elle attend, dans des conditions épouvantables, le réexamen de son cas, prévu le 15 août dernier, mais qui n’est toujours pas à l’ordre du jour. Toutes les femmes du monde entier doivent se lever pour exiger la libération immédiate de Sakineh Mohamadi Ashtiani de la prison de Tabriz, quelles que soient les manipulations faites autour de cette affaire. Dans notre société du XXIe siècle, il ne peut y avoir ce type de répression d’un sexe sur un autre, d’un monde sur un autre, d’une civilisation sur une autre. Lapidation, coups de fouet, ce sont de mots qui ne doivent plus exister ni pour Sakineh ni pour personne. Halte à cette barbarie, que l’ONU fasse respecter les promesses faites par le régime des mollahs en 2002 et en 2008 sur l’abolition de ces châtiments ! La dignité et la liberté de toutes les femmes sont engagées à partir du moment où une seule d’entre elles peut subir ce traitement. Sakineh, ma sœur de combat, tu n’es plus seule. Annick Chevalier 12 -

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L’ARAC partage l’émotion et la douleur des familles et des proches des militaires français tués ou blessés en Afghanistan. Ce nouveau drame soulève, une fois encore, la question de l’intervention militaire de l’OTAN dans ce pays et, notamment, de la participation de la France à cette guerre américaine sans issue, sans légitimité politique et sans espoir pour l’avenir du peuple afghan. Plus le temps passe, plus il y a de victimes et plus l’impasse s’aggrave. Il n’y a pas de solution militaire à la crise afghane. Les troupes françaises et l’ensemble des troupes de la coalition doivent être reti-

rées dans les plus brefs délais. Un débat doit être immédiatement ouvert au Parlement. Une conférence internationale doit être organisée, sous l’égide des Nations unies, pour la reconstruction et l’aide au développement dans toutes ses dimensions, pour le rétablissement de l’autorité de l’État et de la souveraineté du pays, pour réunir les conditions d’un consensus de tous les pays de la région afin de garantir un tel processus. Mardi 24 août 2010

Communiqué de l’ARAC

Négociations israélo-palestiniennes Les conditions d’un accord final sont fixées par les résolutions de l’ONU Après l’annonce d’une reprise des négociations israélo-palestiniennes, le 2 septembre prochain, l’ARAC souligne que les conditions d’un accord final, fixées par les résolutions des Nations unies, dépendent d’un engagement réel et déterminé de la France, de l’Union européenne et de l’ensemble des pays membres du Conseil de Sécurité. Ces derniers doivent veiller à l’application de ces résolutions, y compris celles concernant les réfugiés, et à la mise en œuvre d’un véritable processus politique mettant fin à la colonisation, à l’occupation et au blocus de Gaza. Une paix juste et durable au Proche-Orient passe par l’édification d’un État palestinien indépendant, à côté de l’État d’Israël, dans les frontières de 1967, avec Jérusalem-Est pour capitale... Agir pour la paix au Proche-Orient est une responsabilité collective qui s’impose à tous les États pour l’application du droit international. C’est la base de principe sur laquelle les autorités françaises et européennes doivent agir. Le 21 août 2010


LE CAHIER MÉMOIRE

le réveil

N° 764 Août-Septembre 2010

des combattants

Pour l’amitié, la solidarité, la mémoire, l’antifascisme et la paix

Son action après 1945

Édité par le Réveil des combattants - 2 place du Méridien - 94807  Villejuif - Tél. 01 42 11 11 12

Voici donc la seconde partie de l’interview de Marie-Claude Vaillant-Couturier réalisée par notre ami l’historien Claude Willard annoncée lors de notre édition de juin-juillet. Il relate la vie et l’action de Marie-Claude Vaillant-Couturier de mai 1945 à mai 1956. Là s’arrête la conversation entre l’historien et la militante. Mais l’action de cette dernière se poursuivit par la suite avec la même détermination. Marie-Claude Vaillant-Couturier libérée s’engagea d’abord pour obtenir que justice soit rendue et que les criminels nazis paient leurs crimes, d’où le témoignage qu’elle présenta au procès de Nuremberg. Elle consacra aussi un temps important à la cause des femmes et devint dirigeante de l’Union des femmes françaises (UFF) et, en 1945, elle est élue secrétaire générale de la Fédération démocratique internationale des femmes (FDIF). Marie-Claude Vaillant-Couturier apporte aussi son concours à la vie et à l’action du Parti communiste français dont elle est membre du Comité central et qu’elle représente d’abord à l’Assemblée constituante. Plus tard elle sera élue députée à l’Assemblée nationale. Par cela même, elle montre son souci permanent des intérêts populaires. Mais son investissement le plus lourd durant cette période allant de 1945 à 1956, elle le portera sur l’action pour les femmes et pour la paix. Ce qui l’a conduit à parcourir toute la planète. En fait, Marie-Claude Vaillant-Couturier confirmera, dès son retour de captivité, sa volonté de consacrer sa vie au service de l’humain. Elle en fera l’objet principal de son existence.

ÉDITO - Par Paul Markidès

Marie-Claude Vaillant-Couturier


LE RÉVEIL DOSSIER

Marie-Claude Vaillant-Couturier L’investissement d’une vie Suite de l’interview de Marie-Claude Vaillant-Couturier réalisée par Claude Willard en 1983 Claude Willard : La Libération, ensuite ? Marie-Claude Vaillant-Couturier : Oui, par l’Armée rouge, début mai 1945. Viennent ensuite à notre aide des prisonniers de guerre français, notamment le neveu de d’Astier, le lieutenant Jean d’Astier de la Vigerie, puis le général Allard et le fils de Rémi Roure, à la recherche, le premier de sa femme, le second de sa mère ; mais l’une et l’autre sont mortes. Le fils de Rémi Roure se suicide à la grenade et, quand Rémi Roure arrive, nous devons lui apprendre la double tragédie. C.W. : Dans Le Monde du 16 juin, ce grand journaliste te rend un hommage vibrant : « Une femme admirable dont on ne dira jamais assez le dévouement, Mme VaillantCouturier n’a pas voulu revenir, après 18 mois d’Auschwitz et des mois et des mois de Ravensbrück, tant qu’il restera là-bas un de ses compatriotes. A plusieurs reprises, 14 -

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on l’en a priée. « Non, dit-elle, si je partais, ils se croiraient encore plus abandonnés ». Chaque jour, cette magnifique Française parcourt les blocks, relève les courages, donne de l’espoir qui n’est trop souvent que de l’illusion. Le mot de sainteté vient à l’esprit quand on voit cette grande sœur de la Charité auprès de ces hommes et de ces femmes dont plusieurs meurent chaque jour ». M.C.V.C. : Le rapatriement se fait assez. Je ne veux ni ne puis rentrer avant l’évacuation complète du camp, car je suis la seule Française qui sache le russe : je peux servir d’interprète entre les services sanitaires de l’Armée rouge et les malades françaises. Le 25 juin, j’embarque à l’aéroport de Berlin et arrive au Bourget où personne n’est prévenu de mon retour. J’en suis finalement heureuse car, seule, je peux savourer pleinement la joie d’être en France, de respirer à pleins poumons l’air de France. J’en

Au début des années 1950, à la section du PCF de Villejuif. De gauche à droite : Louis Dolly, maire de Villejuif, MarieClaude VaillantCouturier et Louis Lequy, secrétaire de section. Collection Carlos Escoda.

1 - Pierre Villon, mari de MarieClaude VaillantCouturier. 2 - Fils de Pierre et de MarieClaude. 3 - Elle sera plus tard maire adjointe d’Ivry. 4 - Simone Bertrand travaillera à la FDIF, à Paris puis à Berlin. Auteur de Mille visages, un seul combat.

conserve un souvenir inoubliable. Émile Valley, secrétaire général de Mauthausen, qui attend des déportés, me propose de me conduire à Paris au siège du Comité central du Parti communiste français. Je débarque au 44 rue Le Pelletier, tombe sur Maurice Thorez, Jeannette et Laurent Casanova qui me font fête. Ne soupçonnant nullement que j’arrive directement du Bourget, personne ne me parle de Pierre (1). Je gamberge : est-il mort ? A-t-il refait sa vie ? C’est mon père, que Maurice Thorez a vu il y a quelques jours auparavant, qui prévient Pierre. Ni Thomas (2), ni moi ne nous reconnaissons : j’ai quitté un bambin de 4 ans et je retrouve un garçon de 8 ans. Le lendemain, 28 juin, ouverture du Xe Congrès national du PCF. Encore vidée et nullement dans le bain, je nage en plein brouillard. C.W. : Pierre est élu au Comité central et toi, suppléante. M.C.V.C. : J’apprends aussi que j’ai été cooptée comme membre de l’Assemblée consultative, mais qui bientôt ne siège plus. Après une intervention chirurgicale, je pars 15 jours avec Thomas en convalescence, en Savoie, chez Françoise Leclercq, à Notre-Dame-de-Bellecombe. Je reviens en août. Outre plusieurs conférences sur les camps nazis, je suis absorbée par le Comité d’initiative pour le 1er congrès international des femmes. Secrétaire générale de ce comité, Nicole de Barry et, parmi ses animatrices, Odette Dugué (3) et Simone Bertrand (4). Ce travail me passionne. Ayant appartenue au Comité international de la Résistance d’Auschwitz et de Ravensbrück, je suis particulièrement sensibilisée par cette solidarité internationale. A Ravensbrück, nous ressentions fortement la nécessité de créer, après la guerre, une organisation internationale des femmes… Dès ce moment et jusqu’à maintenant, à mes yeux le problème de la paix prime tous les autres. C.W. : Avant le congrès internatio-


DOSSIER LE RÉVEIL

nal des femmes, tu es réélue député à l’Assemblée constituante, le 21 octobre 1945, dans le 4e secteur de la Seine, sur une liste que conduit Maurice Thorez. M.C.V.C. : Je participe activement à la campagne. Mais l’essentiel de mon temps est consacré à l’Union des Femmes Françaises (UFF) et à son congrès mondial ... où je suis élue secrétaire générale. C.W. : Trois semaines plus tard, le 20 décembre 1945, tu es décorée de la Légion d’honneur avec la citation suivante : « Arrêtée pour fait de résistance est déportée à Auschwitz le 22 novembre 1942, puis à Ravensbrück, après avoir, pendant la captivité, soutenu ses compagnes par son exemple et l’aide qu’elle leur apportait, a fait preuve du plus beau dévouement, après la libération du camp, en y restant volontairement pour assurer les soins aux malades et leur rapatriement, jusqu’au jour où ils ont été tous évacués. » M.C.V.C. : Décorée à titre militaire par le général Legentilhomme, aux Invalides, sur le front des troupes.

le banc des témoins, je passe devant les principaux dignitaires nazis, en particulier Goering : je me paye le luxe de passer très lentement devant eux, regardant chacun dans le blanc des yeux, pensant : « Par mes yeux, ce sont des millions de morts qui vous accusent ! ». Le président du tribunal, le lord Justice Lawrence, qui redoute un moment que je leur crache à la figure, décide que désormais les témoins entreront directement dans le box. En m’asseyant à la barre, je me dis : « Je parle pour toutes celles qui ne sont plus là. Pourvu que je n’oublie rien. » Et j’évoque les expériences sur les cobayes humains, à Auschwitz les stérilisations, à Ravensbrück les microbes inoculés aux jeunes Polonaises que cyniquement ils baptisent « lapins ». Je rappelle les exterminations massives par chambre à gaz ou piqûres mortelles. Je décris le « jugendläger » (6) où vieilles et malades subissent l’appel durant des heures, dans la neige et le froid, à moitié nues, sans nourriture, jusqu’à ce que souvent mort s’ensuive.

Obtenir justice

Au service de la justice, des femmes et de la paix

C.W. : Le 26 janvier 1946, tu es appelée à témoigner au procès historique de Nüremberg.(5) M.C.V.C. : Oui, à la demande d’un des procureurs, Dubost, ami de Pierre. Dans ce royaume de l’horreur qu’était Auschwitz, dans cette machine à broyer les corps et les âmes, je me souviens avoir dit à une amie : « Si quelques-uns sortent vivants d’ici et racontent ce qu’ils ont vécu, personne ne pourra les croire. Et pourtant... ! » Je reflétais là un sentiment très général : un des mobiles de survie des déportés était la volonté que le monde sache, que tant de crimes ne restent ni inconnus ni impunis. Je me dis que j’ai enfin l’occasion de parler au nom de toutes, notamment des mortes. Pour gagner

C.W. : Pendant plusieurs années, tu exerces les fonctions de secrétaire générale de la nouvelle Fédération démocratique internationale des femmes (FDIF), de membre du Comité central du PCF et de député. Quelle est ton activité de secrétaire générale de la FDIF ? M.C.V.C. : Nous essayons de développer et de coordonner les campagnes sur les grands thèmes qu’a dégagés le congrès constitutif. A ce congrès, nous avions fait le serment de lutter pour anéantir complètement le fascisme, créer une paix juste et durable, pour garantir le bonheur de nos enfants et de nos familles... Au nom de la FDIF, je fais, en septembre 1946, un long périple en Amérique

5 - Tribunal militaire international ouvert le 20 novembre 1945, il juge les grands criminels de guerre nazis. Le procureur général français était Auguste Champetier de Ribes. 6 - Jugendläger : littéralement camp de jeunes. Ancien pénitencier destiné aux jeunes délinquantes allemandes transformé par les SS en centre d’élimination par empoisonnement. 7 - Kominform : Bureau d’information des partis communistes, instance de coordination et d’échanges d’expériences créé du 22 au 27 septembre 1947, entre 9 Partis communistes, soviétique, yougoslave, polonais, italien, français, bulgare, roumain, hongrois et tchécoslovaque. 8 - Ce rapport entérinait le partage du monde en deux camps, partage vu du côté du camp socialiste.

latine... La FDIF se développe à son 2e congrès à Budapest (1er au 6 décembre 1948), congrès marqué à la fois par une volonté d’élargissement et par le sceau du sectarisme. Élargissement de notre audience à de nombreux pays, mais mise à l’index des Yougoslaves, à la suite de la condamnation du “titisme” par le Kominform (7) : les déléguées yougoslaves avaient distribué du matériel de propagande et, à l’instigation de Jeannette, nous sommes allées le leur rapporter avec une certaine rudesse. Manichéisme enfin, reflétant, dans notre style, le rapport Jdanov sur les deux camps (8). C.W. : Que penses-tu sur le coup de l’exclusion des Yougoslaves ? M.C.V.C. : J’avais connu des Yougoslaves dans les camps et elles s’étaient conduites comme nous. Certes, j’éprouvais le sentiment que la rupture avec la Yougoslavie de Tito portait préjudice au mouvement communiste international. Mais ma réflexion s’arrêtait là. Je n’avais nul élément qui me permette de douter du bien fondé de la position et du Kominform et du PCF. Quel que soit ce sectarisme, la FDIF œuvre efficacement pour les droits des femmes, le bonheur des enfants, pour la paix, avec la tendance, légitime à mes yeux, de privilégier la lutte contre les dangers de la guerre. Car la démocratie, y compris l’extension des droits de la femme, la possibilité pour chaque enfant d’un développement harmonieux, passe par la paix. Ceci dit, je comprends fort bien qu’il y ait des femmes qui s’intéressent plus que moi, et de façon prioritaire, aux droits de la femme et aux problèmes de l’enfance.

La cause des femmes C.W. : Tu ne te sens alors nullement « féministe » ? M.C.V.C. : Ceci s’explique en grande partie par ma vie elle-même. J’ai toujours pu ou su garder une grande

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LE RÉVEIL DOSSIER

indépendance. Par exemple, lorsque je vivais avec Vaillant-Couturier, je ne voulais pas prendre son nom et, même mariée, s’il avait vécu, j’aurais conservé mon nom de jeune fille. J’ai fait un métier d’homme, travaillant avec des hommes. Certes, j’ai pris conscience d’une certaine discrimination lorsque la Fédération syndicale du Livre, en 1938, regimba contre mon emploi de reporter-photographe. Mais je ne discerne pas clairement, et ce jusqu’à une date relativement récente, que les femmes sont victimes d’exploitations spécifiques variées. Pour moi, je me répète, la paix constitue le problème décisif. C.W. : Certains historiens mettent l’accent sur le rôle modeste des femmes dans la direction du PCF. M.C.V.C. : Je ne le ressens absolument pas à l’époque. D’ailleurs, la place des femmes est plus importante dans notre parti que dans les autres ... Comme membre du Comité central, je suis plusieurs fédérations. D’abord, la Haute-Savoie : là se pose crûment le problème des armes. Quand j’explique à certains camarades qu’il n’est plus question de jouer à la guerre et qu’entreposer des armes prête à toutes les provocations, j’ai le sentiment de prêcher dans le désert. Je suis ensuite envoyée, parce que je sais l’allemand, en Moselle et en Alsace. Là, des problèmes singulièrement délicats, celui des Malgré-Nous (9) et la très forte animosité entre ceux qui ont participé à la Résistance et les autres. Il ne faut pas tout casser...

Députée au contact des populations C.W. : Ton activité comme députée ? M.C.V.C. : Nous étions alors 180 M.C.V.C. : députés communistes et j’étais plus souvent à la FDIF qu’à l’Assemblée nationale. Je ne suis devenue pleinement parlementaire qu’après mon retour de Berlin : mon principal cen-

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9 - Les « malgré-nous » : appellation collective donnée aux Alsaciens et Mosellans incorporés de force dans l’armée allemande. 10 - Raymonde Dien : militante pacifiste qui sera arrêtée et internée en mars 1951 pour s’être couchée sur les rails en gare de SaintPierre-desCorps pour arrêter un train de munitions destinées à l’Indochine.

tre d’intérêt, comme député, est le contact humain avec les populations de la banlieue sud que je représente. J’essaye de défendre leurs revendications. Je me penche donc sur les problèmes sociaux. Par ailleurs, toujours préoccupée par les problèmes de la paix, je siège aux commissions de la Défense nationale et des Affaires étrangères... C.W. : Te souviens-tu de tes réactions à l’éviction, en 1947, des ministres communistes ? M.C.V.C. : Une réaction première M.C.V.C. : dominée par le soulagement de nous voir enfin dégagés du bourbier de la guerre d’Indochine. C.W. : Et quelle est ton action et celle de la FDIF contre cette nouvelle guerre coloniale ? M.C.V.C. : Au Parlement, j’inM.C.V.C. : terviens à deux reprises, insistant surtout sur le drame de ces femmes dont le fils ou le mari combat pour une mauvaise cause. Je participe à plusieurs manifestations, dont certaines violemment réprimées. Et je suis citée comme témoin du procès de Raymonde Dien (10). Le comité exécutif de la FDIF, réuni à Moscou du 15 au 19 novembre 1949, parmi les principaux points à l’ordre du jour, organise la riposte internationale des femmes à la guerre du Vietnam.

Militante globe-trotter C.W. : Le gouvernement Pleven expulse la FDIF en janvier 1951. M.C.V.C. : Nous discutons de notre M.C.V.C. : point de chute. Berlin-Est propose de nous accueillir. Je soutiens avec vigueur cette offre : au milieu des ruines de Berlin, ne sommes-nous pas au cœur des problèmes de la paix et de la guerre ? Jacques Duclos, qui préside le groupe parlementaire communiste, est d’accord pour que je m’installe à Berlin, à la condition que je séjourne une semaine par mois à Paris. Condition qui, sur le moment, m’agrée fort ; je peux faire un travail qui me passion-

ne, vivre à quart temps avec Pierre et Thomas, enfin ne pas être coupée des réalités de la vie française. Avec le recul du temps, je le regrette car, sans cette condition posée par Jacques, je n’aurais pas été à Berlin. Il faut vraiment être de la délicatesse de Pierre, avec son si profond respect de la vie de l’autre, pour accepter qu’une telle situation se prolonge quatre ans. Et ceci de ma faute : si Eugénie Cotton et Nina Popova insistent beaucoup, personne ne m’impose d’aller et encore moins de rester à Berlin. Et, s’il est une chose de ma vie que je ne referais pas, c‘est bien celle-là : car, pour Thomas, qui a 13 ans, il n’est ni sain ni normal d’avoir un père député de l’Allier souvent dans sa circonscription et une mère vivant trois semaines par mois à Berlin. Il en a souffert. C.W. : Comment trouves-tu Berlin en 1951 ? M.C.V.C. : Une vision apocalyptiM.C.V.C. : que ! Un champ de décombres. Les équipes de « volontaires » plus ou moins obligatoires, après le travail, déblayent les ruines. Comme les autres organisations ayant leur siège ici, le personnel de la FDIF participe à cette mesure de première urgence. Un soir d’hiver, dans le froid et la neige, resurgit avec force un souvenir enfoui : passant des briques, brusquement, au contact de mes doigts, je me retrouve à Auschwitz lorsque, à la lumière des miradors, les SS me forcent à transporter des briques. Et je mesure le chemin parcouru. Si, en 1943, on m’avait dit que, volontairement, je participerais, si modestement que ce soit, à la reconstruction de Berlin, j’aurais été abasourdie. Nos conditions de vie sont relativement favorables. Le siège de la FDIF est Unter den Linden et nous résidons dans un quartier résidentiel de Berlin-Est, où sont vacants des logements dont les propriétaires ont fui à l’Ouest. C.W. : Es-tu là, le 17 juin 1953, lorsque grèves et manifestations sont durement réprimées ?


DOSSIER LE RÉVEIL

M.C.V.C. : Non, je suis à Paris. Mais je ne suis nullement surprise par ces événements. Les conditions dramatiques de vie, surtout de logement, mais aussi les bas salaires, le rationnement, accumulent un stock explosif de mécontentement. Sur lequel se greffe le ressentiment d’être « occupé » : parlant des Soviétiques, les dirigeants disent « nos amis » mais les chauffeurs « les troupes d’occupation ». En 1953, je trouve que ma double vie a suffisamment duré. J’obtiens d’être remplacée après le congrès de Copenhague par l’Italienne Carmen Zanti, avec qui j’ai travaillé en pleine harmonie tant à Paris qu’à Berlin. Mais à la dernière minute, Carmen sent comme moi qu’elle ne peut plus vivre ainsi et décide de rentrer en Italie. Je fais donc une rallonge de six mois, le temps d’initier une nouvelle

secrétaire générale, l’Italienne Zangela Minelli. En 1954, j’abandonne la fonction de secrétaire générale pour celle, bien moins absorbante, de vice-présidente. C.W. : Comme secrétaire générale, puis comme vice-présidente de la FDIF, tu effectues de nombreux voyages. M.C.V.C. : A travers le monde entier. En décembre 1949, pendant un mois, mon voyage en Chine populaire, juste au lendemain de sa révolution victorieuse. A Shangai, libérée depuis peu, je vois encore dans les squares des plaques, conservées volontairement comme témoignages : « interdit aux chiens et aux Chinois… ». Dans les usines, les enfants de 8 ou 9 ans travaillent. J’interroge un ouvrier, sans âge, sur ce qu’il a pu gagner avec le nouveau régime : une augmentation de sa25 août 1974 : inauguration de la stèle des fusillés, à Villejuif (94), à l’occasion du 30e anniversaire de la Libération. Collection Archives communales de Villejuif.

laire ? Non. Une journée de travail moins longue? Non. Alors, la Révolution ne vous a rien apporté ? Son visage alors s’illumine : « Oh, si ! la possibilité d’être un homme » . Je suis profondément marquée. Je m’entretiens longuement avec Chou En Lai, qui me décrit et m’explique les types de problèmes que doit affronter la Révolution. Par exemple, lorsque l’armée populaire libère un village, la terre est partagée entre les paysans. Fort bien. Mais quand l’armée populaire emporte une ville, les soldats veulent partager l’usine entre les ouvriers. Et ils disent aux conducteurs de pousse-pousse : à partir d’aujourd’hui, vous vous assiérez dans les pousse-pousse et vos clients tireront vos voitures. Mais, le lendemain, ni clients ni travail ni riz ! Ce spontanéisme, cette vision utopiste doivent être rapidement corrigés. Je l’interroge sur le travail des jeunes enfants dans les usines : « Il est, me répond Chou En Lai, impossible de supprimer cette survivance barbare du jour au lendemain, car le travail de ses gosses est un appoint nécessaire aux ressources familiales. Il faut d’abord réorganiser la production ». Autre difficulté de taille, le pourcentage très élevé d’analphabètes, avec une langue écrite si difficile à apprendre. Avec nous, il y a une jeune Vietnamienne. Elle me confie qu’il leur est difficile, de par leur passé (une occupation séculaire de l’Indochine par la Chine) de fraterniser avec les Chinois. Les Chinois eux-mêmes me paraissent, dans les conversations privées, manifester à l’égard de l’URSS, un certain nationalisme. Première révélation des problèmes et limites de l’internationalisme prolétarien. Aux États-Unis, la FDIF ayant obtenu un statut consultatif à l’ONU, je me rends à la session de son Conseil économique et social. Mais mon visa, comme communiste, m’interdit de sortir de New York. J’assiste

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au Congrès des femmes américaines, fédération adhérente à la FDIF. Je suis encore frappée par des interventions commençant par « moi, comme polonaise américaine… » ou « moi, comme noire américaine… ». Les racines des différentes immigrations affleurent encore. Peu après, le Congrès des femmes américaines doit se dissoudre, car le maccarthisme veut le contraindre à déclarer ses membres comme agents d’une puissance étrangère. Mon deuxième séjour en Chine, encore un mois, se déroule en septembre-octobre 1959, à l’occasion du Xe anniversaire de la Révolution chinoise. Là, je mesure les progrès spectaculaires effectués en une décennie : élévation prodigieuse du niveau de vie, lois sociales bouleversant l’existence. Nous nous attachons surtout à ce qui est réalisé pour la libération des femmes - à travail égal salaire égal - des œuvres sociales telles que crèches, jardins d’enfants, cantines, libérant partiellement la femme de son esclavage domestique ne lui permettant pas de s’épanouir. Nous sommes émues par la sollicitude dont sont entourés enfants et jeunes, favorisant leur développement harmonieux, physique, intellectuel, moral. Un exemple pour nombre de pays. A commencer par ce grand pays qu’est l’Inde que je visite aussi à dix ans d’intervalle. Les deux fois, la même misère s’étalant dans les rues avec ces nuées de mômes nous assaillant pour mendier de quoi manger, ces hommes et ces femmes mourant de faim dans les ruisseaux… C.W. : A plusieurs reprises tu as rencontré Hô Chi Minh. M.C.V.C. : La première fois, en 1946, lors des accords de Fontainebleau, lors d’un dîner avec les membres du Bureau politique. Hô Chi Minh avait insisté pour que Mathilde Péri et moi soyons invitées en raison des liens qui l’unissaient avant guerre avec Péri et Vaillant-Couturier. En 1959, Hô Chi Minh dirige la délégation du Vietnam aux festivités 18 -

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Marie-Claude Vaillant-Couturier en compagnie de Louis Dolly, maire de Villejuif (94) de 1946 à 1971. Collection Carlos Escoda.

du Xe anniversaire de la Révolution chinoise. Je reçois une invitation à dîner de Hô Chi Minh. Il m’a, je pense, conviée en même temps que la délégation du PCF. A sa résidence, tout en blanc, il m’accueille avec Giap. Après quelques moments de discussion, il me prie de passer à table. Comme je m’étonne d’être la seule Française, il me répond : « Nous avons invité la délégation du PCF un autre soir… J’ai voulu te voir pour que nous évoquions la figure de mon vieil ami, Paul Vaillant-Couturier ». Et Hô Chi Minh me raconte comment ils se sont connus, comment Paul lui avait fait connaître et apprécier le prolétariat parisien et comment lui, en retour, avait éclairé Paul sur certaines facettes des problèmes coloniaux… Je suis à la fois stupéfiée et bouleversée. Que Hô Chi Minh, alors que le Vietnam est en pleine guerre contre le géant américain,

consacre une soirée à parler d’un ami mort depuis 22 ans me paraît décrire l’homme. Sans aucun doute celui qui, de mon existence, m’a le plus impressionnée et séduite…


DOSSIER LE RÉVEIL

Une vie au service de l’humain Retour de la déportation : députée et militante (1945-1973) Marie-Claude Vaillant-Couturier est rentrée des camps de la mort le 25 juin 1945. Dès le lendemain, 26 juin, elle est désignée comme suppléante au Comité central du Parti communiste français, dont elle deviendra par la suite membre titulaire et qu’elle ne quittera que lors du XXVe congrès en 1985. Devenue une figure emblématique de la Résistance et de la Déportation, Marie-Claude est d’abord cooptée à l’Assemblée consultative. Le 21 octobre 1945, les Français élisent une Assemblée constituante, à la représentation proportionnelle. MarieClaude présentée par le Parti communiste français, est élue, dans le 4e secteur de la Seine-Sud. Dès lors s’ouvre devant elle une carrière parlementaire quasi ininterrompue jusqu’en 1973, date à laquelle elle se retirera pour permettre l’élection de Georges Marchais à l’Assemblée nationale.

Inauguration du foyer des personnes âgées RenéHamon à Villejuif, le 24 janvier 1965. Collection Archives communales de Villejuif.

Son activité en tant que parlementaire sera tendue tout au long de sa carrière par les enseignements tirés de ses expériences antérieures, on pourrait dire de ses vies antérieures. En particulier le poids de ce qu’elle a vécu et souffert pendant sa déportation ne la quittera jamais. Aussi nous paraît-il important de souligner d’emblée ce qui relève directement de ces années de Résistance. Figure emblématique : cet aspect sera mis en relief par deux événements : d’abord, l’attribution de la Légion d’honneur à titre militaire (décret du 19 décembre 1945) ; la croix lui fut remise le 22 janvier 1946 par le général Le Gentilhomme au cours d’une prise d’armes sur l’esplanade des Invalides. Par la suite, elle sera faite officier avant d’être nommée commandeur en 1995. Et puis aussi, et cela aura un retentissement universel, il y aura, en 1946, son témoignage au procès de Nuremberg, dur, précis, poignant, son face à face avec Gœring, enregistré comme

un des sommets de ce procès (on peut lire les 12 pages du compte rendu de ce témoignage sur Internet, au site de la FNDIRP). Une obligation s’impose dès lors pour la défense de tous ceux qui ont combattu le nazisme et leur permettre de peser sur la vie politique du pays, afin que ce combat qu’ils ont mené parfois jusqu’à la mort ne soit pas banalisé et oublié : ce sera la création de la FNDIRP, la Fédération nationale des déportés, internés, résistants et patriotes. Marie-Claude sera membre de sa présidence collective et ne cessera d’animer son action pratiquement jusqu’à sa mort. Elle participera aussi aux activités de l’Union des femmes françaises dont elle assumera la vice-présidence durant de longues années. Et, durant les premières années d’après-guerre, elle sera très accaparée par sa fonction de secrétaire générale de la Fédération démocratique internationale des femmes, dont le siège est à Berlin. AOÛT-SEPTEMBRE  2010 - N°764 - LE RÉVEIL

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LE RÉVEIL DOSSIER

La défense de la paix et le devoir de mémoire (1973-1996) En 1973, Marie-Claude ne se représente pas aux élections législatives, et soutient la candidature de Georges Marchais dans sa circonscription de Villejuif. Dès lors, sans se départir de son travail de militante, sans s’interdire aucun terrain, elle peut concentrer son activité sur les questions fondamentales de la défense de la paix et le devoir de mémoire. Sa ligne de conduite ne dévie pas, mais elle se veut plus que jamais ouverte à tout ce qui va dans le sens de la justice sociale et des libertés. A Frédéric Mitterrand qui l’interroge sur Antenne 2 le 19 janvier 1989 et lui demande si elle serait contente de parler à l’abbé Pierre ou à mère Teresa, ne répond-elle pas : « Même si nous ne sommes pas d’accord sur tous les

points, je suis heureuse de discuter avec tous ceux qui dénoncent les injustices. Qu’il puisse y avoir des gens qui ont faim, des gens qui cherchent du travail dans un pays comme la France, me paraît inacceptable et c’est une des raisons pour lesquelles je reste fidèle à l’engagement de ma jeunesse » ? C’est l’engagement de sa jeunesse qui lui fait multiplier ses interventions en particulier devant les jeunes (et nous l’avons vue au lycée Darius-Milhaud, au Kremlin-Bicêtre, tenir une salle de près de cent élèves une aprèsmidi durant), dans les journaux et quelques rares fois à la télévision. C’est l’engagement de sa jeunesse qui, le 10 juin 1987, la fait témoigner au procès de Barbie, tortionnaire de Jean Moulin et organisateur de la déportation des enfants juifs d’Izieu, et accepter la Meeting électoral, en 1973 : MarieClaude VaillantCouturier, député sortant, avec Georges Marchais, candidat à la 1ere circonscription du Val-de-Marne. Collection Archives communales de Villejuif.

présidence de la Fondation pour la mémoire de la déportation, créée en 1990. En 1994, elle accorde un entretien à France-Soir au cours duquel elle rappelle cet engagement de sa jeunesse : « ... Aujourd’hui, j’ai 81 ans, je suis présidente de la Fondation pour la mémoire de la déportation. Je pense que la tâche essentielle de ma génération est de témoigner pour mettre en garde ceux qui n’ont pas connu cette période. Le racisme, la xénophobie et la volonté d’exclusion trouvent facilement un terrain favorable, surtout en période de crise économique. Les droits de l’homme, de la femme et des peuples sont à défendre en permanence. L’histoire prouve qu’aucun peuple n’est à l’abri d’un régime totalitaire. » Et comme la journaliste lui demande quelles impressions elle garde de ses années de guerre et de déportation, elle lui répond : « Des sentiments contradictoires. A la fois d’avoir connu l’horreur absolue : l’extermination des Juifs et des Tziganes (du bébé au vieillard) dans les chambres à gaz. D’autre part d’avoir rencontré des hommes et des femmes qui ont su, en toutes circonstances, au péril de leur vie, résister à cette entreprise de dégradation qu’était le nazisme et rester des êtres humains dans l’acception la plus noble du terme. » Et elle conclut, nous sommes en 1994, deux ans donc avant son décès : « C’est pourquoi je crois en l’avenir. » C’est sur ces paroles d’une grande lucidité que nous arrêtons cette évocation de la vie de MarieClaude Vaillant-Couturier, une vie qui s’est éteinte le 11 décembre 1996, à l’issue d’un parcours exemplaire et unique par sa rectitude, sa cohérence et sa plénitude. Carlos ESCODA

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mémoire LE RÉVEIL

Événements de Sétif et le film Hors la loi

Gérard Vallée témoigne Gérard Vallée, du Var, nous a fait parvenir un texte sur les événements de Sétif du 8 mai 1945, que retrace à sa mémoire le film Hors la loi de Rachid Bouchareb, film qui n’est pas un document historique mais qui prend appui sur les événements pour dérouler son scénario. Nous en publions de larges extraits. L’idée d’en finir avec le colonialisme est bien partie de cette date du 8 mai, mais les contestations au régime colonial étaient déjà là. Le 21 avril, il y avait eu de graves incidents à Alger faisant des victimes parmi les militants indépendantistes, comme aussi à Oran, Bougie, et Hors-la-loi de Rachid Bouchareb, avec Bernard Guelma. Blancan, Sami Bouajila, Jamel Debbouze, RosA Sétif, c’est une foule de chdy Zem, etc. - Sortie le 22 septembre jour de marché, qui d’abord dépose cannes et bâtons « Les faits : ce jour-là, le 8 mai 1945, la avant d’aller manifester dans la rue population de Sétif fête la victoire contre Georges-Clemenceau avec en tête la le nazisme et le pétainisme. Cette ma- troupe des scouts musulmans « Kenifestation est autorisée par le préfet, chalat el hayat »portant des bouquets malgré la tension régnante développée de fleurs pour le monument aux morts. par les ultra-nationalistes. S’appuyant Suivent ensuite, dans le cortège, les drasur cette tension, se mettent en place les peaux alliés et celui de l’Algérie tenue mécanismes du massacre que les jour- par un jeune scout de 22 ans et beaunaux algériens de l’époque qualifieront coup de banderoles où l’on peut lire : « d’agression à main armée dans la région « Vivent les Nation unies ! A bas l’impéde Sétif »… En France, les événements rialisme ! Indépendance ! » sont masqués, passés sous silence, Le préfet avait donné l’ordre de tirer ignorés y compris par des membres du sur ceux qui brandiraient le drapeau algérien : c’est le commissaire de police gouvernement. L’idée d’indépendance faisait toutefois Lucien Olivier qui tire, avec d’autres, sur son chemin… La manifestation de Sé- le porteur Bouzid qui est tué. Gendartif arborait des drapeaux algériens et mes, policiers, gardes mobiles ouvrent français. Les colons en retrait étaient le feu sur la foule et divers groupes de sur leur garde, ils savaient la situation manifestants attaquent les Européens explosive. Certains extrémistes envisa- faisant aussi des victimes parmi elles. geaient de susciter des affrontements Le lendemain 9 mai, dans un rayon qui entraînaient de vastes opérations de 60 à 80 kilomètres, c’est le soulèvede répression, acceptées par le préfet ment. Le préfet établit un « bilan » de Lestrade Carbonel : ce dernier souhai- 103 morts... tait, en vain, obtenir l’aval du ministre La répression est féroce. Le consulat américain, après enquête, retiendra le de l’Intérieur.

chiffre de 40 000 tués… Le monde algérien avait basculé, le général Duval a tiré ses propres conclusions : « Je vous ai donné la paix pour dix ans, mais il ne faut pas se leurrer, tout doit changer en Algérie ! » En effet les injustices sociales, la citoyenneté aux autochtones refusée, l’idée d’indépendance refusée continueront et conduiront au soulèvement de 1954… puis vers l’indépendance en 1962. Des nostalgiques du colonialisme sont encore là pour affirmer des contrevérités historiques ou manifester. Le film a révélé courageusement cette douloureuse époque. Reste à obtenir un débat dépassionné et utile pour les jeunes générations de cette version des échanges croisés entre témoins et historiens des deux parties.

Du poète, Kateb Yacine, lycéen de 15 ans au moment des faits à Sétif : J’ai ressenti la force des idées Je suis parti avec les tracts Je les ai enterrés dans la rivière J’ai tracé sur le sable un plan Un plan de manifestation future Qu’on me donne cette rivière et je me battrai Je me battrai avec du sable et de l’eau De l’eau fraîche, du sable chaud, je me battrai J’étais décidé. Je voyais donc loin. Très loin…

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LE RÉVEIL vOS DROITS

Campagne double

Le décret (restrictif) a été publié Le Journal officiel n° 0174 du 30 juillet 2010 a publié le décret n° 2010290 (daté du 29 juillet) portant attribution du bénéfice de la campagne double aux anciens combattants en Afrique du Nord. Outre que ce décret paraît près de 42 ans après la fin de la guerre d’Algérie, son contenu semble justifier - hélas ! - les réserves qui étaient nôtres lors de la parution de la décision du Conseil d’État justement saisi par nos camarades de l’ANCAC. Il aura donc fallu que le gouvernement soit condamné par le Conseil d’État pour être contraint à respecter la loi ; tout comme il a fallu que le Conseil constitutionnel condamne ce même gouvernement quant à la décristallisation des pensions militaires de retraite attribuées aux anciens combattants des ex-pays coloniaux. Ces deux condamnations en disent long quant aux refus du gouvernement de faire justice aux ACVG, contrairement à ses discours d’autosatisfaction. Le droit à campagne double est un droit à réparation reconnu par la loi au bénéfice des AC fonctionnaires, travailleurs de l’État et assimilés. Il s’applique au nombre de leurs annuités en matière de retraite professionnelle, permettant ainsi de compenser la perte d’évolutions de carrière auxquelles leurs collègues nonmobilisés ont eu accès durant la période où eux, anciens combattants, étaient « sur le pied de guerre ». Jusqu’ici, seuls les fonctionnaires AC de la guerre en Afrique du Nord (1952-1962) en étaient exclus, leurs « anciens » de 1914-1918, 1939-1945, de Corée, d’Indochine, de Suez et de Madagascar en ayant bénéficié, ainsi que, plus récemment, ceux de la guerre du Golfe du début des années 1990.

Des aspects restrictifs Le gouvernement fait payer aux AC son refus de reconnaître la guerre d’Algérie avant 1999 : le décret concerne les pensions de retraite liquidées à compter du 22 -

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19 octobre 1999 (date de la reconnaissance officielle de la guerre d’Algérie et des combats au Maroc et en Tunisie) et n’ouvrent droit à aucun intérêt de retard (article 3).

Or, les fonctionnaires, selon la qualification de leur profession, partaient en retraite à 55 ou 60 ans. Ceux qui avaient 20 ans de 1952 à 1958 ont donc pu liquider leur retraite professionnelle de 1992 à 1998, y compris une partie de ceux de la classe 1959… Il pourrait donc y avoir au moins 7 à 8 classes d’âges dont les retraites, prises avant la date du 19 octobre 1999, ne seraient pas concernées par ce décret, seules les classes 196o, 1961,1962 (en partie pour celleci) étant en mesure de bénéficier de la campagne double, leur retraite ayant été prise à partir de l’an 2000… Encore que ceux de ces classes partis à 55 ans (conducteurs SNCF, RATP, lignards EDF…), soit en 1995, 1996, 1997, risquent aussi d’en être exclus ! En fait, le gouvernement fait payer à ces anciens combattants sa propre

Déclaration de l’ARAC - Membre de la Commission permanente française pour une Culture de Paix de l’UNESCO

La République en danger, ensemble défendons-la…

Le 4 septembre, le rassemblement de Morlaix

Avec les 78 organisations, l’ARAC (Association Républicaine des Anciens Combattants et victimes de guerre et des combattants pour l’Amitié, la Solidarité, la Mémoire, l’Antifascisme et la Paix) a signé l’appel « Face à la xénophobie et la politique du pilori : liberté, égalité, fraternité » et participe aux 132 manifestations du 4 septembre 2010 partout en France. Le milieu anciens combattants et victimes de guerre, comme les jeunes de banlieue, les salariés de Continental, les Roms et les gens du voyage subissent

les attaques gouvernementales en raison de leur origine et situation sociale, comme toutes ces attaques présentes qui remettent en cause les valeurs républicaines de la nation, comme la Révision générale des politiques publiques, les privatisations, la remise en cause du droit à la retraite, du droit à la santé, la casse de l’école, les droits des anciens combattants et victimes de guerre. L’ARAC entend faire respecter la Constitution de la France qui assure « l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion » et de situation sociale. L’ARAC ne peut se taire et laisser faire ce qui conduit à mettre la paix civile en péril. Avec nos associations locales et départementales nous serons dans tous les combats pour défendre les valeurs républicaines de la Nation. Villejuif, le 2 septembre 2010


vOS DROITS LE RÉVEIL

faute, le propre refus de l’État de reconnaître la guerre d’Algérie durant 37 années, jusqu’en 1999, et de cela, les AC concernés ne sont pas responsables et n’ont pas à en supporter les conséquences. L’attribution de la campagne double devrait donc être automatique à toutes les retraites professionnelles des AC concernés, quelle que soit la date à laquelle ils ont bénéficié de celles-ci.

Un mode de calcul inacceptable En effet, le décret accorde la campagne double « pour toute journée durant laquelle les appelés et les militaires (…) ont pris part à une action de feu ou de combat, ou ont subi le feu (…) établie par les archives collectives de l’unité à laquelle les intéressés appartenaient ou étaient rattachés » (article 2). Un tel processus est injuste, lourd et lent. Il est fondamentalement injuste car il renvoie aux premiers critères d’attribution de la carte du combattant (actions de feu ou de combat), alors que la possession de cette carte n’est pas obligatoire pour le bénéfice de la campagne double. De plus, un calcul par journée selon les archives est une tâche lourde et d’autant plus lente que les services historiques de l’Armée (détenteurs des journaux de marche des unités) n’ont plus les appelés du contingent pour s’atteler à cette mission. Rappelons qu’en son temps, le ministre des AC, Jacques Floch, avait

rejeté ce processus quant aux critères d’attribution de la carte du combattant, le déclarant impossible avec les moyens d’alors. Une exigence s’impose donc : celle d’accorder la campagne double sur les mêmes bases que celles utilisées à l’époque par le gouvernement quant à la guerre d’Indochine. A savoir : « La campagne double est attribuée à tous les militaires pour le temps de leur séjour en Algérie, en Tunisie ou au Maroc entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962 ». Et cette mesure doit s’appliquer à tous les AC

concernés, quelle que soit la date à laquelle ils aient fait valoir leur droit à la retraite professionnelle. Voilà quelques premières réactions de l’ARAC sur lesquelles nous reviendrons plus en détail, car d’autres problèmes doivent sans doute exister qui méritent d’être soulevés. André Fillère

Augmentation

des retraites du combattant

Depuis le 1er juillet 2010, et conformément à la loi de finances adoptée par le Parlement, le nombre de points d’indice affectés au calcul de la retraite du combattant est passé de 41 à 43. Par conséquent, le nouveau montant annuel de cette retraite s’élèvera à 589,96 euros. AOÛT-SEPTEMBRE  2010 - N°764 - LE RÉVEIL

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LE RÉVEIL vos droits

Droit à réparation La réforme ne passe pas ! Après avoir pris acte et analysé « une situation jugée sérieuse, voire grave », les présidents des huit UDAC (Union départementale des anciens combattants) de l’Ile-de-France ont ensemble rédigé un texte qui, selon l’ARAC, est « d’une extrême importance pour l’union et l’action coordonnée du mouvement combattant sur une région » (départements : 75, 77, 78, 91, 92, 93, 94, 95). Sous le titre : « A des promesses succèdent des périls… Le droit à réparation est en grave danger ! », le document décrit les « différents aspects de la dégradation » de l’exercice du droit à réparation, stigmatise « la brutalité avec laquelle la Révision générale des politiques publiques » (RGPP) lancée en 2007, promulguée par décrets les 12/12/2007, puis les 4/4 et 11/06/2007, « a été appliquée au monde combattant ! » Ce constat, mis en parallèle avec les engagements que Nicolas Sarkozy adressa le 2 avril 2007 à l’UFAC, alors qu’il était candidat à la Présidence de la République, a mis en évidence une inacceptable réalité... Extraits d’engagements: « La reconnaissance de la Nation, c’est la garantie de l’existence des droits spécifiques des anciens combattant,(…) je n’ai pas l’intention de revenir sur l’ensemble du droit existant… La reconnaissance, c’est le devoir de solidarité nationale qui s’exprime dans l’attribution nécessaire et équitable des pensions de réparation » (inobservée depuis des décennies, la loi afférente à l’évolution de la valeur du point d’indice - rapport constant - affiche aujourd’hui un retard de 43 % ! ) … « Une de vos revendications « la bonification pour campagne double » aux anciens combattants d’Afrique du Nord est toujours à l’étude. Je veillerai à ce que l’on aboutisse à un résultat satisfaisant et équilibré » : aucun résultat à ce jour... « S’agissant de la rente mutualiste je sais 24 -

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que le monde combattant est attaché à atteindre l’indice 130 et vous pouvez compter sur ma détermination pour faire avancer cette revendication » : annonce non tenue ! Le texte signé par les huit présidents note également que « la promesse de porter de 37 à 48 points la retraite du combattant en 2012 avec l’attribution de deux points de Pension militaire d’invalidité (PMI) par an est observée, bien que cette majoration soit systématiquement appliquée au 1er juillet de chaque année, pénalisant ainsi les anciens combattants de 6 mois d’augmentation et instituant une pratique ambiguë de fonctionnement budgétaire permettant de commencer l’année … le 1er juillet ! ». « Les UDAC relèvent que, depuis des décennies, les crédits affectés au budget des AC sont systématiquement indexés à la baisse démographique des AC et non à l’application prioritaire des lois fondatrices du droit à réparation… ».

« Les UDAC rappellent que nos aînés, combattants rescapés, veuves, orphelins, ont acquis le droit à réparation - loi du 31 mars 1919- fondatrice et imprescriptible, suivie d’autres lois qui, établissant son exercice, furent adoptées par le Législateur à la suite de la Première et Seconde Guerre mondiale ». L’ARAC, destinataire de la lettre (1), appelle ses militants et militantes à s’en saisir, à la populariser, à développer partout l’action unie, sous toutes ses formes. Ce n’est pas dans l’esprit équivoque de cette « réforme » que doit s’élaborer le projet de budget 2011 des Anciens Combattants mais dans le respect des lois afférentes au droit à réparation et, prioritairement, la satisfaction des engagements de Nicolas Sarkozy. Vigilance, oui, vigilance ! (1) La lettre des huit présidents est disponible : écrire au Réveil.

Victimes des essais nucléaires Mise en place du Comité d’indemnisation Un arrêté du 3 août 2010 a nommé pour trois ans les membres du Comité pour l’indemnisation des victimes des essais nucléaires. Ce sont, au titre du ministère de la Défense, le professeur André Aurengo et M. Roland Masse ; au titre du ministère de la Santé, les docteurs Dominique Choudat et Jean-Marc Cosset ; au titre conjoint des deux ministères précédents, le professeur Daniel Rougé, le docteur Guy Kantor et Mme Marguerite Pélier, magistrate honoraire, qui assurera la vice-présidence du Comité. Soulignons, ce que nous considérons comme inadmissible, que ce Comité d’indemnisation ne comprend aucun représentant des victimes ou de leurs

associations, dont l’Association des victimes des essais nucléaires (AVEN) dont l’ARAC soutient l’action pour un véritable droit à réparation. Parallèlement le décret n° 2010-860 du 23 juillet 2010 a porté création, par le ministère de la Défense, d’un traitement automatisé de données à caractère personnel nommé « Indemnisation des victimes des essais nucléaires ». Il définit les catégories d’information et de données personnelles qui seront enregistrées, ainsi que les agents qui y auront accès.


vos droits LE RÉVEIL

Un documentaire de François Demerliac, diffusé sur la chaîne Public Sénat.

Audin, la disparition L’affaire Maurice Audin, qui remonte à plus de cinquante ans, est aujourd’hui presque inconnue ; elle appartient à une période de notre histoire couverte par l’amnistie et l’amnésie. Maurice Audin, mathématicien et militant contre la guerre d’Algérie, arrêté par des militaires français alors qu’il n’avait que 25 ans, a disparu à Alger en 1957. Après plus de cinquante ans d’enquête, la justice française a refermé ce dossier sans condamner les coupables ni reconnaître les faits : la torture et l’assassinat. Alger en revanche a commémoré cette année encore la disparition de Maurice Audin. Une enquête inédite, intitulée Audin la disparition, comportant des

témoignages de sa veuve Josette Audin, de l’historien Pierre Vidal-Naquet, de l’ancien ministre Robert Badinter et du journaliste Henri Alleg, a été diffusée en juillet dernier sur la chaîne Public Sénat. Le documentaire est maintenant disponible en DVD.

L’affaire Audin En pleine bataille d’Alger, Maurice Audin est arrêté chez lui, sur dénonciation, le 10 juin 1957, par des parachutistes français chargés

Décristallisation Où en est le gouvernement ? Le 29 mai dernier, la presse par des « Unes » fracassantes, annonçait la condamnation du gouvernement, prononcée par le Conseil constitutionnel, qui lui enjoignait de payer les pensions militaires des ex-colonies françaises au même taux que celles des « métropolitaines ». Le même jour, le secrétaire d’État aux Anciens Combattants, M. Hubert Falco, publiait un communiqué vigoureux prenant acte de cette décision et déclarant qu’il « s’emploiera à rédiger de nouvelles dispositions législatives (…) afin de faire respecter le principe d’égalité ». Que ne l’a-til fait auparavant, par exemple en même temps que furent « décristallisées », en 2007, les pensions et les retraites des anciens combattants des ex-pays coloniaux ? C’est sans doute qu’il n’y a pas de petits profits et que trois ans de répit… c’est toujours ça de gagné ! Mais quel gouvernement avons-nous là, qui ne se résout à rendre justice et égalité que contraint et forcé, lorsqu’il est publiquement condamné, ici par le Conseil constitutionnel, hier par le Conseil d’État pour le bénéfice de cam-

pagne double de guerre. Et encore ! Le décret publié pour l’application de la campagne double est tellement restrictif qu’il est inacceptable et rejeté par le mouvement ancien combattant. Quant à la « décristallisation »… Décret ? Loi ? Mutisme et secret sont à l’ordre du jour. Cela sera-t-il dans le cadre du budget pour 2011 ? Ou bien une mesure spéciale ? Pour quand ? L’ombre du remaniement ministériel rend muets tous nos ministres… Attendre devient leur maître mot, y compris pour que le Conseil d’État se prononce quant aux critères d’attribution de la carte du combattant aux OPEX. De la lassitude peut jaillir la colère, quand, ainsi que viennent de l’écrire les huit UDAC de la région parisienne, « Ça ne passe plus ! »

du maintien de l’ordre. Sa femme, Josette, et ses trois jeunes enfants ne le reverront plus jamais. Il est mort sous la torture, vraisemblablement le 21 juin 1957 ; entre les deux dates du 10 et du 27 juin 1957, un des rares témoins à l’avoir rencontré est Henri Alleg, journaliste, arrêté et torturé lui aussi ; il est l’auteur d’un livre de témoignages sur la torture, La Question. Qui était Maurice Audin ? Un jeune mathématicien algérois, assistant de mathématiques à l’université d’Alger, militant de la cause anticolonialiste, communiste. Il luttait pour le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Il avait entrepris, dans des conditions difficiles, la rédaction de sa thèse qu’il devait soutenir. Pour mettre au point le déroulement de la soutenance, qui ne pouvait se faire qu’à Paris, sur les conseils de son directeur de recherches, René De Possel, il était venu à Paris rencontrer Laurent Schwartz qui, après examen du travail de recherche de Maurice Audin, avait demandé quelques modifications tout en acceptant le projet de soutenance à brève échéance. Dès qu’elle a le pressentiment de la mort de Maurice, Josette Audin informe Laurent Schwartz de la disparition de son mari. Laurent Schwartz essaie de s’informer, mais devant le mutisme ou les mensonges des autorités politiques et militaires de l’époque, il décide avec le soutien de quelques intellectuels de lancer, au second semestre de l’année 1957, le Comité Audin dont l’un des objectifs est de connaître la vérité sur la mort de Maurice. L’un des animateurs de ce comité, Pierre Vidal-Naquet, a écrit plusieurs ouvrages sur l’affaire Audin et la torture en Algérie. Quelques informations distillées par les autorités civiles et militaires de l’époque laissent supposer que Maurice Audin se serait « évadé » au cours d’un transfert. Aujourd’hui, la thèse officielle sur la disparition de Maurice est toujours celle de l’évasion ! Source : la section de Toulon de la Ligue des droits de l’homme AOÛT-SEPTEMBRE  2010 - N°764 - LE RÉVEIL

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LE RÉVEIL Vie de l’arac

Georges Gavelle nous a quittés Notre ami Georges Gavelle est décédé le 3 juin dernier. Né en 1922, dans une famille modeste, il devient ajusteur. En 1942, après avoir tenté de passer en Afrique du Nord, il reprend contact avec la Résistance intérieure à Montluçon et devient responsable militaire du maquis Hoche. Il crée l’ANACR dans l’Allier où il était aussi président de l’Association des combattants et victimes de la guerre d’Indochine (1). Un hommage lui a été rendu le 15 juin à Tronget (Allier). Pierre Bussone, secrétaire national de l’ARAC, était parmi les intervenants et a fait part du message de Georges Doussin au nom de la direction nationale de l’ARAC. « Georges nous a quittés. Nous perdons plus qu’un ami, nous perdons un compagnon de lutte, toujours fidèle à nos côtés, toujours en totale solidarité avec les combats de l’ARAC et de l’ACVGI, dont il était le président, avec la création et la prise en charge du Village qui accueille des enfants et des anciens combattants vietnamiens, encore aujourd’hui victimes des épandages de l’agent orange par les avions américains. A tous les moments importants de la vie, Georges a été activement présent. Dirigeant éminent de la Fédération des officiers de réserve républicains, il a toujours veillé à entretenir le dialogue avec l’ARAC. Lorsque le pouvoir en place a supprimé l’armée

de conscription au bénéfice d’une armée de métier, c’est avec Gorges que nous avons exprimé notre désaccord et que nous avons développé nos arguments pour une armée de la Nation, héritière des soldats de Valmy. L’image que nous garderons de Georges, c’est d’abord sa gentillesse, sa modestie, son attitude toujours fraternelle, toujours chaleureuse, son humour qui était toujours éclairé de son sourire. Mais cette gentillesse, cette fraternité qu’il partageait avec tous, donnaient d’autant plus de force aux idées pour lesquelles il s’est toujours battu et que nous partagions sans réserve. Il était totalement ouvert aux nécessaires adaptations qui doivent accompagner les évolutions des sociétés humaines, mais il portait toujours

en lui les valeurs léguées comme bases intangibles des idéaux républicains et révolutionnaires. Résistant des années sombres de l’occupation nazie et de la collaboration pétainiste, il partageait également avec nous la conviction que les résistants au fascisme devaient continuer leurs combats et que le capitalisme, autant que le colonialisme, le racisme et la xénophobie, était un système qu’il fallait toujours combattre avec détermination si nous voulions voir la devise républicaine née de la Révolution française devenir le fondement inaliénable pour tous les peuples du monde. Dans ces temps de régression sociale, de chômage, de démolition systématique des acquis du programme du Conseil national de la Résistance, dans cette période dramatique pour toute l’humanité où tous les continents connaissent les affres de la misère et des guerres déclarées ou larvées, les prises de position et les engagements personnels de Georges Gavelle nous seraient plus que jamais précieux et nourriraient encore notre réflexion et conforteraient notre action. » 1 - ACVGI : Association des combattants et victimes de la guerre d’Indochine, animée par Michel Bassot, chevalier dans l’Ordre national du mérite. Cotisation annuelle : 20 e à envoyer au 2 place du Méridien - 94807 Villejuif cedex.

NOS PEINES Août/septembre 2010 Le Réveil des Combattants adresse aux familles et aux amis de nos camarades décédés ses sincères condoléances. AISNE (02) Crouy : Noël JACMIN, 82 ans. Saint-Quentin : René MERLIN, 77 ans, AC ATM, membre du Conseil national d’honneur.

CHARENTE (16) La Rochefoucauld : François LASTERE, 78 ans, AC ATM. Saint-Cybard : Jean FRUGIER, AC ATM.

ALLIER (03) Moulins : René JEUX , 69 ans. Saint-Germain-des-Fossés : Robert GODIER, 73 ans, ami. Saint-Pourçain-sur-Sioule : Jean DESSAGNES, 76 ans, AC ATM. Raymond LAURENT, 76 ans, AC ATM.

COTE-D’OR (21) Vonges : Guy CHEVALIER, 89 ans, Résistant au maquis Henri Bourgogne, Chevalier de la Légion d’honneur, Médaille de la Résistance.

BOUCHES-DU-RHONE (13) Marseille centre : Théophile LAGANA, AC 39-45.

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HAUTE-GARONNE (31) Launaguet : Robert PISANT, 75 ans, AC ATM Toulouse centre : Claude DUPUY, 85 ans, Résistant 39-45, Officier de la Légion d’honneur.

LE RÉVEIL - N° 764 - AOÛT-SEPTEMBRE 2010

Snias : Jean-Claude BONAN, 70 ans, AC ATM. GIRONDE (33) Mérignac : Mme Adrienne CHABRETOU, 93 ans, amie. LOT-ET-GARONNE (47) Agen : Yves GRAFEILLE, 85 ans, AC 39-45, trésorier de la section, membre du comité départemental, membre du CA de l’UDAC. MEURTHE-ET-MOSELLE (54) Villerupt : André OSVALD, AC 39-45. PUY-DE-DOME (63) Issoire : René BREUIL, 73 ans, AC ATM. Michel ROUVET, 73 ans, AC ATM.

RHONE (69) Tarare : Gaston SIMON, 88 ans, AC 39-45, président de la section. Villeurbanne : Mme Laurence GARCIA, 85 ans, amie. SEINE-ET-MARNE (77) Meaux : Roger CAPPE, AC ATM. VAUCLUSE (84) Avignon : Marcel CHARRIER, 91 ans, AC 39-45. VAL-DE-MARNE (94) Bonneuil-sur-Marne : Mme Lucette CANIVEZ, 86 ans, veuve.


Vie de l’arac LE RÉVEIL

9 juillet - 28 juillet 2010

L’ARAC au Festival d’Avignon L’ARAC - Guerre à la guerre - Village de l’amitié de Van-Cahn : une boutique avec une enseigne pas comme les autres dans un quartier populaire à 300 mètres du vieil Avignon, encerclé par ses remparts.

Une expérience que veulent renouveler les dirigeants de l’ARAC dans le Vaucluse. Pourquoi ? Parce que pendant trois semaines, les contacts avec tous les visiteurs étaient riches d’enseignement, non seulement pour les visiteurs mais aussi pour les militants de l’ARAC qui tenaient boutique. Les visiteurs étaient de tous âges, de toutes origines et de toutes conditions sociales (des Maghrébins et des petits retraités du quartier, des festivaliers, acteurs et spectateurs, bien sûr des Français mais aussi des Canadiens, des Chinois, des Néo-Zélandais, des Ukrainiens…) Il a fallu bien des fois expliquer ce qu’était l’ARAC, l’histoire du Village de l’amitié, le crime de l’agent orange et les dangers de la dioxine, des pesticides, de l’écocide, l’horreur de la guerre du Viêtnam et de toutes les guerres d’hier et d’aujourd’hui. La volonté d’apprendre, la générosité et le désir de paix et de fraternité des jeunes nous ont particulièrement frappés. Nous a fait également chaud au cœur la solidarité des jeunes Maghrébins, devant le café voisin, le café du Progrès dont le propriétaire avait mis gracieusement une boutique vide à notre disposition : « Allez acheter à côté, pour les enfants du Viêtnam. Vous verrez, il y a de belles choses pas chères. Et les anciens combattants qui sont là sont sympathiques. »

Et, euro par euro, nous en avons récolté 1 300, soit à peu près 600 journées-enfants au Village de l’amitié. Pourtant les gens qui sont venus étaient eux aussi touchés par la crise actuelle. Au-delà de notre satisfaction, voire de notre enthousiasme, nous tirons d’autres certitudes : nous voulons ouvrir la porte de l’ARAC à tous les gens de bonne volonté. Mais ouvrir la porte ne suffit pas pour voir les gens entrer. Il faut aller voir les gens qui passent, les interpeller sur les situations et les événements, en appeler à leurs sentiments, provoquer leurs réactions.

Dans cette période de grave crise économique, sociale, morale et politique, aujourd’hui comme hier, nous avons à prendre toute notre place pour résister, faire front et gagner contre la dictature des puissants sur les peuples. Droits, retraite, défense de la République, lutte contre la xénophobie, le racisme et la guerre, vérité sur l’Histoire, union de toutes les victimes du capitalisme, les terrains sont nombreux où nous pouvons rassembler, solidaires de tous ces combats. Georges Doussin

ACVGI - Ravivage de la flamme Ravivage de la flamme par l’ACVGI, le 20 juillet dernier avec Michel Bassot, Mme Christinne, représentant le maire de Paris, et la représentante de Jean-Paul Huchon, président de la région Ile-de-France. AOÛT-SEPTEMBRE  2010 - N°764 - LE RÉVEIL

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Légion d’honneur à Jo Cano Le 13 juillet dernier, notre camarade Jo Cano (87 ans, ancien combattant de 39-45) a reçu à Prades-le-Lez (34) la Croix de chevalier de la Légion d’honneur des mains d’André Fillère, vice-président national honoraire de l’ARAC, président national de la Mutuelle. Près de 300 personnes assistaient à cette cérémonie, parmi lesquelles de

nombreuses personnalités et beaucoup de jeunes venus écouter Jean-Marc Lus-

sert, maire de Prades-le-Lez, Maurice Moréno, président départemental de l’ARAC Hérault, et André Fillère qui rendirent hommage au citoyen, au dirigeant sportif, au militant de la Mutuelle et de l’ARAC, au combattant de la Libération de la France. Natif d’Algérie, Jo Cano participa à la campagne d’Italie (Monte-Cassino, Rome, Florence, Sienne, Espéria), au débarquement de Provence (Saint-Raphaël, Saint-Tropez, Toulon, Marseille), jusqu’aux combats dans les Vosges et la campagne d’Alsace où il fut très grièvement blessé par un tir de mitrailleuse lourde. Croix de guerre avec étoile de bronze et deux palmes, médaillé militaire, pensionné de guerre à 80 %, fondateur du Football Club Pradéen (le stade porte son nom et celui de son épouse), artisan de la création de la fête votive, deux mandats de conseiller municipal, ancien administrateur de la Mutuelle de l’ARAC, cette Légion d’honneur vient couronner son parcours citoyen et républicain. L’ARAC et le Réveil lui présentent, ainsi qu’à Loulette son épouse, leurs plus vives félicitations.

Le réveil des Combattants - Bulletin d’abonnement

A retourner au Réveil des Combattants - 2, place du Méridien - 94807 Villejuif cedex Tél. 01 42 11 11 12 - reveil-des-combattants@wanadoo.fr Individuel

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Collectivités (lycées, collèges, centres de documentation, bibliothèques…)

10 numéros - au prix de 28,00 e par an

10 numéros (5 exemplaires par parution) au prix de 100,00 e par an

Nom. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

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Ci-joint un chèque de 28 e libellé à l’ordre du Réveil des Combattants

Ci-joint un chèque de 100 e libellé à l’ordre du Réveil des Combattants

LE RÉVEIL - N° 764 - AOÛT-SEPTEMBRE 2010


Vie de l’arac LE RÉVEIL

Commémoration de l’appel du 18 juin 1940

Nos camarades du Var lors de la commémoration de l’Appel du 18 juin 1940.

Montreuil 70e anniversaire de l’Appel du 10 juillet 1940 Le 10 juillet 2010, la section de l’ARAC de Montreuil et le PCF de la ville ont commémoré le 70e anniversaire de l’Appel du 10 juillet 1940, signé par Jacques Duclos et Maurice Thorez, secrétaire général du PCF, en présence de nombreux camarades, ainsi que de Pierre Bussone, président de la section ARAC de Montreuil et secrétaire national. Le dépôt de gerbes fut suivi d’une minute de silence. Raphaël Vahé, président national de l’ARAC, a prononcé une allocution au nom de notre association. Il rappela que Jacques Duclos était viceprésident de l’ARAC à l’époque. Patrice Bessac, conseiller régional et membre du Bureau exécutif du PCF, ainsi que Jean-Pierre Brard, député de SeineSaint-Denis et maire honoraire de Montreuil, prirent également la parole. Après le Chant des Partisans et la Marseillaise, les personnalités ont salué le porte-drapeau de l’ARAC, Huguette Rapineau.

Réforme des retraites

7 septembre 2010 : à l’appel de sept organisations syndicales, les sections et comités départementaux ont participé à de nombreuses manifestations. Ici, la manifestation à Paris. AOÛT-SEPTEMBRE  2010 - N°764 - LE RÉVEIL

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LE RÉVEIL Vie de l’arac

Les combats et l’honneur des Forces navales françaises libres (1940-1944) Étienne et Alain Schlumberger - Ed. Le Cherche Midi - 24 euros Étienne a 91 ans… En juin 1940, il a rejoint Londres et s’est engagé dans les Forces navales françaises libres, au sein desquelles il a servi comme second du commandant, notamment sur le sous-marin « Junon ». Jugé par l’État français de Vichy et le tribunal militaire de Toulon, il est condamné aux travaux forcés à perpétuité pour désertion et trahison (comme Honoré d’Estienne d’Orves).

Figures de Résistants Pendant tout l’été, le journal l’Humanité a publié des portraits de résistants connus et méconnus. Il s’agit de documents qui prennent leur place dans la bataille de la mémoire aujourd’hui et montrent que des femmes et des hommes de toute obédience 30 -

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Français libres Jean-François Murraddiole - Ed. Taillandier - 25 euros Ils furent 52 200 combattants, dont 1 160 femmes, ralliés au général de Gaulle à Londres, entre le 18 juin 1940 et le 31 juillet 1943. Souvent très jeunes, catholiques, protestants, francs-maçons, juifs de métropole ou d’Afrique du Nord, Espagnols, Polonais, Belges, Allemands antifascistes sont mêlés dans l’épopée. Au départ, les pêcheurs de l’île de Sein et les ouvriers des arsenaux bretons ne forment pas une « population » homogène avec les « indigènes » coloniaux ralliés, parfois plus de force que de gré, selon le ralliement de telle ou telle province coloniale. Pourtant, fraternité et héroïsme vont les souder dans la dure condition des combats, pour une solde dérisoire, dans l’extrême chaleur ou le froid intense. Et les pertes humaines sont lourdes, autant chez les officiers que parmi les hommes du rang. Mais ce livre a aussi le grand mérite de soulever le voile trop souvent hermétique pesant sur des sujets tabous. Ainsi, les « indigènes » : à l’été 1943, les Américains refusent de rééquiper et d’armer la 2e DB de Leclerc, tant que les tirailleurs sénégalais n’en auront pas été écartés. Viendra ensuite le « blanchiment » des

armées FFL avec, en 1944, le renvoi de 6 000 soldats africains. Sont évoquées également les exactions commises en 1944 par des éléments du corps expéditionnaire français en Italie. De même, l’ostracisme exercé par certains officiers supérieurs (anciens pétainistes ou giraudistes) à l’égard des Français libres. Pour conclure son livre, l’auteur évoque le destin de ces FFL après la victoire. Pour certains, les colonies, pour d’autres, des postes essentiels dans l’armée, la haute fonction publique, la diplomatie, la recherche, le monde de la culture ou de l’art, si ce n’est au sein de grandes sociétés nationales tels l’énergie, les transports, le nucléaire, l’aéronautique, l’informatique en création... Pour ceux-là, « le dessus du panier » car de Gaulle, reconnaissant, les met en place en vue d’affirmer l’indépendance de la France. Pour les autres, pêcheurs retournés à la pêche, ouvriers dans les usines, agriculteurs aux champs, officiers républicains rassemblés et confinés sans commandement à Versailles, il leur est resté la mémoire de la grande aventure vécue, celle que nous ne devons pas oublier.


VIEMagazine DE L’ARAC LE RÉVEIL

politique, syndicale, professionnelle, confessionnelle et de toutes catégories sociales se sont opposés avec courage à l’occupant et à ses sbires. L’Humanité a regroupé tous ces témoignages dans un document que vous pouvez vous procurer au siège du journal.

Je suis le dernier juif Treblinka 1942-1943 Chil Rajchman - Préface de Annette Wiervorka - Ed. Les Arènes - 14,80 E Treblinka, en Pologne. L’un des camps de la mort nazie parmi les plus terribles. 750 000 juifs y furent envoyés pour la « solution finale ». 57 survivants seulement échappèrent aux chambres à gaz. Chil Rajchman a 28 ans quand il est déporté à Treblinka en novembre 1942. Séparé de ses compagnons à la descente des wagons à bestiaux, il va survivre en étant tour à tour trieur des vêtements des morts, coiffeur des survivants, porteur de cadavres ou « dentiste » arrachant les dents en or des cadavres que les nazis récupèrent. Le 2 août 1943, il participe au soulèvement du camp, réprimé avec férocité, et s’évade. Après plusieurs mois d’errance dans les bois et les campagnes, un ami l’héberge clandestinement à Varsovie. Après l’insurrection de la ville, il passera trois mois et demi dans un bunker, jusqu’au 17 janvier 1945. « J’ai survécu et je suis libre, mais à quoi bon ? Pour raconter l’assassinat de millions de victimes innocentes, pour témoigner d’un sang innocent versé par ces assassins, pour témoigner de ce grand abattoir : Treblinka. » Le texte de Chil Rajchman est publié pour la première fois et il est unique, parce qu’écrit dans l’urgence, avant même la victoire sur le nazisme. Emigré fin 1946 en Uruguay, Chil Rajchman a témoigné à plusieurs procès de SS, toujours en se référant à ce texte. Il est mort

en 2004 à Montevideo en demandant à sa famille de le publier.

Regards dans la tourmente Tulle 1939-1945, le Limousin sous l’occupation Pierrette Arnal - Les Ed. de la Veytizou 24,90 euros L’auteur, infirmière, est affectée à la Manufacture d’armes de Tulle en septembre 1939. Elle y sera témoin des atrocités nazies et de l’apogée criminelle de juin 1944. Elle-même échappera de justesse au sort fatal que lui réservaient en juillet 1944 les miliciens français et le nazi Walter. Un poignant récit des pendaisons commises par les nazis dans les rues de Tulle, aux balcons, aux réverbères, atrocités auxquelles s’opposent le courage et la générosité anonyme de certains habitants.

HHhH Laurent Binet, prix Goncourt du premier roman - Ed. Grasset - 20,90 e Ce n’est pas le nom d’un nouveau virus… Encore que ces initiales furent fortement mortifères car elles abrègent « Himmler Hirn Heibt Heydrich », c’est-àdire « le cerveau d’Himmler s’appelle Heydrich », comme on disait chez les SS. D’emblée, le terrible décor est dressé : Prague 1942… Deux hommes doivent en tuer un troisième. C’est l’opération « Anthropoïde », où deux parachutistes tchécoslovaques sont envoyés par Londres tuer Reinhard Heydrich, chef de la Gestapo, chef des services secrets nazis, planificateur de la solution finale (extermination des juifs), autrement

dit « le bourreau de Prague », « la tête blonde », « l’homme le plus dangereux du IIIe Reich ». Tous les personnages du livre ont existé ou existent encore. Tous les faits relatés sont authentiques. Mais derrière l’histoire de guerre, un autre combat se profile : celui du romancier en prise avec l’histoire et la tentation si facile de la romancer.

Margueritte Christian Langeois - Ed. du Cherche Midi - 18 euros Biographie de Marguerite Buffard-Flavien 1912-1944 : itinéraire d’une vie brisée ; celle de l’élève de l’École normale supérieure de Sèvres, devenue professeur de philosophie, combattante antifasciste dès 1934, révoquée de l’Éducation nationale en 1939 parce que communiste et qui vit le sol s’effondrer sous ses pieds. Mari prisonnier, isolée et exclue du PCF, elle est internée en 1942 au camp de femmes de Monts, près de Tours. Menant la révolte contre la mauvaise nourriture, elle est transférée à Mérignac, près de Bordeaux, dont elle s’évade en décembre 1943 pour rejoindre la Résistance à Lyon. Agent de renseignement FTPF, elle est arrêtée par la milice le 10 juin 1944. Le 13 juin, par crainte de parler sous la torture, elle se jette par la fenêtre du 3e étage du siège de la milice, rue Sainte-Hélène, et meurt le jour même sans avoir parlé. Quel souvenir nous reste-t-il ? Une simple plaque, rue Sainte-Hélène. Merci de nous avoir restitué sa mémoire.

AOÛT-SEPTEMBRE  2010 - N°764 - LE RÉVEIL

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CHOISY-LE-ROI un territoire en renouveau En bord de Seine à 7mn de Paris par le RER C

Ville en mouvement • Membre de Seine Amont développement et du Pôle Orly-Rungis • Au centre de l’Opération d’Intérêt National • Engagée dans un programme de Renouvellement Urbain • Territoire en pleine expansion

Ville d’Art et de Culture 20% de sa superficie est consacrée aux espaces verts Choisy-le-Roi, ville solidaire, est à votre écoute au 01 48 92 44 44 - www.ville-choisy-le-roi.fr


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